Tout De Suite Quotes

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Je suis comme ça. Ou j'oublie tout de suite ou je n'oublie jamais." Samuel BECKETT, En attendant Godot I'm like that. Either I forget right away or I never forget.
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Samuel Beckett (Waiting for Godot)
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Vous me dĂ©goĂ»tez tous avec votre bonheur ! Avec votre vie qu’il faut aimer coĂ»te que coĂ»te
 Moi, je veux tout, tout de suite, et que ce soit entier, ou alors je refuse! Je ne veux pas ĂȘtre modeste , moi, et de me contenter d’un petit morceau, si j’ai Ă©tĂ© bien sage.
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Jean Anouilh (Antigone)
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Il y a dans la lecture quelque chose qui relĂšve de l'irrationnel. Avant d'avoir lu, on devine tout de suite si on va aimer ou pas. On hume, on flaire le livre, on se demande si ça vaut la peine de passer du temps en sa compagnie. C'est l'alchimie invisible des signes tracĂ©s sur une feuille qui s'impriment dans notre cerveau. Un livre, c'est un ĂȘtre vivant.
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Jean-Michel Guenassia (Le Club des incorrigibles optimistes)
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There should be a phone service that turns off your phone between midnight and six A.M. every night. And if you want to make a call, you have to pick up the phone and talk to an operator: Put me through to AAA. My car battery's dead. Yes, ma'am. Put me through to Pink Dot. I need vanilla HĂ€agen-Dazs toute de suite! Yes, ma'am. Put me through to my ex-boyfriend... I'm sorry, ma'am, the operator would say. That would be a bad idea. Now you go to bed before you do anything stupid.
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Kim Gruenenfelder (A Total Waste of Makeup (Charlize Edwards, #1))
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Elle voulait que sa vie prit forme maintenant, tout de suite - et cette dĂ©cision devait ĂȘtre forgĂ©e par une force quelconque - d'amour, d'argent, d'un ordre pratique incontestable - qui devait ĂȘtre la, sous sa main.
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Boris Vian (L'écume des jours)
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Je suis comme ça. Ou j'oublie tout de suite ou je n'oublie jamais
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Samuel Beckett (Waiting for Godot)
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L'amour comme moi part en voyage Un jour je le rencontrerai A peine j'aurai vu son visage Tout de suite je le reconnaĂźtrai...
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Édith Piaf
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Dans le fond des forĂȘts votre image me suit. La lumiĂšre du jour, les ombres de la nuit, Tout retrace Ă  mes yeux les charmes que j'Ă©vite. Tout vous livre Ă  l'envi le rebelle Hippolyte.
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Jean Racine (PhĂšdre)
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On se prépare à la jouissance du siÚcle, et, le moment venu, elle a un goût de Fernet Branca. Sur ce point comme sur quelques autres, Julia a raison : ne jamais investir dans la promesse du plaisir. Tout de suite ou pas du tout.
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Daniel Pennac (Au bonheur des ogres)
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Ne pas gaspiller dans l'unique souci de manger tout de suite notre simple force d'avoir faim.
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Alain Damasio (La Horde du Contrevent)
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On s'ennuie de tout, mon ange, c'est une loi de la nature; ce n'est pas ma faute. Si donc, je m'ennuie aujourd'hui d'une aventure qui m'a occupĂ© entiĂšrement depuis quatre mortels mois, ce n'est pas ma faute. Si, par exemple, j'ai eu juste autant d'amour que toi de vertu, et c'est surement beaucoup dire, il n'est pas Ă©tonnant que l'un ait fini en mĂȘme temps que l'autre. Ce n'est pas ma faute. Il suit de lĂ , que depuis quelque temps je t'ai trompĂ©e: mais aussi ton impitoyable tendresse m'y forçait en quelque sorte! Ce n'est pas ma faute. Aujourd'hui, une femme que j'aime Ă©perdument exige que je te sacrifie. Ce n'est pas ma faute. Je sens bien que voilĂ  une belle occasion de crier au parjure: mais si la Nature n'a accordĂ© aux hommes que la constance, tandis qu'elle donnait aux femmes l'obstination, ce n'est pas ma faute. Crois-moi, choisis un autre amant, comme j'ai fait une maĂźtresse. Ce conseil est bon, trĂšs bon; si tu le trouve mauvais, ce n'est pas ma faute. Adieu, mon ange, je t'ai prise avec plaisir, je te quitte sans regrets: je te reviendrai peut-ĂȘtre. Ainsi va le monde. Ce n'est pas ma faute.
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Pierre Choderlos de Laclos (Les liaisons dangereuses)
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Quand je lis quelque chose je suis frappĂ©e tout de suite par peut-ĂȘtre une certaine vĂ©ritĂ© dedans n’est ce pas ? Quelque chose de sincĂšre, et c’est pas nĂ©cessaire que c’est tragique ou un drame ca peut ĂȘtre aussi une comĂ©die mais il faut avoir quelque chose de vraie.
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Ingrid Bergman
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Des fois, je donnerais ma main Ă  couper pour devenir tout de suite un homme et d'autres fois il me semble que je ne voudrais pas survivre Ă  ma jeunesse.
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Jean-Paul Sartre (Les Mains sales)
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À 20 ans, je croyais tout savoir de la vie. À 30 ans, j'ai appris que je ne savais rien. Je venais de passer dix annĂ©es Ă  apprendre tout ce qu'il me faudrait, par la suite, dĂ©sapprendre.
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Frédéric Beigbeder (L'amour dure trois ans - Le roman suivi du scénario du film)
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Si elle avait vécu, est-ce que j'aurais pu prendre le téléphone, là, tout de suite, l'appeler, lui dire je meurs de douleur, maman, je voudrais pleurer mais rien ne sort, rien ne sort, viens m'aider.
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Michel Tremblay
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Monsieur Haneda était le supérieur de monsieur Omochi, qui était le supérieur de monsieur Saito, qui était le supérieur de mademoiselle Mori qui était ma supérieure. Et moi, je n'étais la supérieure de personne. On pourrait dire les choses autrement. J'étais aux ordres de mademoiselle Mori, qui était aux ordres de monsieur Saito, et ainsi de suite, avec cette précision que les ordres pouvaient, en aval, sauter les échelons hiérarchiques. Donc, dans la compagnie Yumimoto, j'étais aux ordres de tout le monde.
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Amélie Nothomb
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Ainsi leur rencontre avait eu l'importance d'une aventure. Ils s'étaient, tout de suite, accrochés par des fibres secrÚtes. D'ailleurs, comment expliquer les sympathies? Pourquoi telle particularité, telle imperfection indifférente ou odieuse dans celui-ci enchante-t-elle dans celui-là? Ce qu'on appelle le coup de foudre est vrai pour toutes les passions. Avant la fin de la semaine, ils se tutoyÚrent
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Gustave Flaubert (Bouvard and Pécuchet)
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Et voilĂ . Maintenant le ressort est bandĂ©. Cela n'a plus qu'Ă  se dĂ©rouler tout seul. C'est cela qui est commode dans la tragĂ©die. On donne le petit coup de pouce pour que cela dĂ©marre, rien, un regard pendant une seconde Ă  une fille qui passe et lĂšve les bras dans la rue, une envie d'honneur un beau matin, au rĂ©veil, comme de quelque chose qui se mange, une question de trop qu'on se pose un soir
 C'est tout. AprĂšs, on n'a plus qu'Ă  laisser faire. On est tranquille. Cela roule tout seul. C'est minutieux, bien huilĂ© depuis toujours. La mort, la trahison, le dĂ©sespoir sont lĂ , tout prĂȘts, et les Ă©clats, et les orages, et les silences, tous les silences : le silence quand le bras du bourreau se lĂšve Ă  la fin, le silence au commencement quand les deux amants sont nus l'un en face de l'autre pour la premiĂšre fois, sans oser bouger tout de suite, dans la chambre sombre, le silence quand les cris de la foule Ă©clatent autour du vainqueur - et on dirait un film dont le son s'est enrayĂ©, toutes ces bouches ouvertes dont il ne sort rien, toute cette clameur qui n'est qu'une image, et le vainqueur, dĂ©jĂ  vaincu, seul au milieu de son silence

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Jean Anouilh
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L'homme ne peut jamais savoir ce qu'il faut vouloir car il n'a qu'une vie et il ne peut ni la comparer Ă  des vies antĂ©rieures ni la rectifier dans des vies ultĂ©rieures. (...) Il n'existe aucun moyen de vĂ©rifier quelle dĂ©cision est la bonne car il n'existe aucune comparaison. Tout est vĂ©cu tout de suite pour la premiĂšre fois et sans prĂ©paration. Comme si un acteur entrait en scĂšne sans avoir jamais rĂ©pĂ©tĂ©. Mais que peut valoir la vie, si la premiĂšre rĂ©pĂ©tition de la vie est dĂ©jĂ  la vie mĂȘme ? C'est ce qui fait que la vie ressemble toujours Ă  une esquisse. Mais mĂȘme "esquisse" n'est pas le mot juste, car une esquisse est toujours l'Ă©bauche de quelque chose, la prĂ©paration d'un tableau, tandis que l'esquisse qu'est notre vie est une esquisse de rien, une Ă©bauche sans tableau. (partie I, ch. 3)
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Milan Kundera (The Unbearable Lightness of Being)
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Lorsque la sexualitĂ© disparaĂźt, c'est le corps de l'autre qui apparaĂźt, dans sa prĂ©sence vaguement hostile; ce sont les bruits, les mouvements, les odeurs; et la prĂ©sence mĂȘme de ce corps qu'on ne peut plus toucher, ni sanctifier par le contact, devient peu Ă  peu une gĂȘne; tout cela malheureusement, est connu. La disparition de la tendresse suit toujours de prĂšs celle de l'Ă©rotisme. Il n'y a pas de relation Ă©purĂ©e, d'union supĂ©rieure des Ăąmes, ni quoi que ce soit qui puisse y ressembler, ou mĂȘme l'Ă©voquer sur un mode allusif. Quand l'amour physique disparaĂźt, tout disparaĂźt; un agacement morne, sans profondeur, vient remplir la succession des jours.
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Michel Houellebecq (The Possibility of an Island)
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  Frédéric n'aima point cette maniÚre de s'associer, tout de suite, à sa fortune. Son ami témoignait trop de joie pour eux deux, et pas assez pour lui seul.
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Gustave Flaubert (L'éducation sentimentale)
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DĂšs qu'on nous embrasse, il est bon de prĂ©voir, tout de suite, l'instant oĂč nous serons giflĂ©s.
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Jules Renard (L'Écornifleur)
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Vous voyez, c'est ça que j'adore chez ces gamins ! s'exclama Ro. Ils ne font pas de menaces en l'air
 ils passent tout de suite à l'action.
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Shannon Messenger (Nightfall (Keeper of the Lost Cities, #6))
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Toute ma vie fut la promesse de cette rencontre avec toi. [...] En vérité je t'ai reconnu tout de suite.
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Alexandre Pouchkine (EugÚne Onéguine (French Edition))
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Alors, Nana, tout de suite, entama La Faloise. Il postulait depuis longtemps l'honneur d'ĂȘtre ruinĂ© par elle, afin d'ĂȘtre parfaitement chic.
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Émile Zola (Nana)
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...Ă  propos des intellectuels justement... C'est facile de se foutre de leur gueule... Ouais, c'est vachement facile... Souvent, ils sont pas trĂšs musclĂ©s et en plus, ils n'aiment pas ça, se battre... Ça ne les excite pas plus que ça les bruits des bottes, les mĂ©dailles et les grosses limousines, alors oui, c'est pas trĂšs dur... Il suffit de leur arracher leur livre des mains, leur guitare, leur crayon ou leur appareil photo et dĂ©jĂ  ils ne sont plus bons Ă  rien, ces empotĂ©s... D'ailleurs, les dictateurs, c'est souvent la premiĂšre chose qu'ils font: casser les lunettes, brĂ»ler les livres ou interdire les concerts, ça leur coĂ»te pas cher et ça peut leur Ă©viter bien des contrariĂ©tĂ©s par la suite... Mais tu vois, si ĂȘtre intello ça veut dire aimer s'instruire, ĂȘtre curieux, attentif, admirer, s'Ă©mouvoir, essayer de comprendre comment tout ça tient debout et tenter de se coucher un peu moins con que la veille, alors oui, je le revendique totalement: non seulement je suis une intello, mais en plus je suis fiĂšre de l'ĂȘtre... Vachement fiĂšre, mĂȘme...
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Anna Gavalda
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Une poignĂ©e de main, ou une main fortement appuyĂ©e sur l’épaule de l’ami dans l’affliction, ou encore un sanglot se mĂȘlant aux siens, ce sont lĂ  des expressions de sympathie que le cƓur reconnaĂźt tout de suite.
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Bram Stoker (Dracula)
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My hope believes it is possible for all of us to become human human beings, and especially if I find myself in a place where no one is acting like one, I had better become one tout de suite. To hope is to reclaim our humanity.
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Jacqueline A. Bussie (Outlaw Christian: Finding Authentic Faith by Breaking the 'Rules')
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Oh ! S'il avait pu partir, tout de suite, n'importe oĂč, et ne jamais revenir, ne jamais Ă©crire, ne jamais laisser savoir ce qu'il Ă©tait devenu ! Mais non, il fallait rentrer, rentrer dans la maison paternelle et se coucher dans son lit
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Guy de Maupassant
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Vous me dĂ©goutez tous avec votre bonheur ! Avec votre vie qu'il faut aimer coĂ»te que coĂ»te. On dirait des chiens qui lĂšchent tout ce qu'ils trouvent. Et cette petite chance pour tous les jours, si on n'est pas trop exigeant. Moi, je veux tout, tout de suite, et que ce soit entier ou alors je refuse ! Je ne veux pas ĂȘtre modeste, moi, et me contenter d'un petit morceau si j'ai Ă©tĂ© bien sage. Je veux ĂȘtre sĂ»re de tout aujourd'hui et que cela soit aussi beau que quand j'Ă©tais petite ou mourir !
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Jean Anouilh (Antigone)
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Toute ma vie fut la promesse De cette rencontre avec toi. C’est Dieu qui t’envoie, je le sais Pour me garder jusqu’à la mort
 Tu apparaissais dans mes rĂȘves ; Sans te voir je te chĂ©rissais Ton regard me faisait languir, Ta voix rĂ©sonnait dans mon Ăąme Depuis toujours
 En vĂ©ritĂ© Je t’ai reconnu tout de suite. Ce fut pour moi un froid, un feu, Et dans mon cƓur, j’ai dit : c’est lui ! Je t’entendais dans le silence, Quand j’allais secourir les pauvres Ou quand la priĂšre apaisait L’angoisse de mon Ăąme en peine.
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Alexander Pushkin (Eugene Onegin)
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Que les huttes puissent tenir rang de palais, les habituĂ©s des suites royales ne le comprendront jamais. Ils n'ont pas connu l'onglĂ©e avant le bain moussant. Le luxe n'est pas un Ă©tat mais le passage d'une ligne, le seuil oĂč, soudain, disparaĂźt toute souffrance.
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Sylvain Tesson (Dans les forĂȘts de SibĂ©rie)
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«Mais tu ferais mieux de t’y mettre tout de suite, ma fille. On a Ă  peine le temps de faire un mouvement que le sablier est dĂ©jĂ  vide, tu sais. Crois-moi, je sais de quoi je parle. Tu auras eu de la veine si tu trouves le temps d’éternuer dans ce monde incroyable.»
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J.D. Salinger (Franny and Zooey)
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Contrairement Ă  la plupart des hommes un peu rĂ©flĂ©chis, je n'ai pas plus l'habitude du mĂ©pris de soi que de l'amour-propre ; je sens trop que chaque acte est complet, nĂ©cessaire et inĂ©vitable, bien qu'imprĂ©vu Ă  la minute qui prĂ©cĂšde, et dĂ©passĂ© Ă  la minute qui suit. Pris dans une sĂ©rie de dĂ©cisions toutes dĂ©finitives, pas plus qu'un animal, je n'avais eu le temps d'ĂȘtre un problĂšme Ă  mes propres yeux. (p. 158-159)
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Marguerite Yourcenar (Alexis ou le Traité du vain combat / Le Coup de grùce)
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Persuade-toi de ceci : j’abomine les mĂ©diocres et ne puis aimer qu’un vainqueur. Si tu veux de moi, que ce soit pour t’aider Ă  vaincre. Mais si c’est pour te faire plaindre, consoler, dorloter
, autant te le dire tout de suite : non, mon vieux Vincent, ce n’est pas moi qu’il te faut : c’est Laura.
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André Gide (The Counterfeiters)
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T. me laisse parler. À la fin, il dit  : c'est comme ça, il n'y a rien Ă  discuter (je crois mĂȘme qu'il dit  : nĂ©gocier). Si tu prĂ©fĂšres, on arrĂȘte. Si tu ne supportes plus. LĂ , maintenant, tout de suite. Je dis  : non, on n'arrĂȘte pas. La terreur de le perdre l'a emportĂ© sur toute autre considĂ©ration. La dĂ©pendance.
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Philippe Besson (« ArrĂȘte avec tes mensonges »)
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DerriĂšre mon dos, un officier de sa suite chuchota d'une voix moqueuse : "Eh bien on leur donne quand mĂȘme une douche aprĂšs tout." Il y eut deux ou trois rires Ă©touffĂ©s.
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Robert Merle (La mort est mon métier)
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Il Ă©tait arrivĂ© Ă  ce moment de la vie, variable pour tout homme, oĂč l'ĂȘtre humain s'abandonne Ă  son dĂ©mon ou Ă  son gĂ©nie, suit une loi mystĂ©rieuse qui lui ordonne de se dĂ©truire ou de se dĂ©passer.
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Marguerite Yourcenar
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Elle variait ses hallucinations Ă  son grĂ©. Elle ne se contentait pas du passĂ©; elle escomptait l'avenir! Elle changeait le prĂ©sent selon sa volontĂ©; elle mentait et se trompait elle-mĂȘme, mais comme ses mensonges Ă©taient ses propres oeuvres, elle les chĂ©rissait. Pour de brefs instants, elle Ă©tait heureuse. Il n'y avait plus Ă  son bonheur ces limites imposĂ©es par le rĂ©el. Tout Ă©tait possible, tout Ă©tait Ă  sa portĂ©e. D'abord, la guerre Ă©tait finie.
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IrÚne Némirovsky (Suite Française)
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— Écrivez tout de suite. — Tout de suite ! Tout de suite ! Comme si je n’avais pas d’affaires plus importantes Ă  rĂ©gler ! Et puis regarde, il n’y a plus d’encre lĂ -dedans dit Oblomov, tournant sa plume sĂšche dans l’encrier vide. Alors, comment veux-tu que j’écrive ? [
] Il semble bien qu’il n’y ait mĂȘme pas de papier ! se dit-il, fouillant dans le tiroir et tĂątant des objets posĂ©s sur la table. Non dĂ©cidĂ©ment, il n’y en a pas. Ah, c’est parfait, parfait !
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Ivan Goncharov
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- Bon, intervint Camille. par quoi commence-t-on ? Nous allons chez Mathieu ? Il n'y eut pas de rĂ©ponse et elle planta les mains sur ses hanches. - Je vous signale que je suis la plus jeune, les fustigea-t-elle. Vous pourriez faire un effort et ne pas me laisser prendre seule toutes les dĂ©cisions. vous ressemblez Ă  deux moutons ! - Ne t'inquiĂštes pas, Bjorn, persifla Salim. Ça la prend rĂ©guliĂšrement, mais elle fait des progrĂšs. Il n'y a pas longtemps, elle me traitait de mollusque. Me voilĂ  devenu mouton. Peut-ĂȘtre un jour aurai-je le droit d'ĂȘtre traitĂ© comme un humain ! Dis-moi ma vieille, poursuivit-il Ă  l'intention de Camille, ça changerait quoi qu'on te donne notre avis ? Tu ne tiens jamais compte de ce qu'on te propose ! Suppose que je te conseille d'attendre demain pour rendre visite Ă  ton frĂšre. Quelle serait ta rĂ©action ? - Je t'Ă©couterai jusqu'au bout, lança-t-elle d'une voix tranquille, et je te dirais que ton idĂ©e est stupide. Nous y allons tout de suite. En route ! Bjorn la regardait, sidĂ©rĂ©, et Salim hocha la tĂȘte. - Surprenante, non ?
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Pierre Bottero (L'Ăźle du destin (La QuĂȘte d'Ewilan, #3))
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AurĂ©lien ne s’était naturellement pas rendu compte tout de suite qu’il avait Ă©pousĂ© une merde, et de surcroĂźt une merde vĂ©nale, c’est une chose qu’on ne rĂ©alise pas immĂ©diatement, il faut un minimum de quelques mois pour comprendre qu’on va vivre en enfer, et qu’il ne s’agit pas d’un enfer simple, les cercles sont nombreux, il s’était enfoncĂ© au fil des ans dans des couches successives, de plus en plus oppressantes, de plus en plus noirĂątres et irrespirables, les mots acrimonieux qu’ils Ă©changeaient chaque soir se chargeaient chaque fois un peu plus de haine pure.
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Michel Houellebecq (Anéantir)
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Il n'existe aucun moyen de vĂ©rifier quelle dĂ©cision est la bonne car il n'existe aucune comparaison. Tout est vĂ©cu tout de suite pour la premiĂšre fois et sans prĂ©paration. Comme si un acteur entrait en scĂšne sans avoir jamais rĂ©pĂ©tĂ©. Mais que peut valoir la vie, si la premiĂšre rĂ©pĂ©tition de la vie est dĂ©jĂ  la vie mĂȘme? C'est ce qui fait que la vie ressemble toujours Ă  une esquisse. Mais mĂȘme 'esquisse' n'est pas le mot juste, car une esquisse est toujours l'Ă©bauche de quelque chose, la prĂ©paration d'un tableau, tandis que l'esquisse qu'est notre vie est une esquisse de rien, une Ă©bauche sans tableau.
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Milan Kundera
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Quand je considĂšre ma vie, je suis Ă©pouvantĂ© de la trouver informe. L'existence des hĂ©ros, celle qu'on nous raconte, est simple ; elle va droit au but comme une flĂšche. Et la plupart des hommes aiment Ă  rĂ©sumer leur vie dans une formule, parfois dans une vanterie ou dans une plainte, presque toujours dans une rĂ©crimination ; leur mĂ©moire leur fabrique complaisamment une existence explicable et claire. Ma vie a des contours moins fermes... Le paysage de mes jours semble se composer, comme les rĂ©gions de montagne, de matĂ©riaux divers entassĂ©s pĂȘle-mĂȘle. J'y rencontre ma nature, dĂ©jĂ  composite, formĂ©e en parties Ă©gales d'instinct et de culture. Ça et lĂ , affleurent les granits de l'inĂ©vitable ; partout, les Ă©boulements du hasard. Je m'efforce de reparcourir ma vie pour y trouver un plan, y suivre une veine de plomb ou d'or, ou l'Ă©coulement d'une riviĂšre souterraine, mais ce plan tout factice n'est qu'un trompe-l'oeil du souvenir. De temps en temps, dans une rencontre, un prĂ©sage, une suite dĂ©finie d'Ă©vĂ©nements, je crois reconnaĂźtre une fatalitĂ©, mais trop de routes ne mĂšnent nulle part, trop de sommes ne s'additionnent pas. Je perçois bien dans cette diversitĂ©, dans ce dĂ©sordre, la prĂ©sence d'une personne, mais sa forme semble presque toujours tracĂ©e par la pression des circonstances ; ses traits se brouillent comme une image reflĂ©tĂ©e sur l'eau. Je ne suis pas de ceux qui disent que leurs actions ne leur ressemblent pas. Il faut bien qu'elles le fassent, puisqu'elles sont ma seule mesure, et le seul moyen de me dessiner dans la mĂ©moire des hommes, ou mĂȘme dans la mienne propre ; puisque c'est peut-ĂȘtre l'impossibilitĂ© de continuer Ă  s'exprimer et Ă  se modifier par l'action que constitue la diffĂ©rence entre l'Ă©tat de mort et celui de vivant. Mais il y a entre moi et ces actes dont je suis fait un hiatus indĂ©finissable. Et la preuve, c'est que j'Ă©prouve sans cesse le besoin de les peser, de les expliquer, d'en rendre compte Ă  moi-mĂȘme. Certains travaux qui durĂšrent peu sont assurĂ©ment nĂ©gligeables, mais des occupations qui s'Ă©tendirent sur toute la vie ne signifient pas davantage. Par exemple, il me semble Ă  peine essentiel, au moment oĂč j'Ă©cris ceci, d'avoir Ă©tĂ© empereur..." (p.214)
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Marguerite Yourcenar (Les Yeux ouverts : Entretiens avec Matthieu Galey)
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Jean shifted his commentary from his guard to me. “Drusilla, a grievance must be made against these ruffians and thieves. They have stolen my clothing and given me only this
this
.” He ran out of words. “Ugly-ass orange jumpsuit?” I offered, always ready to help Jean with his command of modern English. “Oui, exactement. I demand that you obtain my release, tout de suite. And you must know, a woman who allows her husband to remain in such conditions for an entire evening must face reprimand.” I leaned back in the chair and crossed my arms. “And you must know that, in this day and age, should a man reprimand his wife too much, said wife might leave her husband to enjoy a longer time in his prison cell wearing his ugly-ass orange jumpsuit.
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Suzanne Johnson (Pirateship Down (Sentinels of New Orleans #4.5))
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Le relativisme rĂ©duit tout Ă©lĂ©ment d'absoluitĂ© Ă  la relativitĂ©, en faisant une exception parfaitement illogique avec cette rĂ©duction mĂȘme. Il consiste en somme Ă  dĂ©clarer qu'il est vrai qu'il n'y a pas de vĂ©ritĂ©, ou qu'il est absolument vrai qu'il n'y a que du relativement vrai ; autant dire qu'il n'y a pas de langage, ou Ă©crire qu'il n'y a pas d'Ă©criture. Bref, toute idĂ©e se trouve rĂ©duite Ă  une relativitĂ© soit psychologique, soit historique, soit sociale ; l'assertion s'annule du fait qu'elle se prĂ©sente elle-mĂȘme comme une relativitĂ© psychologique, historique, ou sociale, et ainsi de suite. L'assertion s'annule, si elle est vraie, et en s'annulant logiquement, prouve qu'elle est fausse ; son absurditĂ© initiale, c'est la prĂ©tention implicite d'ĂȘtre seule Ă  sortir, comme par enchantement, d'une relativitĂ© dĂ©clarĂ©e seule possible.
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Frithjof Schuon (Logic and Transcendence)
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Si un danseur a la possibilitĂ© d'entrer dans le jeu politique, il refusera ostensiblement toutes les nĂ©gociations secrĂštes (qui sont depuis toujours le terrain de jeu de la vraie politique) en les dĂ©nonçant comme mensongĂšres, malhonnĂȘtes, hypocrites, sales ; il avancera ses propositions publiquement, sur une estrade, en chantant, en dansant, et appellera nommĂ©ment les autres Ă  le suivre dans son action ; j'insiste : non pas discrĂštement (pour donner Ă  l'autre le temps de rĂ©flĂ©chir, de discuter des contrepropositions) mais publiquement, et si possible par surprise : "Êtes-vous prĂȘt tout de suite (comme moi) Ă  renoncer Ă  votre salaire du mois de mars au profit des enfants de Somalie ?" Surpris, les gens n'auront que deux possibilitĂ©s : ou bien refuser et ainsi se discrĂ©diter en tant qu'ennemis des enfants, ou bien dire "oui" dans un terrible embarras que la camĂ©ra devra malicieusement montrer (chapitre 6)
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Milan Kundera (Slowness)
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Un moment a vaincu mon audace imprudente : Cette Ăąme si superbe est enfin dĂ©pendante. Depuis prĂšs de six mois, honteux, dĂ©sespĂ©rĂ©, Portant partout le trait dont je suis dĂ©chirĂ©, Contre vous, contre moi, vainement je m’éprouve : PrĂ©sente je vous fuis, absente je vous trouve ; Dans le fond des forĂȘts votre image me suit ; La lumiĂšre du jour, les ombres de la nuit, Tout retrace Ă  mes yeux les charmes que j’évite, Tout vous livre Ă  l’envi le rebelle Hippolyte.
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Jean Racine (PhĂšdre)
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- Alors ? - J'ai du plaisir Ă  sentir mon corps se remettre Ă  fonctionner, Salim. Je me dĂ©lecte de mes enjambĂ©es qui se fluidifient, du frottement de mes bras contre mon torse, de l'oxygĂšne qui entre dans mes poumons, j'apprĂ©cie mĂȘme la douleur dans mes muscles et mon souffle court... Comprends-tu ? - Je crois, oui, rĂ©pondit Salim soudain attentif. - Alors Ă©coute la suite. Je dĂ©sire marcher pour redevenir moi-mĂȘme mais, par-dessus tout, je dĂ©sire dĂ©couvrir un trajet que j'ai effectuĂ© dans tes bras et dont je ne garde pas le moindre souvenir. Si j'en Ă©tais capable, je l'accomplirais en te portant sur mon dos pour comprendre la force qui t'a soutenu, sans boire et sans manger, sans certitude pour motiver tes pas. Je veux marcher parce que je te suis redevable, Salim, c'est le seul moyen dont je dispose pour rembourser une infime partie de ma dette. Un pas sur le cĂŽtĂ© amoindrirait ton geste et je t'aime trop pour te diminuer.
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Pierre Bottero (La ForĂȘt des captifs (Les Mondes d'Ewilan, #1))
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Dieu est bon ; rien n'est plus manifeste : mais la bonté dans l'homme est l'amour de ses semblables, et la bonté de Dieu est l'amour de l'ordre ; car c'est par l'ordre qu'il maintient ce qui existe, et lie chaque partie avec le tout. Dieu est juste ; j'en suis convaincu, c'est une suite de sa bonté ; l'injustice des hommes est leur oeuvre et non pas la sienne ; le désordre moral, qui dépose contre la Providence aux yeux des philosophes, ne fait que la démontrer aux miens.
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Jean-Jacques Rousseau (Emile, or On Education)
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Ah ! que paraĂźt salubre Ă  tout ĂȘtre l’air qui n’a pas encore Ă©tĂ© respirĂ© ! Bernard suit la grille du Luxembourg ; il descend la rue Bonaparte, gagne les quais, traverse la Seine. Il songe Ă  sa nouvelle rĂšgle de vie, dont il a trouvĂ© depuis peu la formule : « Si tu ne fais pas cela, qui le fera ? Si tu ne le fais pas aussitĂŽt, quand sera-ce ? » – Il songe : « De grandes choses Ă  faire » ; il lui semble qu’il va vers elles. « De grandes choses », se rĂ©pĂšte-t-il en marchant.
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André Gide (The Counterfeiters)
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Patrice a vingt-quatre ans et, la premiĂšre fois que je l’ai vu, il Ă©tait dans son fauteuil inclinĂ© trĂšs en arriĂšre. Il a eu un accident vasculaire cĂ©rĂ©bral. Physiquement, il est incapable du moindre mouvement, des pieds jusqu’à la racine des cheveux. Comme on le dit souvent d’une maniĂšre trĂšs laide, il a l’aspect d’un lĂ©gume : bouche de travers, regard fixe. Tu peux lui parler, le toucher, il reste immobile, sans rĂ©action, comme s’il Ă©tait complĂštement coupĂ© du monde. On appelle ça le locked in syndrome.Quand tu le vois comme ça, tu ne peux qu’imaginer que l’ensemble de son cerveau est dans le mĂȘme Ă©tat. Pourtant il entend, voit et comprend parfaitement tout ce qui se passe autour de lui. On le sait, car il est capable de communiquer Ă  l’aide du seul muscle qui fonctionne encore chez lui : le muscle de la paupiĂšre. Il peut cligner de l’Ɠil. Pour l’aider Ă  s’exprimer, son interlocuteur lui propose oralement des lettres de l’alphabet et, quand la bonne lettre est prononcĂ©e, Patrice cligne de l’Ɠil.  Lorsque j’étais en rĂ©animation, que j’étais complĂštement paralysĂ© et que j’avais des tuyaux plein la bouche, je procĂ©dais de la mĂȘme maniĂšre avec mes proches pour pouvoir communiquer. Nous n’étions pas trĂšs au point et il nous fallait parfois un bon quart d’heure pour dicter trois pauvres mots. Au fil des mois, Patrice et son entourage ont perfectionnĂ© la technique. Une fois, il m’est arrivĂ© d’assister Ă  une discussion entre Patrice et sa mĂšre. C’est trĂšs impressionnant.La mĂšre demande d’abord : « Consonne ? » Patrice acquiesce d’un clignement de paupiĂšre. Elle lui propose diffĂ©rentes consonnes, pas forcĂ©ment dans l’ordre alphabĂ©tique, mais dans l’ordre des consonnes les plus utilisĂ©es. DĂšs qu’elle cite la lettre que veut Patrice, il cligne de l’Ɠil. La mĂšre poursuit avec une voyelle et ainsi de suite. Souvent, au bout de deux ou trois lettres trouvĂ©es, elle anticipe le mot pour gagner du temps. Elle se trompe rarement. Cinq ou six mots sont ainsi trouvĂ©s chaque minute.  C’est avec cette technique que Patrice a Ă©crit un texte, une sorte de longue lettre Ă  tous ceux qui sont amenĂ©s Ă  le croiser. J’ai eu la chance de lire ce texte oĂč il raconte ce qui lui est arrivĂ© et comment il se sent. À cette lecture, j’ai pris une Ă©norme gifle. C’est un texte brillant, Ă©crit dans un français subtil, lĂ©ger malgrĂ© la tragĂ©die du sujet, rempli d’humour et d’autodĂ©rision par rapport Ă  l’état de son auteur. Il explique qu’il y a de la vie autour de lui, mais qu’il y en a aussi en lui. C’est juste la jonction entre les deux mondes qui est un peu compliquĂ©e.Jamais je n’aurais imaginĂ© que ce texte si puissant ait Ă©tĂ© Ă©crit par ce garçon immobile, au regard entiĂšrement vide.  Avec l’expĂ©rience acquise ces derniers mois, je pensais ĂȘtre capable de diagnostiquer l’état des uns et des autres seulement en les croisant ; j’ai reçu une belle leçon grĂące Ă  Patrice.Une leçon de courage d’abord, Ă©tant donnĂ© la vitalitĂ© des propos que j’ai lus dans sa lettre, et, aussi, une leçon sur mes a priori. Plus jamais dorĂ©navant je ne jugerai une personne handicapĂ©e Ă  la vue seule de son physique. C’est jamais inintĂ©ressant de prendre une bonne claque sur ses propres idĂ©es reçues .
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Grand corps malade (Patients)
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Les jeunes filles d’aujourd’hui Ă©taient plus avisĂ©es et plus rationnelles. Elles se prĂ©occupaient avant tout de leur rĂ©ussite scolaire, tĂąchaient avant tout de s’assurer un avenir professionnel dĂ©cent. Les sorties avec les garçons n’étaient pour elles qu’une activitĂ© de loisirs, un divertissement oĂč intervenaient Ă  parts plus ou moins Ă©gales le plaisir sexuel et la satisfaction narcissique. Par la suite elles s’attachaient Ă  conclure un mariage raisonnĂ©, sur la base d’une adĂ©quation suffisante des situations socio-professionnelles et d’une certaine communautĂ© de goĂ»ts. Bien entendu elles se coupaient ainsi de toute possibilitĂ© de bonheur – celui-ci Ă©tant indissociable d’états fusionnels et rĂ©gressifs incompatibles avec l’usage pratique de la raison – mais elles espĂ©raient ainsi Ă©chapper aux souffrances sentimentales et morales qui avaient torturĂ© leurs devanciĂšres. Cet espoir Ă©tait d’ailleurs rapidement déçu, la disparition des tourments passionnels laissait en effet le champ libre Ă  l’ennui, Ă  la sensation de vide, Ă  l’attente angoissĂ©e du vieillissement et de la mort.
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Michel Houellebecq (The Elementary Particles)
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AprĂšs tout, on ne juge le monde que d'aprĂšs son propre coeur. L'avare seul voit les gens menĂ©s par l'intĂ©rĂȘt, le luxurieux par l'obsession du dĂ©sir. Pour Madame Angellier, un Allemand n'Ă©tait pas un homme, c'Ă©tait une personnification de la cruautĂ©, de la perversitĂ© et de la haine. Que d'autres eussent un jugement diffĂ©rent Ă©tait impossible, invraisemblable... Elle ne pouvait pas plus se rĂ©presenter Lucile amoureuse d'un Allemand qu'elle n'eĂ»t imaginĂ© l'accouplement d'une femme et d'une bĂȘte fabuleuse, comme la licorne, le dragon ou la tarasque.
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IrÚne Némirovsky (Suite Française)
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«Imagine que ce rĂ©cipient soit ta vie. Et que les trois cailloux symbolisent les choses les plus importantes pour toi: ce dont tu ne pourrais te passer pour ĂȘtre heureuse. ConsidĂšre les graviers comme les prioritĂ©s secondaires, celles qui arrivent juste aprĂšs l’indispensable.» Je le fixai sans comprendre ce qu’il essayait de me dire. «Enfin, imagine que le sable corresponde Ă  tout le reste: les bonheurs futiles, ceux qui te font du bien, mais qui ne sont qu’un complĂ©ment de “l’essentiel” puis de “l’important”. — Bon, oĂč veux-tu en venir? — Si j’avais rempli le pot de sable, il n’y aurait plus de place pour les graviers ou les cailloux. C’est pareil pour ta vie: si tu consacres ton temps et ton Ă©nergie aux Ă©lĂ©ments secondaires, tu n’as plus d’espace pour l’essentiel, tu passes Ă  cĂŽtĂ© de ton chemin. Tu cours aprĂšs le superficiel en te demandant pourquoi tu n’es pas heureuse.» J’applaudis en souriant. Belle dĂ©monstration! «Maintenant, Ă  toi de dĂ©finir tes prioritĂ©s. À quoi correspondent les cailloux de ta vie, quelles sont pour toi les choses essentielles? C’est-Ă -dire ce que tu ne sacrifierais pas. Ou ce que tu voudrais le plus au monde. — Je ne sais pas
 Euh, lĂ  tout de suite, je suis fatiguĂ©e. — RĂ©flĂ©chis!», ordonna-t-il avec fermetĂ©.
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Maud Ankaoua (KilomÚtre zéro)
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C'Ă©tait l'une de ces voix dont l'oreille Ă©pouse chaque modulation, car elles improvisent de phrase en phrase une suite d'accords de hasard que personne jamais ne rejouera plus. Son visage Ă©tait triste et tendre avec de beaux Ă©clats, l'Ă©clat du regard, l'Ă©clat brĂ»lant des lĂšvres — mais on percevait dans sa voix une note d'excitation dont les hommes qui l'ont aimĂ©e se souviendront toujours: une vibration musicale, une exigence impĂ©rieuse et chuchotĂ©e: "Écoutez-moi, Ă©coutez-moi!", l'assurance qu'elle venait tout juste de vivre des instants radieux, magiques et que l'heure suivante lui en rĂ©servaitd'autres, tout aussi magiques et radieux.
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F. Scott Fitzgerald (The Great Gatsby)
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Pendant des millions d'annĂ©es, l'humanitĂ© a vĂ©cu comme les animaux. Par la suite, quelque chose est arrivĂ© qui a libĂ©rĂ© le pouvoir de notre imagination. Nous avons appris Ă  parler et Ă  Ă©couter. La parole a permis la communication des idĂ©es, abilitant l'ĂȘtre humain Ă  travailler ensemble afin de construire l'impossible. Les plus grandes rĂ©alisations de l'humanitĂ© se sont matĂ©rialisĂ©es en parlant, et ses plus grands Ă©checs en ne parlant plus. Cela n'a pas lieu d'ĂȘtre. Nos plus grands espoirs pourraient devenir des rĂ©alitĂ©s dans le futur. Avec la technologie Ă  notre disposition, les possibilitĂ©s sont illimitĂ©es. Tout ce que nous avons Ă  faire est de s'assurer que nous continuions Ă  parler.
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Stephen Hawking
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Cette sociĂ©tĂ©, que j'ai remarquĂ©e la premiĂšre dans ma vie, est aussi la premiĂšre qui ait disparu Ă  mes yeux. J'ai vu la mort entrer sous ce toit de paix et de bĂ©nĂ©diction, le rendre peu Ă  peu solitaire, fermer une chambre et puis une autre qui ne se rouvrait plus. J'ai vu ma grand'mĂšre forcĂ©e de renoncer Ă  son quadrille, faute des partners accoutumĂ©s; j'ai vu diminuer le nombre de ces constantes amies, jusqu'au jour oĂč mon aĂŻeule tomba la derniĂšre. Elle et sa sƓur s'Ă©taient promis de s'entre-appeler aussitĂŽt que l'une aurait devancĂ© l'autre; elles se tinrent parole, et madame de BedĂ©e ne survĂ©cut que peu de mois Ă  mademoiselle de Boisteilleul. Je suis peut-ĂȘtre le seul homme au monde qui sache que ces personnes ont existĂ©. Vingt fois, depuis cette Ă©poque, j'ai fait la mĂȘme observation; vingt fois des sociĂ©tĂ©s se sont formĂ©es et dissoutes autour de moi. Cette impossibilitĂ© de durĂ©e et de longueur dans les liaisons humaines, cet oubli profond qui nous suit, cet invincible silence qui s'empare de notre tombe et s'Ă©tend de lĂ  sur notre maison, me ramĂšnent sans cesse Ă  la nĂ©cessitĂ© de l'isolement. Toute main est bonne pour nous donner le verre d'eau dont nous pouvons avoir besoin dans la fiĂšvre de la mort. Ah! qu'elle ne nous soit pas trop chĂšre! car comment abandonner sans dĂ©sespoir la main que l'on a couverte de baisers et que l'on voudrait tenir Ă©ternellement sur son cƓur?
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François-René de Chateaubriand (Mémoires d'Outre-Tombe)
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La mĂ©ditation Ăąpre et profondĂ©ment sĂ©rieuse sur la non-valeur de tout ce qui est arrivĂ©, sur l'urgence qu'il y a Ă  mettre le monde en jugement, a fait place Ă  la conviction sceptique qu'il est, en tout cas, bon de connaĂźtre le passĂ©, puisqu'il est trop tard pour faire quelque chose de meilleur. Ainsi le sens historique rend ses serviteurs passifs et respectueux. C'est seulement quand, par suite d'un oubli momentanĂ©, ce sens est suspendu, que l'homme malade de la fiĂšvre historique devient actif. Mais, dĂšs que l'action est passĂ©e, il se met Ă  dissĂ©quer, pour l'empĂȘcher, par l'examen analytique auquel il la soumet, de prolonger son influence. Ainsi dĂ©pouillĂ©e, son action est alors du domaine de l' "Histoire". DeuxiĂšme ConsidĂ©ration intempestive, ch. 8
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Friedrich Nietzsche
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Enfin, en continuant Ă  suivre du dedans au−dehors les Ă©tats simultanĂ©ment juxtaposĂ©s dans ma conscience, et avant d'arriver jusqu'Ă  l'horizon rĂ©el qui les enveloppait, je trouve des plaisirs d'un autre genre, celui d'ĂȘtre bien assis, de sentir la bonne odeur de l'air, de ne pas ĂȘtre dĂ©rangĂ© par une visite et, quand une heure sonnait au clocher de Saint−hilaire, de voir tomber morceau par morceau ce qui de l'aprĂšs−midi Ă©tait dĂ©jĂ  consommĂ©, jusqu'Ă  ce que j'entendisse le dernier coup qui me permettait de faire le total et aprĂšs lequel le long silence qui le suivait semblait faire commencer, dans le ciel bleu, toute la partie qui m'Ă©tait encore concĂ©dĂ©e pour lire jusqu'au bon dĂźner qu'apprĂȘtait Françoise et qui me rĂ©conforterait des fatigues prises, pendant la lecture du livre, Ă  la suite de son hĂ©ros.
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Marcel Proust (Swann's Way)
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Il songea, une nouvelle fois, que, petit, un jour, il portait un lapin par les pattes de derriĂšre. C'Ă©tait en Sicile, les pattes Ă©taient attachĂ©es avec de la ficelle, il marchait Ă  cĂŽtĂ© de son pĂšre, son pĂšre trimbalait un panier de pommes de terre, et il sentait que le sang s'accumulait dans la petite tĂȘte du lapin, le lapin Ă©tait juste dans la posture de Saint-Pierre le jour de sa mort, les yeux du lapin muet avait un vertige infini de souffrance et de terreur, il aurait suffi de mettre l'animal dans l'autre sens, la tĂȘte en haut, alors, au moins, avant la mort inĂ©vitable, il aurait cessĂ© de souffrir, mais il n'osa pas. Par consĂ©quent, lui, petit, dĂ©jĂ  Ă©tait pris dans l'omertĂ  du monde, dans cette complicitĂ© gĂ©nĂ©rale qui nous fait, en gros, accepter des mers et des montagnes de souffrance et de terreur, les reconnaitre pour lĂ©gitimes, nĂ©cessaires, bonnes, justes. Si l'on se mettait, par exemple, Ă  souffrir pour un lapin, il faudrait, tout de suite, souffrir aussi pour les chevaux, les mouches, les rats, les vieillards. C'est pourquoi il avait continuĂ© Ă  tenir l'animal Ă  l'envers, par ses pattes ficelĂ©es, tout en sentant que le regret s'accumulait en lui, s'accumulait jusqu'Ă  former un dĂ©pĂŽt pesant dans la tĂȘte de l'animal, enflammant ses yeux de sang et de terreur, mais l'omertĂ , dĂ©jĂ , Ă©tait la plus forte, la complicitĂ© taciturne des hommes entre eux, des ĂȘtres entre eux. Demandez Ă  qui vous voudrez. Un lapin, pour un trajet donnĂ©, se porte la tĂȘte en bas, ficelĂ© par les pattes de derriĂšre, c'est la loi. Un bambin, sur un chemin, dans la grande Ăźle, dans la Sicile, il ne va pas, de lui-mĂȘme, accomplir la rĂ©volution, tourner l'animal dans l'autre sens, dans le sens du pardon, du bien-ĂȘtre, au risque de troubler le pas de son pĂšre, son pĂšre portait les pommes de terre.
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Jacques Audiberti (Le MaĂźtre De Milan)
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Revenons donc Ă  nos poncifs, ou plutĂŽt Ă  quelques-uns d’entre eux : 1° Le XIXe siĂšcle est le siĂšcle de la science. 2° Le XIXe siĂšcle est le siĂšcle du progrĂšs. 3° Le XIXe siĂšcle est le siĂšcle de la dĂ©mocratie, qui est progrĂšs et progrĂšs continu. 4° Les tĂ©nĂšbres du moyen Ăąge. 5° La RĂ©volution est sainte, et elle a Ă©mancipĂ© le peuple français. 6° La dĂ©mocratie, c’est la paix. Si tu veux la paix, prĂ©pare la paix. 7° L’avenir est Ă  la science. La Science est toujours bienfaisante. 8° L’instruction laĂŻque, c’est l’émancipation du peuple. 9° La religion est la fille de la peur. 10° Ce sont les États qui se battent. Les peuples sont toujours prĂȘts Ă  s’accorder. 11° Il faut remplacer l’étude du latin et du grec, qui est devenue inutile, par celle des langues vivantes, qui est utile. 12° Les relations de peuple Ă  peuple vont sans cesse en s’amĂ©liorant. Nous courons aux États-Unis d’Europe. 13° La science n’a ni frontiĂšres, ni patrie. 14° Le peuple a soif d’égalitĂ©. 15° Nous sommes Ă  l’aube d’une Ăšre nouvelle de fraternitĂ© et de justice. 16° La propriĂ©tĂ©, c’est le vol. Le capital, c’est la guerre. 17° Toutes les religions se valent, du moment qu’on admet le divin. 18° Dieu n’existe que dans et par la conscience humaine. Cette conscience crĂ©e Dieu un peu plus chaque jour. 19° L’évolution est la loi de l’univers. 20° Les hommes naissent naturellement bons. C’est la sociĂ©tĂ© qui les pervertit. 21° Il n’y a que des vĂ©ritĂ©s relatives, la vĂ©ritĂ© absolue n’existe pas. 22° Toutes les opinions sont bonnes et valables, du moment que l’on est sincĂšre. Je m’arrĂȘte Ă  ces vingt-deux Ăąneries, auxquelles il serait aisĂ© de donner une suite, mais qui tiennent un rang majeur par les innombrables calembredaines du XIXe siĂšcle, parmi ce que j’appellerai ses idoles. Idoles sur chacune desquelles on pourrait mettre un ou plusieurs noms.
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Léon Daudet (Le Stupide XIXe siÚcle (French Edition))
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- Je souhaite ne jamais te voir, rĂ©pondit la Fadette trĂšs durement ; et n'importe quelle chose tu m'apporteras, tu peux bien compter que je te la jetterai au nez. - VoilĂ  des paroles trop rudes pour quelqu'un qui vous offre rĂ©paration. Si tu ne veux point de cadeau, il y a peut-ĂȘtre moyen de te rendre service et de te montrer par lĂ  qu'on te veut du bien et non pas du mal. Allons, dis-moi ce que j'ai Ă  faire pour te contenter. - Vous ne sauriez donc me demander pardon et souhaiter mon amitiĂ© ? dit la Fadette en s'arrĂȘtant. - Pardon, c'est beaucoup demander, rĂ©pondit Landry, qui ne pouvait vaincre sa hauteur Ă  l'endroit d'une fille qui n'Ă©tait point considĂ©rĂ©e en proportion de l'Ăąge qu'elle commençait Ă  avoir, et qu'elle ne portait pas toujours aussi raisonnablement qu'elle l'aurait dĂ» ; quant Ă  ton amitiĂ©, Fadette, tu es si drĂŽlement bĂątie dans ton esprit, que je ne saurais y avoir grand'fiance. Demande-moi donc une chose qui puisse se donner tout de suite, et que je ne sois pas obligĂ© de te reprendre. - Eh bien, dit la Fadette d'une voix claire et sĂšche, il en sera comme vous le souhaitez, besson Landry. Je vous ai offert votre pardon, et vous n'en voulez point. À prĂ©sent, je vous rĂ©clame ce que vous m'avez promis, qui est d'obĂ©ir Ă  mon commandement, le jour oĂč vous en serez requis. Ce jour-lĂ , ce ne sera pas plus tard que demain Ă  la Saint-Andoche, et voici ce que je veux : Vous me ferez danser trois bourrĂ©es aprĂšs la messe, deux bourrĂ©es aprĂšs vĂȘpres, et encore deux bourrĂ©es aprĂšs l'AngĂ©lus, ce qui fera sept. Et dans toute votre journĂ©e, depuis que vous serez levĂ© jusqu'Ă  ce que vous soyez couchĂ©, vous ne danserez aucune autre bourrĂ©e avec n'importe qui, fille ou femme. Si vous ne le faites, je saurai que vous avez trois choses bien laides en vous : l'ingratitude, la peur et le manque de parole. Bonsoir, je vous attends demain pour ouvrir la danse, Ă  la porte de l'Ă©glise. Et la petite Fadette, que Landry avait suivie jusqu'Ă  sa maison, tira la corillette et entra si vite que la porte fut poussĂ©e et recorillĂ©e avant que le besson eĂ»t pu rĂ©pondre un mot.
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George Sand (La Petite Fadette)
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« Il dit rĂ©solument : « Je ne venais point vous voir parce que cela valait mieux. » Elle demanda, sans comprendre : « Comment ? Pourquoi ? – Pourquoi ? Vous ne devinez pas. – Non, pas du tout. – Parce que je suis amoureux de vous... oh ! un peu, rien qu’un peu... et que je ne veux pas le devenir tout Ă  fait... » Elle ne parut ni Ă©tonnĂ©e, ni choquĂ©e, ni flattĂ©e ; elle continuait Ă  sourire du mĂȘme sourire indiffĂ©rent, et elle rĂ©pondit avec tranquillitĂ© : « Oh ! vous pouvez venir tout de mĂȘme. On n’est jamais amoureux de moi longtemps. » Il fut surpris du ton plus encore que des paroles, et il demanda : « Pourquoi ? – Parce que c’est inutile et que je le fais comprendre tout de suite. Si vous m’aviez racontĂ© plus tĂŽt votre crainte, je vous aurais rassurĂ© et engagĂ© au contraire Ă  venir le plus possible. » Il s’écria, d’un ton pathĂ©tique : « Avec ça qu’on peut commander aux sentiments ! » Elle se tourna vers lui : « Mon cher ami, pour moi un homme amoureux est rayĂ© du nombre des vivants. Il devient idiot, pas seulement idiot, mais dangereux. Je cesse, avec les gens qui m’aiment d’amour, ou qui le prĂ©tendent, toute relation intime, parce qu’ils m’ennuient d’abord, et puis parce qu’ils me sont suspects comme un chien enragĂ© qui peut avoir une crise. Je les mets donc en quarantaine morale jusqu’à ce que leur maladie soit passĂ©e. Ne l’oubliez point. Je sais bien que chez vous l’amour n’est autre chose qu’une espĂšce d’appĂ©tit, tandis que chez moi ce serait, au contraire, une espĂšce de... de... de communion des Ăąmes qui n’entre pas dans la religion des hommes. Vous en comprenez la lettre, et moi l’esprit. Mais... regardez-moi bien en face... » Elle ne souriait plus. Elle avait un visage calme et froid et elle dit en appuyant sur chaque mot : « Je ne serai jamais, jamais votre maĂźtresse, entendez-vous. Il est donc absolument inutile, il serait mĂȘme mauvais pour vous de persister dans ce dĂ©sir... Et maintenant que... l’opĂ©ration est faite... voulez-vous que nous soyons amis, bons amis, mais lĂ , de vrais amis, sans arriĂšre-pensĂ©e ? » Il avait compris que toute tentative resterait stĂ©rile devant cette sentence sans appel. Il en prit son parti tout de suite, franchement, et, ravi de pouvoir se faire cette alliĂ©e dans l’existence, il lui tendit les deux mains : « Je suis Ă  vous, madame, comme il vous plaira. » » (de « Bel-Ami » par Guy de Maupassant)
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Guy de Maupassant
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Le premier empereur est appelĂ© l'Empereur du Ciel. Il a dĂ©terminĂ© l'ordre du temps qu'il a divisĂ© en dix troncs cĂ©lestes et douze branches terrestres, le tout formant un cycle. Cet empereur vĂ©cut dix-huit mille ans. Le second empereur est l'Empereur de la Terre ; il vĂ©cut aussi dix-huit mille ans : on lui attribue la division du mois en trente jours. Le troisiĂšme empereur est l'Empereur des Hommes. Sous son rĂšgne apparaissent les premiĂšres Ă©bauches de la vie sociale. Il partage son territoire en neuf parties, et Ă  chacune d'elles il donne pour chef un des membres de sa famille. L'histoire cĂ©lĂšbre pour la premiĂšre fois les beautĂ©s de la nature et la douceur du climat. Ce rĂšgne eut quarante-cinq mille cinq cents ans de durĂ©e. Pendant ces trois rĂšgnes qui embrassent une pĂ©riode de quatre-vingt-un mille ans, il n'est question ni de l'habitation, ni du vĂȘtement. L'histoire nous dit que les hommes vivaient dans des cavernes, sans crainte des animaux, et la notion de la pudeur n'existait pas parmi eux. A la suite de quels Ă©vĂ©nements cet Ă©tat de choses se transforma-t-il ? L'histoire n'en dit mot. Mais on remarquera les noms des trois premiers empereurs qui comprennent trois termes, le ciel, la terre, les hommes, gradation qui conduit Ă  l'hypothĂšse d'une dĂ©cadence progressive dans l'Ă©tat de l'humanitĂ©.
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Tcheng-Ki-Tong (Les Chinois peints par eux-mĂȘmes)
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Celui qui souffre d'un mal caractĂ©risĂ© n'a pas le droit de se plaindre : il a une occupation. Les grands souffrants ne s'ennuient jamais : la maladie les remplit, comme le remords nourrit les grands coupables. Car toute souffrance intense suscite un simulacre de plĂ©nitude et propose Ă  la conscience une rĂ©alitĂ© terrible, qu'elle ne saurait Ă©luder ; tandis que la souffrance sans matiĂšre dans ce deuil temporel qu'est l' ennui n'oppose Ă  la conscience rien qui l'oblige Ă  une dĂ©marche fructueuse. Comment guĂ©rir d'un mal non localisĂ© et suprĂȘmement imprĂ©cis, qui frappe le corps sans y laisser d'empreinte, qui s'insinue dans l'Ăąme sans y marquer de signe ? Il ressemble Ă  une maladie Ă  laquelle nous aurions survĂ©cu, mais qui aurait absorbĂ© nos possibilitĂ©s, nos rĂ©serves d' attention et nous aurait laissĂ©s impuissants Ă  combler le vide qui suit la disparition de nos affres et l'Ă©vanouissement de nos tourments. L'enfer est un havre auprĂšs de ce dĂ©paysement dans le temps, de cette langueur vide et prostrĂ©e oĂč rien ne nous arrĂȘte sinon le spectacle de l'univers qui se carie sous nos regard. Quelle thĂ©rapeutique employer contre une maladie dont nous ne nous souvenons plus et dont les suites empiĂštent sur nos jours ? Comment inventer un remĂšde Ă  l'existence, comment conclure cette guĂ©rison sans fin ? Et comment se remettre de sa naissance ? L'ennui, cette convalescence incurable ...
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Emil M. Cioran (Précis de décomposition (French Edition))
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Cette sociĂ©tĂ©, que j'ai remarquĂ©e la premiĂšre dans ma vie, est aussi la premiĂšre qui ait disparu Ă  mes yeux. J'ai vu la mort entrer sous ce toit de paix et de bĂ©nĂ©diction, le rendre peu Ă  peu solitaire, fermer une chambre et puis une autre qui ne se rouvrait plus. J'ai vu ma grand'mĂšre forcĂ©e de renoncer Ă  son quadrille, faute des partners accoutumĂ©s; j'ai vu diminuer le nombre de ces constantes amies, jusqu'au jour oĂč mon aĂŻeule tomba la derniĂšre. Elle et sa sƓur s'Ă©taient promis de s'entre-appeler aussitĂŽt que l'une aurait devancĂ© l'autre; elles se tinrent parole, et madame de BedĂ©e ne survĂ©cut que peu de mois Ă  mademoiselle de Boisteilleul. Je suis peut-ĂȘtre le seul homme au monde qui sache que ces personnes ont existĂ©. Vingt fois, depuis cette Ă©poque, j'ai fait la mĂȘme observation; vingt fois des sociĂ©tĂ©s se sont formĂ©es et dissoutes autour de moi. Cette impossibilitĂ© de durĂ©e et de longueur dans les liaisons humaines, cet oubli profond qui nous suit, cet invincible silence qui s'empare de notre tombe et s'Ă©tend de lĂ  sur notre maison, me ramĂšnent sans cesse Ă  la nĂ©cessitĂ© de l'isolement. Toute main est bonne pour nous donner le verre d'eau dont nous pouvons avoir besoin dans la fiĂšvre de la mort. Ah! qu'elle ne nous soit pas trop chĂšre! car comment abandonner sans dĂ©sespoir la main que l'on a couverte de baisers et que l'on voudrait tenir Ă©ternellement sur son cƓur? 
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François-René de Chateaubriand (Memoires D'Outre Tombe Lu Par Daniel Mesguich)
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[...] existe en AlgĂ©rie, dans une zone qui est historiquement marocaine, mais qui a Ă©tĂ© rattachĂ©e Ă  l’AlgĂ©rie par la France, existe les gisements des mines de Gara Djebilet et ces mines, exploitĂ©es en Ă©tant ouvertes vers la mĂ©diterranĂ©e, avec 1700km de voie ferrĂ©es, ne sont pas rentables, alors que l’AlgĂ©rie, avec une ouverture sur l'Atlantique, n'aurait que 300km a faire pour toucher les port d'Ifni ou LaĂąyoune, et le gouvernement Marocain a proposĂ© Ă  l'AlgĂ©rie un accord - "voila, nous proposons un port franc, une voie ferrĂ©e, un point de sortie pour les mines Gara Djebilet", et l'AlgĂ©rie a refusĂ©, parce qu'il y a un autre argument et c'est un argument dont il est difficile de parler quand on ne connait pas l'Ăąme profonde de ces deux peuples, lorsqu'on ne connait pas l'Ăąme profonde du peuple algĂ©rien, lorsqu'on ne connait pas l'Ăąme profonde du peuple marocain. Les algĂ©riens, font un complexe d'infĂ©rioritĂ© par rapport aux marocains. Ils font un complexe d’infĂ©rioritĂ© car ils ne sont au fait que des parvenus de l'histoire, je le dit sans aucune agressivitĂ©, je le dit en toute amitiĂ©, ce sont des parvenus de l'histoire, ce pays n'a jamais existĂ© - au mieux il fut une dĂ©pendance turque, une suite de beyliks, de beylikats. Il Ă©tait un monde d'anarchie, il n'y a pas d'histoire de l'AlgĂ©rie, d'ailleurs Ferhat Abbas l'avait dit "j'ai visitĂ© les cimetiĂšres et je n'ai pas trouvĂ© d'histoire de l'AlgĂ©rie" - et bien de l'autre cotĂ© de la Moulouya, existe un royaume qui a 12 siĂšcles d'histoire.
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Bernard Lugan
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Sept ans plus tĂŽt, elle m’avait expliquĂ© qu’elle n’avait jamais ressenti un tel sentiment avec personne, une telle Ă©motion, une telle vague de douce et chaude mĂ©lancolie qui l’avait envahie en me voyant faire ce geste si simple, si apparemment anodin, de rapprocher trĂšs lentement mon verre Ă  pied du sien pendant le repas, trĂšs prudemment, et de façon tout Ă  fait incongrue en mĂȘme temps pour deux personnes qui ne se connaissaient pas encore trĂšs bien, qui ne s’étaient rencontrĂ©es qu’une seule fois auparavant, de rapprocher mon verre Ă  pied du sien pour aller caresser le galbe de son verre, l’incliner pour le heurter dĂ©licatement dans un simulacre de trinquer sitĂŽt entamĂ© qu’interrompu, il Ă©tait impossible d’ĂȘtre Ă  la fois plus entreprenant, plus dĂ©licat et plus explicite, m’avait-elle expliquĂ©, un concentrĂ© d’intelligence, de douceur et de style. Elle m’avait souri, elle m’avait avouĂ© par la suite qu’elle Ă©tait tombĂ©e amoureuse de moi dĂšs cet instant. Ce n’était donc pas par des mots que j’étais parvenu Ă  lui communiquer ce sentiment de beautĂ© de la vie et d’adĂ©quation au monde qu’elle ressentait si intensĂ©ment en ma prĂ©sence, non plus par mes regards ou par mes actes, mais par l’élĂ©gance de ce simple geste de la main qui s’était lentement dirigĂ©e vers elle avec une telle dĂ©licatesse mĂ©taphorique qu’elle s’était sentie soudain Ă©troitement en accord avec le monde jusqu’à me dire quelques heures plus tard, avec la mĂȘme audace, la mĂȘme spontanĂ©itĂ© naĂŻve et culottĂ©e, que la vie Ă©tait belle, mon amour.
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Jean-Philippe Toussaint (Making Love)
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J’ai remarquĂ© souvent que quand deux amis pĂ©tersbourgeois se rencontrent quelque part, aprĂšs s’ĂȘtre saluĂ©s, ils demandent en mĂȘme temps : Quoi de neuf ? il y a une tristesse particuliĂšre dans leurs voix, quelle qu’ait Ă©tĂ© l’intonation initiale de leur conversation. En effet, une dĂ©sespĂ©rance totale est liĂ©e Ă  cette question Ă  PĂ©tersbourg. Mais le plus agaçant c’est que, trĂšs souvent, l’homme qui la pose est tout Ă  fait indiffĂ©rent, un PĂ©tersbourgeois de naissance, qui connaĂźt trĂšs bien la coutume, sait d’avance qu’on ne lui rĂ©pondra rien, qu’il n’y a rien de nouveau, qu’il a posĂ© cette question peut-ĂȘtre mille fois sans aucun succĂšs ; cependant, il la pose, et il a l’air de s’y intĂ©resser, comme si les convenances l’obligeaient de participer lui aussi Ă  la vie publique, d’avoir des intĂ©rĂȘts publics. Mais les intĂ©rĂȘts publics... C’est-Ă -dire nous ne nions pas que nous ayons des intĂ©rĂȘts publics ; nous tous aimons ardemment la patrie, nous aimons notre cher PĂ©tersbourg, nous aimons jouer si l’occasion se prĂ©sente. En un mot il y a beaucoup d’intĂ©rĂȘts publics. Mais ce qu’il y a surtout chez nous, ce sont les groupes. On sait que PĂ©tersbourg n’est que la rĂ©union d’un nombre considĂ©rable de petits groupes dont chacun a ses statuts, ses conventions, ses lois, sa logique et son oracle. C’est en quelque sorte le produit de notre caractĂšre national qui a encore peur de la vie publique et tient plutĂŽt au foyer. En outre, la vie publique exige un certain art ; il faut s’y prĂ©parer ; il faut beaucoup de conditions. Aussi, l’on prĂ©fĂšre la maison. LĂ , tout est plus simple ; il ne faut aucun art ; on est plus tranquille. Dans le groupe, on vous rĂ©pondra bravement Ă  la question : Quoi de neuf ? La question reçoit tout de suite un sens particulier, et l’on vous rĂ©pond ou par un potin, ou par un bĂąillement, ou par quelque chose qui vous force vous-mĂȘme Ă  bĂąiller cyniquement, magistralement. Dans le groupe, on peut traĂźner de la façon la meilleure et la plus douce une vie utile entre le bĂąillement et le ragot, jusqu’au moment oĂč la grippe, ou bien la fiĂšvre chaude, visite votre demeure ; et vous quittez alors la vie stoĂŻquement, avec indiffĂ©rence, sans savoir comment et pourquoi tout cela Ă©tait avec vous jusqu’alors. Aujourd’hui, dans l’obscuritĂ©, au crĂ©puscule, aprĂšs une triste journĂ©e, plein d’étonnement que tout se soit arrangĂ© ainsi, il semble qu’on ait vĂ©cu, qu’on ait atteint quelque chose, et tout Ă  coup, on ne sait pas pourquoi, il faut quitter ce monde agrĂ©able et sans soucis pour Ă©migrer dans un monde meilleur. Dans certains groupes, d’ailleurs, on parle fortement de la cause. Quelques personnes instruites et bien intentionnĂ©es se rĂ©unissent. On bannit sĂ©vĂšrement tous les plaisirs innocents, comme les potins et la prĂ©fĂ©rence, et, avec un entrain incomprĂ©hensible, on parle de diffĂ©rents sujets trĂšs importants. Enfin, aprĂšs avoir bavardĂ©, parlĂ©, rĂ©solu quelques questions d’utilitĂ© gĂ©nĂ©rale, et aprĂšs avoir rĂ©ussi Ă  imposer aux uns et aux autres une opinion sur toutes choses, le groupe est saisi d’une irritation quelconque et commence Ă  s’affaiblir considĂ©rablement. Finalement, tous se fĂąchent les uns contre les autres. On se dit quelques dures vĂ©ritĂ©s. Quelques caractĂšres tranchants se font jour et tout se termine par la dislocation totale. Ensuite on se calme ; on fait provision de bon sens et, peu Ă  peu, l’on se rĂ©unit de nouveau dans le groupe dĂ©crit ci-dessus. Sans doute il est agrĂ©able de vivre ainsi. Mais Ă  la longue cela devient irritant ; cela irrite fortement.
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Fyodor Dostoevsky
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J'ouvre les yeux. Je ne sais mĂȘme pas comment je fais pour dormir. je ne suis pas fatiguĂ©e, je ne fais rien. J'Ă©vite de penser au moment qui va suivre. C'est tout ce que je fais. Avec acharnement. Ne pas penser que rien ne viendra. Que tout va rester pareil. Une suite infinie de moments vides. Une Ă©ternitĂ©.
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Claudine Dumont (Anabiose)
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RÉPONSES INTERROGATIVES À UNE QUESTION DE MARTIN HEIDEGGER La poĂ©sie ne rythmera plus l'action. Elle sera en avant. RIMBAUD. Divers sens Ă©troits pourraient ĂȘtre proposĂ©s, compte non tenu du sens qui se crĂ©e dans le mouvement mĂȘme de toute poĂ©sie objective, toujours en chemin vers le point qui signe sa justification et clĂŽt son existence, Ă  l'Ă©cart, en avant de l'existence du mot Dieu : -La poĂ©sie entraĂźnera Ă  vue l'action, se plaçant en avant d'elle. L'en-avant suppose toutefois un alignement d'angle de la poĂ©sie sur l'action, comme un vĂ©hicule pilote aspire Ă  courte distance par sa vitesse un second vĂ©hicule qui le suit. Il lui ouvre la voie, contient sa dispersion, le nourrit de sa lancĂ©e. -La poĂ©sie, sur-cerveau de l’action, telle la pensĂ©e qui commande au corps de l'univers, comme l'imagination visionnaire fournit l'image de ce qui sera Ă  l'esprit forgeur qui la sollicite. De lĂ , l'enavant. -La poĂ©sie sera « un chant de dĂ©part ». PoĂ©sie et action, vases obstinĂ©ment communicants. La poĂ©sie, pointe de flĂšche supposant l'arc action, l'objet sujet Ă©troitement dĂ©pendant, la flĂšche Ă©tant projetĂ©e au loin et ne retombant pas car l'arc qui la suit la ressaisira avant chute, les deux Ă©gaux bien qu'inĂ©gaux, dans un double et unique mouvement de rejonction. -L'action accompagnera la poĂ©sie par une admirable fatalitĂ©, la rĂ©fraction de la seconde dans le miroir brĂ»lant et brouillĂ© de la premiĂšre produisant une contradiction et communiquant le signe plus (+) Ă  la matiĂšre abrupte de l’action. -La poĂ©sie, du fait de la parole mĂȘme, est toujours mise par la pensĂ©e en avant de l'agir dont elle emmĂšne le contenu imparfait en une course perpĂ©tuelle vie-mort-vie. -L'action est aveugle, c'est la poĂ©sie qui voit. L'une est unie par un lien mĂšre-fils Ă  1'autre, le fils en avant de la mĂšre et la guidant par nĂ©cessitĂ© plus que par amour. -La libre dĂ©termination de la poĂ©sie semble lui confĂ©rer sa qualitĂ© conductrice. Elle serait un ĂȘtre action, en avant de Faction. -La poĂ©sie est la loi, l'action demeure le phĂ©nomĂšne. L'Ă©clair prĂ©cĂšde le tonnerre, illuminant de haut en bas son théùtre, lui donnant valeur instantanĂ©e. -La poĂ©sie est le mouvement pur ordonnant le mouvement gĂ©nĂ©ral. Elle enseigne le pays en se dĂ©calant. -La poĂ©sie ne rythme plus l'action, elle se porte en avant pour lui indiquer le chemin mobile. C'est pourquoi la poĂ©sie touche la premiĂšre. Elle songe l'action et, grĂące Ă  son matĂ©riau, construit la Maison, mais jamais une fois pour toutes. _ La poĂ©sie est le moi en avant de l'en soi, « le poĂšte Ă©tant chargĂ© de l'HumanitĂ© » (Rimbaud). - La poĂ©sie serait de « la pensĂ©e chantĂ©e ». Elle serait l'Ɠuvre en avant de Faction, serait sa consĂ©quence finale et dĂ©tachĂ©e. -La poĂ©sie est une tĂȘte chercheuse. L'action est son corps. Accomplissant une rĂ©volution ils font, au terme de celle-ci, coĂŻncider la fin et le commencement. Ainsi de suite selon le cercle. -Dans l'optique de Rimbaud et de la Commune, la poĂ©sie ne servira plus la bourgeoisie, ne la rythmera plus. Elle sera en avant, la bourgeoisie ici supposĂ©e action de conquĂȘte. La poĂ©sie sera alors sa propre maĂźtresse, Ă©tant maĂźtresse de sa rĂ©volution; le signal du dĂ©part donnĂ©, l'action en-vue-de se transformant sans cesse en action voyant.
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René Char (Recherche de la base et du sommet)
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« Alors, quelle est la premiĂšre Ă©tape ? Je pourrais ĂȘtre votre assistant, si vous voulez. — Éloignez tout de suite vos mains de mes flacons, espĂšce d’ignare. »
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Astrid Stérin (Automates & Fiançailles (Les Mécagiciennes, #1))
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On ne saura jamais quel a Ă©tĂ© le patient zĂ©ro de l'hystĂ©rie. Le promoteur de cette maladie pourrait ĂȘtre le serpent qui a incitĂ© Eve Ă  donner la pomme dĂ©fendue Ă  Adam. La nuditĂ© leur apparut alors comme une menace, puis la sexualitĂ© comme un danger permanent. L'hystĂ©rie du paradis terrestre Ă©tait alors unisexe et le port de vĂȘtements en a Ă©tĂ© le premier symptĂŽme. Dans l'Égypte pharaonique, l'hystĂ©rie est devenue sexuĂ©e, elle ne concernait plus que le genre fĂ©minin, car la mĂ©decine Ă©tait une exclusivitĂ© masculine. Les maladies oĂč le corps s'exprimait de façon incomprĂ©hensible ne pouvaient toucher que des femmes. Les symptĂŽmes erratiques de l'hystĂ©rie Ă©taient interprĂ©tĂ©s comme une errance de l'utĂ©rus Ă  travers toutes les parties du corps. Pour ramener l'utĂ©rus Ă  sa place, les mĂ©decins prescrivaient des fumigations de cire brĂ»lĂ©e Ă  l'entrĂ©e du vagin. On ignore les rĂ©sultats de cette mĂ©thode; on peut au moins supposer que le mal changeait de nature. Plus tard, c'est l'exorcisme qui devint le traitement idĂ©al, suite au diagnostic allĂ©guant une possession du corps par le dĂ©mon. Il s'agissait toujours du corps des femmes, car les thĂ©rapeutes, tous mĂąles, Ă©taient Ă©galement prĂȘtres et ne pouvaient ĂȘtre pĂ©nĂ©trĂ©s par le dĂ©mon, ou alors avec la discrĂ©tion qui convient aux hommes d'Église. Beaucoup plus tard, quand les symptĂŽmes de l'hystĂ©rie ont Ă©tĂ© mis en Ă©vidence chez les mĂąles sapiens, il a bien fallu innocenter l'utĂ©rus et le dĂ©mon. On a alors choisi le cerveau comme siĂšge de la maladie; il eĂ»t Ă©tĂ© inconvenant de choisir la prostate ou les testicules.
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Luc Perino (Patients zéro - Histoires inversées de la médecine)
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Il n'existe aucun moyen de vĂ©rifier quelle dĂ©cision la bonne car il n’existe aucune comparaison. Tout est vĂ©cu tout de suite pour la premiĂšre fois et sans prĂ©paration. [
] Mais que peut valoir la vie, si la premiĂšre rĂ©pĂ©tition de la vie et dĂ©jĂ  la vie mĂȘme ? C'est ce qui fait que la vie ressemble toujours Ă  une esquisse. Mais mĂȘme « esquisse » n'est pas le mot juste, car une esquisse et toujours l’ébauche de quelque chose, la prĂ©paration d'un tableau, tandis que l'esquisse qu’est notre vie est une esquisse de rien, une Ă©bauche sans tableau. Tomas se rĂ©pĂšte le proverbe allemand : einmal ist keinmal une fois ne compte pas, une fois c'est jamais. Ne pouvoir vivre qu'une vie c'est comme ne pas vivre du tout.
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Milan Kundera (The Unbearable Lightness of Being)
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Il n'existe aucun moyen de vĂ©rifier quelle dĂ©cision est la bonne car il n'existe aucune comparaison. Tout est vĂ©cu tout de suite pour la premiĂšre fois et sans prĂ©paration. [...] Mais que peur valoir la vie, si la premiĂšre rĂ©pĂ©tition de la vie est dĂ©jĂ  la vie mĂȘme? C'est ce qui fait que la vie ressemble toujours Ă  une esquisse. Mais mĂȘme "esquisse" n'est pas le mot juste, car une esquisse est toujours l'Ă©bauche de quelque chose, la prĂ©paration d'un tableau, tandis que l'esquisse qu'est notre vie est une esquisse de rien, une Ă©bauche sans tableau. Tomas se rĂ©pĂšte le proverbe allemand : einmal ist keinmal, une fois ne compte pas, une fois c'est jamais. Ne pouvoir vivre qu'une vie, c'est comme ne pas vivre du tout.
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Milan Kundera (The Unbearable Lightness of Being)
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connaĂźt, aprĂšs le procĂšs des Fleurs du mal, le sort d’un homme « public », certes, mais stigmatisĂ©, exclu de la bonne sociĂ©tĂ© et des salons que frĂ©quente Flaubert et mis au ban de l’univers littĂ©raire par la grande presse et les revues. En 1861, la seconde Ă©dition des Fleurs du mal est ignorĂ©e par la presse, donc par le grand public, mais impose son auteur dans les milieux littĂ©raires, oĂč il conserve de nombreux ennemis. Par la suite continue de dĂ©fis qu’il lance aux bien-pensants, dans sa vie autant que dans son Ɠuvre, Baudelaire incarne la position la plus extrĂȘme de l’avant-garde, celle de la rĂ©volte contre tous les pouvoirs et toutes les institutions, Ă  commencer par les institutions littĂ©raires.
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Pierre Bourdieu (Les RÚgles de l'art. GenÚse et structure du champ littéraire (LIBRE EXAMEN) (French Edition))
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MĂȘme le grand TolstoĂŻ, vous savez ce qu’il disait Ă  Gorki? « Quand je serai Ă  mi-corps dans la tombe, je dirai ce que je pense des femmes, et tout de suite je refermerai sur moi la pierre tombale! »
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Henry de Montherlant
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Fort heureusement, mĂȘme si la volontĂ© accordĂ©e la naissance est faible, il est toujours possible de la renforcer. Il s'agit de la dĂ©velopper petit petit et cela peut prendre beaucoup de temps, ce qui est aussi le cas pour la force physique. Au dĂ©but, on peut avoir l'impression que rien ne change. Le doute, la paresse, l'envie de tout abandonner peuvent alors commencer Ă  se manifester. Mais il faut les combattre, serrer les dents et persĂ©vĂ©rer. Et au moment oĂč on se dit que rien ne changera jamais, il se produit un Ă©vĂ©nement qui nous fait dĂ©couvrir qu'on est diffĂ©rent de celui qu'on Ă©tait avant. On continue de faire des efforts, dans une succession de jours monotones, et soudain, on dĂ©couvre que celui qu'on est devenu est encore diffĂ©rent de celui qu'on Ă©tait jusqu'Ă  maintenant, et ainsi de suite. Grand-mĂšre s'interrompit quelques secondes. Mais la grande diffĂ©rence avec l'entraĂźnement physique ou le dĂ©veloppement d'autres compĂ©tences, c'est qu'il est plus facile d'Ă©chouer, car ce sont souvent ceux qui manquent de volontĂ© qui veulent relever le dĂ©fi, conclut-elle lentement.
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Nashiki (Un'estate con la Strega dell'Ovest)
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Rassemblez tout votre courage à deux mains et écoutez-moi: quelque chose est fini. Maintenant, le plus dur étant fait, écoutez la suite. J'en aime un autre - on ne peut pas dire plus simple, plus brutal et plus juste. Ai-je cessé de vous aimer? Non, vous n'avez pas changé et je n'ai pas changé - non plus. Une seule chose a changé: ma concentration névralgique sur vous. Vous n'avez pas cessé d'exister pour moi, j'ai cessé d'exister en vous. Mon heure avec vous s'est achevée, reste mon éternité avec vous. Oh, attardez-vous un peu là-dessus! En dehors des passions, il y a encore l'immensité. C'est dans l'immensité qu'a lieu désormais notre rencontre.
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Marina Tsvetaeva (Vivre dans le feu)
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Je ne sais pas faire autrement, l'Histoire m'a choisie, mastiquée, déchiquetée, recrachée survivante, et plutÎt que de la fuir, de me soigner aux sentiments et aux passions intimes, je ne peux vivre sans elle, je la longe comme on suit un cours d'eau par peur de me perdre. J'ai vécu, aimé et travaillé tout prÚs d'elle.
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Marceline Loridan-Ivens (L'Amour aprĂšs)
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AprĂšs, nous sommes restĂ©s enlacĂ©s, l’un contre l’autre, fronts joints. Il aurait fallu que cela ne cesse jamais. Je voulais refermer les yeux mais, en mĂȘme temps, je ne le voulais pas, parce que dĂšs lors, je ne l’aurais plus vu. Je voulais tout, tout de suite, pour toujours
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Sarah Sprinz (In unserem Universum sind wir unendlich)
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Le regard de Cadenat se voila. — Oui. Nous nous sommes connus Ă  la Foire du livre de Londres il y a cinq ans. Elle la couvrait pour son blog, et moi, quoique retraitĂ©, j’étais au stand de ma maison d’édition. Nous nous sommes liĂ©s tout de suite. Vous me direz : que peuvent donc avoir en commun un homme de soixante-dix ans passĂ©s et une femme de mĂȘme pas trente ans ? Les livres bien sĂ»r ! Il n’y a pas d’ñge pour ça. Nous avons causĂ© littĂ©rature, poĂ©sie, et peu Ă  peu la conversation a glissĂ© vers les voyages. Les vrais, pas ceux de papier. J’ai mentionnĂ© que j’avais une maison en GrĂšce oĂč je passais mes vacances et elle m’a demandĂ© de la dĂ©crire. Sa voix se brisa sous le poids du souvenir. — Elle m’a dit « Ça ressemble au paradis »
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Christos Markogiannakis (ΜυΞÎčστόρηΌα ΌΔ ÎșλΔÎčÎŽÎŻ)
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Nous avions pour reprĂ©sentant Ă  Madrid un ancien dĂ©magogue, dĂ©pourvu de toute influence, et qui n'a laissĂ© aucun nom dans la carriĂšre diplomatique, oĂč les Ă©vĂ©nements l'avaient jetĂ© par hasard.
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Adolphe Thiers (Histoire du Consulat et de l'Empire, (Vol. 1 / 20) faisant suite à l'Histoire de la Révolution Française (French Edition))
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Jessica regarde autour d’elle, verse comme par rĂ©flexe quelques doses de dĂ©sinfectant sur ses paumes, qu’elle frotte fort l’une contre l’autre. Elle n’a pas spĂ©cialement peur des bactĂ©ries, aprĂšs tout elle a passĂ© pas mal de temps dans des hĂŽpitaux et des morgues pour son travail. Mais ce dont elle a peur en ce moment, c’est l’inaction totale, l’attente les mains dans les poches. Depuis la veille, elle se sent Ă  nu, Ă  dĂ©couvert, comme une cible : c’est pour ça qu’elle ne veut pas s’arrĂȘter, qu’elle reste en mouvement. Il est plus difficile d’atteindre une cible en mouvement. Toutes les victimes lui ressemblent d’une façon ou d’une autre : elles sont plutĂŽt jeunes, brunes, Ă©lancĂ©es. En outre, elle sait qu’elle a des ennemis. En octobre dernier, Jessica est devenue relativement cĂ©lĂšbre aprĂšs avoir menĂ© comme inspectrice en chef une affaire oĂč deux jeunes d’un groupe de motards avaient Ă©tĂ© incarcĂ©rĂ©s pour prĂ©somption de meurtre. Mais plus elle y rĂ©flĂ©chit, plus elle se dit qu’il n’y a aucun motard aigri derriĂšre cette histoire de sorciĂšres, ni personne d’autre, dont Jessica se serait attirĂ© la colĂšre Ă  la suite d’une incarcĂ©ration. Au contraire, la vision de la silhouette cornue sur la glace lui a rappelĂ© quelque chose qu’elle essaie d’oublier depuis prĂšs de quinze ans.
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Max Seeck (The Witch Hunter (Jessica Niemi, #1))
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c'est important les apparences mĂȘme si on est tout croche en dedans et qu'on a l'impression qu'une cour Ă  scrap a plus d'allure que sa vie si on a l'air bien du dehors c'est ok tant que la vie extĂ©rieure suit son cours tant qu'on a du rouge Ă  lĂšvres du cafĂ© du rimmel du fond de teint des chandails avec le col en V des tatouages inutiles tout baigne
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Nicholas GiguĂšre (Queues)
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Mais cette fois-ci, je ne parvins pas à me détourner. Pas tout de suite. Parce que fermer les yeux n'effacerait pas ses cicatrices et la souffrance endurée.
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L.C. Blake (Princesse déchue : La reine sans couronne)
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Une pensĂ©e horrible traversa l’esprit de Caroline : C’est une liste de condamnĂ©s. Quelqu’un nous a marquĂ©s du sceau de la mort. Cela lui vint de maniĂšre automatique, tout comme elle pensait automatiquement, chaque fois que le tĂ©lĂ©phone sonnait, qu’on l’appelait pour lui annoncer une indicible tragĂ©die. Elle relut la liste, puis rit intĂ©rieurement de sa propre morbiditĂ©. Évidemment, s’il s’agissait d’une liste de personnes vivantes, alors tous ces gens Ă©taient condamnĂ©s Ă  mourir, tĂŽt ou tard. Il n’empĂȘche que cette lettre avait quelque chose d’inhabituel et d’angoissant ; elle lui rappelait un roman de Muriel Spark : Memento Mori. Sans doute dĂ©cortiquait-elle trop ce qui n’était sĂ»rement qu’une banale suite de noms.
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Peter Swanson (Neuf Vies)
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En entrant dans la maison, j’ai couru dans les escaliers bruyamment et je me suis tout de suite mise Ă  Ă©crire un poĂšme d’amour. J’étais inspirĂ©e comme dix! Le morceau de papier est encore cachĂ© entre mon matelas et mon sommier. Je l’ai parfumĂ© avec ma vieille eau de toilette. Des fois, ça sent la gomme balloune en plein milieu de la nuit et ça me rappelle que le poĂšme dort lĂ ..
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Sarah-Maude Beauchesne (CƓur de slush (CƓur de slush, #1))
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expression tout de suite. His tongue
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Dan J. Marlowe (The Name of the Game is Death)
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Fils, s'il t'est donnĂ© de vivre, tu rencontreras sur ta route des hommes qui sont suivis par des troupeaux de montagnes. Des hommes qui arrivent dans des pays, nus et crus. On remarque Ă  peine que leurs mains ouvertes Ă©clairent l'ombre comme des veilleuses. Quand on le remarque. Et voilĂ  que les montagnes se lĂšvent et marchent Ă  leur suite. Et voilĂ  que tous les mĂ©caniciens de raison tapent du poing sur leurs tables. VoilĂ  qu'ils crient : « Il y a dix ans que je cherche des formules, dix ans que je noircis du papier, dix ans que j'use des arithmĂ©tiques. Dix ans que je cherche le bouton secret ». Et celui-lĂ  est arrivĂ© et il a dit tout simplement : « Montagne » et puis la montagne s'est dressĂ©e. OĂč est la justice ? « Elle est lĂ , fiston la justice. L'espĂ©rance
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Jean Giono (Blue Boy)
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La grotte Pourquoi le Coran, dĂ©crivant l'Ă©tat des jeunes hommes, indique qu'ils inspirent une telle crainte que "si tu les apercevais, tu leur tournerais le dos pour t'enfuir"? On explique habituellement la raison de leur aspect si terrible par leur chevelure, leurs barbes et leurs ongles qui auraient tellement poussĂ© que ces jeunes ressembleraient aux hommes des cavernes. Cette explication n'est pas acceptable (...) quand ils sont revenus Ă  eux-mĂȘmes, Ă  leur conscience normale, ils ne semblaient pas ĂȘtre choquĂ©s les uns par les aspects des autres et Ă©taient persuadĂ©s de n'ĂȘtre restĂ©s plus d'une journĂ©e dans leur Ă©tat d'inconscience. (...) "Qu'est ce que ces jeunes faisaient dans la grotte? Est-ce qu'ils dormaient? PrĂ©server la foi et la fortifier - principal but de cette retraite - peut il se rĂ©aliser simplement par un long et profond sommeil? Est ce que la "rahma" et le "rachad" que Dieu leur a promis se ramĂšnent simplement Ă  dormir?" A aucun moment le texte coranique ne laisse entendre que ces gens Ă©taient allongĂ©s. Le chien lui Ă©tait allongĂ©. Par contre ces gens, qui sont lĂ  - rappelons le- pour assumer leur "destin vertical" de liaison entre ciel et terre, semblent d'aprĂšs la description du coran debout ou du moins assis. "Tu croirais qu'ils sont Ă©veillĂ©s mais ils dorment" dit le Coran. Si les jeunes Ă©taient allongĂ©s, tu ne croirais pas qu'ils sont Ă©veillĂ©s. Par contre, si tu les trouves assis ou debout tu penserais qu'ils sont Ă©veillĂ©s, surtout qu'ils ne cessent de bouger (nous les tournons Ă  droite et Ă  gauche). D'aprĂšs la description du Coran nous imaginons une scĂšne oĂč des jeunes debout ou assis, remuant Ă  droite et Ă  gauche, apparemment ils sont donc Ă©veillĂ©s, mais intĂ©rieurement ils sont dans un profond "sommeil" c'est Ă  dire dans un Ă©tat second, autrement dit un Ă©tat extatique. C'est cet Ă©tat trĂšs inhabituel qui provoquerait l'inquiĂ©tude d'un Ă©ventuel visiteur non averti, lequel penserait tout de suite qu'il s'agit d'un groupe de fous en plein dĂ©lire
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Ben Rochd Er Rachid (Coran - Lecture soufie contemporaine)
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On connaĂźt la considĂ©rable contribution de la psychanalyse Ă  cette bĂȘtise modernisĂ©e. Le seul effet de la cure psychanalytique Ă©tait dĂ©jĂ  de transformer le patient en analyste, capable de gloser indĂ©finiment sur ses malheurs. Et la psychanalyse peut bien dĂ©cliner en tant que petit commerce,elle s'est pleinement rĂ©alisĂ©e dans la fausse conscience de ce temps: le commentaire perpĂ©tuel et « l'analyse interminable» sont pris en charge par tout un chacun, dans l'impuissance gĂ©nĂ©rale Ă  intervenir sur sa vie, Ă  trancher. A ceux qui ne trouvent pas eux mĂȘmes leurs raisons dans ce qu'ils vivent directement, il faut toujours plus d'idĂ©es pour ne pas vivre: ils perfectionnent sans cesse leur ignorance au prĂšs des experts, c'est-Ă -dire de ceux qu'ils croient tels. L'existence n'est plus alors qu'une longue suite de« stages de formation» au cours desquels on accumule des connaissances, on thĂ©saurise des capacitĂ©s, pour la jouissance d'une vie imaginaire. L'EncyclopĂ©die des Nuisances, N°7.
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Encyclopedie des Nuisances
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– Bah alors, c’est ce que je dis, avec la dotation qu’on a, ajouta Făneață puis il se leva pour prendre le livre le plus Ă©pais de la pile la plus proche. Il se trouva que c’était La Montagne magique. – Ça fera l’affaire, dit-il le travailleur en se rasseyant Ă  table. Il a suffisamment de pages pour que personne ne remarque que nous en avons dĂ©chirĂ© quelques-unes. – Mon frĂšre, t’es vraiment mortel. Laisse donc ce livre en paix, nom de Dieu
 Nicu s’opposa pour la derniĂšre fois, l’image de son camarade en cerbĂšre le fit Ă©clater de rire. Une considĂ©ration de folie. – Tiens, avant de le dĂ©plumer, lis au moins ce qu’il y a d’écrit, qu’on entende nous aussi. Făneață fourra son doigt Ă©pais au cƓur du livre et lut lĂ  oĂč ses yeux se posĂšrent : – Qu’est-ce que le corps ! Ă©clata-t-il avec une impĂ©tositĂ© soudaine. Qu’est-ce que la chair ! Qu’est-ce que le corps humain ! De quoi est-il constitué ! Monsieur le conchilier aulique, dites-le nous tout de suite, cet aprĂšs-midi mĂȘme. Dites-le-nous une fois pour tourtes et le plus Ă©chactement, pour que nous le sachions. ÉcƓurĂ© par la lecture, il s’arrĂȘta, et ne cacha pas son Ă©tonnement : certains sont prĂȘts Ă  jeter leur argent par les fenĂȘtres pour n’importe quoi. – Mon petit Nicu, c’est ainsi quand l’homme a trop de temps libre, qu’il ne travaille mĂȘme pas. Il est lĂ  Ă  se faire des idĂ©es, et ceux qui se font passer pour cultivĂ©s font la file d’attente pour acheter quelque livre comme celui-lĂ . Chiche qu’on va montrer Ă  m’sieur l’écrivain – il fit une pause pour lire le nom de celui-ci sur la couverture – ce que c’est-ce que la viande, car je vois que l’honorable dit ne pas le savoir. Passe-moi les saucisses, va ! Puis il arracha soigneusement quelques pages sur lesquelles il dĂ©posa fromage et lĂ©gumes en se vantant auprĂšs de Nicu que lui Ă©tait un garçon de salon et que l’on n’aurait dĂ©chirĂ© des feuilles que de lĂ -bas, de l’introduction, partie que personne ne lit. – De la critique.
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Călin Torsan (Brocs en stock (French Edition))
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Ma sƓur est d'une totale instabilitĂ© d'humeur. (
) Elle entamait une histoire d'amour clandestine avec un encadreur. Dans l'euphorie des dĂ©buts, elle venait de s'acheter une laisse et un collier de soumission. Il fallait qu'elle m'entraine tout de suite Ă  part pour me montrer le kit sur son portable. Elle avait aussi envie d'un martinet, elle en avait vu un trĂšs joli sur internet, un knout Ă  quatre brins montĂ©s sur un manche croco. Mais il valait cinquante-quatre euros et il y avait Ă©crit: attention objet TRES cinglant. J'ai voulu voir la tĂȘte de l'encadreur mais elle n'avait pas de photo. Il avait soixante-quatre ans, cinq de plus qu'elle, mariĂ©, des bras costauds car il faisait de l'aviron, m'a-t-elle dit, et tatouĂ©s. J'ai pensĂ©, et pourquoi aucun mec tatouĂ© avec un fouet ne survient dans ma vie?
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Yasmina Reza (Babylone)
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Encore aujourd'hui, il m'arrive d'entendre, le soir, une voix qui m'appelle par mon prénom, dans la rue. Une voix rauque. Elle traßne un peu sur les syllabes et je la reconnais tout de suite: la voix de Louki.
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Patrick Modiano (Dans le café de la jeunesse perdue)
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En Union SoviĂ©tique, quand quelque chose ne va pas, dans un domaine d’activitĂ© quelconque, on pense d’abord structures. On l’a vu en aoĂ»t 1972, aprĂšs le sĂ©vĂšre rĂ©quisitoire du ComitĂ© Central du Parti contre la production cinĂ©matographique. Des mesures de rĂ©organisation avaient tout de suite Ă©tĂ© prises. Un nouveau patron Ă©tait nommĂ© Ă  la tĂȘte de Goskino. Deux mois plus tard, l’Union des CinĂ©astes se rĂ©unissait Ă  Moscou. Un dĂ©bat trĂšs libre s’ouvrait qui Ă©tonnait les correspondants Ă©trangers par sa franchise. On y entendait Alexandre Medvedkine (Le Bonheur) s’interroger sur la notion de « film politique ». En mĂȘme temps qu’étaient critiquĂ©es certaines mesures de rĂ©organisation, on se fĂ©licitait de la crĂ©ation d’un « studio central des scĂ©narios » susceptible d’assainir les rapports (difficiles, paraĂźt-il) entre scĂ©naristes et rĂ©alisateurs. Mais l’interrogation majeure de cette rencontre Ă©tait : « Existe-t-il un cinĂ©ma pour les masses et un cinĂ©ma pour les Ă©lites ? ». On conviendra que c’était lĂ  une question d’importance. Surtout en Union SoviĂ©tique. RĂ©pondre oui c’était reconnaĂźtre l’existence possible de plusieurs publics avec ce que cela implique de consĂ©quences sur la conception, la production, la distribution des films dans un appareil d’État qui fait volontiers du populisme une vertu.
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Gaston Haustrate (CinĂ©ma 73 : Le CrĂ©puscule des Dieux, L'HomosexualitĂ© Ă  L'Écran, Le CinĂ©ma SoviĂ©tique en Questions (N°175 - Avril 1973))
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Le simple vit comme il respire, sans plus d’efforts ni de gloire, sans plus d’effets ni de honte. La simplicitĂ© n’est pas une vertu qui s’ajouterait Ă  l’existence. C’est l’existence mĂȘme, en tant que rien ne s’y ajoute [...]. Sans autre richesse que tout. Sans autre trĂ©sor que rien. SimplicitĂ© est libertĂ©, lĂ©gĂšretĂ©, transparence. Simple comme l’air, libre comme l’air [...]. Le simple ne se prend ni au sĂ©rieux ni au tragique. Il suit son bonhomme de chemin, le cƓur lĂ©ger, l’ñme en paix, sans but, sans nostalgie, sans impatience. Le monde est son royaume, qui lui suffit. Le prĂ©sent est son Ă©ternitĂ©, qui le comble. Il n’a rien Ă  prouver, puisqu’il ne veut rien paraĂźtre. Ni rien Ă  chercher, puisque tout est lĂ . Quoi de plus simple que la simplicité ? Quoi de plus lĂ©ger ? C’est la vertu des sages, et la sagesse des saints5.
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Matthieu Ricard (Plaidoyer pour le bonheur)
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Sous le rapport qui intĂ©resse l’Occident, le Cheikh Elish semble avoir eu aussi une certaine connaissance de la situation de la Maçonnerie et de son symbolisme initiatique. C'est ainsi que RenĂ© GuĂ©non nous Ă©crivait une fois que le Cheikh Elish « expliquait Ă  ce propos la correspondance des lettres du nom d’Allah par leurs formes respectives, avec la rĂšgle, le compas, l’équerre et le triangle ». Ce que disait ainsi le Cheikh Elish pourrait avoir un rapport avec l’une des modalitĂ©s possibles de la revivification initiatique de la Maçonnerie. En tout cas. par la suite, une bonne part des articles de son grand disciple a Ă©tĂ© consacrĂ©e au symbolisme et Ă  la doctrine initiatique maçonnique. et cet important travail apparaĂźtra de toutes façons comme une contribution de l’intellectualitĂ© et de l’universalitĂ© de l'Islam, car RenĂ© GuĂ©non s'appelait alors depuis longtemps Abdel-WĂ hid Yahya et Ă©tait lui-mĂȘme une autoritĂ© initiatique islamique.
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Michel Vùlsan (L'Islam et la fonction de René Guénon)
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On reproche Ă  la religion d'ĂȘtre incapable de rĂ©soudre les « problĂšmes de notre temps », mais on ne se rend pas compte, premiĂšrement que la religion n'a en vue que les problĂšmes de toujours, et deuxiĂšmement, que nul ne rĂ©soudra les problĂšmes nouveaux, et ne serait-ce que parce que chaque solution engendre, sur ce plan ou Ă  ce niveau, de nouveaux problĂšmes. Au XIXe siĂšcle, la machine — celle qui combine le « fer » et le « feu » — Ă©tait censĂ©e rĂ©soudre une fois pour toutes le problĂšme du travail ; les sĂ©rums devaient abolir la maladie, et ainsi de suite ; or les rĂ©sultats rĂ©els nous incitent Ă  faire remarquer qu'un faiseur de pluie ne doit ni ĂȘtre inefficace, ni provoquer une inondation. Il est du reste contradictoire de vouloir abolir le travail et ensuite de le glorifier au point d'en faire une religion.
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Frithjof Schuon (The Transfiguration of Man)