Un Plus Une Quotes

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Rien n’est plus trompeur qu’une photo : on croit fixer un moment heureux pour l’éternitĂ© alors qu’on ne crĂ©e que de la nostalgie
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Guillaume Musso (Sauve-moi)
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La joie réside au plus intime de l'ùme; on peut aussi bien la posséder dans une obscure prison que dans un palais.
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ThérÚse of Lisieux
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Rien n'est plus beau qu'un corps nu. Le plus beau vĂȘtement qui puisse habiller une femme ce sont les bras de l'homme qu'elle aime. Mais, pour celles qui n'ont pas eu la chance de trouver ce bonheur, je suis lĂ .
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Yves Saint-Laurent
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Rien n'est plus trompeur qu'une photo : On croit fixer un moment heureux pour l'éternité alors qu'on ne crée que de la nostalgie. On appuie sur le déclencheur, et hop, une seconde plus tard, l'instant à disparu.
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Guillaume Musso (Sauve-moi)
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Tu n’étais plus qu’un insecte prisonnier d’une araignĂ©e repue, qui te gardait en rĂ©serve pour un repas Ă  venir. Elle t’avait capturĂ© pour te savourer en toute quiĂ©tude, quand l’envie lui viendrait de goĂ»ter ton sang. Tu imaginais ses pattes velues, ses gros yeux globuleux, implacables, son ventre mou, gorgĂ© de viande, vibrant, gĂ©latineux, et ses crocs venimeux, sa bouche noire qui allait te sucer la vie.
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Thierry Jonquet (Mygale)
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Le savant doit ordonner ; on fait la science avec des faits comme une maison avec des pierres ; mais une accumulation de faits n'est pas plus une science qu'un tas de pierres n'est une maison. The Scientist must set in order. Science is built up with facts, as a house is with stones. But a collection of facts is no more a science than a heap of stones is a house.
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Henri Poincaré (Science and Hypothesis)
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Nous ne serons heureux, se dit-elle alors, que lorsque nous n'aurons plus besoin les uns des autres. Quand nous pourrons vivre une vie Ă  nous, une vie qui nous appartienne, qui ne regarde pas les autres. Quand nous serons libres.
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LeĂŻla Slimani (Chanson douce)
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Il y a des moments rares dans l’existence oĂč une porte s’ouvre et oĂč la vie vous offre une rencontre que vous n’attendiez plus. Celle de l’ĂȘtre complĂ©mentaire qui vous accepte tel que vous ĂȘtes, qui vous prend dans votre globalitĂ©, qui devine et admet vos contradictions, vos peurs, votre ressentiment, votre colĂšre, le torrent de boue sombre qui coule dans votre tĂȘte. Et qui l’apaise. Celui qui vous tend un miroir dans lequel vous n’avez plus peur de vous regarder.
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Guillaume Musso (Central Park)
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On la connaßt tous... Cette solitude qui nous mine parfois. Qui sabote notre sommeil ou pourrit nos petits matins. C'est la tristesse du premier jour d'école. C'est lorsqu'il embrasse une fille plus belle dans la cour du lycée. C'est Orly ou la gare de l'Est à la fin d'un amour. C'est l'enfant qu'on ne fera jamais ensemble. C'est quelquefois moi. C'est quelquefois vous. Mais il suffit parfois d'une rencontre...
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Guillaume Musso (Que serais-je sans toi?)
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A l'adolescence, on rĂȘve du jour oĂč l'on quittera ses parents, un autre jour ce sont vos parents qui vous quittent. Alors, on ne rĂȘve plus qu'Ă  pouvoir redevenir, ne serait-ce qu'un instant, l'enfant qui vivait sous leur toit, les prendre dans vos bras, leur dire sans pudeur qu'on les aime, se serrer contre eux pour qu'ils vous rassurent encore une fois.
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Marc Levy (Le Voleur d'ombres)
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Que l'on soit absent dans la piÚce voisine, ou sur l'autre versant de la planÚte, la différence n'est pas essentielle. La présence de l'ami qui en apparence s'est éloigné, peut se faire plus dense qu'une présence réelle.
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Antoine de Saint-Exupéry (Lettre à un otage)
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En un mot, pour tirer la loi de l'expérience, if faut généraliser; c'est une nécessité qui s'impose à l'observateur le plus circonspect. In one word, to draw the rule from experience, one must generalize; this is a necessity that imposes itself on the most circumspect observer.
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Henri Poincaré (The Value of Science: Essential Writings of Henri Poincare (Modern Library Science))
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Si j’aimais une femme, la plus belle preuve d’amour que je puisse lui faire, c’est de ne jamais le lui dire, pour qu’elle ne prenne pas le risque de vivre avec un type comme moi
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Marc Levy (L'Ă©trange voyage de Monsieur Daldry)
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Chaque sourire cachait un bùillement d'ennui, chaque joie une malédiction, tout plaisir son dégoût, et les meilleurs baisers ne vous laissaient sur la lÚvre qu'une irréalisable envie d'une volupté plus haute.
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Gustave Flaubert (Madame Bovary)
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Un baiser, mais à tout prendre, qu'est-ce? Un serment fait d'un peu plus prÚs, une promesse Plus précise, un aveu qui peut se confirmer, Un point rose qu'on met sur l'i du verbe aimer; C'est un secret qui prend la bouche pour oreille, Un instant d'infini qui fait un bruit d'abeille, Une communion ayant un goût de fleur, Une façon d'un peu se respirer le coeur, Et d'un peu se goûter au bord des lÚvres, l'ùme!
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Edmond Rostand (Cyrano de Bergerac)
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(...), j'étais animée d'une faim nouvelle, et certains jours, j'étais véritablement vorace. Le besoin de lire s'emparait de moi et exerçait sa délicieuse et grisante emprise. Plus je lisais, plus j'avais faim. Chaque ouvrage était riche de promesses, chaque page que je tournais était une équipée, l'attrait d'un autre monde.
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Tatiana de Rosnay (The House I Loved)
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Je ne suis pas plus moderne qu'ancien, pas plus Français que Chinois, et l'idĂ©e de la patrie c'est-Ă -dire l'obligation oĂč l'on est de vivre sur un coin de terre marquĂ© en rouge ou en bleu sur la carte et de dĂ©tester les autres coins en vert ou en noir m'a paru toujours Ă©troite, bornĂ©e et d'une stupiditĂ© fĂ©roce.
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Gustave Flaubert (Correspondance)
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Je crois que c'est moi qui ai changé: c'est la solution la plus simple. La plus désagréable aussi. Mais einfin je dois reconnaßtre que je suis sujet à ces transformations soudaines. Ce qu'il y a, c'est que je pense trÚs rarement; alors une foule depetites métamorphoses s'accumulent en moi sans que j'y prenne garde et puis, un beau jour, il se produit une véritable révolution. C'est ce qui a donné à ma vie cet aspect huerté, incohérent.
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Jean-Paul Sartre (Nausea)
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Quand j'Ă©tais enfant, le luxe c'Ă©tait pour moi les manteaux de fourrure et les villas au bord de la mer. Plus tard, j'ai cru que c'Ă©tait de mener une vie d'intellectuel. Il me semble maintenant que c'est aussi de pouvoir vivre une passion pour un homme ou une femme
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Annie Ernaux (Simple Passion)
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Les utopies apparaissent comme bien plus rĂ©alisables qu’on ne le croyait autrefois. Et nous nous trouvons actuellement devant une question bien autrement angoissante : comment Ă©viter leur rĂ©alisation dĂ©finitive ? ... Les utopies sont rĂ©alisables. La vie marche vers les utopies. Et peut-ĂȘtre un siĂšcle nouveau commence-t-il, un siĂšcle oĂč les intellectuels et la classe cultivĂ©e rĂȘveront aux moyens d’éviter les utopies et de retourner Ă  une sociĂ©tĂ© non utopique moins parfaite et plus libre.
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Nicolas Berdiaeff
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Avec l'amour maternel, la vie vous fait, Ă  l'aube, une promesse qu'elle ne tient jamais. Chaque fois qu'une femme vous prend dans ses bras et vous serre sur son coeur, ce ne sont plus que des condolĂ©ances. On revient toujours gueuler sur la tombe de sa mĂšre comme un chien abandonnĂ©. Jamais plus, jamais plus, jamais plus. Des bras adorables se referment autour de votre cou et des lĂšvres trĂšs douces vous parlent d'amour, mais vous ĂȘtes au courant. Vous ĂȘtes passĂ© Ă  la source trĂšs tĂŽt et vous avez tout bu. Lorsque la soif vous reprend, vous avez beau vous jeter de tous cĂŽtĂ©s, il n'y a plus de puits, il n'y a que des mirages. Vous avez fait, dĂšs la premiĂšre lueur de l'aube, une Ă©tude trĂšs serrĂ©e de l'amour et vous avez sur vous de la documentation. Je ne dis pas qu'il faille empĂȘcher les mĂšres d'aimer leurs petits. Je dis simplement qu'il vaut mieux que les mĂšres aient encore quelqu'un d'autre Ă  aimer. Si ma mĂšre avait eu un amant, je n'aurais pas passĂ© ma vie Ă  mourir de soif auprĂšs de chaque fontaine. Malheureusement pour moi, je me connais en vrais diamants.
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Romain Gary (Promise at Dawn)
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Je n'arrive plus à ressentir. J'ai l'impression de transporter de la lumiÚre dans mes veines. Tout ce qui m'arrive a un prénom... Emma, elle s'appelle Emma.
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Jul Maroh (Le bleu est une couleur chaude)
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As-tu dĂ©jĂ  Ă©tĂ© amoureux? C'est horrible non? Ca rend si vulnĂ©rable. Ca t'ouvre la poitrine et le coeur en grand et du coup, n'importe qui peut venir te bousiller de l'intĂ©rieur. On se forge des dĂ©fenses, on se fabrique une belle armure pour que rien ne puisse jamais nous atteindre, et voilĂ  qu'un imbĂ©cile, pas bien diffĂ©rent des autres s'immisce dans notre imbĂ©cile de vie... On lui offre un morceau de soi alors que l'autre n'a rien demandĂ©. Il a juste fait un truc dĂ©bile un jour, genre t'embrasser ou te sourire, mais, depuis, ta vie ne t'appartient plus. L'amour te prend en otage. Il s'insinue en toi. Il te dĂ©vore de l'intĂ©rieur et te laisse tout seul Ă  chialer dans le noir, au point qu'un simple phrase comme "je crois qu'on devrait rester amis" te fait l'effet d'un Ă©clat de verre qu'on t'aurait plantĂ© dans le coeur. Ca fait mal. Pas juste dans ton imagination. Pas juste dans ta tĂȘte. C'est une douleur Ă  fendre l'Ăąme, qui s'incruste en toi et te dĂ©chire du dedans. Je hais l'amour.
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Neil Gaiman (The Sandman, Vol. 9: The Kindly Ones)
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‱ On peut ĂȘtre avec quelqu’un pour fuir sa solitude, on peut partager son quotidien pour digĂ©rer une rupture en continuant d’entretenir le souvenir d’un autre. On peut parler Ă  quelqu’un en Ă©coutant la voix d’un autre, regarder quelqu’un dans les yeux en voyant ceux d’un autre.
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Marc Levy (Un sentiment plus fort que la peur)
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Tous les hommes sont menteurs, inconstants, faux, bavards, hypocrites, orgueilleux et lĂąches, mĂ©prisables et sensuels ; toutes les femmes sont perfides, artificieuses, vaniteuses, curieuses et dĂ©pravĂ©es ; le monde n'est qu'un Ă©gout sans fond oĂč les phoques les plus informes rampent et se tordent sur des montagnes de fange ; mais il y a au monde une chose sainte et sublime, c'est l'union de deux de ces ĂȘtres si imparfaits et si affreux. On est souvent trompĂ© en amour, souvent blessĂ© et souvent malheureux ; mais on aime, et quand on est sur le bord de sa tombe, on se retourne pour regarder en arriĂšre ; et on se dit : " J'ai souffert souvent, je me suis trompĂ© quelquefois, mais j'ai aimĂ©. C'est moi qui ai vĂ©cu, et non pas un ĂȘtre factice crĂ©Ă© par mon orgueil et mon ennui.
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Alfred de Musset (On ne badine pas avec l'amour)
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En effet: je mourais dĂ©jĂ . Je venais d'apprendre cette nouvelle horrible que tout humain apprend un jour ou l'autre: ce que tu aimes, tu vas le perdre. "Ce qui t'a Ă©tĂ© donnĂ© te sera repris." Face Ă  la dĂ©couverte de cette spoliation future, il y a deux attitudes possibles: soit on dĂ©cide de ne pas s'attacher aux ĂȘtres et aux choses, afin de rendre l'amputation moins douloureuse; soit on dĂ©cide, au contraire, d'aimer d'autant plus les ĂȘtres et les choses, d'y mettre le paquet - "puisque nous n'aurons pas beaucoup de temps ensemble, je vais te donner en un an tout l'amour que j'aurais pu te donner en une vie.
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Amélie Nothomb (Métaphysique des tubes)
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C'est vrai ce qu'on dit, vous ĂȘtes le fils d'un dĂ©mon et d'une pucelle? Vous avez plus pris de la pucelle. (Arthur Ă  Merlin)
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Alexandre Astier (Kaamelott, livre 1, premiùre partie : Épisodes 1 à 50)
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une once d'inertie pĂšse plus qu'un boisseau de sagesse (La conversation Ă  Innsbruck)
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Marguerite Yourcenar (L'ƒuvre au noir)
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Elle ferma les yeux quelques secondes, lutta pour faire refluer son désir naissant. Elle savait que les sentiments étaient souvent plus destructeurs et dangereux qu'une balle d'un 9 mm ou que la lame tranchante d'un sabre.
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Guillaume Musso (Que serais-je sans toi?)
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La vie est comme un chĂąteau de cartes. On met un temps infini Ă  le construire, on essaie de poser des bases solides, on monte un Ă©tage aprĂšs l'autre, et puis, un jour, tout s'effondre et quelqu'un les range dans une boĂźte.
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Virginie Grimaldi (Tu comprendras quand tu seras plus grande)
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Il existe des femmes dont le mystĂšre s'Ă©vente d'un seul coup lorsqu'elles se mettent Ă  rire. Comme si quelqu'un allumait des nĂ©ons de salle de bains au milieu d'une forĂȘt de conte de fĂ©es. Toi, tu fais pousser des forĂȘts de conte de fĂ©es dans un bouquet de nĂ©on.
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Mathias Malzieu (Le plus petit baiser jamais recensé)
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Une grosse vieille dame à cÎté de moi se retenait à la courroie et sa robe sans manches laissait voir un incroyable nid d'oiseau sous son bras. C'est la chose la plus nauséabonde que j'aie jamais vue. J'espÚre que Tim ne l'a pas vue, il en serait devenu pédéraste.
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Beatrice Sparks (Go Ask Alice)
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Minne, pùle comme une nuit de lune, se réchauffe, un peu blessée, à ce feu de couleurs, et parfois, toute nue au soleil, un miroir à la main, cherche en vain, à travers son corps mince, l'ombre plus noire de son squelette élégant.
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Colette Gauthier-Villars (L'ingénue libertine)
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Tout le monde voulait ĂȘtre dans le coup ce jour-lĂ . Car, ce jour-lĂ , on allait Ă©crire l'Histoire avec un grand H. Il y avait eu un ghetto Ă  Cracovie pendant plus de sept siĂšcles, et voici qu'Ă  la fin de la journĂ©e, ou au plus tard le lendemein, ces sept siĂšcles ne seraient plus qu'une rumeur, et Cracovie serait enfin fiduciare (dĂ©barrassĂ©e des juifs).
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Thomas Keneally (Schindler’s List)
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Corto Ă  lui mĂȘme: Ce serait bon de vivre dans une fable. Bouche DorĂ©e Ă  Corto: Oh oui!
 Mais toi tu vis continuellement une fable et tu ne t'en aperçois plus. Lorsqu'un adulte entre dans le monde des fables, il ne peut plus en sortir. Le savais-tu?
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Hugo Pratt (En Sibérie (Corto Maltese #6))
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Dans cette vie qui vous apparaĂźt quelquefois comme un grand terrain vague sans poteau indicateur, au milieu de toutes les lignes de fuite et les horizons perdus, on aimerait trouver des points de repĂšre, dresser une sorte de cadastre pour n'avoir plus l'impression de naviguer au hasard. Alors, on tisse des liens, on essaye de rendre plus stables des rencontres hasardeuses.
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Patrick Modiano (Dans le café de la jeunesse perdue)
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À partir de lĂ , le dialogue de la journĂ©e suivait une pente uniformĂ©ment descendante, mais avec des lĂšvres et des mains chaleureuses et languides flottant sur les surface les plus sensibles du corps, le monde Ă©tait aussi prĂšs que possible de la perfection. Freud appelait cela un Ă©tat de perversitĂ© polymorphe impersonnel et le regardait d'un mauvais oeil, mais je doute fort qu'il ait jamais eu les mains de Lil lui frĂŽlant le corps. Ou mĂȘme celles de sa propre femme dans le mĂȘme rĂŽle. Freud Ă©tait un bien grand homme, mais je n'arrive pas Ă  me faire Ă  l'idĂ©e que quelqu'un lui ait jamais efficacement flattĂ© le pĂ©nis.
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Luke Rhinehart (The Dice Man)
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Tout s'effacera en une seconde. Le dictionnaire accumulĂ© du berceau au dernier lit s'Ă©liminera. Ce sera le silence et aucun mot pour le dire. De la bouche ouverte il ne sortira rien. Ni je ni moi. La langue continuera Ă  mettre en mots le monde. Dans les conversations autour d'une table de fĂȘte on ne sera qu'un prĂ©nom, de plus en plus sans visage, jusqu'Ă  disparaĂźtre dans la masse anonyme d'une lointaine gĂ©nĂ©ration
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Annie Ernaux (Les Années)
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Voici ce que j'ai pensé : pour que l'événement le plus banal devienne une aventure, il faut et il suffit qu'on se mette à la raconter. C'est ce qui dupe les gens : un homme, c'est toujours un conteur d'histoires, il vit entouré de ses histoires et des histoires d'autrui, il voit tout ce qui lui arrive à travers elles ; et il cherche à vivre sa vie comme s'il la racontait. Mais il faut choisir : vivre ou raconter.
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Jean-Paul Sartre (Nausea)
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J'ai lu le DeuxiĂšme Sexe. Simone expliquait que si les femmes faisaient pipi debout, leur conception de la vie changerait. Alors j'ai essayĂ©. Ça coulait lĂ©gĂšrement sur ma jambe gauche. C'Ă©tait un peu dĂ©goutant. Assise, c'Ă©tait bien plus simple. De pus, en tant qu'iranienne, avant d'uriner comme un homme, il fallait que j'apprenne Ă  devenir une femme libĂ©rĂ©e et Ă©mancipĂ©e.
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Marjane Satrapi (Persepolis, Volume 3)
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Le néo-libéralisme reprend les plus vieilles idées du patronat, sous un message chic et moderne. C'est une "révolution" conservatrice qui veut imposer un retour à une forme de capitalisme sauvage et cynique, qui organise l'insécurité et la précarité, qui se réclame du progrÚs mais qui glorifie l'archaïque loi du plus fort.
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Pierre Bourdieu
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Plus je vieillis et plus je trouve qu’on ne peut vivre qu’avec les ĂȘtres qui vous libĂšrent, qui vous aiment d’une affection aussi lĂ©gĂšre Ă  porter que forte Ă  Ă©prouver. La vie d’aujourd’hui est trop dure, trop amĂšre, trop anĂ©miante, pour qu’on subisse encore de nouvelles servitudes, venues de qui on aime [...]. C’est ainsi que je suis votre ami, j’aime votre bonheur, votre libertĂ©, votre aventure en un mot, et je voudrais ĂȘtre pour vous le compagnon dont on est sĂ»r, toujours. The older I get, the more I find that you can only live with those who free you, who love you from a lighter affection to bear as strong as you can to experience Today's life is too hard, too bitter, too anemic, for us to undergo new bondages, from whom we love [...]. This is how I am your friend, I love your happiness, your freedom, Your adventure in one word, and I would like to be for you the companion we are sure of, always. ---- Albert Camus Ă  RenĂ© Char, 17 septembre 1957 (in "Albert Camus - RenĂ© Char : Correspondance 1946-1959") ---- Albert Camus to RenĂ© Char, September 17, 1957 (via RenĂ© Char)
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Albert Camus (Correspondance (1944-1959))
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Les feuilles tombent, la figue sĂšche, remplace la figue fraĂźche, le raisin sec la grappe mĂ»re, voilĂ  selon toi des paroles de mauvaise augure ! Mais il n’y a lĂ  que la transformation d’états antĂ©rieurs en d’autres ; il n’y a pas de destruction, mais un amĂ©nagement et une disposition bien rĂ©glĂ©e. L’émigration n’est qu’un petit changement. La mort en est un plus grand, mais il ne va pas de l’ĂȘtre actuel au non-ĂȘtre, mais au non-ĂȘtre de l’ĂȘtre actuel. Alors ne serais-je plus ? Tu ne seras pas ce que tu es mais autre chose dont le monde aura alors besoin.
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Epictetus
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Environ une demi-seconde aprĂšs avoir terminĂ© votre livre, aprĂšs en avoir lu le dernier mot, le lecteur doit se sentir envahi d’un sentiment puissant; pendant un instant, il ne doit plus penser qu’à tout ce qu’il vient de lire, regarder la couverture et sourireavec une pointe de tristesse parce que tous les personnages vont lui manquer
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Joël Dicker (La Vérité sur l'Affaire Harry Quebert (Marcus Goldman, #1))
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À une passante La rue assourdissante autour de moi hurlait.‹ Longue, mince, en grand deuil, douleur majestueuse,‹ Une femme passa, d'une main fastueuse‹ Soulevant, balançant le feston et l'ourlet; Agile et noble, avec sa jambe de statue.‹ Moi, je buvais, crispĂ© comme un extravagant,‹ Dans son oeil, ciel livide oĂč germe l'ouragan,‹ La douceur qui fascine et le plaisir qui tue. Un Ă©clair . . . puis la nuit! — Fugitive beautĂ© ‹ Dont le regard m'a fait soudainement renaĂźtre,‹ Ne te verrai-je plus que dans l'Ă©ternitĂ©? Ailleurs, bien loin d'ici! trop tard! jamais peut-ĂȘtre!‹ Car j'ignore oĂč tu fuis, tu ne sais oĂč je vais,‹ Ô toi que j'eusse aimĂ©e, ĂŽ toi qui le savais!
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Charles Baudelaire (Les Fleurs du Mal)
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Jette mon livre; dis-toi bien que ce n'est lĂ  qu'une des mille postures possibles en face de la vie. Cherche la tienne. Ce qu'un autre aurait aussi bien fait que toi, ne le fais pas. Ce qu'un autre aurait aussi bien dit que toi, ne le dis pas, -- aussi bien Ă©crit que toi, ne l'Ă©cris pas. Ne t'attache en toi qu'Ă  ce que tu sens qui n'est nulle part ailleurs qu'en toi-mĂȘme, et crĂ©e de toi, impatiemment ou patiemment, ah! le plus irremplaçable des ĂȘtres.
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André Gide
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Il n'y a pas d'amour dans la liberté individuelle, dans l'indépendance, c'est tout simplement un mensonge, et l'un des plus grossiers qui puisse se concevoir; il n'y a d'amour que dans le désir d'anéantissement, de fusion, de disparition individuelle, dans une sorte comme on disait autrefois de sentiment océanique, dans quelque chose qui de toute façon était, au moins dans un futur proche, condamné.
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Michel Houellebecq (The Possibility of an Island)
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Dit comme ça, c'Ă©tait un peu cucul Ă©videmment, mais bon, c'Ă©tait la vĂ©ritĂ© et il y avait bien longtemps que le ridicule ne les tuait plus: pour la premiĂšre fois et tous autant qu'ils Ă©taient, ils eurent l'impression d'avoir une vraie famille. Mieux qu'une vraie d'ailleurs, une voulue, une pour laquelle ils s'Ă©taient battus et qui ne leur demandait rien d'autre en Ă©change que d'ĂȘtre heureux ensemble. MĂȘme pas heureux d'ailleurs, ils n'Ă©taient plus si exigeants. D'ĂȘtre ensemble, c'est tout. Et dĂ©jĂ  c'Ă©tait inesperĂ©.
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Anna Gavalda (Hunting and Gathering)
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- Nous allons nous quitter maintenant. Tu vas descendre d'un cotĂ©, moi de l'autre et si nos ĂȘtres demeurent Ă  jamais liĂ©s, nos prĂ©sents dĂ©sormais divergent. - Non, hoqueta Ellana, pas maintenant. Demain. Plus tard. Il secoua la tĂȘte. - Quel autre moment plus beau, plus favorable choisir ? Tu es au sommet Ellana. Offre-moi le bonheur de te voir t'envoler. Il ferma les yeux une seconde. - S'il te plaĂźt. Un murmure. Qui perça le cƓur d'Ellana. Elle le caressa du regard une derniĂšre fois, lui sourit comme on fait une promesse et de dĂ©tourna. Il ne pleura que lorsqu'elle fut loin.
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Pierre Bottero (Ellana, l'Envol (Le Pacte des MarchOmbres, #2))
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C’est une folie de haĂŻr toutes les roses parce que une Ă©pine vous a piquĂ©, d’abandonner tous les rĂȘves parce que l’un d’entre eux ne s’est pas rĂ©alisĂ©, de renoncer Ă  toutes les tentatives parce qu’on a Ă©choué  C‘est une folie de condamner toutes les amitiĂ©s parce qu’une d’elles vous a trahi, de ne croire plus en l’amour juste parce qu’un d’entre eux a Ă©tĂ© infidĂšle, de jeter toutes les chances d’ĂȘtre heureux juste parce que quelque chose n’est pas allĂ© dans la bonne direction. Il y aura toujours une autre occasion, un autre ami, un autre amour, une force nouvelle. Pour chaque fin il y a toujours un nouveau dĂ©part.
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Antoine de Saint-Exupéry
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Devenir adulte est toujours une infidĂ©litĂ© qu’on fait Ă  nos tendres annĂ©es. Mais lĂ  rĂ©side toute la beautĂ© de l’enfance : elle existe pour ĂȘtre trahie, et cette trahison est la naissance de la nostalgie, le seul sentiment qui permette, un jour peut-ĂȘtre, Ă  l’extrĂ©mitĂ© de la vie, de retrouver la puretĂ© de jeunesse.
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Mohamed Mbougar Sarr (La Plus SecrĂšte MĂ©moire des hommes)
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Philibert prenait toujours du chocolat au petit déjeuner et son plaisir, c'était d'éteindre le gaz juste avant que le lait déborde. Plus qu'un rite ou une manie, c'était sa petite vistoire quotidienne. Son exploit, son invisible triomphe. Le lait retombait et la journée pouvait commencer : il maßtrisait la situation.
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Anna Gavalda (Hunting and Gathering)
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Si l’on ramĂšne les 4,5 milliards d’annĂ©es de notre planĂšte Ă  une seule journĂ©e terrestre, en supposant que celle-ci soit apparue Ă  0 heure, alors la vie naĂźt vers 5 heures du matin et se dĂ©veloppe pendant toute la journĂ©e. Vers 20 heures seulement viennent les premiers mollusques. Puis Ă  23 heures arrivent les dinosaures qui disparaĂźtront Ă  23h40. Quant Ă  nos ancĂȘtres, ils ne dĂ©barquent enfin que dans les 5 derniĂšres minutes avant 24 heures et ne voient leur cerveau doubler de volume que dans la toute derniĂšre minute. La rĂ©volution industrielle n’a commencĂ© que depuis un centiĂšme de seconde.
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Hubert Reeves (La Plus Belle Histoire du Monde)
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Un rideau de flocons blancs ininterrompu miroitait sans cesse en descendant vers la terre; il effaçait les formes, poudrait les choses d'une mousse de glace; et l'on n'entendait plus, dans le grand silence de la ville calme et ensevelie sous l'hiver, que ce froissement vague, innommable et flottant de la neige qui tombe, plutĂŽt sensation que bruit , entremĂȘlement d'atomes lĂ©gers qui semblaient emplir l'espace, couvrir le monde.
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Guy de Maupassant (Boule de Suif (21 contes))
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Le voilĂ  le grand drame de notre sociĂ©tĂ©: MĂȘme les riches ne font plus envie. Ils sont gros, moches, et vulgaires, leurs femmes sont liftĂ©es, ils vont en prison, leurs enfants se droguent, ils ont des goĂ»ts de ploucs, ils posent pour Gala. Les riches d'aujourd'hui ont oubliĂ© que l'argent est un moyen non une fin. Ils ne savent plus quoi en faire. Au moins quand on est pauvre, on peut se dire qu'avec du fric, tout s'arrangerait. Mais quand on est riche, on ne peut pas se dire qu'avec une nouvelle baraque dans le Midi, une autre voiture de sport, une paire de pompes Ă  12000 balles, ou un mannequin supplĂ©mentaire, tout s'arrangerait. Quand on est riche, on n'a plus d'excuse. C'est pour ça que tout les milliardaires sont sous Prozac ; parce qu'ils ne font plus rĂȘver personne, mĂȘme pas eux !
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Frédéric Beigbeder (L'amour dure trois ans (Marc Marronnier, #3))
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Les corps des femmes désirées, comme les dépouilles des vipÚres et les parfums volatils, ne sont pas faits pour dépérir, pourrir et s' évaporer dans notre atmosphÚre : fioles, bocaux et baignoires : c'est là que doivent durer les fleurs, scintiller les écailles et les femmes s' épanouir, loin de l' air et du temps, ainsi qu'un continent englouti ou une épave qu'on saborde, pour y découvrir plus tard, en cas de survie, un ultime trésor.
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Kateb Yacine
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Je suis trĂšs content de mon bonheur, je puis encore le subir un bon moment. Seulement, quand il me donne une heure de rĂ©pit pour prendre conscience, pour redevenir nostalgique, alors toute cette nostalgie tend non pas Ă  garder toujours ce bonheur, mais Ă  souffrir encore, en plus grand, en plus beau qu'autrefois. Je me consume du besoin d'une souffrance qui me rende prĂȘt et dĂ©sireux de mourir.
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Hermann Hesse (Steppenwolf)
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Rien n'est jamais acquis à l'homme Ni sa force Ni sa faiblesse ni son coeur Et quand il croit Ouvrir ses bras son ombre est celle d'une croix Et quand il croit serrer son bonheur il le broie Sa vie est un étrange et douloureux divorce Il n'y a pas d'amour heureux Sa vie Elle ressemble à ces soldats sans armes Qu'on avait habillés pour un autre destin A quoi peut leur servir de se lever matin Eux qu'on retrouve au soir désoeuvrés incertains Dites ces mots Ma vie Et retenez vos larmes Il n'y a pas d'amour heureux Mon bel amour mon cher amour ma déchirure Je te porte dans moi comme un oiseau blessé Et ceux-là sans savoir nous regardent passer Répétant aprÚs moi les mots que j'ai tressés Et qui pour tes grands yeux tout aussitÎt moururent Il n'y a pas d'amour heureux Le temps d'apprendre à vivre il est déjà trop tard Que pleurent dans la nuit nos coeurs à l'unisson Ce qu'il faut de malheur pour la moindre chanson Ce qu'il faut de regrets pour payer un frisson Ce qu'il faut de sanglots pour un air de guitare Il n'y a pas d'amour heureux Il n'y a pas d'amour qui ne soit à douleur Il n'y a pas d'amour dont on ne soit meurtri Il n'y a pas d'amour dont on ne soit flétri Et pas plus que de toi l'amour de la patrie Il n'y a pas d'amour qui ne vive de pleurs Il n'y a pas d'amour heureux Mais c'est notre amour à tous les deux
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Louis Aragon (La Diane française: En Étrange Pays dans mon pays lui-mĂȘme)
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Lorsque la sexualitĂ© disparaĂźt, c'est le corps de l'autre qui apparaĂźt, dans sa prĂ©sence vaguement hostile; ce sont les bruits, les mouvements, les odeurs; et la prĂ©sence mĂȘme de ce corps qu'on ne peut plus toucher, ni sanctifier par le contact, devient peu Ă  peu une gĂȘne; tout cela malheureusement, est connu. La disparition de la tendresse suit toujours de prĂšs celle de l'Ă©rotisme. Il n'y a pas de relation Ă©purĂ©e, d'union supĂ©rieure des Ăąmes, ni quoi que ce soit qui puisse y ressembler, ou mĂȘme l'Ă©voquer sur un mode allusif. Quand l'amour physique disparaĂźt, tout disparaĂźt; un agacement morne, sans profondeur, vient remplir la succession des jours.
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Michel Houellebecq (The Possibility of an Island)
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Nous savions que si l'intelligence du texte est une rude et solitaire conquĂȘte de l'esprit, la blague stupide Ă©tablit, elle, une connivence reposante qui ne se partage qu'entre amis de confiance. C'est avec nos intimes que nous Ă©changeons les histoires les plus bĂȘtes, façon de rendre un hommage implicite Ă  la finesse de leur esprit. Avec les autres, on fait les malins, on dĂ©balle son savoir, on en installe, on sĂ©duit.
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Daniel Pennac
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Et comme j’essayais de lui expliquer ce que c’était que ces mariages, je sentis quelque chose de frais et de fin peser lĂ©gĂšrement sur mon Ă©paule. C’était sa tĂȘte alourdie de sommeil qui s’appuyait contre moi avec un joli froissement de rubans, de dentelles et de cheveux ondĂ©s. Elle resta ainsi sans bouger jusqu’au moment oĂč les astres du ciel pĂąlirent, effacĂ©s par le jour qui montait. Moi, je la regardais dormir, un peu troublĂ© au fond de mon ĂȘtre, mais saintement protĂ©gĂ© par cette claire nuit qui ne m’a jamais donnĂ© que de belles pensĂ©es. Autour de nous, les Ă©toiles continuaient leur marche silencieuse, dociles comme un grand troupeau ; et par moments je me figurais qu’une de ces Ă©toiles, la plus fine, la plus brillante ayant perdu sa route, Ă©tait venue se poser sur mon Ă©paule pour dormir..
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Alphonse Daudet (Lettres de mon moulin)
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La Courbe de tes yeux La courbe de tes yeux fait le tour de mon coeur, Un rond de danse et de douceur, Auréole du temps, berceau nocturne et sûr, Et si je ne sais plus tout ce que j'ai vécu C'est que tes yeux ne m'ont pas toujours vu. Feuilles de jour et mousse de rosée, Roseaux du vent, sourires parfumés, Ailes couvrant le monde de lumiÚre, Bateaux chargés du ciel et de la mer, Chasseurs des bruits et sources des couleurs, Parfums éclos d'une couvée d'aurores Qui gßt toujours sur la paille des astres, Comme le jour dépend de l'innocence Le monde entier dépend de tes yeux purs Et tout mon sang coule dans leurs regards.
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Paul Éluard (Capital of Pain)
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Il y a ceux qui n'ont jamais lu et qui s'en font une honte, ceux qui n'ont plus le temps de lire et qui en cultivent le regret, il y a ceux qui ne lisent pas de romans, mais des livres *utiles*, mais des essais, mais des ouvrages techniques, mais des biographies, mais des livres d'histoire, il y a ceux qui lisent tout et n'importe quoi, ceux qui "dévorent" et dont les yeux brillent, il y a ceux qui ne lisent que les classiques, monsieur, "car il n'est meilleur critique que le tamis du temps", ceux qui passent leur maturité à "relire", et ceux qui ont lu le dernier untel et le dernier tel autre, car il faut bien, monsieur, se tenir au courant... Mais tous, tous, au nom de la nécessité de lire. Le dogme. (p. 78-79)
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Daniel Pennac (Comme un roman)
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...Ă  propos des intellectuels justement... C'est facile de se foutre de leur gueule... Ouais, c'est vachement facile... Souvent, ils sont pas trĂšs musclĂ©s et en plus, ils n'aiment pas ça, se battre... Ça ne les excite pas plus que ça les bruits des bottes, les mĂ©dailles et les grosses limousines, alors oui, c'est pas trĂšs dur... Il suffit de leur arracher leur livre des mains, leur guitare, leur crayon ou leur appareil photo et dĂ©jĂ  ils ne sont plus bons Ă  rien, ces empotĂ©s... D'ailleurs, les dictateurs, c'est souvent la premiĂšre chose qu'ils font: casser les lunettes, brĂ»ler les livres ou interdire les concerts, ça leur coĂ»te pas cher et ça peut leur Ă©viter bien des contrariĂ©tĂ©s par la suite... Mais tu vois, si ĂȘtre intello ça veut dire aimer s'instruire, ĂȘtre curieux, attentif, admirer, s'Ă©mouvoir, essayer de comprendre comment tout ça tient debout et tenter de se coucher un peu moins con que la veille, alors oui, je le revendique totalement: non seulement je suis une intello, mais en plus je suis fiĂšre de l'ĂȘtre... Vachement fiĂšre, mĂȘme...
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Anna Gavalda
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- LE VICOMTE, suffoquĂ© : Ces grands airs arrogants ! Un hobereau qui... qui... n'a mĂȘme pas de gants ! Et qui sort sans rubans, sans bouffettes, sans ganses ! - CYRANO : Moi, c'est moralement que j'ai mes Ă©lĂ©gances. Je ne m'attife pas ainsi qu'un freluquet, Mais je suis plus soignĂ© si je suis moins coquet ; Je ne sortirais pas avec, par nĂ©gligence, Un affront pas trĂšs bien lavĂ©, la conscience Jaune encore de sommeil dans le coin de son oeil, Un honneur chiffonnĂ©, des scrupules en deuil. Mais je marche sans rien sur moi qui ne reluise, EmpanachĂ© d'indĂ©pendance, et de franchise ; Ce n'est pas une taille avantageuse, c'est Mon Ăąme que je cambre ainsi qu'en un corset, Et tout couvert d'exploits qu'en rubans je m'attache, Retroussant mon esprit ainsi qu'une moustache, Je fais, en traversant les groupes et les ronds, Sonner les vĂ©ritĂ©s comme des Ă©perons." (Acte I, scĂšne IV)
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Edmond Rostand (Cyrano de Bergerac)
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La terre est bleue La terre est bleue comme une orange Jamais une erreur les mots ne mentent pas Ils ne vous donnent plus Ă  chanter Au tour des baisers de s’entendre Les fous et les amours Elle sa bouche d’alliance Tous les secrets tous les sourires Et quels vĂȘtements d’indulgence À la croire toute nue. Les guĂȘpes fleurissent vert L’aube se passe autour du cou Un collier de fenĂȘtres Des ailes couvrent les feuilles Tu as toutes les joies solaires Tout le soleil sur la terre Sur les chemins de ta beautĂ©.
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Paul Éluard (Love, Poetry (Translation))
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Elle se mordit la langue quand Thorn pressa sa bouche contre la sienne. Sur le moment, elle ne comprit plus rien. Elle sentit sa barbe lui piquer le menton, son odeur de dĂ©sinfectant lui monter Ă  la tĂȘte, mais la seule pensĂ©e qui la traversa, stupide et Ă©vidente, fut quenelle avait une botte plantĂ©e dans son tibia. Elle voulut se reculer; Thorn l’en empĂȘcha. Il referma ses mains de part et d’autre de son visage, les doigts dans ses cheveux, prenant appui sur sa nuque avec une urgence qui les dĂ©sĂ©quilibra tous les deux. La bibliothĂšque dĂ©versa une pluie de documents sur eux. Quand Thorn s’écarte finalement, le souffle court, ce fut pour clouer un regard de fer dans ses lunettes. - je vous prĂ©viens. Les mots que vous m’avez dits, je ne vous laisserai pas revenir dessus. Sa voix Ă©tait Ăąpre, mais sous l’autoritĂ© des paroles il y avait comme une fĂȘlure. OphĂ©lie pouvait percevoir le pouls prĂ©cipitĂ© des mains qu’il appuyait maladroitement sur ses joues. Elle devait reconnaĂźtre que son propre cƓur jouait Ă  la balançoire. Thorn Ă©tait sans doute l’homme le plus dĂ©concertant qu’elle avait jamais rencontrĂ©, mais il l’a faisait se sentir formidablement vivante. - je vous aime, rĂ©pĂ©ta-y-elle d’un ton inflexible. C’est ce que j’aurais du vous rĂ©pondre quand vous vouliez connaĂźtre la raison de ma prĂ©sence Ă  Babel c’est ce que j’en aurais du vous rĂ©pondre chaque fois que vous vouliez savoir ce que j’en avais vraiment Ă  vous dire. Bien sĂ»r que je dĂ©sire percer les mystĂšres de Dieu et reprendre le contrĂŽle de ma vie, mais... vous faites partie de ma vie, justement. Je vous ai traitĂ© d’égoĂŻste et Ă  aucun moment je ne me suis mise, moi, Ă  votre place. Je vous demande pardon. 
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Christelle Dabos (La MĂ©moire de Babel (La Passe-Miroir, #3))
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Tant qu’il existera, par le fait des lois et des mƓurs, une damnation sociale crĂ©ant artificiellement, en pleine civilisation, des enfers, et compliquant d’une fatalitĂ© humaine la destinĂ©e qui est divine; tant que les trois problĂšmes du siĂšcle, la dĂ©gradation de l’homme par le prolĂ©tariat, la dĂ©chĂ©ance de la femme par la faim, l’atrophie de l’enfant par la nuit, ne seront pas rĂ©solus; tant que, dans de certaines rĂ©gions, l’asphyxie sociale sera possible; en d’autres termes, et Ă  un point de vue plus Ă©tendu encore, tant qu’il y aura sur la terre ignorance et misĂšre, des livres de la nature de celui-ci pourront ne pas ĂȘtre inutiles.
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Victor Hugo (Les Misérables)
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Elle aimait la vie, il aimait la mort, Il aimait la mort, et ses sombres promesses, Avenir incertain d'un garçon en dĂ©tresse, Il voulait mourir, laisser partir sa peine, Oublier tous ces jours Ă  la mĂȘme rengaine... Elle aimait la vie, heureuse d'exister, Voulait aider les gens et puis grandir en paix, C'Ă©tait un don du ciel, toujours souriante, Fleurs et nature, qu'il pleuve ou qu'il vente. Mais un beau jour, la chute commença, Ils tombĂšrent amoureux, mauvais choix, Elle aimait la vie et il aimait la mort, Qui d'entre les deux allait ĂȘtre plus fort? Ils s'aimaient tellement, ils auraient tout sacrifiĂ©, Amis et famille, capables de tout renier, Tout donner pour s'aimer, tel Ă©tait leur or, Mais elle aimait la vie et il aimait la mort... Si diffĂ©rents et pourtant plus proches que tout, Se comprenant pour protĂ©ger un amour fou, L'un ne rĂȘvait que de mourir et de s'envoler, L'autre d'une vie avec lui, loin des atrocitĂ©s... Fin de l'histoire : obligĂ©s de se sĂ©parer, Ils s'Ă©taient promis leur Ă©ternelle fidĂ©litĂ©. Aujourd'hui, le garçon torturĂ© vit pour elle, Puisque la fille, pour lui, a rendu ses ailes... Il aimait la mort, elle aimait la vie, Il vivait pour elle, elle est morte pour lui »
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William Shakespeare
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Le parti national-socialiste avait fait un fameux cadeau Ă  ces SS-lĂ  : ils pouvaient marcher au combat sans aucun risque physique, dĂ©crocher les honneurs sans avoir Ă  entendre siffler les balles. L'impunitĂ© psychologique Ă©tait plus difficile Ă  atteindre. Tous les officiers SS avaient des camarades qui s'Ă©taient suicidĂ©s. Le haut commandment avait pondu des circulaires pour dĂ©noncer ces pertes futiles : il fallait ĂȘtre simple d'esprit pour croire que les juifs, parce qu'ils n'avaient pas de fusils, ne possĂ©daient pas d'armes d'un autre calibre : des armes sociales, Ă©conomiques et politiques. En fait, le juif Ă©tait armĂ© jusqu'aux dents. Trempez votre caractĂšre dans l'acier, soulignaient les circulaires, car l'enfant juif est une bombe Ă  retardement culturelle, la femme juive, un tissu biologique de toutes les trahisons, le mĂąle juif, un ennemi plus implacable encore qu'aucun Russe ne saurait l'ĂȘtre. (ch. 20)
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Thomas Keneally (Schindler’s List)
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Page 41 - Alors qu'est ce que tu décides? Tu me suis ou pas? Pitié accepte, ne me force pas à te tuer... - Par simple curiosité, que ferais-tu si je refusais? J'hésitais un instant à répondre mais optai pour la franchise. Clarence n'était pas un mauvais bougre, il avait le droit de savoir ce qui l'attendait. - Je devrais te liquidier, répondis-je d'un ton glacial. Une vie contre des milliers d'autres, le choix n'était pas trÚs compliqué. - Tu sais que tu es pire partenaire que j'aie jamais eue? fit-il non sans humour. Je haussais les épaules. - Pourquoi? Parce que je veux préserver la paix? - Non, parce que tu as une maniÚre trÚs personnelle d'argumenter. - Le moyen le plus efficace de défendre une opinion est de tuer ceux qui ne la partagent pas. - C'est quoi ca? Un extrait du guide du parfait dictateur? - Non, un vieil adage familial, fis je en lui tendant la main pour l'aider à se relever. - Eh ben désolé de te dire ca, mais ta famille craint! fit-il en se redressant. - Oui et encore, t'es trÚs en dessous de la vérité, soupirai-je...
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Cassandra O'Donnell (Potion macabre (Rebecca Kean, #3))
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De guiche. "Portez-les-lui." Cyrano, tentĂ© et un peu charmĂ©. "Vraiment
" De guiche. "Il est des plus experts. Il vous corrigera seulement quelques vers
" Cyrano, dont le visage s’est immĂ©diatement rembruni. "Impossible, Monsieur ; mon sang se coagule En pensant qu’on y peut changer une virgule." De guiche. "Mais quand un vers lui plaĂźt, en revanche, mon cher, Il le paye trĂšs cher." Cyrano. "Il le paye moins cher Que moi, lorsque j’ai fait un vers, et que je l’aime, Je me le paye, en me le chantant Ă  moi-mĂȘme !" De guiche. "Vous ĂȘtes fier." Cyrano. "Vraiment, vous l’avez remarquĂ© ?
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Edmond Rostand (Cyrano de Bergerac)
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je finirai bien par te rencontrer quelque part bon dieu! et contre tout ce qui me rend absent et douloureux par le mince regard qui me reste au fond du froid j'affirme ĂŽ mon amour que tu existes je corrige notre vie nous n'irons plus mourir de langueur Ă  des milles de distance dans nos rĂȘves bourrasques des filets de sang dans la soif craquelĂ©e de nos lĂšvres les Ă©paules baignĂ©es de vols de mouettes non j'irai te chercher nous vivrons sur la terre la dĂ©tresse n'est pas incurable qui fait de moi une Ă©pave de dĂ©rision, un ballon d'indĂ©cence un pitre aux larmes d'Ă©tincelles et de lĂ©sions profondes frappe l'air et le feu de mes soifs coule-moi dans tes mains de ciel de soie la tĂȘte la premiĂšre pour ne plus revenir
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Gaston Miron (L'Homme rapaillé)
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- LE VICOMTE, suffoquĂ© : Ces grands airs arrogants ! Un hobereau qui... qui... n'a mĂȘme pas de gants ! Et qui sort sans rubans, sans bouffettes, sans ganses ! - CYRANO : Moi, c'est moralement que j'ai mes Ă©lĂ©gances. Je ne m'attife pas ainsi qu'un freluquet, Mais je suis plus soignĂ© si je suis moins coquet ; Je ne sortirais pas avec, par nĂ©gligence, Un affront pas trĂšs bien lavĂ©, la conscience Jaune encore de sommeil dans le coin de son oeil, Un honneur chiffonnĂ©, des scrupules en deuil. Mais je marche sans rien sur moi qui ne reluise, EmpanachĂ© d'indĂ©pendance et de franchise ; Ce n'est pas une taille avantageuse, c'est Mon Ăąme que je cambre ainsi qu'en un corset, Et tout couvert d'exploits qu'en rubans je m'attache, Retroussant mon esprit ainsi qu'une moustache, Je fais, en traversant les groupes et les ronds, Sonner les vĂ©ritĂ©s comme des Ă©perons.
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Edmond Rostand (Cyrano de Bergerac)
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La seule chance de survie, lorsqu'on est sincĂšrement Ă©pris, consiste Ă  le dissimuler Ă  la femme qu'on aime, Ă  feindre en toutes circonstances un lĂ©ger dĂ©tachement. Quelle tristesse, dans cette simple constatation !... Il ne m'Ă©tait cependant jamais venu Ă  l'esprit de contester cette loi, ni d'envisager de m'y soustraire : l'amour rend faible, et le plus faible des deux est opprimĂ©, torturĂ© et finalement tuĂ© par l'autre, qui de son cĂŽtĂ© opprime, torture et tue sans penser Ă  mal, sans mĂȘme en Ă©prouver de plaisir, avec une complĂšte indiffĂ©rence ; voilĂ  ce que les hommes, ordinairement, appellent l'amour. (La possibilitĂ© d'une Ăźle, Daniel 1,13)
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Michel Houellebecq
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Et voilĂ . Maintenant le ressort est bandĂ©. Cela n'a plus qu'Ă  se dĂ©rouler tout seul. C'est cela qui est commode dans la tragĂ©die. On donne le petit coup de pouce pour que cela dĂ©marre, rien, un regard pendant une seconde Ă  une fille qui passe et lĂšve les bras dans la rue, une envie d'honneur un beau matin, au rĂ©veil, comme de quelque chose qui se mange, une question de trop qu'on se pose un soir
 C'est tout. AprĂšs, on n'a plus qu'Ă  laisser faire. On est tranquille. Cela roule tout seul. C'est minutieux, bien huilĂ© depuis toujours. La mort, la trahison, le dĂ©sespoir sont lĂ , tout prĂȘts, et les Ă©clats, et les orages, et les silences, tous les silences : le silence quand le bras du bourreau se lĂšve Ă  la fin, le silence au commencement quand les deux amants sont nus l'un en face de l'autre pour la premiĂšre fois, sans oser bouger tout de suite, dans la chambre sombre, le silence quand les cris de la foule Ă©clatent autour du vainqueur - et on dirait un film dont le son s'est enrayĂ©, toutes ces bouches ouvertes dont il ne sort rien, toute cette clameur qui n'est qu'une image, et le vainqueur, dĂ©jĂ  vaincu, seul au milieu de son silence

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Jean Anouilh
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La distinction traditionnelle entre guerres "justes" et guerres "injustes" est dĂ©sormais obsolĂšte. La cruautĂ© des moyens dĂ©passe aujourd'hui tout objectif imaginable. Aucune frontiĂšre nationale, aucune idĂ©ologie, aucun "mode de vie" ne peut justifier la disparition de millions de vies que la guerre moderne, nuclĂ©aire ou conventionnelle, entraĂźne inĂ©vitablement. Les prĂ©textes classiques sont soit trop confus soit trop changeants pour que l'on meure pour eux. Les systĂšmes changent, les politiques changent. Les distinctions entre le bien et le mal proclamĂ©es par les politiciens ne sont pas assez Ă©videntes pour justifier que des gĂ©nĂ©rations d'ĂȘtre humains meurent pour prouver leur caractĂšre sacro-saint. MĂȘme une guerre de lĂ©gitime dĂ©fense, la plus moralement justifiable des guerres, perd tout caractĂšre moral lorsqu'elle exige un sacrifice collectif si Ă©norme qu'il frise le suicide.
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Howard Zinn (Disobedience and Democracy: Nine Fallacies on Law and Order (Radical 60s))
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- DĂ©gage je t'ai dit ! - Je te fais une contre-proposition, lança Ellana que le poing brandi du barbu ne paraissait pas impressionner le moins du monde. Tu quittes l'auberge maintenant, sans bruit, avec la promesse de ne plus jamais y remettre les pieds, et je ne te casse pas en mille morceaux. Le colosse ouvrit la bouche pour un cri ou peut-ĂȘtre un rire, mais la voix de Jilano le lui vola. - C'est un marchĂ© de dupe ! s'Ă©cria-t-il sur un ton plein de verve. - Et pourquoi donc ? fit mine de se fĂącher Ellana. - Parce que mĂȘme si tu tapes fort, tu lui casseras au maximum une douzaine d'os. Allez, vingt parce que c'est toi. On est loin des mille morceaux que tu revendiques. Ellana soupira. - C'est une expression, il ne faut pas la prendre au pied de la lettre. - Sans doute, mais ce monsieur pourrait s'estimer grugĂ©. - TrĂšs bien. VoilĂ  ma contre-proposition rĂ©actualisĂ©e. Tu quittes l'auberge maintenant, sans bruit, avec la promesse de ne plus jamais y remettre les pieds et je ne te casse pas en douze morceaux. Peut-ĂȘtre vingt parce que c'est moi.
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Pierre Bottero (Ellana, l'Envol (Le Pacte des MarchOmbres, #2))
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N’importe ! elle n’était pas heureuse, ne l’avait jamais Ă©tĂ©. D’oĂč venait donc cette insuffisance de la vie, cette pourriture instantanĂ©e des choses oĂč elle s’appuyait ?
 Mais, s’il y avait quelque part un ĂȘtre fort et beau, une nature valeureuse, pleine Ă  la fois d’exaltation et de raffinements, un coeur de poĂšte sous une forme d’ange, lyre aux cordes d’airain, sonnant vers le ciel des Ă©pithalames Ă©lĂ©giaques, pourquoi, par hasard, ne le trouveraitelle pas ? Oh ! quelle impossibilitĂ© ! Rien, d’ailleurs, ne valait la peine d’une recherche ; tout mentait ! Chaque sourire cachait un bĂąillement d’ennui, chaque joie une malĂ©diction, tout plaisir son dĂ©goĂ»t, et les meilleurs baisers ne vous laissaient sur la lĂšvre qu’une irrĂ©alisable envie d’une voluptĂ© plus haute.
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Gustave Flaubert (Madame Bovary)
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Qu'une goutee de vin tombe dans un verre d'eau; quelle que soit la loi du movement interne du liquide, nous verrons bientÎt se colorer d'une teinte rose uniforme et à partir de ce moment on aura beau agiter le vase, le vin et l'eau ne partaßtront plus pouvoir se séparer. Tout cela, Maxwell et Boltzmann l'ont expliqué, mais celui qui l'a vu plus nettement, dans un livre trop peu lu parce qu'il est difficile à lire, c'est Gibbs dans ses principes de la Mécanique Statistique. Let a drop of wine fall into a glass of water; whatever be the law that governs the internal movement of the liquid, we will soon see it tint itself uniformly pink and from that moment on, however we may agitate the vessel, it appears that the wine and water can separate no more. All this, Maxwell and Boltzmann have explained, but the one who saw it in the cleanest way, in a book that is too little read because it is difficult to read, is Gibbs, in his Principles of Statistical Mechanics.
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Henri Poincaré (The Value of Science: Essential Writings of Henri Poincare (Modern Library Science))
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Mes amis, j'Ă©cris ce petit mot pour vous dire que je vous aime, que je pars avec la fiertĂ© de vous avoir connus, l'orgueil d'avoir Ă©tĂ© choisi et apprĂ©ciĂ© par vous, et que notre amitiĂ© fut sans doute la plus belle Ɠuvre de ma vie. C'est Ă©trange, l'amitiĂ©. Alors qu'en amour, on parle d'amour, entre vrais amis on ne parle pas d'amitiĂ©. L'amitiĂ©, on la fait sans la nommer ni la commenter. C'est fort et silencieux. C'est pudique. C'est viril. C'est le romantisme des hommes. Elle doit ĂȘtre beaucoup plus profonde et solide que l'amour pour qu'on ne la disperse pas sottement en mots, en dĂ©clarations, en poĂšmes, en lettres. Elle doit ĂȘtre beaucoup plus satisfaisante que le sexe puisqu'elle ne se confond pas avec le plaisir et les dĂ©mangeaisons de peau. En mourant, c'est Ă  ce grand mystĂšre silencieux que je songe et je lui rends hommage. Mes amis, je vous ai vus mal rasĂ©s, crottĂ©s, de mauvaise humeur, en train de vous gratter, de pĂ©ter, de roter, et pourtant je n'ai jamais cessĂ© de vous aimer. J'en aurais sans doute voulu Ă  une femme de m'imposer toutes ses misĂšres, je l'aurais quittĂ©e, insultĂ©e, rĂ©pudiĂ©e. Vous pas. Au contraire. Chaque fois que je vous voyais plus vulnĂ©rables, je vous aimais davantage. C'est injuste n'est-ce pas? L'homme et la femme ne s'aimeront jamais aussi authentiquement que deux amis parce que leur relation est pourrie par la sĂ©duction. Ils jouent un rĂŽle. Pire, ils cherchent chacun le beau rĂŽle. ThĂ©Ăątre. ComĂ©die. Mensonge. Il n'y a pas de sĂ©curitĂ© en l'amour car chacun pense qu'il doit dissimuler, qu'il ne peut ĂȘtre aimĂ© tel qu'il est. Apparence. Fausse façade. Un grand amour, c'est un mensonge rĂ©ussi et constamment renouvelĂ©. Une amitiĂ©, c'est une vĂ©ritĂ© qui s'impose. L'amitiĂ© est nue, l'amour fardĂ©. Mes amis, je vous aime donc tels que vous ĂȘtes.
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Éric-Emmanuel Schmitt (La Part de l'autre)
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Je te rencontre. Je me souviens de toi. Cette ville Ă©tait faite Ă  la taille de l'amour. Tu Ă©tais fait Ă  la taille de mon corps mĂȘme. Qui es-tu ? Tu me tues. J'avais faim. Faim d'infidĂ©litĂ©s, d'adultĂšres, de mensonges et de mourir. Depuis toujours. Je me doutais bien qu'un jour tu me tomberais dessus. Je t'attendais dans une impatience sans borne, calme. DĂ©vore-moi. DĂ©forme-moi Ă  ton image afin qu'aucun autre, aprĂšs toi, ne comprenne plus du tout le pourquoi de tant de dĂ©sir. Nous allons rester seuls, mon amour. La nuit ne va pas finir. Le jour ne se lĂšvera plus sur personne. Jamais. Jamais plus. Enfin. Tu me tues. Tu me fais du bien. Nous pleurerons le jour dĂ©funt avec conscience et bonne volontĂ©. Nous n'aurons plus rien d'autre Ă  faire, plus rien que pleurer le jour dĂ©funt. Du temps passera. Du temps seulement. Et du temps va venir. Du temps viendra. OĂč nous ne saurons plus du tout nommer ce qui nous unira. Le nom s'en effacera peu Ă  peu de notre mĂ©moire. Puis, il disparaĂźtra, tout Ă  fait.
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Marguerite Duras (Hiroshima mon amour)
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- Offre ton identitĂ© au Conseil, jeune apprentie. La voix Ă©tait douce, l’ordre sans appel. - Je m’appelle Ellana Caldin. - Ton Ăąge. Ellana hĂ©sita une fraction de seconde. Elle ignorait son Ăąge exact, se demandait si elle n’avait pas intĂ©rĂȘt Ă  se vieillir. Les apprentis qu’elle avait discernĂ©s dans l’assemblĂ©e Ă©taient tous plus ĂągĂ©s qu’elle, le Conseil ne risquait-il pas de la considĂ©rer comme une enfant ? Les yeux noirs d’Ehrlime fixĂ©s sur elle la dissuadĂšrent de chercher Ă  la tromper. - J’ai quinze ans. Des murmures Ă©tonnĂ©s s’élevĂšrent dans son dos. Imperturbable, Ehrlime poursuivit son interrogatoire. - Offre-nous le nom de ton maĂźtre. - Jilano AlhuĂŻn. Les murmures, qui s’étaient tus, reprirent. Plus marquĂ©s, Ehrlime leva une main pour exiger un silence qu’elle obtint immĂ©diatement. - Jeune Ellana, je vais te poser une sĂ©rie de questions. A ces questions, tu devras rĂ©pondre dans l’instant, sans rĂ©flĂ©chir, en laissant les mots jaillir de toi comme une cascade vive. Les mots sont un cours d’eau, la source est ton Ăąme. C’est en remontant tes mots jusqu’à ton Ăąme que je saurai discerner si tu peux avancer sur la voie des marchombres. Es-tu prĂȘte ? - Oui. Une esquisse de sourire traversa le visage ridĂ© d’Ehrlime. - Qu’y a-t-il au sommet de la montagne ? - Le ciel. - Que dit le loup quand il hurle ? - Joie, force et solitude. - À qui s’adresse-t-il ? - À la lune. - OĂč va la riviĂšre ? L’anxiĂ©tĂ© d’Ellana s’était dissipĂ©e. Les questions d’Ehrlime Ă©taient trop imprĂ©vues, se succĂ©daient trop rapidement pour qu’elle ait d’autre solution qu’y rĂ©pondre ainsi qu’on le lui avait demandĂ©. Impossible de tricher. Cette Ă©vidence se transforma en une onde paisible dans laquelle elle s’immergea, laissant Ehrlime remonter le cours de ses mots jusqu’à son Ăąme, puisque c’était ce qu’elle dĂ©sirait. - Remplir la mer. - À qui la nuit fait-elle peur ? - À ceux qui attendent le jour pour voir. - Combien d’hommes as-tu dĂ©jĂ  tuĂ©s ? - Deux. - Es-tu vent ou nuage ? - Je suis moi. - Es-tu vent ou nuage ? - Vent. - MĂ©ritaient-ils la mort ? - Je l’ignore. - Es-tu ombre ou lumiĂšre ? - Je suis moi. - Es-tu ombre ou lumiĂšre ? - Les deux. - OĂč se trouve la voie du marchombre ? - En moi. Ellana s’exprimait avec aisance, chaque rĂ©ponse jaillissant d’elle naturellement, comme une expiration aprĂšs une inspiration. FluiditĂ©. Le sourire sur le visage d’Ehrlime Ă©tait revenu, plus marquĂ©, et une pointe de jubilation perçait dans sa voix ferme. - Que devient une larme qui se brise ? - Une poussiĂšre d’étoiles. - Que fais-tu devant une riviĂšre que tu ne peux pas traverser ? - Je la traverse. - Que devient une Ă©toile qui meurt ? - Un rĂȘve qui vit. - Offre-moi un mot. - Silence. - Un autre. - Harmonie. - Un dernier. - FluiditĂ©. - L’ours et l’homme se disputent un territoire. Qui a raison ? - Le chat qui les observe. - Marie tes trois mots. - Marchombre.
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Pierre Bottero (Ellana (Le Pacte des MarchOmbres, #1))
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Je condamne l'ignorance qui rĂšgne en ce moment dans les dĂ©mocraties aussi bien que dans les rĂ©gimes totalitaires. Cette ignorance est si forte, souvent si totale, qu'on la dirait voulue par le systĂšme, sinon par le rĂ©gime. J'ai souvent rĂ©flĂ©chi Ă  ce que pourrait ĂȘtre l'Ă©ducation de l'enfant. Je pense qu'il faudrait des Ă©tudes de base, trĂšs simples, oĂč l'enfant apprendrait qu'il existe au sein de l'univers, sur une planĂšte dont il devra plus tard mĂ©nager les ressources, qu'il dĂ©pend de l'air, de l'eau, de tous les ĂȘtres vivants, et que la moindre erreur ou la moindre violence risque de tout dĂ©truire. Il apprendrait que les hommes se sont entre-tuĂ©s dans des guerres qui n'ont jamais fait que produire d'autres guerres, et que chaque pays arrange son histoire, mensongĂšrement, de façon Ă  flatter son orgueil. On lui apprendrait assez du passĂ© pour qu'il se sente reliĂ© aux hommes qui l'ont prĂ©cĂ©dĂ©, pour qu'il les admire lĂ  oĂč ils mĂ©ritent de l'ĂȘtre, sans s'en faire des idoles, non plus que du prĂ©sent ou d'un hypothĂ©tique avenir. On essaierait de le familiariser Ă  la fois avec les livres et les choses ; il saurait le nom des plantes, il connaĂźtrait les animaux sans se livrer aux hideuses vivisections imposĂ©es aux enfants et aux trĂšs jeunes adolescents sous prĂ©texte de biologie ; il apprendrait Ă  donner les premiers soins aux blessĂ©s ; son Ă©ducation sexuelle comprendrait la prĂ©sence Ă  un accouchement, son Ă©ducation mentale la vue des grands malades et des morts. On lui donnerait aussi les simples notions de morale sans laquelle la vie en sociĂ©tĂ© est impossible, instruction que les Ă©coles Ă©lĂ©mentaires et moyennes n'osent plus donner dans ce pays. En matiĂšre de religion, on ne lui imposerait aucune pratique ou aucun dogme, mais on lui dirait quelque chose de toutes les grandes religions du monde, et surtout de celles du pays oĂč il se trouve, pour Ă©veiller en lui le respect et dĂ©truire d'avance certains odieux prĂ©jugĂ©s. On lui apprendrait Ă  aimer le travail quand le travail est utile, et Ă  ne pas se laisser prendre Ă  l'imposture publicitaire, en commençant par celle qui lui vante des friandises plus ou moins frelatĂ©es, en lui prĂ©parant des caries et des diabĂštes futurs. Il y a certainement un moyen de parler aux enfants de choses vĂ©ritablement importantes plus tĂŽt qu'on ne le fait. (p. 255)
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Marguerite Yourcenar (Les Yeux ouverts : Entretiens avec Matthieu Galey)
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Le petit prince Ă©tait maintenant tout pĂąle de colĂšre. «Il y a des millions d'annĂ©es que les fleurs fabriquent des Ă©pines. Il y a des millions d'annĂ©es que les moutons mangent quand mĂȘme les fleurs. Et ce n'est pas sĂ©rieux de chercher Ă  comprendre pourquoi elles se donnent tant de mal pour se fabriquer des Ă©pines qui ne servent jamais Ă  rien? Ce n'est pas important la guerre des moutons et des fleurs? Ce n'est pas sĂ©rieux et plus important que les additions d'un gros Monsieur rouge? Et si je connais, moi, une fleur unique au monde, qui n'existe nulle part, sauf dans ma planĂšte, et qu'un petit mouton peut anĂ©antir d'un seul coup, comme ça, un matin, sans se rendre compte de ce qu'il fait, ce n'est pas important ça?» Il rougit, puis reprit: «Si quelqu'un aime une fleur qui n'existe qu'Ă  un exemplaire dans les millions d'Ă©toiles, ça suffit pour qu'il soit heureux quand il les regarde. Il se dit: "Ma fleur est lĂ  quelque part..." Mais si le mouton mange la fleur, c'est pour lui comme si, brusquement, toutes les Ă©toiles s'Ă©teignaient! Et ce n'est pas important ça!»
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Antoine de Saint-Exupéry (The Little Prince)
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L’harmonie, me disait-il, n’est qu’un accessoire Ă©loignĂ© dans la musique imitative; il n’y a dans l’harmonie proprement dite aucun principe d’imitation. Elle assure, il est vrai, les intonations; elle porte tĂ©moignage de leur justesse; et, rendant les modulations plus sensibles, elle ajoute de l’énergie Ă  l’expresson, et de la grĂące au chant. Mais c’est de la seule mĂ©lodie que sort cette puissance invincible des accents passionĂ©s; c’est d’elle que dĂ©rive tout le pouvoir de la musique sur l’ñme. Formez les plus savantes successions d’accords sans mĂ©lange de mĂ©lodie, vous serez ennuyĂ©s au bout d’un quart d’heure. De beaux chants sans aucune harmonie sont longtemps Ă  l’épreuve de l’ennui. Que l’accent du sentiment anime les chants les plus simples, ils seront intĂ©ressants. Au contraire, une mĂ©lodie qui ne parle point chante toujours mal, et la seule harmonie n’a jamais rien su dire au coeur.
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Jean-Jacques Rousseau (Julie, ou La nouvelle Heloise. Lettres de deux amans, habitans d'une petite ville au pied des Alpes. Recueillies et publiées Volume 2 (French Edition))
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Notre gĂ©nĂ©ration est trop superficielle pour le mariage. On se marie comme on va au MacDo. AprĂšs, on zappe. Comment voudriez-vous qu'on reste toute sa vie avec la mĂȘme personne dans la sociĂ©tĂ© du zapping gĂ©nĂ©ralisĂ©? Dans l'Ă©poque oĂč les stars, les hommes politiques, les arts, les sexes, les religions n'ont jamais Ă©tĂ© aussi interchangeables? Pourquoi le sentiment amoureux ferait-il exception Ă  la schizophrĂ©nie gĂ©nĂ©rale? Et puis d'abord, d'oĂč nous vient donc cette curieuse obsession: s'escrimer Ă  tout prix pour ĂȘtre heureux avec une seule personne? Sur 558 types de sociĂ©tĂ©s humaines, 24 % seulement sont monogames. La plupart des espĂšces animales sont polygames. Quant aux extraterrestres, n'en parlons pas: il y a longtemps que la Charte Galactique X23 a interdit la monogamie dans toutes les planĂštes de type B#871. Le mariage, c'est du caviar Ă  tous les repas: une indigestion de ce que vous adorez, jusqu'Ă  l'Ă©cƓurement. “ Allez, vous en reprendrez bien un peu, non? Quoi? Vous n'en pouvez plus? Pourtant vous trouviez cela dĂ©licieux il y a peu, qu'est-ce qui vous prend? Sale gosse, va!” La puissance de l'amour, son incroyable pouvoir, devait franchement terrifier la sociĂ©tĂ© occidentale pour qu'elle en vienne Ă  crĂ©er ce systĂšme destinĂ© Ă  vous dĂ©goĂ»ter de ce que vous aimez.
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Frédéric Beigbeder (L'amour dure trois ans - Le roman suivi du scénario du film)
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- Mais tu sais, l'alcool ne te guĂ©rira pas. Il ne faut pas que tu croies ça. Ça apaisera tes blessures, mais cela t'en donnera d'autres, peut-ĂȘtre pires. Tu ne pourras plus te passer de l'alcool, et mĂȘme si, au dĂ©but, tu Ă©prouves une euphorie, un bonheur Ă  boire, ça disparaĂźtra vite pour ne laisser place qu'Ă  la tyrannie de la dĂ©pendance et du manque. Ta vie ne sera que brumes, Ă©tats de sĂ©mi-conscience, hallucinations, paranoĂŻa, crises de delirium tremens, violence contre ton entourage. Ta personnalitĂ© se dĂ©sagrĂ©gera... - C'est ce que je veux ! martela Antoine en frappant le comptoir de son petit poing. Je n'ai plus la force d'ĂȘtre moi, plus le courage, plus l'envie d'avoir quelque chose comme une personnalitĂ©. Une personnalitĂ©, c'est un luxe qui me coĂ»te cher. Je veux ĂȘtre un spectre banal. J'en ai assez de ma libertĂ© de pensĂ©e, de toutes mes connaissances, de ma satanĂ©e conscience ! ("Comment je suis devenu stupide", p34)
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Martin Page (Comment je suis devenu stupide)
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Et que faudrait-il faire ? Chercher un protecteur puissant, prendre un patron, Et comme un lierre obscur qui circonvient un tronc Et s'en fait un tuteur en lui lĂ©chant l'Ă©corce, Grimper par ruse au lieu de s'Ă©lever par force ? Non, merci ! DĂ©dier, comme tous ils le font, Des vers aux financiers ? se changer en bouffon Dans l'espoir vil de voir, aux lĂšvres d'un ministre, NaĂźtre un sourire, enfin, qui ne soit pas sinistre ? Non, merci ! DĂ©jeuner, chaque jour, d'un crapaud ? Avoir un ventre usĂ© par la marche ? une peau Qui plus vite, Ă  l'endroit des genoux, devient sale ? ExĂ©cuter des tours de souplesse dorsale ?... Non, merci ! D'une main flatter la chĂšvre au cou Cependant que, de l'autre, on arrose le chou, Et donneur de sĂ©nĂ© par dĂ©sir de rhubarbe, Avoir son encensoir, toujours, dans quelque barbe ? Non, merci ! Se pousser de giron en giron, Devenir un petit grand homme dans un rond, Et naviguer, avec des madrigaux pour rames, Et dans ses voiles des soupirs de vieilles dames ? Non, merci ! Chez le bon Ă©diteur de Sercy Faire Ă©diter ses vers en payant ? Non, merci ! S'aller faire nommer pape par les conciles Que dans des cabarets tiennent des imbĂ©ciles ? Non, merci ! Travailler Ă  se construire un nom Sur un sonnet, au lieu d'en faire d'autres ? Non, Merci ! Ne dĂ©couvrir du talent qu'aux mazettes ? Être terrorisĂ© par de vagues gazettes, Et se dire sans cesse : "Oh ! pourvu que je sois Dans les petits papiers du Mercure François" ?... Non, merci ! Calculer, avoir peur, ĂȘtre blĂȘme, PrĂ©fĂ©rer faire une visite qu'un poĂšme, RĂ©diger des placets, se faire prĂ©senter ? Non, merci ! non, merci ! non, merci ! Mais... chanter, RĂȘver, rire, passer, ĂȘtre seul, ĂȘtre libre, Avoir l'Ɠil qui regarde bien, la voix qui vibre, Mettre, quand il vous plaĂźt, son feutre de travers, Pour un oui, pour un non, se battre, - ou faire un vers ! Travailler sans souci de gloire ou de fortune, À tel voyage, auquel on pense, dans la lune ! N'Ă©crire jamais rien qui de soi ne sortĂźt, Et modeste d'ailleurs, se dire : mon petit, Sois satisfait des fleurs, des fruits, mĂȘme des feuilles, Si c'est dans ton jardin Ă  toi que tu les cueilles ! Puis, s'il advient d'un peu triompher, par hasard, Ne pas ĂȘtre obligĂ© d'en rien rendre Ă  CĂ©sar, Vis-Ă -vis de soi-mĂȘme en garder le mĂ©rite, Bref, dĂ©daignant d'ĂȘtre le lierre parasite, Lors mĂȘme qu'on n'est pas le chĂȘne ou le tilleul, Ne pas monter bien haut, peut-ĂȘtre, mais tout seul !
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Edmond Rostand (Cyrano de Bergerac)
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Je cherchais une Ăąme qui et me ressemblĂąt, et je ne pouvais pas la trouver. Je fouillais tous les recoins de la terre; ma persĂ©vĂ©rance Ă©tait inutile. Cependant, je ne pouvais pas rester seul. Il fallait quelqu’un qui approuvĂąt mon caractĂšre; il fallait quelqu’un qui eĂ»t les mĂȘmes idĂ©es que moi. C’était le matin; le soleil se leva Ă  l’horizon, dans toute sa magnificence, et voilĂ  qu’à mes yeux se lĂšve aussi un jeune homme, dont la prĂ©sence engendrait les fleurs sur son passage. Il s’approcha de moi, et, me tendant la main: "Je suis venu vers toi, toi, qui me cherches. BĂ©nissons ce jour heureux." Mais, moi: "Va-t’en; je ne t’ai pas appelĂ©: je n’ai pas besoin de ton amitiĂ©." C’était le soir; la nuit commençait Ă  Ă©tendre la noirceur de son voile sur la nature. Une belle femme, que je ne faisais que distinguer, Ă©tendait aussi sur moi son influence enchanteresse, et me regardait avec compassion; cependant, elle n’osait me parler. Je dis: "Approche-toi de moi, afin que je distingue nettement les traits de ton visage; car, la lumiĂšre des Ă©toiles n’est pas assez forte, pour les Ă©clairer Ă  cette distance." Alors, avec une dĂ©marche modeste, et les yeux baissĂ©s, elle foula l’herbe du gazon, en se dirigeant de mon cĂŽtĂ©. DĂšs que je la vis: "Je vois que la bontĂ© et la justice ont fait rĂ©sidence dans ton coeur: nous ne pourrions pas vivre ensemble. Maintenant, tu admires ma beautĂ©, qui a bouleversĂ© plus d’une; mais, tĂŽt ou tard, tu te repentirais de m’avoir consacrĂ© ton amour; car, tu ne connais pas mon Ăąme. Non que je te sois jamais infidĂšle: celle qui se livre Ă  moi avec tant d’abandon et de confiance, avec autant de confiance et d’abandon, je me livre Ă  elle; mais, mets-le dans ta tĂȘte, pour ne jamais l’oublier: les loups et les agneaux ne se regardent pas avec des yeux doux." Que me fallait-il donc, Ă  moi, qui rejetais, avec tant de dĂ©goĂ»t, ce qu’il y avait de plus beau dans l’humanitĂ©!
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Comte de Lautréamont (Les Chants de Maldoror)
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À l'Ăąge de quinze ans Annabelle faisait partie de ces trĂšs rares jeunes filles sur lesquelles tous les hommes s'arrĂȘtent, sans distinction d'Ăąge ni d'Ă©tat; de ces jeunes filles dont le simple passage, le long de la rue commerçante d'une ville d'importance moyenne, accĂ©lĂšre le rythme cardiaque des jeunes gens et des hommes d'Ăąge mĂ»r, fait pousser des grognements de regret aux vieillards. Elle prit rapidement conscience de ce silence qui accompagnait chacune de ses apparitions, dans un cafĂ© ou dans une salle de cours, mais il lui fallut des annĂ©es pour en comprendre pleinement la raison. Au CEG de CrĂ©cy-en-Brie, il Ă©tait communĂ©ment admis qu'elle «était avec» Michel; mais mĂȘme sans cela, Ă  vrai dire, aucun garçon n'aurait osĂ© tenter quoi que ce soit avec elle. Tel est l'un des principaux inconvĂ©nients de l'extrĂȘme beautĂ© chez les jeunes filles: seuls les dragueurs expĂ©rimentĂ©s, cyniques et sans scrupule se sentent Ă  la hauteur; ce sont donc en gĂ©nĂ©ral les ĂȘtres les plus vils qui obtiennent le trĂ©sor de leur virginitĂ©, et ceci constitue pour elles le premier stade d'une irrĂ©mĂ©diable dĂ©chĂ©ance.
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Michel Houellebecq (The Elementary Particles)
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Je le vis, je rougis, je pĂąlis Ă  sa vue ; Un trouble s’éleva dans mon Ăąme Ă©perdue ; Mes yeux ne voyaient plus, je ne pouvais parler; Je sentis tout mon corps et transir et brĂ»ler : Je reconnus VĂ©nus et ses feux redoutables, D’un sang qu’elle poursuit tourments inĂ©vitables ! Par des vƓux assidus je crus les dĂ©tourner : Je lui bĂątis un temple, et pris soin de l’orner ; De victimes moi-mĂȘme Ă  toute heure entourĂ©e, Je cherchais dans leurs flancs ma raison Ă©garĂ©e : D’un incurable amour remĂšdes impuissants ! En vain sur les autels ma main brĂ»lait l’encens ! Quand ma bouche implorait le nom de la dĂ©esse, J’adorais Hippolyte ; et, le voyant sans cesse, MĂȘme au pied des autels que je faisais fumer, J’offrais tout Ă  ce dieu que je n’osais nommer. Je l’évitais partout. Ô comble de misĂšre ! Mes yeux le retrouvaient dans les traits de son pĂšre. Contre moi-mĂȘme enfin j’osai me rĂ©volter : J’excitai mon courage Ă  le persĂ©cuter. Pour bannir l’ennemi dont j’étais idolĂątre, J’affectai les chagrins d’une injuste marĂątre ; Je pressai son exil ; et mes cris Ă©ternels L’arrachĂšrent du sein et des bras paternels. Je respirais, ƒNONE ; et, depuis son absence, Mes jours moins agitĂ©s coulaient dans l’innocence : Soumise Ă  mon Ă©poux, et cachant mes ennuis, De son fatal hymen je cultivais les fruits. Vaines prĂ©cautions ! Cruelle destinĂ©e ! Par mon Ă©poux lui-mĂȘme Ă  TrĂ©zĂšne amenĂ©e, J’ai revu l’ennemi que j’avais Ă©loignĂ© : Ma blessure trop vive aussitĂŽt a saignĂ©. Ce n’est plus une ardeur dans mes veines cachĂ©e : C’est VĂ©nus tout entiĂšre Ă  sa proie attachĂ©e. J’ai conçu pour mon crime une juste terreur ; J’ai pris la vie en haine, et ma flamme en horreur ; Je voulais en mourant prendre soin de ma gloire, Et dĂ©rober au jour une flamme si noire : Je n’ai pu soutenir tes larmes, tes combats : Je t’ai tout avouĂ© ; je ne m’en repens pas. Pourvu que, de ma mort respectant les approches, Tu ne m’affliges plus par d’injustes reproches, Et que tes vains secours cessent de rappeler Un reste de chaleur tout prĂȘt Ă  s’exhaler.
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Jean Racine (PhĂšdre)
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Il y a ceux que le malheur effondre. Il y a ceux qui en deviennent tout rĂȘveurs. Il y a ceux qui parlent de tout et de rien au bord de la tombe, et ça continue dans la voiture, de tout et de rien, pas mĂȘme du mort, de petits propos domestiques, il y a ceux qui se suicideront aprĂšs et ça ne se voit pas sur leur visage, il y a ceux qui pleurent beaucoup et cicatrisent vite, ceux qui se noyent dans les larmes qu'ils versent, il y a ceux qui sont contents, dĂ©barrassĂ©s de quelqu'un, il y a ceux qui ne peuvent plus voir le mort, ils essayent mais ils ne peuvent plus, le mort a emportĂ© son image, il y a ceux qui voient le mort partout, ils voudraient l'effacer, ils vendent ses nippes, brĂ»lent ses photos, dĂ©mĂ©nagent, changent de continent, rebelotent avec un vivant, mais rien Ă  faire, le mort est toujours lĂ , dans le rĂ©troviseur, il y a ceux qui pique-niquent au cimetiĂšre et ceux qui le contournent parce qu'ils ont une tombe creusĂ©e dans la tĂȘte, il y a ceux qui ne mangent plus, il y a ceux qui boivent, il y a ceux qui se demandent si leur chagrin est authentique ou fabriquĂ©, il y a ceux qui se tuent au travail et ceux qui prennent enfin des vacances, il y a ceux qui trouvent la mort scandaleuse et ceux qui la trouvent naturelle avec un Ăąge pour, des circonstances qui font que, c'est la guerre, c'est la maladie, c'est la moto, la bagnole, l'Ă©poque, la vie, il y a ceux qui trouvent que la mort c'est la vie. Et il y a ceux qui font n'importe quoi. Qui se mettent Ă  courrir, par exemple. À courir comme s'ils ne devaient jamais plus s'arrĂȘter. C'est mon cas.
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Daniel Pennac (La fata carabina)
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Quand on s’attend au pire, le moins pire a une saveur toute particuliĂšre, que vous dĂ©gusterez avec plaisir, mĂȘme si ce n’est pas le meilleur. *** Ce n'est pas la vie qui est belle, c'est nous qui la voyons belle ou moins belle. Ne cherchez pas Ă  atteindre un bonheur parfait, mais contentez vous des petites choses de la vie, qui, mises bout Ă  bout, permettent de tenir la distance
 Les tout petit riens du quotidien, dont on ne se rend mĂȘme plus compte mais qui font que, selon la façon dont on les vit, le moment peut ĂȘtre plaisant et donne envie de sourire. Nous avons tous nos petits riens Ă  nous. Il faut juste en prendre conscience. *** Le silence a cette vertu de laisser parler le regard, miroir de l’ñme. On entend mieux les profondeurs quand on se tait. *** Au temps des sorciĂšres, les larmes d’homme devaient ĂȘtre trĂšs recherchĂ©es. C’est rare comme la bave de crapaud. Ce qu’elles pouvaient en faire, ça, je ne sais pas. Une potion pour rendre plus gentil ? Plus humain ? Moins avare en Ă©motion ? Ou moins poilu ? *** Quand un silence s’installe, on dit qu’un ange passe
 *** Vide. Je me sens vide et Ă©teinte. J’ai l’impression d’ĂȘtre un peu morte, moi aussi. D’ĂȘtre un champ de bataille. Tout a brĂ»lĂ©, le sol est irrĂ©gulier, avec des trous bĂ©ants, des ruines Ă  perte de vue. Le silence aprĂšs l’horreur. Mais pas le calme aprĂšs la tempĂȘte, quand on se sent apaisĂ©. Moi, j’ai l’impression d’avoir sautĂ© sur une mine, d’avoir explosĂ© en mille morceaux, et de ne mĂȘme pas savoir comment je vais faire pour les rassembler, tous ses morceaux, ni si je les retrouverai tous. *** Accordez-vous le droit de vivre votre chagrin. Il y a un temps pour tout. *** Ce n’est pas d’intuition dont est dotĂ© Romain, mais d’attention. *** ÒȘa fait toujours plaisir un cadeau, surtout de la part des gens qu’on aime.
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AgnĂšs Ledig (Juste avant le bonheur)
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Si il y avait bien une chose que l'Occupation nous avait apprise, c'Ă©tait Ă  nous taire. A ne jamais montrer ce que nous pensions du IIIĂšme Reich et de cette guerre. Nous n'Ă©tions que des dĂ©tenus dans nos propres maisons, dans notre pays. Plus libres d'avoir une opinion. Parce que mĂȘme nos pensĂ©es pouvaient nous enchaĂźner. Ce soir, je l'avais oubliĂ©. Pourtant il ne m'arrĂȘta pas. Il ne me demanda pas de le suivre pour un petit interrogatoire. AprĂšs tout, il n'y avait que les rĂ©sistants pour tenir un discours si tranchĂ©, non? Il n'y avait qu'eux pour oser dire de telles choses devant un caporal de la Wehrmacht. Alors pourquoi me tendit-il simplement sa fourche? Puisque la mienne Ă©tait inutilisable... J'hĂ©sitai Ă  la prendre. Quand je le fis, il refusa de la lĂącher. Nous restĂąmes lĂ , une seconde. Nos mains se frĂŽlant sur le manche en bois et nos regards accrochĂ©s. - Je ne suis pas innocent c'est vrai, m'avoua-t-il. Je ne le serai jamais plus et je devrai vivre avec toutes mes fautes. J'ai tuĂ©, je tuerai sans doute encore. J'ai blessĂ© et je blesserai encore. J'ai menti et je mentirai encore. Non, c'est vrai, il n'y a plus rien d'innocent en moi. Mais je l'ai Ă©tĂ©. Au dĂ©but. Avant la guerre. Je l'Ă©tais vraiment, vous savez. Innocent. Sa voix n'Ă©tait qu'un murmure. - Pourquoi me dites-vous ça? - Pour que vous le sachiez. - Mais pourquoi? demandai-je encore. Il recula d'un pas. - Bonne soirĂ©e, monsieur Lambert, dit-il sans me rĂ©pondre. Il quitta les Ă©curies sans un bruit. Aussi discrĂštement qu'il Ă©tait arrivĂ©.
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Lily Haime (À l'ombre de nos secrets)
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PrĂ©face J'aime l'idĂ©e d'un savoir transmis de maĂźtre Ă  Ă©lĂšve. J'aime l'idĂ©e qu'en marge des "maĂźtres institutionnels" que sont parents et enseignants, d'autres maĂźtres soient lĂ  pour dĂ©fricher les chemins de la vie et aider Ă  y avancer. Un professeur d'aĂŻkido cĂŽtoyĂ© sur un tatami, un philosophe rencontrĂ© dans un essai ou sur les bancs d'un amphi-thĂ©Ăątre, un menuisier aux mains d'or prĂȘt Ă  offrir son expĂ©rience... J'aime l'idĂ©e d'un maĂźtre considĂ©rant comme une chance et un honneur d'avoir un Ă©lĂšve Ă  faire grandir. Une chance et un honneur d'assister aux progrĂšs de cet Ă©lĂšve. Une chance et un honneur de participer Ă  son envol en lui offrant des ailes. Des ailes qui porteront l'Ă©lĂšve bien plus haut que le maĂźtre n'ira jamais. J'aime cette idĂ©e, j'y vois une des clefs d'un Ă©quilibre fondĂ© sur la transmission, le respect et l'Ă©volution. Je l'aime et j'en ai fait un des axes du "Pacte des MarchOmbres". Jilano, qui a Ă©tĂ© guidĂ© par EsĂźl, guide Ellana qui, elle-mĂȘme, guidera Salim... Transmission. Ellana, personnage ĂŽ combien essentiel pour moi (et pour beaucoup de mes lecteurs), dans sa complexitĂ©, sa richesse, sa volontĂ©, ne serait pas ce qu elle est si son chemin n avait pas croisĂ© celui de Jilano. Jilano qui a su dĂ©velopper les qualitĂ©s qu'il dĂ©celait en elle. Jilano qui l'a poussĂ©e, ciselĂ©e, enrichie, libĂ©rĂ©e, sans chercher une seule fois Ă  la modeler, la transformer, la contraindre. Respect. q Jilano, maĂźtre marchombre accompli. MaĂźtre accompli et marchombre accompli. Il sait ce qu'il doit Ă  EsĂźl qui l'a formĂ©. Il sait que sans elle, il ne serait jamais devenu l'homme qu'il est. L'homme accompli. Elle l'a poussĂ©, ciselĂ©, enrichi, libĂ©rĂ©, sans chercher une seule fois Ă  le modeler, le transformer, le contraindre. Respect. Évolution. EsĂźl, uniquement prĂ©sente dans les souvenirs de Jilano, ne fait qu'effleurer la trame du Pacte des Marchombres. Nul doute pourtant qu'elle soit parvenue Ă  faire dĂ©couvrir la voie Ă  Jilano et Ă  lui offrir un Ă©lan nĂ©cessaire pour qu'il y progresse plus loin qu'elle. Jilano agit de mĂȘme avec Ellana. Il sait, dĂšs le dĂ©part, qu'elle le distancera et attend ce moment avec joie et sĂ©rĂ©nitĂ©. Ellana est en train de libĂ©rer les ailes de Salim. Jusqu'oĂč s envolera-t-il grĂące Ă  elle ? J'aime cette idĂ©e, dans les romans et dans la vie, d’un maĂźtre transmettant son savoir Ă  un Ă©lĂšve afin qu a terme il le dĂ©passe. J'aime la gĂ©nĂ©rositĂ© qu'elle induit, la confiance qu'elle implique en la capacitĂ© des hommes Ă  s'amĂ©liorer. J'aime cette idĂ©e, mĂȘme si croiser un maĂźtre est une chance rare et mĂȘme s'il existe bien d'autres maniĂšres de prendre son envol. Lire. Écrire. S'envoler. Pierre Bottero
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Pierre Bottero (Ellana, l'Envol (Le Pacte des MarchOmbres, #2))
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Je me mis dĂšs lors Ă  lire avec aviditĂ© et bientĂŽt la lecture fut ma passion. Tous mes nouveaux besoins, toutes mes aspirations rĂ©centes, tous les Ă©lans encore vagues de mon adolescence qui s’élevaient dans mon Ăąme d’une façon si troublante et qui Ă©taient provoquĂ©s par mon dĂ©veloppement si prĂ©coce, tout cela, soudainement, se prĂ©cipita dans une direction, parut se satisfaire complĂštement de ce nouvel aliment et trouver lĂ  son cours rĂ©gulier. BientĂŽt mon cƓur et ma tĂȘte se trouvĂšrent si charmĂ©s, bientĂŽt ma fantaisie se dĂ©veloppa si largement, que j’avais l’air d’oublier tout ce qui m’avait entourĂ©e jusqu’alors. Il semblait que le sort lui mĂȘme m’arrĂȘtĂąt sur le seuil de la nouvelle vie dans laquelle je me jetais, Ă  laquelle je pensais jour et nuit, et, avant de m’abandonner sur la route immense, me faisait gravir une hauteur d’oĂč je pouvais contempler l’avenir dans un merveilleux panorama, sous une perspective brillante, ensorcelante. Je me voyais destinĂ©e Ă  vivre tout cet avenir en l’apprenant d’abord par les livres ; de vivre dans les rĂȘves, les espoirs, la douce Ă©motion de mon esprit juvĂ©nile. Je commençai mes lectures sans aucun choix, par le premier livre qui me tomba sous la main. Mais, le destin veillait sur moi. Ce que j’avais appris et vĂ©cu jusqu’à ce jour Ă©tait si noble, si austĂšre, qu’une page impure ou mauvaise n’eĂ»t pu dĂ©sormais me sĂ©duire. Mon instinct d’enfant, ma prĂ©cocitĂ©, tout mon passĂ© veillaient sur moi ; et maintenant ma conscience m’éclairait toute ma vie passĂ©e. En effet, presque chacune des pages que je lisais m’était dĂ©jĂ  connue, semblait dĂ©jĂ  vĂ©cue, comme si toutes ces passions, toute cette vie qui se dressaient devant moi sous des formes inattendues, en des tableaux merveilleux, je les avais dĂ©jĂ  Ă©prouvĂ©es. Et comment pouvais-je ne pas ĂȘtre entraĂźnĂ©e jusqu’à l’oubli du prĂ©sent, jusqu’à l’oubli de la rĂ©alitĂ©, quand, devant moi dans chaque livre que je lisais, se dressaient les lois d’une mĂȘme destinĂ©e, le mĂȘme esprit d’aventure qui rĂšgnent sur la vie de l’homme, mais qui dĂ©coulent de la loi fondamentale de la vie humaine et sont la condition de son salut et de son bonheur ! C’est cette loi que je soupçonnais, que je tĂąchais de deviner par toutes mes forces, par tous mes instincts, puis presque par un sentiment de sauvegarde. On avait l’air de me prĂ©venir, comme s’il y avait en mon Ăąme quelque chose de prophĂ©tique, et chaque jour l’espoir grandissait, tandis qu’en mĂȘme temps croissait de plus en plus mon dĂ©sir de me jeter dans cet avenir, dans cette vie. Mais, comme je l’ai dĂ©jĂ  dit, ma fantaisie l’emportait sur mon impatience, et, en vĂ©ritĂ©, je n’étais trĂšs hardie qu’en rĂȘve ; dans la rĂ©alitĂ©, je demeurais instinctivement timide devant l’avenir.
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Fyodor Dostoevsky (Netochka Nezvanova)
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Eh bien, c'est l'histoire d'un petit ourson qui s'appelle
 Arthur. Et y'a une fĂ©e, un jour, qui vient voir le petit ourson et qui lui dit : Arthur tu vas partir Ă  la recherche du Vase Magique. Et elle lui donne une Ă©pĂ©e hmm
 magique (ouais, parce qu'y a plein de trucs magiques dans l'histoire, bref) alors le petit ourson il se dit : "Heu, chercher le Vase Magique ça doit ĂȘtre drĂŽlement difficile, alors il faut que je parte dans la forĂȘt pour trouver des amis pour m'aider." Alors il va voir son ami Lancelot
 le cerf (parce que le cerf c'est majestueux comme ça), heu, Bohort le faisan et puis LĂ©odagan
 heu
 l'ours, ouais c'est un ours aussi, c'est pas tout Ă  fait le mĂȘme ours mais bon. Donc LĂ©odagan qui est le pĂšre de la femme du petit ourson, qui s'appelle GueniĂšvre la truite
 non, non, parce que c'est la fille de
 non c'est un ours aussi puisque c'est la fille de l'autre ours, non parce qu'aprĂšs ça fait des machins mixtes, en fait un ours et une truite
 non en fait ça va pas. Bref, sinon y'a Gauvain le neveu du petit ourson qui est le fils de sa sƓur Anna, qui est restĂ©e Ă  Tintagel avec sa mĂšre Igerne la
 bah non, ouais du coup je suis obligĂ© de foutre des ours de partout sinon on pige plus rien dans la famille
 Donc c'est des ours, en gros, enfin bref
 Ils sont tous lĂ  et donc Petit Ourson il part avec sa troupe Ă  la recherche du Vase Magique. Mais il le trouve pas, il le trouve pas parce qu'en fait pour la plupart d'entre eux c'est
 c'est des nazes : ils sont hyper mous, ils sont bĂȘtes, en plus y'en a qu'ont la trouille. Donc il dĂ©cide de les faire bruler dans une grange pour s'en dĂ©barrasser
 Donc la fĂ©e revient pour lui dire : "Attention petit ourson, il faut ĂȘtre gentil avec ses amis de la forĂȘt" quand mĂȘme c'est vrai, et du coup Petit Ourson il lui met un taquet dans la tĂȘte Ă  la fĂ©e, comme ça : "BAH !". Alors la fĂ©e elle est comme ça et elle s'en va
 et voilĂ  et en fait il trouve pas le vase. En fait il est
 il trouve pas
 et Petit Ourson il fait de la dĂ©pression et tous les jours il se demande s'il va se tuer ou
 pas

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Alexandre Astier (Kaamelott, livre 3, premiùre partie : Épisodes 1 à 50)
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Tu viens d'incendier la BibliothĂšque ? - Oui. J'ai mis le feu lĂ . - Mais c'est un crime inouĂŻ ! Crime commis par toi contre toi-mĂȘme, infĂąme ! Mais tu viens de tuer le rayon de ton Ăąme ! C'est ton propre flambeau que tu viens de souffler ! Ce que ta rage impie et folle ose brĂ»ler, C'est ton bien, ton trĂ©sor, ta dot, ton hĂ©ritage Le livre, hostile au maĂźtre, est Ă  ton avantage. Le livre a toujours pris fait et cause pour toi. Une bibliothĂšque est un acte de foi Des gĂ©nĂ©rations tĂ©nĂ©breuses encore Qui rendent dans la nuit tĂ©moignage Ă  l'aurore. Quoi! dans ce vĂ©nĂ©rable amas des vĂ©ritĂ©s, Dans ces chefs-d'oeuvre pleins de foudre et de clartĂ©s, Dans ce tombeau des temps devenu rĂ©pertoire, Dans les siĂšcles, dans l'homme antique, dans l'histoire, Dans le passĂ©, leçon qu'Ă©pelle l'avenir, Dans ce qui commença pour ne jamais finir, Dans les poĂštes! quoi, dans ce gouffre des bibles, Dans le divin monceau des Eschyles terribles, Des HomĂšres, des jobs, debout sur l'horizon, Dans MoliĂšre, Voltaire et Kant, dans la raison, Tu jettes, misĂ©rable, une torche enflammĂ©e ! De tout l'esprit humain tu fais de la fumĂ©e ! As-tu donc oubliĂ© que ton libĂ©rateur, C'est le livre ? Le livre est lĂ  sur la hauteur; Il luit; parce qu'il brille et qu'il les illumine, Il dĂ©truit l'Ă©chafaud, la guerre, la famine Il parle, plus d'esclave et plus de paria. Ouvre un livre. Platon, Milton, Beccaria. Lis ces prophĂštes, Dante, ou Shakespeare, ou Corneille L'Ăąme immense qu'ils ont en eux, en toi s'Ă©veille ; Ébloui, tu te sens le mĂȘme homme qu'eux tous ; Tu deviens en lisant grave, pensif et doux ; Tu sens dans ton esprit tous ces grands hommes croĂźtre, Ils t'enseignent ainsi que l'aube Ă©claire un cloĂźtre À mesure qu'il plonge en ton coeur plus avant, Leur chaud rayon t'apaise et te fait plus vivant ; Ton Ăąme interrogĂ©e est prĂȘte Ă  leur rĂ©pondre ; Tu te reconnais bon, puis meilleur; tu sens fondre, Comme la neige au feu, ton orgueil, tes fureurs, Le mal, les prĂ©jugĂ©s, les rois, les empereurs ! Car la science en l'homme arrive la premiĂšre. Puis vient la libertĂ©. Toute cette lumiĂšre, C'est Ă  toi comprends donc, et c'est toi qui l'Ă©teins ! Les buts rĂȘvĂ©s par toi sont par le livre atteints. Le livre en ta pensĂ©e entre, il dĂ©fait en elle Les liens que l'erreur Ă  la vĂ©ritĂ© mĂȘle, Car toute conscience est un noeud gordien. Il est ton mĂ©decin, ton guide, ton gardien. Ta haine, il la guĂ©rit ; ta dĂ©mence, il te l'ĂŽte. VoilĂ  ce que tu perds, hĂ©las, et par ta faute ! Le livre est ta richesse Ă  toi ! c'est le savoir, Le droit, la vĂ©ritĂ©, la vertu, le devoir, Le progrĂšs, la raison dissipant tout dĂ©lire. Et tu dĂ©truis cela, toi ! - Je ne sais pas lire.
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Victor Hugo
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Patrice a vingt-quatre ans et, la premiĂšre fois que je l’ai vu, il Ă©tait dans son fauteuil inclinĂ© trĂšs en arriĂšre. Il a eu un accident vasculaire cĂ©rĂ©bral. Physiquement, il est incapable du moindre mouvement, des pieds jusqu’à la racine des cheveux. Comme on le dit souvent d’une maniĂšre trĂšs laide, il a l’aspect d’un lĂ©gume : bouche de travers, regard fixe. Tu peux lui parler, le toucher, il reste immobile, sans rĂ©action, comme s’il Ă©tait complĂštement coupĂ© du monde. On appelle ça le locked in syndrome.Quand tu le vois comme ça, tu ne peux qu’imaginer que l’ensemble de son cerveau est dans le mĂȘme Ă©tat. Pourtant il entend, voit et comprend parfaitement tout ce qui se passe autour de lui. On le sait, car il est capable de communiquer Ă  l’aide du seul muscle qui fonctionne encore chez lui : le muscle de la paupiĂšre. Il peut cligner de l’Ɠil. Pour l’aider Ă  s’exprimer, son interlocuteur lui propose oralement des lettres de l’alphabet et, quand la bonne lettre est prononcĂ©e, Patrice cligne de l’Ɠil.  Lorsque j’étais en rĂ©animation, que j’étais complĂštement paralysĂ© et que j’avais des tuyaux plein la bouche, je procĂ©dais de la mĂȘme maniĂšre avec mes proches pour pouvoir communiquer. Nous n’étions pas trĂšs au point et il nous fallait parfois un bon quart d’heure pour dicter trois pauvres mots. Au fil des mois, Patrice et son entourage ont perfectionnĂ© la technique. Une fois, il m’est arrivĂ© d’assister Ă  une discussion entre Patrice et sa mĂšre. C’est trĂšs impressionnant.La mĂšre demande d’abord : « Consonne ? » Patrice acquiesce d’un clignement de paupiĂšre. Elle lui propose diffĂ©rentes consonnes, pas forcĂ©ment dans l’ordre alphabĂ©tique, mais dans l’ordre des consonnes les plus utilisĂ©es. DĂšs qu’elle cite la lettre que veut Patrice, il cligne de l’Ɠil. La mĂšre poursuit avec une voyelle et ainsi de suite. Souvent, au bout de deux ou trois lettres trouvĂ©es, elle anticipe le mot pour gagner du temps. Elle se trompe rarement. Cinq ou six mots sont ainsi trouvĂ©s chaque minute.  C’est avec cette technique que Patrice a Ă©crit un texte, une sorte de longue lettre Ă  tous ceux qui sont amenĂ©s Ă  le croiser. J’ai eu la chance de lire ce texte oĂč il raconte ce qui lui est arrivĂ© et comment il se sent. À cette lecture, j’ai pris une Ă©norme gifle. C’est un texte brillant, Ă©crit dans un français subtil, lĂ©ger malgrĂ© la tragĂ©die du sujet, rempli d’humour et d’autodĂ©rision par rapport Ă  l’état de son auteur. Il explique qu’il y a de la vie autour de lui, mais qu’il y en a aussi en lui. C’est juste la jonction entre les deux mondes qui est un peu compliquĂ©e.Jamais je n’aurais imaginĂ© que ce texte si puissant ait Ă©tĂ© Ă©crit par ce garçon immobile, au regard entiĂšrement vide.  Avec l’expĂ©rience acquise ces derniers mois, je pensais ĂȘtre capable de diagnostiquer l’état des uns et des autres seulement en les croisant ; j’ai reçu une belle leçon grĂące Ă  Patrice.Une leçon de courage d’abord, Ă©tant donnĂ© la vitalitĂ© des propos que j’ai lus dans sa lettre, et, aussi, une leçon sur mes a priori. Plus jamais dorĂ©navant je ne jugerai une personne handicapĂ©e Ă  la vue seule de son physique. C’est jamais inintĂ©ressant de prendre une bonne claque sur ses propres idĂ©es reçues .
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Grand corps malade (Patients)