Pu La Quotes

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P.L. Deshpande
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la vérité, c'est une agonie qui n'en finit pas. La vérité de ce monde, c'est la mort. Il faut choisir, mourir ou mentir. Je n'ai jamais pu me tuer moi
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Louis-Ferdinand Céline (Journey to the End of the Night)
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En effet: je mourais dĂ©jĂ . Je venais d'apprendre cette nouvelle horrible que tout humain apprend un jour ou l'autre: ce que tu aimes, tu vas le perdre. "Ce qui t'a Ă©tĂ© donnĂ© te sera repris." Face Ă  la dĂ©couverte de cette spoliation future, il y a deux attitudes possibles: soit on dĂ©cide de ne pas s'attacher aux ĂȘtres et aux choses, afin de rendre l'amputation moins douloureuse; soit on dĂ©cide, au contraire, d'aimer d'autant plus les ĂȘtres et les choses, d'y mettre le paquet - "puisque nous n'aurons pas beaucoup de temps ensemble, je vais te donner en un an tout l'amour que j'aurais pu te donner en une vie.
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Amélie Nothomb (Métaphysique des tubes)
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Les roses de Saadi J'ai voulu ce matin te rapporter des roses ; Mais j'en avais tant pris dans mes ceintures closes Que les noeuds trop serrés n'ont pu les contenir. Les noeuds ont éclaté. Les roses envolées Dans le vent, à la mer s'en sont toutes allées. Elles ont suivi l'eau pour ne plus revenir ; La vague en a paru rouge et comme enflammée. Ce soir, ma robe encore en est tout embaumée... Respires-en sur moi l'odorant souvenir.
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Marceline Desbordes-Valmore
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Pauvres créatures! Si c'est un tort de les aimer, c'est bien le moins qu'on les plaigne. Vous plaignez l'aveugle qui n'a jamais vu les rayons du jour, le sourd qui n'a jamais entendu les accords de la nature, le muet qui n'a jamais pu rendre la voix de son ùme, et, sous un faux prétexte de pudeur, vous ne voulez pas plaindre cette cécité du coeur, cette surdité de ùme, ce mutisme de la conscience qui rendent folle la malheureuse affligée et qui la font malgré elle incapable de voir le bien, d'entendre le Seigneur et de parler la langue pure de l'amour et de la foi.
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Alexandre Dumas fils (La dame aux camélias)
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Moi qui d'abord ne trouvais de goût qu'au passé, la subite saveur de l'instant m'a pu griser un jour, pensai-je, mais le futur désenchante l'heure présente, plus encore que le présent ne désenchanta le passé...
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André Gide (The Immoralist)
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Antoine n'avait pas pu ĂȘtre alcoolique. Il prit comme remĂšde de substitution la rĂ©solution de se suicider. Être alcoolique avait Ă©tĂ© sa derniĂšre ambition d'intĂ©gration sociale, se donner la mort Ă©tait l'ultime moyen qu'il voyait pour participer au monde. ("Comment devenir stupide", p41)
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Martin Page (Comment je suis devenu stupide)
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Angélique Sookie, toi qui es la beauté et la grùce incarnées, pardonne-moi. Je suis accablé à l'idée que cette ménade malfaisante et démoniaque ait pu oser violenter ce corps parfait et voluptueux qui est le tien, dans l'intention de faire parvenir un message à mon indigne et misérable personne.
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Charlaine Harris (Living Dead in Dallas (Sookie Stackhouse, #2))
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L'humour ne sauve pas; l'humour ne sert en dĂ©finitive Ă  peu prĂšs Ă  rien. On peut envisager les Ă©vĂšnements de la vie avec humour pendant des annĂ©es, parfois de trĂšs longues annĂ©es, dans certains cas on peut adopter une attitude humoristique jusqu'Ă  la fin; mais en dĂ©finitive la vie vous brise le coeur. Quelles que soient les qualitĂ©s de courage, de sang froid et d'humour qu'on a pu dĂ©velopper tout au long de sa vie, on finit toujours par avoir le coeur brisĂ©. Alors on s'arrĂȘte de rire. Au bout du compte il n'y a plus que la solitude, le froid et le silence. Au bout du compte il n'y a plus que la mort.
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Michel Houellebecq (The Elementary Particles)
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Admettons que tu aies résolu l'énigme de la création. Quel est ton destin? Admettons que tu aies pu dépouiller de toutes ses robes la Vérité. Quel est ton destin? Admettons que tu aies vécu cent ans, heureux, et que tu vives cent ans encore. Quel est ton destin?
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Omar KhayyĂĄm (Rubaiyat of Omar Khayyam)
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J'ai Ă©coutĂ© le sermon du prĂȘtre qui officiait devant la tombe de ma mĂšre. On ne perd jamais ses parents, mĂȘme aprĂšs leur mort ils vivent encore en vous. Ceux qui vous ont conçu, qui vous ont donnĂ© tout cet amour afin que vous surviviez ne peuvent pas disparaĂźtre. Le prĂȘtre avait raison, mais l'idĂ©e de savoir qu'il n'est plus d'endroit dans le monde oĂč ils respirent, que vous n'entendrez plus leur voix, que les volets de votre maison d'enfance seront clos Ă  jamais, vous plonge dans une solitude que mĂȘme Dieu n'avait pu concevoir.
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Marc Levy (Le Voleur d'ombres)
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J'aurais pu lutter contre la cocaĂŻne et lui rĂ©sister dans un seul cas: celui oĂč la sensation de bonheur aurait Ă©tĂ© dĂ©terminĂ©e chez moi moins par la rĂ©alisation de l'Ă©vĂ©nement extĂ©rieur que par le travail, la peine, les efforts qu'il aurait fallu fournir pour y arriver. Mais je n'avais pas cela dans ma vie.
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M. Agueev (Novel with Cocaine (European Classics))
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La littérature, il me semble, est tournée vers ce qui a disparu, ou bien ce qui aurait pu advenir et n'est pas advenu, voilà pourquoi les temps modernes, si épris d'un advenir sans mémoire, lui sont si hostiles.
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Olivier Rollin
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adore à genoux quand on n'a pas pu l'enterrer sous la boue. La corruption est en force, le talent est rare. Ainsi, la corrup- tion est l'arme de la médiocrité qui abonde, et vous en sentirez partout la pointe.
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Honoré de Balzac (PÚre Goriot)
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Oh! tout ce que nous n'avons point fait et que pourtant nous aurions pu faire...penseront-ils, sur le point de quitter la vie. - Tout ce que nous aurions dĂ» faire et que pourtant nous n'avons point fait! par souci des considĂ©rants, par temporisation, par paresse, et pour s'ĂȘtre trop dit: "Bah! nous aurons toujours le temps." Pour n'avoir pas saisi le chaque jour irremplaçable, l'irretrouvable chaque instant. Pour avoir remis Ă  plus tard la dĂ©cision, l'effort, l'Ă©treinte... L'heure qui passe est bien passĂ©e? -Oh! toi qui viendras, penseront-ils, sois plus habile: Saisis l'instant!
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André Gide
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Il y a des livres que l’on rate, comme certaines rencontres, on passe Ă  cĂŽtĂ© d’histoires et de gens qui auraient pu tout changer. À cause d’un malentendu, d’une couverture, ou d’un rĂ©sumĂ© passable, d’un a priori. Heureusement que parfois, la vie insiste.
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Valérie Perrin (Trois)
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Quelques crimes toujours prĂ©cĂšdent les grands crimes. Quiconque a pu franchir les bornes lĂ©gitimes Peut violer enfin les droits les plus sacrĂ©s; Ainsi que la vertu, le crime a ses degrĂ©s, Et jamais on n'a vu la timide innocence Passer subitement Ă  l'extrĂȘme licence.
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Jean Racine (PhĂšdre)
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L'homme lutte contre la peur mais, contrairement Ă  ce qu'on rĂ©pĂšte toujours, cette peur n'est pas celle de la mort, car la peur de la mort, tout le monde ne l'Ă©prouve pas, certains n'ayant aucune imagination, d'autres se croyant immortels, d'autres encore espĂ©rant des rencontres merveilleuses aprĂšs leur trĂ©pas ; la seule peur universelle, la peur unique, celle qui conduit toutes nos pensĂ©es, car la peur de n'ĂȘtre rien. Parce que chaque individu a Ă©prouvĂ© ceci, ne fĂ»t-ce qu'une seconde au cours d'une journĂ©e : se rendre compte que, par nature, ne lui appartient aucune des identitĂ©s qui le dĂ©finissent, qu'il aurait pu ne pas ĂȘtre dotĂ© de ce qui le caractĂ©rise, qu'il s'en est fallu d'un cheveu qu'il naisse ailleurs, apprenne une autre langue, reçoive une Ă©ducation religieuse diffĂ©rente, qu'on l'Ă©lĂšve dans une autre culture, qu'on l'instruise dans une autre idĂ©ologie, avec d'autres parents, d'autres tuteurs, d'autres modĂšles. Vertige !
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Éric-Emmanuel Schmitt
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Sascha era un arco iris dentro de Ă©l, una fontana resplandeciente de una belleza tal, que Lucas se sintiĂł bendecido por tener la posibilidad de verla. Por un instante sus mentes fueron una sola y vio cuĂĄn desesperada, salvaje e irracionalmente le amaba Sascha... lo suficiente como para romper su promesa, para elegir morir a fin de que Ă©l puÂŹdiera vivir. Sascha vio hasta quĂ© punto la pantera la adoraba, que su corazĂłn latĂ­a solo por ella y que la vida darĂ­a paso a la muerte despuĂ©s de que ella se hubiera ido. La bestia estaba furiosa con ella por intentar arrebatarle a su compañera y el hombre lo estaba aĂșn mĂĄs, pero bajo toda esa ira habĂ­a deseo, necesidad, amor. Un amor tan intenso y abrasador que no tenĂ­a principio ni fin.
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Nalini Singh (Slave to Sensation (Psy-Changeling, #1))
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Depuis que tu es partie, j’ai pu compter jusqu’au sept millions neuf cent quarante-huit mille cents. Tu as eu le temps d’aller te cacher loin. Je cherche partout. Je ne te trouve pas, je dĂ©sespĂšre. La partie de cache-cache dure trop longtemps. Allez, tu as gagnĂ©, tu peux sortir de ta cachette. Je t’en supplie. J’ai perdu. J’ai tout perdu.
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Jean-Louis Fournier (Veuf (La Bleue) (French Edition))
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Joseph Voilà c'que c'est, mon vieux Joseph Que d'avoir pris la plus jolie Parmi les filles de Galilée Celle qu'on appelait Marie Tu aurais pu, mon vieux Joseph Prendre Sarah ou Déborah Et rien ne serait arrivé Mais tu as préféré Marie Tu aurais pu, mon vieux Joseph Rester chez toi, tailler ton bois PlutÎt que d'aller t'exiler Et te cacher avec Marie Tu aurais pu, mon vieux Joseph Faire des petits avec Marie Et leur apprendre ton métier Comme ton pÚre te l'avait appris Pourquoi a-t-il fallu, Joseph Que ton enfant, cet innocent Ait eu ces étranges idées Qui ont tant fait pleurer Marie Parfois je pense à toi, Joseph Mon pauvre ami, lorsque l'on rit De toi qui n'avais demandé Qu'à vivre heureux avec Marie
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Georges Moustaki
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J'aurais pu adhérer au Front National, mais à quoi bon manger de la choucroute avec des cons?
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Michel Houellebecq (The Elementary Particles)
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Dieu n'a pu créer qu'en se cachant. Autrement il n'y aurait que lui.
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Simone Weil (La pesanteur et la grace (annoté-illustré): Des citations fulgurantes (French Edition))
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L'homme ne s'avise de la réalité que quand il l'a représentée. Et rien, jamais, n'a pu mieux la représenter que le théùtre.
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Pier Paolo Pasolini (Affabulazione)
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Ainsi cependant vous avez pu vivre cet amour de la seule façon qui puisse se faire pour vous, en le perdant avant qu'il soit advenu.
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Marguerite Duras (The Malady of Death (Duras, Marguerite))
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J'étais dans la justice et dans le droit, ajouta-t-il. J'ai fait partout le bien que j'ai pu, et aussi le mal que j'ai dû. Toute justice n'est pas dans le pardon!
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Jules Verne (The Mysterious Island (Captain Nemo, #3))
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Si que­da­ba al­gu­na es­pe­ran­za, debĂ­a estar en los pro­les, por­que solo en esas masas des­pre­cia­das, que cons­ti­tuĂ­an el ochen­ta y cinco por cien­to de la po­bla­ciĂłn de Ocea­nĂ­a, podĂ­a ge­ne­rar­se la fuer­za ne­ce­sa­ria para des­truir al Par­ti­do. Este no podĂ­a de­rro­car­se desde den­tro. Sus enemi­gos, si es que los habĂ­a, no te­nĂ­an forma de unir­se o si­quie­ra de re­co­no­cer­se mu­tua­men­te. In­clu­so en caso de que exis­tie­ra la le­gen­da­ria Her­man­dad —lo cual no era del todo im­po­si­ble— re­sul­ta­ba in­con­ce­bi­ble que sus miem­bros pu­die­ran re­unir­se en gru­pos de mĂĄs de dos o tres. La re­be­liĂłn se li­mi­ta­ba a un cruce de mi­ra­das, una in­fle­xiĂłn de la voz o, como mucho, una pa­la­bra su­su­rra­da oca­sio­nal­men­te. En cam­bio los pro­les, si pu­die­ran ser cons­cien­tes de su fuer­za, no ten­drĂ­an ne­ce­si­dad de cons­pi­rar. Bas­ta­rĂ­a con que se en­ca­bri­ta­ran como un ca­ba­llo que se sa­cu­de las mos­cas. Si qui­sie­ran, po­drĂ­an volar el Par­ti­do en pe­da­zos a la ma­ña­na si­guien­te. Tarde o tem­prano tenĂ­a que ocu­rrĂ­r­se­les. Y sin em­bar­go

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George Orwell (1984)
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Mais en fait les voix fĂ©minines se taisent lĂ  oĂč commence l'action concrĂšte; elles ont pu susciter des guerres, non suggĂ©rer la tactique d'une bataille; elles n'ont guĂšre orientĂ© la politique que dans la mesure oĂč la politique se rĂ©duisait Ă  l'intrigue: les vraies commandes du monde n'ont jamais Ă©tĂ© aux mains des femmes; elles n'ont pas agi sur les techniques ni sur l'Ă©conomie, elles n'ont pas fait ni dĂ©fait des États, elles n'ont pas dĂ©couvert des mondes. C'est par elles que certains Ă©vĂ©nements ont Ă©tĂ© dĂ©clenchĂ©s: mais elles ont Ă©tĂ© prĂ©textes beaucoup plus qu'agents.
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Simone de Beauvoir (Le deuxiĂšme sexe, I)
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– Eh bien, sans vouloir offenser plus encore votre magnanimitĂ© contrariĂ©e, je pense que vous n’auriez pas dĂ» assommer votre mĂšre et la sodomiser d’entrĂ©e de jeu. Elle aurait pu vous ĂȘtre utile.
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Antoine Buéno (Le Soupir de l'immortel)
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philosophes qui ont pu autrefois se soustraire de l'empire de la fortune, et, malgrĂ© les douleurs et la pauvretĂ©, disputer de la fĂ©licitĂ© avec leurs dieux. Car s'occupant sans cesse Ă  considĂ©rer les bornes qui leur Ă©taient prescrites par la nature, ils se persuadaient si parfaitement que rien n'Ă©tait en leur pouvoir que leurs pensĂ©es, que cela seul Ă©tait suffisant pour les empĂȘcher d'avoir aucune affection pour d'autres choses; et ils disposaient d'elles si absolument qu'ils avaient en cela quelque raison de s'estimer plus riches, et plus puissants, et plus libres, et plus heureux qu'aucun des autres hommes, qui, n'ayant point cette philosophie, tant favorisĂ©s de la nature et de la fortune qu'ils puissent ĂȘtre, ne disposent jamais ainsi de tout ce qu'ils veulent. (partie 3, para 4)
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René Descartes (Discours de la méthode: suivi des Méditations métaphysiques)
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Le jour oĂč je me suis aimĂ© pour de vrai, J’ai compris qu'en toutes circonstances, J’étais Ă  la bonne place, au bon moment. Et alors, j'ai pu me relaxer. Aujourd'hui je sais que cela s'appelle... l'Estime de soi. Le jour oĂč je me suis aimĂ© pour de vrai, J’ai pu percevoir que mon anxiĂ©tĂ© et ma souffrance Ă©motionnelle N’étaient rien d'autre qu'un signal Lorsque je vais Ă  l'encontre de mes convictions. Aujourd'hui je sais que cela s'appelle... l'AuthenticitĂ©. Le jour oĂč je me suis aimĂ© pour de vrai, J'ai cessĂ© de vouloir une vie diffĂ©rente Et j'ai commencĂ© Ă  voir que tout ce qui m'arrive Contribue Ă  ma croissance personnelle. Aujourd'hui, je sais que cela s'appelle... la MaturitĂ©. Le jour oĂč je me suis aimĂ© pour de vrai, J’ai commencĂ© Ă  percevoir l'abus Dans le fait de forcer une situation ou une personne, Dans le seul but d'obtenir ce que je veux, Sachant trĂšs bien que ni la personne ni moi-mĂȘme Ne sommes prĂȘts et que ce n'est pas le moment... Aujourd'hui, je sais que cela s'appelle... le Respect. Le jour oĂč je me suis aimĂ© pour de vrai, J’ai commencĂ© Ă  me libĂ©rer de tout ce qui n'Ă©tait pas salutaire, personnes, situations, tout ce qui baissait mon Ă©nergie. Au dĂ©but, ma raison appelait cela de l'Ă©goĂŻsme. Aujourd'hui, je sais que cela s'appelle... l'Amour propre. Le jour oĂč je me suis aimĂ© pour de vrai, J’ai cessĂ© d'avoir peur du temps libre Et j'ai arrĂȘtĂ© de faire de grands plans, J’ai abandonnĂ© les mĂ©ga-projets du futur. Aujourd'hui, je fais ce qui est correct, ce que j'aime Quand cela me plait et Ă  mon rythme. Aujourd'hui, je sais que cela s'appelle... la SimplicitĂ©. Le jour oĂč je me suis aimĂ© pour de vrai, J’ai cessĂ© de chercher Ă  avoir toujours raison, Et je me suis rendu compte de toutes les fois oĂč je me suis trompĂ©. Aujourd'hui, j'ai dĂ©couvert ... l'HumilitĂ©. Le jour oĂč je me suis aimĂ© pour de vrai, J’ai cessĂ© de revivre le passĂ© Et de me prĂ©occuper de l'avenir. Aujourd'hui, je vis au prĂ©sent, LĂ  oĂč toute la vie se passe. Aujourd'hui, je vis une seule journĂ©e Ă  la fois. Et cela s'appelle... la PlĂ©nitude. Le jour oĂč je me suis aimĂ© pour de vrai, J’ai compris que ma tĂȘte pouvait me tromper et me dĂ©cevoir. Mais si je la mets au service de mon coeur, Elle devient une alliĂ©e trĂšs prĂ©cieuse ! Tout ceci, c'est... le Savoir vivre. Nous ne devons pas avoir peur de nous confronter. Du chaos naissent les Ă©toiles.
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Charlie Chaplin
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- Viens t’agenouiller avec moi prĂšs de la fenĂȘtre, David, et prions pour que ta maman se sente bien demain, et que rien n’arrive Ă  ton papa ce soir, et que toi et moi
 que toi et moi ne souffrions pas trop, ni demain, ni jamais. Cela m’avait l’air d’une priĂšre magnifique, alors j’ai regardĂ© par la fenĂȘtre et j’ai commencĂ©, mais mes yeux sont tombĂ©s sur la Bible de nĂ©on, en dessous de nous, et je n’ai pas pu continuer. Et puis j’ai vu les Ă©toiles du ciel qui brillaient autant que la belle priĂšre et j’ai recommencĂ©, et la priĂšre est venue sans que j’aie Ă  rĂ©flĂ©chir, et je l’ai offerte aux Ă©toiles et au ciel de la nuit.
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John Kennedy Toole (The Neon Bible)
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Spleen Je suis comme le roi d'un pays pluvieux, Riche, mais impuissant, jeune et pourtant trĂšs vieux, Qui, de ses prĂ©cepteurs mĂ©prisant les courbettes, S'ennuie avec ses chiens comme avec d'autres bĂȘtes. Rien ne peut l'Ă©gayer, ni gibier, ni faucon, Ni son peuple mourant en face du balcon. Du bouffon favori la grotesque ballade Ne distrait plus le front de ce cruel malade; Son lit fleurdelisĂ© se transforme en tombeau, Et les dames d'atour, pour qui tout prince est beau, Ne savent plus trouver d'impudique toilette Pour tirer un souris de ce jeune squelette. Le savant qui lui fait de l'or n'a jamais pu De son ĂȘtre extirper l'Ă©lĂ©ment corrompu, Et dans ces bains de sang qui des Romains nous viennent, Et dont sur leurs vieux jours les puissants se souviennent, II n'a su rĂ©chauffer ce cadavre hĂ©bĂ©tĂ© OĂč coule au lieu de sang l'eau verte du LĂ©thĂ© // I'm like the king of a rain-country, rich but sterile, young but with an old wolf's itch, one who escapes his tutor's monologues, and kills the day in boredom with his dogs; nothing cheers him, darts, tennis, falconry, his people dying by the balcony; the bawdry of the pet hermaphrodite no longer gets him through a single night; his bed of fleur-de-lys becomes a tomb; even the ladies of the court, for whom all kings are beautiful, cannot put on shameful enough dresses for this skeleton; the scholar who makes his gold cannot invent washes to cleanse the poisoned element; even in baths of blood, Rome's legacy, our tyrants' solace in senility, he cannot warm up his shot corpse, whose food is syrup-green Lethean ooze, not blood. — Robert Lowell, from Marthiel & Jackson Matthews, eds., The Flowers of Evil (NY: New Directions, 1963)
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Charles Baudelaire (Les Fleurs du Mal)
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C'est dans ma neuviĂšme annĂ©e que j'ai appris le hollandais. A cette Ă©poque-lĂ , j'avais un papa, un chic type dans mon genre, qui voulait que ses enfants rĂ©ussissent dans la vie. Lui n'avait pas beaucoup travaillĂ© Ă  l'Ă©cole ; ce qui ne l'empĂȘchait pas, tous les Ă©tĂ©s, de nous acheter Ă  ma sƓur Christine et Ă  moi des "cahiers de vacances". Le lundi soir, elle avait dĂ©jĂ  fait son cahier jusqu'au jeudi. Moi, je n'ai jamais pu terminer le mien.
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Marie-Aude Murail (Le hollandais sans peine)
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Oh ! S'il avait pu partir, tout de suite, n'importe oĂč, et ne jamais revenir, ne jamais Ă©crire, ne jamais laisser savoir ce qu'il Ă©tait devenu ! Mais non, il fallait rentrer, rentrer dans la maison paternelle et se coucher dans son lit
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Guy de Maupassant
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Lasse de ma lassitude, blanche lune derniĂšre, seul regret, mĂȘme pas. Être mort, avant elle, sur elle, avec elle, et tourner, mort sur morte, autour des pauvres hommes, et n’avoir plus jamais Ă  mourir, d’entre les mourants. MĂȘme pas, mĂȘme pas ça. Ma lune fut ici-bas, ici bien bas, le peu que j’aie su dĂ©sirer. Et un jour, bientĂŽt, une nuit de terre, bientĂŽt, sous la terre, un mourant dira, comme moi, au clair de terre, MĂȘme pas, mĂȘme pas ça, et mourra, sans avoir pu trouver un regret.
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Samuel Beckett (Malone Dies)
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Je le vis, je rougis, je pĂąlis Ă  sa vue ; Un trouble s’éleva dans mon Ăąme Ă©perdue ; Mes yeux ne voyaient plus, je ne pouvais parler; Je sentis tout mon corps et transir et brĂ»ler : Je reconnus VĂ©nus et ses feux redoutables, D’un sang qu’elle poursuit tourments inĂ©vitables ! Par des vƓux assidus je crus les dĂ©tourner : Je lui bĂątis un temple, et pris soin de l’orner ; De victimes moi-mĂȘme Ă  toute heure entourĂ©e, Je cherchais dans leurs flancs ma raison Ă©garĂ©e : D’un incurable amour remĂšdes impuissants ! En vain sur les autels ma main brĂ»lait l’encens ! Quand ma bouche implorait le nom de la dĂ©esse, J’adorais Hippolyte ; et, le voyant sans cesse, MĂȘme au pied des autels que je faisais fumer, J’offrais tout Ă  ce dieu que je n’osais nommer. Je l’évitais partout. Ô comble de misĂšre ! Mes yeux le retrouvaient dans les traits de son pĂšre. Contre moi-mĂȘme enfin j’osai me rĂ©volter : J’excitai mon courage Ă  le persĂ©cuter. Pour bannir l’ennemi dont j’étais idolĂątre, J’affectai les chagrins d’une injuste marĂątre ; Je pressai son exil ; et mes cris Ă©ternels L’arrachĂšrent du sein et des bras paternels. Je respirais, ƒNONE ; et, depuis son absence, Mes jours moins agitĂ©s coulaient dans l’innocence : Soumise Ă  mon Ă©poux, et cachant mes ennuis, De son fatal hymen je cultivais les fruits. Vaines prĂ©cautions ! Cruelle destinĂ©e ! Par mon Ă©poux lui-mĂȘme Ă  TrĂ©zĂšne amenĂ©e, J’ai revu l’ennemi que j’avais Ă©loignĂ© : Ma blessure trop vive aussitĂŽt a saignĂ©. Ce n’est plus une ardeur dans mes veines cachĂ©e : C’est VĂ©nus tout entiĂšre Ă  sa proie attachĂ©e. J’ai conçu pour mon crime une juste terreur ; J’ai pris la vie en haine, et ma flamme en horreur ; Je voulais en mourant prendre soin de ma gloire, Et dĂ©rober au jour une flamme si noire : Je n’ai pu soutenir tes larmes, tes combats : Je t’ai tout avouĂ© ; je ne m’en repens pas. Pourvu que, de ma mort respectant les approches, Tu ne m’affliges plus par d’injustes reproches, Et que tes vains secours cessent de rappeler Un reste de chaleur tout prĂȘt Ă  s’exhaler.
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Jean Racine (PhĂšdre)
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Un piĂšge. DressĂ© non pour Ellana mais pour lui. Jilano bondit vers la porte. VerrouillĂ©e, elle l'aurait Ă  peine ralenti. Elle s'ouvrit sans difficultĂ©. Sur un mur de pierre. Il leva les yeux. La mĂȘme substance huileuse qui l'avait fait glisser recouvrait tous les murs. La gouttiĂšre gisait au sol. Inutile de l'observer pour savoir qu'elle avait Ă©tĂ© sabotĂ©e. Du joli travail. Jilano inspira profondĂ©ment, ralentissant son rythme cardiaque jusqu'Ă  ce que son corps Ă©limine l'injonction de survie induite par le danger. Ce n'Ă©tait plus la peine. Il s'assit en tailleur contre un mur et attendit que la silhouette apparaisse au-dessus de lui. Elle ne tarda pas. Un sourire pĂąle erra sur les lĂšvres du maĂźtre marchombre lorsqu’il reconnut l'assassin. La guilde Ă©tait donc tombĂ©e si bas ? Il faillit parler, non pas pour tenter de convaincre, encore moins pour supplier, mais pour chercher Ă  comprendre. Il prĂ©fĂ©ra dĂ©tourner les yeux afin de se concentrer sur l'essentiel. Alors que l'assassin bandait son arc, les pensĂ©es de Jilano s'envolĂšrent vers Ellana. Bonheur. Gratitude. Amour. - Garde-toi, murmura-t-il, et que ta route soit belle. - Madame ! Que vous arrive-t-il ? Ellana Ă©tait brusquement devenue livide. Elle poussa un cri rauque, leva la main Ă  son cƓur et, avant qu'Aoro ait pu intervenir, elle s'effondra.
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Pierre Bottero (Ellana, l'Envol (Le Pacte des MarchOmbres, #2))
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Il faudrait avoir des regrets. Croire que j'aurais mieux fait de me rebeller, mais non, je n'y arrive pas. Si c'était à refaire, je ne changerais rien. Avec toi, quelle qu'aurait été la maniÚre, je n'aurais pu échapper à la souffrance, à la pureté éclatante de la souffrance.
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Philippe Besson (Se résoudre aux adieux)
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Il ajoute cette phrase, pour moi inoubliable  : parce que tu partiras et que nous resterons. J'ai les larmes aux yeux en recopiant les mots. Je demeure fascinĂ© que cette phrase ait Ă©tĂ© prononcĂ©e un jour, qu'elle m'ait Ă©tĂ© adressĂ©e. Qu'on me comprenne  : ce n'est pas l'Ă©ventuelle prĂ©monition qu'elle contient qui me fascine, ni mĂȘme qu'elle ait Ă©tĂ© rĂ©alisĂ©e. Ce n'est pas non plus la maturitĂ© ou la fulgurance qu'elle suppose. Ce n'est pas davantage l'agencement des mots, mĂȘme si je prendrai conscience que je n'aurais sans doute pas pu les trouver alors, ni plus tard les Ă©crire. C'est la violence de ce qu'ils signifient, de ce qu'ils charrient  : l'infĂ©rioritĂ© qu'ils racontent en mĂȘme temps que l'amour sous-jacent dont ils tĂ©moignent, l'amour rendu nĂ©cessaire par la disparition prochaine, inĂ©vitable, l'amour rendu possible par elle aussi.
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Philippe Besson (" ArrĂȘte avec tes mensonges ")
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J'ai essayé, vois-tu, d'entraßner GeneviÚve dans un monde à moi. Tout ce que je lui montrais devenait terne, gris. La premiÚre nuit était d'une épaisseur sans nom : nous n'avons pas pu la franchir. J'ai dû lui rendre sa maison, sa vie, son ùme. Un à un tous les peupliers de la route.
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Antoine de Saint-Exupéry
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Je ne mĂ©prise pas les hommes. Si je le faisais, je n'aurais aucun droit, ni aucune raison, d'essayer de les gouverner. Je les sais vains, ignorants, avides, inquiets, capables de presque tout pour rĂ©ussir, pour se faire valoir, mĂȘme Ă  leurs propres yeux, ou tout simplement pour Ă©viter de souffrir. Je le sais : je suis comme eux, du moins par moment, ou j'aurais pu l'ĂȘtre. Entre autrui et moi, les diffĂ©rences que j'aperçois sont trop nĂ©gligeables pour compter dans l'addition finale. Je m'efforce donc que mon attitude soit aussi Ă©loignĂ©e de la froide supĂ©rioritĂ© du philosophe que l'arrogance du CĂ©sar.
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Marguerite Yourcenar (Memoirs of Hadrian)
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Que se serait-il passĂ© ? Lol ne va pas loin dans l'inconnu sur lequel s'ouvre cet instant. Elle ne dispose d'aucun souvenir mĂȘme imaginaire, elle n'a aucune idĂ©e sur cet inconnu. Mais ce qu'elle croit, c'est qu'elle devait y pĂ©nĂ©trer, que c'Ă©tait ce qu'il lui fallait faire, que ç'aurait Ă©tĂ© pour toujours, pour sa tĂȘte et pour son corps, leur plus grande douleur et leur plus grande joie confondues jusque dans leur dĂ©finition devenue unique mais innommable faute d'un mot. J'aime Ă  croire, comme je l'aime, que si Lol est silencieuse dans la vie c'est qu'elle a cru, l'espace d'un Ă©clair, que ce mot pouvait exister. Faute de son existence, elle se tait. Ç'aurait Ă©tĂ© un mot-absence, un mot-trou, creusĂ© en son centre d'un trou, de ce trou oĂč tous les autres mots auraient Ă©tĂ© enterrĂ©s. On n'aurait pas pu le dire mais on aurait pu le faire rĂ©sonner. Immense, sans fin, un gong vide, il aurait retenu ceux qui voulaient partir, il les aurait convaincus de l'impossible, il les aurait assourdis Ă  tout autre vocable que lui-mĂȘme, en une fois il les aurait nommĂ©s, eux, l'avenir et l'instant. Manquant, ce mot, il gĂąche tous les autres, les contamine, c'est aussi le chien mort de la plage en plein midi, ce trou de chair.
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Marguerite Duras (The Ravishing of Lol Stein)
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Je suis un homme mort. Je me rĂ©veille chaque matin avec une insoutenable envie de dormir. Je m'habille de noir car je suis en deuil de moi-mĂȘme. Je porte le deuil de l'homme que j'aurais pu ĂȘtre. Je dĂ©ambule d'un pas fixe, rue des Beaux-Arts - la rue oĂč Oscar Wilde est mort, comme moi. Je vais au restaurant pour ne rien manger. Les maĂźtres d'hĂŽtel sont vexĂ©s que je ne touche pas Ă  leurs assiettes. Mais vous en connaissez beaucoup, vous, des morts qui finissent le plat de rĂ©sistance en se pourlĂ©chant les babines? Tout ce que je bois, c'est donc Ă  jeun. Avantage: l'ivresse rapide. InconvĂ©nient; l'ulcĂšre Ă  l'estomac.
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Frédéric Beigbeder (L'amour dure trois ans (Marc Marronnier, #3))
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La vie me fait moins peur.Vous pouvez m'attaquer, vous pouvez me juger, vous pouvez me ruiner. J'aurau toujours à portée de main un vieux bic mùchouillé et un bloc-notes froissé. Mes seules armes. A la fois dérisoires et puissantes. Les seules sur lesquelles j'ai toujours pu compter pour m'aider à traverser la nuit.
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Guillaume Musso (La jeune fille et la nuit)
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Paul Gauguin’s remark about his friend Van Gogh is not without interest: “Il oubliait mĂȘme,” wrote the famous painter of nĂ©gresses, “d’écrire le hollandais, et comme on a pu voir par la publication de ses lettres Ă  son frĂšre, il n’écrivait jamais qu’en français, et cela admirablement, avec des ‘Tant qu’à, Quant Ă ,’ Ă  n’en plus finir.”[1]
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Vincent van Gogh (The Letters of a Post-Impressionist : Being the Familiar Correspondence of Vincent Van Gogh by Van Gogh)
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Je suis fils de l'homme et de la femme, d'aprĂšs ce qu'on m'a dit. Ça m'Ă©tonne... je croyais ĂȘtre davantage! Au reste, que m'importe d'oĂč je viens? Moi, si cela avait pu dĂ©pendre de ma volontĂ©, j'aurais voulu ĂȘtre plutĂŽt le fils de la femelle du requin, dont la faim est amie des tempĂȘtes, et du tigre, Ă  la cruautĂ© reconnue: je ne serais pas si mĂ©chant.
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Comte de Lautréamont (Les Chants de Maldoror)
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VoilĂ  comment ça se passait au cƓur du cƓur du Dieu : notre groupe de six, sept ou dix arrivait Ă  pied ou en chaise roulante, piochait dans un malheureux assortiment de biscuits et se servait un verre de limonade, avant de prendre place dans le cercle de la vĂ©ritĂ© et d'Ă©couter Patrick dĂ©biter pour la milliĂšme fois le rĂ©cit dĂ©primant de sa vie – comment il avait eu un cancer des testicules et aurait dĂ» en mourir, sauf qu'il n'Ă©tait pas mort et que maintenant il Ă©tait mĂȘme un adulte bien vivant qui se tenait devant nous dans la crypte d'une Ă©glise de la 137e ville d'AmĂ©rique la plus agrĂ©able Ă  vivre, divorcĂ©, accro aux jeux vidĂ©o, seul, vivotant du maigre revenu que lui rapportait l'exploitation de son passĂ© de super-cancĂ©reux, futur dĂ©tenteur d'un master ne risquant pas d'amĂ©liorer ses perspectives de carriĂšre, et qui attendait, comme nous tous, que l'Ă©pĂ©e de DamoclĂšs lui procure le soulagement auquel il avait Ă©chappĂ© des annĂ©es plus tĂŽt quand le cancer lui avait pris ses couilles, mais avait Ă©pargnĂ© ce que seule une Ăąme charitable aurait pu appeler « sa vie ».
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John Green (The Fault in Our Stars)
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La muraille de l’escalier oĂč je vis monter le reflet de sa bougie n’existe plus depuis longtemps. En moi aussi bien des choses ont Ă©tĂ© dĂ©truites que je croyais devoir durer toujours, et de nouvelles se sont Ă©difiĂ©es, donnant naissance Ă  des peines et Ă  des joies nouvelles que je n’aurais pu prĂ©voir alors, de mĂȘme que les anciennes me sont devenues difficiles Ă  comprendre.
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Marcel Proust (A la recherche du temps perdu)
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AmputĂ©e!
 O soleil, si c’est vrai que je viens de toi, pourquoi m’as-tu faite amputĂ©e? Pourquoi m’as-tu faite une fille? Pourquoi ces seins, cette faiblesse, cette plaie ouverte au milieu de moi? N’aurait-il pas Ă©tĂ© beau le garçon MĂ©dĂ©e? N’aurait-il pas Ă©tĂ© fort? Le corps dur comme la pierre, fait pour prendre et partir aprĂšs, ferme, intact, entier, lui! Ah! il aurait pu venir, alors, Jason, avec ses grandes mains redoutables, il aurait pu tenter de les poser sur moi! Un couteau, chacun dans la sienne -oui!- et le plus fort tue l’autre et s’en va dĂ©livrĂ©. Pas cette lutte oĂč je ne voulais que toucher les Ă©paules, cette blessure que j’implorais. Femme! Femme! Chienne! Chair faite d’un peu de boue de d’une cĂŽte d’homme! Morceau d’homme! Putain!
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Jean Anouilh (Médée)
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Je me mis dĂšs lors Ă  lire avec aviditĂ© et bientĂŽt la lecture fut ma passion. Tous mes nouveaux besoins, toutes mes aspirations rĂ©centes, tous les Ă©lans encore vagues de mon adolescence qui s’élevaient dans mon Ăąme d’une façon si troublante et qui Ă©taient provoquĂ©s par mon dĂ©veloppement si prĂ©coce, tout cela, soudainement, se prĂ©cipita dans une direction, parut se satisfaire complĂštement de ce nouvel aliment et trouver lĂ  son cours rĂ©gulier. BientĂŽt mon cƓur et ma tĂȘte se trouvĂšrent si charmĂ©s, bientĂŽt ma fantaisie se dĂ©veloppa si largement, que j’avais l’air d’oublier tout ce qui m’avait entourĂ©e jusqu’alors. Il semblait que le sort lui mĂȘme m’arrĂȘtĂąt sur le seuil de la nouvelle vie dans laquelle je me jetais, Ă  laquelle je pensais jour et nuit, et, avant de m’abandonner sur la route immense, me faisait gravir une hauteur d’oĂč je pouvais contempler l’avenir dans un merveilleux panorama, sous une perspective brillante, ensorcelante. Je me voyais destinĂ©e Ă  vivre tout cet avenir en l’apprenant d’abord par les livres ; de vivre dans les rĂȘves, les espoirs, la douce Ă©motion de mon esprit juvĂ©nile. Je commençai mes lectures sans aucun choix, par le premier livre qui me tomba sous la main. Mais, le destin veillait sur moi. Ce que j’avais appris et vĂ©cu jusqu’à ce jour Ă©tait si noble, si austĂšre, qu’une page impure ou mauvaise n’eĂ»t pu dĂ©sormais me sĂ©duire. Mon instinct d’enfant, ma prĂ©cocitĂ©, tout mon passĂ© veillaient sur moi ; et maintenant ma conscience m’éclairait toute ma vie passĂ©e. En effet, presque chacune des pages que je lisais m’était dĂ©jĂ  connue, semblait dĂ©jĂ  vĂ©cue, comme si toutes ces passions, toute cette vie qui se dressaient devant moi sous des formes inattendues, en des tableaux merveilleux, je les avais dĂ©jĂ  Ă©prouvĂ©es. Et comment pouvais-je ne pas ĂȘtre entraĂźnĂ©e jusqu’à l’oubli du prĂ©sent, jusqu’à l’oubli de la rĂ©alitĂ©, quand, devant moi dans chaque livre que je lisais, se dressaient les lois d’une mĂȘme destinĂ©e, le mĂȘme esprit d’aventure qui rĂšgnent sur la vie de l’homme, mais qui dĂ©coulent de la loi fondamentale de la vie humaine et sont la condition de son salut et de son bonheur ! C’est cette loi que je soupçonnais, que je tĂąchais de deviner par toutes mes forces, par tous mes instincts, puis presque par un sentiment de sauvegarde. On avait l’air de me prĂ©venir, comme s’il y avait en mon Ăąme quelque chose de prophĂ©tique, et chaque jour l’espoir grandissait, tandis qu’en mĂȘme temps croissait de plus en plus mon dĂ©sir de me jeter dans cet avenir, dans cette vie. Mais, comme je l’ai dĂ©jĂ  dit, ma fantaisie l’emportait sur mon impatience, et, en vĂ©ritĂ©, je n’étais trĂšs hardie qu’en rĂȘve ; dans la rĂ©alitĂ©, je demeurais instinctivement timide devant l’avenir.
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Fyodor Dostoevsky (Netochka Nezvanova)
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Si j'ai pu autant évoluer en tant qu'individu, c'est grùce à l'influence des personnes qui m'entourent. (...) Tout ce qui concerne la façon de parler, en particulier, je l'apprends par imitation. Mon language actuel est un mélange d'Izumi et de Sugehara. N'est-ce pas ainsi que fonctionne tout le monde ? (...) C'est en nous imprégnant ainsi les uns des autres que nous préservons notre humanité.
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Sayaka Murata (Convenience Store Woman)
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Huit heures de sommeil ! Nous perdons le tiers de notre vie humaine dans cet Ă©tat d’impuissance et de demi-mort. VoilĂ  ce qui me rĂ©voltait. Il faut libĂ©rer l’humanitĂ© de la charge du sommeil. Quelles extraordinaires perspectives, quelles possibilitĂ©s !... Combien de grandes Ɠuvres les grands penseurs nous auraient encore donnĂ©es, si toutes leurs nuits avaient pu ĂȘtre consacrĂ©es Ă  la crĂ©ation ! Combien de grandes Ɠuvres inachevĂ©es ne le seraient pas ! Comme le progrĂšs avancerait ! ! L’ouvrier ayant travaillĂ© aux heures fixĂ©es Ă  sa machine-outil consacrerait la nuit aux livres ou au travail social. Nous n’aurions pas d’illettrĂ©s. Mieux encore, tous recevraient la possibilitĂ© de devenir parfaitement instruits. De quels pas gigantesques avancerait le progrĂšs ! C’était Ă  cela que je pensais...
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Alexandre BeliaĂŻev (L'homme qui ne dormait pas)
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J'ai Ă©crit le mot  : amour. J'ai bien envisagĂ© d'en employer un autre. Au moins parce que c'est une notion curieuse, l'amour  ; difficile Ă  dĂ©finir, Ă  cerner, Ă  Ă©tablir. Il en existe tant de degrĂ©s, tant de variations. J'aurais pu me contenter d'affirmer que j'Ă©tais attendri (et il est exact que T.   savait Ă  merveille me faire faiblir, flĂ©chir), ou charmĂ© (il s'y entendait comme personne pour attirer Ă  lui, conquĂ©rir, flatter, et mĂȘme ensorceler), ou troublĂ© (il provoquait souvent un mĂ©lange de perplexitĂ© et d'Ă©moi, renversait les situations), ou sĂ©duit (il m'attirait dans ses filets, me bluffait, me gagnait Ă  ses causes), ou Ă©pris (j'Ă©tais bĂȘtement enjouĂ©, je pouvais m'enflammer pour un rien)  ; ou mĂȘme aveuglĂ© (je mettais de cĂŽtĂ© ce qui m'embarrassait, je minimisais ses dĂ©fauts, portais aux nues ses qualitĂ©s), perturbĂ© (je n'Ă©tais plus tout Ă  fait moi-mĂȘme), ce qui aurait un sens moins favorable. J'aurais pu expliquer qu'il ne s'agissait que d'affection, que je me contentais d'avoir le «  bĂ©guin  », une formulation suffisamment floue pour englober n'importe quoi. Mais ce serait me payer de mots. La vĂ©ritĂ©, la vĂ©ritĂ© toute nue, c'est que j'Ă©tais amoureux. Autant employer les mots prĂ©cis.
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Philippe Besson (« ArrĂȘte avec tes mensonges »)
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Je me suis figurĂ© qu’une femme devait faire plus de cas de son Ăąme que de son corps, contre l’usage gĂ©nĂ©ral qui veut qu’elle permette qu’on l’aime avant d’avouer qu’elle aime, et qu’elle abandonne ainsi le trĂ©sor de son coeur avant de consentir Ă  la plus lĂ©gĂšre prise sur celui de sa beautĂ©. J’ai voulu, oui, voulu absolument tenter de renverser cette marche uniforme ; la nouveautĂ© est ma rage. Ma fantaisie et ma paresse, les seuls dieux dont j’aie jamais encensĂ© les autels, m’ont vainement laissĂ© parcourir le monde, poursuivi par ce bizarre dessein ; rien ne s’offrait Ă  moi. Peut-ĂȘtre je m’explique mal. J’ai eu la singuliĂšre idĂ©e d’ĂȘtre l’époux d’une femme avant d’ĂȘtre son amant. J’ai voulu voir si rĂ©ellement il existait une Ăąme assez orgueilleuse pour demeurer fermĂ©e lorsque les bras sont ouverts, et livrer la bouche Ă  des baisers muets ; vous concevez que je ne craignais que de trouver cette force Ă  la froideur. Dans toutes les contrĂ©es qu’aime le soleil, j’ai cherchĂ© les traits les plus capables de rĂ©vĂ©ler qu’une Ăąme ardente y Ă©tait enfermĂ©e : j’ai cherchĂ© la beautĂ© dans tout son Ă©clat, cet amour qu’un regard fait naĂźtre ; j’ai dĂ©sirĂ© un visage assez beau pour me faire oublier qu’il Ă©tait moins beau que l’ĂȘtre invisible qui l’anime ; insensible Ă  tout, j’ai rĂ©sistĂ© Ă  tout,... exceptĂ© Ă  une femme, – Ă  vous, Laurette, qui m’apprenez que je me suis un peu mĂ©pris dans mes idĂ©es orgueilleuses ; Ă  vous, devant qui je ne voulais soulever le masque qui couvre ici-bas les hommes qu’aprĂšs ĂȘtre devenu votre Ă©poux. – Vous me l’avez arrachĂ©, je vous supplie de me pardonner, si j’ai pu vous offenser. ( Le prince )
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Alfred de Musset (La nuit vénitienne)
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Car ce que les gens ont fait, ils le recommencent indĂ©finiment. Et qu’on aille voir chaque annĂ©e un ami qui les premiĂšres fois n’a pu venir Ă  votre rendez-vous, ou s’est enrhumĂ©, on le retrouvera avec un autre rhume qu’il aura pris, on le manquera Ă  un autre rendez-vous oĂč il ne sera pas venu, pour une mĂȘme raison permanente Ă  la place de laquelle il croit voir des raisons variĂ©es, tirĂ©es des circonstances.
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Marcel Proust (A la recherche du temps perdu)
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La ThĂ©ologie. Qu'est-ce que la chute ? Si c'est l'unitĂ© devenue dualitĂ©, c'est Dieu qui a chutĂ©. Au moins aurait-il pu deviner dans cette localisation une malice ou une satire de la providence contre l’amour, et, dans le mode de la gĂ©nĂ©ration, un signe du pĂ©chĂ© originel. De fait, nous ne pouvons faire l’amour qu’avec des organes excrĂ©mentiels. En d'autres termes, la crĂ©ation ne serait-elle pas la chute de Dieu ?
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Charles Baudelaire (My Heart Laid Bare)
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Car lĂ  encore ces hommes se livraient Ă  quelque chose de grotesque lorsqu'ils embĂȘtaient leur famille pour qu'elle leur achĂšte un costume tout neuf pour leur procĂšs. Les tribunaux ne prenaient jamais en considĂ©ration la tenue des inculpĂ©s. Ils auraient pu comparaĂźtre dans des sacs Ă  pommes de terre, les juges n'en avaient rien Ă  faire. La seule chose qui comptait Ă©tait la couleur de leur peau et les chefs d'accusation.
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Donald Goines (White Man's Justice, Black Man's Grief)
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J’ai arpentĂ© les galeries sans fin des grandes bibliothĂšque, les rues de cette ville qui fĂ»t la nĂŽtre, celle oĂč nous partagions presque tous nos souvenirs depuis l’enfance. Hier, j’ai marchĂ© le long des quais, sur les pavĂ©s du marchĂ© Ă  ciel ouvert que tu aimais tant. Je me suis arrĂȘtĂ© par-ci par-lĂ , il me semblait que tu m’accompagnais, et puis je suis revenu dans ce petit bar prĂšs du port, comme chaque vendredi. Te souviendras-tu ? Je ne sais pas oĂč tu es. Je ne sais pas si tout ce que nous avons vĂ©cu avait un sens, si la vĂ©ritĂ© existe, mais si tu trouves ce petit mot un jour, alors tu sauras que j’ai tenu ma promesse, celle que je t’ai faite. A mon tour de te demander quelque chose, tu me le dois bien. Oublie ce que je viens d’écrire, en amitiĂ© on ne doit rien. Mais voici nĂ©anmoins ma requĂȘte : Dis-lui, dis-lui que quelque part sur cette terre, loin de vous, de votre temps, j’ai arpentĂ© les mĂȘmes rues, ri avec toi autour des mĂȘmes tables, et puisque les pierres demeurent, dis-lui que chacune de celles oĂč nous avons posĂ© nos mais et nos regards contient Ă  jamais une part de notre histoire. Dis-lui, que j’étais ton ami, que tu Ă©tais mon frĂšre, peut-ĂȘtre mieux encore puisque nous nous Ă©tions choisis, dis-lui que rien n’a jamais pu nous sĂ©parer, mĂȘme votre dĂ©part si soudain.
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Marc Levy (La prochaine fois)
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Elles disent, malheureuse, ils t'ont chassée du monde des signes, et cependant ils t'ont donné des noms, ils t'ont appelée esclave, toi malheureuse esclave. Comme des maßtres ils ont exercé leur droit de maßtre. Ils écrivent de ce droit de donner des noms qu'il va si loin que l'on peut considérer l'origine du langage comme un acte d'autorité émanant de ceux qui dominent. Ainsi ils disent qu'ils ont dit, ceci est telle ou telle chose, ils ont attaché à un objet et à un fait tel vocable et par là ils se le sont pour ainsi dire appropriés. Elles disent, ce faisant ils ont gueulé hurlé de toutes leurs forces pour te réduire au silence. Elles disent, le langage que tu parles t'empoisonne la glotte la langue le palais les lÚvres. Elles disent le langage que tu parles est fait de mots qui te tuent. Elles disent, le langage que tu parles est fait de signes qui à proprement parler désignent ce qu'ils se sont appropriés. Ce sur quoi ils n'ont pas mis la main, ce sur quoi ils n'ont pas fondu comme des rapaces aux yeux multiples, cela n'apparaßt pas dans le langage que tu parles. Cela se manifeste juste dans l'intervalle que les maßtres n'ont pas pu combler avec leurs mots de propriétaires et de possesseurs, cela peut se chercher dans la lacune, dans tout ce qui n'est pas la continuité de leurs discours, dans le zéro, le O, le cercle parfait que tu inventes pour les emprisonner et pour les vaincre.
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Monique Wittig (Les GuérillÚres)
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Je vous rappelle ce trait d’Histoire pour vous faire entendre que non seulement les diffĂ©rents corps de votre armĂ©e doivent se secourir mutuellement, mais encore qu’il faut que vous secouriez vos alliĂ©s, que vous donniez mĂȘme du secours aux peuples vaincus qui en ont besoin ; car, s’ils vous sont soumis, c’est qu’ils n’ont pu faire autrement ; si leur souverain vous a dĂ©clarĂ© la guerre, ce n’est pas de leur faute. Rendez-leur des services, ils auront leur tour pour vous en rendre aussi. p87
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Sun Tzu (L'art de la guerre)
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« On n’est vĂ©ritablement morte que quand on n’est plus aimĂ©e, ton dĂ©sir m’a rendu la vie, la puissante Ă©vocation de ton cƓur a supprimĂ© les distances qui nous sĂ©paraient. » [...] En effet, rien ne meurt, tout existe toujours ; nulle force ne peut anĂ©antir ce qui fut une fois. Toute action, toute parole, toute forme, toute pensĂ©e tombĂ©e dans l’ocĂ©an universel des choses y produit des cercles qui vont s’élargissant jusqu’aux confins de l’éternitĂ©. La figuration matĂ©rielle ne disparaĂźt que pour les regards vulgaires, et les spectres qui s’en dĂ©tachent peuplent l’infini. PĂąris continue d’enlever HĂ©lĂšne dans une rĂ©gion inconnue de l’espace. La galĂšre de ClĂ©opĂątre gonfle ses voiles de soie sur l’azur d’un Cydnus idĂ©al. Quelques esprits passionnĂ©s et puissants ont pu amener Ă  eux des siĂšcles Ă©coulĂ©s en apparence, et faire revivre des personnages morts pour tous. Faust a eu pour maĂźtresse la fille de Tyndare, et l’a conduite Ă  son chĂąteau gothique, du fond des abĂźmes mystĂ©rieux de l’HadĂšs.
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Théophile Gautier
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Je suis encore un homme jeune, et pourtant, quand je songe Ă  ma vie, c’est comme une bouteille dans laquelle on aurait voulu faire entrer plus qu’elle ne peut contenir. Est-ce le cas pour toute vie humaine, ou suis-je nĂ© dans une Ă©poque qui repousse toute limite et qui bat les existences comme les cartes d’un grand jeu de hasard ? Moi, je ne demandais pas grand-chose. J'aurais aimĂ© ne jamais quitter le village. Les montagnes, les bois, nos riviĂšres, tout cela m’aurait suffi. J’aurais aimĂ© ĂȘtre tenu loin de la rumeur du monde, mais autour de moi bien des peuples se sont entretuĂ©s. Bien des pays sont morts et ne sont plus que des noms dans les livres d’Histoire. Certains en ont dĂ©vorĂ© d’autres, les ont Ă©ventrĂ©s, violĂ©s, souillĂ©s. Et ce qui est juste n’a pas toujours triomphĂ© de ce qui est sale. Pourquoi ai-je dĂ», comme des milliers d’autres hommes, porter une croix que je n’avais pas choisie, endurer un calvaire qui n’était pas fait pour mes Ă©paules et qui ne me concernait pas? Qui a donc dĂ©cidĂ© de venir fouiller mon obscure existence, de dĂ©terrer ma maigre tranquillitĂ©, mon anonymat gris, pour me lancer comme une boule folle et minuscule dans un immense jeu de quilles? Dieu? Mais alors, s’Il existe, s’Il existe vraiment, qu’Il se cache. Qu’Il pose Ses deux mains sur Sa tĂȘte, et qu’Il la courbe. Peut-ĂȘtre, comme nous l'apprenait jadis Peiper, que beaucoup d’hommes ne sont pas dignes de Lui, mais aujourd’hui je sais aussi qu’Il n'est pas digne de la plupart d’entre nous, et que si la crĂ©ature a pu engendrer l’horreur c’est uniquement parce que son CrĂ©ateur lui en a soufflĂ© la recette.
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Philippe Claudel (Brodeck)
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Il est possible qu'Ă  des Ă©poques antĂ©rieures, oĂč les ours Ă©taient nombreux, la virilitĂ© ait pu jouer un rĂŽle spĂ©cifique et irremplaçable; mais depuis quelques siĂšcles, les hommes ne servaient visiblement Ă  peu prĂšs plus Ă  rien. Ils trompaient parfois leur ennui en faisant des parties de tennis, ce qui Ă©taient un moindre mal; mais parfois aussi ils estimaient utile de faire avancer l'histoire, c'est-Ă -dire essentiellement de provoquer des rĂ©volutions et des guerres. Outre les souffrances absurdes qu'elles provoquaient, les rĂ©volutions et les guerres dĂ©truisaient le meilleurs du passĂ©, obligeant Ă  chaque fois Ă  faire table rase pour rebĂątir. Non inscrite dans le cours rĂ©gulier d'une ascension progressive, l'Ă©volution humaine acquĂ©rait ainsi un tour chaotique, dĂ©structurĂ©, irrĂ©gulier et violent. Tout cela les hommes (avec leur goĂ»t du risque et du jeu, leur vanitĂ© grotesque, leur irresponsabilitĂ©, leur violence fonciĂšre) en Ă©taient directement et exclusivement responsables. Un monde composĂ© de femmes serait Ă  tous points de vue infiniment supĂ©rieur; il Ă©voluerait plus lentement, mais avec rĂ©gularitĂ©, sans retours en arriĂȘre et sans remises en cause nĂ©fastes, vers un Ă©tat de bonheur commun.
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Michel Houellebecq
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Oui, si le souvenir, grĂące Ă  l’oubli, n’a pu contracter aucun lien, jeter aucun chaĂźnon entre lui et la minute prĂ©sente, s’il est restĂ© Ă  sa place, Ă  sa date, s’il a gardĂ© ses distances, son isolement dans le creux d’une vallĂ©e ou Ă  la pointe d’un sommet, il nous fait tout Ă  coup respirer un air nouveau, prĂ©cisĂ©ment parce que c’est un air qu’on a respirĂ© autrefois, cet air plus pur que les poĂštes ont vainement essayĂ© de faire rĂ©gner dans le Paradis et qui ne pourrait donner cette sensation profonde de renouvellement que s’il avait Ă©tĂ© respirĂ© dĂ©jĂ , car les vrais paradis sont les paradis qu’on a perdus.
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Marcel Proust (Le Temps Retrouve)
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Pour ce qu’il avait pu en observer l’existence des hommes s’organisait autour du travail, qui occupait la plus grande partie de la vie, et s’accomplissait dans des organisations de dimension variable. A l’issue des annĂ©es de travail s’ouvrait une pĂ©riode plus brĂšve, marquĂ©e par le dĂ©veloppement de diffĂ©rentes pathologies. Certains ĂȘtres humains, pendant la pĂ©riode la plus active de leur vie, tentaient en outre de s’associer dans des micro-regroupements, qualifies de familles, ayant pour but la reproduction de l’espĂšce ; mais ces tentatives, le plus souvent, tournaient court, pour des raisons liĂ©es a la <>.
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Michel Houellebecq
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Ce dernier talent correspond proprement Ă  ce qu’on appelle l’ñme ; car exprimer et rendre universellement communicable ce qu’il y a d’indicible dans l’état d’esprit associĂ© Ă  une certaine reprĂ©sentation – et ce, que l’expression relĂšve du langage, de la peinture ou de la plastique -, cela requiert un pouvoir d’apprĂ©hender le jeu si fugace de l’imagination et de le synthĂ©tiser dans un concept qui se peut communiquer sans la contrainte de rĂšgles (un concept qui, prĂ©cisĂ©ment pour cette raison, est original et fait apparaĂźtre en mĂȘme temps une rĂšgle nouvelle qui n’a pu rĂ©sulter d’aucun principe ou d’aucun exemple qui l’eusse prĂ©cĂ©dĂ©e).
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Immanuel Kant (La Critique de la faculté de juger (Critique du jugement esthétique): Une oeuvre fondamentale de l'esthétique moderne (La troisiÚme grand ouvrage critique ... de la raison pratique))
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Cet objectif a Ă©tĂ© atteint par une mĂ©thode occidentale : l’application d’une taxe fonciĂšre nationale de 3 %. Les agriculteurs japonais Ă©taient mĂ©contents et se sont rĂ©voltĂ©s pĂ©riodiquement du fait qu’ils devaient payer comptant cette taxe chaque annĂ©e, et ce, quel que soit le volume de la rĂ©colte. Mais s’ils avaient eu connaissance des taux d’imposition occidentaux modernes, ils auraient pu s’estimer heureux
 Dans l’État oĂč je vis, la Californie, par exemple, nous payons un impĂŽt foncier de 1 %, plus un impĂŽt d’État sur le revenu qui peut atteindre 12 %, plus un impĂŽt national sur le revenu qui va chercher actuellement dans les 44 %.
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Jared Diamond (Bouleversement: Les nations face aux crises et au changement)
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Et s’il venait avec violence ? Et s’il venait et ne me lĂąchait plus, un chagrin venu pour rester, et me faisait ce qu’avait fait mon dĂ©sir d’Oliver ces nuits oĂč il me semblait qu’il manquait quelque chose de si essentiel Ă  ma vie que cela aurait aussi bien pu manquer Ă  mon corps, de sorte que le perdre alors, lui, serait comme de perdre un bras qu’on peut voir sur toutes les photos de soi dans la maison, mais sans lequel on ne pourra plus ĂȘtre vraiment soi-mĂȘme. On le perd, comme on a su qu’on le perdrait, et comme on s’y Ă©tait mĂȘme prĂ©paré ; mais on ne peut se rĂ©signer Ă  cette perte. Et espĂ©rer ne pas y penser, ne pas rĂȘver Ă  ce qu’on a perdu, est tout aussi amer.
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André Aciman (Call Me By Your Name (Call Me By Your Name, #1))
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J’admire qu’on puisse trouver au bord de la MĂ©diterranĂ©e des certitudes et des rĂšgles de vie, qu’on y satisfasse sa raison et qu’on y justifie un optimisme et un sens social. Car enfin, ce qui me frappait alors ce n’était pas un monde fait Ă  la mesure de l’homme - mais qui se refer-mait sur l’homme. Non, si le langage de ces pays s’accordait Ă  ce qui rĂ©sonnait profondĂ©ment en moi, ce n’est pas parce qu’il rĂ©pondait Ă  mes questions, mais parce qu’il les rendait inutiles. Ce n’était pas des actions de grĂąces qui pouvaient me monter aux lĂšvres, mais ce Nada qui n’a pu naĂźtre que devant des paysages Ă©crasĂ©s de soleil. Il n’y a pas d’amour de vivre sans dĂ©sespoir de vivre.
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Albert Camus (L'envers et l'endroit)
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Qui me reflĂšte sinon toi-mĂȘme Je me vois si peu Sans toi je ne vois rien Qu’une Ă©tendue dĂ©serte Entre autrefois et aujourd’hui Il y a eu toutes ces morts Que j’ai franchies Sur de la paille Je n’ai pas pu percer Le mur de mon miroir Il m’a fallu apprendre Mot par mot la vie Comme on oublie Je t’aime pour ta sagesse Qui n’est pas la mienne Pour la santĂ© je t’aime Contre tout ce qui n’est qu’illusion Pour ce cƓur immortel Que je ne dĂ©tiens pas Que tu crois ĂȘtre le doute Et tu n’es que raison Tu es le grand soleil Qui me monte Ă  la tĂȘte Quand je suis sĂ»r de moi Quand je suis sĂ»r de moi Tu es le grand soleil Qui me monte Ă  la tĂȘte Quand je suis sĂ»r de moi Quand je suis sĂ»r de moi
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Paul Éluard
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Quelles bizarreries ne trouve-t-on pas dans une ville, qund on sait se promener et regarder? La ville fourmille de monstres innocents. - Seigneur, mon Dieu! vous, le CrĂ©ateur, vous, le MaĂźtre; vous qui avez fait la Loit et la LibertĂ©; vous, le souverain qui laissez faire; vous, le juge qui pardonnez; vous qui ĂȘtes plein de motifs et de causes, et qui avez peut-ĂȘtre mis dans mon esprit le goĂ»t de l'horreur pour convertir mon coeur, comme la guĂ©rison au bout d'une lame; Seigneur, ayez pitiĂ©, ayez pitiĂ© des fous et des folles! Ô CrĂ©ateur! peut-il exister des monstres aux yeux de Celui-lĂ  seul qui sait pourquoi ils existent,comment ils se sont faits et comment ils auraient pu ne pas se faire?
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Charles Baudelaire
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Les donnĂ©es scientifiques et Ă©sotĂ©riques montrent lÂŽimportance du sommeil et des rĂȘves dans la vie de lÂŽindividu. Il est aisĂ© de comprendre pourquoi les rĂȘves ont jouĂ© et jouent un rĂŽle important pour guider les comportements de nombreuses civilisations anciennes. Il est aisĂ© de comprendre, Ă©galement, pourquoi des rites sont proposĂ©s avant lÂŽendormissement par les religions ou sur le chemin de lÂŽinitiation (rĂ©trospection, priĂšres, mĂ©ditations, exercices respiratoires, relaxation, etc...). Ils ont pour but de purifier les corps astral ou mental des substances grossiĂšres qui auraient pu les pĂ©nĂ©trer au cours de la journĂ©e et dÂŽorienter la conscience vers des plans vibratoires Ă©levĂ©s de lÂŽUnivers.
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Marie-France Bel (Corps Subtils, Science et Médecine)
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Ce n'est pas par l'importation de l'or et de l'argent que la dĂ©couverte de l'AmĂ©rique a enrichi l'Europe. [...] En ouvrant Ă  toutes les marchandises de l'Europe un nouveau marchĂ© presque inĂ©puisable, elle a donnĂ© naissance Ă  de nouvelles divisions de travail, Ă  de nouveaux perfectionnements de l'industrie, qui n'auraient jamais pu avoir lieu dans le cercle Ă©troit oĂč le commerce Ă©tait anciennement resserrĂ©, cercle qui ne leur offrait pas de marchĂ© suffisant pour la plus grande partie de leur produit. Le travail se perfectionna, sa puissance productive augmenta, son produit s'accrut dans tous les divers pays de l'Europe, et en mĂȘme temps s'accrurent avec lui la richesse et le revenu rĂ©el des habitants.
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Adam Smith (An Inquiry into the Nature and Causes of the Wealth of Nations)
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MalgrĂ© leur nombre et un siĂšcle de recherches, l'Ă©criture libyque garde encore aujourd'hui une grande partie de ses secrets. En effet, ces inscriptions demeurent pour l'essentiel indĂ©chiffrĂ©s, mĂȘme si quelques-unes bilingues ont apportĂ© quelques lueurs. "Aussi, c'est sans surprise que l'on constate qu'il a pu rĂ©gner chez certains auteurs, un doute tenace quant Ă  la parentĂ© du libyque et du berbĂšre. ... C'est pourquoi L. Galand en arrivait Ă  se demander si ces inscriptions libyques (ou, du moins, un certain nombre d'entre elles) n'Ă©taient pas rĂ©digĂ©es dans une langue qui n'aurait pas de rapports directs avec le berbĂšre". Il faut espĂ©rer qu'un jour, les spĂ©cialistes en libyque pourront apporter une solution Ă  ce problĂšme.
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Ait Ali Yahia Samia (Les stĂšles Ă  inscriptions libyques de la Grande Kabylie)
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NaguĂšre Raymond s'Ă©tonnait de sentir Ă  sa portĂ©e la fameuse Maria Cross; il se rĂ©pĂ©tait : « Cette petite femme si simple, c'est Maria Cross. » Et il n'aurait eu qu'Ă  tendre la main : elle Ă©tait lĂ , soumise, inerte, il aurait pu la prendre, la laisser tomber, la ressaisir; — et tout Ă  coup le geste de ses bras tendus avait suffi pour Ă©loigner cette Maria vertigineusement. Ah! elle Ă©tait lĂ  encore; mais il savait d'une science sĂ»re que dĂ©sormais il ne la toucherait pas plus qu'une Ă©toile. Ce fut alors qu'il vit qu'elle Ă©tait belle : tout occupĂ© de savoir comment cueillir et manger le fruit, sans mettre une seconde en doute que ce fruit lui fĂ»t destinĂ©, il ne l'avait jamais regardĂ©e ; — cela te reste maintenant de la dĂ©vorer des yeux.
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François Mauriac (Le désert de l'amour (Littérature) (French Edition))
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Il avait pris le temps de l’analyser sous tous les angles et il aurait pu la reconnaĂźtre parmi des milliers de personnes. Il ne pouvait pas nier qu’il la trouvait intrigante
 Et il n’était pas du genre Ă  refouler ses fantasmes. Il savait que Lee le dĂ©testait, mais lui, il ne l’avait pas oubliĂ©e. Comment pourrait-il l’oublier ? Depuis le tournoi, il n’avait jamais oubliĂ© la flamme qu’il avait vue dans ses yeux au moment de sa dĂ©faite. Il l’avait Ă©crasĂ©e et il n’éprouvait pas une once de culpabilité  Elle le mĂ©ritait, ce n’était qu’une petite vantarde. Ce dĂ©sir qu’il Ă©prouvait pour elle aurait dĂ» se dissiper depuis autant d’annĂ©es, et pourtant, il brĂ»lait toujours en lui. Il Ă©tait mĂȘme devenu plus intense, plus fou. Il se rĂ©jouissait de pouvoir la traquer, il adorait jouer.
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Myosotis (Vices et Maléfices (Sexe, Secrets & SortilÚges #1))
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L'affaire du couvent des PĂšres Blancs ne fut pas mauvaise. J'aurais pu faire main basse sur bien des choses prĂ©cieuses mais, pour ĂȘtre un indĂ©vot, je ne suis pas un incroyant et l'idĂ©e seule de m'emparer d'objets du culte, mĂȘme s'ils sont d'or et d'argent massifs, m'emplit d'horreur. Les bons moins pleureront leurs palimpsestes, incunables et antiphonaires disparus, mais ils loueront le Seigneur d'avoir dĂ©tournĂ© une main impie de leurs ciboires et de leurs ostensoirs. [...] La vente du buste du dieu Terme m'a rapportĂ© une fortune...oui, une fortune. Le quart m'a suffit pour racheter les parchemins, incunables et antiphonaires dĂ©robĂ©s aux bons PĂšres Blancs. Demain, je leur enverrai leur bien en leur demandant des priĂšres...et non pour moi seul. Mais j'ai gardĂ© le mĂ©moire. Ils me doivent bien cela.
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Jean Ray (Malpertuis: The Classic Modern Gothic Novel)
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Ni l’Inde ni les pythagoriciens n’ont pratiquĂ© la science actuelle, et isoler chez eux les Ă©lĂ©ments de technique rationnelle, qui rappellent notre science, des Ă©lĂ©ments mĂ©taphysiques, qui ne la rappellent point, c’est une opĂ©ration arbitraire et violente, contraire Ă  l’objectivitĂ© vĂ©ritable. Platon ainsi dĂ©cantĂ© n’a plus qu’un intĂ©rĂȘt anecdotique alors que toute sa doctrine est d’installer l’homme dans la vie supratemporelle et supradiscursive de la pensĂ©e, dont les mathĂ©matiques, comme le monde sensible, peuvent ĂȘtre les symboles. Si donc les peuples ont pu se passer de notre science autonome pendant des millĂ©naires et sous tous les climats, c’est que cette science n’est pas nĂ©cessaire; et si elle est apparue comme phĂ©nomĂšne de civilisation brusquement et en un seul lieu, c’est pour rĂ©vĂ©ler son essence contingente.
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Fernand Brunner (Science et réalité)
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L'objet de leur discussion aperçut alors son reflet, comme elles auraient pu elles aussi le voir, dans un miroir Ă  cadre dorĂ© sur le mur opposĂ© : une silhouette Ă©trange, contorsionnĂ©e, une jambe enroulĂ©e sur l'autre, la main droite serrĂ©e dans la gauche, et une tĂȘte hirsute inclinĂ©e sur le cĂŽtĂ©. L'angle de vue effaçait le reste de la piĂšce et il donnait l'impression d'ĂȘtre seul au centre d'une immensitĂ© blanche. Un paysage de neige givrĂ© sur lequel tombaient les rayons du soleil. L'Ă©tĂ© arctique : rien ne bouge, rien ne vit et le ciel est dĂ©gagĂ©. Ce n'est pas moi, pensa-t-il. Et pourtant, si. Tout Ă©tait faux Ă  propos de cet homme. Jamais son reflet ne montrerait la vĂ©ritĂ© qu'il avait en vie de crier tout haut. (
) Alors qu'il avait cru pouvoir crier, une toute petite voix s'Ă©chappa de lui. ‘J'ai aimĂ©, leur dit-il. Ce qui signifie que j'ai vĂ©cu. A ma maniĂšre.’ Il n'y avait rien Ă  ajouter.
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Damon Galgut (Arctic Summer)
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Ce qui est tout Ă  fait extraordinaire, c’est la rapiditĂ© avec laquelle la civilisation du Moyen-Âge tomba dans le plus complet oubli ; les hommes du XVIIe siĂšcle n’en avaient plus la moindre notion, et les monuments qui en subsistaient ne reprĂ©sentaient plus rien Ă  leurs yeux, ni dans l’ordre intellectuel, ni mĂȘme dans l’ordre esthĂ©tique ; on peut juger par lĂ  combien la mentalitĂ© avait Ă©tĂ© changĂ©e dans l’intervalle. Nous n’entreprendrons pas de rechercher ici les facteurs, certainement fort complexes, qui concoururent Ă  ce changement, si radical qu’il semble difficile d’admettre qu’il ait pu s’opĂ©rer spontanĂ©ment et sans l’intervention d’une volontĂ© directrice dont la nature exacte demeure forcĂ©ment assez Ă©nigmatique ; il y a, Ă  cet Ă©gard, des circonstances bien Ă©tranges, comme la vulgarisation, Ă  un moment dĂ©terminĂ©, et en les prĂ©sentant comme des dĂ©couvertes nouvelles, de choses qui Ă©taient connues en rĂ©alitĂ© depuis fort longtemps, mais dont la connaissance, en raison de certains inconvĂ©nients qui risquaient d’en dĂ©passer les avantages, n’avait pas Ă©tĂ© rĂ©pandue jusque lĂ  dans le domaine public (1). Il est bien invraisemblable aussi que la lĂ©gende qui fit du moyen Ăąge une Ă©poque de « tĂ©nĂšbres », d’ignorance et de barbarie, ait pris naissance et se soit accrĂ©ditĂ©e d’elle-mĂȘme, et que la vĂ©ritable falsification de l’histoire Ă  laquelle les modernes se sont livrĂ©s ait Ă©tĂ© entreprise sans aucune idĂ©e prĂ©conçue ; mais nous n’irons pas plus avant dans l’examen de cette question, car, de quelque façon que ce travail se soit accompli, c’est, pour le moment, la constatation du rĂ©sultat qui, en somme, nous importe le plus. (1) Nous ne citerons que deux exemples, parmi les faits de ce genre qui devaient avoir les plus graves consĂ©quences : la prĂ©tendue invention de l’imprimerie, que les Chinois connaissaient antĂ©rieurement Ă  l’ùre chrĂ©tienne et la dĂ©couverte « officielle » de l’AmĂ©rique, avec laquelle des communications beaucoup plus suivies qu’on ne le pense avaient existĂ© durant tout le moyen Ăąge.
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René Guénon (The Crisis of the Modern World)
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La Grande Terreur ne fut ni la premiĂšre vague d’arrestations en Union soviĂ©tique, ni la plus grande : les prĂ©cĂ©dents accĂšs de terreur avaient Ă©tĂ© largement dirigĂ©s contre les paysants et les minoritĂ©s ethniques, notamment ceux qui vivaient Ă  proximitĂ© de la frontiĂšre soviĂ©tique. Mais elle fut la premiĂšre Ă  viser la haute direction du Parti, et suscita un profond malaise chez les communistes, au pays comme Ă  l’étranger. Le moment venu, la Grande Terreur aurait pu conduire Ă  une vĂ©ritable dĂ©sillusion. Mais, par un effet du hasard, la Seconde Guerre mondiale sauva le stalinisme – et Staline. MalgrĂ© le chaos et les erreurs, malgrĂ© les morts en masse et l’immensitĂ© des destructions, la victoire conforta la lĂ©gitimitĂ© du sytĂšme et de son dirigeant, en « prouvant » la valeur. Au lendemain de la victoire, le culte quasi religieux de Staline atteignit de nouveaux sommets. La propagande soviĂ©tique dĂ©crivit le leader soviĂ©tique comme « l’incarnation de leur hĂ©roĂŻsme, de leur patriotisme et de leur dĂ©vouement Ă  la Patrie socialiste »
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Anne Applebaum (Iron Curtain: The Crushing of Eastern Europe 1944-1956)
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Ce que l'ingĂ©niositĂ© des hommes nous a offert dans ces cent derniĂšres annĂ©es aurait pu faciliter une vie libre et heureuse, si le progrĂšs entre les humains s'effectuait en mĂȘme temps que les progrĂšs sur les choses. Or le rĂ©sultat laborieux ressemble pour ceux de notre gĂ©nĂ©ration Ă  ce que serait un rasoir pour un enfant de trois ans. La conquĂȘte de fabuleux moyens de production n'a pas apportĂ© la libertĂ©, mais les angoisses et la faim. Pire encore, les progrĂšs techniques fournissent les moyens d'anĂ©antir la vie humaine et tout ce qui a Ă©tĂ© durement créé par l'homme. Nous, les anciens, avons vĂ©cu cette abomination pensant la guerre mondiale. Mais plus ignoble que cet anĂ©antissement, nous avons vĂ©cu l'esclavage ignominieux oĂč l'homme se voit entraĂźnĂ© par la guerre ! N'est-il pas Ă©pouvantable d'ĂȘtre contraint par la communautĂ© d'accomplir des actes que chacun, face Ă  sa conscience, juge criminels ? Or peu d'ĂȘtres ont rĂ©vĂ©lĂ© une telle grandeur d'Ăąme qu'ils ont refusĂ© de les commettre. A mes yeux pourtant ils sont les vrais hĂ©ros de la guerre mondiale.
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Albert Einstein (The World As I See It)
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Esther n'Ă©tait certainement pas bien Ă©duquĂ©e au sens habituel du terme, jamais l'idĂ©e ne lui serait venue de vider un cendrier ou de dĂ©barrasser le relief de ses repas, et c'est sans la moindre gĂȘne qu'elle laissait la lumiĂšre allumĂ©e derriĂšre elle dans les piĂšces qu'elle venait de quitter (il m'est arrivĂ©, suivant pas Ă  pas son parcours dans ma rĂ©sidence de San Jose, d'avoir Ă  actionner dix-sept commutateurs); il n'Ă©tait pas davantage question de lui demander de penser Ă  faire un achat, de ramener d'un magasin oĂč elle se rendait une course non destinĂ©e Ă  son propre usage, ou plus gĂ©nĂ©ralement de rendre un service quelconque. Comme toutes les trĂšs jolies jeunes filles elle n'Ă©tait au fond bonne qu'Ă  baiser, et il aurait Ă©tĂ© stupide de l'employer Ă  autre chose, de la voir autrement que comme un animal de luxe, en tout choyĂ© et gĂ„tĂ©, protĂ©gĂ© de tout souci comme de toute tĂąche ennuyeuse ou pĂ©nible afin de mieux pouvoir se consacrer Ă  son service exclusivement sexuel. Elle n'en Ă©tait pas moins trĂšs loin d'ĂȘtre ce monstre d'arrogance, d'Ă©goĂŻsme absolu et froid, au, pour parler en termes plus baudelairiens, cette infernale petite salope que sont la plupart des trĂšs jolies jeunes filles; il y avait en elle la conscience de la maladie, de la faiblesse et de la mort. Quoique belle, trĂšs belle, infiniment Ă©rotique et dĂ©sirable, Esther n'en Ă©tait pas moins sensible aux infirmitĂ©s animales, parce qu'elle les connaissait ; c'est ce soir-lĂ  que j'en pris conscience, et que je me mis vĂ©ritablement Ă  l'aimer. Le dĂ©sir physique, si violent soit-il, n'avait jamais suffi chez moi Ă  conduire Ă  l'amour, il n'avait pu atteindre ce stade ultime que lorsqu'il s'accompagnait, par une juxtaposition Ă©trange, d'une compassion pour l'ĂȘtre dĂ©sirĂ© ; tout ĂȘtre vivant, Ă©videmment, mĂ©rite la compassion du simple fait qu'il est en vie et se trouve par lĂ -mĂȘme exposĂ© Ă  des souffrances sans nombre, mais face Ă  un ĂȘtre jeune et en pleine santĂ© c'est une considĂ©ration qui paraĂźt bien thĂ©orique. Par sa maladie de reins, par sa faiblesse physique insoupçonnable mais rĂ©elle, Esther pouvait susciter en moi une compassion non feinte, chaque fois que l'envie me prendrait d'Ă©prouver ce sentiment Ă  son Ă©gard. Étant elle-mĂȘme compatissante, ayant mĂȘme des aspirations occasionnelles Ă  la bontĂ©, elle pouvait Ă©galement susciter en moi l'estime, ce qui parachevait l'Ă©difice, car je n'Ă©tais pas un ĂȘtre de passion, pas essentiellement, et si je pouvais dĂ©sirer quelqu'un de parfaitement mĂ©prisable, s'il m'Ă©tait arrivĂ© Ă  plusieurs reprises de baiser des filles dans l'unique but d'assurer mon emprise sur elles et au fond de les dominer, si j'Ă©tais mĂȘme allĂ© jusqu'Ă  utiliser ce peu louable sentiment dans des sketches, jusqu'Ă  manifester une comprĂ©hension troublante pour ces violeurs qui sacrifient leur victime immĂ©diatement aprĂšs avoir disposĂ© de son corps, j'avais par contre toujours eu besoin d'estimer pour aimer, jamais au fond je ne m'Ă©tais senti parfaitement Ă  l'aise dans une relation sexuelle basĂ©e sur la pure attirance Ă©rotique et l'indiffĂ©rence Ă  l'autre, j'avais toujours eu besoin, pour me sentir sexuellement heureux, d'un minimum - Ă  dĂ©faut d'amour - de sympathie, d'estime, de comprĂ©hension mutuelle; l'humanitĂ© non, je n'y avais pas renoncĂ©. (La possibilitĂ© d'une Ăźle, Daniel 1,15)
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Michel Houellebecq
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Mais maintenant je dirai tout, afin que tu saches qui tu quittes, de quel homme tu te sĂ©pares. Sais-tu comment d’abord je t’ai comprise ? La passion m’a saisi comme le feu, elle s’est infiltrĂ©e dans mon sang comme le poison et a troublĂ© toutes mes pensĂ©es, tous mes sentiments. J’étais enivrĂ©. J’étais comme Ă©tourdi, et Ă  ton amour pur, misĂ©ricordieux, j’ai rĂ©pondu non d’égal Ă  Ă©gal, non comme si j’étais digne de ton amour, mais sans comprendre ni sentir. Je ne t’ai pas comprise. Je t’ai rĂ©pondu comme Ă  la femme qui, Ă  mon point de vue, s’oubliait jusqu’à moi et non comme Ă  celle qui voulait m’élever jusqu’à elle. « Sais-tu de quoi je t’ai soupçonnĂ©e, ce que signifiait, s’oublier jusqu’à moi » ? Mais non, je ne t’offenserai pas par mon aveu. Je te dirai seulement que tu t’es profondĂ©ment trompĂ©e sur moi ! Jamais jamais, je n’aurais pu m’élever jusqu’à toi. Je ne pouvais que te contempler dans ton amour illimitĂ©, une fois que je t’eus comprise. Mais cela n’efface pas ma faute. Ma passion rehaussĂ©e par toi n’était pas l’amour. L’amour, je ne le craignais pas. Je n’osais pas t’aimer. Dans l’amour il y a rĂ©ciprocitĂ©, Ă©galité ; et j’en Ă©tais indigne. Je ne savais pas ce qui Ă©tait en moi !
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Fyodor Dostoevsky (Netochka Nezvanova)
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Comment se fait-il que l'humanitĂ©, en dĂ©pit de ressources planĂ©taires suffisantes et de ses prouesses technologiques sans prĂ©cĂ©dent, ne parvienne pas Ă  faire en sorte que chaque ĂȘtre humain puisse se nourrir, se vĂȘtir, s'abriter, se soigner et dĂ©velopper les potentiels nĂ©cessaires Ă  son accomplissement? Comment se fait-il que la moitiĂ© du genre humain, constituĂ©e par le monde fĂ©minin, soit toujours subordonnĂ©e Ă  l'arbitraire d'un masculin outrancier et violent? Comment se fait-il que le monde animal, Ă  savoir les crĂ©atures compagnes de notre destin et auxquelles nous devons mĂȘme notre propre survie Ă  travers l'histoire, soit ravalĂ© dans notre sociĂ©tĂ© d'hyperconsommation Ă  des masses ou Ă  des fabriques de protĂ©ines. Comment les mammifĂšres bipĂšdes auxquels j'appartiens ont-ils pu se croire le droit d'exercer d’innombrables exactions sur le monde animal, domestique ou sauvage? Comment se fait-il que nous n'ayons pas pris conscience de la valeur inestimable de notre petite planĂšte, seule oasis de vie au sein d'un dĂ©sert sidĂ©ral infini, et que nous ne cessions de la piller, de la polluer, de la dĂ©truire aveuglĂ©ment au lieu d'en prendre soin et d'y construire la paix et la concorde entre les peuples?
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Pierre Rabhi (La part du colibri: L'EspĂšce humaine face Ă  son devenir)
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Wilhelm, que serait pour notre cƓur le monde sans l’amour ? Ce qu’une lanterne magique est sans lumiĂšre. A peine la petite lampe est-elle introduite, que les images les plus variĂ©es apparaissent sur la muraille blanche. Et ne fussent-elles que des fantĂŽmes passagers, cela fait pourtant notre bonheur, lorsque nous nous arrĂȘtons devant, comme des enfants joyeux, nous extasiant sur ces apparitions merveilleuses. Aujourd’hui je n’ai pu aller voir Charlotte : une sociĂ©tĂ© inĂ©vitable m’a retenu. Que faire ? J’ai envoyĂ© chez elle mon domestique, uniquement pour avoir quelqu’un prĂšs de moi qui eĂ»t approchĂ© d’elle aujourd’hui. Avec quelle impatience je l’attendais ! avec quelle joie je l’ai revu ! Je l’aurais embrassĂ©, si j’avais osĂ© m’en croire. On conte que la pierre de Bologne, si on l’expose au soleil, en absorbe les rayons, et qu’elle Ă©claire quelque temps pendant la nuit. Il en Ă©tait de mĂȘme pour moi de ce garçon. L’idĂ©e que les yeux de Charlotte s’étaient arrĂȘtĂ©s sur son visage, sur ses joues, sur les boutons de son habit et le collet de son surtout, me rendait tout cela prĂ©cieux et sacrĂ©. Dans ce moment, je n’aurais pas donnĂ© mon valet pour mille Ă©cus. Sa prĂ©sence nie faisait du bien
. Dieu te garde d’en rire ! Wilhelm, sont-ce lĂ  des fantĂŽmes, si nous sommes heureux ?
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Johann Wolfgang von Goethe (The Sorrows of Young Werther)
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Il y a quelque chose d’ineffablement touchant dans notre campagne pĂ©tersbourgeoise, quand, au printemps, elle dĂ©ploie soudain toute sa force, s’épanouit, se pare, s’enguirlande de fleurs. Elle me fait songer Ă  ces jeunes filles languissantes, anĂ©miĂ©es, qui n’excitent que la pitiĂ©, parfois l’indiffĂ©rence, et brusquement, du jour au lendemain, deviennent inexprimablement merveilleuses de beautĂ©: vous demeurez stupĂ©faits devant elles, vous demandant quelle puissance a mis ce feu inattendu dans ces yeux tristes et pensifs, qui a colorĂ© d’un sang rose ces joues pĂąles naguĂšre, qui a rĂ©pandu cette passion sur ces traits qui n’avaient pas d’expression, pourquoi s’élĂšvent et s’abaissent si profondĂ©ment ces jeunes seins ? Mon Dieu ! qui a pu donner Ă  la pauvre fille cette force, cette soudaine plĂ©nitude de vie, cette beautĂ© ? Qui a jetĂ© cet Ă©clair dans ce sourire ? Qui donc fait ainsi Ă©tinceler cette gaietĂ© ? Vous regardez autour de vous, vous cherchez quelqu’un, vous devinez... Mais que les heures passent et peut-ĂȘtre demain retrouverezvous le regard triste et pensif d’autrefois, le mĂȘme visage pĂąle, les mĂȘmes allures timides, effacĂ©es : c’est le sceau du chagrin, du repentir, c’est aussi le regret de l’épanouissement Ă©phĂ©mĂšre... et vous dĂ©plorez que cette beautĂ© se soit fanĂ©e si vite : quoi ! vous n’avez pas mĂȘme eu le temps de l’aimer !...
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Fyodor Dostoevsky
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Donner un avis n’est pas compliquĂ©. On peut donner un avis au Maroc. On peut donner un avis sur la monarchie. Et d’ailleurs, on peut le voir, le Maroc applique une relative libertĂ© oĂč tout est accessible en termes de mĂ©dias. Tous les sites internet sont accessibles Ă  partir du Maroc et aucun site n’est bloquĂ©. Il y a peu de pays identiques. Il n’y a pas de sites bloquĂ©s. Vous allez en Turquie, c’est diffĂ©rent. Vous allez en ThaĂŻlande, ce n’est pas la mĂȘme chose. Vous pouvez aller dans beaucoup de pays oĂč j’ai pu voyager, il y a beaucoup de sites, parfois Facebook, parfois Twitter, qui sont soumis Ă  des restrictions. Au Maroc, il y a eu le blocage de la VoIP pour les communications Whatsapp, ça a Ă©tĂ© un scandale et ça a Ă©tĂ© rĂ©tabli. Il y a, surtout sur les rĂ©seaux sociaux et sur internet, une libertĂ© absolue. LibertĂ© ne rime pas avec qualitĂ©. Parce qu’il y a toutes sortes de choses dans cette libertĂ©. Il y a des sites qui sont orduriers. Ce n’est pas non plus la panacĂ©e, la libertĂ© absolue. Encore faut-il qu’il y ait un peu de rĂ©gulation. Il nous manque peut-ĂȘtre au Maroc un peu de rĂ©gulation
 Cela ne signifie pas qu’il faudrait interdire, loin de lĂ , mais peut-ĂȘtre essayer de sĂ©vir aussi et de faire respecter la loi
 Il ne faut pas non plus que ça soit l’anarchie, la diffamation, des maĂźtres chanteurs
 C’est quelque chose qui peut influer nĂ©gativement sur les mĂ©dias marocains qui sont sur le net. Entretien avec SouleĂŻman Bencheikh : « C’est quand mĂȘme mieux ici qu’en Turquie
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SouleĂŻman Bencheikh
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Charlotte se trouvait seule ; aucun de ses frĂšres et sƓurs n’était autour d’elle ; elle s’abandonnait Ă  ses rĂ©flexions, qui passaient doucement sa situation en revue. Elle se voyait pour jamais unie Ă  un homme dont elle connaissait l’amour et la fidĂ©litĂ©, Ă  qui elle Ă©tait dĂ©vouĂ©e, dont le calme, la soliditĂ©, semblaient destinĂ©s par le ciel mĂȘme Ă  fonder, pour la vie, le bonheur d’une honnĂȘte femme ; elle sentait ce qu’il serait toujours pour elle et pour sa famille. D’un autre cĂŽtĂ©, Werther lui Ă©tait devenu bien cher ; dĂšs le premier moment oĂč ils avaient appris Ă  se connaĂźtre, la sympathie de leurs caractĂšres s’était rĂ©vĂ©lĂ©e de la maniĂšre la plus heureuse ; leur longue liaison, tant de situations diverses oĂč ils s’étaient trouvĂ©s, avaient fait sur le cƓur de Charlotte une impression ineffaçable. Tous les sentiments, toutes les pensĂ©es qui l’intĂ©ressaient, elle Ă©tait accoutumĂ©e Ă  les partager avec lui, et le dĂ©part de Werther menaçait de faire dans toute son existence un vide, qui ne pourrait plus ĂȘtre comblĂ©. Oh ! si elle avait pu dans ce moment le changer en un frĂšre ! qu’elle se serait trouvĂ©e heureuse !
 Si elle avait osĂ© le marier avec une de ses amies, elle aurait pu espĂ©rer de rĂ©tablir tout Ă  fait la bonne intelligence entre Albert et lui. Elle avait passĂ© en revue toutes ses amies, et trouvait Ă  chacune quelque dĂ©faut ; elle n’en voyait aucune Ă  qui elle eĂ»t donnĂ© Werther volontiers. En faisant toutes’ces rĂ©flexions, elle finit par sentir profondĂ©ment, sans se l’expliquer d’une maniĂšre bien claire, que le secret dĂ©sir, de son cƓur Ă©tait de le garder pour elle, et elle se disait en mĂȘme temps qu’elle ne pouvait, qu’elle ne devait pas le garder ; son Ăąme pure et belle, jusqu’alors si libre et si courageuse, sentit le poids d’une mĂ©lancolie Ă  laquelle est fermĂ©e la perspective du bonheur. Son cƓur Ă©tait oppressĂ©, et un sombre nuage couvrait ses yeux.
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Johann Wolfgang von Goethe (The Sorrows of Young Werther)
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A ce discours, Candide s’évanouit encore; mais revenue Ă  soi, et ayant dit tout ce qu’il devait dire, il s’enquit de la cause et de l’effet, et de la raison suffisante qui avait mis Pangloss dans un si piteux Ă©tat. HĂ©las! dit l’autre, c’est l’amour: l’amour, le consolateur du genre humain, le conservateur de l’univers, l’ñme de tous les ĂȘtres sensibles, le tender amour. HĂ©las! dit Candide, je l’ai connu cet amour, ce souverain des coeurs, cette Ăąme de notre Ăąme, il ne m’a jamais valu qu’un baiser et vingt coups de pied au cul. Comment cette belle cause a-t-elle pu produire en vous un effet si abominable? Pangloss rĂ©pondit en ces termes: O mon cher Candide! vous avez connu Paquette, cette jolie suivante de notre auguste baronne: j’ai goĂ»tĂ© dans ses bras les dĂ©lices du paradis, qui ont produit ces tourments d’enfer dont vous me voyez dĂ©vorĂ©; elle en Ă©tait infectĂ©e, elle en est peut-ĂȘtre morte. Paquette tenait ce present d’un Cordelier trĂšs savant qui avait remontĂ© Ă  la source, car il l’avait eu d’une vieille comtesse, qui l’avait reçu d’un capitaine de cavalerie, qui le devait Ă  une marquise, qui le tenait d’un page, qui l’avait reçu d’un jĂ©suite, qui, Ă©tant novice, l’avait eu en droite ligne d’un des compagnons de Christophe Colomb. Pour moi, je ne le donnerai Ă  personne, car je me meurs. O Pangloss! s’écria Candide, voilĂ  une Ă©trange gĂ©nĂ©alogie! n’est-ce pas le diable qui en fut la souche? Point du tout, rĂ©pliqua ce grand home; c’était une chose indispensable dans le meilleur des mondes, un ingredient nĂ©cessaire; car si Colomb n’avait pas attrapĂ© dans une Ăźle de l'AmĂ©rique cette maladie qui empoisonne la source de la generation, qui souvent meme empĂȘche la generation, et qui est Ă©videmment l’opposĂ© du grand but de la nature, nous n’aurions ni le chocolat ni la cochenille; il faut encore observer que jusqu’aujourd’hui, dans notre continent, cette maladie nous est particuliĂšre, comme la controverse.
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Voltaire (Candide)
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- Je souhaite ne jamais te voir, rĂ©pondit la Fadette trĂšs durement ; et n'importe quelle chose tu m'apporteras, tu peux bien compter que je te la jetterai au nez. - VoilĂ  des paroles trop rudes pour quelqu'un qui vous offre rĂ©paration. Si tu ne veux point de cadeau, il y a peut-ĂȘtre moyen de te rendre service et de te montrer par lĂ  qu'on te veut du bien et non pas du mal. Allons, dis-moi ce que j'ai Ă  faire pour te contenter. - Vous ne sauriez donc me demander pardon et souhaiter mon amitiĂ© ? dit la Fadette en s'arrĂȘtant. - Pardon, c'est beaucoup demander, rĂ©pondit Landry, qui ne pouvait vaincre sa hauteur Ă  l'endroit d'une fille qui n'Ă©tait point considĂ©rĂ©e en proportion de l'Ăąge qu'elle commençait Ă  avoir, et qu'elle ne portait pas toujours aussi raisonnablement qu'elle l'aurait dĂ» ; quant Ă  ton amitiĂ©, Fadette, tu es si drĂŽlement bĂątie dans ton esprit, que je ne saurais y avoir grand'fiance. Demande-moi donc une chose qui puisse se donner tout de suite, et que je ne sois pas obligĂ© de te reprendre. - Eh bien, dit la Fadette d'une voix claire et sĂšche, il en sera comme vous le souhaitez, besson Landry. Je vous ai offert votre pardon, et vous n'en voulez point. À prĂ©sent, je vous rĂ©clame ce que vous m'avez promis, qui est d'obĂ©ir Ă  mon commandement, le jour oĂč vous en serez requis. Ce jour-lĂ , ce ne sera pas plus tard que demain Ă  la Saint-Andoche, et voici ce que je veux : Vous me ferez danser trois bourrĂ©es aprĂšs la messe, deux bourrĂ©es aprĂšs vĂȘpres, et encore deux bourrĂ©es aprĂšs l'AngĂ©lus, ce qui fera sept. Et dans toute votre journĂ©e, depuis que vous serez levĂ© jusqu'Ă  ce que vous soyez couchĂ©, vous ne danserez aucune autre bourrĂ©e avec n'importe qui, fille ou femme. Si vous ne le faites, je saurai que vous avez trois choses bien laides en vous : l'ingratitude, la peur et le manque de parole. Bonsoir, je vous attends demain pour ouvrir la danse, Ă  la porte de l'Ă©glise. Et la petite Fadette, que Landry avait suivie jusqu'Ă  sa maison, tira la corillette et entra si vite que la porte fut poussĂ©e et recorillĂ©e avant que le besson eĂ»t pu rĂ©pondre un mot.
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George Sand (La Petite Fadette)
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Un matin oĂč j’étais Ă  l’école, un incident a eu lieu sur notre parcelle en prĂ©sence de Papa. Une violente dispute avait Ă©clatĂ© entre ProthĂ© et Innocent. Je ne sais pas de quoi il s’agissait, mais Innocent a levĂ© la main sur ProthĂ©. Papa a immĂ©diatement licenciĂ© Innocent, qui ne voulait pas prĂ©senter ses excuses et qui menaçait tout le monde. La tension permanente rendait les gens nerveux. Ils devenaient sensibles au moindre bruit, Ă©taient sur leurs gardes dans la rue, regardaient dans leur rĂ©troviseur pour ĂȘtre sĂ»rs de n’ĂȘtre pas suivi. Chacun Ă©tait aux aguets. Un jour, en plein cours de gĂ©ographie, un pneu a Ă©clatĂ© derriĂšre la clĂŽture, sur le boulevard de l’IndĂ©pendance, et toute la classe, y compris le professeur, s’est jetĂ© Ă  plat ventre sous les tables. À l’école, les relations entre les Ă©lĂšves burundais avaient changĂ©. C’était subtil, mais je m’en rendais compte. Il y avait beaucoup d’allusions mystĂ©rieuses, de propos implicites. Lorsqu’il fallait crĂ©er des groupes, en sport ou pour prĂ©parer des exposĂ©s, on dĂ©celait rapidement une gĂȘne. Je n’arrivais pas Ă  m’expliquer ce changement brutal, cet embarras palpable. Jusqu’à ce jour, Ă  la rĂ©crĂ©ation, oĂč deux garçons burundais se sont battus derriĂšre le grand prĂ©au, Ă  l’abri du regard des profs et des surveillants. Les autres Ă©lĂšves burundais, Ă©chaudĂ©s par l’altercation, se sont rapidement sĂ©parĂ©s en deux groupes, chacun soutenant un garçon. « Sales Hutu », disaient les uns, « sales Tutsi » rĂ©pliquaient les autres. Cet aprĂšs-midi-lĂ , pour la premiĂšre fois de ma vie, je suis entrĂ© dans la rĂ©alitĂ© profonde de ce pays. J’ai dĂ©couvert l’antagonisme hutu et tutsi, infranchissable ligne de dĂ©marcation qui obligeait chacun Ă  ĂȘtre d’un camp ou d’un autre. Ce camp, tel un prĂ©nom qu’on attribue Ă  un enfant, on naissait avec, et il nous poursuivait Ă  jamais. Hutu ou tutsi. C’était soit l’un soit l’autre. Pile ou face. Comme un aveugle qui recouvre la vue, j’ai alors commencĂ© Ă  comprendre les gestes et les regards, les non-dits et les maniĂšres qui m’échappaient depuis toujours. La guerre, sans qu’on lui demande, se charge toujours de nous trouver un ennemi. Moi qui souhaitais rester neutre, je n’ai pas pu. J’étais nĂ© avec cette histoire. Elle coulait en moi. Je lui appartenais.
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Gaël Faye (Petit pays)
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Si l’humanitĂ© s’est Ă©cartĂ©e des conditions initiales dont je parlais, si elle a renoncĂ©, sans le savoir et sans le vouloir, Ă  la stabilitĂ© Ă  laquelle elle pouvait tendre, on pouvait supposer qu’étant arrivĂ©e Ă  un certain niveau, elle s’y serait stabilisĂ©e, comme les abeilles ont pu se stabiliser (elles ont trouvĂ© certains procĂ©dĂ©s de construction, d’accumulation des rĂ©serves), et demeurer en cet Ă©tat indĂ©finiment, comme il semble que les abeilles y soient demeurĂ©es, nous aurions pu arriver Ă  concevoir une humanitĂ© comme une fourmiliĂšre ou une ruche d’abeilles. Pas du tout. Elle n’a cessĂ© de s’écarter de son bien-ĂȘtre, le bien-ĂȘtre n’a pas suffi Ă  l’humanitĂ©. HĂ©las ! dans bien des cas on pourrait se lamenter Ă  ce sujet et pleurer, mais il s’est trouvĂ© toujours que les hommes se soient Ă©cartĂ©s de la norme dĂ©jĂ  Ă©tablie, que des hommes, des penseurs par exemple aient spĂ©culĂ© assez pour trouver que la stabilitĂ© acquise Ă©tait une stabilitĂ© insuffisante, trĂšs insuffisante. C’est pourquoi j’ai pu prononcer dans ma derniĂšre leçon ce mot de l’aventure qui m’a paru rĂ©sumer la vie humaine dans son ensemble. L’aventure... c’est-Ă -dire ce fait qu’il y a eu un changement qui a toujours etendu Ă  repousser, Ă  nier, Ă  ruiner les conditions d’existence, mĂȘme favorables, mĂȘme satisfaisantes pour la majoritĂ© des individus, et qui a tendu Ă  dĂ©truire cet ordre-lĂ , Ă  le renverser. J’avais associĂ© Ă  ce mot-lĂ  le mot le plus connu de progrĂšs, mais je prĂ©fĂšre celui d’aventure, et je vais vous dire pourquoi le terme de progrĂšs, que j’ai essayĂ© de prĂ©ciser en le ramenant Ă  ce qui est observable, progrĂšs que j’ai dĂ©fini par l’accroissement de prĂ©cision dans les mesures marquĂ©es par les dĂ©cimales qu’on peut calculer et observer : progrĂšs dans l’acquisition des moyens d’action, progrĂšs de puissance mĂ©canique, nombre de chevaux-vapeur par tĂȘte Ă  telle Ă©poque, progrĂšs dans les automatismes sociaux, par consĂ©quent progrĂšs qui permet de commander beaucoup plus d’élĂ©ments humains ou matĂ©riels Ă  l’aide d’un plus petit effort, diminution de l’effort Ă  accomplir. Tout ceci est parfaitement observable, ce ne sont pas des chimĂšres. On a ajoutĂ© Ă  cela une vĂ©ritable religion du progrĂšs, qui fait croire que, quoi qu’il en soit aprĂšs bien des aventures, beaucoup d’expĂ©riences, l’humanitĂ© marche toujours vers une amĂ©lioration de son sort.
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Paul Valéry (Cours de poétique (Tome 1) - Le corps et l'esprit (1937-1940) (French Edition))
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en vĂ©ritĂ© il est trĂšs agrĂ©able de se rĂ©unir, de s’asseoir et de bavarder des intĂ©rĂȘts publics. Parfois mĂȘme je suis prĂȘt Ă  chanter de joie, quand je rentre dans la sociĂ©tĂ© et vois des hommes solides, sĂ©rieux, trĂšs bien Ă©levĂ©s, qui se sont rĂ©unis, parlent de quelque chose sans rien perdre de leur dignitĂ©. De quoi parlent-ils ? ça c’est une autre question. J’oublie mĂȘme, parfois, de pĂ©nĂ©trer le sens de la conversation, me contentant du tableau seul. Mais jusqu’ici, je n’ai jamais pu pĂ©nĂ©trer le sens de ce dont s’entretiennent chez nous les gens du monde qui n’appartiennent pas Ă  un certain groupe. Dieu sait ce que c’est. Sans doute quelque chose de charmant, puisque ce sont des gens charmants. Mais tout cela paraĂźt incomprĂ©hensible. On dirait toujours que la conversation vient de commencer ; comme si l’on accordait les instruments. On reste assis pendant deux heures et, tout ce temps, on ne fait que commencer la conversation. Parfois tous ont l’air de parler de choses sĂ©rieuses, de choses qui provoquent la rĂ©flexion. Mais ensuite, quand vous vous demandez de quoi ils ont parlĂ©, vous ĂȘtes incapable de le dire : de gants, d’agriculture, ou de la constance de l’amour fĂ©minin ? De sorte que, parfois, je l’avoue, l’ennui me gagne. On a l’impression de rentrer par une nuit sombre Ă  la maison en regardant tristement de cĂŽtĂ© et d’entendre soudain de la musique. C’est un bal, un vrai bal. Dans les fenĂȘtres brillamment Ă©clairĂ©es passent des ombres ; on entend des murmures de voix, des glissements de pas ; sur le perron se tiennent des agents. Vous passez devant, distrait, Ă©mu ; le dĂ©sir de quelque chose s’est Ă©veillĂ© en vous. Il vous semble avoir entendu le battement de la vie, et, cependant, vous n’emportez avec vous que son pĂąle motif, l’idĂ©e, l’ombre, presque rien. Et l’on passe comme si l’on n’avait pas confiance. On entend autre chose. On entend, Ă  travers les motifs incolores de notre vie courante, un autre motif, pĂ©nĂ©trant et triste, comme dans le bal des Capulet de Berlioz. L’angoisse et le doute rongent votre coeur, comme cette angoisse qui est au fond du motif lent de la triste chanson russe : Écoutez... d’autres sons rĂ©sonnent. Tristesse et orgie dĂ©sespĂ©rĂ©es... Est-ce un brigand qui a entonnĂ©, lĂ -bas, la chanson ? Ou une jeune fille qui pleure Ă  l’heure triste des adieux ? Non ; ce sont les faucheurs qui rentrent de leur travail... Autour sont les forĂȘts et les steppes de Saratov.
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Fyodor Dostoevsky
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On apprit qu’il avait Ă©tĂ© arrĂȘtĂ©, en dehors de la ville, en proie Ă  un accĂšs de folie furieuse. On l’avait conduit Ă  l’hĂŽpital oĂč il Ă©tait mort deux jours aprĂšs. Une mort pareille Ă©tait la consĂ©quence nĂ©cessaire, naturelle, de toute sa vie. Il devait mourir ainsi, quand tout ce qui le soutenait dans la vie disparaissait d’un coup comme une vision, comme un rĂȘve vide. Il mourut aprĂšs avoir perdu son dernier espoir, aprĂšs avoir eu la vision nette de tout ce qui avait leurrĂ© et soutenu sa vie. La vĂ©ritĂ© l’aveugla de son Ă©clat insoutenabe . et ce qui Ă©tait le mensonge lui apparut tel Ă  lui-mĂȘme. Pendant la derniĂšre heure de sa vie, il avait entendu un gĂ©nie merveilleux qui lui avait contĂ© sa propre existence et l’avait condamnĂ© pour toujours. Avec le dernier son jailli du violon du gĂ©nial S... s’était dĂ©voilĂ© Ă  ses yeux tout le mystĂšre de l’art, et le gĂ©nie, Ă©ternellement jeune, puissant et vrai, l’avait Ă©crasĂ© de sa vĂ©ritĂ©. Il semblait que tout ce qui l’avait tourmentĂ© durant toute sa vie, par des souffrances mystĂ©rieuses, indicibles, tout ce qu’il n’avait vu jusqu’à ce jour que dans un rĂȘve et qu’il fuyait avec horreur et se masquait par le mensonge de toute sa vie, tout ce qu’il pressentait et redoutait, tout cela, tout d’un coup, brillait Ă  ses yeux qui, obstinĂ©ment, ne voulaient par reconnaĂźtre que la lumiĂšre est la lumiĂšre, et que les tĂ©nĂšbres sont les tĂ©nĂšbres. La vĂ©ritĂ© Ă©tait intolĂ©rable pour ces yeux qui voyaient clair pour la premiĂšre fois ; elle l’aveugla et dĂ©truisit sa raison. Elle l’avait frappĂ© brusquement, comme la foudre. Soudain s’était rĂ©alisĂ© ce qu’il avait attendu toute sa vie avec un tremblement de terreur. Il semblait que durant toute sa vie une hache avait Ă©tĂ© suspendue au-dessus de sa tĂȘte ; que toute sa vie il avait attendu Ă  chaque instant, dans des souffrance indicibles, que cette hache le frappĂąt. Enfin elle l’avait frappĂ©. Le coup Ă©tait mortel. Il voulait s’enfuir, mais il ne savait oĂč aller. Le dernier espoir s’était Ă©vanoui, le dernier prĂ©texte anĂ©anti. Celle dont la vie lui avait Ă©tĂ© un fardeau pendant de longues annĂ©es, celle dont la mort, ainsi qu’il le croyait dans son aveuglement, devait amener sa rĂ©surrection Ă  lui, Ă©tait morte. Enfin il Ă©tait seul ; rien ne le gĂȘnait. Il Ă©tait enfin libre ! Pour la derniĂšre fois, dans un accĂšs de dĂ©sespoir, il avait voulu se juger soi-mĂȘme, se condamner impitoyablement comme un juge Ă©quitable ; mais son archet avait faibli et n’avait pu que rĂ©pĂ©ter faiblement la derniĂšre phrase musicale du gĂ©nie. À ce moment, la folie, qui le guettait depuis dix ans, l’avait frappĂ© irrĂ©missiblement
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Fyodor Dostoevsky (Netochka Nezvanova)
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« Les Arabes auraient facilement pu ĂȘtre aveuglĂ©s par leurs premiĂšres conquĂȘtes et maltraiter leurs opposants ou les forcer Ă  embrasser l'islam, qu'ils souhaitaient rĂ©pandre Ă  travers le monde. Mais ils Ă©vitĂšrent cela. Les premiers califes, qui possĂ©daient un gĂ©nie politique que l'on retrouve rarement chez les adhĂ©rents aux nouvelles religions, avaient compris que la religion et les systĂšmes de pensĂ©e ne s'imposent pas par la force. Alors, ils traitĂšrent les peuples de Syrie, d'Égypte, d'Espagne et de tous les pays dont ils prirent le contrĂŽle avec beaucoup de considĂ©ration, comme on a pu le voir. Ils leur permirent de conserver intactes leurs lois, leurs rĂšgles et leurs croyances et ne leur imposĂšrent que la jizya, qui Ă©tait d'un montant dĂ©risoire lorsque comparĂ© Ă  ce qu'ils avaient du payer comme taxes, auparavant, en Ă©change de leur sĂ©curitĂ©. La vĂ©ritĂ© est que jamais les nations n'avaient connu de conquĂ©rants plus tolĂ©rants que les musulmans ni de religion plus tolĂ©rante que l'Islam. » - La civilisation des arabes, p.154, __________________________ Remarque : La Jizya n'Ă©tait imposĂ© qu'aux hommes adultes en bonne santĂ©. Pas aux femmes, aux enfants, aux handicapĂ©s, aux personnes ĂągĂ©es, aux pauvres et aux moines. *************************** Le Coran est entrĂ© dans peu de dĂ©veloppements sur le droit de propriĂ©tĂ©, mais tout ce qui le concerne a Ă©tĂ© bien rĂ©glĂ© par les commentateurs. Ce droit a toujours Ă©tĂ© trĂšs respectĂ© par les Arabes, mĂȘme Ă  l'Ă©gard des peuples vaincus. La terre, qui Ă©tait enlevĂ©e Ă  ces derniers par la conquĂȘte, leur Ă©tait rendue moyennant un tribut qui dĂ©passait rarement le cinquiĂšme de la rĂ©colte. L'occupation individuelle fondĂ©e sur le travail constituait pour les Arabes un droit Ă  la propriĂ©tĂ©. Dans leur opinion, dĂ©fricher c'est vivifier la terre morte, crĂ©er une valeur, et par consĂ©quent un droit Ă  la propriĂ©tĂ©. La prescription n'Ă©tant pas reconnue par la plupart des commentateurs, le droit de revendication est illimitĂ©. Le rite malĂ©kite admet cependant la prescription par dix ans entre Ă©trangers, quarante entre parents. L'Ă©tranger ne peut acquĂ©rir de terre ni possĂ©der d'esclaves sur le sol musulman,mais ce terme d'Ă©trangers s'adresse seulement aux infidĂšles, les musulmans, Ă  quelque nation qu'ils appartiennent, ne sont jamais des Ă©trangers les uns pour les autres. Un Chinois mahomĂ©tan, par le seul fait qu'il est mahomĂ©tan, a sur le sol de l'islam tous les droits que peut possĂ©der l'Arabe qui y est nĂ©. Le droit musulman diffĂšre Ă  ce point de vue d'une façon fondamentale du droit civil chez les peuples EuropĂ©ens." Gustave Le Bon - La civilisation des arabes, Livre IV, section 2 : "Institutions sociales des arabes
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Gustave Le Bon (ۭ۶ۧ۱۩ Ű§Ù„Űč۱ۚ)
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Le « mythe », comme l’« idole » n’a jamais Ă©tĂ© qu’un symbole incompris : l’un est dans l’ordre verbal ce que l’autre est dans l’ordre figuratif ; chez les Grecs, la poĂ©sie produisit le premier comme l’art produisit la seconde ; mais, chez les peuples Ă  qui, comme les Orientaux, le naturalisme et l’anthropomorphisme sont Ă©galement Ă©trangers, ni l’un ni l’autre ne pouvaient prendre naissance, et ils ne le purent en effet que dans l’imagination d’Occidentaux qui voulurent se faire les interprĂštes de ce qu’ils ne comprenaient point. L’interprĂ©tation naturaliste renverse proprement les rapports : un phĂ©nomĂšne naturel peut, aussi bien que n’importe quoi dans l’ordre sensible, ĂȘtre pris pour symboliser une idĂ©e ou un principe, et le symbole n’a de sens et de raison d’ĂȘtre qu’autant qu’il est d’un ordre infĂ©rieur Ă  ce qui est symbolisĂ©. De mĂȘme, c’est sans doute une tendance gĂ©nĂ©rale et naturelle Ă  l’homme que d’utiliser la forme humaine dans le symbolisme ; mais cela, qui ne prĂȘte pas en soi Ă  plus d’objections que l’emploi d’un schĂ©ma gĂ©omĂ©trique ou de tout autre mode de reprĂ©sentation, ne constitue nullement l’anthropomorphisme, tant que l’homme n’est point dupe de la figuration qu’il a adoptĂ©e. En Chine et dans l’Inde, il n’y eut jamais rien d’analogue Ă  ce qui se produisit en GrĂšce, et les symboles Ă  figure humaine, quoique d’un usage courant, n’y devinrent jamais des « idoles » ; et l’on peut encore noter Ă  ce propos combien le symbolisme s’oppose Ă  la conception occidentale de l’art : rien n’est moins symbolique que l’art grec, et rien ne l’est plus que les arts orientaux ; mais lĂ  oĂč l’art n’est en somme qu’un moyen d’expression et comme un vĂ©hicule de certaines conceptions intellectuelles, il ne saurait Ă©videmment ĂȘtre regardĂ© comme une fin en soi, ce qui ne peut arriver que chez les peuples Ă  sentimentalitĂ© prĂ©dominante. C’est Ă  ces mĂȘmes peuples seulement que l’anthropomorphisme est naturel, et il est Ă  remarquer que ce sont ceux chez lesquels, pour la mĂȘme raison, a pu se constituer le point de vue proprement religieux ; mais, d’ailleurs, la religion s’y est toujours efforcĂ©e de rĂ©agir contre la tendance anthropomorphique et de la combattre en principe, alors mĂȘme que sa conception plus ou moins faussĂ©e dans l’esprit populaire contribuait parfois au contraire Ă  la dĂ©velopper en fait. Les peuples dits sĂ©mitiques, comme les Juifs et les Arabes, sont voisins sous ce rapport des peuples occidentaux : il ne saurait, en effet, y avoir d’autre raison Ă  l’interdiction des symboles Ă  figure humaine, commune au JudaĂŻsme et Ă  l’Islamisme, mais avec cette restriction que, dans ce dernier, elle ne fut jamais appliquĂ©e rigoureusement chez les Persans, pour qui l’usage de tels symboles offrait moins de dangers, parce que, plus orientaux que les Arabes, et d’ailleurs d’une tout autre race, ils Ă©taient beaucoup moins portĂ©s Ă  l’anthropomorphisme.
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René Guénon (Introduction to the Study of the Hindu Doctrines)
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Comme l'impĂŽt est obligatoire pour tous, qu'ils votent ou non, une large proportion de ceux qui votent le font sans aucun doute pour Ă©viter que leur propre argent ne soit utilisĂ© contre eux; alors que, en fait, ils se fussent volontiers abstenus de voter, si par lĂ  ils avaient pu Ă©chapper ne serait-ce qu'Ă  l'impĂŽt, sans parler de toutes les autres usurpations et tyrannies du gouvernement. Prendre le bien d'un homme sans son accord, puis conclure Ă  son consentement parce qu'il tente, en votant, d'empĂȘcher que son bien ne soit utilisĂ© pour lui faire tort, voilĂ  une preuve bien insuffisante de son consentement Ă  soutenir la Constitution. Ce n'est en rĂ©alitĂ© aucunement une preuve. Puisque tous les hommes qui soutiennent la Constitution en votant (pour autant qu'il existe de tels hommes) le font secrĂštement (par scrutin secret), et de maniĂšre Ă  Ă©viter toute responsabilitĂ© personnelle pour l'action de leurs agents ou reprĂ©sentants, on ne saurait dire en droit ou en raison qu'il existe un seul homme qui soutienne la Constitution en votant. Puisque tout vote est secret (par scrutin secret), et puisque tout gouvernement secret est par nĂ©cessitĂ© une association secrĂšte de voleurs, tyrans et assassins, le fait gĂ©nĂ©ral que notre gouvernement, dans la pratique, opĂšre par le moyen d'un tel vote prouve seulement qu'il y a parmi nous une association secrĂšte de voleurs, tyrans et assassins, dont le but est de voler, asservir et -- s'il le faut pour accomplir leurs desseins -- assassiner le reste de la population. Le simple fait qu'une telle association existe ne prouve en rien que "le peuple des Etats-Unis", ni aucun individu parmi ce peuple, soutienne volontairement la Constitution. Les partisans visibles de la Constitution, comme les partisans visibles de la plupart des autres gouvernements, se rangent dans trois catĂ©gories, Ă  savoir: 1. Les scĂ©lĂ©rats, classe nombreuse et active; le gouvernement est pour eux un instrument qu'ils utiliseront pour s'agrandir ou s'enrichir; 2. Les dupes -- vaste catĂ©gorie, sans nul doute, dont chaque membre, parce qu'on lui attribue une voix sur des millions pour dĂ©cider ce qu'il peut faire de sa personne et de ses biens, et parce qu'on l'autorise Ă  avoir, pour voler, asservir et assassiner autrui, cette mĂȘme voix que d'autres ont pour le voler, l'asservir et l'assassiner, est assez sot pour imaginer qu'il est "un homme libre", un "souverain"; assez sot pour imaginer que ce gouvernement est "un gouvernement libre", "un gouvernement de l'Ă©galitĂ© des droits", "le meilleur gouvernement qu'il y ait sur terre", et autres absurditĂ©s de ce genre; 3. Une catĂ©gorie qui a quelque intelligence des vices du gouvernement, mais qui ou bien ne sait comment s'en dĂ©barrasser, ou bien ne choisit pas de sacrifier ses intĂ©rĂȘts privĂ©s au point de se dĂ©vouer sĂ©rieusement et gravement Ă  la tĂąche de promouvoir un changement. Le fait est que le gouvernement, comme un bandit de grand chemin, dit Ă  un individu: "La bourse ou la vie." QuantitĂ© de taxes, ou mĂȘme la plupart, sont payĂ©es sous la contrainte d'une telle menace.
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Lysander Spooner (Outrage À Chefs D'Ă©tat ;Suivi De Le Droit Naturel)
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je lui tendis les trois pommes vertes que je venais de voler dans le verger. Elle les accepta et m'annonça, comme en passant : — Janek a mangĂ© pour moi toute sa collection de timbres-poste. C'est ainsi que mon martyre commença. Au cours des jours qui suivirent, je mangeai pour Valentine plusieurs poignĂ©es de vers de terre, un grand nombre de papillons, un kilo de cerises avec les noyaux, une souris, et, pour finir, je peux dire qu'Ă  neuf ans, c'est-Ă -dire bien plus jeune que Casanova, je pris place parmi les plus grands amants de tous les temps, en accomplissant une prouesse amoureuse que personne, Ă  ma connaissance, n'est jamais venu Ă©galer. Je mangeai pour ma bien-aimĂ©e un soulier en caoutchouc. Ici, je dois ouvrir une parenthĂšse. Je sais bien que, lorsqu'il s'agit de leurs exploits amoureux, les hommes ne sont que trop portĂ©s Ă  la vantardise. A les entendre, leurs prouesses viriles ne connaissent pas de limite, et ils ne vous font grĂące d'aucun dĂ©tail. Je ne demande donc Ă  personne de me croire lorsque j'affirme que, pour ma bien-aimĂ©e, je consommai encore un Ă©ventail japonais, dix mĂštres de fil de coton, un kilo de noyaux de cerises — Valentine me mĂąchait, pour ainsi dire, la besogne, en mangeant la chair et en me tendant les noyaux — et trois poissons rouges, que nous Ă©tions allĂ©s pĂȘcher dans l'aquarium de son professeur de musique. Dieu sait ce que les femmes m'ont fait avaler dans ma vie, mais je n'ai jamais connu une nature aussi insatiable. C'Ă©tait une Messaline doublĂ©e d'une ThĂ©odora de Byzance. AprĂšs cette expĂ©rience, on peut dire que je connaissais tout de l'amour. Mon Ă©ducation Ă©tait faite. Je n'ai fait, depuis, que continuer sur ma lancĂ©e. Mon adorable Messaline n'avait que huit ans, mais son exigence physique dĂ©passait tout ce qu'il me fut donnĂ© de connaĂźtre au cours de mon existence. Elle courait devant moi, dans la cour, me dĂ©signait du doigt tantĂŽt un tas de feuilles, tantĂŽt du sable, ou un vieux bouchon, et je m'exĂ©cutais sans murmurer. Encore bougrement heureux d'avoir pu ĂȘtre utile. A un moment, elle s'Ă©tait mise Ă  cueillir un bouquet de marguerites, que je voyais grandir dans sa main avec apprĂ©hension — mais je mangeai les marguerites aussi, sous son oeil attentif — elle savait dĂ©jĂ  que les hommes essayent toujours de tricher, dans ces jeux-lĂ  — oĂč je cherchais en vain une lueur d'admiration. Sans une marque d'estime ou de gratitude, elle repartit en sautillant, pour revenir, au bout d'un moment, avec quelques escargots qu'elle me tendit dans le creux de la main. Je mangeai humblement les escargots, coquille et tout. A cette Ă©poque, on n'apprenait encore rien aux enfants sur le mystĂšre des sexes et j'Ă©tais convaincu que c'Ă©tait ainsi qu'on faisait l'amour. J'avais probablement raison. Le plus triste Ă©tait que je n'arrivais pas Ă  l'impressionner. J'avais Ă  peine fini les escargots qu'elle m'annonçait nĂ©gligemment : — Josek a mangĂ© dix araignĂ©es pour moi et il s'est arrĂȘtĂ© seulement parce que maman nous a appelĂ©s pour le thĂ©. Je frĂ©mis. Pendant que j'avais le dos tournĂ©, elle me trompait avec mon meilleur ami. Mais j'avalai cela aussi. Je commençais Ă  avoir l'habitude. (La promesse de l'aube, ch.XI)
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Romain Gary (Promise at Dawn)