Bien Fait Quotes

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Wanted, wanted: Dolores Haze. Hair: brown. Lips: scarlet. Age: five thousand three hundred days. Profession: none, or "starlet" Where are you hiding, Dolores Haze? Why are you hiding, darling? (I Talk in a daze, I walk in a maze I cannot get out, said the starling). Where are you riding, Dolores Haze? What make is the magic carpet? Is a Cream Cougar the present craze? And where are you parked, my car pet? Who is your hero, Dolores Haze? Still one of those blue-capped star-men? Oh the balmy days and the palmy bays, And the cars, and the bars, my Carmen! Oh Dolores, that juke-box hurts! Are you still dancin', darlin'? (Both in worn levis, both in torn T-shirts, And I, in my corner, snarlin'). Happy, happy is gnarled McFate Touring the States with a child wife, Plowing his Molly in every State Among the protected wild life. My Dolly, my folly! Her eyes were vair, And never closed when I kissed her. Know an old perfume called Soliel Vert? Are you from Paris, mister? L'autre soir un air froid d'opera m'alita; Son fele -- bien fol est qui s'y fie! Il neige, le decor s'ecroule, Lolita! Lolita, qu'ai-je fait de ta vie? Dying, dying, Lolita Haze, Of hate and remorse, I'm dying. And again my hairy fist I raise, And again I hear you crying. Officer, officer, there they go-- In the rain, where that lighted store is! And her socks are white, and I love her so, And her name is Haze, Dolores. Officer, officer, there they are-- Dolores Haze and her lover! Whip out your gun and follow that car. Now tumble out and take cover. Wanted, wanted: Dolores Haze. Her dream-gray gaze never flinches. Ninety pounds is all she weighs With a height of sixty inches. My car is limping, Dolores Haze, And the last long lap is the hardest, And I shall be dumped where the weed decays, And the rest is rust and stardust.
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Vladimir Nabokov (Lolita)
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Ma jeunesse ne fut qu'un ténébreux orage, Traversé çà et là par de brillants de soleils; Le tonnerre et la pluie ont fait un tel ravage, Qu'il reste en mon jardin bien peu de fruits vermeils.
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Charles Baudelaire (Les Fleurs du Mal)
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Il dort. Quoique le sort fût pour lui bien étrange, Il vivait. Il mourut quand il n'eut plus son ange. La chose simplement d'elle-même arriva, Comme la nuit se fait lorsque le four s'en va.
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Victor Hugo (Les Misérables)
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Un sueño roto bien pegado puede volverse aún más bello y sólido. Hasta el punto de hacer añicos los límites de lo real.
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Mathias Malzieu (Maintenant qu'il fait tout le temps nuit sur toi)
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Il dort. Quoique le sort fut pour lui bien étrange, Il vivait. Il mourut quand il n’eut plus son ange. La choise simplement d’elle-même arriva. Comme la nuit se fait lorsque le jour s’en va. He is asleep. Though his mettle was sorely tried, He lived, and when he lost his angel, died. It happened calmly, on its own. The way night comes when day is done.
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Victor Hugo (Les Misérables)
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Avancer. M'appuyer sur ce que j'ai vécu. Sur ce que j'ai fait. Bien et mal. Sur mes forces et mes faiblesses. Mes joies et mes regrets. Mes remords. Avancer.
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Pierre Bottero (Les Âmes croisées)
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Il est démontré, disait-il, que les choses ne peuvent être autrement; car tout étant fait pour une fin, tout est nécessairement pour la meilleure fin. Remarquez bien que les nez ont été faits pour porter des lunettes; aussi avons-nous des lunettes
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Voltaire (Candide)
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Pour le voir, il faut bien regarder, chercher. Je dis aux jeunes: cherchez un peu, vous allez trouver. La pire des attitudes est l'indifférence, dire «je n'y peux rien, je me débrouille». En vous comportant ainsi, vous perdez l'une des composantes essentielles qui fait l'humain. Une des composantes indispensables: la faculté d'indignation et l'engagement qui en est la conséquence.
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Stéphane Hessel (Indignez-vous !)
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Jette mon livre; dis-toi bien que ce n'est là qu'une des mille postures possibles en face de la vie. Cherche la tienne. Ce qu'un autre aurait aussi bien fait que toi, ne le fais pas. Ce qu'un autre aurait aussi bien dit que toi, ne le dis pas, -- aussi bien écrit que toi, ne l'écris pas. Ne t'attache en toi qu'à ce que tu sens qui n'est nulle part ailleurs qu'en toi-même, et crée de toi, impatiemment ou patiemment, ah! le plus irremplaçable des êtres.
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André Gide
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Une tĂŞte bien faite et une tĂŞte bien pleine (kepala yang baik adalah kepala yang penuh dengan ilmu pengetahuan
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François Rabelais
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As-tu déjà été amoureux? C'est horrible non? Ca rend si vulnérable. Ca t'ouvre la poitrine et le coeur en grand et du coup, n'importe qui peut venir te bousiller de l'intérieur. On se forge des défenses, on se fabrique une belle armure pour que rien ne puisse jamais nous atteindre, et voilà qu'un imbécile, pas bien différent des autres s'immisce dans notre imbécile de vie... On lui offre un morceau de soi alors que l'autre n'a rien demandé. Il a juste fait un truc débile un jour, genre t'embrasser ou te sourire, mais, depuis, ta vie ne t'appartient plus. L'amour te prend en otage. Il s'insinue en toi. Il te dévore de l'intérieur et te laisse tout seul à chialer dans le noir, au point qu'un simple phrase comme "je crois qu'on devrait rester amis" te fait l'effet d'un éclat de verre qu'on t'aurait planté dans le coeur. Ca fait mal. Pas juste dans ton imagination. Pas juste dans ta tête. C'est une douleur à fendre l'âme, qui s'incruste en toi et te déchire du dedans. Je hais l'amour.
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Neil Gaiman (The Sandman, Vol. 9: The Kindly Ones)
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Adieu, dit-il… - Adieu, dit le renard. Voici mon secret. Il est très simple : on ne voit bien qu’avec le coeur. L’essentiel est invisible pour les yeux. - L’essentiel est invisible pour les yeux, répéta le petit prince, afin de se souvenir. - C’est le temps que tu a perdu pour ta rose qui fait ta rose si importante. - C’est le temps que j’ai perdu pour ma rose… fit le petit prince, afin de se souvenir. - Les hommes ont oublié cette vérité, dit le renard. Mais tu ne dois pas l’oublier. Tu deviens responsable pour toujours de ce que tu as apprivoisé. Tu es responsable de ta rose… - Je suis responsable de ma rose… répéta le petit prince, afin de se souvenir.
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Antoine de Saint-Exupéry (The Little Prince)
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Lee, sueña, descansa, diviértete. No cedas a la desesperación. Usa tus sueños. Y si están rotos, ¡pégalos! Un sueño roto bien pegado puede volverse aún más bello de lo que era. Ama las cosas. ¡Estás vivo! Y lucha solo: de ahí saldrá tu fuerza interior
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Mathias Malzieu (Maintenant qu'il fait tout le temps nuit sur toi)
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Il est coupable de tout le bien qu'il ne fait pas.
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Voltaire (Le Siècle de Louis XIV)
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On s'ennuie de tout, mon ange, c'est une loi de la nature; ce n'est pas ma faute. Si donc, je m'ennuie aujourd'hui d'une aventure qui m'a occupé entièrement depuis quatre mortels mois, ce n'est pas ma faute. Si, par exemple, j'ai eu juste autant d'amour que toi de vertu, et c'est surement beaucoup dire, il n'est pas étonnant que l'un ait fini en même temps que l'autre. Ce n'est pas ma faute. Il suit de là, que depuis quelque temps je t'ai trompée: mais aussi ton impitoyable tendresse m'y forçait en quelque sorte! Ce n'est pas ma faute. Aujourd'hui, une femme que j'aime éperdument exige que je te sacrifie. Ce n'est pas ma faute. Je sens bien que voilà une belle occasion de crier au parjure: mais si la Nature n'a accordé aux hommes que la constance, tandis qu'elle donnait aux femmes l'obstination, ce n'est pas ma faute. Crois-moi, choisis un autre amant, comme j'ai fait une maîtresse. Ce conseil est bon, très bon; si tu le trouve mauvais, ce n'est pas ma faute. Adieu, mon ange, je t'ai prise avec plaisir, je te quitte sans regrets: je te reviendrai peut-être. Ainsi va le monde. Ce n'est pas ma faute.
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Pierre Choderlos de Laclos (Les liaisons dangereuses)
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Vous êtes tout les deux les personnes que j'ai le plus aimées au monde et j'ai fait de mon mieux possible, croyez-le. Serrez bien contre vous vos beaux enfants. Lucile PS : [...] Je sais bien que ça va vous faire de la peine mais c'est inéluctable à plus ou moins de temps et je préfère mourir vivante.
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Delphine de Vigan (Rien ne s'oppose Ă  la nuit)
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Elle savait que tout irait bien désormais.Car là où on s'aime, il ne fait jamais nuit.
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Guillaume Musso (Parce que je t'aime)
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Il faut qu'il ait tué bien des gens pour s'être fait si riche.
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Molière (Le Malade imaginaire)
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Voilà peut-être ce qu'il faudrait accepter: on ne fait que passer. Et quand bien même l'amour, le combat, la souffrance à en devenir fou... De tout ça un jour il ne reste rien
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Laurence Tardieu (Puisque rien ne dure)
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A tout moment, des phoques émergent et fixent la rive. Ils contrôlent que le monde est toujours en place, vérifient qu'ils ont bien fait de choisir les profondeurs.
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Sylvain Tesson (Dans les forêts de Sibérie)
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Non, moi j'crois qu'il faut qu’vous arrêtiez d'essayer d'dire des trucs. Ça vous fatigue, déjà, et pour les autres, vous vous rendez pas compte de c'que c'est. Moi quand vous faites ça, ça me fout une angoisse... j'pourrais vous tuer, j'crois. De chagrin, hein ! J'vous jure c'est pas bien. Il faut plus que vous parliez avec des gens. (Arthur à Perceval)
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Alexandre Astier (Kaamelott, livre 1, première partie : Épisodes 1 à 50)
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À une passante La rue assourdissante autour de moi hurlait.
 Longue, mince, en grand deuil, douleur majestueuse,
 Une femme passa, d'une main fastueuse
 Soulevant, balançant le feston et l'ourlet; Agile et noble, avec sa jambe de statue.
 Moi, je buvais, crispé comme un extravagant,
 Dans son oeil, ciel livide où germe l'ouragan,
 La douceur qui fascine et le plaisir qui tue. Un éclair . . . puis la nuit! — Fugitive beauté 
 Dont le regard m'a fait soudainement renaître,
 Ne te verrai-je plus que dans l'éternité? Ailleurs, bien loin d'ici! trop tard! jamais peut-être!
 Car j'ignore où tu fuis, tu ne sais où je vais,
 Ô toi que j'eusse aimée, ô toi qui le savais!
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Charles Baudelaire (Les Fleurs du Mal)
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Le vieillard: Maintenant... vous voyez aussi les morts. Pierre: Comment les distingue-t-on des vivants? Le vieillard: C'est bien simple: les vivants, eux, sonts toujours pressés.
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Jean-Paul Sartre (Les jeux sont faits)
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Ta voix, tes yeux, tes mains, tes lèvres, Nos silences, nos paroles, La lumière qui s’en va, la lumière qui revient, Un seul sourire pour nous deux, Par besoin de savoir, j’ai vu la nuit créer le jour sans que nous changions d’apparence, Ô bien-aimé de tous et bien-aimé d’un seul, En silence ta bouche a promis d’être heureuse, De loin en loin, ni la haine, De proche en proche, ni l’amour, Par la caresse nous sortons de notre enfance, Je vois de mieux en mieux la forme humaine, Comme un dialogue amoureux, le cœur ne fait qu’une seule bouche Toutes les choses au hasard, tous les mots dits sans y penser, Les sentiments à la dérive, les hommes tournent dans la ville, Le regard, la parole et le fait que je t’aime, Tout est en mouvement, il suffit d’avancer pour vivre, D’aller droit devant soi vers tout ce que l’on aime, J’allais vers toi, j’allais sans fin vers la lumière, Si tu souris, c’est pour mieux m’envahir, Les rayons de tes bras entrouvraient le brouillard.
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Paul Éluard
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Voyager, c'est bien utile, ça fait travailler l'imagination. Tout le reste n'est que déceptions et fatigues. Notre voyage à nous est entièrement imaginaire. Voilà sa force. Il va de la vie à la mort. Hommes, bêtes, villes et choses, tout est imaginé. C'est un roman, rien qu'une histoire fictive. Littré le dit, qui ne se trompe jamais. Et puis d'abord tout le monde peut en faire autant. Il suffit de fermer les yeux. C'est de l'autre côté de la vie.
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Louis-Ferdinand CĂ©line (Voyage au bout de la nuit)
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Sophie, gare-toi et suis-le à pied. — Quoi ? Mais t’es malade ! — Si j’y vais et qu’il tombe sur moi, je suis fichue. — Alors que moi, au mieux, il va me prendre pour une prostituée de la cordillère des Andes qui fait le tapin en attendant une éclipse. Merci bien.
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Gilles Legardinier (Demain j'arrĂŞte!)
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El gigante me dijo que los libros eran instrumentos para luchar contra la noche" "Un sueño roto bien pegado puede volverse aún más bello y sólido" "Porque aunque la muerte te quite el tacto y el aparato digestivo entre otras cosas, la memoria permanece intacta. Los muertos se acuerdan muy bien de lo que podían sentir cuando vivían
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Mathias Malzieu (Maintenant qu'il fait tout le temps nuit sur toi)
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Si vous voulez vraiment le savoir, j'aurais préféré ne jamais être né. La vie, je trouve ca bien fatigant. Bien sur, à présent la chose est faite, et je ne peux rien y changer. Mais il y a toujours au fond de moi ce regret, que je n'ariverai pas à chasser complètement, et qui gâchera tout. Maintenant, il s'agit de vieillir vite, d'avaler les années le plus vite possible, sans regarder à gauche ni à droit
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J.M.G. Le Clézio (Fever)
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Si nous ne nous conduisons pas tout à fait bien, c’est parce qu’il nous reste, à tous, une vague petite notion de devoir au fond de notre désordre qui fait que nous n’avons pas le courage de nous conduire tout à fait mal.
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Jean Anouilh (Pièces Grinçantes : Ardèle ; La Valse Des Toréadors ; Ornifle ; Pauvre Bitos)
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- Peut-être, dit Athos; mais, en tout cas, écoutez bien ceci: assassinez ou faites assassiner le duc de Buckingham, peut m'importe! je ne le connais pas, d'ailleurs c'est un Anglais; mais ne touchez pas du bout du doigt à un seul cheveux de d'Artagnan, qui est un fidèle ami qu j'aime et que je défends, ou je vous le jure sur la tête de mon père, le crime que vous aurez commis sera le dernier.
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Alexandre Dumas (Les Trois Mousquetaires)
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- Dites-moi juste un truc : Ma Dalton, qui m'a ouvert... Elle joue avec vous ? - Non, elle fait des crêpes. - Ah, c'est bien aussi. C'est important, les crêpes, quand on répète.
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Anne Percin (Comment devenir une rock star (ou pas))
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je suis une ombre dans ta vie,tu es bien plus que ça dans la mienne et ça me fait du mal
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Marc Levy (Le Voleur d'ombres)
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Chaque fois qu’on évoque un souvenir et qu’on se dit « c’était bien », c’est en fait notre cerveau malade qui distille de la nostalgie pour nous persuader que ce que nous avons vécu n’a pas été vain, que nous n’avons pas perdu notre temps. Parce que perdre son temps, c’est perdre sa vie.
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Joël Dicker (L'Affaire Alaska Sanders)
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- Vous avez lu tous ces livres ? j'ai demandé. - Oui. Certains plusieurs fois, même. Ce sont les grands amours de ma vie. Ils me font rire, pleurer, douter, réfléchir. Ils me permettent de m'échapper. Ils m'ont changée, ont fait de moi une autre personne. - Un livre peut nous changer ? - Bien sûr, un livre peut te changer ! Et même changer ta vie. Comme un coup de foudre. Et on ne peut pas savoir quand la encontre aura lieu. Il faut se méfier des livres, ce sont des génies endormis.
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Gaël Faye (Petit pays)
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Elle se mordit la langue quand Thorn pressa sa bouche contre la sienne. Sur le moment, elle ne comprit plus rien. Elle sentit sa barbe lui piquer le menton, son odeur de désinfectant lui monter à la tête, mais la seule pensée qui la traversa, stupide et évidente, fut quenelle avait une botte plantée dans son tibia. Elle voulut se reculer; Thorn l’en empêcha. Il referma ses mains de part et d’autre de son visage, les doigts dans ses cheveux, prenant appui sur sa nuque avec une urgence qui les déséquilibra tous les deux. La bibliothèque déversa une pluie de documents sur eux. Quand Thorn s’écarte finalement, le souffle court, ce fut pour clouer un regard de fer dans ses lunettes. - je vous préviens. Les mots que vous m’avez dits, je ne vous laisserai pas revenir dessus. Sa voix était âpre, mais sous l’autorité des paroles il y avait comme une fêlure. Ophélie pouvait percevoir le pouls précipité des mains qu’il appuyait maladroitement sur ses joues. Elle devait reconnaître que son propre cœur jouait à la balançoire. Thorn était sans doute l’homme le plus déconcertant qu’elle avait jamais rencontré, mais il l’a faisait se sentir formidablement vivante. - je vous aime, répéta-y-elle d’un ton inflexible. C’est ce que j’aurais du vous répondre quand vous vouliez connaître la raison de ma présence à Babel c’est ce que j’en aurais du vous répondre chaque fois que vous vouliez savoir ce que j’en avais vraiment à vous dire. Bien sûr que je désire percer les mystères de Dieu et reprendre le contrôle de ma vie, mais... vous faites partie de ma vie, justement. Je vous ai traité d’égoïste et à aucun moment je ne me suis mise, moi, à votre place. Je vous demande pardon. 
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Christelle Dabos (La MĂ©moire de Babel (La Passe-Miroir, #3))
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Stop. J'en suis sorti. Des souvenirs. Du passé. Mais tôt ou tard les choses que tu as laissé derrière toi te rattrapent. Et les choses les plus simples, quand tu es amoureux, te semblent les plus belles. Parce que leur simplicité n'a pas d'égal. Et j'ai envie de crier. Dans ce silence qui fait mal. Stop. Laisse tomber. Reprends-toi. Voilà. Fermé. A double tour. Au fond du cœur, bien au fond. Dans ce jardin. Quelques fleurs, un peu d'ombre et puis la douleur. Mets-les là, cache les bien surtout, là où personne ne peut les voir. Là où toi tu ne peux pas les voir.
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Federico Moccia (Ho voglia di te (Tre metri sopra il cielo #2))
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Oh! tout ce que nous n'avons point fait et que pourtant nous aurions pu faire...penseront-ils, sur le point de quitter la vie. - Tout ce que nous aurions dû faire et que pourtant nous n'avons point fait! par souci des considérants, par temporisation, par paresse, et pour s'être trop dit: "Bah! nous aurons toujours le temps." Pour n'avoir pas saisi le chaque jour irremplaçable, l'irretrouvable chaque instant. Pour avoir remis à plus tard la décision, l'effort, l'étreinte... L'heure qui passe est bien passée? -Oh! toi qui viendras, penseront-ils, sois plus habile: Saisis l'instant!
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André Gide
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C'est seulement à partir de ce moment que je commençai à comprendre (ce que taisent la plupart du temps les écrivains) que les malades, les estropiés, les gens laids, fanés, flétris, les êtres physiquement inférieurs aiment au contraire avec plus de passion et de violence, que les gens heureux et bien portants ; ils aiment d'un amour fanatique, sombre, aucune passion sur terre n'est plus violente et avide que celle de ces désespérés, de ces bâtards de Dieu qui ne trouvent que dans l'amour d'autrui et pour autrui leur raison de vivre. Le fait que c'est précisément de l'abîme le plus profond de la détresse que s'élève le plus furieusement le cri panique du désir de vivre, ce terrible secret, jamais, dans mon inexpérience, je ne l'avais soupçonné. Et c'est seulement en cette minute qu'il avait pénétré en moi comme un fer brûlant.
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Stefan Zweig (Beware of Pity)
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je finirai bien par te rencontrer quelque part bon dieu! et contre tout ce qui me rend absent et douloureux par le mince regard qui me reste au fond du froid j'affirme ô mon amour que tu existes je corrige notre vie nous n'irons plus mourir de langueur à des milles de distance dans nos rêves bourrasques des filets de sang dans la soif craquelée de nos lèvres les épaules baignées de vols de mouettes non j'irai te chercher nous vivrons sur la terre la détresse n'est pas incurable qui fait de moi une épave de dérision, un ballon d'indécence un pitre aux larmes d'étincelles et de lésions profondes frappe l'air et le feu de mes soifs coule-moi dans tes mains de ciel de soie la tête la première pour ne plus revenir
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Gaston Miron (L'Homme rapaillé)
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ah ! tu m'as appris à comprendre bien des choses ! le visage d'une jeune fille, d'une femme, est forcément pour un homme un objet extrêmement variable ; le plus souvent, il n'est qu'un miroir, où se reflète tantôt une passion, tantôt un enfantillage, tantôt une lassitude, et il s'efface si vite, comme une image dans une glace, qu'un homme peut sans difficulté oublier le visage d'une femme, d'autant mieux que l'âge y fait alterner l'ombre et la lumière et que des costumes nouveaux l'encadrent différemment.
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Stefan Zweig (Letter from an Unknown Woman and Other Stories)
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La vie est un voyage solitaire et, être mariée n'y change rien. D'ailleurs je pense que le fait de ressentir cette solitude avec la même intensité alors qu'en théorie on est deux est une souffrance encore plus cruelle. Il y a un facteur chance à l'origine de chaque rencontre, après on gère comme on peut ce que la vie nous donne. Or, c'est bien connu, la vie est injuste et, en plus elle a un goût douteux.
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Agathe Colombier Hochberg (Ce crétin de prince charmant)
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Je suis une ombre dans ta vie, tu es bien plus que ça dans la mienne et ça me fait mal. […] Pourquoi m’avoir laissée entrer dans ta vie si ce n’était qu’en simple visiteuse ? J’ai pensé cent fois te quitter, mais je n’y arrive pas toute seule. Alors je te demande un service, fais-le pour nous, ou si tu crois que nous avons quelque chose à partager, même si ce n’est que pour un temps, donne-nous vraiment les moyens de vivre cette histoire.
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Marc Levy (Le Voleur d'ombres)
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Le mariage pour moi n'est pas une chaîne, mais une association. J'entends être libre, tout à fait libre de mes actes, de mes démarches, de mes sorties, toujours. Je ne pourrais tolérer ni contrôle, ni jalousie, ni discussion sur ma conduite. Je m'engagerais, bien entendu, à ne jamais compromettre le nom de l'homme que j'aurais épousé, à ne jamais le rendre odieux ou ridicule. Mais il faudrait aussi que cet homme s'engageât à voir en moi une égale, une alliée, et non pas une inférieure ni une épouse obéissante et soumise. Mes idées, je le sais, ne sont pas celles de tout le monde, mais je n'en changerai point. Voilà.
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Guy de Maupassant
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L'histoire des théologies nous montre que les chefs religieux ont toujours affirmé qu'au moyen de rituels, que par des répétitions de prières ou de mantras, que par l'imitation de certains comportements, par le refoulement des désirs, par des disciplines mentales et la sublimation des passions, que par un frein, imposé aux appétits, sexuels et autres, on parvient après s'être suffisamment torturé l'esprit et le corps, à trouver un quelque-chose qui transcende cette petite vie. Voilà ce que des millions de personnes soi-disant religieuses ont fait au cours des âges ; soit en s'isolant, en s'en allant dans un désert, sur une montagne ou dans une caverne ; soit en errant de village en village avec un bol de mendiant ; ou bien en se réunissant en groupes, dans des monastères, en vue de contraindre leur esprit à se conformer à des modèles établis.
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J. Krishnamurti (Freedom from the Known)
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Vous avez simplement cherché à ne pas faire comme les autres femmes, et ma foi vous n'avez pas mal réussi. Comme je vous l'ai déjà dit, la société ne veut pas qu'on se singularise. C'est le seul péché qu'elle ne pardonne pas. Maudit soit celui qui est différent des autres. Et puis, Scarlett, le seul fait que votre scierie marche bien est une injure à tout homme dont les affaires périclitent. Rappelez-vous qu'une femme bien élevée doit rester à son foyer et ignorer ce qui se passe dans le monde brutal des gens laborieux.
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Margaret Mitchell (Gone with the Wind)
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Je condamne l'ignorance qui règne en ce moment dans les démocraties aussi bien que dans les régimes totalitaires. Cette ignorance est si forte, souvent si totale, qu'on la dirait voulue par le système, sinon par le régime. J'ai souvent réfléchi à ce que pourrait être l'éducation de l'enfant. Je pense qu'il faudrait des études de base, très simples, où l'enfant apprendrait qu'il existe au sein de l'univers, sur une planète dont il devra plus tard ménager les ressources, qu'il dépend de l'air, de l'eau, de tous les êtres vivants, et que la moindre erreur ou la moindre violence risque de tout détruire. Il apprendrait que les hommes se sont entre-tués dans des guerres qui n'ont jamais fait que produire d'autres guerres, et que chaque pays arrange son histoire, mensongèrement, de façon à flatter son orgueil. On lui apprendrait assez du passé pour qu'il se sente relié aux hommes qui l'ont précédé, pour qu'il les admire là où ils méritent de l'être, sans s'en faire des idoles, non plus que du présent ou d'un hypothétique avenir. On essaierait de le familiariser à la fois avec les livres et les choses ; il saurait le nom des plantes, il connaîtrait les animaux sans se livrer aux hideuses vivisections imposées aux enfants et aux très jeunes adolescents sous prétexte de biologie ; il apprendrait à donner les premiers soins aux blessés ; son éducation sexuelle comprendrait la présence à un accouchement, son éducation mentale la vue des grands malades et des morts. On lui donnerait aussi les simples notions de morale sans laquelle la vie en société est impossible, instruction que les écoles élémentaires et moyennes n'osent plus donner dans ce pays. En matière de religion, on ne lui imposerait aucune pratique ou aucun dogme, mais on lui dirait quelque chose de toutes les grandes religions du monde, et surtout de celles du pays où il se trouve, pour éveiller en lui le respect et détruire d'avance certains odieux préjugés. On lui apprendrait à aimer le travail quand le travail est utile, et à ne pas se laisser prendre à l'imposture publicitaire, en commençant par celle qui lui vante des friandises plus ou moins frelatées, en lui préparant des caries et des diabètes futurs. Il y a certainement un moyen de parler aux enfants de choses véritablement importantes plus tôt qu'on ne le fait. (p. 255)
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Marguerite Yourcenar (Les Yeux ouverts : Entretiens avec Matthieu Galey)
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Le jour où je me suis aimé pour de vrai, J’ai compris qu'en toutes circonstances, J’étais à la bonne place, au bon moment. Et alors, j'ai pu me relaxer. Aujourd'hui je sais que cela s'appelle... l'Estime de soi. Le jour où je me suis aimé pour de vrai, J’ai pu percevoir que mon anxiété et ma souffrance émotionnelle N’étaient rien d'autre qu'un signal Lorsque je vais à l'encontre de mes convictions. Aujourd'hui je sais que cela s'appelle... l'Authenticité. Le jour où je me suis aimé pour de vrai, J'ai cessé de vouloir une vie différente Et j'ai commencé à voir que tout ce qui m'arrive Contribue à ma croissance personnelle. Aujourd'hui, je sais que cela s'appelle... la Maturité. Le jour où je me suis aimé pour de vrai, J’ai commencé à percevoir l'abus Dans le fait de forcer une situation ou une personne, Dans le seul but d'obtenir ce que je veux, Sachant très bien que ni la personne ni moi-même Ne sommes prêts et que ce n'est pas le moment... Aujourd'hui, je sais que cela s'appelle... le Respect. Le jour où je me suis aimé pour de vrai, J’ai commencé à me libérer de tout ce qui n'était pas salutaire, personnes, situations, tout ce qui baissait mon énergie. Au début, ma raison appelait cela de l'égoïsme. Aujourd'hui, je sais que cela s'appelle... l'Amour propre. Le jour où je me suis aimé pour de vrai, J’ai cessé d'avoir peur du temps libre Et j'ai arrêté de faire de grands plans, J’ai abandonné les méga-projets du futur. Aujourd'hui, je fais ce qui est correct, ce que j'aime Quand cela me plait et à mon rythme. Aujourd'hui, je sais que cela s'appelle... la Simplicité. Le jour où je me suis aimé pour de vrai, J’ai cessé de chercher à avoir toujours raison, Et je me suis rendu compte de toutes les fois où je me suis trompé. Aujourd'hui, j'ai découvert ... l'Humilité. Le jour où je me suis aimé pour de vrai, J’ai cessé de revivre le passé Et de me préoccuper de l'avenir. Aujourd'hui, je vis au présent, Là où toute la vie se passe. Aujourd'hui, je vis une seule journée à la fois. Et cela s'appelle... la Plénitude. Le jour où je me suis aimé pour de vrai, J’ai compris que ma tête pouvait me tromper et me décevoir. Mais si je la mets au service de mon coeur, Elle devient une alliée très précieuse ! Tout ceci, c'est... le Savoir vivre. Nous ne devons pas avoir peur de nous confronter. Du chaos naissent les étoiles.
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Charlie Chaplin
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Très bien, on verra tout ça ce soir, se dit-il, convaincu d'être un égoïste, mais averti par l'usage que les gens qui vous quittent vraiment ne prennent jamais la peine de vous en avertir par une lettre de six pages. Ceux-là s'éclipsent sans parler, et c'est comme ça qu'avait fait la petite chérie. Et ceux qui déambulent en laissant dépasser la crosse d'un pistolet hors de leur poche ne se tuent jamais [...]
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Fred Vargas (L'homme aux cercles bleus (Commissaire Adamsberg, #1))
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En fait, au XVème siècle, en Transylvanie, pendant la guerre contre les Ottomans, j'ai vraiment rencontré Vlad l'Empaleur, qui a inspiré le personnage mythique de Dracula, et qui n'a jamais eu les terribles canines que la légende lui attribue. Au contraire, une visite chez le dentiste lui aurait fait le plus grand bien : il avait les dents pourries, et une haleine des plus fétides. Et ce n'était pas un vampire, tout juste un catholique fanatique, doté d'un penchant fétichiste pour la décapitation, qui m'avait proposé une promenade dans sa calèche. J'ai le chic pour attirer les hommes qui sortent de l'ordinaire.
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Christopher Pike
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Mais la connaissance du passé rendu vivant et présent, où la trouve-t-on ? Eh bien, avant tout, dans la littérature ! Et là est à mes yeux la merveille. On la trouve dans les textes français et étrangers, modernes et anciens. Aussi cela me paraît-il une erreur très grave que de représenter l’enseignement de la littérature comme une espèce d’élégance superflue et gratuite. En fait, c’est grâce à la littérature que se forme presque toute notre idée de la vie ; le détour par les textes conduit directement à la formation de l’homme. Ils nous apportent les analyses et les idées, mais aussi les images, les personnages, les mythes, et les rêves qui se sont succédé dans l’esprit des hommes ; ils nous ont un jour émus parce qu’ils étaient exprimés ou décrits avec force ; et c’est de cette expérience que se nourrit la nôtre.
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Jacqueline de Romilly
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Et que faudrait-il faire ? Chercher un protecteur puissant, prendre un patron, Et comme un lierre obscur qui circonvient un tronc Et s'en fait un tuteur en lui léchant l'écorce, Grimper par ruse au lieu de s'élever par force ? Non, merci ! Dédier, comme tous ils le font, Des vers aux financiers ? se changer en bouffon Dans l'espoir vil de voir, aux lèvres d'un ministre, Naître un sourire, enfin, qui ne soit pas sinistre ? Non, merci ! Déjeuner, chaque jour, d'un crapaud ? Avoir un ventre usé par la marche ? une peau Qui plus vite, à l'endroit des genoux, devient sale ? Exécuter des tours de souplesse dorsale ?... Non, merci ! D'une main flatter la chèvre au cou Cependant que, de l'autre, on arrose le chou, Et donneur de séné par désir de rhubarbe, Avoir son encensoir, toujours, dans quelque barbe ? Non, merci ! Se pousser de giron en giron, Devenir un petit grand homme dans un rond, Et naviguer, avec des madrigaux pour rames, Et dans ses voiles des soupirs de vieilles dames ? Non, merci ! Chez le bon éditeur de Sercy Faire éditer ses vers en payant ? Non, merci ! S'aller faire nommer pape par les conciles Que dans des cabarets tiennent des imbéciles ? Non, merci ! Travailler à se construire un nom Sur un sonnet, au lieu d'en faire d'autres ? Non, Merci ! Ne découvrir du talent qu'aux mazettes ? Être terrorisé par de vagues gazettes, Et se dire sans cesse : "Oh ! pourvu que je sois Dans les petits papiers du Mercure François" ?... Non, merci ! Calculer, avoir peur, être blême, Préférer faire une visite qu'un poème, Rédiger des placets, se faire présenter ? Non, merci ! non, merci ! non, merci ! Mais... chanter, Rêver, rire, passer, être seul, être libre, Avoir l'œil qui regarde bien, la voix qui vibre, Mettre, quand il vous plaît, son feutre de travers, Pour un oui, pour un non, se battre, - ou faire un vers ! Travailler sans souci de gloire ou de fortune, À tel voyage, auquel on pense, dans la lune ! N'écrire jamais rien qui de soi ne sortît, Et modeste d'ailleurs, se dire : mon petit, Sois satisfait des fleurs, des fruits, même des feuilles, Si c'est dans ton jardin à toi que tu les cueilles ! Puis, s'il advient d'un peu triompher, par hasard, Ne pas être obligé d'en rien rendre à César, Vis-à-vis de soi-même en garder le mérite, Bref, dédaignant d'être le lierre parasite, Lors même qu'on n'est pas le chêne ou le tilleul, Ne pas monter bien haut, peut-être, mais tout seul !
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Edmond Rostand (Cyrano de Bergerac)
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Don Juan : [...] Les voilà, mes spectres, les spectres de ce que je ne suis pas. Ce sont eux qui me persécutent et m'écoeurent, et qui me survivront. Ils vivront, car il sont le mensonge. Mais si je dois payer ma vie au prix de toutes les sottises et de tous les mensonges qu'on aura dits sur moi, peut-être vaudrait-il mieux n'avoir pas vécu. Je vais changer d'habit et mettre mon beau costume. Il faut être bien vêtu quand on va être arrêté.
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Henry de Montherlant (La Mort qui fait le trottoir [Don Juan])
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Alors, il ne reste plus qu’une seule hypothèse acceptable : c’est que la science d’Idris est bien vraiment cachée dans la Pyramide, mais parce qu’elle se trouve incluse dans sa structure même, dans sa disposition extérieure et intérieure et dans ses proportions ; et tout ce qu’il peut y avoir de valable dans les «découvertes» que les modernes ont faites ou cru faire à ce sujet ne représente en somme que quelques fragments infimes de cette antique science traditionnelle.
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René Guénon (Traditional Forms and Cosmic Cycles (Collected Works of Rene Guenon))
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Et l'amitié, qui est un sentiment plus sévère, plus solidement assis, puisqu'il repose sur tout ce qu'il y a de plus élevé en nous, la partie purement intellectuelle de nous-même. Quel bonheur de pouvoir dire tout ce que l'on sent à quelqu'un qui vous comprend jusqu'au bout et non pas seulement jusqu'à un certain point, à quelqu'un qui achève votre pensée avec le même mot qui était sur vos lèvres, dont la réplique fait jaillir de chez vous un torrent de conceptions, un flot d'idées. Un demi-mot de votre ami vous en dit plus que bien des phrases, car vous êtes habitué à penser avec lui. Vous comprenez tous les sentiments qui l'animent et il le sait. Vous êtes deux intelligences qui s'ajoutent et se complètent.
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Pierre Loti (Aziyadé : suivi de Fantôme d'Orient)
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Les amants, en effet, regrettent le bien qu’ils ont fait, une fois que leur désir est éteint. Ceux qui n’ont pas d’amour, au contraire, n’ont jamais occasion seyante au repentir, car ce n’est point par contrainte, mais librement, comme s’ils s’occupaient excellemment des biens de leurs demeures, qu’ils font, dans la mesure de leurs moyens, du bien à leurs amis. Les amants considèrent en outre, et les dommages que leur amour fit à leurs intérêts et les largesses qu’ils ont dû consentir ; puis, en y ajoutant la peine qu’ils ont eue, ils pensent depuis longtemps avoir déjà payé à leurs aimés le juste prix des faveurs obtenues. Par contre, ceux qui ne sont pas épris ne peuvent, ni prétexter les affaires négligées par amour, ni mettre en ligne de compte les souffrances passées, ni alléguer les différends familiaux qu’ils ont eus. Exempts de tous ces maux, il ne leur reste plus qu’à s’empresser de mettre en acte tout ce qu’ils croient devoir leur donner du plaisir.
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Plato (Phaedrus (Hackett Classics))
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Il n'était pas prêt à lui dire qu'il essayerait de tout son être d'être assez bien pour l'aider à élever un enfant. Il n'était pas prêt à lui dire qu'il était absolument terrifié à l'idée de reproduire les erreurs de son père et pas prêt à admettre qu'il avait peur d'échouer.Il ne connaissait pas les mots qui lui permettraient de lui dire qu'il ne voulait pas rentrer à la maison bourré et que ses enfants le fuient pour se cacher de lui comme lui l'avait fait avec son propre père. Il voulait l'épouser, passer sa vie à ses côtés, se vautrer dans sa bonté. Il ne pouvait s'imaginer de vie sans elle et il essayait de trouver un moyen de le lui dire, de lui montrer qu'il pouvait vraiment changer et qu'il pouvait être digne d'elle.
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Anna Todd (After Saison 1 Episode 5)
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Je te rencontre. Je me souviens de toi. Cette ville était faite à la taille de l'amour. Tu étais fait à la taille de mon corps même. Qui es-tu ? Tu me tues. J'avais faim. Faim d'infidélités, d'adultères, de mensonges et de mourir. Depuis toujours. Je me doutais bien qu'un jour tu me tomberais dessus. Je t'attendais dans une impatience sans borne, calme. Dévore-moi. Déforme-moi à ton image afin qu'aucun autre, après toi, ne comprenne plus du tout le pourquoi de tant de désir. Nous allons rester seuls, mon amour. La nuit ne va pas finir. Le jour ne se lèvera plus sur personne. Jamais. Jamais plus. Enfin. Tu me tues. Tu me fais du bien. Nous pleurerons le jour défunt avec conscience et bonne volonté. Nous n'aurons plus rien d'autre à faire, plus rien que pleurer le jour défunt. Du temps passera. Du temps seulement. Et du temps va venir. Du temps viendra. Où nous ne saurons plus du tout nommer ce qui nous unira. Le nom s'en effacera peu à peu de notre mémoire. Puis, il disparaîtra, tout à fait.
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Marguerite Duras (Hiroshima mon amour)
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L'histoire est le produit le plus dangereux que la chimie de l'intellect ait élaboré. Ses propriétés sont bien connues. Il fait rêver, il enivre les peuples, leur engendre de faux souvenirs, exagère leurs réflexes, entretient leurs vieilles plaies, les tourmente dans leur repos, les conduit au délire des grandeurs ou à celui de la persécution, et rend les nations amères, superbes, insupportables et vaines. L'histoire justifie ce que l'on veut. Elle n'enseigne rigoureusement rien, car elle contient tout, et donne des exemples de tout.
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Paul Valéry (Regards sur le monde actuel et autres essais)
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Tous les grands divertissement sont dangereux [...]; mais entre tous ceux que le monde a inventés, il n'y en a point qui soit plus à craindre que la comedie. C'est une représentation si naturelle et si délicate des passions, qu'elle les émeut et les fait naitre dans notre coeur, et surtout celle de l'amour; principalement lorsqu'on le représente fort chaste et fort honnete. Car plus il parait innocent aux ames innocentes, plus elles sont capables d'en etre touchées; sa violence plait a notre amour-propre, qui forme un desir de causer les memes effets, que l'on voit si bien représentes; et l'on se fait en meme temps une conscience fondée sur l'honneteté des sentiments qu'on y voit, qui otent la crainte des ames pures, qui s'imaginent que ce n'est pas blesser la pureté, d'aimer d'un amour qui leur semble si sage.
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Blaise Pascal (Pensées)
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Ensuite, la peur se tourne vers votre corps, qui sent déjà que quelque chose de terrible et de mauvais est entrain de survenir. Déjà, votre souffle s'est envolé comme un oiseau et votre cran a fui en rampant comme un serpent. Maintenant, vous avez la langue qui s'affale comme un opossum, tandis que votre mâchoire commence à galoper sur place. Vos oreilles n'entendent plus. Vos muscles se mettent à trembler comme si vous aviez la malaria et vos genoux à frémir comme si vous dansiez. Votre coeur pompe follement, tandis que votre sphincter se relâche. Il en va ainsi de tout le reste de votre corps. Chaque partie de vous, à sa manière, perd ses moyens. Il n'y a que vos yeux à bien fonctionner. Ils prêtent toujours pleine attention à la peur. Vous prenez rapidement des décisions irréfléchies. Vous abandonnez vos derniers alliés: l'espoir et la confiance. Voilà que vous vous êtes défait vous-même. La peur, qui n'est qu'une impression, a triomphé de vous. Cette expérience est difficile à exprimer. Car la peur, la véritable peur, celle qui vous ébranle jusqu'au plus profond de vous, celle que vous ressentez au moment où vous êtes face à votre destin final, se blottit insidieusement dans votre mémoire, comme une gangrène: elle cherche à tout pourrir, même les mots pour parler d'elle. Vous devez donc vous battre très fort pour l'appeler par son nom. Il faut que vous luttiez durement pour braquer la lumière des mots sur elle. Car si vous ne le faites pas, si la peur devient une noirceur indicible que vous évitez, que vous parvenez peut-être même à oublier, vous vous exposez à d'autres attaques de peur parce que vous n'aurez jamais vraiment bataillé contre l'ennemi qui vous a défait.
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Yann Martel (Life of Pi)
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Comment en suis-je arrivée là ? Mais il n'y a pas qu'un seul moment. Il y en a toute une série. Et votre vie peut partir dans des centaines de directions différentes. Peut-être existe-t-il des versions de votre vie correspondant à tous les choix que vous avez faits et tous ceux que vous n'avez pas faits. Peut-être existe-t-il une version de ma vie où je suis bel et bien malade, finalement. Et une autre où je meurs à Hawaï. Une autre encore où mon père et mon frère survivent à leur accident, et où ma mère n'est pas détruite. Il y a peut-être même une version de ma vie sans Olly. Mais ce n'est pas celle-ci.
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Nicola Yoon (Everything, Everything)
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- Bardamu, qu'il me fait alors gravement et un peu triste, nos pères nous valaient bien, n'en dis pas de mal !... - T'as raison, Arthur, pour ça t'as raison ! Haineux et dociles, violés, volés, étripés et couillons toujours, ils nous valaient bien ! Tu peux le dire ! Nous ne changeons pas ! Ni de chaussettes, ni de maîtres, ni d'opinions, ou bien si tard, que ça n'en vaut plus la peine. On est nés fidèles, on en crève nous autres ! Soldats gratuits, héros pour tout le monde et singes parlants, mots qui souffrent, on est nous les mignons du Roi Misère. C'est lui qui nous possède ! Quand on est pas sage, il serre... On a ses doigts autour du cou, toujours, ça gêne pour parler, faut faire bien attention si on tient à pouvoir manger... Pour des riens, il vous étrangle... C'est pas une vie... - Il y a l'amour, Bardamu ! - Arthur, l'amour c'est l'infini mis à la portée des caniches et j'ai ma dignité moi ! que je lui réponds.
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Louis-Ferdinand CĂ©line
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On assiste en fait à un étrange renversement de perspective : l’humanité antique a été accusée d’être «mythique», c’est-à-dire d’avoir vécu et d’avoir agi sous la pression de complexes imaginaires et irrationnels. La vérité, en fait, c’est que s’il a jamais existé une humanité «mythique» dans ce sens négatif du terme, c’est bien l’humanité contemporaine : tous les grands mots écrits avec une majuscule - à commencer par Peuple, Progrès, Humanité, Société, Liberté et tant d’autres qui ont provoqué d’incroyables mouvements de masse, entraîné chez l’individu une paralysie fondamentale de toute capacité de jugement lucide et de critique, et qui ont eu les conséquences les plus désastreuses -, tous ces mots ressemblent aujourd’hui à des mythes ou, mieux, à des «fables», puisque «fable», de fari, signifie étymologiquement ce qui correspond au seul parler, donc à des paroles vides. C’est là le niveau auquel est parvenue l’humanité actuelle, évoluée et éclairée.
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Julius Evola (L'arco e la clava)
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Préface J'aime l'idée d'un savoir transmis de maître à élève. J'aime l'idée qu'en marge des "maîtres institutionnels" que sont parents et enseignants, d'autres maîtres soient là pour défricher les chemins de la vie et aider à y avancer. Un professeur d'aïkido côtoyé sur un tatami, un philosophe rencontré dans un essai ou sur les bancs d'un amphi-théâtre, un menuisier aux mains d'or prêt à offrir son expérience... J'aime l'idée d'un maître considérant comme une chance et un honneur d'avoir un élève à faire grandir. Une chance et un honneur d'assister aux progrès de cet élève. Une chance et un honneur de participer à son envol en lui offrant des ailes. Des ailes qui porteront l'élève bien plus haut que le maître n'ira jamais. J'aime cette idée, j'y vois une des clefs d'un équilibre fondé sur la transmission, le respect et l'évolution. Je l'aime et j'en ai fait un des axes du "Pacte des MarchOmbres". Jilano, qui a été guidé par Esîl, guide Ellana qui, elle-même, guidera Salim... Transmission. Ellana, personnage ô combien essentiel pour moi (et pour beaucoup de mes lecteurs), dans sa complexité, sa richesse, sa volonté, ne serait pas ce qu elle est si son chemin n avait pas croisé celui de Jilano. Jilano qui a su développer les qualités qu'il décelait en elle. Jilano qui l'a poussée, ciselée, enrichie, libérée, sans chercher une seule fois à la modeler, la transformer, la contraindre. Respect. q Jilano, maître marchombre accompli. Maître accompli et marchombre accompli. Il sait ce qu'il doit à Esîl qui l'a formé. Il sait que sans elle, il ne serait jamais devenu l'homme qu'il est. L'homme accompli. Elle l'a poussé, ciselé, enrichi, libéré, sans chercher une seule fois à le modeler, le transformer, le contraindre. Respect. Évolution. Esîl, uniquement présente dans les souvenirs de Jilano, ne fait qu'effleurer la trame du Pacte des Marchombres. Nul doute pourtant qu'elle soit parvenue à faire découvrir la voie à Jilano et à lui offrir un élan nécessaire pour qu'il y progresse plus loin qu'elle. Jilano agit de même avec Ellana. Il sait, dès le départ, qu'elle le distancera et attend ce moment avec joie et sérénité. Ellana est en train de libérer les ailes de Salim. Jusqu'où s envolera-t-il grâce à elle ? J'aime cette idée, dans les romans et dans la vie, d’un maître transmettant son savoir à un élève afin qu a terme il le dépasse. J'aime la générosité qu'elle induit, la confiance qu'elle implique en la capacité des hommes à s'améliorer. J'aime cette idée, même si croiser un maître est une chance rare et même s'il existe bien d'autres manières de prendre son envol. Lire. Écrire. S'envoler. Pierre Bottero
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Pierre Bottero (Ellana, l'Envol (Le Pacte des MarchOmbres, #2))
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Les heures passèrent. Même si la défense et la guerre n'avaient jamais été mon dada, la sécurité des vampires était hautement contextuelle et donc incroyablement intéressante. Il y avait des liens avec l'histoire (les vampires s'étaient fait baiser par le passé!), la politique (La Maison X nous avait baisé par le passé!), la philosophie (pourquoi croyez-vous qu'on nous avait baisé par le passé?) l'éthique (si nous ne buvions pas le sang des humains, nous serions-nous fait baiser par le passé?) et, bien-sûr, la stratégie (comment nous avait-on baisé? Comment pouvait-on éviter de nous faire baiser de nouveau ou, mieux encore, comment pouvions-nous les baiser en premier?)
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Chloe Neill (Some Girls Bite (Chicagoland Vampires, #1))
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C'est en punique que sont rédigés les dédicaces religieuses, les rares textes administratifs conservés, les épitaphes royales et les légendes monétaires, et non pas seulement chez les Numides de l'Est mais d'un bout à l'autre de l'Afrique du Nord. Ce fait mérite d'autant plus d'être rappelé que les Africains possédaient un système d'écriture national suffisamment répandu pour qu'il ait survécu jusqu'à nos jours chez les Touareg qui, ironie du vocabulaire, nomment cette écriture tifinagh, ce qui semble bien signifier « la punique ». Seule la cité de Dougga tenta un moment, sous Massinissa et Micipsa, d'utiliser le libyque dans ses inscriptions officielles, fait unique dans l'état de nos connaissances.
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Gabriel Camps (Les Berbères: Mémoire et Identité)
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Mais toutes ces étoiles-là elles se taisent. Toi, tu auras des étoiles comme personne n’en a... - Que veux-tu dire ? - Quand tu regarderas le ciel, la nuit, puisque j’habiterai dans l’une d’elles, puisque je rirai dans l’une d’elles, alors ce sera pour toi comme si riaient toutes les étoiles. Tu auras, toi, des étoiles qui savent rire ! Et il rit encore. - Et quand tu seras consolé (on se console toujours) tu seras content de m’avoir connu. Tu seras toujours mon ami. Tu auras envie de rire avec moi. Et tu ouvriras parfois ta fenêtre, comme ça, pour le plaisir... Et tes amis seront bien étonnés de te voir rire en regardant le ciel. Alors tu leur diras: "Oui, les étoiles, ça me fait toujours rire !" Et ils te croiront fou.
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Antoine de Saint-Exupéry (The Little Prince)
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Quand je considère ma vie, je suis épouvanté de la trouver informe. L'existence des héros, celle qu'on nous raconte, est simple ; elle va droit au but comme une flèche. Et la plupart des hommes aiment à résumer leur vie dans une formule, parfois dans une vanterie ou dans une plainte, presque toujours dans une récrimination ; leur mémoire leur fabrique complaisamment une existence explicable et claire. Ma vie a des contours moins fermes... Le paysage de mes jours semble se composer, comme les régions de montagne, de matériaux divers entassés pêle-mêle. J'y rencontre ma nature, déjà composite, formée en parties égales d'instinct et de culture. Ça et là, affleurent les granits de l'inévitable ; partout, les éboulements du hasard. Je m'efforce de reparcourir ma vie pour y trouver un plan, y suivre une veine de plomb ou d'or, ou l'écoulement d'une rivière souterraine, mais ce plan tout factice n'est qu'un trompe-l'oeil du souvenir. De temps en temps, dans une rencontre, un présage, une suite définie d'événements, je crois reconnaître une fatalité, mais trop de routes ne mènent nulle part, trop de sommes ne s'additionnent pas. Je perçois bien dans cette diversité, dans ce désordre, la présence d'une personne, mais sa forme semble presque toujours tracée par la pression des circonstances ; ses traits se brouillent comme une image reflétée sur l'eau. Je ne suis pas de ceux qui disent que leurs actions ne leur ressemblent pas. Il faut bien qu'elles le fassent, puisqu'elles sont ma seule mesure, et le seul moyen de me dessiner dans la mémoire des hommes, ou même dans la mienne propre ; puisque c'est peut-être l'impossibilité de continuer à s'exprimer et à se modifier par l'action que constitue la différence entre l'état de mort et celui de vivant. Mais il y a entre moi et ces actes dont je suis fait un hiatus indéfinissable. Et la preuve, c'est que j'éprouve sans cesse le besoin de les peser, de les expliquer, d'en rendre compte à moi-même. Certains travaux qui durèrent peu sont assurément négligeables, mais des occupations qui s'étendirent sur toute la vie ne signifient pas davantage. Par exemple, il me semble à peine essentiel, au moment où j'écris ceci, d'avoir été empereur..." (p.214)
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Marguerite Yourcenar (Les Yeux ouverts : Entretiens avec Matthieu Galey)
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Attendez!... Je choisis mes rimes... Là, j'y suis. (Il fait ce qu'il dit, à mesure.) Je jette avec grâce mon feutre, Je fais lentement l'abandon Du grand manteau qui me calfeutre, Et je tire mon espadon; Élégant comme Céladon, Agile comme Scaramouche, Je vous préviens, cher Mirmidon, Qu'à la fin de l'envoi, je touche! (Premier engagement de fer.) Vous auriez bien dû rester neutre; Où vais-je vous larder, dindon ?... Dans le flanc, sous votre maheutre ?... Au coeur, sous votre bleu cordon ?... - Les coquilles tintent, ding-don ! Ma pointe voltige: une mouche ! Décidément... c'est au bedon, Qu'à la fin de l'envoi, je touche. Il me manque une rime en eutre... Vous rompez, plus blanc qu'amidon ? C'est pour me fournir le mot pleutre ! - Tac! je pare la pointe dont Vous espériez me faire don: - J'ouvre la ligne, - je la bouche... Tiens bien ta broche, Laridon ! A la fin de l'envoi, je touche. (Il annonce solennellement:) Envoi Prince, demande à Dieu pardon ! Je quarte du pied, j'escarmouche, Je coupe, je feinte... (Se fendant.) Hé! Là donc! (Le vicomte chancelle, Cyrano salue.) A la fin de l'envoi, je touche.
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Edmond Rostand (Cyrano de Bergerac)
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«Je m’appelle Paloma, j’ai douze ans, j’habite au 7 rue de Grenelle dans un appartement de riches. Mais malgré toute cette chance et toute cette richesse, depuis très longtemps, je sais que la destination finale, c’est le bocal à poissons; la vacuité et l’ineptie de l’existence. Comment est-ce que je le sais ? Il se trouve que je suis très intelligente. Exceptionnellement intelligente, même. Même si on compare avec les adultes, je suis beaucoup plus maligne que la plupart d’entre eux. C’est comme ça. Je n’en suis pas spécialement fière parce que je n’y suis pour rien. Mais ce qui est certain, c’est que dans le bocal, je n’irais pas. C’est une décision bien réfléchie. Même pour une personne aussi intelligente que moi, aussi douée pour les études, aussi différente des autres et aussi supérieure à la plupart, la vie est déjà toute tracée et c’est triste à pleurer : personne ne semble avoir songé au fait que si l’existence est absurde, y réussir brillamment n’a pas plus de valeur qu’y échouer. C’est seulement plus confortable. Et encore : je crois que la lucidité rend le succès amer alors que la médiocrité espère toujours quelque chose.»
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Muriel Barbery (The Elegance of the Hedgehog)
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La nuit qui suivit ne fut pas celle de la lutte, mais celle du silence. Dans cette chambre retranchée du monde, au-dessus de ce corps mort maintenant habillé, Rieux sentit planer le calme surprenant qui, bien des nuits auparavant, sur les terrasses au-dessus de la peste, avait suivi l'attaque des portes. Déjà, à cette époque, il avait pensé à ce silence qui s'élevait des lits où il avait laissé mourir des hommes. C'était partout la même pause, le même intervalle solennel, toujours le même apaisement qui suivait les combats, c'était le silence de la défaite. Mais pour celui qui enveloppait maintenant son ami, il était si compact, il s'accordait si étroitement au silence des rues et de la ville libérée de la peste, que Rieux sentait bien qu'il s'agissait cette fois de la défaite définitive, celle qui termine les guerres et fait de la paix elle-même une souffrance sans guérison. Le docteur ne savait pas si, pour finir, Tarrou avait retrouvé la paix, mais, dans ce moment tout au moins, il croyait savoir qu'il n'y aurait jamais plus de paix possible pour lui-même, pas plus qu'il n'y a d'armistice pour la mère amputée de son fils ou pour l'homme qui ensevelit son ami.
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Albert Camus (The Plague)
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J'ai écrit le mot  : amour. J'ai bien envisagé d'en employer un autre. Au moins parce que c'est une notion curieuse, l'amour  ; difficile à définir, à cerner, à établir. Il en existe tant de degrés, tant de variations. J'aurais pu me contenter d'affirmer que j'étais attendri (et il est exact que T.   savait à merveille me faire faiblir, fléchir), ou charmé (il s'y entendait comme personne pour attirer à lui, conquérir, flatter, et même ensorceler), ou troublé (il provoquait souvent un mélange de perplexité et d'émoi, renversait les situations), ou séduit (il m'attirait dans ses filets, me bluffait, me gagnait à ses causes), ou épris (j'étais bêtement enjoué, je pouvais m'enflammer pour un rien)  ; ou même aveuglé (je mettais de côté ce qui m'embarrassait, je minimisais ses défauts, portais aux nues ses qualités), perturbé (je n'étais plus tout à fait moi-même), ce qui aurait un sens moins favorable. J'aurais pu expliquer qu'il ne s'agissait que d'affection, que je me contentais d'avoir le «  béguin  », une formulation suffisamment floue pour englober n'importe quoi. Mais ce serait me payer de mots. La vérité, la vérité toute nue, c'est que j'étais amoureux. Autant employer les mots précis.
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Philippe Besson (« Arrête avec tes mensonges »)
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Eh bien, c'est l'histoire d'un petit ourson qui s'appelle… Arthur. Et y'a une fée, un jour, qui vient voir le petit ourson et qui lui dit : Arthur tu vas partir à la recherche du Vase Magique. Et elle lui donne une épée hmm… magique (ouais, parce qu'y a plein de trucs magiques dans l'histoire, bref) alors le petit ourson il se dit : "Heu, chercher le Vase Magique ça doit être drôlement difficile, alors il faut que je parte dans la forêt pour trouver des amis pour m'aider." Alors il va voir son ami Lancelot… le cerf (parce que le cerf c'est majestueux comme ça), heu, Bohort le faisan et puis Léodagan… heu… l'ours, ouais c'est un ours aussi, c'est pas tout à fait le même ours mais bon. Donc Léodagan qui est le père de la femme du petit ourson, qui s'appelle Guenièvre la truite… non, non, parce que c'est la fille de… non c'est un ours aussi puisque c'est la fille de l'autre ours, non parce qu'après ça fait des machins mixtes, en fait un ours et une truite… non en fait ça va pas. Bref, sinon y'a Gauvain le neveu du petit ourson qui est le fils de sa sœur Anna, qui est restée à Tintagel avec sa mère Igerne la… bah non, ouais du coup je suis obligé de foutre des ours de partout sinon on pige plus rien dans la famille… Donc c'est des ours, en gros, enfin bref… Ils sont tous là et donc Petit Ourson il part avec sa troupe à la recherche du Vase Magique. Mais il le trouve pas, il le trouve pas parce qu'en fait pour la plupart d'entre eux c'est… c'est des nazes : ils sont hyper mous, ils sont bêtes, en plus y'en a qu'ont la trouille. Donc il décide de les faire bruler dans une grange pour s'en débarrasser… Donc la fée revient pour lui dire : "Attention petit ourson, il faut être gentil avec ses amis de la forêt" quand même c'est vrai, et du coup Petit Ourson il lui met un taquet dans la tête à la fée, comme ça : "BAH !". Alors la fée elle est comme ça et elle s'en va… et voilà et en fait il trouve pas le vase. En fait il est… il trouve pas… et Petit Ourson il fait de la dépression et tous les jours il se demande s'il va se tuer ou… pas…
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Alexandre Astier (Kaamelott, livre 3, première partie : Épisodes 1 à 50)
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Elle se mordit la langue quand Thorn pressa sa bouche contre la sienne. Sur le moment, elle ne comprit plus rien. Elle sentit sa barbe lui piquer le menton, son odeur de désinfectant lui monter à la tête, mais la seule pensée qui la traversa, stupide et évidente, fut quenelle avait une botte plantée dans son tibia. Elle voulut se reculer; Thorn l’en empêcha. Il referma ses mains de part et d’autre de son visage, les doigts dans ses cheveux, prenant appui sur sa nuque avec une urgence qui les déséquilibra tous les deux. La bibliothèque déversa une pluie de documents sur eux. Quand Thorn s’écarte finalement, le souffle court, ce fut pour clouer un regard de fer dans ses lunettes. - je vous préviens. Les mots que vous m’avez dits, je ne vous laisserai pas revenir dessus. Sa voix était âpre, mais sous l’autorité des paroles il y avait comme une fêlure. Ophélie pouvait percevoir le pouls précipité des mains qu’il appuyait maladroitement sur ses joues. Elle devait reconnaître que son propre cœur jouait à la balançoire. Thorn était sans doute l’homme le plus déconcertant qu’elle avait jamais rencontré, mais il l’a faisait se sentir formidablement vivante. - je vous aime, répéta-y-elle d’un ton inflexible. C’est ce que j’aurais du vous répondre quand vous vouliez connaître la raison de ma présence à Babel c’est ce que j’en aurais du vous répondre chaque fois que vous vouliez savoir ce que j’en avais vraiment à vous dire. Bien sûr que je désire percer les mystères de Dieu et reprendre le contrôle de ma vie, mais... vous faites partie de ma vie, justement. Je vous ai traité d’égoïste et à aucun moment je ne me suis mise, moi, à votre place. Je vous demande pardon. 
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Dabos Christelle
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J’ai arpenté les galeries sans fin des grandes bibliothèque, les rues de cette ville qui fût la nôtre, celle où nous partagions presque tous nos souvenirs depuis l’enfance. Hier, j’ai marché le long des quais, sur les pavés du marché à ciel ouvert que tu aimais tant. Je me suis arrêté par-ci par-là, il me semblait que tu m’accompagnais, et puis je suis revenu dans ce petit bar près du port, comme chaque vendredi. Te souviendras-tu ? Je ne sais pas où tu es. Je ne sais pas si tout ce que nous avons vécu avait un sens, si la vérité existe, mais si tu trouves ce petit mot un jour, alors tu sauras que j’ai tenu ma promesse, celle que je t’ai faite. A mon tour de te demander quelque chose, tu me le dois bien. Oublie ce que je viens d’écrire, en amitié on ne doit rien. Mais voici néanmoins ma requête : Dis-lui, dis-lui que quelque part sur cette terre, loin de vous, de votre temps, j’ai arpenté les mêmes rues, ri avec toi autour des mêmes tables, et puisque les pierres demeurent, dis-lui que chacune de celles où nous avons posé nos mais et nos regards contient à jamais une part de notre histoire. Dis-lui, que j’étais ton ami, que tu étais mon frère, peut-être mieux encore puisque nous nous étions choisis, dis-lui que rien n’a jamais pu nous séparer, même votre départ si soudain.
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Marc Levy (La prochaine fois)
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Dans le domaine des opinions individuelles, on peut toujours discuter, parce qu’on ne dépasse pas l’ordre rationnel, et parce que, ne faisant appel à aucun principe supérieur, on arrive facilement à trouver des arguments plus ou moins valables pour soutenir le « pour » et le « contre » ; on peut même, dans bien des cas, pousser la discussion indéfiniment sans parvenir à aucune solution, et c’est ainsi que presque toute la philosophie moderne n’est faite que d’équivoques et de questions mal posées. Bien loin d’éclaircir les questions comme on le suppose d’ordinaire, la discussion, le plus souvent, ne fait guère que les déplacer, sinon les obscurcir davantage ; et le résultat le plus habituel est que chacun, en s’efforçant de convaincre son adversaire, s’attache plus que jamais à sa propre opinion et s’y enferme d’une façon encore plus exclusive qu’auparavant.
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René Guénon (The Crisis of the Modern World)
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Vieux bureaucrate, mon camarade ici présent, nul jamais ne t'a fait évader et tu n'en es point responsable. Tu as construit ta paix à force d'aveugler de ciment, comme le font les termites, toutes les échappées vers la lumière. Tu t'es roulé en boule dans ta sécurité bourgeoise, tes routines, les rites étouffants de ta vie provinciale, tu as élevé cet humble rempart contre les vents et les marées et les étoiles. Tu ne veux point t'inquiéter des grands problèmes, tu as eu bien assez de mal à oublier ta condition d'homme. Tu n'es point l'habitant d'une planète errante, tu ne te poses point de questions sans réponse : tu es un petit bourgeois de Toulouse. Nul ne t'a saisi par les épaules quand il était temps encore. Maintenant, la glaise dont tu es formé a séché, et s'est durcie, et nul en toi ne saurait désormais réveiller le musicien endormi ou le poète, ou l'astronome qui peut-être t'habitait d'abord.
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Antoine de Saint-Exupéry (Wind, Sand and Stars)
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Un aveu. Je fais autre chose encore, autre chose que visualiser la scène, autre chose que convoquer un souvenir, je me dis  : à quoi Thomas a-t-il pensé, quand ça a été le dernier moment  ? après avoir passé la corde autour de son cou  ? avant de renverser la chaise  ? et d'abord, combien de temps cela a-t-il duré  ? une poignée de secondes  ? puisqu'il ne servait à rien de perdre du temps, la décision avait été prise, il fallait la mettre à exécution, une minute  ? mais c'est interminable, une minute, dans ces circonstances, et alors comment l'a-t-il remplie  ? avec quelles pensées  ? et j'en reviens à ma question. A-t-il fermé les yeux et revu des épisodes de son passé, de la tendre enfance, par exemple son corps étendu en croix dans l'herbe fraîche, tourné vers le bleu du ciel, la sensation de chaleur sur sa joue et sur ses bras  ? de son adolescence  ? une chevauchée à moto, la résistance de l'air contre son torse  ? a-t-il été rattrapé par des détails auxquels il ne s'attendait pas  ? des choses qu'il croyait avoir oubliées  ? ou bien a-t-il fait défiler des visages ou des lieux, comme s'il s'agissait de les emporter avec lui  ? (À la fin, je suis convaincu qu'en tout cas, il n'a pas envisagé de renoncer, que sa détermination n'a pas fléchi, qu'aucun regret, s'il y en a eu, n'est venu contrarier sa volonté.) Je traque cette ultime image formée dans son esprit, surgie de sa mémoire, non pas pour escompter y avoir figuré mais pour croire qu'en la découvrant, je renouerais avec notre intimité, je serais à nouveau ce que nul autre n'a été pour lui.
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Philippe Besson (« Arrête avec tes mensonges »)
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Tu viens d'incendier la Bibliothèque ? - Oui. J'ai mis le feu là. - Mais c'est un crime inouï ! Crime commis par toi contre toi-même, infâme ! Mais tu viens de tuer le rayon de ton âme ! C'est ton propre flambeau que tu viens de souffler ! Ce que ta rage impie et folle ose brûler, C'est ton bien, ton trésor, ta dot, ton héritage Le livre, hostile au maître, est à ton avantage. Le livre a toujours pris fait et cause pour toi. Une bibliothèque est un acte de foi Des générations ténébreuses encore Qui rendent dans la nuit témoignage à l'aurore. Quoi! dans ce vénérable amas des vérités, Dans ces chefs-d'oeuvre pleins de foudre et de clartés, Dans ce tombeau des temps devenu répertoire, Dans les siècles, dans l'homme antique, dans l'histoire, Dans le passé, leçon qu'épelle l'avenir, Dans ce qui commença pour ne jamais finir, Dans les poètes! quoi, dans ce gouffre des bibles, Dans le divin monceau des Eschyles terribles, Des Homères, des jobs, debout sur l'horizon, Dans Molière, Voltaire et Kant, dans la raison, Tu jettes, misérable, une torche enflammée ! De tout l'esprit humain tu fais de la fumée ! As-tu donc oublié que ton libérateur, C'est le livre ? Le livre est là sur la hauteur; Il luit; parce qu'il brille et qu'il les illumine, Il détruit l'échafaud, la guerre, la famine Il parle, plus d'esclave et plus de paria. Ouvre un livre. Platon, Milton, Beccaria. Lis ces prophètes, Dante, ou Shakespeare, ou Corneille L'âme immense qu'ils ont en eux, en toi s'éveille ; Ébloui, tu te sens le même homme qu'eux tous ; Tu deviens en lisant grave, pensif et doux ; Tu sens dans ton esprit tous ces grands hommes croître, Ils t'enseignent ainsi que l'aube éclaire un cloître À mesure qu'il plonge en ton coeur plus avant, Leur chaud rayon t'apaise et te fait plus vivant ; Ton âme interrogée est prête à leur répondre ; Tu te reconnais bon, puis meilleur; tu sens fondre, Comme la neige au feu, ton orgueil, tes fureurs, Le mal, les préjugés, les rois, les empereurs ! Car la science en l'homme arrive la première. Puis vient la liberté. Toute cette lumière, C'est à toi comprends donc, et c'est toi qui l'éteins ! Les buts rêvés par toi sont par le livre atteints. Le livre en ta pensée entre, il défait en elle Les liens que l'erreur à la vérité mêle, Car toute conscience est un noeud gordien. Il est ton médecin, ton guide, ton gardien. Ta haine, il la guérit ; ta démence, il te l'ôte. Voilà ce que tu perds, hélas, et par ta faute ! Le livre est ta richesse à toi ! c'est le savoir, Le droit, la vérité, la vertu, le devoir, Le progrès, la raison dissipant tout délire. Et tu détruis cela, toi ! - Je ne sais pas lire.
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Victor Hugo
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- Tu crois ça ? Alors, pour toi, les choses sont simples : il y a les bons et les méchants ? Quelle chance tu as ! Tiens, si tu avais le choix au moment des élections entre trois candidats : le premier à moitié paralysé par la polio, souffrant d'hypertension, d'anémie et de nombreuses pathologies lourdes, menteur à l'occasion, consultant une astrologue, trompant sa femme, fumant des cigarettes à la chaîne et buvant trop de martinis ; le deuxième obèse, ayant déjà perdu trois élections, fait une dépression et deux crises cardiaques, fumant des cigares et s'imbibant le soir au champagne, au porto, au cognac et au whisky avant de prendre deux somnifères ; le troisième enfin un héros de guerre décoré, respectant les femmes, aimant les animaux, ne buvant qu'une bière de temps en temps et ne fumant pas, lequel choisirais-tu ? Servaz sourit. - Je suppose que vous vous attendez à ce que je réponde le troisième ? - Eh bien bravo, tu viens de rejeter Roosevelt et Churchill et d'élire Adolf Hitler. Tu vois : les choses ne sont jamais ce qu'elles paraissent.
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Bernard Minier
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Je suis encore un homme jeune, et pourtant, quand je songe à ma vie, c’est comme une bouteille dans laquelle on aurait voulu faire entrer plus qu’elle ne peut contenir. Est-ce le cas pour toute vie humaine, ou suis-je né dans une époque qui repousse toute limite et qui bat les existences comme les cartes d’un grand jeu de hasard ? Moi, je ne demandais pas grand-chose. J'aurais aimé ne jamais quitter le village. Les montagnes, les bois, nos rivières, tout cela m’aurait suffi. J’aurais aimé être tenu loin de la rumeur du monde, mais autour de moi bien des peuples se sont entretués. Bien des pays sont morts et ne sont plus que des noms dans les livres d’Histoire. Certains en ont dévoré d’autres, les ont éventrés, violés, souillés. Et ce qui est juste n’a pas toujours triomphé de ce qui est sale. Pourquoi ai-je dû, comme des milliers d’autres hommes, porter une croix que je n’avais pas choisie, endurer un calvaire qui n’était pas fait pour mes épaules et qui ne me concernait pas? Qui a donc décidé de venir fouiller mon obscure existence, de déterrer ma maigre tranquillité, mon anonymat gris, pour me lancer comme une boule folle et minuscule dans un immense jeu de quilles? Dieu? Mais alors, s’Il existe, s’Il existe vraiment, qu’Il se cache. Qu’Il pose Ses deux mains sur Sa tête, et qu’Il la courbe. Peut-être, comme nous l'apprenait jadis Peiper, que beaucoup d’hommes ne sont pas dignes de Lui, mais aujourd’hui je sais aussi qu’Il n'est pas digne de la plupart d’entre nous, et que si la créature a pu engendrer l’horreur c’est uniquement parce que son Créateur lui en a soufflé la recette.
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Philippe Claudel (Brodeck)
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J’allais ouvrir la bouche et aborder cette fille , quand quelqu’un me toucha l’épaule. Je me retournai, surpris, et j’aperçus un homme d’aspect ordinaire, ni jeune ni vieux, qui me regardait d’un air triste. — Je voudrais vous parler, dit-il. Je fis une grimace qu’il vit sans doute, car il ajouta : — « C’est important. » Je me levai et le suivis à l’autre bout du bateau : — « Monsieur, reprit-il, quand l’hiver approche avec les froids, la pluie et la neige, votre médecin vous dit chaque jour : « Tenez-vous les pieds bien chauds, gardez-vous des refroidissements, des rhumes, des bronchites, des pleurésies. » Alors vous prenez mille précautions, vous portez de la flanelle, des pardessus épais, des gros souliers, ce qui ne vous empêche pas toujours de passer deux mois au lit. Mais quand revient le printemps avec ses feuilles et ses fleurs, ses brises chaudes et amollissantes, ses exhalaisons des champs qui vous apportent des troubles vagues, des attendrissements sans cause, il n’est personne qui vienne vous dire : « Monsieur, prenez garde à l’amour ! Il est embusqué partout ; il vous guette à tous les coins ; toutes ses ruses sont tendues, toutes ses armes aiguisées, toutes ses perfidies préparées ! Prenez garde à l’amour !… Prenez garde à l’amour ! Il est plus dangereux que le rhume, la bronchite et la pleurésie ! Il ne pardonne pas, et fait commettre à tout le monde des bêtises irréparables. » Oui, monsieur, je dis que, chaque année, le gouvernement devrait faire mettre sur les murs de grandes affiches avec ces mots : « Retour du printemps. Citoyens français, prenez garde à l’amour ; » de même qu’on écrit sur la porte des maisons : « Prenez garde à la peinture ! » — Eh bien, puisque le gouvernement ne le fait pas, moi je le remplace, et je vous dis : « Prenez garde à l’amour ; il est en train de vous pincer, et j’ai le devoir de vous prévenir comme on prévient, en Russie, un passant dont le nez gèle. » Je demeurai stupéfait devant cet étrange particulier, et, prenant un air digne : — « Enfin, monsieur, vous me paraissez vous mêler de ce qui ne vous regarde guère. » Il fit un mouvement brusque, et répondit : — « Oh ! monsieur ! monsieur ! si je m’aperçois qu’un homme va se noyer dans un endroit dangereux, il faut donc le laisser périr ?
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Guy de Maupassant
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« — Tu as entendu parler de Marcion, Martin ? Marcion était un chrétien qui vivait il y a mille huit cents ans à Rome. En regardant autour de lui, en regardant cet univers traversé de souffrances, de massacres, de maladies, de guerres et de violence, Marcion l’hérétique en conclut que le Dieu qui avait créé tout ça ne pouvait pas être bon, que le mal était une composante de sa création. Les scénaristes de la chrétienté trouvèrent un rebondissement assez vaseux pour répondre à la question du mal : ils inventèrent Lucifer. Mais la version de Marcion était bien meilleure : Dieu est responsable du mal comme de tout le reste, il est responsable de la maladie de Gustav aussi. Non seulement le mal fait partie de sa création, mais il en est un des leviers. C’est grâce à la violence et au conflit que la création évolue vers des formes toujours supérieures. Regarde Rome. Selon Plutarque, Jules César a pris plus de huit cents villes, soumis trois cents nations, fait un million de prisonniers et tué un autre million de ses ennemis. Rome était une société vicieuse, avec un goût certain pour la cruauté. Pourtant, son ascension a permis au monde d’évoluer[…] »
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Bernard Minier
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Je ris, Caesonia, quand je pense que, pendant des années, Rome tout entière a évité de prononcer le nom de Drusilla. Car Rome s'est trompée pendant des années. L'amour ne m'est pas suffisant, c'est cela que j'ai compris alors. C'est cela que je comprends aujourd'hui encore, en te regardant. Aimer un être, c'est accepter de vieillir avec lui. Je ne suis pas capable de cet amour. Drusilla vieille, c'était bien pis que Drusilla morte. On croit qu'un homme souffre parce que l'être qu'il aime meurt en un jour. Mais sa vraie souffrance est moins futile : c'est de s'apercevoir que le chagrin non plus ne dure pas. Même la douleur est privée de sens. Tu vois, je n'avais pas d'excuses, pas même l'ombre d'un amour, ni l'amertume de la mélancolie. Je suis sans alibi. Mais aujourd'hui, me voilà encore plus libre qu'il y a des an-nées, libéré que je suis du souvenir et de l'illusion. (Il rit d'une façon passionnée.) Je sais que rien ne dure ! Savoir cela ! Nous sommes deux ou trois dans l'histoire à en avoir fait vraiment l'expérience, accompli ce bonheur dément. Ceasonia, tu as suivi jusqu'au bout une bien curieuse tragédie. Il est temps que pour toi le rideau se baisse.
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Albert Camus (Caligula)
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Il me semble qu'ils confondent but et moyen ceux qui s'effraient par trop de nos progrès techniques. Quiconque lutte dans l'unique espoir de biens matériels, en effet, ne récolte rien qui vaille de vivre. Mais la machine n'est pas un but. L'avion n'est pas un but : c'est un outil, un outil comme la charrue. Si nous croyons que la machine abîme l'homme c'est que, peut-être, nous manquons un peu de recul pour juger les effets de transformations aussi rapides que celles que nous avons subies. Que sont les cent années de l'histoire de la machine en regard des deux cent mille années de l'histoire de l'homme? C'est à peine si nous nous installons dans ce paysage de mines et de centrales électriques. C'est à peine si nous commençons d'habiter cette maison nouvelle, que nous n'avons même pas achevé de bâtir. Tout a changé si vite autour de nous : rapports humains, conditions de travail, coutumes. Notre psychologie elle-même a été bousculée dans ses bases les plus intimes. Les notions de séparation, d'absence, de distance, de retour, si les mots sont demeurés les mêmes, ne contiennent plus les mêmes réalités. Pour saisir le monde aujourd'hui, nous usons d'un langage qui fut établi pour le monde d'hier. Et la vie du passé nous semble mieux répondre à notre nature, pour la seule raison qu'elle répond mieux à notre langage. Pour le colonial qui fonde un empire, le sens de la vie est de conquérir. Le soldat méprise le colon. Mais le but de cette conquête n'était-il pas l'établissement de ce colon? Ainsi dans l'exaltation de nos progrès, nous avons fait servir les hommes à l'établissement des voies ferrées, à l'érection des usines, au forage de puits de pétrole. Nous avions un peu oublié que nous dressions ces constructions pour servir les hommes. (Terre des Hommes, ch. III)
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Antoine de Saint-Exupéry
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Seigneur je suis très fatigué. Je suis né fatigué. Et j'ai beaucoup marché depuis le chant du coq Et le morne est bien haut qui mène à leur école. Seigneur, je ne veux plus aller à leur école, Faites, je vous en prie, que je n'y aille plus. Je veux suivre mon père dans les ravines fraîches Quand la nuit flotte encore dans le mystère des bois Où glissent les esprits que l'aube vient chasser. Je veux aller pieds nus par les rouges sentiers Que cuisent les flammes de midi, Je veux dormir ma sieste au pied des lourds manguiers, Je veux me réveiller Lorsque là-bas mugit la sirène des blancs Et que l'Usine Sur l'océan des cannes Comme un bateau ancré Vomit dans la campagne son équipage nègre... Seigneur, je ne veux plus aller à leur école, Faites, je vous en prie, que je n'y aille plus. Ils racontent qu'il faut qu'un petit nègre y aille Pour qu'il devienne pareil Aux messieurs de la ville Aux messieurs comme il faut Mais moi je ne veux pas Devenir, comme ils disent, Un monsieur de la ville, Un monsieur comme il faut. Je préfère flâner le long des sucreries Où sont les sacs repus Que gonfle un sucre brun autant que ma peau brune. Je préfère vers l'heure où la lune amoureuse Parle bas à l'oreille des cocotiers penchés Ecouter ce que dit dans la nuit La voix cassée d'un vieux qui raconte en fumant Les histoires de Zamba et de compère Lapin Et bien d'autres choses encore Qui ne sont pas dans les livres. Les nègres, vous le savez, n'ont que trop travaillé. Pourquoi faut-il de plus apprendre dans les livres Qui nous parlent de choses qui ne sont point d'ici ? Et puis elle est vraiment trop triste leur école, Triste comme Ces messieurs de la ville, Ces messieurs comme il faut Qui ne savent plus danser le soir au clair de lune Qui ne savent plus marcher sur la chair de leurs pieds Qui ne savent plus conter les contes aux veillées. Seigneur, je ne veux plus aller à leur école.
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Guy Tirolien (Balles d'or: Poèmes (Poésie) (French Edition))
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En ce qui me concerne, je suis végétarienne à quatre-vingt-quinze pour cent. L'exception principale serait le poisson, que je mange peut-être deux fois par semaine pour varier un peu mon régime et en n'ignorant pas, d'ailleurs, que dans la mer telle que nous l'avons faite le poisson est lui aussi contaminé. Mais je n'oublie surtout pas l'agonie du poisson tiré par la ligne ou tressautant sur le pont d'une barque. Tout comme Zénon, il me déplaît de "digérer des agonies". En tout cas, le moins de volaille possible, et presque uniquement les jours où l'on offre un repas à quelqu'un ; pas de veau, pas d'agneau, pas de porc, sauf en de rares occasions un sandwich au jambon mangé au bord d'une route ; et naturellement pas de gibier, ni de bœuf, bien entendu. - Pourquoi, bien entendu ? - Parce que j'ai un profond sentiment d'attachement et de respect pour l'animal dont la femelle nous donne le lait et représente la fertilité de la terre. Curieusement, dès ma petite enfance, j'ai refusé de manger de la viande et on a eu la grande sagesse de ne pas m'obliger à le faire. Plus tard, vers la quinzième année, à l'âge où l'on veut "être comme tout le monde", j'ai changé d'avis ; puis, vers quarante ans, je suis revenue à mon point de vue de la sixième année.(p. 288)
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Marguerite Yourcenar (Les Yeux ouverts : Entretiens avec Matthieu Galey)
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L'Art d’avoir toujours raison La dialectique 1 éristique est l’art de disputer, et ce de telle sorte que l’on ait toujours raison, donc per fas et nefas (c’est-à-dire par tous les moyens possibles)2. On peut en effet avoir objectivement raison quant au débat lui-même tout en ayant tort aux yeux des personnes présentes, et parfois même à ses propres yeux. En effet, quand mon adversaire réfute ma preuve et que cela équivaut à réfuter mon affirmation elle-même, qui peut cependant être étayée par d’autres preuves – auquel cas, bien entendu, le rapport est inversé en ce qui concerne mon adversaire : il a raison bien qu’il ait objectivement tort. Donc, la vérité objective d’une proposition et la validité de celle-ci au plan de l’approbation des opposants et des auditeurs sont deux choses bien distinctes. (C'est à cette dernière que se rapporte la dialectique.) D’où cela vient-il ? De la médiocrité naturelle de l’espèce humaine. Si ce n’était pas le cas, si nous étions foncièrement honnêtes, nous ne chercherions, dans tout débat, qu’à faire surgir la vérité, sans nous soucier de savoir si elle est conforme à l’opinion que nous avions d’abord défendue ou à celle de l’adversaire : ce qui n’aurait pas d’importance ou serait du moins tout à fait secondaire. Mais c’est désormais l’essentiel. La vanité innée, particulièrement irritable en ce qui concerne les facultés intellectuelles, ne veut pas accepter que notre affirmation se révèle fausse, ni que celle de l’adversaire soit juste. Par conséquent, chacun devrait simplement s’efforcer de n’exprimer que des jugements justes, ce qui devrait inciter à penser d’abord et à parler ensuite. Mais chez la plupart des hommes, la vanité innée s’accompagne d’un besoin de bavardage et d’une malhonnêteté innée. Ils parlent avant d’avoir réfléchi, et même s’ils se rendent compte après coup que leur affirmation est fausse et qu’ils ont tort, il faut que les apparences prouvent le contraire. Leur intérêt pour la vérité, qui doit sans doute être généralement l’unique motif les guidant lors de l’affirmation d’une thèse supposée vraie, s’efface complètement devant les intérêts de leur vanité : le vrai doit paraître faux et le faux vrai.
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Arthur Schopenhauer (L'art d'avoir toujours raison (La Petite Collection))
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Ce n’est pas des gens comme Aoki que j’ai peur. Des types de son espèce, il y en a partout. Je suis résigné au fait qu’il en existe. Quand j’en aperçois un, je m’arrange simplement pour ne pas croiser son chemin. Avec eux, le salut est dans la fuite. Ça ne m’est pas bien difficile de les éviter, je les repère au premier coup d’œil. D’un autre côté, il m’arrive aussi de trouver que les gens comme Aoki sont très forts. Cette capacité à attendre tapi dans l’ombre qu’une occasion se présente, leur habileté à manipuler l’esprit des autres, tout le monde n’a pas ce don. Je déteste ce genre de types, ils me font vomir, mais je leur reconnais un certain talent. Non, en fait, ce qui me fait vraiment peur, ce sont les autres, ceux qui gobent sans le moindre esprit critique tout ce qu’un Aoki peut leur raconter. Incapables de se forger leur propre opinion, ou de comprendre quoi que ce soit par eux-mêmes, ils avalent l’avis de beaux parleurs convaincants comme Aoki et mettent leurs propos en action en groupe. Il ne leur vient jamais à l’idée, même brièvement, qu’ils pourraient se tromper, faire une erreur, non. Ou qu’ils pourraient causer un mal définitif à quelqu’un, pour rien. Ils sont totalement irresponsables, ne se questionnent jamais sur les conséquences de leurs actes. Ce sont eux qui me font vraiment peur. Ces gens que je vois en rêve n’ont pas de visage. Leur silence envahit tout comme une eau glaciale. Dans ce silence, tout se met à fondre et à disparaître. Moi aussi je fonds au milieu d’eux, et j’ai beau hurler, personne ne m’entend.
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Haruki Murakami (The Silence)
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Voisine Je peux rester des après-midi entiers à regarder cette fille, caché derrière mon rideau. Je me demande ce qu'elle peut écrire sur son ordinateur. A quoi elle pense quand elle regarde par la fenêtre. Je me demande ce qu'elle mange, ce qu'elle utilise comme dentifrice, ce qu'elle écoute comme musique. Un jour, je l'ai vue danser toute seule. Je me demande si elle a des frères et sœurs, si elle met la radio quand elle se lève le matin, si elle préfère l'Espagne ou l'Italie, si elle garde son mouchoir en boule dans sa main quand elle pleure et si elle aime Thomas Bernhard. Je me demande comment elle dort et comment elle jouit. Je me demande comment est son corps de près. Je me demande si elle s'épile ou si au contraire elle a une grosse toison. Je me demande si elle lit des livres en anglais. Je me demande ce qui la fait rire, ce qui la met hors d'elle, ce qui la touche et si elle a du goût. Qu'est-ce qu'elle peut bien en penser, cette fille, de la hausse du baril de pétrole et des Farc, et que dans trente ans il n'y aura sans doute plus de gorilles dans les montagnes du Rwanda ? Je me demande à quoi elle pense quand je la vois fumer sur son canapé, et ce qu'elle fume comme cigarettes. Est-ce que ça lui pèse d'être seule ? Est-ce qu'elle a un homme dans sa vie ? Et si c'est le cas, pourquoi c'est elle qui va toujours chez lui ? Pourquoi il n'y a jamais d'homme chez elle ? Je me demande comment elle se voit dans vingt ans. Je me demande quel sens elle donne à sa vie. Qu'est-ce qu'elle pense de sa vie quand elle est comme ça, toute seule, chez elle ? Si ça se trouve, elle n'a aucun intérêt, cette fille.
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David Thomas (La Patience des buffles sous la pluie)
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Qu’est-ce qui peut seul être notre doctrine ? — Que personne ne donne à l’homme ses qualités, ni Dieu, ni la société, ni ses parents et ses ancêtres, ni lui-même (— le non-sens de l’« idée », réfuté en dernier lieu, a été enseigné, sous le nom de « liberté intelligible par Kant et peut-être déjà par Platon).Personne n’est responsable du fait que l’homme existe, qu’il est conformé de telle ou telle façon, qu’il se trouve dans telles conditions, dans tel milieu. La fatalité de son être n’est pas à séparer de la fatalité de tout ce qui fut et de tout ce qui sera. L’homme n’est pas la conséquence d’une intention propre, d’une volonté, d’un but ; avec lui on ne fait pas d’essai pour atteindre un « idéal d’humanité », un « idéal de bonheur », ou bien un « idéal de moralité », — il est absurde de vouloir faire dévier son être vers un but quelconque. Nous avons inventé l’idée de « but » : dans la réalité le « but » manque… On est nécessaire, on est un morceau de destinée, on fait partie du tout, on est dans le tout, — il n’y a rien qui pourrait juger, mesurer, comparer, condamner notre existence, car ce serait là juger, mesurer, comparer et condamner le tout…Mais il n’y a rien en dehors du tout ! — Personne ne peut plus être rendu responsable, les catégories de l’être ne peuvent plus être ramenées à une cause première, le monde n’est plus une unité, ni comme monde sensible, ni comme « esprit » : cela seul est la grande délivrance, — par là l’innocence du devenir est rétablie… L’idée de « Dieu » fut jusqu’à présent la plus grande objection contre l’existence… Nous nions Dieu, nous nions la responsabilité en Dieu : par là seulement nous sauvons le monde.
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Friedrich Nietzsche (Twilight of the Idols)
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Quand je vis avec mes semblables, ma pensée s'occupe d'eux si exclusivement, soit pour les aider à vivre bien, soit pour comprendre pourquoi ils vivent mal, que j'oublie absolument de vivre pour mon compte. Quand je m'aperçois que j'ai fait pour eux mon possible et que je ne leur suis plus nécessaire, ou, ce qui arrive plus souvent, que je ne leur suis bon à rien, j'éprouve le besoin de vivre avec ce moi intérieur qui s'identifie à la nature et au rêve de la vie dans l'éternel et dans l'infini. La nature, je le sais, parle dans l'homme plus que dans les arbres et les rochers; mais elle y parle follement, elle y est plus souvent délirante que sage, elle y est pleine d'illusions ou de mensonges. Les animaux sauvages eux-mêmes sont tourmentés d'un besoin d'existence qui nous empêche de savoir ce qu'ils pensent et si leurs obscures manifestations ne sont pas trompeuses. Dès qu'ils subissent des besoins et des passions, ils doivent les satisfaire à tout prix, et toute logique de leur instinct de conservation doit céder à cette sauvage logique de la faim et de l'amour. Où donc trouver, où donc surprendre la voix du vrai absolu dans la nature? Hélas, dans le silence des choses inertes, dans le mutisme de ce qui ne ment pas! la face impassible du rocher qui boit le soleil, le front sans ombre du glacier qui regarde la lune, la morne altitude des lieux inaccessibles, exercent sur nous un rassérénement inexplicable. Là, nous nous sentons comme suspendus entre ciel et terre, dans une région d'idées où il ne peut y avoir que Dieu ou rien, et, s'il n'y a rien, nous sentons que nous ne sommes rien nous-mêmes et que nous n'existons pas; car rien ne peut se passer de sa raison d'être.
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George Sand (Le dernier amour)
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Mais le revenu annuel de toute société est toujours précisément égal à la valeur échangeable de tout le produit annuel de son industrie, ou plutôt c'est précisément la même chose que cette valeur échangeable. Par conséquent, puisque chaque individu tâche, le plus qu'il peut, 1° d'employer son capital à faire valoir l'industrie nationale, et - 2° de diriger cette industrie de manière à lui faire produire la plus grande valeur possible, chaque individu travaille nécessairement à rendre aussi grand que possible le revenu annuel de la société. A la vérité, son intention, en général, n'est pas en cela de servir l'intérêt public, et il ne sait même pas jusqu'à quel point il peut être utile à la société. En préférant le succès de l'industrie nationale à celui de l'industrie étrangère, il ne pense qu'à se donner personnellement une plus grande sûreté ; et en dirigeant cette industrie de manière à ce que son produit ait le plus de valeur possible, il ne pense qu'à son propre gain ; en cela, comme dans beaucoup d'autres cas, il est conduit par une main invisible à remplir une fin qui n'entre nullement dans ses intentions ; et ce n'est pas toujours ce qu'il y a de plus mal pour la société, que cette fin n'entre pour rien dans ses intentions. Tout en ne cherchant que son intérêt personnel, il travaille souvent d'une manière bien plus efficace pour l'intérêt de la société, que s'il avait réellement pour but d'y travailler. Je n'ai jamais vu que ceux qui aspiraient, dans leurs entreprises de commerce, à travailler pour le bien général, aient fait beaucoup de bonnes choses. Il est vrai que cette belle passion n'est pas très commune parmi les marchands, et qu'il ne faudrait pas de longs discours pour les en guérir.
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Adam Smith (An Inquiry into the Nature and Causes of the Wealth of Nations)
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Chaque fois que je vais dans un super-market, ce qui du reste m'arrive rarement, je me crois en Russie. C'est la même nourriture imposée d'en haut, pareille où qu'on aille, imposée par des trusts au lieu de l'être par des organismes d’État. Les États-Unis, en un sens, sont aussi totalitaires que l'URSS, et dans l'un comme dans l'autre pays, et comme partout d'ailleurs, le progrès (c'est-à-dire l'accroissement de l'immédiat bien-être humain) ou même le maintien du présent état de choses dépend de structures de plus en plus complexes et de plus en plus fragiles. Comme l'humanisme un peu béat du bourgeois de 1900, le progrès à jet continu est un rêve d'hier. Il faut réapprendre à aimer la condition humaine telle qu'elle est, accepter ses limitations et ses dangers, se remettre de plain-pied avec les choses, renoncer à nos dogmes de partis, de pays, de classes, de religions, tous intransigeants et donc tous mortels. Quand je pétris la pâte, je pense aux gens qui ont fait pousser le blé, je pense aux profiteurs qui en font monter artificiellement le prix, aux technocrates qui en ont ruiné la qualité - non que les techniques récentes soient nécessairement un mal, mais parce qu'elles se sont mises au service de l'avidité qui en est un, et parce que la plupart ne peuvent s'exercer qu'à l'aide de grandes concentrations de forces, toujours pleines de potentiels périls. Je pense aux gens qui n'ont pas de pain, et à ceux qui en ont trop, je pense à la terre et au soleil qui font pousser les plantes. Je me sens à la fois idéaliste et matérialiste. Le prétendu idéaliste ne voit pas le pain, ni le prix du pain, et le matérialiste, par un curieux paradoxe, ignore ce que signifie cette chose immense et divine que nous appelons "la matière". (p. 242)
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Marguerite Yourcenar (Les Yeux ouverts : Entretiens avec Matthieu Galey)
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Moi qui ai eu la chance, malgré quelques grosses séquelles, de me relever et de retrouver une autonomie totale, je pense souvent à cette incroyable période de ma vie et surtout à tous mes compagnons d’infortune. À part Samia, peut-être, je sais pertinemment que les autres sont toujours dans leurfauteuil, qu’ils sont contraints à une assistance permanente, qu’ils ont toujours droit aux sondages urinaires, aux transferts, aux fauteuils-douches, aux séances de verticalisation… Ils sont pour toujours confrontés à ces mots qui ont été mon quotidien, cette année-là J’ai fait trois autres centres de rééducation par la suite, mais jamais je n’ai autant ressenti la violence de cette immersion dans le monde du handicap que lors de ces quelques mois. Jamais je n’ai retrouvé autant de malheur et autant d’envie de vivre réunis en un même lieu, jamais je n’ai croisé autant de souffrance et d’énergie, autant d’horreur et d’humour. Et jamais plus je n’ai ressenti autant d’intensité dans le rapport des êtres humains à l’incertitude de leur avenir .. Je ne connaissais rien de ce monde-là avant mon accident. Je me demande même si j’y avais déjà vraiment pensé. Bien sûr, cette expérience aussi difficile pour moi que pour mon entourage proche m’a beaucoup appris sur moi-même, sur la fragilité de l’existence (et celle des vertèbres cervicales). Personne d’autre ne sait mieux que moi aujourd’hui qu’une catastrophe n’arrive pas qu’aux autres, que la vie distribue ses drames sans regarder qui les mérite le plus . Mais, au-delà de ces lourds enseignements et de ces grandes considérations, ce qui me reste surtout de cette période, ce sont les visages et les regards que j’ai croisés dans ce centre. Ce sont les souvenirs de ces êtres qui, à l’heure où j’écris ces lignes, continuent chaque jour de mener un combat qu’ils n’ont jamais l’impression de gagner.Si cette épreuve m’a fait grandir et progresser, c’est surtout grâce aux rencontres qu’elle m’aura offertes.
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Grand corps malade (Patients)
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Ce qui est tout à fait extraordinaire, c’est la rapidité avec laquelle la civilisation du Moyen-Âge tomba dans le plus complet oubli ; les hommes du XVIIe siècle n’en avaient plus la moindre notion, et les monuments qui en subsistaient ne représentaient plus rien à leurs yeux, ni dans l’ordre intellectuel, ni même dans l’ordre esthétique ; on peut juger par là combien la mentalité avait été changée dans l’intervalle. Nous n’entreprendrons pas de rechercher ici les facteurs, certainement fort complexes, qui concoururent à ce changement, si radical qu’il semble difficile d’admettre qu’il ait pu s’opérer spontanément et sans l’intervention d’une volonté directrice dont la nature exacte demeure forcément assez énigmatique ; il y a, à cet égard, des circonstances bien étranges, comme la vulgarisation, à un moment déterminé, et en les présentant comme des découvertes nouvelles, de choses qui étaient connues en réalité depuis fort longtemps, mais dont la connaissance, en raison de certains inconvénients qui risquaient d’en dépasser les avantages, n’avait pas été répandue jusque là dans le domaine public (1). Il est bien invraisemblable aussi que la légende qui fit du moyen âge une époque de « ténèbres », d’ignorance et de barbarie, ait pris naissance et se soit accréditée d’elle-même, et que la véritable falsification de l’histoire à laquelle les modernes se sont livrés ait été entreprise sans aucune idée préconçue ; mais nous n’irons pas plus avant dans l’examen de cette question, car, de quelque façon que ce travail se soit accompli, c’est, pour le moment, la constatation du résultat qui, en somme, nous importe le plus. (1) Nous ne citerons que deux exemples, parmi les faits de ce genre qui devaient avoir les plus graves conséquences : la prétendue invention de l’imprimerie, que les Chinois connaissaient antérieurement à l’ère chrétienne et la découverte « officielle » de l’Amérique, avec laquelle des communications beaucoup plus suivies qu’on ne le pense avaient existé durant tout le moyen âge.
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René Guénon (The Crisis of the Modern World)
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Qui vous le dit, qu’elle (la vie) ne vous attend pas ? Certes, elle continue, mais elle ne vous oblige pas à suivre le rythme. Vous pouvez bien vous mettre un peu entre parenthèses pour vivre ce deuil… accordez-vous le temps. *** Parce que ҫa me fait plaisir. Parce que je sais aussi que l’entourage peut se montrer très discret dans pareille situation, et que de se changer les idées de temps en temps fait du bien. Parce que je sais que vous aimez la montagne et que vous n’iriez pas toute seule. *** Oui. Si vous perdez une jambe, ҫa se voit, les gens sont conciliants. Et encore, pas tous. Mais quand c’est un morceau de votre cœur qui est arraché, ҫa ne se voit pas de l’extérieur, et c’est au moins aussi douloureux… Ce n’est pas de la faute des gens. Ils ne se fient qu’aux apparences. Il faut gratter pour voir ce qu’il y a au fond. Si vous jetez une grosse pierre dans une mare, elle va faire des remous à la surface. Des gros remous d'abord, qui vont gifler les rives, et puis des remous plus petits, qui vont finir par disparaître. Peu à peu, la surface redevient lisse et paisible. Mais la grosse pierre est quand même au fond. La grosse pierre est quand même au fond. *** La vie s’apparente à la mer. Il y a les bruit des vagues, quand elles s’abattent sur la plage, et puis le silence d’après, quand elles se retirent. Deux mouvement qui se croissent et s’entrecoupent sans discontinuer. L’un est rapide, violent, l’autre est doux et lent. Vous aimeriez vous retirer, dans le même silence des vagues, partir discrètement, vous faire oublier de la vie. Mais d’autres vague arrivent et arriveront encore et toujours. Parce que c’est ҫa la vie… C’est le mouvement, c’est le rythme, le fracas parfois, durant la tempête, et le doux clapotis quand tout est calme. Mais le clapotis quand même Un bord de mer n'est jamais silencieux, jamais. La vie non plus, ni la vôtre, ni la mienne. Il y a les grains de sables exposés aux remous et ceux protégés en haut de la plage. Lesquels envier? Ce n'est pas avec le sable d'en haut, sec et lisse, que l'on construit les châteaux de sable, c'est avec celui qui fraye avec les vagues car ses particules sont coalescentes. Vous arriverez à reconstruire votre château, vous le construirez avec des grains qui vous ressemblent, qui ont aussi connu les déferlantes de la vie, parce qu'avec eux, le ciment est solide.. *** « Tu ne sais jamais à quel point tu es fort jusqu’au jour où être fort reste la seule option. » C’est Bob Marley qui a dit ҫa. *** Manon ne referme pas violemment la carte du restaurant. Elle n’éprouve pas le besoin qu’il lui lise le menu pour qu’elle ne voie pas le prix, et elle trouvera égal que chaque bouchée vaille cinq euros. Manon profite de la vie. Elle accepte l’invitation avec simplicité. Elle défend la place des femmes sans être une féministe acharnée et cela ne lui viendrait même pas à l’idée de payer sa part. D’abord, parce qu’elle sait que Paul s’en offusquerait, ensuite, parce qu’elle aime ces petites marques de galanterie, qu’elle regrette de voir disparaître avec l’évolution d’une société en pertes de repères.
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Agnès Ledig (Juste avant le bonheur)
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Et puis, le manque est arrivé, dans le moment où je m’y attendais le moins, il est arrivé alors que j’avais presque fini par croire à mon amnésie. C’est terrible, la morsure du manque. Ça frappe sans prévenir, l’attaque est sournoise tout d’abord, on ressent juste une vive douleur qui disparaît presque dans la foulée, c’est bref, fugace, ça nous plie en deux mais on se redresse aussitôt, on considère que l’attaque est passée, on n’est même pas capable de nommer cette effraction, et pourquoi on la nommerait, on n’a pas eu le temps de s’inquiéter, c’est parti si vite, on se sent déjà beaucoup mieux, on se sent même parfaitement bien, tout de même on garde un souvenir désagréable de cette fraction de seconde, on tente de chasser le souvenir, et on y réussit, la vie continue, le monde nous appelle, l’urgence commande. Et puis, ça revient, le jour d’après, l’attaque est plus longue ou plus violente, on ploie les genoux, on a un méchant rictus, on se dit : quelque chose est à l'œuvre à l’intérieur, on pense à ces transports au cerveau qui annoncent les tumeurs, qui sont le signal enfin visible de cancers généralisés jusque-là insoupçonnables, on éprouve une sale frayeur, un mauvais pressentiment. Et puis, le mal devient lancinant, il s’installe comme un intrus qu’on n’est pas capable de chasser, il est moins mordant et plus profond, on comprend qu’on ne s’en débarrassera pas, qu’on est foutu. Oui, un jour, le manque est arrivé. Le manque de lui. Au début, j’ai fait comme si je ne m’en rendais pas compte, le traitant par l’indifférence, par le mépris, je me savais plus fort que lui, j’étais en mesure de le dominer, de l’éliminer, c’était juste une question de volonté ou de temps, je n’étais pas le genre à me laisser abattre par quelque chose d’aussi ténu, d’aussi risible. Et puis, il m’a fallu me rendre à l’évidence : ce match, je n’étais pas en train de le gagner, j’allais peut-être même le perdre, et je ne possédais pas le moyen d’échapper à cette déroute et plus je luttais, plus je cédais du terrain ; plus je niais la réalité, plus elle me sautait au visage. Autant le reconnaître : j’étais dévoré par ça, le manque de lui.
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Philippe Besson (Un homme accidentel)
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Esther n'était certainement pas bien éduquée au sens habituel du terme, jamais l'idée ne lui serait venue de vider un cendrier ou de débarrasser le relief de ses repas, et c'est sans la moindre gêne qu'elle laissait la lumière allumée derrière elle dans les pièces qu'elle venait de quitter (il m'est arrivé, suivant pas à pas son parcours dans ma résidence de San Jose, d'avoir à actionner dix-sept commutateurs); il n'était pas davantage question de lui demander de penser à faire un achat, de ramener d'un magasin où elle se rendait une course non destinée à son propre usage, ou plus généralement de rendre un service quelconque. Comme toutes les très jolies jeunes filles elle n'était au fond bonne qu'à baiser, et il aurait été stupide de l'employer à autre chose, de la voir autrement que comme un animal de luxe, en tout choyé et gåté, protégé de tout souci comme de toute tâche ennuyeuse ou pénible afin de mieux pouvoir se consacrer à son service exclusivement sexuel. Elle n'en était pas moins très loin d'être ce monstre d'arrogance, d'égoïsme absolu et froid, au, pour parler en termes plus baudelairiens, cette infernale petite salope que sont la plupart des très jolies jeunes filles; il y avait en elle la conscience de la maladie, de la faiblesse et de la mort. Quoique belle, très belle, infiniment érotique et désirable, Esther n'en était pas moins sensible aux infirmités animales, parce qu'elle les connaissait ; c'est ce soir-là que j'en pris conscience, et que je me mis véritablement à l'aimer. Le désir physique, si violent soit-il, n'avait jamais suffi chez moi à conduire à l'amour, il n'avait pu atteindre ce stade ultime que lorsqu'il s'accompagnait, par une juxtaposition étrange, d'une compassion pour l'être désiré ; tout être vivant, évidemment, mérite la compassion du simple fait qu'il est en vie et se trouve par là-même exposé à des souffrances sans nombre, mais face à un être jeune et en pleine santé c'est une considération qui paraît bien théorique. Par sa maladie de reins, par sa faiblesse physique insoupçonnable mais réelle, Esther pouvait susciter en moi une compassion non feinte, chaque fois que l'envie me prendrait d'éprouver ce sentiment à son égard. Étant elle-même compatissante, ayant même des aspirations occasionnelles à la bonté, elle pouvait également susciter en moi l'estime, ce qui parachevait l'édifice, car je n'étais pas un être de passion, pas essentiellement, et si je pouvais désirer quelqu'un de parfaitement méprisable, s'il m'était arrivé à plusieurs reprises de baiser des filles dans l'unique but d'assurer mon emprise sur elles et au fond de les dominer, si j'étais même allé jusqu'à utiliser ce peu louable sentiment dans des sketches, jusqu'à manifester une compréhension troublante pour ces violeurs qui sacrifient leur victime immédiatement après avoir disposé de son corps, j'avais par contre toujours eu besoin d'estimer pour aimer, jamais au fond je ne m'étais senti parfaitement à l'aise dans une relation sexuelle basée sur la pure attirance érotique et l'indifférence à l'autre, j'avais toujours eu besoin, pour me sentir sexuellement heureux, d'un minimum - à défaut d'amour - de sympathie, d'estime, de compréhension mutuelle; l'humanité non, je n'y avais pas renoncé. (La possibilité d'une île, Daniel 1,15)
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Michel Houellebecq
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Augmentez la dose de sports pour chacun, développez l'esprit d'équipe, de compétition, et le besoin de penser est éliminé, non ? Organiser, organisez, super-organisez des super-super-sports. Multipliez les bandes dessinées, les films; l'esprit a de moins en moins d'appétits. L'impatience, les autos-trades sillonnées de foules qui sont ici, là, partout, nulle part. Les réfugiés du volant. Les villes se transforment en auberges routières; les hommes se déplacent comme des nomades suivant les phases de la lune, couchant ce soir dans la chambre où tu dormais à midi et moi la veille. (1re partie) On vit dans l'immédiat. Seul compte le boulot et après le travail l'embarras du choix en fait de distractions. Pourquoi apprendre quoi que ce soit sinon à presser les boutons, brancher des commutateurs, serrer des vis et des écrous ? Nous n'avons pas besoin qu'on nous laisse tranquilles. Nous avons besoin d'être sérieusement tracassés de temps à autre. Il y a combien de temps que tu n'as pas été tracassée sérieusement ? Pour une raison importante je veux dire, une raison valable ? - Tu dois bien comprendre que notre civilisation est si vaste que nous ne pouvons nous permettre d'inquiéter ou de déranger nos minorités. Pose-toi la question toi-même. Que recherchons-nous, par-dessus tout, dans ce pays ? Les gens veulent être heureux, d'accord ? Ne l'as-tu pas entendu répéter toute la vie ? Je veux être heureux, déclare chacun. Eh bien, sont-ils heureux ? Ne veillons-nous pas à ce qu'ils soient toujours en mouvement, toujours distraits ? Nous ne vivons que pour ça, c'est bien ton avis ? Pour le plaisir, pour l'excitation. Et tu dois admettre que notre civilisation fournit l'un et l'autre à satiété. Si le gouvernement est inefficace, tyrannique, vous écrase d'impôts, peu importe tant que les gens n'en savent rien. La paix, Montag. Instituer des concours dont les prix supposent la mémoire des paroles de chansons à la mode, des noms de capitales d'État ou du nombre de quintaux de maïs récoltés dans l'Iowa l'année précédente. Gavez les hommes de données inoffensives, incombustibles, qu'ils se sentent bourrés de "faits" à éclater, renseignés sur tout. Ensuite, ils s'imagineront qu'ils pensent, ils auront le sentiment du mouvement, tout en piétinant. Et ils seront heureux, parce que les connaissances de ce genre sont immuables. Ne les engagez pas sur des terrains glissants comme la philosophie ou la sociologie à quoi confronter leur expérience. C'est la source de tous les tourments. Tout homme capable de démonter un écran mural de télévision et de le remonter et, de nos jours ils le sont à peu près tous, est bien plus heureux que celui qui essais de mesurer, d'étalonner, de mettre en équations l'univers ce qui ne peut se faire sans que l'homme prenne conscience de son infériorité et de sa solitude. Nous sommes les joyeux drilles, les boute-en-train, toi, moi et les autres. Nous faisons front contre la marée de ceux qui veulent plonger le monde dans la désolation en suscitant le conflit entre la théorie et la pensée. Nous avons les doigts accrochés au parapet. Tenons bon. Ne laissons pas le torrent de la mélancolie et de la triste philosophie noyer notre monde. Nous comptons sur toi. Je ne crois pas que tu te rendes compte de ton importance, de notre importance pour protéger l'optimisme de notre monde actuel.
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Ray Bradbury (Fahrenheit 451)