Un Regard Quotes

We've searched our database for all the quotes and captions related to Un Regard. Here they are! All 100 of them:

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Si quelqu'un aime une fleur qui n'existe qu'à un exemplaire dans les millions et les millions d'étoiles, ça suffit pour qu'il soit heureux quand il les regarde.
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Antoine de Saint-Exupéry
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Le souvenir n'est qu'un regard posĂ© de temps en temps sur des ĂȘtres devenus intĂ©rieurs,mais qui ne dĂ©pendent pas de la mĂ©moire pour continuer d'exister.
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Marguerite Yourcenar (L'ƒuvre au noir)
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Aimer, ce n'est pas se regarder l'un l'autre, c'est regarder ensemble dans la mĂȘme direction.
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Antoine de Saint-Exupéry (Wind, Sand and Stars)
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Fuir, toujours, et courir sans relĂąche. Et puis, un jour, s'arrĂȘter pour dire Ă  quelqu'un, en le regardant droit dans les yeux : c'est toi dont j'ai besoin, vraiment. Et le croire.
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FrĂ©dĂ©ric Beigbeder (L'ÉgoĂŻste romantique)
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Il suffit d’un instant. Un regard. Une rencontre. Pour bouleverser une existence. La bonne personne, le bon moment. Le caprice complice du hasard.
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Guillaume Musso (Central Park)
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Granny and Elsa used to watch the evening news together. Now and then Elsa would ask Granny why grown-ups were always doing such idiotic things to each other. Granny usually answered that it was because grown-ups were generally people, and people are generally shits. Elsa countered that grown-ups were also responsible for a lot of good things in between all the idiocy – space exploration, the UN, vaccines and cheese slicers, for instance. Granny then said the real trick of life was that almost no one is entirely a shit and almost no one is entirely not a shit. The hard part of life is keeping as much on the ‘not-a-shit’ side as one can.
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Fredrik Backman (My Grandmother Sends Her Regards and Apologises)
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Nous ne serons heureux, se dit-elle alors, que lorsque nous n'aurons plus besoin les uns des autres. Quand nous pourrons vivre une vie Ă  nous, une vie qui nous appartienne, qui ne regarde pas les autres. Quand nous serons libres.
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LeĂŻla Slimani (Chanson douce)
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Quant Ă  moi, maintenant, j'ai fermĂ© mon Ăąme. Je ne dis plus Ă  personne ce que je crois, ce que je pense et ce que j'aime. Me sachant condamnĂ© Ă  l'horrible solitude, je regarde les choses, sans jamais Ă©mettre mon avis. Que m'importent les opinions, les querelles, les plaisirs, les croyances ! Ne pouvant rien partager avec personne, je me suis dĂ©sintĂ©ressĂ© de tout. Ma pensĂ©e, invisible, demeure inexplorĂ©e. J'ai des phrases banales pour rĂ©pondre aux interrogations de chaque jour, et un sourire qui dit "oui", quand je ne veux mĂȘme pas prendre la peine de parler.
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Guy de Maupassant (Le Horla et autres nouvelles fantastiques)
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Un bon livre, au contraire, ne cherche pas Ă  vous captiver, il vous fait regarder vers le haut (le ciel sans nuage d'Ă©tĂ©) tout en plongeant au fond de vous-mĂȘme.
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Dany LaferriĂšre (L'art presque perdu de ne rien faire)
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Il y a des moments rares dans l’existence oĂč une porte s’ouvre et oĂč la vie vous offre une rencontre que vous n’attendiez plus. Celle de l’ĂȘtre complĂ©mentaire qui vous accepte tel que vous ĂȘtes, qui vous prend dans votre globalitĂ©, qui devine et admet vos contradictions, vos peurs, votre ressentiment, votre colĂšre, le torrent de boue sombre qui coule dans votre tĂȘte. Et qui l’apaise. Celui qui vous tend un miroir dans lequel vous n’avez plus peur de vous regarder.
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Guillaume Musso (Central Park)
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The genocide had been tolerated by the so-called international community, but I was told that the UN regarded the corpse-eating dogs as a health problem.
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Philip Gourevitch (We Wish to Inform You That Tomorrow We Will Be Killed With Our Families)
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Lorsque tu veux savoir si tu es dans un endroit riche ou pauvre, tu regardes les poubelles. Si tu vois ni ordures ni poubelles, c'est trÚs riche. Si tu vois des poubelles et pas d'ordures, c'est riche. Si tu vois des ordures à cÎté des poubelles, c'est ni riche ni pauvre: c'est touristique. Si tu vois les ordures sans les poubelles, c'est pauvre. Et si les gens habitent dans les ordures, c'est trÚs trÚs pauvre.
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Éric-Emmanuel Schmitt (Monsieur Ibrahim and The Flowers of the Qur'an)
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Mais il avait oubliĂ© l’inventaire, il ne voyait pas son empire, ces magasins crevant de richesses. Tout avait disparu, les victoires bruyantes d’hier, la fortune colossale de demain. D’un regard dĂ©sespĂ©rĂ©, il suivait Denise, et quand elle eut passĂ© la porte, il n’y eut plus rien, la maison devint noire.
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Émile Zola (The Ladies' Paradise)
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Un feu sans allumettes est aussi facile Ă  allumer qu’un Ă©clat d’intelligence dans le regard d’une vache.
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Pierre Bottero (D'un monde Ă  l'autre (La QuĂȘte d'Ewilan, #1))
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Le Chat Viens, mon beau chat, sur mon coeur amoureux; Retiens les griffes de ta patte, Et laisse-moi plonger dans tes beaux yeux, MĂȘlĂ©s de mĂ©tal et d'agate. Lorsque mes doigts caressent Ă  loisir Ta tĂȘte et ton dos Ă©lastique, Et que ma main s'enivre du plaisir De palper ton corps Ă©lectrique, Je vois ma femme en esprit. Son regard, Comme le tien, aimable bĂȘte, Profond et froid, coupe et fend comme un dard, Et, des pieds jusques Ă  la tĂȘte, Un air subtil, un dangereux parfum, Nagent autour de son corps brun.
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Charles Baudelaire (Les Fleurs du Mal)
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J'ai souvent pensĂ© alors que si l'on m'avait fait vivre dans un tronc d'arbre sec, sans autre occupaion que de regarder la fleur du ciel au-dessus de ma tĂȘte, je m'y serais peu Ă  peu habituĂ©. J'aurais attendu des passages d'oiseaux ou de rencontres de nuages comme j'attendais ici les curieuses cravates de mon avocat et comme, dans un autre monde, je patientais jusqu'au samedi pour Ă©treindre le corps de Marie.
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Albert Camus (The Stranger)
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Pour le voir, il faut bien regarder, chercher. Je dis aux jeunes: cherchez un peu, vous allez trouver. La pire des attitudes est l'indifférence, dire «je n'y peux rien, je me débrouille». En vous comportant ainsi, vous perdez l'une des composantes essentielles qui fait l'humain. Une des composantes indispensables: la faculté d'indignation et l'engagement qui en est la conséquence.
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Stéphane Hessel (Indignez-vous !)
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J'ai connu et je connais encore, dans ma vie, des bonheurs inouĂŻs. Depuis mon enfance, par exemple, j'ai toujours aimĂ© les concombres salĂ©s, pas les cornichons, mais les concombres, les vrais, les seuls et uniques, ceux qu'on appelle concombres Ă  la russe. J'en ai toujours trouvĂ© partout. Souvent, je m'en achĂšte une livre, je m'installe quelque part au soleil, au bord de la mer, ou n'importe oĂč, sur un trottoir ou sur un banc, je mords dans mon concombre et me voilĂ  complĂštement heureux. Je reste lĂ , au soleil, le cƓur apaisĂ©, en regardant les choses et les hommes d'un Ɠil amical et je sais que la vie vaut vraiment la peine d'ĂȘtre vĂ©cue, que le bonheur est accessible, qu'il suffit simplement de trouver sa vocation profonde, et de se donner Ă  ce qu'on aime avec un abandon total de soi.
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Romain Gary (Promise at Dawn)
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‱ On peut ĂȘtre avec quelqu’un pour fuir sa solitude, on peut partager son quotidien pour digĂ©rer une rupture en continuant d’entretenir le souvenir d’un autre. On peut parler Ă  quelqu’un en Ă©coutant la voix d’un autre, regarder quelqu’un dans les yeux en voyant ceux d’un autre.
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Marc Levy (Un sentiment plus fort que la peur)
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A Mademoiselle Oui, femmes, quoi qu'on puisse dire, Vous avez le fatal pouvoir De nous jeter par un sourire Dans l'ivresse ou le dĂ©sespoir. Oui, deux mots, le silence mĂȘme, Un regard distrait ou moqueur, Peuvent donner Ă  qui vous aime Un coup de poignard dans le coeur. Oui, votre orgueil doit ĂȘtre immense, Car, grĂące Ă  notre lĂąchetĂ©, Rien n'Ă©gale votre puissance, Sinon votre fragilitĂ©. Mais toute puissance sur terre Meurt quand l'abus en est trop grand, Et qui sait souffrir et se taire S'Ă©loigne de vous en pleurant. Quel que soit le mal qu'il endure, Son triste rĂŽle est le plus beau. J'aime encore mieux notre torture Que votre mĂ©tier de bourreau.
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Alfred de Musset
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Tous les hommes sont menteurs, inconstants, faux, bavards, hypocrites, orgueilleux et lĂąches, mĂ©prisables et sensuels ; toutes les femmes sont perfides, artificieuses, vaniteuses, curieuses et dĂ©pravĂ©es ; le monde n'est qu'un Ă©gout sans fond oĂč les phoques les plus informes rampent et se tordent sur des montagnes de fange ; mais il y a au monde une chose sainte et sublime, c'est l'union de deux de ces ĂȘtres si imparfaits et si affreux. On est souvent trompĂ© en amour, souvent blessĂ© et souvent malheureux ; mais on aime, et quand on est sur le bord de sa tombe, on se retourne pour regarder en arriĂšre ; et on se dit : " J'ai souffert souvent, je me suis trompĂ© quelquefois, mais j'ai aimĂ©. C'est moi qui ai vĂ©cu, et non pas un ĂȘtre factice crĂ©Ă© par mon orgueil et mon ennui.
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Alfred de Musset (On ne badine pas avec l'amour)
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Queremos que el fotĂłgrafo sea un espĂ­a en la casa del amor y de la muerte y que los retratados no sean conscientes de la cĂĄmara, se encuentren con "la guardia baja".
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Susan Sontag (Regarding the Pain of Others)
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C’est en regardant les objets du quotidien, tel un couteau à beurre, que l’on se rend compte que quelqu’un est parti et qu’il ne reviendra plus ; un stupide couteau à beurre qui taille à jamais des tranches de solitude dans votre vie.
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Marc Levy (Le premier jour)
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Y entonces harĂ­a un nombre para Ă©l
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Patrick Rothfuss (The Slow Regard of Silent Things (The Kingkiller Chronicle, #2.5))
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Tes yeux sont revenus d’un pays arbitraire OĂč nul n’a jamais su ce que c’est qu’un regard
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Paul Éluard (Capital of Pain)
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La Nature est un temple oĂč de vivants piliers Laissent parfois sortir de confuses paroles; L'homme y passe Ă  travers des forĂȘts de symboles Qui l'observent avec des regards familiers.
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Charles Baudelaire (Les Fleurs du Mal)
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Le courage, c'est de dominer ses propres fautes, d'en souffrir, mais de n'en pas ĂȘtre accablĂ© et de continuer son chemin. Le courage, c'est d'aimer la vie et de regarder la mort d'un regard tranquille ; c'est d'aller Ă  l'idĂ©al et de comprendre le rĂ©el ; c'est d'agir et de se donner aux grandes causes sans savoir quelle rĂ©compense rĂ©serve Ă  notre effort l'univers profond, ni s'il lui rĂ©serve une rĂ©compense. Le courage, c'est de chercher la vĂ©ritĂ© et de la dire ; c'est de ne pas subir la loi du mensonge triomphant qui passe, et de ne pas faire Ă©cho, de notre Ăąme, de notre bouche et de nos mains aux applaudissements imbĂ©ciles et aux huĂ©es fanatiques.
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Jean JaurĂšs
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Ninguna definiciĂłn compleja de lo que es o podrĂĄ ser la fotografĂ­a atenuarĂĄ jamĂĄs el placer deparado por una foto de un hecho inesperado que capta a mitad de la acciĂłn un fotĂłgrafo alerta.
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Susan Sontag (Regarding the Pain of Others)
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Est-ce que j'ai seulement envie de quelque chose? J'ai tout. Chaque matin j'ouvre les yeux et je me découvre milliardaire: la vie est là, discrÚte, bruyante, colorée, petite, immense. [...] Vraiment, j'ai tout. Pourquoi aurais-je envie de quelques chose de plus? Y a-t-il quelque chose de plus que tout? [...] Je ne comprends rien à ce monde. J'adore regarder ce monde auquel je ne comprends rien. Le regarder et l'écouter. [...] Voir, entendre, aimer. La vie est un cadeau dont je défais les ficelles chaque matin, au réveil. La vie est un trésor dont je découvre le plus beau chaque soir, avant de fermer les paupiÚres: Geai assise au pied du lit, souriante.
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Christian Bobin (Ű§ŰšÙ„Ù‡ Ù…Ű­Ù„Ù‡)
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Environ une demi-seconde aprĂšs avoir terminĂ© votre livre, aprĂšs en avoir lu le dernier mot, le lecteur doit se sentir envahi d’un sentiment puissant; pendant un instant, il ne doit plus penser qu’à tout ce qu’il vient de lire, regarder la couverture et sourireavec une pointe de tristesse parce que tous les personnages vont lui manquer
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Joël Dicker (La Vérité sur l'Affaire Harry Quebert (Marcus Goldman, #1))
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Elle se mordit la langue quand Thorn pressa sa bouche contre la sienne. Sur le moment, elle ne comprit plus rien. Elle sentit sa barbe lui piquer le menton, son odeur de dĂ©sinfectant lui monter Ă  la tĂȘte, mais la seule pensĂ©e qui la traversa, stupide et Ă©vidente, fut quenelle avait une botte plantĂ©e dans son tibia. Elle voulut se reculer; Thorn l’en empĂȘcha. Il referma ses mains de part et d’autre de son visage, les doigts dans ses cheveux, prenant appui sur sa nuque avec une urgence qui les dĂ©sĂ©quilibra tous les deux. La bibliothĂšque dĂ©versa une pluie de documents sur eux. Quand Thorn s’écarte finalement, le souffle court, ce fut pour clouer un regard de fer dans ses lunettes. - je vous prĂ©viens. Les mots que vous m’avez dits, je ne vous laisserai pas revenir dessus. Sa voix Ă©tait Ăąpre, mais sous l’autoritĂ© des paroles il y avait comme une fĂȘlure. OphĂ©lie pouvait percevoir le pouls prĂ©cipitĂ© des mains qu’il appuyait maladroitement sur ses joues. Elle devait reconnaĂźtre que son propre cƓur jouait Ă  la balançoire. Thorn Ă©tait sans doute l’homme le plus dĂ©concertant qu’elle avait jamais rencontrĂ©, mais il l’a faisait se sentir formidablement vivante. - je vous aime, rĂ©pĂ©ta-y-elle d’un ton inflexible. C’est ce que j’aurais du vous rĂ©pondre quand vous vouliez connaĂźtre la raison de ma prĂ©sence Ă  Babel c’est ce que j’en aurais du vous rĂ©pondre chaque fois que vous vouliez savoir ce que j’en avais vraiment Ă  vous dire. Bien sĂ»r que je dĂ©sire percer les mystĂšres de Dieu et reprendre le contrĂŽle de ma vie, mais... vous faites partie de ma vie, justement. Je vous ai traitĂ© d’égoĂŻste et Ă  aucun moment je ne me suis mise, moi, Ă  votre place. Je vous demande pardon. 
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Christelle Dabos (La MĂ©moire de Babel (La Passe-Miroir, #3))
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On offre des fleurs parce que dans les fleurs se trouve le sens de l'Amour. Celui qui tente de posséder une fleur verra sa beauté se flétrir. Mais celui qui regarde simplement une fleur dans un champ la gardera pour toujours. Parce qu'elle va avec l'aprÚs-midi, le coucher du soleil, l'odeur de terre mouillée et les nuages sur l'horizon.
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Paulo Coelho (Brida)
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- Nous allons nous quitter maintenant. Tu vas descendre d'un cotĂ©, moi de l'autre et si nos ĂȘtres demeurent Ă  jamais liĂ©s, nos prĂ©sents dĂ©sormais divergent. - Non, hoqueta Ellana, pas maintenant. Demain. Plus tard. Il secoua la tĂȘte. - Quel autre moment plus beau, plus favorable choisir ? Tu es au sommet Ellana. Offre-moi le bonheur de te voir t'envoler. Il ferma les yeux une seconde. - S'il te plaĂźt. Un murmure. Qui perça le cƓur d'Ellana. Elle le caressa du regard une derniĂšre fois, lui sourit comme on fait une promesse et de dĂ©tourna. Il ne pleura que lorsqu'elle fut loin.
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Pierre Bottero (Ellana, l'Envol (Le Pacte des MarchOmbres, #2))
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Te montrer à l'univers, le temps d'un éclair, puis m'enfermer avec toi, seul, et te regarder pendant l'éternité.
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René Barjavel
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Ta voix, tes yeux, tes mains, tes lĂšvres, Nos silences, nos paroles, La lumiĂšre qui s’en va, la lumiĂšre qui revient, Un seul sourire pour nous deux, Par besoin de savoir, j’ai vu la nuit crĂ©er le jour sans que nous changions d’apparence, Ô bien-aimĂ© de tous et bien-aimĂ© d’un seul, En silence ta bouche a promis d’ĂȘtre heureuse, De loin en loin, ni la haine, De proche en proche, ni l’amour, Par la caresse nous sortons de notre enfance, Je vois de mieux en mieux la forme humaine, Comme un dialogue amoureux, le cƓur ne fait qu’une seule bouche Toutes les choses au hasard, tous les mots dits sans y penser, Les sentiments Ă  la dĂ©rive, les hommes tournent dans la ville, Le regard, la parole et le fait que je t’aime, Tout est en mouvement, il suffit d’avancer pour vivre, D’aller droit devant soi vers tout ce que l’on aime, J’allais vers toi, j’allais sans fin vers la lumiĂšre, Si tu souris, c’est pour mieux m’envahir, Les rayons de tes bras entrouvraient le brouillard.
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Paul Éluard
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À une passante La rue assourdissante autour de moi hurlait.‹ Longue, mince, en grand deuil, douleur majestueuse,‹ Une femme passa, d'une main fastueuse‹ Soulevant, balançant le feston et l'ourlet; Agile et noble, avec sa jambe de statue.‹ Moi, je buvais, crispĂ© comme un extravagant,‹ Dans son oeil, ciel livide oĂč germe l'ouragan,‹ La douceur qui fascine et le plaisir qui tue. Un Ă©clair . . . puis la nuit! — Fugitive beautĂ© ‹ Dont le regard m'a fait soudainement renaĂźtre,‹ Ne te verrai-je plus que dans l'Ă©ternitĂ©? Ailleurs, bien loin d'ici! trop tard! jamais peut-ĂȘtre!‹ Car j'ignore oĂč tu fuis, tu ne sais oĂč je vais,‹ Ô toi que j'eusse aimĂ©e, ĂŽ toi qui le savais!
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Charles Baudelaire (Les Fleurs du Mal)
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Ma vie est monotone. Je chasse les poules, les hommes me chassent. Toutes les poules se ressemblent, et tous les hommes se ressemblent. Je m'ennuie donc un peu. Mais, si tu m'apprivoises, ma vie sera comme ensoleillée. Je connaßtrai un bruit de pas qui sera différent de tous les autres. Les autres pas me font rentrer sous terre. Le tien m'appellera hors du terrier, comme une musique. Et puis regarde ! Tu vois, là-bas, les champs de blé ? Je ne mange pas de pain. Le blé pour moi est inutile. Les champs de blé ne me rappellent rien. Et ça, c'est triste ! Mais tu as des cheveux couleur d'or. Alors ce sera merveilleux quand tu m'auras apprivoisé ! Le blé, qui est doré, me fera souvenir de toi. Et j'aimerai le bruit du vent dans le blé...
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Antoine de Saint-Exupéry (The Little Prince)
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que ferais-je sans ce monde que ferais-je sans ce monde sans visage sans questions oĂč ĂȘtre ne dure qu'un instant oĂč chaque instant verse dans le vide dans l'oubli d'avoir Ă©tĂ© sans cette onde oĂč Ă  la fin corps et ombre ensemble s'engloutissent que ferais-je sans ce silence gouffre des murmures haletant furieux vers le secours vers l'amour sans ce ciel qui s'Ă©lĂšve sur la poussieĂšre de ses lests que ferais-je je ferais comme hier comme aujourd'hui regardant par mon hublot si je ne suis pas seul Ă  errer et Ă  virer loin de toute vie dans un espace pantin sans voix parmi les voix enfermĂ©es avec moi Translation... what would I do without this world what would I do without this world faceless incurious where to be lasts but an instant where every instant spills in the void the ignorance of having been without this wave where in the end body and shadow together are engulfed what would I do without this silence where the murmurs die the pantings the frenzies towards succour towards love without this sky that soars above its ballast dust what would I do what I did yesterday and the day before peering out of my deadlight looking for another wandering like me eddying far from all the living in a convulsive space among the voices voiceless that throng my hiddenness
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Samuel Beckett (Collected Poems in English and French)
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Nous ne pouvons savoir ! - Nous sommes accablés D'un manteau d'ignorance et d'étroites chimÚres ! Singes d'hommes tombés de la vulve des mÚres, Notre pùle raison nous cache l'infini ! Nous voulons regarder : - le Doute nous punit ! Le doute, morne oiseau, nous frappe de son aile... - Et l'horizon s'enfuit d'une fuite éternelle !...
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Arthur Rimbaud
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Aimer, ce n'est pas se regarder l'un l'autre, c'est regarder ensemble dans la mĂȘme direction.” (Love doesn’t mean gazing at each other, but looking, together, in the same direction.) Antoine de Saint-ExupĂ©ry
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E.M. Lindsey (Verismo (Magnum Opus, #1))
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« Courir aprĂšs un rĂȘve, cela a un prix. Cela peut exiger que nous abandonnions nos habitudes, cela peut nous faire traverser des difficultĂ©s, cela peut nous conduire Ă  des dĂ©ceptions, etc. Mais aussi Ă©levĂ© que soit le prix, ce n'est jamais aussi cher que le prix payĂ© par celui qui n'a pas vĂ©cu. Parce que cette personne va un jour regarder en arriĂšre et elle entendra son propre cƓur dire : “J'ai gaspillĂ© ma vie.” »
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Paulo Coelho (AdultĂšre (French Edition))
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- CYRANO, regardant Christian : Si j'avais Pour exprimer mon Ăąme un pareil interprĂšte ! - CHRISTIAN, avec dĂ©sespoir : Il me faudrait de l'Ă©loquence ! - CYRANO, brusquement : Je t'en prĂȘte ! Toi, du charme physique et vainqueur, prĂȘte-m'en : Et faisons Ă  nous deux un hĂ©ros de roman !
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Edmond Rostand (Cyrano de Bergerac)
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Et voilĂ . Maintenant le ressort est bandĂ©. Cela n'a plus qu'Ă  se dĂ©rouler tout seul. C'est cela qui est commode dans la tragĂ©die. On donne le petit coup de pouce pour que cela dĂ©marre, rien, un regard pendant une seconde Ă  une fille qui passe et lĂšve les bras dans la rue, une envie d'honneur un beau matin, au rĂ©veil, comme de quelque chose qui se mange, une question de trop qu'on se pose un soir
 C'est tout. AprĂšs, on n'a plus qu'Ă  laisser faire. On est tranquille. Cela roule tout seul. C'est minutieux, bien huilĂ© depuis toujours. La mort, la trahison, le dĂ©sespoir sont lĂ , tout prĂȘts, et les Ă©clats, et les orages, et les silences, tous les silences : le silence quand le bras du bourreau se lĂšve Ă  la fin, le silence au commencement quand les deux amants sont nus l'un en face de l'autre pour la premiĂšre fois, sans oser bouger tout de suite, dans la chambre sombre, le silence quand les cris de la foule Ă©clatent autour du vainqueur - et on dirait un film dont le son s'est enrayĂ©, toutes ces bouches ouvertes dont il ne sort rien, toute cette clameur qui n'est qu'une image, et le vainqueur, dĂ©jĂ  vaincu, seul au milieu de son silence

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Jean Anouilh
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Only the Christian Church can offer any rational objection to a complete confidence in the rich. For she has maintained from the beginning that the danger was not in man's environment, but in man. Further, she has maintained that if we come to talk of a dangerous environment, the most dangerous environment of all is the commodious environment. I know that the most modern manufacture has been really occupied in trying to produce an abnormally large needle. I know that the most recent biologists have been chiefly anxious to discover a very small camel. But if we diminish the camel to his smallest, or open the eye of the needle to its largest — if, in short, we assume the words of Christ to have meant the very least that they could mean, His words must at the very least mean this — that rich men are not very likely to be morally trustworthy. Christianity even when watered down is hot enough to boil all modern society to rags. The mere minimum of the Church would be a deadly ultimatum to the world. For the whole modern world is absolutely based on the assumption, not that the rich are necessary (which is tenable), but that the rich are trustworthy, which (for a Christian) is not tenable. You will hear everlastingly, in all discussions about newspapers, companies, aristocracies, or party politics, this argument that the rich man cannot be bribed. The fact is, of course, that the rich man is bribed; he has been bribed already. That is why he is a rich man. The whole case for Christianity is that a man who is dependent upon the luxuries of this life is a corrupt man, spiritually corrupt, politically corrupt, financially corrupt. There is one thing that Christ and all the Christian saints have said with a sort of savage monotony. They have said simply that to be rich is to be in peculiar danger of moral wreck. It is not demonstrably un-Christian to kill the rich as violators of definable justice. It is not demonstrably un-Christian to crown the rich as convenient rulers of society. It is not certainly un-Christian to rebel against the rich or to submit to the rich. But it is quite certainly un-Christian to trust the rich, to regard the rich as more morally safe than the poor.
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G.K. Chesterton
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Rien n'est jamais acquis à l'homme Ni sa force Ni sa faiblesse ni son coeur Et quand il croit Ouvrir ses bras son ombre est celle d'une croix Et quand il croit serrer son bonheur il le broie Sa vie est un étrange et douloureux divorce Il n'y a pas d'amour heureux Sa vie Elle ressemble à ces soldats sans armes Qu'on avait habillés pour un autre destin A quoi peut leur servir de se lever matin Eux qu'on retrouve au soir désoeuvrés incertains Dites ces mots Ma vie Et retenez vos larmes Il n'y a pas d'amour heureux Mon bel amour mon cher amour ma déchirure Je te porte dans moi comme un oiseau blessé Et ceux-là sans savoir nous regardent passer Répétant aprÚs moi les mots que j'ai tressés Et qui pour tes grands yeux tout aussitÎt moururent Il n'y a pas d'amour heureux Le temps d'apprendre à vivre il est déjà trop tard Que pleurent dans la nuit nos coeurs à l'unisson Ce qu'il faut de malheur pour la moindre chanson Ce qu'il faut de regrets pour payer un frisson Ce qu'il faut de sanglots pour un air de guitare Il n'y a pas d'amour heureux Il n'y a pas d'amour qui ne soit à douleur Il n'y a pas d'amour dont on ne soit meurtri Il n'y a pas d'amour dont on ne soit flétri Et pas plus que de toi l'amour de la patrie Il n'y a pas d'amour qui ne vive de pleurs Il n'y a pas d'amour heureux Mais c'est notre amour à tous les deux
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Louis Aragon (La Diane française: En Étrange Pays dans mon pays lui-mĂȘme)
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Peut-ĂȘtre faudra-t-il que quelqu’un ose leur apprendre Ă  regarder la dĂ©faite dans les yeux, ose leur expliquer que pour se relever il faut d’abord admettre qu’on est Ă  terre. Peut-ĂȘtre faudra-t-il que quelqu’un leur dise la vĂ©ritĂ© un jour.
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Amin Maalouf (Leo Africanus)
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Dans le regard des autres, nous recherchons d'abord notre propre reflet. Nous nous mettons en quĂȘte d'un unique miroir de rĂ©fĂ©rence. Cela signifie se mettre en quĂȘte de l'amour mais, en fait, il s'agit plutĂŽt de la quĂȘte de sa propre identitĂ©. Un coup de foudre s'avĂšre souvent la trouvaille d'un "bon miroir", nous renvoyant un reflet satisfaisant de nous-mĂȘme. On cherche alors Ă  s'aimer dans le regard de l'autre.
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Bernard Werber (Nous les dieux (Cycle des dieux #1))
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Il me semblait entendre ces paroles sur un rythme d'une douceur infinie, car son regard avait presque la sonorité, et les phrases que ses yeux m'envoyaient retentissaient au fond de mon coeur comme si une bouche invisible les eût soufflées dans mon ùme.
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Théophile Gautier
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A qui Ă©cris-tu? -A toi. En fait, je ne t'Ă©cris pas vraiment, j'Ă©cris ce que j'ai envie de faire avec toi... Il y avait des feuilles partout. Autour d'elle, Ă  ses pieds, sur le lit. J'en ai pris une au hasard: "...Pique-niquer, faire la sieste au bord d'une riviĂšre, manger des pĂȘches, des crevettes, des croissants, du riz gluant, nager, danser, m'acheter des chaussures, de la lingerie, du parfum, lire le journal, lĂ©cher les vitrines, prendre le mĂ©tro, surveiller l'heure, te pousser quand tu prends toute la place, Ă©tendre le linge, aller Ă  l'OpĂ©ra, faire des barbecues, rĂąler parce que tu as oubliĂ© le charbon, me laver les dents en mĂȘme temps que toi, t'acheter des caleçons, tondre la pelouse, lire le journal par-dessus ton Ă©paule, t'empĂȘcher de manger trop de cacahuĂštes, visiter les caves de la Loire, et celles de la Hunter Valley, faire l'idiote, jacasser, cueillir des mĂ»res, cuisiner, jardiner, te rĂ©veiller encore parce que tu ronfles, aller au zoo, aux puces, Ă  Paris, Ă  Londres, te chanter des chansons, arrĂȘter de fumer, te demander de me couper les ongles, acheter de la vaisselle, des bĂȘtises, des choses qui ne servent Ă  rien, manger des glaces, regarder les gens, te battre aux Ă©checs, Ă©couter du jazz, du reggae, danser le mambo et le cha-cha-cha, m'ennuyer, faire des caprices, bouder, rire, t'entortiller autour de mon petit doigt, chercher une maison avec vue sur les vaches, remplir d'indĂ©cents Caddie, repeindre un plafond, coudre des rideaux, rester des heures Ă  table Ă  discuter avec des gens intĂ©ressants, te tenir par la barbichette, te couper les cheveux, enlever les mauvaises herbes, laver la voiture, voir la mer, t'appeler encore, te dire des mots crus, apprendre Ă  tricoter, te tricoter une Ă©charpe, dĂ©faire cette horreur, recueillir des chats, des chiens, des perroquets, des Ă©lĂ©phants, louer des bicyclettes, ne pas s'en servir, rester dans un hamac, boire des margaritas Ă  l'ombre, tricher, apprendre Ă  me servir d'un fer Ă  repasser, jeter le fer Ă  repasser par la fenĂȘtre, chanter sous la pluie, fuire les touristes, m'enivrer, te dire toute la vĂ©ritĂ©, me souvenir que toute vĂ©ritĂ© n'est pas bonne Ă  dire, t'Ă©couter, te donner la main, rĂ©cupĂ©rer mon fer Ă  repasser, Ă©couter les paroles des chansons, mettre le rĂ©veil, oublier nos valises, m'arrĂȘter de courir, descendre les poubelles, te demander si tu m'aimes toujours, discuter avec la voisine, te raconter mon enfance, faire des mouillettes, des Ă©tiquettes pour les pots de confiture..." Et ça continuais comme ça pendant des pages et des pages...
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Anna Gavalda (Someone I Loved (Je l'aimais))
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La Courbe de tes yeux La courbe de tes yeux fait le tour de mon coeur, Un rond de danse et de douceur, Auréole du temps, berceau nocturne et sûr, Et si je ne sais plus tout ce que j'ai vécu C'est que tes yeux ne m'ont pas toujours vu. Feuilles de jour et mousse de rosée, Roseaux du vent, sourires parfumés, Ailes couvrant le monde de lumiÚre, Bateaux chargés du ciel et de la mer, Chasseurs des bruits et sources des couleurs, Parfums éclos d'une couvée d'aurores Qui gßt toujours sur la paille des astres, Comme le jour dépend de l'innocence Le monde entier dépend de tes yeux purs Et tout mon sang coule dans leurs regards.
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Paul Éluard (Capital of Pain)
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«  mais il y a au monde une chose sainte et sublime, c'est l'union de deux de ces ĂȘtres si imparfaits et si affreux. On est souvent trompĂ© en amour, souvent blessĂ© et souvent malheureux; mais on aime, et quand on est sur le bord de sa tombe, on se retourne pour regarder en arriĂšre et on se dit : j'ai souffert souvent, je me suis trompĂ© quelquefois, mais j'ai aimĂ©. C'est moi qui ai vĂ©cu, et non pas un ĂȘtre factice crĂ©Ă© par mon orgueil et mon ennui.»
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Alfred de Musset
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Quel bonheur dans ce temps-lĂ  ! quelle libertĂ© ! quel espoir ! quellle abondance d’illusions ! Il n’en restait plus maintenant ! Elle en avait dĂ©pensĂ© Ă  toutes les aventures de son Ăąme, par toutes les conditions successives, dans la virginitĂ©, dans le mariage et dans l’amour ; - les perdant ainsi continuellement le long de sa vie, comme un voyageur qui laisse quelque chose de sa richesse Ă  toutes les auberges de la route. Mais qui donc la rendait si malheureuse ? oĂč Ă©tait la catastrophe extraordinaire qui l’avait bouleversĂ©e ? Elle releva sa tĂȘte, regardant autour d’elle, comme pour chercher la cause de ce qui la faisait souffrir.
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Gustave Flaubert (Madame Bovary)
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La vie est une cîte. Tant qu'on monte, on regarde le sommet, et on se sent heureux; mais, lorsqu'on arrive en haut, on aperçoit tout d'un coup la descente, et la fin, qui est la mort. Ça va lentement quand on monte, mais ça va vite quand on descend. A votre ñge, on est joyeux. On espùre tant de choses, qui n'arrivent jamais d'ailleurs. Au mien, on n'attend plus rien... que la mort.
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Guy de Maupassant (Bel-Ami)
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ce qui convainc de la nécessité de la vie future, ce ne sont pas les raisonnements mais ceci : tu marches dans la vie la main dans la main avec un homme, et tout à coup, cet homme disparaßt là-bas dans le néant, et toi tu restes devant cet abßme et tu y plonges ton regard (Guerre et Paix, livre deuxiÚme, 2iÚme partie, ch. XII)
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Leo Tolstoy
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J'archive les heures qui passent. Tenir un journal fĂ©conde l'existence. Le rendez-vous quotidien devant la page blanche du journal contraint Ă  prĂȘter meilleure attention aux Ă©vĂ©nements de la journĂ©e - Ă  mieux Ă©couter, Ă  penser plus fort, Ă  regarder plus intensĂ©ment. Il serait dĂ©sobligeant de n'avoir rien Ă  inscrire sur sa page de calepin.
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Sylvain Tesson (Dans les forĂȘts de SibĂ©rie)
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À l'horloge de tes baisers, le temps se ramollit. Le jour met son pyjama d'Ă©toiles en cachette et s'Ă©vapore. L'orchestre Ă  moteur qui fulmine au feu rouge joue en sourdine. La lune te regarde Ă  travers la fenĂȘtre. Elle va peindre ses reflets sur ta peau. Du bout de mes doigts, je m'efforcerai d'ĂȘtre un tout petit peu plus que son pinceau.
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Mathias Malzieu (Le plus petit baiser jamais recensé)
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Kilmartin wrote a highly amusing and illuminating account of his experience as a Proust revisionist, which appeared in the first issue of Ben Sonnenberg's quarterly Grand Street in the autumn of 1981. The essay opened with a kind of encouragement: 'There used to be a story that discerning Frenchmen preferred to read Marcel Proust in English on the grounds that the prose of A la recherche du temps perdu was deeply un-French and heavily influenced by English writers such as Ruskin.' I cling to this even though Kilmartin thought it to be ridiculous Parisian snobbery; I shall never be able to read Proust in French, and one's opportunities for outfacing Gallic self-regard are relatively scarce.
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Christopher Hitchens (Love, Poverty, and War: Journeys and Essays)
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Je voulais les entendre lire les histoires de leurs ancĂȘtres, les regarder Ă©couter la musique de mes bardes. Elles ne voulaient que la viande sous la couronne. Exister par cela. Combler leur esprit vide. Chacun possĂšde un gouffre en la tĂȘte, chacun sait les monstres qui viennent y boire leur nĂ©ant. La chair ne sait pas combler les trous de la pensĂ©e.
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Justine Niogret (Mordred)
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je finirai bien par te rencontrer quelque part bon dieu! et contre tout ce qui me rend absent et douloureux par le mince regard qui me reste au fond du froid j'affirme ĂŽ mon amour que tu existes je corrige notre vie nous n'irons plus mourir de langueur Ă  des milles de distance dans nos rĂȘves bourrasques des filets de sang dans la soif craquelĂ©e de nos lĂšvres les Ă©paules baignĂ©es de vols de mouettes non j'irai te chercher nous vivrons sur la terre la dĂ©tresse n'est pas incurable qui fait de moi une Ă©pave de dĂ©rision, un ballon d'indĂ©cence un pitre aux larmes d'Ă©tincelles et de lĂ©sions profondes frappe l'air et le feu de mes soifs coule-moi dans tes mains de ciel de soie la tĂȘte la premiĂšre pour ne plus revenir
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Gaston Miron (L'Homme rapaillé)
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Alors que la lumiĂšre s'Ă©puise de faire des trous dans les nuages, je me couche sur la plage, devant un feu de bois, les chiens contre le flanc, la kayak remontĂ© de moitiĂ© sur la rive et, Ă©coutant la musique de la houle, je regarde griller mes poissons embrochĂ©s sur des pics de bois vert en pensant que la vie ne devrait ĂȘtre que cela: l'hommage rendu par l'adulte Ă  ses rĂȘves d'enfant.
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Sylvain Tesson (Dans les forĂȘts de SibĂ©rie)
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Tu vas voir, le regard des gens sur un mec handicapĂ© se fait en plusieurs temps. Quand les gens te rencontrent la premiĂšre fois, tu n’es rien d’autre qu’un handicapĂ©. Tu n’as pas d’histoire, pas de particularitĂ©s, ton handicap est ta seule identitĂ©. Ensuite, s’ils prennent un peu le temps, ils vont dĂ©couvrir une facette de ton caractĂšre. Ils verront alors si tu as de l’humour, si tu es dĂ©pressif
 Enfin, ils verront presque avec surprise que tu peux avoir une vraie personnalitĂ© qui s’ajoute Ă  ton statut d’handicapé .
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Grand corps malade (Patients)
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CYRANO Ă  LE BRET : Regarde-moi, mon cher, et dis quelle espĂ©rance Pourrait bien me laisser cette protubĂ©rance ! Oh ! je ne me fais pas d'illusion ! - Parbleu, Oui, quelquefois, je m'attendris, dans le soir bleu ; J'entre en quelque jardin oĂč l'heure se parfume ; Avec mon pauvre grand diable de nez je hume L'avril, - je suis des yeux, sous un rayon d'argent, Au bras d'un cavalier, quelque femme, en songeant Que pour marcher, Ă  petits pas, dans de la lune, Aussi moi j'aimerais au bras en avoir une, Je m'exalte, j'oublie... et j'aperçois soudain L'ombre de mon profil sur le mur du jardin !
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Edmond Rostand (Cyrano de Bergerac)
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D’oĂč viennent ces influences mystĂ©rieuses qui changent en dĂ©couragement notre bonheur et notre confiance en dĂ©tresse ? On dirait que l’air, l’air invisible est plein d’inconnaissables Puissances, dont nous subissons les voisinages mystĂ©rieux. Je m’éveille plein de gaietĂ©, avec des envies de chanter dans la gorge. – Pourquoi ? – Je descends le long de l’eau ; et soudain, aprĂšs une courte promenade, je rentre dĂ©solĂ©, comme si quelque malheur m’attendait chez moi. – Pourquoi ? – Est-ce un frisson de froid qui, frĂŽlant ma peau, a Ă©branlĂ© mes nerfs et assombri mon Ăąme ? Est-ce la forme des nuages, ou la couleur du jour, la couleur des choses, si variable, qui, passant par mes yeux, a troublĂ© ma pensĂ©e ? Sait-on ? Tout ce qui nous entoure, tout ce que nous voyons sans le regarder, tout ce que nous frĂŽlons sans le connaĂźtre, tout ce que nous touchons sans le palper, tout ce que nous rencontrons sans le distinguer, a sur nous, sur nos organes et, par eux, sur nos idĂ©es, sur notre cƓur lui-mĂȘme, des effets rapides, surprenants et inexplicables ?
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Guy de Maupassant (Le Horla et autres contes fantastiques (Classiques hachette))
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Nous nous Ă©tions enfin rencontrĂ©s. On chemine longtemps cĂŽte Ă  cĂŽte, enfermĂ© dans son propre silence, ou bien l'on Ă©change des mots qui ne transportent rien. Mais voici l'heure du danger. Alors on s'Ă©paule l'un Ă  l'autre. On dĂ©couvre que l'on appartient Ă  la mĂȘme communautĂ©. On s'Ă©largit par la dĂ©couverte d'autres consciences. On se regarde avec un grand sourire. On est semblable Ă  ce prisonnier dĂ©livrĂ© qui s'Ă©merveille de l'immensitĂ© de la mer. (p. 37)
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Antoine de Saint-Exupéry (Wind, Sand and Stars)
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Tout en pensant, il marche Ă  grands pas. Tout en marchant, il rĂ©flĂ©chit Ă  grands traits. Il atteint Ombre blanche au moment oĂč le soleil bascule derriĂšre l'horizon, teintant les Causses d'une somptueuse lumiĂšre orangĂ©e. Un frĂ©missement dans ses bras lui fait baisser la tĂȘte. La fille a bougĂ©. Elle ouvre les yeux. Échange fugace. Échange parfait. Maximilien se noie dans le violet de son regard et en ressort grandi. Le dernier des Caussenards a trouvĂ© son destin.
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Pierre Bottero (La ForĂȘt des captifs (Les Mondes d'Ewilan, #1))
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That until the philosophy which holds one race superior and another inferior is finally and permanently discredited and abandoned: That until there are no longer first-class and second class citizens of any nation; That until the color of a man's skin is of no more significance than the color of his eyes; That until the basic human rights are equally guaranteed to all without regard to race; That until that day, the dream of lasting peace and world citizenship and the rule of international morality will remain but a fleeting illusion, to be pursued but never attained; And until the ignoble and unhappy regimes that hold our brothers in Angola, in Mozambique and in South Africa in subhuman bondage have been toppled and destroyed; Until bigotry and prejudice and malicious and inhuman self-interest have been replaced by understanding and tolerance and good-will; Until all Africans stand and speak as free beings, equal in the eyes of all men, as they are in the eyes of Heaven; Until that day, the African continent will not know peace. We Africans will fight, if necessary, and we know that we shall win, as we are confident in the victory of good over evil.
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Haile Selassie
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Mon rĂȘve familier Je fais souvent ce rĂȘve Ă©trange et pĂ©nĂ©trant D'une femme inconnue, et que j'aime, et qui m'aime Et qui n'est, chaque fois, ni tout Ă  fait la mĂȘme Ni tout Ă  fait une autre, et m'aime et me comprend. Car elle me comprend, et mon coeur, transparent Pour elle seule, hĂ©las ! cesse d'ĂȘtre un problĂšme Pour elle seule, et les moiteurs de mon front blĂȘme, Elle seule les sait rafraĂźchir, en pleurant. Est-elle brune, blonde ou rousse ? - Je l'ignore. Son nom ? Je me souviens qu'il est doux et sonore Comme ceux des aimĂ©s que la Vie exila. Son regard est pareil au regard des statues, Et, pour sa voix, lointaine, et calme, et grave, elle a L'inflexion des voix chĂšres qui se sont tues.
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Paul Verlaine (PoĂšmes saturniens)
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AprĂšs tout
, reprit le docteur, et il hĂ©sita encore, regardant Tarrou avec attention, c’est une chose qu’un homme comme vous peut comprendre, n’est-ce pas, mais puisque l’ordre de monde est rĂ©glĂ© par la mort, peut-ĂȘtre vaut-il mieux pour Dieu qu’on ne croie pas en lui et qu’on lutte de toutes ses forces contre la mort, sans lever les yeux vers le ciel oĂč il se tait.
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Albert Camus (The Plague)
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Un homme était apparu au sommet des escaliers. Il tenait à la main un sabre ruisselant de sang et une détermination effrayante irradiait de ses yeux gris acier. Il ne lui fallut qu'une fraction de seconde pour jauger la situation. Pour que son regard capte celui d'Ellana. Pour qu'il comprenne l'incroyable présent que lui offrait la vie. Pour qu'il en juge l'inestimable valeur et en mesure la terrible fragilité. Pour qu'il bondisse et atterrisse au milieu des mercenaires. Une fraction de seconde. Edwin entreprit de se frayer un passage jusqu'à Ellana.
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Pierre Bottero (Ellana, la Prophétie (Le Pacte des MarchOmbres, #3))
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The summer of 1950 was the hottest in living memory, with high humidity and temperatures above 100 F. My mother had been washing every day, and she was attacked for this, too. Peasants, especially in the North where Mrs. Mi came from, washed very rarely, because of the shortage of water. In the guerrillas, men and women used to compete to see who had the most 'revolutionary insects' (lice). Cleanliness was regarded as un proletarian When the steamy summer turned into cool autumn my father's bodyguard weighed in with a new accusation: my mother was 'behaving like a Kuomintang official's grand lady' because she had used my father's leftover hot water. At the time, in order to save fuel, there was a rule that only officials above a certain rank were entitled to wash with hot water. My father fell into this group, but my mother did not. She had been strongly advised by the women in my father's family not to touch cold water when she came near to delivery time. After the bodyguard's criticism, my father would not let my mother use his water. My mother felt like screaming at him for not taking her side against the endless intrusions into the most irrelevant recesses of her life.
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Jung Chang (Wild Swans: Three Daughters of China)
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Je me suis figurĂ© qu’une femme devait faire plus de cas de son Ăąme que de son corps, contre l’usage gĂ©nĂ©ral qui veut qu’elle permette qu’on l’aime avant d’avouer qu’elle aime, et qu’elle abandonne ainsi le trĂ©sor de son coeur avant de consentir Ă  la plus lĂ©gĂšre prise sur celui de sa beautĂ©. J’ai voulu, oui, voulu absolument tenter de renverser cette marche uniforme ; la nouveautĂ© est ma rage. Ma fantaisie et ma paresse, les seuls dieux dont j’aie jamais encensĂ© les autels, m’ont vainement laissĂ© parcourir le monde, poursuivi par ce bizarre dessein ; rien ne s’offrait Ă  moi. Peut-ĂȘtre je m’explique mal. J’ai eu la singuliĂšre idĂ©e d’ĂȘtre l’époux d’une femme avant d’ĂȘtre son amant. J’ai voulu voir si rĂ©ellement il existait une Ăąme assez orgueilleuse pour demeurer fermĂ©e lorsque les bras sont ouverts, et livrer la bouche Ă  des baisers muets ; vous concevez que je ne craignais que de trouver cette force Ă  la froideur. Dans toutes les contrĂ©es qu’aime le soleil, j’ai cherchĂ© les traits les plus capables de rĂ©vĂ©ler qu’une Ăąme ardente y Ă©tait enfermĂ©e : j’ai cherchĂ© la beautĂ© dans tout son Ă©clat, cet amour qu’un regard fait naĂźtre ; j’ai dĂ©sirĂ© un visage assez beau pour me faire oublier qu’il Ă©tait moins beau que l’ĂȘtre invisible qui l’anime ; insensible Ă  tout, j’ai rĂ©sistĂ© Ă  tout,... exceptĂ© Ă  une femme, – Ă  vous, Laurette, qui m’apprenez que je me suis un peu mĂ©pris dans mes idĂ©es orgueilleuses ; Ă  vous, devant qui je ne voulais soulever le masque qui couvre ici-bas les hommes qu’aprĂšs ĂȘtre devenu votre Ă©poux. – Vous me l’avez arrachĂ©, je vous supplie de me pardonner, si j’ai pu vous offenser. ( Le prince )
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Alfred de Musset (La nuit vénitienne)
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Elle se mordit la langue quand Thorn pressa sa bouche contre la sienne. Sur le moment, elle ne comprit plus rien. Elle sentit sa barbe lui piquer le menton, son odeur de dĂ©sinfectant lui monter Ă  la tĂȘte, mais la seule pensĂ©e qui la traversa, stupide et Ă©vidente, fut quenelle avait une botte plantĂ©e dans son tibia. Elle voulut se reculer; Thorn l’en empĂȘcha. Il referma ses mains de part et d’autre de son visage, les doigts dans ses cheveux, prenant appui sur sa nuque avec une urgence qui les dĂ©sĂ©quilibra tous les deux. La bibliothĂšque dĂ©versa une pluie de documents sur eux. Quand Thorn s’écarte finalement, le souffle court, ce fut pour clouer un regard de fer dans ses lunettes. - je vous prĂ©viens. Les mots que vous m’avez dits, je ne vous laisserai pas revenir dessus. Sa voix Ă©tait Ăąpre, mais sous l’autoritĂ© des paroles il y avait comme une fĂȘlure. OphĂ©lie pouvait percevoir le pouls prĂ©cipitĂ© des mains qu’il appuyait maladroitement sur ses joues. Elle devait reconnaĂźtre que son propre cƓur jouait Ă  la balançoire. Thorn Ă©tait sans doute l’homme le plus dĂ©concertant qu’elle avait jamais rencontrĂ©, mais il l’a faisait se sentir formidablement vivante. - je vous aime, rĂ©pĂ©ta-y-elle d’un ton inflexible. C’est ce que j’aurais du vous rĂ©pondre quand vous vouliez connaĂźtre la raison de ma prĂ©sence Ă  Babel c’est ce que j’en aurais du vous rĂ©pondre chaque fois que vous vouliez savoir ce que j’en avais vraiment Ă  vous dire. Bien sĂ»r que je dĂ©sire percer les mystĂšres de Dieu et reprendre le contrĂŽle de ma vie, mais... vous faites partie de ma vie, justement. Je vous ai traitĂ© d’égoĂŻste et Ă  aucun moment je ne me suis mise, moi, Ă  votre place. Je vous demande pardon. 
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Dabos Christelle
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Je cherchais une Ăąme qui et me ressemblĂąt, et je ne pouvais pas la trouver. Je fouillais tous les recoins de la terre; ma persĂ©vĂ©rance Ă©tait inutile. Cependant, je ne pouvais pas rester seul. Il fallait quelqu’un qui approuvĂąt mon caractĂšre; il fallait quelqu’un qui eĂ»t les mĂȘmes idĂ©es que moi. C’était le matin; le soleil se leva Ă  l’horizon, dans toute sa magnificence, et voilĂ  qu’à mes yeux se lĂšve aussi un jeune homme, dont la prĂ©sence engendrait les fleurs sur son passage. Il s’approcha de moi, et, me tendant la main: "Je suis venu vers toi, toi, qui me cherches. BĂ©nissons ce jour heureux." Mais, moi: "Va-t’en; je ne t’ai pas appelĂ©: je n’ai pas besoin de ton amitiĂ©." C’était le soir; la nuit commençait Ă  Ă©tendre la noirceur de son voile sur la nature. Une belle femme, que je ne faisais que distinguer, Ă©tendait aussi sur moi son influence enchanteresse, et me regardait avec compassion; cependant, elle n’osait me parler. Je dis: "Approche-toi de moi, afin que je distingue nettement les traits de ton visage; car, la lumiĂšre des Ă©toiles n’est pas assez forte, pour les Ă©clairer Ă  cette distance." Alors, avec une dĂ©marche modeste, et les yeux baissĂ©s, elle foula l’herbe du gazon, en se dirigeant de mon cĂŽtĂ©. DĂšs que je la vis: "Je vois que la bontĂ© et la justice ont fait rĂ©sidence dans ton coeur: nous ne pourrions pas vivre ensemble. Maintenant, tu admires ma beautĂ©, qui a bouleversĂ© plus d’une; mais, tĂŽt ou tard, tu te repentirais de m’avoir consacrĂ© ton amour; car, tu ne connais pas mon Ăąme. Non que je te sois jamais infidĂšle: celle qui se livre Ă  moi avec tant d’abandon et de confiance, avec autant de confiance et d’abandon, je me livre Ă  elle; mais, mets-le dans ta tĂȘte, pour ne jamais l’oublier: les loups et les agneaux ne se regardent pas avec des yeux doux." Que me fallait-il donc, Ă  moi, qui rejetais, avec tant de dĂ©goĂ»t, ce qu’il y avait de plus beau dans l’humanitĂ©!
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Comte de Lautréamont (Les Chants de Maldoror)
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Le petit prince Ă©tait maintenant tout pĂąle de colĂšre. «Il y a des millions d'annĂ©es que les fleurs fabriquent des Ă©pines. Il y a des millions d'annĂ©es que les moutons mangent quand mĂȘme les fleurs. Et ce n'est pas sĂ©rieux de chercher Ă  comprendre pourquoi elles se donnent tant de mal pour se fabriquer des Ă©pines qui ne servent jamais Ă  rien? Ce n'est pas important la guerre des moutons et des fleurs? Ce n'est pas sĂ©rieux et plus important que les additions d'un gros Monsieur rouge? Et si je connais, moi, une fleur unique au monde, qui n'existe nulle part, sauf dans ma planĂšte, et qu'un petit mouton peut anĂ©antir d'un seul coup, comme ça, un matin, sans se rendre compte de ce qu'il fait, ce n'est pas important ça?» Il rougit, puis reprit: «Si quelqu'un aime une fleur qui n'existe qu'Ă  un exemplaire dans les millions d'Ă©toiles, ça suffit pour qu'il soit heureux quand il les regarde. Il se dit: "Ma fleur est lĂ  quelque part..." Mais si le mouton mange la fleur, c'est pour lui comme si, brusquement, toutes les Ă©toiles s'Ă©teignaient! Et ce n'est pas important ça!»
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Antoine de Saint-Exupéry (The Little Prince)
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Et que faudrait-il faire ? Chercher un protecteur puissant, prendre un patron, Et comme un lierre obscur qui circonvient un tronc Et s'en fait un tuteur en lui lĂ©chant l'Ă©corce, Grimper par ruse au lieu de s'Ă©lever par force ? Non, merci ! DĂ©dier, comme tous ils le font, Des vers aux financiers ? se changer en bouffon Dans l'espoir vil de voir, aux lĂšvres d'un ministre, NaĂźtre un sourire, enfin, qui ne soit pas sinistre ? Non, merci ! DĂ©jeuner, chaque jour, d'un crapaud ? Avoir un ventre usĂ© par la marche ? une peau Qui plus vite, Ă  l'endroit des genoux, devient sale ? ExĂ©cuter des tours de souplesse dorsale ?... Non, merci ! D'une main flatter la chĂšvre au cou Cependant que, de l'autre, on arrose le chou, Et donneur de sĂ©nĂ© par dĂ©sir de rhubarbe, Avoir son encensoir, toujours, dans quelque barbe ? Non, merci ! Se pousser de giron en giron, Devenir un petit grand homme dans un rond, Et naviguer, avec des madrigaux pour rames, Et dans ses voiles des soupirs de vieilles dames ? Non, merci ! Chez le bon Ă©diteur de Sercy Faire Ă©diter ses vers en payant ? Non, merci ! S'aller faire nommer pape par les conciles Que dans des cabarets tiennent des imbĂ©ciles ? Non, merci ! Travailler Ă  se construire un nom Sur un sonnet, au lieu d'en faire d'autres ? Non, Merci ! Ne dĂ©couvrir du talent qu'aux mazettes ? Être terrorisĂ© par de vagues gazettes, Et se dire sans cesse : "Oh ! pourvu que je sois Dans les petits papiers du Mercure François" ?... Non, merci ! Calculer, avoir peur, ĂȘtre blĂȘme, PrĂ©fĂ©rer faire une visite qu'un poĂšme, RĂ©diger des placets, se faire prĂ©senter ? Non, merci ! non, merci ! non, merci ! Mais... chanter, RĂȘver, rire, passer, ĂȘtre seul, ĂȘtre libre, Avoir l'Ɠil qui regarde bien, la voix qui vibre, Mettre, quand il vous plaĂźt, son feutre de travers, Pour un oui, pour un non, se battre, - ou faire un vers ! Travailler sans souci de gloire ou de fortune, À tel voyage, auquel on pense, dans la lune ! N'Ă©crire jamais rien qui de soi ne sortĂźt, Et modeste d'ailleurs, se dire : mon petit, Sois satisfait des fleurs, des fruits, mĂȘme des feuilles, Si c'est dans ton jardin Ă  toi que tu les cueilles ! Puis, s'il advient d'un peu triompher, par hasard, Ne pas ĂȘtre obligĂ© d'en rien rendre Ă  CĂ©sar, Vis-Ă -vis de soi-mĂȘme en garder le mĂ©rite, Bref, dĂ©daignant d'ĂȘtre le lierre parasite, Lors mĂȘme qu'on n'est pas le chĂȘne ou le tilleul, Ne pas monter bien haut, peut-ĂȘtre, mais tout seul !
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Edmond Rostand (Cyrano de Bergerac)
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Nous restĂąmes quelques instants Ă  nous fixer avec la mĂȘme hargne dans le regard. La piĂšce semblait onduler sous le poids du combat qui s’y Ă©tait dĂ©roulĂ©. L’espace qui nous sĂ©parait paraissait tantĂŽt se comprimer, tantĂŽt se dilater, jusqu’à ce que, finalement, il n’y ait plus entre nous que nos deux bouches qui s’emmĂȘlaient dans un baiser furieux. Je le dĂ©testais pour tout ce qu’il venait de me dire, et je n’en avais que plus envie de lui.
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Marika Gallman (Rage de dents (Maeve Regan, #1))
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Lorsque j’ai commencĂ© Ă  voyager en Gwendalavir aux cĂŽtĂ©s d'EwĂŹlan et de Salim, je savais que, au fil de mon Ă©criture, ma route croiserait celle d'une multitude de personnages. Personnages attachants ou irritants, discrets ou hauts en couleurs, pertinents ou impertinents, sympathiques ou malĂ©fiques... Je savais cela et je m'en rĂ©jouissais. Rien, en revanche, ne m'avait prĂ©parĂ© Ă  une rencontre qui allait bouleverser ma vie. Rien ne m'avait prĂ©parĂ© Ă  Ellana. Elle est arrivĂ©e dans la QuĂȘte Ă  sa maniĂšre, tout en finesse tonitruante, en dĂ©licatesse remarquable, en discrĂ©tion Ă©tincelante. Elle est arrivĂ©e Ă  un moment clef, elle qui se moque des serrures, Ă  un moment charniĂšre, elle qui se rit des portes, au sein d’un groupe constituĂ©, elle pourtant pĂ©trie d’indĂ©pendance, son caractĂšre forgĂ© au feu de la solitude. Elle est arrivĂ©e, s'est glissĂ©e dans la confiance d'Ewilan avec l'aisance d'un songe, a captĂ© le regard d’Edwin et son respect, a sĂ©duit Salim, conquis maĂźtre Duom... Je l’ai regardĂ©e agir, admiratif ; sans me douter un instant de la toile que sa prĂ©sence, son charisme, sa beautĂ© tissaient autour de moi. Aucun calcul de sa part. Ellana vit, elle ne calcule pas. Elle s'est contentĂ©e d'ĂȘtre et, ce faisant, elle a tranquillement troquĂ© son statut de personnage secondaire pour celui de figure emblĂ©matique d'une double trilogie qui ne portait pourtant pas son nom. Convaincue du pouvoir de l'ombre, elle n'a pas cherchĂ© la lumiĂšre, a Ă©paulĂ© Ewilan dans sa quĂȘte d'identitĂ© puis dans sa recherche d'une parade au danger qui menaçait l'Empire. Sans elle, Ewilan n'aurait pas retrouvĂ© ses parents, sans elle, l'Empire aurait succombĂ© Ă  la soif de pouvoir des Valinguites, mais elle n’en a tirĂ© aucune gloire, trop Ă©quilibrĂ©e pour ignorer que la victoire s'appuyait sur les Ă©paules d'un groupe de compagnons soudĂ©s par une indĂ©fectible amitiĂ©. Lorsque j'ai posĂ© le dernier mot du dernier tome de la saga d'Ewilan, je pensais que chacun de ses compagnons avait mĂ©ritĂ© le repos. Que chacun d'eux allait suivre son chemin, chercher son bonheur, vivre sa vie de personnage libĂ©rĂ© par l'auteur aprĂšs une Ă©prouvante aventure littĂ©raire. Chacun ? Pas Ellana. Impossible de la quitter. Elle hante mes rĂȘves, se promĂšne dans mon quotidien, fluide et insaisissable, transforme ma vision des choses et ma perception des autres, crochĂšte mes pensĂ©es intimes, escalade mes dĂ©sirs secrets... Un auteur peut-il tomber amoureux de l'un de ses personnages ? Est-ce moi qui ai crĂ©Ă© Ellana ou n'ai-je vraiment commencĂ© Ă  exister que le jour oĂč elle est apparue ? Nos routes sont-elles liĂ©es Ă  jamais ? — Il y a deux rĂ©ponses Ă  ces questions, souffle le vent Ă  mon oreille. Comme Ă  toutes les questions. Celle du savant et celle du poĂšte. — Celle du savant ? Celle du poĂšte ? Qu'est-ce que... — Chut... Écris.
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Pierre Bottero (Ellana (Le Pacte des MarchOmbres, #1))
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- Tu reviendras quand ? - Il y a deux rĂ©ponses Ă  ta question. Comme Ă  toutes les questions, tu le sais bien. Je commence par laquelle ? À l'extĂ©rieur, un bruit terrifiant s'Ă©leva. Le bruit des armes qui s'entrechoquent, fendent la chair, donnent la mort. La fillette tressaillit mais sa mĂšre, en lui caressant la joue, rĂ©ussit Ă  l'enfermer dans l'univers de son regard. - Laquelle ? - Celle du savant. - Je ne reviendrais peut ĂȘtre jamais, ma princesse. - Elle est nulle cette rĂ©ponse. Donne moi celle du poĂšte. Isaya se pencha pour lui murmurer Ă  l'oreille. - Je serai toujours avec toi. OĂč que tu te trouves, quoi que tu fasses, je serai lĂ . Toujours. Elle avait placĂ© la main sur sa poitrine. La petite la regarda avec attention. - Dans mon cƓur ? - Oui. - D'accord...
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Pierre Bottero (Ellana (Le Pacte des MarchOmbres, #1))
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Et dans mon kiosque d'aiguilles qui procure une illusion de chaleur, je regarde le puits noir du lac. La masse de glace m'apparait comme un creuset cauchemardesque. Je perçois la force Ă  l'oeuvre sous ce couvercle. Dans le caveau, un univers grouille de bĂȘtes qui broient, dĂ©vorent et sectionnent. Dans les profondeurs, des Ă©ponges balancent lentement leurs branches. Des coquillages enroulent leurs spires, battant la mesure du temps et crĂ©ent des bijoux de nacre en forme de constellation. Des silures monstrueux rĂŽdent dans les vasiĂšres. Des poissons carnassiers migrent vers la surface pour le festin nocturne et les holocaustes de crustacĂ©s. Des bancs d'ombles tracent leurs chorĂ©graphies benthiques. Des bactĂ©ries barattent les scories, les digĂšrent, purifient l'eau. Ce morne malaxage s'opĂšre en silence, sous le miroir oĂč les Ă©toiles n'ont mĂȘme pas la force de se reflĂ©ter.
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Sylvain Tesson (Dans les forĂȘts de SibĂ©rie)
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Gamberge Tu gamberges. Tu regardes ta vie. Ça ne colle pas. Alors tu dĂ©primes. Combien de vies ratĂ©es pour une vie rĂ©ussie ? C'est quoi, les proportions ? Qu'est-ce que j'ai mal fait pour en arriver lĂ  ? C'est quand, que j'ai merdĂ© ? J'ai encore le temps de me rattraper ? Combien de chances il me reste pour m'en sortir pas trop mal ? Elle peut encore changer, ma vie ? Je ne suis pas fait pour cette vie-lĂ  ? Ça se change, une vie ? Je veux dire, ça se change vraiment ? C'est quoi, le problĂšme ? C'est ma nĂ©vrose ? Comment on fait pour tordre une nĂ©vrose ? J'ai mangĂ© mon pain blanc, alors ? JE l'ai mangĂ© sans m'en rendre compte, c'est ça ? Je vais encore ramer longtemps comme ça ? C'est encore loin, l'AmĂ©rique ? Est-ce qu'un jour moi aussi je mĂąchouillerai un brin d'herbe sous un saule en me disant que la vie est belle ? Qu'elle est sacrement belle ? Faut que j'arrĂȘte de gamberger, c'est pas bon.
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David Thomas (La Patience des buffles sous la pluie)
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Quand on s’attend au pire, le moins pire a une saveur toute particuliĂšre, que vous dĂ©gusterez avec plaisir, mĂȘme si ce n’est pas le meilleur. *** Ce n'est pas la vie qui est belle, c'est nous qui la voyons belle ou moins belle. Ne cherchez pas Ă  atteindre un bonheur parfait, mais contentez vous des petites choses de la vie, qui, mises bout Ă  bout, permettent de tenir la distance
 Les tout petit riens du quotidien, dont on ne se rend mĂȘme plus compte mais qui font que, selon la façon dont on les vit, le moment peut ĂȘtre plaisant et donne envie de sourire. Nous avons tous nos petits riens Ă  nous. Il faut juste en prendre conscience. *** Le silence a cette vertu de laisser parler le regard, miroir de l’ñme. On entend mieux les profondeurs quand on se tait. *** Au temps des sorciĂšres, les larmes d’homme devaient ĂȘtre trĂšs recherchĂ©es. C’est rare comme la bave de crapaud. Ce qu’elles pouvaient en faire, ça, je ne sais pas. Une potion pour rendre plus gentil ? Plus humain ? Moins avare en Ă©motion ? Ou moins poilu ? *** Quand un silence s’installe, on dit qu’un ange passe
 *** Vide. Je me sens vide et Ă©teinte. J’ai l’impression d’ĂȘtre un peu morte, moi aussi. D’ĂȘtre un champ de bataille. Tout a brĂ»lĂ©, le sol est irrĂ©gulier, avec des trous bĂ©ants, des ruines Ă  perte de vue. Le silence aprĂšs l’horreur. Mais pas le calme aprĂšs la tempĂȘte, quand on se sent apaisĂ©. Moi, j’ai l’impression d’avoir sautĂ© sur une mine, d’avoir explosĂ© en mille morceaux, et de ne mĂȘme pas savoir comment je vais faire pour les rassembler, tous ses morceaux, ni si je les retrouverai tous. *** Accordez-vous le droit de vivre votre chagrin. Il y a un temps pour tout. *** Ce n’est pas d’intuition dont est dotĂ© Romain, mais d’attention. *** ÒȘa fait toujours plaisir un cadeau, surtout de la part des gens qu’on aime.
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AgnĂšs Ledig (Juste avant le bonheur)
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Si il y avait bien une chose que l'Occupation nous avait apprise, c'Ă©tait Ă  nous taire. A ne jamais montrer ce que nous pensions du IIIĂšme Reich et de cette guerre. Nous n'Ă©tions que des dĂ©tenus dans nos propres maisons, dans notre pays. Plus libres d'avoir une opinion. Parce que mĂȘme nos pensĂ©es pouvaient nous enchaĂźner. Ce soir, je l'avais oubliĂ©. Pourtant il ne m'arrĂȘta pas. Il ne me demanda pas de le suivre pour un petit interrogatoire. AprĂšs tout, il n'y avait que les rĂ©sistants pour tenir un discours si tranchĂ©, non? Il n'y avait qu'eux pour oser dire de telles choses devant un caporal de la Wehrmacht. Alors pourquoi me tendit-il simplement sa fourche? Puisque la mienne Ă©tait inutilisable... J'hĂ©sitai Ă  la prendre. Quand je le fis, il refusa de la lĂącher. Nous restĂąmes lĂ , une seconde. Nos mains se frĂŽlant sur le manche en bois et nos regards accrochĂ©s. - Je ne suis pas innocent c'est vrai, m'avoua-t-il. Je ne le serai jamais plus et je devrai vivre avec toutes mes fautes. J'ai tuĂ©, je tuerai sans doute encore. J'ai blessĂ© et je blesserai encore. J'ai menti et je mentirai encore. Non, c'est vrai, il n'y a plus rien d'innocent en moi. Mais je l'ai Ă©tĂ©. Au dĂ©but. Avant la guerre. Je l'Ă©tais vraiment, vous savez. Innocent. Sa voix n'Ă©tait qu'un murmure. - Pourquoi me dites-vous ça? - Pour que vous le sachiez. - Mais pourquoi? demandai-je encore. Il recula d'un pas. - Bonne soirĂ©e, monsieur Lambert, dit-il sans me rĂ©pondre. Il quitta les Ă©curies sans un bruit. Aussi discrĂštement qu'il Ă©tait arrivĂ©.
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Lily Haime (À l'ombre de nos secrets)
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J'ai ri. Il a secouĂ© la tĂȘte et m'a regardĂ©e. - Quoi ? Ai-je demandĂ©. - Rien, a t-il rĂ©pondu. - Pourquoi tu me regardes comme ça ? Augustus a eu un petit sourire. - Parce-que tu es belle. J'aime regarder les gens beaux et, depuis un certain temps, j'ai dĂ©cidĂ© de ne me refuser aucun petit plaisir de la vie. D'autant plus que, comme tu l'as dĂ©licieusement fait remarquer, tout ceci tombera dans l'oubli. - Je ne suis pas bel... - Tu es belle comme mille Natalie Portman. Natalie Portman dans V pour Vendetta. (...) - Ah bon ? S'est-il Ă©tonnĂ©. Fille sublime, cheveux courts, dĂ©teste l'autoritĂ© et ne peut s'empĂȘcher de craquer pour le garçon qui ne lui apportera que des ennuies. Ta bio, en somme.
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John Green (The Fault in Our Stars)
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Dans l’automne de l’annĂ©e 1816, John Melmoth, Ă©lĂšve du collĂšge de la TrinitĂ©, Ă  Dublin, suspendit momentanĂ©ment ses Ă©tudes pour visiter un oncle mourant, et de qui dĂ©pendaient toutes ses espĂ©rances de fortune. John, qui avait perdu ses parents, Ă©tait le fils d’un cadet de famille, dont la fortune mĂ©diocre suffisait Ă  peine pour payer les frais de son Ă©ducation ; mais son oncle Ă©tait vieux, cĂ©libataire et riche. Depuis sa plus tendre enfance, John avait appris, de tous ceux qui l’entouraient, Ă  regarder cet oncle avec ce sentiment qui attire et repousse Ă  la fois, ce respect mĂȘlĂ© du dĂ©sir de plaire, que l’on Ă©prouve pour l’ĂȘtre qui tient en quelque sorte en ses mains le fil de notre existence.
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Charles Robert Maturin (Melmoth, l'homme errant)
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Tu peux ĂȘtre grave et fou, qui empĂȘche ? Tu peux ĂȘtre tout ce que tu veux et fou en surplus, mais il faut ĂȘtre fou, mon enfant. Regarde autour de toi le monde sans cesse grandissant de gens qui se prennent au sĂ©rieux. Outre qu'ils se donnent un ridicule irrĂ©mĂ©diable devant les esprits semblables au mien, ils se font une vie dangereusement constipĂ©e. Ils sont exactement comme si, Ă  la fois, ils se bourraient de tripes qui relĂąchent et de nĂšfles du Japon qui resserrent. Ils gonflent, gonflent, puis ils Ă©clatent et ça sent mauvais pour tout le monde. Je n'ai pas trouvĂ© d'image meilleure que celle-lĂ . D'ailleurs, elle me plaĂźt beaucoup. Il faudrait mĂȘme y employer trois ou quatre mots de dialecte de façon Ă  la rendre plus orduriĂšre que ce qu'elle est en piĂ©montais. Toi qui connais mon Ă©loignement naturel pour tout ce qui est grossier, cette recherche te montre bien tout le danger que courent les gens qui se prennent au sĂ©rieux devant le jugement des esprits originaux. Ne sois jamais une mauvaise odeur pour tout un royaume, mon enfant. PromĂšne-toi comme un jasmin au milieu de tous.
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Jean Giono (The Horseman on the Roof)
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La solitude est une chose bien Ă©trange. Elle vous envahit, tout doucement et sans faire de bruit, s’assoit Ă  vos cĂŽtĂ©s dans le noir, vous caresse les cheveux pendant votre sommeil. Elle s’enroule autour de vous, vous serre si fort que vous pouvez Ă  peine respirer, que vous n’entendez presque plus la pulsation du sang dans vos veines, tandis qu’elle file sur votre peau et effleure de ses lĂšvres le fin duvet de votre nuque. Elle s’installe dans votre cƓur, s’allonge prĂšs de vous la nuit, dĂ©vore comme une sangsue la lumiĂšre dans le moindre recoin. C’est une compagne de chaque instant, qui vous serre la main pour mieux vous tirer vers le bas quand vous luttez pour vous redresser. Vous vous rĂ©veillez le matin et vous vous demandez qui vous ĂȘtes. Vous n’arrivez pas Ă  vous endormir le soir et tremblez comme une feuille. Vous doutez vous doutez vous doutez. je dois je ne dois pas je devrais pourquoi je ne vais pas Et mĂȘme quand vous ĂȘtes prĂȘt Ă  lĂącher prise. Quand vous ĂȘtes prĂȘt Ă  vous libĂ©rer. Quand vous ĂȘtes prĂȘt Ă  devenir quelqu’un de nouveau. La solitude est une vieille amie debout Ă  votre cĂŽtĂ© dans le miroir ; elle vous regarde droit dans les yeux, vous met au dĂ©fi de mener votre vie sans elle. Vous ne pouvez pas trouver les mots pour lutter contre vous-mĂȘme, lutter contre les mots qui hurlent que vous n’ĂȘtes pas Ă  la hauteur, que vous ne le serez jamais vraiment, jamais vraiment. La solitude est une compagne cruelle, maudite. Parfois, elle ne veut simplement pas vous abandonner
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Tahereh Mafi (Unravel Me (Shatter Me, #2))
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A un moment j’ai mĂȘme laissĂ© Ă©chapper un son qui s’est prolongĂ© malgrĂ© moi en prenant de plus en plus de force, un son qui avait attendu ce jour prĂ©cis pour partir du fond de mes annĂ©es de tĂ©nĂšbres Ă  mal aimer des hommes qui m’ont mal aimĂ©e en retour et recouvrir ta poitrine comme une brĂ»lure ; c’était d’abord un son rauque et traĂźnant, une plainte animale qui n’avait rien du sanglot et qui en un vĂ©ritable appel Ă  la mort. A ce moment tout s’est arrĂȘtĂ©, je me suis soudain rappelĂ© cette mĂȘme scĂšne vĂ©cu avec toi alors qu’on venait de se rencontrer ; ce hurlement avait dĂ©jĂ  eu lieu et sa rĂ©pĂ©tition implacable m’a fait taire une fois pour toute. A ce moment aussi tu t’es Ă©cartĂ© de moi, sans doute pour la mĂȘme raison, tu t’es levĂ© dans une brusquerie qui a dĂ©logĂ© OrĂ©o de la chaise de ton bureau. Ne voulant pas te regarder dans les yeux, j’ai regardĂ© tes pieds. Mon hurlement avait tracĂ© une ligne infranchissable entre nous, en hurlant je venais de sonner le glas de notre histoire. Tu as dit des paroles que tu avais dĂ©jĂ  prononcĂ©es en d’autres circonstances et je suis partie, je savais que plus jamais on ne se reparlerait.
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Nelly Arcan (Folle)
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J’ai arpentĂ© les galeries sans fin des grandes bibliothĂšque, les rues de cette ville qui fĂ»t la nĂŽtre, celle oĂč nous partagions presque tous nos souvenirs depuis l’enfance. Hier, j’ai marchĂ© le long des quais, sur les pavĂ©s du marchĂ© Ă  ciel ouvert que tu aimais tant. Je me suis arrĂȘtĂ© par-ci par-lĂ , il me semblait que tu m’accompagnais, et puis je suis revenu dans ce petit bar prĂšs du port, comme chaque vendredi. Te souviendras-tu ? Je ne sais pas oĂč tu es. Je ne sais pas si tout ce que nous avons vĂ©cu avait un sens, si la vĂ©ritĂ© existe, mais si tu trouves ce petit mot un jour, alors tu sauras que j’ai tenu ma promesse, celle que je t’ai faite. A mon tour de te demander quelque chose, tu me le dois bien. Oublie ce que je viens d’écrire, en amitiĂ© on ne doit rien. Mais voici nĂ©anmoins ma requĂȘte : Dis-lui, dis-lui que quelque part sur cette terre, loin de vous, de votre temps, j’ai arpentĂ© les mĂȘmes rues, ri avec toi autour des mĂȘmes tables, et puisque les pierres demeurent, dis-lui que chacune de celles oĂč nous avons posĂ© nos mais et nos regards contient Ă  jamais une part de notre histoire. Dis-lui, que j’étais ton ami, que tu Ă©tais mon frĂšre, peut-ĂȘtre mieux encore puisque nous nous Ă©tions choisis, dis-lui que rien n’a jamais pu nous sĂ©parer, mĂȘme votre dĂ©part si soudain.
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Marc Levy (La prochaine fois)
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Patrice a vingt-quatre ans et, la premiĂšre fois que je l’ai vu, il Ă©tait dans son fauteuil inclinĂ© trĂšs en arriĂšre. Il a eu un accident vasculaire cĂ©rĂ©bral. Physiquement, il est incapable du moindre mouvement, des pieds jusqu’à la racine des cheveux. Comme on le dit souvent d’une maniĂšre trĂšs laide, il a l’aspect d’un lĂ©gume : bouche de travers, regard fixe. Tu peux lui parler, le toucher, il reste immobile, sans rĂ©action, comme s’il Ă©tait complĂštement coupĂ© du monde. On appelle ça le locked in syndrome.Quand tu le vois comme ça, tu ne peux qu’imaginer que l’ensemble de son cerveau est dans le mĂȘme Ă©tat. Pourtant il entend, voit et comprend parfaitement tout ce qui se passe autour de lui. On le sait, car il est capable de communiquer Ă  l’aide du seul muscle qui fonctionne encore chez lui : le muscle de la paupiĂšre. Il peut cligner de l’Ɠil. Pour l’aider Ă  s’exprimer, son interlocuteur lui propose oralement des lettres de l’alphabet et, quand la bonne lettre est prononcĂ©e, Patrice cligne de l’Ɠil.  Lorsque j’étais en rĂ©animation, que j’étais complĂštement paralysĂ© et que j’avais des tuyaux plein la bouche, je procĂ©dais de la mĂȘme maniĂšre avec mes proches pour pouvoir communiquer. Nous n’étions pas trĂšs au point et il nous fallait parfois un bon quart d’heure pour dicter trois pauvres mots. Au fil des mois, Patrice et son entourage ont perfectionnĂ© la technique. Une fois, il m’est arrivĂ© d’assister Ă  une discussion entre Patrice et sa mĂšre. C’est trĂšs impressionnant.La mĂšre demande d’abord : « Consonne ? » Patrice acquiesce d’un clignement de paupiĂšre. Elle lui propose diffĂ©rentes consonnes, pas forcĂ©ment dans l’ordre alphabĂ©tique, mais dans l’ordre des consonnes les plus utilisĂ©es. DĂšs qu’elle cite la lettre que veut Patrice, il cligne de l’Ɠil. La mĂšre poursuit avec une voyelle et ainsi de suite. Souvent, au bout de deux ou trois lettres trouvĂ©es, elle anticipe le mot pour gagner du temps. Elle se trompe rarement. Cinq ou six mots sont ainsi trouvĂ©s chaque minute.  C’est avec cette technique que Patrice a Ă©crit un texte, une sorte de longue lettre Ă  tous ceux qui sont amenĂ©s Ă  le croiser. J’ai eu la chance de lire ce texte oĂč il raconte ce qui lui est arrivĂ© et comment il se sent. À cette lecture, j’ai pris une Ă©norme gifle. C’est un texte brillant, Ă©crit dans un français subtil, lĂ©ger malgrĂ© la tragĂ©die du sujet, rempli d’humour et d’autodĂ©rision par rapport Ă  l’état de son auteur. Il explique qu’il y a de la vie autour de lui, mais qu’il y en a aussi en lui. C’est juste la jonction entre les deux mondes qui est un peu compliquĂ©e.Jamais je n’aurais imaginĂ© que ce texte si puissant ait Ă©tĂ© Ă©crit par ce garçon immobile, au regard entiĂšrement vide.  Avec l’expĂ©rience acquise ces derniers mois, je pensais ĂȘtre capable de diagnostiquer l’état des uns et des autres seulement en les croisant ; j’ai reçu une belle leçon grĂące Ă  Patrice.Une leçon de courage d’abord, Ă©tant donnĂ© la vitalitĂ© des propos que j’ai lus dans sa lettre, et, aussi, une leçon sur mes a priori. Plus jamais dorĂ©navant je ne jugerai une personne handicapĂ©e Ă  la vue seule de son physique. C’est jamais inintĂ©ressant de prendre une bonne claque sur ses propres idĂ©es reçues .
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Grand corps malade (Patients)
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- Je te croyais morte. La voix d'Edwin avait Ă©tĂ© un murmure, le premier souffle hĂ©sitant d'un espoir qui renaissait. Ellana laissa son regard dĂ©river vers le corps ensanglantĂ© d'Essindra. Une flambĂ©e de haine embrasa son cƓur et, durant un bref instant, elle souhaita que la mercenaire soit encore vivante pour pouvoir la tuer Ă  nouveau. Puis Essindra disparut de son esprit et elle embrassa Edwin. Un baiser brĂ»lant Ă  l'improbable parfum de miracle. Un baiser douceur tout en promesses d'Ă©ternitĂ©. Un baiser aveu. Peur, tĂ©nĂšbres et solitude. PassĂ©es. Edwin la serra contre lui, enfouit le visage dans son cou, se perdit dans son parfum et les cheveux fous derriĂšre sa nuque. Sentir son corps, percevoir les battements de son cƓur... Il revint doucement Ă  la vie. - Je t'aime. Ils avaient chuchotĂ© ensemble. Tressaillirent ensemble en entendant l'autre Ă©noncer ce qui Ă©tat l'origine, le centre et l'avenir du monde. - Je t'aime. Autour d'eux l'univers avait pĂąli devant cette Ă©vidence. - Je t'aime. - Ne meurs plus jamais. S'il-te-plaĂźt. Plus jamais. - Je ne peux pas mourir, je t'aime. Leur Ă©treinte devint plus pressante, leurs lĂšvres se cherchĂšrent pour un nouveau baiser, plus intense, plus sensuel, plus... Destan, coincĂ© entre son pĂšre et sa mĂšre, Ă©mit un petit cri de protestation. Sans que leurs Ăąmes ne se dĂ©tachent, Ellana et Edwin s'Ă©cartĂšrent pour contempler leur fils. Peut-on mourir de bonheur ? La question avait dĂ©jĂ  Ă©tĂ© posĂ©. Si les larmes qui embuaient les yeux d'Ellana et celles qui roulaient sur le visage d'Edwin avaient su parler, elles auraient sans doute rĂ©pondu.
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Pierre Bottero (Ellana, la Prophétie (Le Pacte des MarchOmbres, #3))
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J’allais ouvrir la bouche et aborder cette fille , quand quelqu’un me toucha l’épaule. Je me retournai, surpris, et j’aperçus un homme d’aspect ordinaire, ni jeune ni vieux, qui me regardait d’un air triste. — Je voudrais vous parler, dit-il. Je fis une grimace qu’il vit sans doute, car il ajouta : — « C’est important. » Je me levai et le suivis Ă  l’autre bout du bateau : — « Monsieur, reprit-il, quand l’hiver approche avec les froids, la pluie et la neige, votre mĂ©decin vous dit chaque jour : « Tenez-vous les pieds bien chauds, gardez-vous des refroidissements, des rhumes, des bronchites, des pleurĂ©sies. » Alors vous prenez mille prĂ©cautions, vous portez de la flanelle, des pardessus Ă©pais, des gros souliers, ce qui ne vous empĂȘche pas toujours de passer deux mois au lit. Mais quand revient le printemps avec ses feuilles et ses fleurs, ses brises chaudes et amollissantes, ses exhalaisons des champs qui vous apportent des troubles vagues, des attendrissements sans cause, il n’est personne qui vienne vous dire : « Monsieur, prenez garde Ă  l’amour ! Il est embusquĂ© partout ; il vous guette Ă  tous les coins ; toutes ses ruses sont tendues, toutes ses armes aiguisĂ©es, toutes ses perfidies prĂ©parĂ©es ! Prenez garde Ă  l’amour !
 Prenez garde Ă  l’amour ! Il est plus dangereux que le rhume, la bronchite et la pleurĂ©sie ! Il ne pardonne pas, et fait commettre Ă  tout le monde des bĂȘtises irrĂ©parables. » Oui, monsieur, je dis que, chaque annĂ©e, le gouvernement devrait faire mettre sur les murs de grandes affiches avec ces mots : « Retour du printemps. Citoyens français, prenez garde Ă  l’amour ; » de mĂȘme qu’on Ă©crit sur la porte des maisons : « Prenez garde Ă  la peinture ! » — Eh bien, puisque le gouvernement ne le fait pas, moi je le remplace, et je vous dis : « Prenez garde Ă  l’amour ; il est en train de vous pincer, et j’ai le devoir de vous prĂ©venir comme on prĂ©vient, en Russie, un passant dont le nez gĂšle. » Je demeurai stupĂ©fait devant cet Ă©trange particulier, et, prenant un air digne : — « Enfin, monsieur, vous me paraissez vous mĂȘler de ce qui ne vous regarde guĂšre. » Il fit un mouvement brusque, et rĂ©pondit : — « Oh ! monsieur ! monsieur ! si je m’aperçois qu’un homme va se noyer dans un endroit dangereux, il faut donc le laisser pĂ©rir ?
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Guy de Maupassant
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Je ris, Caesonia, quand je pense que, pendant des annĂ©es, Rome tout entiĂšre a Ă©vitĂ© de prononcer le nom de Drusilla. Car Rome s'est trompĂ©e pendant des annĂ©es. L'amour ne m'est pas suffisant, c'est cela que j'ai compris alors. C'est cela que je comprends aujourd'hui encore, en te regardant. Aimer un ĂȘtre, c'est accepter de vieillir avec lui. Je ne suis pas capable de cet amour. Drusilla vieille, c'Ă©tait bien pis que Drusilla morte. On croit qu'un homme souffre parce que l'ĂȘtre qu'il aime meurt en un jour. Mais sa vraie souffrance est moins futile : c'est de s'apercevoir que le chagrin non plus ne dure pas. MĂȘme la douleur est privĂ©e de sens. Tu vois, je n'avais pas d'excuses, pas mĂȘme l'ombre d'un amour, ni l'amertume de la mĂ©lancolie. Je suis sans alibi. Mais aujourd'hui, me voilĂ  encore plus libre qu'il y a des an-nĂ©es, libĂ©rĂ© que je suis du souvenir et de l'illusion. (Il rit d'une façon passionnĂ©e.) Je sais que rien ne dure ! Savoir cela ! Nous sommes deux ou trois dans l'histoire Ă  en avoir fait vraiment l'expĂ©rience, accompli ce bonheur dĂ©ment. Ceasonia, tu as suivi jusqu'au bout une bien curieuse tragĂ©die. Il est temps que pour toi le rideau se baisse.
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Albert Camus (Caligula)
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Il me semble qu'ils confondent but et moyen ceux qui s'effraient par trop de nos progrĂšs techniques. Quiconque lutte dans l'unique espoir de biens matĂ©riels, en effet, ne rĂ©colte rien qui vaille de vivre. Mais la machine n'est pas un but. L'avion n'est pas un but : c'est un outil, un outil comme la charrue. Si nous croyons que la machine abĂźme l'homme c'est que, peut-ĂȘtre, nous manquons un peu de recul pour juger les effets de transformations aussi rapides que celles que nous avons subies. Que sont les cent annĂ©es de l'histoire de la machine en regard des deux cent mille annĂ©es de l'histoire de l'homme? C'est Ă  peine si nous nous installons dans ce paysage de mines et de centrales Ă©lectriques. C'est Ă  peine si nous commençons d'habiter cette maison nouvelle, que nous n'avons mĂȘme pas achevĂ© de bĂątir. Tout a changĂ© si vite autour de nous : rapports humains, conditions de travail, coutumes. Notre psychologie elle-mĂȘme a Ă©tĂ© bousculĂ©e dans ses bases les plus intimes. Les notions de sĂ©paration, d'absence, de distance, de retour, si les mots sont demeurĂ©s les mĂȘmes, ne contiennent plus les mĂȘmes rĂ©alitĂ©s. Pour saisir le monde aujourd'hui, nous usons d'un langage qui fut Ă©tabli pour le monde d'hier. Et la vie du passĂ© nous semble mieux rĂ©pondre Ă  notre nature, pour la seule raison qu'elle rĂ©pond mieux Ă  notre langage. Pour le colonial qui fonde un empire, le sens de la vie est de conquĂ©rir. Le soldat mĂ©prise le colon. Mais le but de cette conquĂȘte n'Ă©tait-il pas l'Ă©tablissement de ce colon? Ainsi dans l'exaltation de nos progrĂšs, nous avons fait servir les hommes Ă  l'Ă©tablissement des voies ferrĂ©es, Ă  l'Ă©rection des usines, au forage de puits de pĂ©trole. Nous avions un peu oubliĂ© que nous dressions ces constructions pour servir les hommes. (Terre des Hommes, ch. III)
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Antoine de Saint-Exupéry
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Mais oui, maĂźtresse... Tenez ! juste au-dessus de nous, voilĂ  le Chemin de saint Jacques (la Voie lactĂ©e). Il va de France droit sur l’Espagne. C’est saint Jacques de Galice qui l’a tracĂ© pour montrer sa route au brave Charlemagne lorsqu’il faisait la guerre aux Sarrasins. Plus loin, vous avez le Char des Ames (la Grande Ourse) avec ses quatre essieux resplendissants. Les trois Ă©toiles qui vont devant sont les Trois BĂȘtes, et cette toute petite contre la troisiĂšme c’est le Charretier. Voyez-vous tout autour cette pluie d’étoiles qui tombent ? Ce sont les Ăąmes dont le bon Dieu ne veut pas chez lui... Un peu plus bas, voici le RĂąteau ou les Trois Rois (Orion). C’est ce qui nous sert d’horloge, Ă  nous autres. Rien qu’en les regardant, je sais maintenant qu’il est minuit passĂ©. Un peu plus bas, toujours vers le midi, brille Jean de Milan, le flambeau des astres (Sirius). Sur cette Ă©toile-lĂ , voici ce que les bergers racontent. Il paraĂźt qu’une nuit Jean de Milan, avec les Trois Rois et la PoussiniĂšre (la PlĂ©iade), furent invitĂ©s Ă  la noce d’une Ă©toile de leurs amies. PoussiniĂšre, plus pressĂ©e, partit, dit-on, la premiĂšre, et prit le chemin haut. Regardez-la, lĂ -haut, tout au fond du ciel. Les Trois Rois coupĂšrent plus bas et la rattrapĂšrent ; mais ce paresseux de Jean de Milan, qui avait dormi trop tard, resta tout Ă  fait derriĂšre, et furieux, pour les arrĂȘter, leur jeta son bĂąton. C’est pourquoi les Trois Rois s’appellent aussi le BĂąton de Jean de Milan... Mais la plus belle de toutes les Ă©toiles, maĂźtresse, c’est la nĂŽtre, c’est l’Etoile du Berger, qui nous Ă©claire Ă  l’aube quand nous sortons le troupeau, et aussi le soir quand nous le rentrons. Nous la nommons encore Maguelonne, la belle Maguelonne qui court aprĂšs Pierre de Provence (Saturne) et se marie avec lui tous les sept ans
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Alphonse Daudet (Lettres de mon moulin)
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Les Poets de Sept ans Et la MĂšre, fermant le livre du devoir, S'en allait satisfaite et trĂšs fiĂšre sans voir, Dans les yeux bleus et sous le front plein d'Ă©minences, L'Ăąme de son enfant livrĂ©e aux rĂ©pugnances. Tout le jour, il suait d'obĂ©issance ; trĂšs Intelligent ; pourtant des tics noirs, quelques traits Semblaient prouver en lui d'Ăącres hypocrisies. Dans l'ombre des couloirs aux tentures moisies, En passant il tirait la langue, les deux poings A l'aine, et dans ses yeux fermĂ©s voyait des points. Une porte s'ouvrait sur le soir : Ă  la lampe On le voyait, lĂ -haut, qui rĂąlait sur la rampe, Sous un golfe de jour pendant du toit. L'Ă©tĂ© Surtout, vaincu, stupide, il Ă©tait entĂȘtĂ© A se renfermer dans la fraĂźcheur des latrines: Il pensait lĂ , tranquille et livrant ses narines. Quand, lavĂ© des odeurs du jour, le jardinet DerriĂšre la maison, en hiver, s'illunait , Gisant au pied d'un mur, enterrĂ© dans la marne Et pour des visions Ă©crasant son oeil darne, Il Ă©coutait grouiller les galeux espaliers. PitiĂ© ! Ces enfants seuls Ă©taient ses familiers Qui, chĂ©tifs, fronts nus, oeil dĂ©teignant sur la joue, Cachant de maigres doigts jaunes et noirs de boue Sous des habits puant la foire et tout vieillots, Conversaient avec la douceur des idiots ! Et si, l'ayant surpris Ă  des pitiĂ©s immondes, Sa mĂšre s'effrayait, les tendresses profondes, De l'enfant se jetaient sur cet Ă©tonnement. C'Ă©tait bon. Elle avait le bleu regard, - qui ment! A sept ans, il faisait des romans, sur la vie Du grand dĂ©sert oĂč luit la LibertĂ© ravie, ForĂȘts, soleils, rives, savanes ! - Il s'aidait De journaux illustrĂ©s oĂč, rouge, il regardait Des Espagnoles rire et des Italiennes. Quand venait, l'Oeil brun, folle, en robes d'indiennes, -Huit ans -la fille des ouvriers d'Ă  cĂŽtĂ©, La petite brutale, et qu'elle avait sautĂ©, Dans un coin, sur son dos, en secouant ses tresses, Et qu'il Ă©tait sous elle, il lui mordait les fesses, Car elle ne portait jamais de pantalons; - Et, par elle meurtri des poings et des talons, Remportait les saveurs de sa peau dans sa chambre. Il craignait les blafards dimanches de dĂ©cembre, OĂč, pommadĂ©, sur un guĂ©ridon d'acajou, Il lisait une Bible Ă  la tranche vert-chou; Des rĂȘves l'oppressaient, chaque nuit, dans l'alcĂŽve. Il n'aimait pas Dieu; mais les hommes qu'au soir fauve, Noirs, en blouse, il voyait rentrer dans le faubourg OĂč les crieurs, en trois roulements de tambour, Font autour des Ă©dits rire et gronder les foules. - Il rĂȘvait la prairie amoureuse, oĂč des houles Lumineuses, parfums sains, pubescences d'or, Font leur remuement calme et prennent leur essor ! Et comme il savourait surtout les sombres choses, Quand, dans la chambre nue aux persiennes closes, Haute et bleue, Ăącrement prise d'humiditĂ©, Il lisait son roman sans cesse mĂ©ditĂ©, Plein de lourds ciels ocreux et de forĂȘts noyĂ©es, De fleurs de chair aux bois sidĂ©rals dĂ©ployĂ©es, Vertige, Ă©croulement, dĂ©routes et pitiĂ© ! - Tandis que se faisait la rumeur du quartier, En bas, - seul et couchĂ© sur des piĂšces de toile Écrue et pressentant violemment la voile!
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Arthur Rimbaud
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finalement, Ă©perdu d'amour et au comble de la frĂ©nĂ©sie Ă©rotique, je m'assis dans l'herbe et j'enlevai un de mes souliers en caoutchouc. — Je vais le manger pour toi, si tu veux. Si elle le voulait I Ha! Mais bien sĂ»r qu'elle le voulait, voyons! C'Ă©tait une vraie petite femme. --- Elle posa son cerceau par terre et s'assit sur ses ta-lons. Je crus voir dans ses yeux une lueur d'estime. Je n'en demandais pas plus. Je pris mon canif et enta-mai le caoutchouc. Elle me regardait faire. — Tu vas le manger cru ? — Oui. J'avalai un morceau, puis un autre. Sous son regard enfin admiratif, je me sentais devenir vraiment un homme. Et j'avais raison. Je venais de faire mon apprentissage. J'entamai le caoutchouc encore plus profondĂ©ment, soufflant un peu, entre les bouchĂ©es, et je continuai ainsi un bon moment, jusqu'Ă  ce qu'une sueur froide me montĂąt au front. Je continuai mĂȘme un peu au-delĂ , serrant les dents, luttant contre la nausĂ©e, ramassant toutes mes forces pour demeurer sur le terrain, comme il me fallut le faire tant de fois, depuis, dans mon mĂ©tier d'homme. Je fus trĂšs malade, on me transporta Ă  l'hĂŽpital, ma mĂšre sanglotait, Aniela hurlait, les filles de l'atelier geignaient, pendant qu'on me mettait sur un brancard dans l'ambulance. J'Ă©tais trĂšs fier de moi. Mon amour d'enfant m'inspira vingt ans plus tard mon premier roman Éducation europĂ©enne, et aussi certains passages du Grand Vestiaire. Pendant longtemps, Ă  travers mes pĂ©rĂ©grinations, j'ai transportĂ© avec moi un soulier d'enfant en caoutchouc, entamĂ© au couteau. J'avais vingt-cinq ans, puis trente, puis quarante, mais le soulier Ă©tait toujours lĂ , Ă  portĂ©e de la main. J'Ă©tais toujours prĂȘt Ă  m'y attabler, Ă  donner, une fois de plus, le meilleur de moi-mĂȘme. Ça ne s'est pas trouvĂ©. Finalement, j'ai abandonnĂ© le soulier quelque part derriĂšre moi. On ne vit pas deux fois. (La promesse de l'aube, ch. XI)
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Romain Gary (Promise at Dawn)
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Voisine Je peux rester des aprĂšs-midi entiers Ă  regarder cette fille, cachĂ© derriĂšre mon rideau. Je me demande ce qu'elle peut Ă©crire sur son ordinateur. A quoi elle pense quand elle regarde par la fenĂȘtre. Je me demande ce qu'elle mange, ce qu'elle utilise comme dentifrice, ce qu'elle Ă©coute comme musique. Un jour, je l'ai vue danser toute seule. Je me demande si elle a des frĂšres et sƓurs, si elle met la radio quand elle se lĂšve le matin, si elle prĂ©fĂšre l'Espagne ou l'Italie, si elle garde son mouchoir en boule dans sa main quand elle pleure et si elle aime Thomas Bernhard. Je me demande comment elle dort et comment elle jouit. Je me demande comment est son corps de prĂšs. Je me demande si elle s'Ă©pile ou si au contraire elle a une grosse toison. Je me demande si elle lit des livres en anglais. Je me demande ce qui la fait rire, ce qui la met hors d'elle, ce qui la touche et si elle a du goĂ»t. Qu'est-ce qu'elle peut bien en penser, cette fille, de la hausse du baril de pĂ©trole et des Farc, et que dans trente ans il n'y aura sans doute plus de gorilles dans les montagnes du Rwanda ? Je me demande Ă  quoi elle pense quand je la vois fumer sur son canapĂ©, et ce qu'elle fume comme cigarettes. Est-ce que ça lui pĂšse d'ĂȘtre seule ? Est-ce qu'elle a un homme dans sa vie ? Et si c'est le cas, pourquoi c'est elle qui va toujours chez lui ? Pourquoi il n'y a jamais d'homme chez elle ? Je me demande comment elle se voit dans vingt ans. Je me demande quel sens elle donne Ă  sa vie. Qu'est-ce qu'elle pense de sa vie quand elle est comme ça, toute seule, chez elle ? Si ça se trouve, elle n'a aucun intĂ©rĂȘt, cette fille.
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David Thomas (La Patience des buffles sous la pluie)
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L'isolement Souvent sur la montagne, Ă  l'ombre du vieux chĂȘne, Au coucher du soleil, tristement je m'assieds ; Je promĂšne au hasard mes regards sur la plaine, Dont le tableau changeant se dĂ©roule Ă  mes pieds. Ici gronde le fleuve aux vagues Ă©cumantes ; Il serpente, et s'enfonce en un lointain obscur ; LĂ  le lac immobile Ă©tend ses eaux dormantes OĂč l'Ă©toile du soir se lĂšve dans l'azur. Au sommet de ces monts couronnĂ©s de bois sombres, Le crĂ©puscule encor jette un dernier rayon ; Et le char vaporeux de la reine des ombres Monte, et blanchit dĂ©jĂ  les bords de l'horizon. Cependant, s'Ă©lançant de la flĂšche gothique, Un son religieux se rĂ©pand dans les airs : Le voyageur s'arrĂȘte, et la cloche rustique Aux derniers bruits du jour mĂȘle de saints concerts. Mais Ă  ces doux tableaux mon Ăąme indiffĂ©rente N'Ă©prouve devant eux ni charme ni transports ; Je contemple la terre ainsi qu'une ombre errante Le soleil des vivants n'Ă©chauffe plus les morts. De colline en colline en vain portant ma vue, Du sud Ă  l'aquilon, de l'aurore au couchant, Je parcours tous les points de l'immense Ă©tendue, Et je dis : " Nulle part le bonheur ne m'attend. " Que me font ces vallons, ces palais, ces chaumiĂšres, Vains objets dont pour moi le charme est envolĂ© ? Fleuves, rochers, forĂȘts, solitudes si chĂšres, Un seul ĂȘtre vous manque, et tout est dĂ©peuplĂ© ! Que le tour du soleil ou commence ou s'achĂšve, D'un oeil indiffĂ©rent je le suis dans son cours ; En un ciel sombre ou pur qu'il se couche ou se lĂšve, Qu'importe le soleil ? je n'attends rien des jours. Quand je pourrais le suivre en sa vaste carriĂšre, Mes yeux verraient partout le vide et les dĂ©serts : Je ne dĂ©sire rien de tout ce qu'il Ă©claire; Je ne demande rien Ă  l'immense univers. Mais peut-ĂȘtre au-delĂ  des bornes de sa sphĂšre, Lieux oĂč le vrai soleil Ă©claire d'autres cieux, Si je pouvais laisser ma dĂ©pouille Ă  la terre, Ce que j'ai tant rĂȘvĂ© paraĂźtrait Ă  mes yeux ! LĂ , je m'enivrerais Ă  la source oĂč j'aspire ; LĂ , je retrouverais et l'espoir et l'amour, Et ce bien idĂ©al que toute Ăąme dĂ©sire, Et qui n'a pas de nom au terrestre sĂ©jour ! Que ne puĂźs-je, portĂ© sur le char de l'Aurore, Vague objet de mes voeux, m'Ă©lancer jusqu'Ă  toi ! Sur la terre d'exil pourquoi restĂ©-je encore ? Il n'est rien de commun entre la terre et moi. Quand lĂ  feuille des bois tombe dans la prairie, Le vent du soir s'Ă©lĂšve et l'arrache aux vallons ; Et moi, je suis semblable Ă  la feuille flĂ©trie : Emportez-moi comme elle, orageux aquilons !
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Alphonse de Lamartine (Antologija francuskog pjesniĆĄtva)
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« Écoute, Egor PĂ©trovitch, lui dit-il. Qu’est ce que tu fais de toi ? Tu te perds seulement avec ton dĂ©sespoir. Tu n’as ni patience ni courage. Maintenant, dans un accĂšs de tristesse, tu dis que tu n’as pas de talent. Ce n’est pas vrai. Tu as du talent ; je t’assure que tu en as. Je le vois rien qu’à la façon dont tu sens et comprends l’art. Je te le prouverai par toute ta vie. Tu m’as racontĂ© ta vie d’autrefois. À cette Ă©poque aussi le dĂ©sespoirte visitait sans que tu t’en rendisses compte. À cette Ă©poque aussi, ton premier maĂźtre, cet homme Ă©trange, dont tu m’as tant parlĂ©, a Ă©veillĂ© en toi, pour la premiĂšre fois, l’amour de l’art et a devinĂ© ton talent. Tu l’as senti alors aussi fortement que maintenant. Mais tu ne savais pas ce qui se passait en toi. Tu ne pouvais pas vivre dans la maison du propriĂ©taire, et tu ne savais toi-mĂȘme ce que tu dĂ©sirais. Ton maĂźtre est mort trop tĂŽt. Il t’a laissĂ© seulement avec des aspirations vagues et, surtout, il ne t’a pas expliquĂ© toimĂȘme. Tu sentais le besoin d’une autre route plus large, tu pressentais que d’autres buts t’étaient destinĂ©s, mais tu ne comprenais pas comment tout cela se ferait et, dans ton angoisse, tu as haĂŻ tout ce qui t’entourait alors. Tes six annĂ©es de misĂšre ne sont pas perdues. Tu as travaillĂ©, pensĂ©, tu as reconnu et toi-mĂȘme et tes forces ; tu comprends maintenant l’art et ta destination. Mon ami, il faut avoir de la patience et du courage. Un sort plus enviĂ© que le mien t’est rĂ©servĂ©. Tu es cent fois plus artiste que moi, mais que Dieu te donne mĂȘme la dixiĂšme partie de ma patience. Travaille, ne bois pas, comme te le disait ton bonpropriĂ©taire, et, principalement, commence par l’a, b, c. « Qu’est-ce qui te tourmente ? La pauvretĂ©, la misĂšre ? Mais la pauvretĂ© et la misĂšre forment l’artiste. Elles sont insĂ©parables des dĂ©buts. Maintenant personne n’a encore besoin de toi ; personne ne veut te connaĂźtre. Ainsi va le monde. Attends, ce sera autre chose quand on saura que tu as du talent. L’envie, la malignitĂ©, et surtout la bĂȘtise t’opprimeront plus fortement que la misĂšre. Le talent a besoin de sympathie ; il faut qu’on le comprenne. Et toi, tu verras quelles gens t’entoureront quand tu approcheras du but. Ils tĂącheront de regarder avec mĂ©pris ce qui s’est Ă©laborĂ© en toi au prix d’un pĂ©nible travail, des privations, des nuits sans sommeil. Tes futurs camarades ne t’encourageront pas, ne te consoleront pas. Ils ne t’indiqueront pas ce qui en toi est bon et vrai. Avec une joie maligne ils relĂšveront chacune de tes fautes. Ils te montreront prĂ©cisĂ©ment ce qu’il y a de mauvais en toi, ce en quoi tu te trompes, et d’un air calme et mĂ©prisant ils fĂȘteront joyeusement chacune de tes erreurs. Toi, tu esorgueilleux et souvent Ă  tort. Il t’arrivera d’offenser une nullitĂ© qui a de l’amour-propre, et alors malheur Ă  toi : tu seras seul et ils seront plusieurs. Ils te tueront Ă  coups d’épingles. Moi mĂȘme, je commence Ă  Ă©prouver tout cela. Prends donc des forces dĂšs maintenant. Tu n’es pas encore si pauvre. Tu peux encore vivre ; ne nĂ©glige pas les besognes grossiĂšres, fends du bois, comme je l’ai fait un soir chez de pauvres gens. Mais tu es impatient ; l’impatience est ta maladie. Tu n’as pas assez de simplicitĂ© ; tu ruses trop, tu rĂ©flĂ©chis trop, tu fais trop travailler ta tĂȘte. Tu es audacieux en paroles et lĂąche quand il faut prendra l’archet en main. Tu as beaucoup d’amour-propre et peu de hardiesse. Sois plus hardi, attends, apprends, et si tu ne comptes pas sur tes forces, alors va au hasard ; tu as de la chaleur, du sentiment, peut-ĂȘtre arriveras-tu au but. Sinon, va quand mĂȘme au hasard. En tout cas tu ne perdras rien, si le gain est trop grand. Vois-tu, aussi, le hasard pour nous est une grande chose. »
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Fyodor Dostoevsky (Netochka Nezvanova)
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Moi qui ai eu la chance, malgrĂ© quelques grosses sĂ©quelles, de me relever et de retrouver une autonomie totale, je pense souvent Ă  cette incroyable pĂ©riode de ma vie et surtout Ă  tous mes compagnons d’infortune. À part Samia, peut-ĂȘtre, je sais pertinemment que les autres sont toujours dans leurfauteuil, qu’ils sont contraints Ă  une assistance permanente, qu’ils ont toujours droit aux sondages urinaires, aux transferts, aux fauteuils-douches, aux sĂ©ances de verticalisation
 Ils sont pour toujours confrontĂ©s Ă  ces mots qui ont Ă©tĂ© mon quotidien, cette annĂ©e-lĂ  J’ai fait trois autres centres de rĂ©Ă©ducation par la suite, mais jamais je n’ai autant ressenti la violence de cette immersion dans le monde du handicap que lors de ces quelques mois. Jamais je n’ai retrouvĂ© autant de malheur et autant d’envie de vivre rĂ©unis en un mĂȘme lieu, jamais je n’ai croisĂ© autant de souffrance et d’énergie, autant d’horreur et d’humour. Et jamais plus je n’ai ressenti autant d’intensitĂ© dans le rapport des ĂȘtres humains Ă  l’incertitude de leur avenir .. Je ne connaissais rien de ce monde-lĂ  avant mon accident. Je me demande mĂȘme si j’y avais dĂ©jĂ  vraiment pensĂ©. Bien sĂ»r, cette expĂ©rience aussi difficile pour moi que pour mon entourage proche m’a beaucoup appris sur moi-mĂȘme, sur la fragilitĂ© de l’existence (et celle des vertĂšbres cervicales). Personne d’autre ne sait mieux que moi aujourd’hui qu’une catastrophe n’arrive pas qu’aux autres, que la vie distribue ses drames sans regarder qui les mĂ©rite le plus . Mais, au-delĂ  de ces lourds enseignements et de ces grandes considĂ©rations, ce qui me reste surtout de cette pĂ©riode, ce sont les visages et les regards que j’ai croisĂ©s dans ce centre. Ce sont les souvenirs de ces ĂȘtres qui, Ă  l’heure oĂč j’écris ces lignes, continuent chaque jour de mener un combat qu’ils n’ont jamais l’impression de gagner.Si cette Ă©preuve m’a fait grandir et progresser, c’est surtout grĂące aux rencontres qu’elle m’aura offertes.
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Grand corps malade (Patients)