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Le monde est oval. On apprend lâeau par la soif, et la terre par le voyage en mer; la passion par les affres, et la paix par les rĂ©cits de guerre; lâamour par la mort, et les oiseaux par lâhiver.
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Emily Dickinson
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Le monde sent la mort
Les oiseaux volent les yeux crevés
Tu es sombre comme un ciel noir.
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Georges Bataille
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Tu dis que tu aimes les fleurs et tu leur coupes la queue, tu dis que tu aimes les chiens et tu leur mets une laisse, tu dis que tu aimes les oiseaux et tu les mets en cage, tu dis que tu mâaimes alors moi jâai peur.
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Jean Cocteau
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J'ai souvent pensĂ© alors que si l'on m'avait fait vivre dans un tronc d'arbre sec, sans autre occupaion que de regarder la fleur du ciel au-dessus de ma tĂȘte, je m'y serais peu Ă peu habituĂ©. J'aurais attendu des passages d'oiseaux ou de rencontres de nuages comme j'attendais ici les curieuses cravates de mon avocat et comme, dans un autre monde, je patientais jusqu'au samedi pour Ă©treindre le corps de Marie.
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Albert Camus (The Stranger)
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Ă travers nous s'envolent
Les oiseaux en silence. O, moi qui veux grandir
Je regarde au dehors, et l'arbre en moi grandit.
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Rainer Maria Rilke
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J'exige un vrai bonheur, un vrai amour, une vraie contrĂ©e oĂč le soleil alterne avec la lune, oĂč les saisons se dĂ©roulent en ordre, oĂč de vrais arbres portent de vrais fruits, oĂč de vrais poissons habitent les riviĂšres, et de vrais oiseaux le ciel, oĂč la vrai neige dĂ©couvre de vraies fleurs, oĂč tout sort est vrai, vrai, vĂ©ritable. Jâen ai assez de cette lumiĂšre morne, de ces campagnes stĂ©riles, sans jour, sans nuit, oĂč ne survivent que les bĂȘtes fĂ©roces et rapaces, oĂč les lois de la nature ne fonctionnent pas.
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Jean Cocteau
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Parler est une graine que l'on sĂšme dans le champ des esprits; la graine devient un arbre, et dans l'arbre finissent par chanter tous les oiseaux du ciel.
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Alphonse de ChĂąteaubriant
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Maintenant tu n'as plus de refuges. Tu as peur, tu attends que tout s'arrĂȘte, la pluie, les heures, le flot des voitures, la vie, les hommes, le monde, que tout s'Ă©croule, les murailles, les tours, les planchers et les plafonds; que les hommes et les femmes, les vieillards et les enfants, les chiens, les chevaux, les oiseaux, un Ă un, tombent Ă terre, paralysĂ©s, pestifĂ©rĂ©s, Ă©pileptiques; que le marbre s'effrite, que le bois se pulvĂ©rise, que les maisons s'abattent en silence, que les pluies diluviennes dissolvent les peintures, disjoignent les chevilles des armoires centenaires, dĂ©chiquettent les tissus, fassent fondre l'encre des journaux; q'un feu sans flammes ronge les marches des escaliers; que les rues s'effondrent en leur exact milieu, dĂ©couvrant le labyrinthe bĂ©ant des Ă©gouts; que la rouille et la brume envahissent la ville.
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Georges Perec (Un homme qui dort)
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Je n'ai jamais grattĂ© la terre ni quĂȘtĂ© des nids, je n'ai pas herborisĂ© ni lancĂ© des pierres aux oiseaux. Mais les livres ont Ă©tĂ© mes oiseaux et mes nids, mes bĂȘtes domestiques, mon Ă©table et ma campagne.
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Jean-Paul Sartre (The Words: The Autobiography of Jean-Paul Sartre)
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May your home be so holy with laughter that wounded birds lean against your door to listen and heal.
â Richard Van Camp's Twitter and Facebook Posts, July 22, 2017
(Ma traduction en français : Que votre maison soit si bĂ©nie par le rire que les oiseaux blessĂ©s sâappuient contre votre porte pour Ă©couter et guĂ©rir.)
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Richard Van Camp (Gather: Richard Van Camp on the Joy of Storytelling (Writers on Writing, 3))
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Les gens ne regardent plus le ciel. Ils gardent les yeux baissĂ©s sur leurs petits soucis, ils oublient que le monde peut ĂȘtre plus vaste, qu'il y a des couleurs, des arcs-en-ciel, des nuages et des oiseaux fantastiques qui pourraient changer leurs vies.
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Carina Rozenfeld (Le Brasier des souvenirs (PhĂŠnix, #2))
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Est-ce que vraiment, disait-elle, la terre est aussi belle que le racontent les oiseaux ?
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André Gide (La Symphonie pastorale)
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JâĂ©coute si bien les oiseaux; je crois que je comprends tout ce quâils disent.
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André Gide (La Symphonie pastorale)
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Pour écrire une poésie
qui ne soit pas politique
je dois Ă©couter les oiseaux
Et pour Ă©couter les oiseaux
il faut que le bruit du bombardier cesse
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Marwan Makhoul
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Comment oublier le monde? Peut-on chercher le bonheur quand tout parle de destruction? Le monde est jaloux, il vient vous prendre, il vient vous retrouver lĂ oĂč vous ĂȘtes, au fond d'un ravin, il fait entendre sa rumeur de peur et de haine, il mĂȘle sa violence Ă tout ce qui vous entoure, il transforme la lumiĂšre, la mer, le vent, mĂȘme les cris des oiseaux. Le monde est dans votre coeur alors, sa douleur vous rĂ©veille de votre rĂȘve et vous dĂ©couvrez que la terre mĂȘme oĂč vous avez voulu crĂ©er votre royaume vous expulse et vous jette Ă la mer.
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J.M.G. Le Clézio
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Tesson évoquant les livres qu'il compte lire durant son ermitage: "Quelques guides naturalistes de la collection Delachaux et Niestlé sur les oiseaux, les plantes et les insectes. La moindre des choses quand on s'invite dans les bois est de connaßtre le nom de ses hÎtes. L'affront serait l'indifférence. Si des gens débarquaient dans mon appartement pour s'y installer de force, j'aimerais au moins qu'ils m'appelassent par mon prénom.
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Sylvain Tesson (Dans les forĂȘts de SibĂ©rie)
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J'ai rĂȘvĂ© que je marchais vers toi et que tu prenais ma main. J'ai rĂȘvĂ© que mon cĆur rougissait, que nous courions dans une forĂȘt de nĂ©nuphars et que les oiseaux fleurissaient. J'ai rĂȘvĂ© de l'amour et j'ai aimĂ© ce rĂȘve.
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Frédéric Beigbeder (Nouvelles sous ecstasy)
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Ah! comme la neige a neigé!
Ma vitre est un jardin de givre.
Ah! comme la neige a neigé!
Qu'est-ce que le spasme de vivre
Ă la douleur que j'ai, que j'ai!
Tous les étangs gisent gelés,
Mon Ăąme est noire: OĂč vis-je? OĂč vais-je?
Tous ses espoirs gisent gelés:
Je suis la nouvelle NorvĂšge
D'oĂč les blonds ciels s'en sont allĂ©s.
Pleurez, oiseaux de février,
Au sinistre frisson des choses,
Pleurez, oiseaux de février,
Pleurez mes pleurs, pleurez mes roses,
Aux branches du genévrier.
Ah! comme la neige a neigé!
Ma vitre est un jardin de givre.
Ah! comme la neige a neigé!
Qu'est-ce que le spasme de vivre
Ă tout l'ennui que j'ai, que j'ai!...
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Ămile Nelligan Soir d'hiver
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Un jour le MeschacebĂ©, encore assez prĂšs de sa source, se lassa de n'ĂȘtre qu'un limpide ruisseau. Il demande des neiges aux montagnes, des eaux aux torrents, des pluies aux tempĂȘtes, il franchit ses rives, et dĂ©sole ses bords charmants. L'orgueilleux ruisseau s'applaudit d'abord de sa puissance; mais voyant que tout devenait dĂ©sert sur son passage; qu'il coulait, abandonnĂ© dans la solitude; que ses eaux Ă©taient toujours troublĂ©es, il regretta l'humble lit que lui avait creusĂ© la nature, les oiseaux, les fleurs, les arbres et les ruisseaux, jadis modestes compagnons de son paisible cours.
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François-René de Chateaubriand
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La pluie ne tombait plus ; le jour commençait à venir, et, sur les branches des pommiers sans feuilles, des oiseaux se tenaient immobiles, hérissant leurs petites plumes au vent froid du matin.
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Gustave Flaubert (Gustave Flaubert: Oeuvres complĂštes et Annexes - 69 titres)
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Messieurs, mâĂ©criai-je de tout cĆur, regardez les Ćuvres de Dieu : le ciel est clair, lâair pur, lâherbe tendre, les oiseaux chantent dans la nature magnifique et innocente ; seuls, nous autres, impies et stupides ne comprenons pas que la vie est un paradis, nous nâaurions quâĂ vouloir le comprendre pour le voir apparaĂźtre dans toute sa beautĂ©, et nous nous Ă©treindrions alors en pleurant⊠»
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Fyodor Dostoevsky (The Brothers Karamazov)
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Je pense à elles comme à des oiseaux de cristal éclos dans un ciel obscurci par les fétides exhalaisons de nos corps. Je pense à elles comme à des comÚtes qui sillonnent la nuit de nos hontes et projettent une lumiÚre incandescente sur nos remords. Je leur élÚverai un monument de papier qui signalera à la postérité l'existence de ces trois déesses. Je serai leur scribe, leur porte-étendard, le serviteur de leur parole, le traducteur de leurs silences.
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Linda LĂȘ (Les Aubes)
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L'invention de l'imprimerie est le plus grand Ă©vĂ©nement de l'histoire. C'est la rĂ©volution mĂšre. C'est le mode d'expression de l'humanitĂ© qui se renouvelle totalement, c'est la pensĂ©e humaine qui dĂ©pouille une forme et en revĂȘt une autre, c'est le complet et dĂ©finitif changement de peau de ce serpent symbolique qui, depuis Adam, reprĂ©sente l'intelligence.
Sous la forme imprimerie, la pensĂ©e est plus impĂ©rissable que jamais; elle est volatile, insaisissable, indestructible. Elle se mĂȘle Ă l'air. Du temps de l'architecture, elle se faisait montagne et s'emparait puissamment d'un siĂšcle et d'un lieu. Maintenant elle se fait troupe d'oiseaux, s'Ă©parpille aux quatre vents, et occupe Ă la fois tous les points de l'air et de l'espace.
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Victor Hugo (Notre-Dame de Paris)
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Les mots ont parfois le pouvoir des trolls et ils sont capables d'abattre les dieux, ils peuvent sauver des vies et les anéantir. Les mots sont des flÚches, des balles de fusil, des oiseaux légendaires lancés à la poursuite des héros, les mots sont des poissons immémoriaux qui découvrent un secret terrifiant au fond de l'abßme, ils sont un filet assez ample pour attraper le monde et embrasser les cieux, mais parfois, ils ne sont rien, des guenilles usées, transpercées par le froid, des forteresses caduques que la mort et le malheur piétinent sans effort. (p. 235)
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JĂłn Kalman StefĂĄnsson (HimnarĂki og helvĂti)
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LĂ -bas, sous les racines, parmi les fleurs corrompues, des bouffĂ©es d'odeurs mortes s'exhalaient; des gouttes se formaient sur le flanc gonflĂ© et pustuleux des choses. La peau des fruits pourris crevait, et du pus trop Ă©pais pour couler suintait de la fissure. Les limaces laissaient derriĂšre elles des sĂ©crĂ©tions jaunes, et parfois, ça et lĂ , un corps informe rampait avec une tĂȘte Ă chaque bout. Les oiseaux aux yeux d'or s'Ă©lançaient sous les feuilles et contemplaient ironiquement cette purulence, cette moiteur. De temps en temps, ils plongeaient sauvagement la pointe de leur bec dans ce gluant mĂ©lange.
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Virginia Woolf (The Waves)
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Un poĂšte n'est pas, comme on le croit, celui qui sait mieux que d'autres regarder la terre et le ciel, Ă©couter le bruit de la mer, le gazouillis des sources et des oiseaux, un poĂšte, vous en serez un, mon petit ami - les piĂšces sonnent, elle salue bien bas - un poĂšte, on l'a dit et c'est vrai, c'est celui qui sait fabriquer un poĂšme avec des mots.
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Nathalie Sarraute
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victor hugo, Les Contemplations, Mors
Je vis cette faucheuse. Elle Ă©tait dans son champ.
Elle allait Ă grands pas moissonnant et fauchant,
Noir squelette laissant passer le crépuscule.
Dans l'ombre oĂč l'on dirait que tout tremble et recule,
L'homme suivait des yeux les lueurs de la faulx.
Et les triomphateurs sous les arcs triomphaux
Tombaient ; elle changeait en désert Babylone,
Le trĂŽne en Ă©chafaud et l'Ă©chafaud en trĂŽne,
Les roses en fumier, les enfants en oiseaux,
L'or en cendre, et les yeux des mĂšres en ruisseaux.
Et les femmes criaient : - Rends-nous ce petit ĂȘtre.
Pour le faire mourir, pourquoi l'avoir fait naĂźtre ? -
Ce n'Ă©tait qu'un sanglot sur terre, en haut, en bas ;
Des mains aux doigts osseux sortaient des noirs grabats ;
Un vent froid bruissait dans les linceuls sans nombre ;
Les peuples Ă©perdus semblaient sous la faulx sombre
Un troupeau frissonnant qui dans l'ombre s'enfuit ;
Tout Ă©tait sous ses pieds deuil, Ă©pouvante et nuit.
DerriÚre elle, le front baigné de douces flammes,
Un ange souriant portait la gerbe d'Ăąmes.
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Victor Hugo
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Souvent, pour s'amuser, les hommes d'Ă©quipage
Prennent des albatros, vastes oiseaux des mers,
Qui suivent, indolents compagnons de voyage,
Le navire glissant sur les gouffres amers.
A peine les ont-ils déposés sur les planches,
Que ces rois de l'azur, maladroits et honteux,
Laissent piteusement leurs grandes ailes blanches
Comme des avirons traßner à cÎté d'eux.
Ce voyageur ailé, comme il est gauche et veule !
Lui, naguĂšre si beau, qu'il est comique et laid !
L'un agace son bec avec un brûle-gueule,
L'autre mime, en boitant, l'infirme qui volait !
Le PoÚte est semblable au prince des nuées
Qui hante la tempĂȘte et se rit de l'archer ;
Exilé sur le sol au milieu des huées,
Ses ailes de gĂ©ant l'empĂȘchent de marcher.
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Charles Baudelaire (Les Fleurs du Mal)
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Pendant le long travail de contraction, ma trĂšs jeune mĂšre observe d'un Ćil distrait flocons et oiseaux se casser silencieusement la gueule par la fenĂȘtre. On dirait une enfant qui joue Ă ĂȘtre enceinte. Sa tĂȘte est pleine de mĂ©lancolie; elle sait qu'elle ne me gardera pas. Elle ose Ă peine baisser les yeux sur son ventre prĂȘt Ă Ă©clore... Elle pleurait dĂ©jĂ en escaladant la colline pour arriver ici. Ses larmes glacĂ©es ont rebondi sur le sol telles les perles d'un collier cassĂ©. Ă mesure qu'elle avançait, un tapis d'Ă©tincelants roulements Ă billes se formait sous ses pieds. Elle a commencĂ© Ă patiner, puis a continuĂ© encore et encore. La cadence de ses pas est devenue trop rapide. Ses talons se sont emmĂȘlĂ©s, ses chevilles ont vacillĂ© et elle a chutĂ© violemment en avant. Ă l'intĂ©rieur, j'ai fait un bruit de tirelire cassĂ©e
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Mathias Malzieu (La MĂ©canique du cĆur)
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Elles sont lâĂąme de lâĂ©tĂ©, lâhorloge des minutes dâabondance, lâaile diligente des parfums qui sâĂ©lancent, le murmure des clartĂ©s qui tressaillent, le chant de lâatmosphĂšre qui sâĂ©tire et se repose. Et leur vol est le signe visible, la note musicale des petites joies innombrables qui naissent de la chaleur et vivent dans la lumiĂšre.
Ă qui les a connues, Ă qui les a aimĂ©es, un Ă©tĂ© sans abeilles semble aussi malheureux et aussi imparfait que sâil Ă©tait sans oiseaux et sans fleurs.
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Maurice Maeterlinck
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Vieil ocĂ©an, ta forme harmonieusement sphĂ©rique, qui rĂ©jouit la face grave de la gĂ©omĂ©trie, ne me rappelle que trop les petits yeux de lâhomme, pareils Ă ceux du sanglier pour la petitesse, et Ă ceux des oiseaux de nuit pour la perfection circulaire du contour. Cependant, lâhomme sâest cru beau dans tous les siĂšcles. Moi, je suppose plutĂŽt que lâhomme ne croit Ă sa beautĂ© que par amour-propre ; mais, quâil nâest pas beau rĂ©ellement et quâil sâen doute ; car, pourquoi regarde-t-il la figure de son semblable avec tant de mĂ©pris?
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Comte de Lautréamont (Les Chants de Maldoror)
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NikĂ©, aprĂšs quelques minutes dâescalade, abandonna la compĂ©tition pour admirer les fleurs sauvages qui diapraient la montagne comme une mosaĂŻque.
âŠSi elle tressait une guirlande ?
Elle leva vers Nicias, qui continuait lâascension, son visage lisse comme une olive, ou brillait un regard malicieux :
â Quand tu seras en haut, ne tâenvole pas !
Le garçon sâarrĂȘta :
â Tu ne joues plus ?
â Je prĂ©fĂšre cueillir des fleurs pour ArtĂ©mis.
â La statue de la dĂ©esse ?
â Oui.
Sur le mont Mangone, giroflĂ©es, asphodĂšles, mauves, gĂ©raniums, Ćillets, marjolaines, absinthes, croissaient Ă plaisir. Lâair surchauffĂ© entĂȘtait comme une cassolette.
Niké, les bras surchargés, pensa :
« Ce nâest pas Ă©tonnant que les chiens perdent la trace du gibier quand ils sont en montagne⊠»
Elle hĂ©sita Ă cueillir les ombelles du sĂ©linon en pensant que la plante sĂ©crĂ©tait un suc qui Ă©tait un poison pour les oiseaux. Or, ArtĂ©mis trĂŽnait dans un bois oĂč chardonnerets, pinsons et serins Ă©taient nombreux. Sâils allaient picorer la guirlande ?
La fillette renonça au lĂ©ger nuage des ombelles pour lui prĂ©fĂ©rer une touffe de silĂšnes dâun rose dâaurore. La guirlande devenait ravissante.
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L.N. Lavolle (L'Otage de Rome)
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Je n'osais pas le dire aux autres mais j'avais peur de Francis. Je n'aimais pas trop quand Gino insistait sur la bagarre et la baston pour protéger l'impasse parce que je voyais bien que les copains étaient de plus en plus motivés par ce qu'il racontait. Moi aussi, je l'étais un peu, mais je préférais quand on fabriquait des bateaux avec des troncs de bananiers pour descendre la Muha, ou quand on observait aux jumelles les oiseaux dans les champs de maïs derriÚre le Lycée international, ou encore quand on construisait des cabanes dans les ficus du quartier et qu'on vivait des tas de péripéties d'Indiens et de Far West. On connaissait tous les recoins de l'impasse et on voulait y rester pour la vie entiÚre, tous les cinq, ensemble.
J'ai beau chercher, je ne me souviens pas du moment oĂč l'on s'est mis Ă penser diffĂ©remment. A considĂ©rer que, dorĂ©navant, il y aurait nous d'un cĂŽtĂ© et, de l'autre, des ennemis, comme Francis. J'ai beau retourner mes souvenirs dans tous les sens, je ne parviens pas Ă me rappeler clairement l'instant oĂč nous avons dĂ©cidĂ© de ne plus nous contenter de partager le peu que nous avions et de cesser d'avoir confiance de voir l'autre comme un danger, de crĂ©er cette frontiĂšre invisible avec le monde extĂ©rieur en faisant de notre quartier une forteresse et de notre impasse un enclos.
Je me demande encore quand, les copains et moi, nous avons commencé à avoir peur.
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Gaël Faye (Petit pays)
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Soudain, il me sembla que le ciel descendait. De la terre, surgit comme une fontaine dâĂ©nergie dorĂ©e. Cette chaude Ă©nergie mâencercla, et mon corps et mon esprit devinrent trĂšs lĂ©gers et trĂšs clairs. Je pouvais mĂȘme comprendre le chant des petits oiseaux autour de moi. A cet instant, je pouvais comprendre que le travail de toute ma vie dans le Budo Ă©tait rĂ©ellement fondĂ© sur lâamour divin et sur les lois de la crĂ©ation. Je ne pus retenir mes larmes, et pleurai sans retenue. Depuis ce jour, jâai su que cette grande Terre elle-mĂȘme Ă©tait ma maison et mon foyer. Le soleil, la lune et les Ă©toiles mâappartiennent. Depuis ce jour, je nâai plus jamais ressenti aucun attachement envers la propriĂ©tĂ© et les possessions.
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Morihei Ueshiba
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TOUZENBACH
Si vous voulez. De quoi parlerons-nous ?
VERCHININE
De quoi ? RĂȘvons ensemble... par exemple de la vie telle quâelle sera aprĂšs nous, dans deux ou trois cents ans.
TOUZENBACH
Eh bien, aprĂšs nous on sâenvolera en ballon, on changera la coupe des vestons, on dĂ©couvrira peut-ĂȘtre un sixiĂšme sens, quâon dĂ©veloppera, mais la vie restera la mĂȘme, un vie difficile, pleine de mystĂšre, et heureuse. Et dans mille ans, lâhomme soupirera comme aujourdâhui : « Ah ! quâil est difficile de vivre ! » Et il aura toujours peur de la mort et ne voudra pas mourir.
VERCHININE, aprÚs avoir réfléchi.
Comment vous expliquer ? Il me semble que tout va se transformer peu Ă peu, que le changement sâaccomplit dĂ©jĂ , sous nos yeux. Dans deux ou trois cents ans, dans mille ans peut-ĂȘtre, peu importe le dĂ©lai, sâĂ©tablira une vie nouvelle, heureuse. Bien sĂ»r, nous ne serons plus lĂ , mais câest pour cela que nous vivons, travaillons, souffrons enfin, câest nous qui la crĂ©ons, câest mĂȘme le seul but de notre existence, et si vous voulez, de notre bonheur.
Macha rit doucement.
TOUZENBACH
Pourquoi riez-vous ?
MACHA
Je ne sais pas. Je ris depuis ce matin.
VERCHININE
Jâai fait les mĂȘmes Ă©tudes que vous, je nâai pas Ă©tĂ© Ă lâAcadĂ©mie militaire. Je lis beaucoup, mais je ne sais pas choisir mes lectures, peut-ĂȘtre devrais-je lire tout autre chose ; et cependant, plus je vis, plus jâai envie de savoir. Mes cheveux blanchissent, bientĂŽt je serai vieux, et je ne sais que peu, oh ! trĂšs peu de chose. Pourtant, il me semble que je sais lâessentiel, et que je le sais avec certitude. Comme je voudrais vous prouver quâil nây a pas, quâil ne doit pas y avoir de bonheur pour nous, que nous ne le connaĂźtrons jamais... Pour nous, il nây a que le travail, rien que le travail, le bonheur, il sera pour nos lointains descendants. (Un temps.) Le bonheur nâest pas pour moi, mais pour les enfants de mes enfants.
TOUZENBACH
Alors, dâaprĂšs vous, il ne faut mĂȘme pas rĂȘver au bonheur ? Mais si je suis heureux ?
VERCHININE
Non.
TOUZENBACH, joignant les mains et riant.
Visiblement, nous ne nous comprenons pas. Comment vous convaincre ? (Macha rit doucement. Il lui montre son index.) Eh bien, riez ! (Ă Verchinine :) Non seulement dans deux ou trois cents ans, mais dans un million dâannĂ©es, la vie sera encore la mĂȘme ; elle ne change pas, elle est immuable, conforme Ă ses propres lois, qui ne nous concernent pas, ou dont nous ne saurons jamais rien. Les oiseaux migrateurs, les cigognes, par exemple, doivent voler, et quelles que soient les pensĂ©es, sublimes ou insignifiantes, qui leur passent par la tĂȘte, elles volent sans relĂąche, sans savoir pourquoi, ni oĂč elles vont. Elles volent et voleront, quels que soient les philosophes quâil pourrait y avoir parmi elles ; elles peuvent toujours philosopher, si ça les amuse, pourvu quâelles volent...
MACHA
Tout de mĂȘme, quel est le sens de tout cela ?
TOUZENBACH
Le sens... VoilĂ , il neige. OĂč est le sens ?
MACHA
Il me semble que lâhomme doit avoir une foi, du moins en chercher une, sinon sa vie est complĂštement vide... Vivre et ignorer pourquoi les cigognes volent, pourquoi les enfants naissent, pourquoi il y a des Ă©toiles au ciel... Il faut savoir pourquoi lâon vit, ou alors tout nâest que balivernes et foutaises.
Comme dit Gogol : « Il est ennuyeux de vivre en ce monde, messieurs. »
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Anton Chekhov (The Three Sisters)
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les hommes doivent ĂȘtre dressĂ©s en vue des besoins de notre temps, afin qu'ils soient en mesure de mettre la main Ă la pĂąte ; qu'ils doivent travailler Ă la grande usine des "utilitĂ©s" communes avant d'ĂȘtre mĂ»rs, et mĂȘme afin qu'ils ne deviennent jamais mĂ»rs, â car ce serait lĂ un luxe qui soustrairait au "marchĂ© du travail" une quantitĂ© de force. On aveugle certains oiseaux pour qu'ils chantent mieux : je ne crois pas que les hommes d'aujourd'hui chantent mieux que leurs grands-parents, mais ce que je sais, c'est qu'on les aveugle tout jeunes. Et le moyen, le moyen scĂ©lĂ©rat qu'on emploie pour les aveugler, c'est une lumiĂšre trop intense, trop soudaine et trop variable. Le jeune homme est promenĂ©, Ă grands coups de fouet, Ă travers les siĂšcles : des adolescents qui n'entendent rien Ă la guerre, aux nĂ©gociations diplomatiques, Ă la politique commerciale, sont jugĂ©s dignes d'ĂȘtre initiĂ©s Ă l'Histoire politique.
DeuxiÚme Considération intempestive, ch. 7
â
â
Friedrich Nietzsche
â
Ă celle qui s'en va
Tu crois que ce fut un amour vraiâŠ
Moi je crois que ce fut une brĂšve folieâŠ
Mais ce qu'au juste ce fut,
Ce que nous voulions que ce fût,
Nous ne le saurons peut-ĂȘtre jamaisâŠ
Ce fut un rĂȘve vĂ©cu au rivage d'une mer,
Un chant triste amené d'autres terres
Par de blancs oiseaux voyageurs,
Sur l'azur insurgé d'autres mers au loin,
Un chant triste amené par les marins
Arrivés de Boston
Norfolk
Et New York,
Un chant triste que souvent chantent les pĂȘcheurs
Quand ils prennent le large et ne reviennent plus.
Et se fut le refrain de triolets qu'un poĂšte
Jadis imagina en les pays du Nord
Sur les bords de quelque blanc fjord,
Mendiant l'amour des blondes coquettes...
Ce fut un rĂȘve
Un vers
Une mélodie
Que nous n'avons chantĂ©e peut-ĂȘtre jamais...
......................
Tu crois que ce fut un amour vrai ?
Moi je crois que ce fut une brĂšve folie !
*
Tu crezi c-a fost iubire-adevÄratÄ...
Eu cred c-a fost o scurtÄ nebunie...
Dar ce anume-a fost,
Ce-am vrut sÄ fie
Noi nu vom Ćti-o poate niciodatÄ...
A fost un vis trÄit pe-un ĆŁÄrm de mare.
Un cĂąntec trist, adus din alte ĆŁÄri
De niĆte pasÄri albe - cÄlÄtoare
Pe-albastrul rÄzvrÄtit al altor mÄri
Un cĂąntec trist, adus de marinarii
SosiĆŁi din Boston,
Norfolk
Ći New York,
Un cĂąntec trist, ce-l cĂąntÄ-ades pescarii
CĂąnd pleacÄ-n larg Ći nu se mai Ăźntorc.
Ći-a fost refrenul unor triolete
Cu care-alt'datÄ un poet din Nord,
Pe marginile albului fiord,
CerĆea iubirea blondelor cochete...
A fost un vis,
Un vers,
O melodie,
Ce n-am cĂąntat-o, poate, niciodatÄ...
......................
Tu crezi c-a fost iubire-adevÄratÄ?...
Eu cred c-a fost o scurtÄ nebunie!
[Celei care pleacÄ, traduction en français dâAurel George BoeÈteanu]
â
â
Ion Minulescu (RomanÈe pentru mai tĂąrziu)
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Les brumes sâĂ©paississent sur les cimes du Ć ar. Les versants se dressent face Ă Emina, implacables dans le jour dĂ©clinant. Les paroles de Feti ricochent en elle, par-dessus la musique quâil met plus fort dans la voiture. Elles traversent le scherzo du violon dont les volutes tournoient entre eux, alors quâils arrivent Ă Tetovo. Elles dissipent le sourd espoir qui lâa menĂ©e ici, au-delĂ du dĂ©sir de renouer avec le frĂšre dâYllka. Elle mesure lâampleur de son rĂȘve, de ce quâelle nâa dit Ă personne lĂ -bas en Allemagne. Ils auraient passĂ© leur bras autour de ses Ă©paules. Ils lâauraient entourĂ©e dâune affection mĂȘlĂ©e de pitiĂ©âŠ
Oui, dans lâoutremer des montagnes, elle croit apercevoir la trace dâYllka. Les empreintes fines dâun oiseau sur un sentier couvert de sable. Elles conduiraient Ă une maison de montagne qui sentirait le bois et le foin Ă la fin de lâĂ©tĂ©. Parce quâYllka se serait rĂ©fugiĂ©e quelque part ici. Elle y attendrait Emina, sa fille, Alija, son fils, depuis toutes ces annĂ©es. Elle-mĂȘme mue par la conviction que ses enfants finiront par la rejoindre. Car comment pourrait-elle savoir oĂč ils vivent aujourdâhui, si mĂȘme ils vivent encore ? Comment ? Et câest la raison de son silence. Il ne peut en ĂȘtre autrement. Preuve de vie ou de mort, Emina ne sâen ira pas dâici sans lâavoir obtenue.
« Je peux juste te parler dâelle. Celle quâelle fut ici. Ma sĆur, ta mĂšre⊠» Des mots qui lacĂšrent le ciel trĂšs loin au-dessus dâelle. Feti gare sa voiture le long de la rue bordĂ©e dâimmeubles. Sâil se trompait⊠Si Yllka nâavait pas pu le retrouver lui non plus ?
Les feuillages des arbres flamboient sur les trottoirs. Des traĂźnĂ©es couleur de fer assombrissent les nuages au-dessus des immeubles. Ils se creusent dâun vaste cratĂšre noirĂątre. Des choucas Ă©voluent par centaines sur la ville, alors que le soleil descend Ă lâhorizon. Ils sâinsinuent dans les invisibles couloirs ouverts par de secrĂštes turbulences. Leur vacarme secoue les airs, assourdit Emina. Elle est sur le point de flancher, rattrapĂ©e par le lieu et les cris des oiseaux.
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Cécile Oumhani (Le café d'Yllka)
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Ă huit heures et demie du soir, deux tables Ă©taient dressĂ©es. La jolie madame des Grassins avait rĂ©ussi Ă mettre son fils Ă cĂŽtĂ© dâEugĂ©nie. Les acteurs de cette scĂšne pleine dâintĂ©rĂȘt, quoique vulgaire en apparence, munis de cartons bariolĂ©s, chiffrĂ©s, et de jetons en verre bleu, semblaient Ă©couter les plaisanteries du vieux notaire, qui ne tirait pas un numĂ©ro sans faire une remarque ; mais tous pensaient aux millions de monsieur Grandet. Le vieux tonnelier contemplait vaniteusement les plumes roses, la toilette fraĂźche de madame des Grassins, la tĂȘte martiale du banquier, celle dâAdolphe, le prĂ©sident, lâabbĂ©, le notaire, et se disait intĂ©rieurement :
â Ils sont lĂ pour mes Ă©cus. Ils viennent sâennuyer ici pour ma fille. HĂ© ! ma fille ne sera ni pour les uns ni pour les autres, et tous ces gens-lĂ me servent de harpons pour pĂȘcher !
Cette gaietĂ© de famille, dans ce vieux salon gris, mal Ă©clairĂ© par deux chandelles ; ces rires, accompagnĂ©s par le bruit du rouet de la grande Nanon, et qui nâĂ©taient sincĂšres que sur les lĂšvres dâEugĂ©nie ou de sa mĂšre ; cette petitesse jointe Ă de si grands intĂ©rĂȘts ; cette jeune fille qui, semblable Ă ces oiseaux victimes du haut prix auquel on les met et quâils ignorent, se trouvait traquĂ©e, serrĂ©e par des preuves dâamitiĂ© dont elle Ă©tait la dupe ; tout contribuait Ă rendre cette scĂšne tristement comique. Nâest-ce pas dâailleurs une scĂšne de tous les temps et de tous les lieux, mais ramenĂ©e Ă sa plus simple expression ? La figure de Grandet exploitant le faux attachement des deux familles, en tirant dâĂ©normes profits, dominait ce drame et lâĂ©clairait. NâĂ©tait-ce pas le seul dieu moderne auquel on ait foi, lâArgent dans toute sa puissance, exprimĂ© par une seule physionomie ? Les doux sentiments de la vie nâoccupaient lĂ quâune place secondaire, ils animaient trois cĆurs purs, ceux de Nanon, dâEugĂ©nie et sa mĂšre. Encore, combien dâignorance dans leur naĂŻvetĂ© ! EugĂ©nie et sa mĂšre ne savaient rien de la fortune de Grandet, elles nâestimaient les choses de la vie quâĂ la lueur de leurs pĂąles idĂ©es, et ne prisaient ni ne mĂ©prisaient lâargent, accoutumĂ©es quâelles Ă©taient Ă sâen passer. Leurs sentiments, froissĂ©s Ă leur insu mais vivaces, le secret de leur existence, en faisaient des exceptions curieuses dans cette rĂ©union de gens dont la vie Ă©tait purement matĂ©rielle. Affreuse condition de lâhomme ! il nây a pas un de ses bonheurs qui ne vienne dâune ignorance quelconque. Au moment oĂč madame Grandet gagnait un lot de seize sous, le plus considĂ©rable qui eĂ»t jamais Ă©tĂ© pontĂ© dans cette salle, et que la grande Nanon riait dâaise en voyant madame empochant cette riche somme, un coup de marteau retentit Ă la porte de la maison, et y fit un si grand tapage que les femmes sautĂšrent sur leurs chaises.
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Honoré de Balzac (Eugénie Grandet)
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Mais jâavais revu tantĂŽt lâune, tantĂŽt lâautre, des chambres que jâavais habitĂ©es dans ma vie, et je finissais par me les rappeler toutes dans les longues rĂȘveries qui suivaient mon rĂ©veil ; chambres dâhiver oĂč quand on est couchĂ©, on se blottit la tĂȘte dans un nid quâon se tresse avec les choses les plus disparates : un coin de lâoreiller, le haut des couvertures, un bout de chĂąle, le bord du lit, et un numĂ©ro des DĂ©bats roses, quâon finit par cimenter ensemble selon la technique des oiseaux en sây appuyant indĂ©finiment ; oĂč, par un temps glacial, le plaisir quâon goĂ»te est de se sentir sĂ©parĂ© du dehors (comme lâhirondelle de mer qui a son nid au fond dâun souterrain dans la chaleur de la terre), et oĂč, le feu Ă©tant entretenu toute la nuit dans la cheminĂ©e, on dort dans un grand manteau dâair chaud et fumeux, traversĂ© des lueurs des tisons qui se rallument, sorte dâimpalpable alcĂŽve, de chaude caverne creusĂ©e au sein de la chambre mĂȘme, zone ardente et mobile en ses contours thermiques, aĂ©rĂ©e de souffles qui nous rafraĂźchissent la figure et viennent des angles, des parties voisines de la fenĂȘtre ou Ă©loignĂ©es du foyer et qui se sont refroidies ; â chambres dâĂ©tĂ© oĂč lâon aime ĂȘtre uni Ă la nuit tiĂšde, oĂč le clair de lune appuyĂ© aux volets entrâouverts, jette jusquâau pied du lit son Ă©chelle enchantĂ©e, oĂč on dort presque en plein air, comme la mĂ©sange balancĂ©e par la brise Ă la pointe dâun rayon â ; parfois la chambre Louis XVI, si gaie que mĂȘme le premier soir je nây avais pas Ă©tĂ© trop malheureux, et oĂč les colonnettes qui soutenaient lĂ©gĂšrement le plafond sâĂ©cartaient avec tant de grĂące pour montrer et rĂ©server la place du lit ; parfois au contraire celle, petite et si Ă©levĂ©e de plafond, creusĂ©e en forme de pyramide dans la hauteur de deux Ă©tages et partiellement revĂȘtue dâacajou, oĂč, dĂšs la premiĂšre seconde, jâavais Ă©tĂ© intoxiquĂ© moralement par lâodeur inconnue du vĂ©tiver, convaincu de lâhostilitĂ© des rideaux violets et de lâinsolente indiffĂ©rence de la pendule qui jacassait tout haut comme si je nâeusse pas Ă©tĂ© lĂ Â ; â oĂč une Ă©trange et impitoyable glace Ă pieds quadrangulaires barrant obliquement un des angles de la piĂšce se creusait Ă vif dans la douce plĂ©nitude de mon champ visuel accoutumĂ© un emplacement qui nây Ă©tait pas prĂ©vu ; â oĂč ma pensĂ©e, sâefforçant pendant des heures de se disloquer, de sâĂ©tirer en hauteur pour prendre exactement la forme de la chambre et arriver Ă remplir jusquâen haut son gigantesque entonnoir, avait souffert bien de dures nuits, tandis que jâĂ©tais Ă©tendu dans mon lit, les yeux levĂ©s, lâoreille anxieuse, la narine rĂ©tive, le cĆur battant ; jusquâĂ ce que lâhabitude eĂ»t changĂ© la couleur des rideaux, fait taire la pendule, enseignĂ© la pitiĂ© Ă la glace oblique et cruelle, dissimulĂ©, sinon chassĂ© complĂštement, lâodeur du vĂ©tiver et notablement diminuĂ© la hauteur apparente du plafond.
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Marcel Proust (Du cÎté de chez Swann (à la recherche du temps perdu #1))
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Je remonte les rues. Je pose des vestes chaudes sur les murmures. J'ai pris l'Ă©ternitĂ© au milieu des regards. Toutes les fessĂ©es du monde cognent Ă ma chair. Trouverai-je des oiseaux Ă ma taille? Vivre est une fĂȘlure qu'embrassent mes lĂšvres.
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Anne Peyrouse (DES NEIGES ET DES CENDRES)
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« On ne peut pas empĂȘcher les oiseaux de
malheur de voler, mais on peut les empĂȘcher
de faire leurs nids dans nos cheveux. »
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CĂ©cile De Grasse (Le Bonheur - 365 Citations Inspirantes (French Edition))
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Les 8 Vallées (les noms des paliers de profondeur du vagin)
1) La Corde du Luth, profonde de 1 pouce (2,5 cm)
2) Les Dents de la ChĂątaigne dâeau, 2 pouces
3) Le Ruisselet, trois pouces
4) La Perle Noire, 4 pouces
5) Le Propre de la Vallée, 5 pouces
6) La Chambre profonde, 6 pouces
7) La Porte Intérieure, 7 pouces
8) Le PĂŽle Nord, 8 pouces
Les 9 maniĂšres d'agiter la Tige de Jade
1) Frapper Ă gauche et Ă droite comme un guerrier courageux qui tenterait de disperser les rangs de ses ennemis
2) Mouvoir de haut en bas (la tige de jade) comme un cheval sauvage fit le saut de mouton pour passer une riviĂšre
3) Se retirer et sâenfoncer comme une bande de mouettes jouant sur les vagues
4) Alterner rapidement pénétrations profondes et pénétrations superficielles comme un moineau bequetant les grains de riz
5) EnchaĂźner dâune façon rĂ©guliĂšre coups profonds et coups peu profonds comme de grosses pierres sâenfonçant dans la mer
6) Entrer avec lenteur comme un serpent se glisse dans son trou pour hiverner
7) Donner de petits coups rapides Ă la maniĂšre dâun rat effrayĂ© qui se prĂ©cipite dans son trou
8) SâĂ©lever lentement, puis foncer comme lâaigle attrapant une proie fuyante
9) SâĂ©lever puis piquer du nez comme un grand voilier bravant le coup de vent
Sou NĂŒ, la conseillĂšre de Huang Di (l'Empereur Jaune) ajoute:
«Profonde et superficielles, lentes et rapides, directes et obliques, toutes ces poussĂ©es ne sont nullement uniformes, et chacune possĂšde ses propres effets et caractĂ©ristiques. Une poussĂ©e lente doit ressembler au mouvement dâune carpe jouant avec lâhameçon; une poussĂ©e rapide, au vol des oiseaux contre le vent. Introduisant et retirant, remuant de bas en haut, de gauche Ă droite, marquant des pauses ou bien en une succession rapide, tous ces mouvements doivent se correspondre. Il faut appliquer chacun dâeux au moment voulu et ne pas sâen tenir toujours Ă un seul et mĂȘme style parce quâon y trouve son bon plaisir»
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Jolan Chang (The Tao of Love and Sex)
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Seulement, de part et d'autre de la double fenĂȘtre, deux minces fenestrons verticaux restent fermĂ©s. L'espace est vaste entre les deux fenestrons, de quoi livrer passage Ă tous les oiseaux du ciel. Pourtant ça ne rate jamais, il faut toujours que trois ou quatre de ces idiotes ce payent les fenestrons! C'est notre proportion de cancres. Nos dĂ©viantes. On n'est pas dans la ligne. On ne suit pas le droit chemin. On batifole en marge. RĂ©sultat: fenestron. Poe! AssommĂ©e sur le tapis. Alors, l'un de nous deux se lĂšve, prend l'hirondelle estourbie au creux de sa main - ça ne pĂšse guĂšre, ces os plein de vent -, attend qu'elle se rĂšveille, et l'envoie rejoindre ses copins. La ressuscitĂše s'envole, groggy encore un peu, zigzaguant dans l'espace retrouvĂ©, puis elle pique droit vers le sud et disparaĂźt dans son avenir.
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Daniel Pennac (Chagrin d'Ă©cole)
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Les oiseaux ne chantaient plus dans le jardin. Ni la pendule au-dessus du vaisselier, ni rien. Combien de temps resta-t-il prostrĂ© ? Les Ćufs brouillĂ©s qu'il avait prĂ©parĂ©s pour elle Ă©taient froids, stupides dans leur poĂȘle, le soleil comme une offense sur le mur jaune de la cuisine. Edwards se sentait amputĂ© de la meilleur partie de lui-mĂȘme, la seule en laquelle il croyait.
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Caryl FĂ©rey (Condor)
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Le chuintement des portes qui se referment masque mon salut au chauffeur, et le bus redémarre dans un sursaut poussif, sans plus s'attarder pour une fille oubliée sitÎt descendue. Je reste immobile sur le trottoir. Quand le bus a disparu au loin, alors seulement je traverse et je rentre chez moi.
Rugissements du vent d'Est
Oiseaux de métal
Sur les branches asphaltées
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Julie Turconi (Les petits riens)
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En 1871, Louis Figuier publie Le Lendemain de la mort ou la vie future selon la science, un gros volume dans lequel il se propose de dĂ©montrer scientifiquement l'immortalitĂ© de l'Ăąme! Selon lui, le corps et la pensĂ©e (ou l'Ăąme) sont deux entitĂ©s distinctes. Puisque d'une gĂ©nĂ©ration Ă l'autre, la matiĂšre ne disparaĂźt pas et ne fait que changer d'Ă©tat, il en est de mĂȘme pour la pensĂ©e: 'Comme la matiĂšre, ell doit se transformer, sans jamais se dĂ©truire.' Il balaie donc tous les 'traitĂ©s de l'Ăąme' Ă©crits depuis l'AntiquitĂ©, puisque ce 'fait de l'immortalitĂ©' est 'Ă©vident pour lui-mĂȘme'.
Le vrai problĂšme, c'est ce que devient l'Ăąme aprĂšs la mort: 'Il nous importerait fort peu, au fond, que l'Ăąme fĂ»t immortelle ou non, si notre Ăąme, Ă©tant rĂ©ellement, indestructible et immortelle, allait servir Ă un autre que nous-mĂȘmes, ou seulement, si revenant en nous, elle ne conservait point la mĂ©moire de son passĂ©. La rĂ©surrection de l'Ăąme, sans la mĂ©moire du passĂ©, serait un vĂ©ritable anĂ©antissement, ce serait le nĂ©ant des matĂ©rialistes.'
Louis Figuier cherche donc Ă dĂ©montrer que notre Ăąme nous sera conservĂ©e 'dans l'autre vie'. Selon lui, aprĂšs la mort, elle devient un ĂȘtre surhumain, ce que l'on nomme d'habitude un ange. 'Si l'atmosphĂšre est le milieu, l'habitat, de l'homme, le fluide Ă©thĂ©rĂ© est le milieu, l'habitat, de l'ĂȘtre surhumain. Ce passage successif en deux milieus diffĂ©rents d'un ĂȘtre, qui subit une mĂ©tamorphose quand il pĂ©nĂštre dans le nouveau milieu, n'est pas aussi extraordinaire, aussi anormal, aussi contraire aux lois de la nature, que l'on pourrait le croire.' C'est simplement une mĂ©tamorphose, semblable Ă celle qui voit 'la larve more et noirĂątre rampant dans la fange des Ă©tangs devenir la gracieuse libellule traversant l'air avec grĂące et vigueur... On peut dire, de ce point de vue, que l'homme est la larve ou la chenille de l'ĂȘtre surhumain.'
Cet ĂȘtre va occuper un nouvel humain, dĂšs sa naissance, Ă moins que l'homme dont il provient n'ait eu une existence vertueuse. Dans ce cas il subit une autre mĂ©tamorphose et se transforme en archange. Louis Figuier dĂ©crit alors un prodigieux cycle thĂ©ologico-Ă©cologique. Ă la suite d'une sĂ©rie de mĂ©tamorphose qui l'amĂšnent Ă proximitĂ© du soleil, l'esprit en devient la matiĂšre mĂȘme, qui revient sur Terre sous forme de rayons bienfaisants. Ceux-ci dĂ©posent dans les plantes les germes des Ăąmes qui mĂ»riront ensuite peu Ă peu, passant des vĂ©gĂ©taux aux animaux infĂ©rieurs, puis aux oiseaux et aux mammifĂšres, jusqu'Ă l'homme.
TrĂšs catholique, Figuier estimait pourtant que cette forme de mĂ©tempsycose Ă©tait bien prĂ©fĂ©rable aux dogmes chrĂ©tiens sur l'enfer et le paradis, qu'il trouvait profondĂ©ment injustes, et donc incompatibles avec la bienveillance divine: 'Le retour Ă une seconde vie terrestre est, en effet, une punition moins cruelle, plus raisonnable et plus juste que la condamnation aux tourment Ă©ternels. Ici la peine n'est qu'en proportion du pĂ©chĂ©; elle est Ă©quitable et indulgente, comme le chĂątiment d'un pĂšre.' Son livre mis Ă l'Index par l'Ăglise Catholique, sera rĂ©imprimĂ© dix fois jusqu'en 1904, dix ans aprĂšs la mort de son auteur et, peut-ĂȘtre, sa propre mĂ©tamorphose.
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Jean-Baptiste de Panafieu (MĂ©tamorphoses Deyrolle)
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Liberté
Sur mes cahiers d'Ă©colier
Sur mon pupitre et les arbres
Sur le sable de neige
J'Ă©cris ton nom
Sur toutes les pages lues
Sur toutes les pages blanches
Pierre sang papier ou cendre
J'Ă©cris ton nom
Sur les images dorées
Sur les armes des guerriers
Sur la couronne des rois
J'Ă©cris ton nom
Sur la jungle et le désert
Sur les nids sur les genĂȘts
Sur l'Ă©cho de mon enfance
J'Ă©cris ton nom
Sur les merveilles des nuits
Sur le pain blanc des journées
Sur les saisons fiancées
J'Ă©cris ton nom
Sur tous mes chiffons d'azur
Sur l'Ă©tang soleil moisi
Sur le lac lune vivante
J'Ă©cris ton nom
Sur les champs sur l'horizon
Sur les ailes des oiseaux
Et sur le moulin des ombres
J'Ă©cris ton nom
Sur chaque bouffées d'aurore
Sur la mer sur les bateaux
Sur la montagne démente
J'Ă©cris ton nom
Sur la mousse des nuages
Sur les sueurs de l'orage
Sur la pluie Ă©paisse et fade
J'Ă©cris ton nom
Sur les formes scintillantes
Sur les cloches des couleurs
Sur la vérité physique
J'Ă©cris ton nom
Sur les sentiers éveillés
Sur les routes déployées
Sur les places qui débordent
J'Ă©cris ton nom
Sur la lampe qui s'allume
Sur la lampe qui s'Ă©teint
Sur mes raisons réunies
J'Ă©cris ton nom
Sur le fruit coupé en deux
Du miroir et de ma chambre
Sur mon lit coquille vide
J'Ă©cris ton nom
Sur mon chien gourmand et tendre
Sur ses oreilles dressées
Sur sa patte maladroite
J'Ă©cris ton nom
Sur le tremplin de ma porte
Sur les objets familiers
Sur le flot du feu béni
J'Ă©cris ton nom
Sur toute chair accordée
Sur le front de mes amis
Sur chaque main qui se tend
J'Ă©cris ton nom
Sur la vitre des surprises
Sur les lĂšvres attendries
Bien au-dessus du silence
J'Ă©cris ton nom
Sur mes refuges détruits
Sur mes phares écroulés
Sur les murs de mon ennui
J'Ă©cris ton nom
Sur l'absence sans désir
Sur la solitude nue
Sur les marches de la mort
J'Ă©cris ton nom
Sur la santé revenue
Sur le risque disparu
Sur l'espoir sans souvenir
J'Ă©cris ton nom
Et par le pouvoir d'un mot
Je recommence ma vie
Je suis né pour te connaßtre
Pour te nommer
Liberté
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Paul Ăluard
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- Bien sĂ»r. Tous les ĂȘtres conscients en ont peur. C'est pour ça que les serpents mordent. C'est pour ça que les oiseaux volent. Mais ça fait partie de ce qu'il faut apprendre, je crois. Ătrange, non ? La plus grande peur de toutes les crĂ©atures, c'est la seule chose qui arrive forcĂ©ment. Ăa paraĂźt cruel, que cette peur soit si...
- Si intégrée?
- Oui.
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Becky Chambers (A Psalm for the Wild-Built (Monk & Robot, #1))
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Les poulets sont les oiseaux les plus répandus au monde.
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Innovative Language (Learn French - Word Power 101)
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Que les dĂ©linquants en costume osent qualifier de « progrĂšs » le dĂ©lire techno-nihiliste qui consiste Ă attendre le bus en parcourant son mur Facebook et sa galerie Instagram bercĂ© par les notifications Snap et Twitch, Ă proximitĂ© dâune poubelle connectĂ©e â alors mĂȘme que les chants dâoiseaux ont presque disparu et que lire devient une quasi-anomalie â relĂšve de lâaliĂ©nation.
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Aurélien Barrau (Il faut une révolution politique, poétique et philosophique: Entretien avec Carole Guilbaud (French Edition))
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La langue des oiseaux, par un jeu de sonoritĂ©s, de mots, permet de dĂ©couvrir le sens cachĂ© des mots, leur symbolique secrĂšte. Ce langage du cĆur, par sa nature initiatique, est pratiquĂ© par les alchimistes et les hermĂ©tistes depuis des siĂšcles. La matiĂšre, lâĂąme Ă tiers, un tiers dâĂąme pour deux tiers de quoi ? Un tiers de corps et un tiers dâesprit. La magie (lâĂąme agit) de nos ĂȘtres multidimensionnels faisant son Ćuvre pour lâessentiel, lâessence du ciel.
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Didier Steimer (Mets Sages d'HermĂšs: Du plomb de lâĂme Ă lâOr spirituel (French Edition))
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La floraison
Ils tâont volĂ© toutes les Ă©toiles
et le ciel ils lâont verrouillĂ©
avec des oiseaux métalliques.
Ils tâont caressĂ© avec lâombreâŠ
Ils tâont arrachĂ© les Ă©paules avec la fuite
Ils tâont embrassĂ© avec la glaceâŠ
une fleur à peine éclose, désertée
flotte impeccablement
sous tes cĂŽtes
tel un grand-pĂšre perdu
implacablement,
par une matinée inutile
comme un dĂ©but de mois de marsâŠ
Seule cette ville
Est le témoin muet
De ton passage Ă travers lâĂ©treinteâŠ
seule cette ville
sâeffondre
intensément, irrémédiablement dans le souvenir souffreteux
de la ville qui fut
sous le vol douloureux
et métallique des oiseaux russes.
Sais-tu que tu nâas plus de nom
ni de rĂȘves ???
que tu es une statistique
un nombre insensible
fondant lentement
sur lâasphalte indĂ©cent
de la ville qui se meurtâŠ
Seule une pluie salée, profonde
Caresse encore ton front
Et le mutisme de la pierre.
(Marius CONU)
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Marius Conu (Le IV-e Reich: UkraĂŻna mir)
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â Câest un pinson, lâĂ©claira Dany, qui avait entre temps fait des recherches sur Google. Souhaitez-vous des dĂ©tails ?
â Non. Cela me suffit de lâentendre chanter et je crois quâon sait tout sur lui.
â Câest une façon de voir les choses, marmonna Dany, qui en avait toujours aprĂšs sa mĂšre, qui, quoiquâil arrive, ne cessait jamais ses remontrances.
â Tu nâaimes pas cet oiseau ? interrogea Rodica avec intĂ©rĂȘt, en constatant que les yeux de sa progĂ©niture Ă©taient toujours rivĂ©s sur lâĂ©cran de son ordinateur portable.
â LĂ -dedans jâai tous les oiseaux de la forĂȘt, et non pas un seul.
(p. 36)
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Violeta Lacatusu (Daria (French Edition))
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- Ne jamais sous-estimer le danger de ne pas y aller, au bout du chemin.
- Ne jamais confondre (j'ai confondu) les refuges, les oasis, les Ăźles et les prisons.
- Ne jamais ramener Ă leur maison les petites filles Ă bout de chemin.
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Lola Lafon (Nous sommes les oiseaux de la tempĂȘte qui s'annonce)
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Rien nâest petit en effet; quiconque est sujet aux pĂ©nĂ©trations profondes de la nature, le sait. Bien quâaucune satisfaction absolue ne soit donnĂ©e Ă la philosophie, pas plus de circonscrire la cause que de limiter lâeffet, le contemplateur tombe dans des extases sans fond Ă cause de toutes ces dĂ©compositions de forces aboutissant Ă lâunitĂ©. Tout travaille Ă tout.
LâalgĂšbre sâapplique aux nuages ; lâirradiation de lâastre profite Ă la rose ; aucun penseur nâoserait dire que le parfum de lâaubĂ©pine est inutile aux constellations. Qui donc peut calculer le trajet dâune molĂ©cule? que savons-nous si des crĂ©ations de mondes ne sont point dĂ©terminĂ©es par des chutes de grains de sable? qui donc connaĂźt les flux et les reflux rĂ©ciproques de lâinfiniment grand et de lâinfiniment petit, le retentissement des causes dans les prĂ©cipices de lâĂȘtre, et les avalanches de la crĂ©ation? Un ciron importe ; le petit est grand, le grand est petit ; tout est en Ă©quilibre dans la nĂ©cessitĂ© ; effrayante vision pour lâesprit. Il y a entre les ĂȘtres et les choses des relations de prodige ; dans cet inĂ©puisable ensemble, de soleil Ă puceron, on ne se mĂ©prise pas ; on a besoin les uns des autres. La lumiĂšre nâemporte pas dans lâazur les parfums terrestres sans savoir ce quâelle en fait ; la nuit fait des distributions dâessence stellaire aux fleurs endormies. Tous les oiseaux qui volent ont Ă la patte le fil de lâinfini. La germination se complique de lâĂ©closion dâun mĂ©tĂ©ore et du coup de bec de lâhirondelle brisant lâĆuf, et elle mĂšne de front la naissance dâun ver de terre et lâavĂšnement de Socrate. OĂč finit le tĂ©lescope, le microscope commence. Lequel des deux a la vue la plus grande? Choisissez. Une moisissure est une plĂ©iade de fleurs ; une nĂ©buleuse est une fourmiliĂšre dâĂ©toiles. MĂȘme promiscuitĂ©, et plus inouĂŻe encore, des choses de lâintelligence et des faits de la substance. Les Ă©lĂ©ments et les principes se mĂȘlent, se combinent, sâĂ©pousent, se multiplient les uns par les autres, au point de faire aboutir le monde matĂ©riel et le monde moral Ă la mĂȘme clartĂ©. Le phĂ©nomĂšne est en perpĂ©tuel repli sur lui-mĂȘme. Dans les vastes Ă©changes cosmiques, la vie universelle va et vient en quantitĂ©s inconnues, roulant tout dans lâinvisible mystĂšre des effluves, employant tout, ne perdant pas un rĂȘve de pas un sommeil, semant un animalcule ici, Ă©miettant un astre lĂ , oscillant et serpentant, faisant de la lumiĂšre une force et de la pensĂ©e un Ă©lĂ©ment, dissĂ©minĂ©e et indivisible, dissolvant tout, exceptĂ© ce point gĂ©omĂ©trique, le moi ; ramenant tout Ă lâĂąme atome ; Ă©panouissant tout en Dieu ; enchevĂȘtrant, depuis la plus haute jusquâĂ la plus basse, toutes les activitĂ©s dans lâobscuritĂ© dâun mĂ©canisme vertigineux, rattachant le vol dâun insecte au mouvement de la terre,subordonnant, qui sait? ne fĂ»t-ce que par lâidentitĂ© de la loi, lâĂ©volution de la comĂšte dans le firmament au tournoiement de lâinfusoire dans la goutte dâeau. Machine faite dâesprit. En grenage Ă©norme dont le premier moteur est le moucheron et dont la derniĂšre roue est le zodiaque.
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Victor Hugo
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LâalgĂšbre sâapplique aux nuages ; lâirradiation de lâastre profite Ă la rose; aucun penseur nâoserait dire que le parfum de lâaubĂ©pine est inutile aux constellations. Qui donc peut calculer le trajet dâune molĂ©cule? Que savons-nous si des crĂ©ations de monde ne sont point dĂ©terminĂ©es par des chutes de grains de sable? Qui donc connaĂźt les flux et les reflux rĂ©ciproques de lâinfiniment grand et de lâinfiniment petit, le retentissement des causes dans les prĂ©cipices de lâĂȘtre et les avalanches de la crĂ©ation? [âŠ] Tous les oiseaux qui volent ont Ă la patte le fil de lâinfini. [âŠ] Dans les vastes Ă©changes cosmiques, la vie universelle va et vient en quantitĂ©s inconnues, roulant tout dans lâinvisible mystĂšre des effluves, [âŠ] rattachant le vol dâun insecte au mouvement de la terre, subordonnant, qui sait? ne fĂ»t-ce que par lâidentitĂ© de la loi, lâĂ©volution de la comĂšte dans le firmament au tournoiement de lâinfusoire dans la goutte dâeau. Machine faite dâesprit. Engrenage Ă©norme dont le premier moteur est le moucheron et dont la derniĂšre roue est le zodiaque.
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â
Victor Hugo (Les Misérables)
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LĂ oĂč lâancienne Ă©ducation initiait, la nouvelle âłconditionneâł. Avec lâancienne, on traitait les Ă©lĂšves comme les oiseaux traitent leurs petits pour leur apprendre Ă voler ; dans la nouvelle, on les traite plutĂŽt comme un Ă©leveur traite ses jeunes volailles, pour des raisons dont elles ignorent tout. En un mot, lâancienne Ă©ducation Ă©tait une sorte de propagation âdes hommes transmettant la force de leur humanitĂ© aux hommes-, la nouvelle nâest que propagande.
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C.S. Lewis
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Je me suis installé dans le jardin. Comme le ciel n'est pas tout à fait noir, je vois des oiseaux traverser l'étendue grise-dessus des arbres, en un long vol, puissant et formidable, et il me semble les sentir glisser à la surface de mes yeux.
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Philippe Djian (Love Song)
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De l'Ă©ternel azure la sereine ironie
Accable, belle indolemment comme les fleurs,
Le poëte impuissant qui maudit son génie
A travers un désert stérile de Douleurs.
Fuyant, les yeux fermés, je le sens qui regarde
Avec l'intensite d'un remords atterrant,
Mon Ăąme vide, OĂč fuir? Et quelle nuit hagarde
Jeter, lambeaux, jeter sur ce mépris navrant?
Brouillards, montez! Versez vos cendres monotones
Avec de longs haillons de brume dans les cieux
Qui noiera le marais livide des automnes
Et batissez un grand plafond silencieux!
Et toi, sors de étangs léthéens et ramasse
En t'en venant la vase et les pĂąles roseaux,
Cher Ennui, pour boucher d'une main jamais lasse
Les grands trous bleux que font méchamment les oiseaux.
Encor! que sans répit les tristes cheminées
Fument, et que de suie une errante prison
Ăteigne dans l'horreur de ses noires traĂźnĂ©es
Le soleil se mourant jaunatre a l'horizon!
-Le Ciel est mort. -Vers toi, j'accours! donne, ĂŽ matiĂšre,
L'oubli de l'Idéal cruel et du Péché
A ce martyr qui vient partager la litiĂšre
Ou le bétail heureux des hommes est couché,
Car j'y veux, puisque enfin ma cervelle, vidée
Comme le pot de fard gisant au pied du mur,
N'a plus l'art d'attifer la sanglotante idée,
Lugubrement bùiller vers un trépas obscur. . .
En vain! l'Azur triomphe, et je l'entends qui chante
Dans les cloches. Mon Ăąme, il se fait voix pour plus
Nous faire peur avec sa victoire méchante,
Et du métal vivant sort en bleus angélus!
Il roule par la brume, ancien et traverse
Ta notive agonie ainsi qu'un glaive sur;
Ou fuir dans la révolte inutle et perverse?
Je suis hanté. L'Azur! l'Azur! l'Azur! l'Azur.
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Stéphane Mallarmé
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Peut-ĂȘtre le but de ce rĂ©cit Ă©tait-il de ressusciter BĂĄrĂ°ur, d'entrer par effraction dans le monde des morts avec les mots pour armes. Les mots ont parfois le pouvoir des trolls et ils sont capables d'abattre les dieux, ils peuvent sauver des vies et les anĂ©antir. Les mots sont des flĂšches, des balles de fusil, des oiseaux lĂ©gendaires lancĂ©s Ă la poursuite des hĂ©ros, les mots sont des poissons immĂ©moriaux qui dĂ©couvrent un secret terrifiant au fond de l'abĂźme, ils sont un filet assez ample pour attraper le monde et embrasser les cieux, mais parfois, ils ne sont rien, des guenilles usĂ©es, transpercĂ©es par le froid, des forteresses caduques que la mort et le malheur piĂ©tinent sans effort.
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JĂłn Kalman StefĂĄnsson (HimnarĂki og helvĂti)
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Nul ne conteste l'appartenance de cette savane au Brésil et son droit d'en user comme bon lui semble. La querelle ne surgit que plus haut vers le nord.
Une belle question de droit international: à qui appartient une richesse essentielle à la survie générale de l'humanité ?
La forĂȘt amazonienne est la premiĂšre rĂ©serve de biodiversitĂ© de la planĂšte (le cinquiĂšme des espĂšces de plantes, le cinquiĂšme des espĂšces d'oiseaux, le dixiĂšme des espĂšces de mammifĂšres). Et, plus vaste foret du monde, elle freine les progrĂšs de l'effet de serre.
Dans ces conditions, Ă qui appartient la forĂȘt amazonienne?
Pour obtenir le poste de directeur général de l'organisation mondiale du commerce, le français Pascal Lamy était venu faire compagne au brésil. Quelqu'un l'interroger sur l'Amazonie: Faut-il envisager pour elle un statut particulier?
- la question pourrait ĂȘtre Ă©voquĂ©e, rĂ©pond le candidat.
Il croyait s'ĂȘtre montrĂ© prudent. Il vient d'allumer un incendie qui mettra des semaines Ă s'Ă©teindre. Qu'en se le dise, s'exclame la presse de SĂŁo Paolo et vocifĂšrent les politiques, jamais, au grand jamais le BrĂ©sil n'acceptera la moindre limitation de sa souverainetĂ© sur quelque partie que ce soit de son territoire!
Combat des Titans: la plus grande ferme du monde face Ă la plus grande foret du monde. Pour nourrir la planĂšte, faut-il l'asphyxier??
Et bataille de juristes: Amazonie, Antarctique: le plus chaud, le trÚs froid ; le trÚs humide, le trÚs glacé. Comment préserver ces deux espaces essentiels à notre survie??
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Ărik Orsenna (Voyage aux pays du coton: Petit prĂ©cis de mondialisation)
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Nul ne conteste l'appartenance de cette savane au Brésil et don droit d'en user comme bon lui semble. La querelle ne surgit que plus haut vers le nord.
Une belle question de droit international: à qui appartient une richesse essentielle à la survie générale de l'humanité ?
La forĂȘt amazonienne est la premiĂšre rĂ©serve de biodiversitĂ© de la planĂšte (le cinquiĂšme des espĂšces de plantes, le cinquiĂšme des espĂšces d'oiseaux, le dixiĂšme des espĂšces de mammifĂšres). Et, plus vaste foret du monde, elle freine les progrĂšs de l'effet de serre.
Dans ces conditions, Ă qui appartient la forĂȘt amazonienne?
Pour obtenir le poste de directeur général de l'organisation mondiale du commerce, le français Pascal Lamy était venu faire compagne au brésil. Quelqu'un l'interroger sur l'Amazonie: Faut-il envisager pour elle un statut particulier?
- la question pourrait ĂȘtre Ă©voquĂ©e, rĂ©pond le candidat.
Il croyait s'ĂȘtre montrĂ© prudent. Il vient d'allumer un incendie qui mettra des semaines Ă s'Ă©teindre. Qu'en se le dise, s'exclame la presse de SĂŁo Paolo et vocifĂšrent les politiques, jamais, au grand jamais le BrĂ©sil n'acceptera la moindre limitation de sa souverainetĂ© sur quelque partie que ce soit de son territoire!
Combat des Titans: la plus grande ferme du monde face Ă la plus grande foret du monde. Pour nourrir la planĂšte, faut-il l'asphyxier??
Et bataille de juristes: Amazonie, Antarctique: le plus chaud, le trÚs froid; le trÚs humide, le trÚs glacé. Comment préserver ces deux espaces essentiels à notre survie??
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Ărik Orsenna (Voyage aux pays du coton: Petit prĂ©cis de mondialisation)
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On aime, on est aimé, bonheur qui manque aux rois! On écoute le chant des oiseaux dans les bois Le matin, on s'éveille, et toute une famille Vous embrasse, une mÚre, une soeur, une fille!
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Anonymous
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Isabelle...n'a pas besoin d'histoire, son passĂ© c'est le petit verger de son pĂšre, quelques poiriers,une rangĂ©e de cognassiers, un vieil abricotier. Son avenir, c'est l'anĂ©mone qu'elle vient de planter, la casserole qu'elle remplit d'eau fraĂźche pour les oiseaux, sous la fenĂȘtre de sa cuisine.
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René Frégni
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Apparence de paix
Pas de carnage ici, pas de mise Ă mort.
Les drames de l'histoire sont parfois
comme une musique qui demeure
au fond d'un champ oĂč l'on marche
parmi le bruissement du maĂŻs,
aimanté par des oiseaux fous
à l'orée du bois et sous un ciel
que strie la fumée blanche d'un avion
â en haute altitude, des voyageurs sans doute
sirotent l'apéro dans une carlingue
qui les protĂšge du froid absolu â
mais ici-bas sous le vent tiĂšde de septembre
la terre joue sa partition
ancienne, les enfant des fermes
s'en sont allés en sifflant dans l'herbe
et des veuves inconsolables hantent toujours
les parages de la riviĂšre que l'on dit
paresseuse, Ă croire que le jour entier
va refermer sur elle sa masse bleue,
elles seront dans la caverne du temps,
les années chanteront leur absence
et trĂšs haut, oiseaux et bolides
iront vers ailleurs en ignorant tout
de leurs peines, leurs douleurs, leurs coffres
remplis de robes d'un autre Ăąge.
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Pierre Nepveu (Lignes aériennes)
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Une autre table Ă lâautre bout de la terrasse est occupĂ©e par une cage qui abrite un petit oiseau: le patron a prĂ©fĂ©rĂ© la poser lĂ plutĂŽt que de la suspendre Ă une poutrelle Ă cause du vent. Un jour, un autre oiseau, nettement plus grand, sâest posĂ© sur la mĂȘme table oĂč Ă©taient dispersĂ©es quelques miettes de nourriture. AprĂšs les avoir picorĂ©es, il sâest approchĂ© de la cage comme pour saluer son locataire. Les deux oiseaux se sont considĂ©rĂ©s un moment sans Ă©mettre toutefois le moindre gazouillis. âIls ne doivent pas parler la mĂȘme langeâ, ai-je pensĂ©
â
â
Vassilis Alexakis
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Au jardin de mon pĂšre, les lilas sont fleuris. Tous les oiseaux du monde viennent y faire leur nid. AuprĂ©s de ma blonde, quâil fait bon, fait bon, fait bon. AuprĂ©s de ma blonde, quâil fait bon dormir.
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Alan Dean Foster (Strange Music (Pip & Flinx #15))
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ĂlĂ©gie de la forĂȘt de Ropraz
Ăcoute, bĂ»cheron, arrĂȘte un peu le bras
Tu tues ma mémoire avec ces arbres
J'ai songé dans le bocage que tu abats
J'ai suivi mainte muse sous cet ombrage
Ta hache fait couler la résine crois-tu
Mais c'est mon souvenir que tu tues
L'odeur des corps les seins la douce aisselle
Toute la mémoire bocagÚre tombe sous tes armes
N'entends-tu les oiseaux crier l'alarme
Ou sur l'Ă©corce du cĆur effrayĂ© qui t'appelle
Ne vois-tu le lait dans le bois que tu entailles
Ă ces figures en larmes dans la faille
[âŠ]
ArrĂȘte, bĂ»cheron, laisse un mĂ©chant travail
N'entends-tu ces appels sous le concert des haches ?
Mais tu n'Ă©coutes rien et c'est ce qui me fĂąche
Des respirations enfouies dans l'Ă©mail
Ou la moire soyeuse des mousses et des tiges
Moi je retrouve mes traces jusqu'au vertige
Ă chaque pas plus avant dans ces bois
Chaque trait de la muse au corps adroit
Les mots qu'elle avait pour le sommeil et pour le songe
Ainsi l'arbre dont le destin me ronge
Si tu l'abats tu me défais de ma vraie voix
Me laissant seul, sans troupes bel arroi
(p. 151)
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Jacques Chessex (Les élégies de Yorick: [poÚmes] (French Edition))
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C'Ă©tait le chant de la vie elle-mĂȘme, les victoires innombrables et les tragĂ©dies dont personne n'aurait jamais connaissance, parce qu'elles appartenaient aux oiseaux et aux bĂȘtes et aux insectes, et que leurs secrets Ă©taient dissous dans le flux calme de la sĂšve qui remonte.
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Patrick K. Dewdney (La Maison des veilleurs (Le cycle de Syffe, #4))
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On n'aimait pas ces moineaux qui becquetaient les griottes, picoraient les tournesols, sans peur des épouvantails, contrairement aux autres oiseaux, corrects, eux ! [...] Le rassemblement qu'ils organisaient une fois tous les deux ou trois ans "mon pÚre appelait ça "les congrÚs du parti") représentaient une véritable catastrophe pour les vergers.
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Aleksandr Pavlovic Cudakov (Anton)
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On n'aimait pas ces moineaux qui becquetaient les griottes, picoraient les tournesols, sans peur des épouvantails, contrairement aux autres oiseaux, corrects, eux ! [...] Le rassemblement qu'ils organisaient une fois tous les deux ou trois ans (mon pÚre appelait ça "les congrÚs du parti") représentaient une véritable catastrophe pour les vergers.
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Aleksandr Pavlovic Cudakov (Anton)
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Elle était libre comme les arbres, comme les vagues du Danube, comme le vent, comme les oiseaux. Elle était Tinka, l'enfant libre d'une race libre, une race qui n'était pas enchaßnée par les entrelacs de la civilisation. La seule race qui n'était pas entrée dans le creuset du monde ni devenue un composant de son alliage
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Konrad Bercovici (Ghitza and Other Romances of Gypsy Blood)
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La trace ontologique du couteau
Je ne suis quâun homme arpentant les Pierres du Nord
sous une Ă©toile stĂ©rile. Je respire le mĂȘme air que
les bĂȘtes sauvages, lâair quâexhalent le jabot des oiseaux,
la puanteur des marais, les restes de
charognes.
Toi seul nâes pas pourri, mon couteau,
sur lequel sâest posĂ©e la main de mon grand-pĂšre Dumitru
sculpteur de croix ; la main de mon pĂšre Georges,
puisatier.
Tu as lâĂ©clat de la louve qui vient de
mettre bas seule dans le hallier.
On peut te poser sur la gorge du tyran, sur
la gorge du vagabond, sur la gorge du frĂšre.
La louve sâagenouille
prend entre ses dents chacun de ses petits et lâemmĂšne au creux de
sa taniĂšre. Puis elle les lĂšche de sa langue rĂȘche.
Ah, tu passes de pĂšre en fils sur les lits de
mort, mon couteau !
Fou qui te reçoit en héritage,
fou qui ne te lĂšgue !
Tout comme moi â fou sur les Pierres
du Nord qui écrit dans la nuit stérile.
Chaque lettre gonflĂ©e dâeffroi laisse une
«âtrace ontologiqueâ» comme la traĂźnĂ©e humide de
lâescargot sur les pierres.
Délicatement je prends chaque lettre et la dépose
dans le mot suivant qui ne tremble pas,
qui ne bégaye pas de trouille,
comme la louve prend ses petits entre ses dents.
Le couteau des lettres ne laisse rien pourrir.
â
â
George Vulturescu
â
DOĂNA POUR LA POĂSIE
La poésie est fraßche
Comme nourrisson en crĂšche
Comme la sage-femme
Qui a perdu son Ăąme.
Poésie bébé
à peine est-elle née
Qu'elle a commencé
Soit Ă pleurnicher
Soit Ă tituber
Puis elle est tombée
Dans ta petite Ă©cole
Dans d'autres encore
Teacher nous l'a donnée
Tellement digérée
La poésie mouche
Mùchée dans sa bouche
Nos cerveaux hurlaient
Des oiseaux passaient
The Wall grandissait
Pink Floyd s'entendait
(We don't need no EDUCATION)
et inside chantaient
les chĆurs d'enfants
on n'a plus envie
de la poésie
on n'a plus envie
de la poésie
chandelles incertaines
Ă©tudiants par centaines
Ă©lĂšves redoublants
d'autres ... Ă©minents
un grand NON disaient
dĂšs qu'ils entendaient
de la poésie
poésie pourrie
et autres lubies
des dizaines - pourries
des pleurnicheries
lugubres envies
... et ils sâĂ©cĆuraient
et ils essayaient
de se libérer
de cette poésie
tellement pourrie
dont les profs voulaient
toujours les gaver
TĂȘtes penchĂ©es
pauvre mémoire
mémoire-Tiroir ...
Comme elle souffrait
Comme elle tremblait
Sanguinolait ...
Et avalait
Encore un poĂšme
Encore et encore
La poésie-Chlore
PoÚmes, poésie
Tellement out of vie
Ăloge de la patrie
De n'importe quoi
De n'importe qui
Pour une fĂȘte scolaire
Pour une thĂšse misĂšre ...
Oh, pauvre mémoire
Qui s'Ă©vanouissait
Imbécillisée ...
Stupidifiée ...
Pauvre petite cervelle
Comme cigale frĂȘle
Quand vient le gel !
D'un coup comme un signe
Le VENT dans la vigne
Joli mois de mai
Le vent PARACLET.
J'ai vu s'avancer
Les Muses d'antan
Elles se mĂȘlaient toujours
Ă des Muses plus cool
Pour l'artiste saoul
La cervelle-moule ...
Elles se mĂ©li-mĂȘlaient
Pour encore changer
L''Ăšre glaciaire
Des cervelles amĂšres
L'Ăšre glaciaire
Des cervelles amĂšres âŠ
â
â
Simona Popescu (LucrÄri Ăźn verde sau Pledoaria mea pentru poezie)
â
SUR LA ROUTE UN ARBRE
Sur la route il est un arbre
Qui reste ployé
Et tous les oiseaux de l'arbre
Se sont égaillés.
Trois vers l'ouest et trois vers l'est
Et le reste au sud
Laissant l'arbre Ă la tempĂȘte
Ă la solitude.
Je dis Ă ma mĂšre : Ă©coute
Si tu n'y fais rien,
Ni une ni deux, ma mĂšre
Oiseaux je deviens !
Je veux m'asseoir sur cet arbre
Je le bercerai,
L'hiver de belles complaintes
Le consolerai.
MĂšre dit : nenni, mon fils !
Et ses pleurs ruissellent
Tu pourrais, hélas, sur l'arbre
Prendre froid mortel !
Je dis : MĂšre, c'est dommage
Pour tes yeux si beaux
Et avant qu'on s'en avise
Je suis un oiseau.
Geint la mĂšre : Itsik, mon Ăąme,
Au nom de Dieu, tiens,
Prends au moins ce petit chĂąle
Et couvre-t'en bien,
Emporte avec toi tes bottes
Rude, l'hiver vient,
Mets ton bonnet de fourrure
Quel malheur est mien !
Emporte aussi ton chandail
Et mets-le, vaurien,
Si tu ne veux ĂȘtre l'hĂŽte
De tous les défunts !
Qu'il est dur de lever mes ailes,
Trop de choses, trop
Tu mis sur le corps, ma mĂšre,
Du fragile oiseau.
Et tristement je regarde
En ses yeux si beaux,
Son amour mĂȘme m'empĂȘche
De devenir oiseau.
(p. 418-419 de L'Anthologie de la poésie yiddish de Charles Dobzynski)
â
â
Itzik Manger
â
LâOISEAU PARADIS
Pour te surprendre
ont Ă©clot cette nuit les magnolias
Jâai dĂ©posĂ© le matin Ă tes pieds,
je me suis vĂȘtue
en azur,
pour te surprendreâŠ
LâOiseau Paradis a chantĂ© une chanson dâamour.
Je me suis réveillée en embrassant ton ombre,
le baiser brillait dans la paume de lâaube
LâOiseau Paradis a chantĂ© une chanson dâamourâŠ
SOI-MĂME SE PRONONCER
Les paroles
tels des oiseaux sur les branches
ont des voix de diamant
Qui a vu
les paroles
se baigner dans des rayons de lune,
se munissant ensuite dâhabits bariolĂ©s,
soi-mĂȘme se prononcer
dâune voix de diamant
Elles touchent les fronts des poĂštes,
telles des sirÚnes qui séduisent les voyageurs des mers au large.
â
â
Gabriela Livescu (PasÄrea Paradis)
â
Logos
Ceux qui ne se pressent pas y parviennent.
Celui qui patiente l'emporte.
C'est toujours autrement. La connaissance est douleur.
La vie poursuit son propre moi comme eau vive.
Tu as dormi sur des fleurs sauvages. Le sang du vent tombait goutte-Ă -goutte des arbres.
Et j'ai songé aux paysannes à leurs myrtilles et à leur doux parler.
Nous quittons notre moi, les objets, les brumes et les murmures
pour accomplir un dénouement dont la fragrance nous trouble.
J'ai vu aurores et crépuscules, lunes se levant, se couchant.
Toute chose est unique. Toujours diffĂ©rente. Et des oiseaux paradoxaux chantaientâŠ
Et je les entendis, les entendis ! Femmes de fiÚvre délirant au torse des hommes.
Je sais la pĂąleur et la folie comme je sais mes deux bras las de se souvenir.
La vie a poursuivi son propre moi comme eau vive.
Les os de la lune s'enquiĂšrent de nous dans l'air.
Il y eut d'étranges saisons⊠Les gens pourrissaient vivants.
Une bouche se pencha pour s'abreuver Ă la nuit.
Et dĂšs lors tu attendis la fin comme on attend la tentationâŠ
Harmonieusement fatigué, l'été s'achevait. La lune comme une nonne jacobine se leva
sur les genoux de l'Apocalypse. Pas de plus magnifique floraison qu'un corollaire.
Tu aimais les oiseaux, les arbres et les eaux,
mais tu n'eus pas d'eaux, pas d'arbres, ni d'oiseaux.
(p. 55)
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Ion Caraion (La neige qui jamais ne neige et autres poĂšmes)
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Mon peuple fantĂŽme (poĂšme d'Ilarie Voronca)
Entre mer et terre. Entre pierres et ciel.
Avec le pain jaune de la route. Avec le vin rouillĂ© de la forĂȘt
VoilĂ mon ouvrage accompli. Et les outils de travail
Sont devenus des instruments de musique.
Câest ainsi
QuâĂ travers la flamme de la mĂ©moire les objets se changent en paroles.
Sur le promontoire, ici, dernier vestige de lâhomme. Rencontre.
Le vent jette dans lâĂ©cume ses Ă©pĂ©es dâeaux.
Solitude coupée géométriquement par les oiseaux
Quâici donc les visages de la vie se montrent.
Le soleil tombĂ© dans mon Ćil salĂ©. Face
Aux algues chevelues et aux cortĂšges de poissons
Mon visage fĂȘlĂ© par le vent comme le bord dâune tasse,
Sur mes lÚvres serrées : aube ou crépuscule comme un son.
Sans filets, sans armes
De chasse. Collé aux rochers. Vers le Sud
Les aigles dâĂ©cumes. Seul avec mon travail accompli entre terre et larmes.
Les cannes Ă pĂȘche sont devenues des harpes. Les fusils des flĂ»tes.
Mais le cĆur est la barque Ă©ternelle dâUlysse
Qui touche dans son rĂȘve tant dâĂźles,
Dans les veines, de nouveaux archipels surgissent,
Une parole, un rire, font naĂźtre une ville.
LĂ sur le promontoire jâattendais ces passages
DâĂźles : oiseaux Ă©tranges jaillis dâentre les cordes
Je te reconnaĂźtrai fantĂŽme entre ces bĂąches
Des terres nomades. LĂ prĂšs du Peuple Ă©tranger dont la patrie est morte
Est ma place. LĂ sur lâIle fantĂŽme
Je viendrai avec mes instruments de musique. Avec ma journée accomplie.
Temps dâexil ? Non. Fuite Ă travers les glaciers du sommeil ? Non.
Le ver de la souffrance tordu dans la pomme de cette blessure.
Mais jusquâalors : sans armes, sans outils, sur cette
Pierre : extrĂȘme limite du continent
Entre rochers et flots qui rejettent
Le lait blanc de lâĂ©cume jusquâĂ ma faim, jusquâau vent,
Ici. Loin de lâhomme implacable. Loin
Des distributeurs de terre. Sans retour. Sans fuite.
La voix oubliée en moi comme une lettre dans un livre
Jâattends mon peuple fantĂŽme, mon Ăźle-fantĂŽme.
â
â
Ilarie Voronca
â
Haut les coeurs, mes frĂšres ! Haut, toujours plus haut ! Et ne m'oubliez pas non plus les jambes ! Haut les jambes aussi, ĂŽ vous qui dansez bien, et, mieux encore, soyez debout, mĂȘme sur la tĂȘte ! Cette couronne du rieur, cette couronne de roses, moi-mĂȘme je l'ai ceinte, moi-mĂȘme ai sanctifiĂ© mon Ă©clat de rire. Pour cela, parmi les autres aujourd'hui je n'ai trouvĂ© personne d'assez robuste.
Zarathoustra le danseur, Zarathoustra le lĂ©ger, qui des ailes fait signe, celui qui sait l'art de voler, qui Ă tous les oiseaux fait signe, prĂȘt et dispos, d'une bienheureuse espiĂšglerie ; Zarathoustra le vrai-disant, Zarathoustra le vrai-dansant, le non-impatient, le non-inconditionnel, celui qui aime et sauts et entrechats ; moi-mĂȘme me suis ceint de cette couronne.
Cette couronne du rieur, cette couronne de roses, à vous, mes frÚres, je lance cette couronne ! J'ai sanctifié le rire : Î vous, hommes supérieurs, apprenez donc - à rire !
â
â
Nietzsche F.
â
Nous savons que le monde se dĂ©traque. Et nous le savons parce quâen nos nerfs il se dĂ©traque aussi. Dâautres incendies, dâautres bateaux qui sombrent, dâautres rĂ©chauffements, dâautres tsunamis. Sa maladie se rejoue en nous, en plus petit.
Nos angoisses et nos insomnies sont les siennes, ses propres douleurs, ses contradictions. En nous, le monde a mal, il souffre et il le dit.
Certes, nous pourrions ĂȘtre contaminĂ©s par la joie, mais les temps sont ce quâils sont et la douleur nous frappe. Elle frappe. Un jour, on se surprend Ă avoir mal aux arbres, aux oiseaux. Le lendemain, Ă lâavenir, aux jeux de nos enfants. On cherche le moyen de guĂ©rir. OĂč espĂ©rer ? Ă quoi sâaccrocher ? On cherche un nom pour les siĂšcles Ă venir. Un nom dĂ©cent. Un nom possible.
â
â
Antoine Wauters (Le Musée des contradictions)
â
LA MORT DE LA BICHE (MOARTEA CAPRIOAREI)
La disette a tué toute brise de vent.
Le soleil sâest fondu et coulĂ© de partout.
Le ciel est resté vide et brûlant
Les seaux ne tirent des fontaines que de boue.
Sur les bois fréquemment feux, toujours feux
Dansent sauvages, sataniques jeux.
Je poursuis papa en route vers les buttes,
Les chardons, les sapins mâĂ©corchent sĂ©chĂ©s.
Tous les deux commençons la poursuite des chÚvres,
La chasse dâla famine en montagnes de tout prĂšs.
La soif mâaccable. Bouillit sur la pierre
Le fil dâeau filtrĂ© des ruisseaux.
La tempe pĂšse lâĂ©paule, comme si jâerre
Une autre planĂšte, immense, Ă©trange, ennuyeux.
Nous restons dans lâendroit oĂč encore retentissent
Sur cordes de douces ondes, les ruisseaux.
Quand la lune sâĂ©lĂšve et le soleil se couche
Ici viendront Ă la fil sâabreuver
Une par une, les biches.
Je dis Ă papa que jâai soif. Il me fait signe de mâ taire.
Enivrante eau. Comme tu tâagites limpide !
Je suis liĂ© par soif de cette ĂȘtre qui meurt
Ă lâheure fixĂ© par loi et habitude.
La vallée raisonne en bruissements flétris.
Quel affreux crĂ©puscule flotte dans lâunivers !
Le sang Ă lâhorizon. Ma poitrine rouge comme si
Jâai essuyĂ© mes mains sur mon poitrail.
Comme sur autel fougÚres brûlent en flammes violùtres
Et les étoiles frappées parmi celles-ci miroitent.
HĂ©las ! comme je voudrais que tu ne viennes, ne viens pas
Superbe offrande de mon noble bois !
Elle se monta sautant et sâarrĂȘta
Scrutant les alentours avec de crainte
Ses minces narines faisaient frĂ©mir lâeau
Avec les cercles en cuivre errantes.
Dans ses yeux moites brillait un certain indécis
Je savais quâelle aura mal, quâelle va mourir.
Il me semblait revivre un récit
Avec la biche, jadis une trĂšs belle fille.
Dâen haut, la pĂąle lumiĂšre, lunaire,
Bruinait sur sa fourrure douces fleurs dâcerisier.
HĂ©las ! comme je voudrais que pour la premiĂšre fois
Le coup dâfusil dâpapa va Ă©chouer.
Mais les vallées résonnent. Elle tombe à genoux.
Elle lĂšve sa tĂȘte, la tourne vers les Ă©toiles
La dévala alors, en déclenchant sur eaux
Fuyards tourbillons de perles noires.
Un oiseau bleu bonda dans les rameaux
La vie dâla biche vers lâespace attardĂ©
Vola trĂšs lentement, en cris, comme en automne oiseaux
Quand laissent tranquilles leurs nids tout ravagés.
En chancelant je suis allé pour lui fermer
Ses yeux ombreux comme en engoisse veillés de cornes
Silencieux et blanc jâai tressailli quand lâpĂšre
Me dit de tout son cĆur: âVoilĂ de la viande !â
âJâai soifâ, je dis. Papa mâincite Ă mâabreuver.
Enivrante eau, enveloppé en brume !
Je suis lié par soif de cette biche gaspillée
A lâheure fixĂ©e par loi et par coutumeâŠ
Mais la loi nous est déserte, étrangÚre
Quand la vie en nous trĂšs difficile sâanime
Coutumes, compassions sont toutes désertes
Quand mĂȘme ma sĆur malade est une des victimes.
La carabine dâ papa nâ Ă©mane que de fumĂ©e
HĂ©las ! Sans vent sâempressent les feuillages en foule
Papa prépare un feu tout effrayé
HĂ©las ! comme la forĂȘt se dĂ©nature !
De lâherbe, sans adresse, je prends en mains
Une mince clochette dâun cliquetis argentin .
Papa tire de la broche avec sa main
Le cĆur de la chevreuil et ses chauds reins.
Câest quoi le cĆur ?⊠Jâai faim. Je veux vivre, jâ voudraisâŠ
Toi, pardonne-moi, vierge ! ma biche, ma bien-aimĂ©eâŠ
Jâai sommeil⊠Comme il est haut le feu ! Et la forĂȘt sauvage !
Je pleurs. Que pense papa ? Je mange. Je pleurs. Je mangeâŠ
1954
(cf. p. 15-18, traduction du roumain par Claudia PINTESCU)
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Nicolae LabiĆ (Poezii (Biblioteca Eminescu) (Romanian Edition))
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« Au Canada, un projet d'oléoducs suspendu grùce à des colibris. Des nids d'oiseaux ont mis sur pause les travaux pendant la saison de nidification. »
Parfois la douceur, la vulnérabilité et la vie l'emporte sur la violence du monde.
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Fred Dubé (L'apocalypse durable: Pamphlet à l'usage des écoanxieux pour radicaliser leur famille (French Edition))
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Si le cerveau des mammifĂšres a Ă©voluĂ© selon une certaine voie, celui des oiseaux en a suivi une autre . Progression dynamique plutĂŽt que stagnation reptilienne. Au lieu de se dĂ©ployer Ă la surface en gros plis grumeleux comme chez les mammifĂšres, leur intelligence est enfouie dans le cortex. Comment voler avec une grosse tĂȘte ? Leur cerveau est compact, renferme plus de neurones dans un petit espace que tout autre animal.
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Deb Olin Unferth (Les pondeuses de l'Iowa (En lettres d'ancre))
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Les hiboux sont connus pour ĂȘtre des oiseaux solitaires ; mais on ignore quâils ont la forĂȘt comme meilleure amie.
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Mehmet Murat ildan
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Va, Aquing, câest ton tour de voler de tes propres ailes.. Câest dans le sang que vous lâavez, gosses sauvages nĂ©s sur cette Ăźle, cette force brute que lâon trouve dans les typhons et les tremblements de terre qui secouent notre sol. Vous ĂȘtes de jeunes oiseaux tombĂ©s du nid, qui, comme les hirondelles de mer qui franchissent les ocĂ©ans, ne savent quâaller de lâavant, pour aboutir oĂč ? Vous-mĂȘmes ne le savez...
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Bai Xianyong (Crystal Boys)
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Il avait alors, comme les oiseaux et les insectes qui lâentouraient depuis son enfance, commencĂ© Ă cueillir des brindilles de mots, des graines dâimages et des grains de sons dâune langue qui nâĂ©tait pas celle de sa mĂšre. Une langue devenue son nid dâĂ©criture.
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Abdelkader DjemaĂŻ (Mokhtar et le figuier)
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Lorsqu'on a aimĂ© une femme de tous ses yeux, de tous ses matins, de toutes les forĂȘts, champs, sources et oiseaux, on sait qu'on ne l'Ă pas encore aimĂ©e assez et que le monde n'est qu'un commencement de tout ce qui vous reste Ă faire.
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Romain Gary (Clair de femme)
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Spinoza pensait que Dieu Ă©tait la nature. [...] CervantĂšs voyait un lien de cause Ă effet entre le soleil et l'art. Entre la crĂ©ation et la crĂ©ation. J'Ă©prouve des sentiments semblables â d'euphorie ou de parfaite adĂ©quation â devant la beautĂ© sauvage comme devant certaines oeuvres. Pour moi, ces deux choses sont consanguines. De toute temps, les artistes se sont Ă©chinĂ©s Ă dĂ©coder cette parentĂ©. Ils se sont agenouillĂ©s sur des toiles, des scĂšnes, des Ă©crans, des pages et des places publiques, pour dire merci. Merci pour le soleil â le soleil est sacrĂ©. Merci pour la lune, pour les oiseaux migrateurs dans le ciel de RiviĂšre-au-Tonnerre, pour les grandes marĂ©es Ă l'Ăźle Verte, pour les fleurs sauvages. Merci pour le saumon dans la fosse. Merci pour les chanterelles sous la robe de l'Ă©pinette bleue. Merci, Seigneur, pour la batture et ses odeurs. Ces lieux oĂč nous vivons des jours sont notre temple.
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Hugo Latulippe (Pour nous libérer les riviÚres)
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Spinoza pensait que Dieu Ă©tait la nature. Don Quichotte a dit du soleil qu'il Ă©tait le pĂšre de la poĂ©sie et l'inventeur de la musique. CervantĂšs voyait un lien de cause Ă effet entre le soleil et l'art. Entre la crĂ©ation et la crĂ©ation. J'Ă©prouve des sentiments semblables â d'euphorie ou de parfaite adĂ©quation â devant la beautĂ© sauvage comme devant certaines oeuvres. Pour moi, ces deux choses sont consanguines. De tout temps, les artistes se sont Ă©chinĂ©s Ă dĂ©coder cette parentĂ©. Ils se sont agenouillĂ©s sur des toiles, des scĂšnes, des Ă©crans, des pages et des places publiques, pour dire merci. Merci pour le soleil â le soleil est sacrĂ©. Merci pour la lune, pour les oiseaux migrateurs dans le ciel de RiviĂšre-au-Tonnerre, pour les grandes marĂ©es Ă l'Ăźle Verte, pour les fleurs sauvages. Merci pour le saumon dans la fosse. Merci pour les chanterelles sous la robe de l'Ă©pinette bleue. Merci, Seigneur, pour la batture et ses odeurs. Ces lieux oĂč nous vivons des jours sont notre temple.
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Hugo Latulippe (Pour nous libérer les riviÚres)
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On avance, comme saoulĂ©, on marche en perdant de temps en temps le souffle, on est un intrus qui s'obstine, qui cherche follement Ă se sentir de nouveau chez lui, dans ce temps et cet espace neufs, saturĂ©s, et qui vous refoulent. Vous ĂȘtes l'Ă©tranger, le dĂ©serteur, celui qui a fuit, qui ne sait plus oĂč en sont les oiseaux de leurs amours, de leurs fouilles, de leurs nids, oĂč en sont les branches, les vers, les salamandres. Vous vous ĂȘtes absentĂ© et tout a tellement progressĂ©, mĂ»ri, tout s'est tellement dĂ©ployĂ©, que vous vagabondez en exilĂ© parmi les mille commencements qui vous ont pris de vitesse, et qui vous dĂ©passent grandement.
Vous tombez assis sur une chaise qui ne vous reconnaĂźt plus, qui est d'un accueil rĂȘche et frisquet, vous surprend les fesses avec des rugositĂ©s de bois rĂ©cemment tourmentĂ© par de la pluie et du vent que vous n'avez pas connus. Vous soufflez difficultueusement, comme un convalescent Ă qui on a pĂ©rilleusement permis cette sortie aventureuse dans l'univers en fusion oĂč vous risquez d'aggraver votre souffrance, ce mal dont vous ignorez tout encore, et qui a quelque chose Ă voir avec votre absence, votre Ă©ternelle distraction, votre effrayant et inguĂ©rissable dĂ©sir d'ĂȘtre une crĂ©ature sĂ©parĂ©e, grandiose, unique, gagnante. Vous vous laissez brasser, secouer, venter. Vous rattraper lentement le morceau de saison perdu, vaille que vaille, vous revenez, et de loin, vous le savez bien. Mais d'oĂč? OĂč Ă©tiez-vous?
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Robert Lalonde (Le Monde sur le flanc de la truite)
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« Vous ne pouvez pas empĂȘcher les oiseaux noirs de voler au-dessus de vos tĂȘtes, mais vous pouvez les empĂȘcher de faire leur nid dans vos cheveux. » (proverbe chinois)
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Sophie Cariel (Méditer - Pourquoi, comment ? L'essentiel à savoir pour démarrer (et s'y tenir !) (French Edition))
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On ne tombe jamais deux fois dans le mĂȘme abĂźme. Mais on tomba toujours de la mĂȘme maniĂšre, dans un mĂ©lange de ridicule et d'effroi. Et on voudrait tant ne plus tomber qu'on s'arc-boute, on hurle. A coups de talon, on nous brise les doigts, Ă coups de bec on nous casse les dents, on nous ronge les yeux. L'abĂźme est bordĂ© de hautes demeures. Et l'Histoire est lĂ , dĂ©esse raisonnable, statue figĂ©e au milieu de la place des FĂȘtes, avec pour tribut, une fois l'an, des gerbes sĂ©chĂ©es de pivoines, et, en guise de pourboire, chaque jour, du pain pour les oiseaux.
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Vuillard
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Ton pÚre? Il est le dernier de cette race effrayante des Tournemine, qui durant les siÚcles, ont fondu comme des oiseaux de proie sur tout ce qui passait à portée de leurs tours (.....) Il ne lui restait rien de la puissance ni de l'énorme fortune qui faisaient dire, à certaine époque, que les messieurs de La Hunaudaye étaient seulement un peu moins grands seigneurs que le Roi de France. Il s'appelait Pierre ....
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Juliette Benzoni (Le Gerfaut (Le Gerfaut des brumes, #1))
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Si vous touchez trop un pinson, il deviendra un oiseau dĂ©primĂ©. Les pinsons ont Ă©tĂ© utilisĂ©s dans la "thĂ©orie de l'Ă©volution" de Darwin.â Le bec des pinsons a une forme conique et est trĂšs robuste.
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Michelle Hawkins (Finch: Des faits amusants sur les oiseaux pour les enfants #14 (French Edition))
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...le chant des oiseaux avait pratiquement disparu de la surface de la Terre. Des milliers de races d'oiseaux s'étaient éteintes progressivement, couvrant d'un silence mortuaire les aubes enchanteresses, silence aussitÎt comblé par le bruit des bétonneuses, des marteaux-piqueurs, des excavateurs, des grues de chantier, dans un tonnerre métallique quotidien au service de la construction, baromÚtre de la santé économique des nations et de ce qui s'ensuit, la croissance en général, et l'emploi en particulier, cet emploi source de toutes les justifications. Les oiseaux mouraient des tombereaux de produits chimiques déversés sur les prés, dans un vaste holocauste de matiÚres organiques et d'insectes. Les oiseaux aussi s'éteignaient aussi faute de place pour s'ébattre et se reproduire. La Bible, les humanistes avaient consacré l'intangibilité de la primauté de l'homme, de sa vie, de son confort sur toute autre espÚce.
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Marc Dugain (Transparence)
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J'ai vu l'éclipse totale d'une orange qu'on a retrouvée par la suite à demi-nue dans du mercure. J'ai aussi vu des corps immortels se liquéfier sur la place publique en apprenant la nouvelle de leur propre mort. J'ai aperçu au loin des volcans cracher de la moutarde. J'ai vu des parachutistes faire collision avec des oiseaux déréglés. J'ai vu bien des choses mais franchement non, je ne les ai pas vues, tes lunettes.
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Daniel BĂ©langer (Erreur d'impression)
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Au reste, les Germains ne croient pas que ce soit honorer les dieux, de les peindre comme des hommes, ou de les renfermer dans les temples; ils se contentent de leur consacrer des bois et des forĂȘts, dans l'obscuritĂ© desquels ils imaginent que rĂ©side la divinitĂ©. X. Ils sont fort adonnĂ©s aux augures et aux sorts, et n'y observent pas grande cĂ©rĂ©monie. Ils coupent une branche de quelque arbre fruitier en plusieurs piĂšces, et le marquent de certains caractĂšres. Ils les jettent ensuite, au hasard, sur un drap blanc. Alors le prĂȘtre, si c'est en public, ou le pĂšre de famille, si c'est dans quelque maison particuliĂšre, lĂšve chaque brin trois fois, aprĂšs avoir invoquĂ© les dieux, et les interprĂšte selon les caractĂšres qu'il y a faits. Si l'entreprise se trouve dĂ©fendue, ils ne passent point plus avant; car on ne consulte point deux fois sur un mĂȘme sujet, en un mĂȘme jour; mais si elle est approuvĂ©e, on jette le sort une seconde fois, pour en avoir la confirmation. Ils consultent aussi le vol et le chant des oiseaux: le hennissement des chevaux est encore pour eux un prĂ©sage trĂšs-assurĂ©. Ils en nourrissent de blancs dans leurs bois sacrĂ©s, et ils croiraient faire une profanation s'ils les employaient aux usages ordinaires.
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Anonymous
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Ordres
Ne piétinez pas les fourmiliÚres, ni les nids des oiseaux ne les cassez pas !
Ne dérangez pas les escargots dans leurs maisonnettes
roulottes ayant roulé et si péniblement portées !
Ne brisez pas les fleurs, ni les ailes des insectes,
Ne torturez pas les plus petits que vous ! â on nous disait
quand nous Ă©tions enfants.
La pluie dâobus dĂ©truit les petites mains de lâUNICEF
Ă©treignant la terre de maniĂšre protectrice.
De glaise tu as été pétri, à la glaise tu retourneras !
Les missiles font exploser les traités de paix !
Je veux des fleurs au printemps!
Quelque part, je pense que Dieu nâest pas mort,
mais quâil attend simplement le score du combat entre le Bien et le Mal.
(p. 31)
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Indira SpÄtaru (Poeme glazurate Èi cafea/ PoĂšmes Ă enrobage et cafĂ©)
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Câest lâheure de la promenade. Lâheure que Laurent attend chaque jour avec impatience. Lâheure qui lui permet de voir le ciel, dâentendre la vie Ă lâextĂ©rieur, pas le chant des oiseaux, mais le bruissement du vent dans les quelques arbres rachitiques de la cour, les bruits de circulation, parfois la cloche de lâĂ©glise. Lâheure qui lui permet de mesurer les Ă©carts de tempĂ©rature, sensibles dâun jour sur lâautre.
(p. 15)
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StĂ©phanie Castillo-Soler (Libres dans leurs tĂȘtes)