Plein Soleil Quotes

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Quand je suis triste, je pense Ă  vous, comme l'hiver on pense au soleil, et quand je suis gai, je pense Ă  vous, comme en plein soleil on pense Ă  l'ombre.
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Victor Hugo
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Je traverse des chaos de banquise. La neige a déposé une crÚme blanche au-dessus des tranches bleues. Je marche dans le gùteau d'un dieu boréal. Parfois le soleil illumine la pointe des glaçons: des étoiles s'allument en plein jour.
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Sylvain Tesson (Dans les forĂȘts de SibĂ©rie)
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Quand je suis triste, je pense Ă  vous, comme l'hiver on pense au soleil, et quand je suis gai, je pense Ă  vous, comme en plein soleil on pense Ă  l'ombre
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Victor Hugo
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On ne demande pas Ă  une mouette apprivoisĂ©e pourquoi elle Ă©prouve le besoin de disparaĂźtre de temps en temps vers la pleine mer. Elle y va, c’est tout, et c’est aussi simple qu’un rayon de soleil, aussi normal que le bleu du ciel.
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Bernard Moitessier (Longue route (ne) (La): SEUL ENTRE MERS ET CIELS)
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Lorsqu'on se baigne dans le Langage Universel, il est facile de comprendre qu'il y a toujours dans le monde une personne qui en attend une autre, que ce soit en plein dĂ©sert ou au cƓur des grandes villes. Et quand ces deux personnes se rencontrent, et que leurs regards se croisent, tout le passĂ© et tout le futur sont dĂ©sormais sans la moindre importance, seul existe ce moment prĂ©sent, et cette incroyable certitude que toute chose sous la voĂ»te du ciel a Ă©tĂ© Ă©crite par la mĂȘme Main. La Main qui fait naĂźtre l'Amour, et qui a créé une Ăąme sƓur pour chaque ĂȘtre qui travaille, se repose, et cherche des trĂ©sors sous la lumiĂšre du soleil.
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Paulo Coelho (The Alchemist)
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Ainsi en présence du soleil, s'éteint l'éclat des étoiles, ainsi la troupe formant la constellation des Pléiades se cache à nos yeux, quand Phébé arrondissant son croissant forme un disque plein en reflétant une lumiÚre empruntée.
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SénÚque (Médée)
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Thomas meurt. Thomas accepte de mourir. C’est ici, dans la maison de Saint-ClĂ©ment, la maison de l’enfance, qu’il choisit d’attendre de mourir. Je suis auprĂšs de lui. C’est encore l’étĂ©. J’ignorais qu’on pouvait mourir en Ă©tĂ©. Je croyais que la mort survenait toujours en hiver, qu’il lui fallait le froid, la grisaille, une sorte de dĂ©solation, que c’est seulement ainsi qu’elle pouvait se sentir sur son terrain. Je dĂ©couvre qu’elle peut tout aussi bien exercer sa besogne en plein soleil, en pleine lumiĂšre.
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Philippe Besson (Son frĂšre)
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Au fond de son Ăąme, cependant, elle attendait un Ă©vĂ©nement. Comme les matelots en dĂ©tresse elle promenait sur la solitude de sa vie des yeux dĂ©sespĂ©rĂ©s, cherchant au loin quelque voile blanche dans les brumes de l’horizon. Elle ne savait pas quel serait ce hasard, le vent qui le pousserait jusqu’à elle, vers quel rivage il la mĂšnerait, s’il Ă©tait chaloupe ou vaisseau Ă  trois ponts, chargĂ© d’angoisses ou plein de fĂ©licitĂ©s jusqu’aux sabords. Mais chaque matin, Ă  son rĂ©veil, elle l’espĂ©rait pour la journĂ©e, et elle Ă©coutait tous les bruits, se levait en sursaut, s’étonnait qu’il ne vĂźnt pas; puis, au coucher du soleil, toujours plus triste, dĂ©sirait ĂȘtre au lendemain.
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Gustave Flaubert (Madame Bovary)
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Êtes-vous ce qu’on appelle un heureux ? Eh bien, vous ĂȘtes triste tous les jours. Chaque jour a son grand chagrin ou son petit souci. Hier, vous trembliez pour une santĂ© qui vous est chĂšre, aujourd’hui vous craignez pour la vĂŽtre, demain ce sera une inquiĂ©tude d’argent, aprĂšs-demain la diatribe d’un calomniateur, l’autre aprĂšs-demain le malheur d’un ami ; puis le temps qu’il fait, puis quelque chose de cassĂ© ou de perdu, puis un plaisir que la conscience et la colonne vertĂ©brale vous reprochent ; une autre fois, la marche des affaires publiques. Sans compter les peines de cƓur. Et ainsi de suite. Un nuage se dissipe, un autre se reforme. À peine un jour sur cent de pleine joie et de plein soleil. Et vous ĂȘtes de ce petit nombre qui a le bonheur ! Quant aux autres hommes, la nuit stagnante est sur eux.
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Victor Hugo (Les Misérables)
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Attends. Laisse-moi dire adieu Ă  cette lĂ©gĂšretĂ© sans tache qui fut la mienne. Laisse-moi dire adieu Ă  ma jeunesse. Il y a des soirs, des soirs de Corinthe ou d'AthĂšnes, pleins de chants et d'odeurs qui ne m'appartiendront plus jamais. Des matins, pleins d'espoir aussi... Allons adieu! adieu! (Il vient vers Electre.) Viens, Electre, regarde notre ville. Elle est lĂ , rouge sous le soleil, bourdonnante d'hommes et de mouches, dans l'engourdissement tĂȘtu d'un aprĂšs-midi d'Ă©tĂ©; elle me repousse de tous ses murs, de tous ses toits, de toutes ses portes closes. Et pourtant elle est Ă  prendre, je le sens depuis ce matin. Et toi aussi, Electre, tu es Ă  prendre. Je vous prendrai. Je deviendrai hache et je fendrai en deux ces murailles obstinĂ©es, j'ouvrirai le ventre de ces maisons bigotes, elles exhaleront par leurs plaies bĂ©antes une odeur de mangeaille et d'encens; je deviendrai cognĂ©e et je m enfoncerai dans le cƓur de cette ville comme la cognĂ©e dans le cƓur d'un chĂȘne.
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Jean-Paul Sartre (The Flies (SparkNotes Literature Guide Series))
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Sais-tu pourquoi nous allions ainsi Ă  l’assaut des troupes adverses, comme des torrents chargeant la mer ? Pourquoi nous dansions, la nuit, sous les symboles Ă©cartelĂ©s des Ă©toiles, Ă  nous en rendre ivres ? Pourquoi nous nous mettions en danger pour une tocade, un enfant mortel, un joli visage, l’assouvissement d’un dĂ©sir passager ? Nous sommes fous, nous, les citoyens du Peuple, fous de plaisir, de mort, d’extase. Tout nous est essentiel, rien ne nous est nĂ©cessaire. Nous ne voulons rien d’autre que la pleine intensitĂ© du soleil, concentrĂ© dans le point incandescent d’une piqĂ»re d’épingle. Le mouvement des mondes qui s’effondrent, Ă  chaque pas que nous frappons sur le bronze de la terre. Alors il nous faut tout ceci Ă  la fois : le pas lĂ©ger Ă  la danse, et le poignet souple Ă  la bataille. DĂ©valer les pentes comme des torrents. Et l’ivresse. Car aimer, tuer
 ce n’est rien, et du pareil au mĂȘme. Enlacer, pourfendre. BĂątir, briser. Rien. Et la recherche d’une mĂȘme sensation : l’intĂ©gralitĂ©, le tout, oui, dans l’inconsĂ©quence d’une piqĂ»re d’épingle.
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Léa Silhol (Avant l'Hiver, Architectonique des Clartés)
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Les Poets de Sept ans Et la MĂšre, fermant le livre du devoir, S'en allait satisfaite et trĂšs fiĂšre sans voir, Dans les yeux bleus et sous le front plein d'Ă©minences, L'Ăąme de son enfant livrĂ©e aux rĂ©pugnances. Tout le jour, il suait d'obĂ©issance ; trĂšs Intelligent ; pourtant des tics noirs, quelques traits Semblaient prouver en lui d'Ăącres hypocrisies. Dans l'ombre des couloirs aux tentures moisies, En passant il tirait la langue, les deux poings A l'aine, et dans ses yeux fermĂ©s voyait des points. Une porte s'ouvrait sur le soir : Ă  la lampe On le voyait, lĂ -haut, qui rĂąlait sur la rampe, Sous un golfe de jour pendant du toit. L'Ă©tĂ© Surtout, vaincu, stupide, il Ă©tait entĂȘtĂ© A se renfermer dans la fraĂźcheur des latrines: Il pensait lĂ , tranquille et livrant ses narines. Quand, lavĂ© des odeurs du jour, le jardinet DerriĂšre la maison, en hiver, s'illunait , Gisant au pied d'un mur, enterrĂ© dans la marne Et pour des visions Ă©crasant son oeil darne, Il Ă©coutait grouiller les galeux espaliers. PitiĂ© ! Ces enfants seuls Ă©taient ses familiers Qui, chĂ©tifs, fronts nus, oeil dĂ©teignant sur la joue, Cachant de maigres doigts jaunes et noirs de boue Sous des habits puant la foire et tout vieillots, Conversaient avec la douceur des idiots ! Et si, l'ayant surpris Ă  des pitiĂ©s immondes, Sa mĂšre s'effrayait, les tendresses profondes, De l'enfant se jetaient sur cet Ă©tonnement. C'Ă©tait bon. Elle avait le bleu regard, - qui ment! A sept ans, il faisait des romans, sur la vie Du grand dĂ©sert oĂč luit la LibertĂ© ravie, ForĂȘts, soleils, rives, savanes ! - Il s'aidait De journaux illustrĂ©s oĂč, rouge, il regardait Des Espagnoles rire et des Italiennes. Quand venait, l'Oeil brun, folle, en robes d'indiennes, -Huit ans -la fille des ouvriers d'Ă  cĂŽtĂ©, La petite brutale, et qu'elle avait sautĂ©, Dans un coin, sur son dos, en secouant ses tresses, Et qu'il Ă©tait sous elle, il lui mordait les fesses, Car elle ne portait jamais de pantalons; - Et, par elle meurtri des poings et des talons, Remportait les saveurs de sa peau dans sa chambre. Il craignait les blafards dimanches de dĂ©cembre, OĂč, pommadĂ©, sur un guĂ©ridon d'acajou, Il lisait une Bible Ă  la tranche vert-chou; Des rĂȘves l'oppressaient, chaque nuit, dans l'alcĂŽve. Il n'aimait pas Dieu; mais les hommes qu'au soir fauve, Noirs, en blouse, il voyait rentrer dans le faubourg OĂč les crieurs, en trois roulements de tambour, Font autour des Ă©dits rire et gronder les foules. - Il rĂȘvait la prairie amoureuse, oĂč des houles Lumineuses, parfums sains, pubescences d'or, Font leur remuement calme et prennent leur essor ! Et comme il savourait surtout les sombres choses, Quand, dans la chambre nue aux persiennes closes, Haute et bleue, Ăącrement prise d'humiditĂ©, Il lisait son roman sans cesse mĂ©ditĂ©, Plein de lourds ciels ocreux et de forĂȘts noyĂ©es, De fleurs de chair aux bois sidĂ©rals dĂ©ployĂ©es, Vertige, Ă©croulement, dĂ©routes et pitiĂ© ! - Tandis que se faisait la rumeur du quartier, En bas, - seul et couchĂ© sur des piĂšces de toile Écrue et pressentant violemment la voile!
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Arthur Rimbaud
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Quand je vis avec mes semblables, ma pensĂ©e s'occupe d'eux si exclusivement, soit pour les aider Ă  vivre bien, soit pour comprendre pourquoi ils vivent mal, que j'oublie absolument de vivre pour mon compte. Quand je m'aperçois que j'ai fait pour eux mon possible et que je ne leur suis plus nĂ©cessaire, ou, ce qui arrive plus souvent, que je ne leur suis bon Ă  rien, j'Ă©prouve le besoin de vivre avec ce moi intĂ©rieur qui s'identifie Ă  la nature et au rĂȘve de la vie dans l'Ă©ternel et dans l'infini. La nature, je le sais, parle dans l'homme plus que dans les arbres et les rochers; mais elle y parle follement, elle y est plus souvent dĂ©lirante que sage, elle y est pleine d'illusions ou de mensonges. Les animaux sauvages eux-mĂȘmes sont tourmentĂ©s d'un besoin d'existence qui nous empĂȘche de savoir ce qu'ils pensent et si leurs obscures manifestations ne sont pas trompeuses. DĂšs qu'ils subissent des besoins et des passions, ils doivent les satisfaire Ă  tout prix, et toute logique de leur instinct de conservation doit cĂ©der Ă  cette sauvage logique de la faim et de l'amour. OĂč donc trouver, oĂč donc surprendre la voix du vrai absolu dans la nature? HĂ©las, dans le silence des choses inertes, dans le mutisme de ce qui ne ment pas! la face impassible du rocher qui boit le soleil, le front sans ombre du glacier qui regarde la lune, la morne altitude des lieux inaccessibles, exercent sur nous un rassĂ©rĂ©nement inexplicable. LĂ , nous nous sentons comme suspendus entre ciel et terre, dans une rĂ©gion d'idĂ©es oĂč il ne peut y avoir que Dieu ou rien, et, s'il n'y a rien, nous sentons que nous ne sommes rien nous-mĂȘmes et que nous n'existons pas; car rien ne peut se passer de sa raison d'ĂȘtre.
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George Sand (Le dernier amour)
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Chaque fois que je vais dans un super-market, ce qui du reste m'arrive rarement, je me crois en Russie. C'est la mĂȘme nourriture imposĂ©e d'en haut, pareille oĂč qu'on aille, imposĂ©e par des trusts au lieu de l'ĂȘtre par des organismes d’État. Les États-Unis, en un sens, sont aussi totalitaires que l'URSS, et dans l'un comme dans l'autre pays, et comme partout d'ailleurs, le progrĂšs (c'est-Ă -dire l'accroissement de l'immĂ©diat bien-ĂȘtre humain) ou mĂȘme le maintien du prĂ©sent Ă©tat de choses dĂ©pend de structures de plus en plus complexes et de plus en plus fragiles. Comme l'humanisme un peu bĂ©at du bourgeois de 1900, le progrĂšs Ă  jet continu est un rĂȘve d'hier. Il faut rĂ©apprendre Ă  aimer la condition humaine telle qu'elle est, accepter ses limitations et ses dangers, se remettre de plain-pied avec les choses, renoncer Ă  nos dogmes de partis, de pays, de classes, de religions, tous intransigeants et donc tous mortels. Quand je pĂ©tris la pĂąte, je pense aux gens qui ont fait pousser le blĂ©, je pense aux profiteurs qui en font monter artificiellement le prix, aux technocrates qui en ont ruinĂ© la qualitĂ© - non que les techniques rĂ©centes soient nĂ©cessairement un mal, mais parce qu'elles se sont mises au service de l'aviditĂ© qui en est un, et parce que la plupart ne peuvent s'exercer qu'Ă  l'aide de grandes concentrations de forces, toujours pleines de potentiels pĂ©rils. Je pense aux gens qui n'ont pas de pain, et Ă  ceux qui en ont trop, je pense Ă  la terre et au soleil qui font pousser les plantes. Je me sens Ă  la fois idĂ©aliste et matĂ©rialiste. Le prĂ©tendu idĂ©aliste ne voit pas le pain, ni le prix du pain, et le matĂ©rialiste, par un curieux paradoxe, ignore ce que signifie cette chose immense et divine que nous appelons "la matiĂšre". (p. 242)
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Marguerite Yourcenar (Les Yeux ouverts : Entretiens avec Matthieu Galey)
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Nous nous tĂ»mes l'un et l'autre ; pendant que nous attendions, je l'examinai. Un homme petit et rĂąblĂ©, brun comme un grain de cafĂ©, ayant peut-ĂȘtre une tendance Ă  engraisser, mais pour le moment excessivement mince. Les rides profondes de son visage et de son cou n'Ă©taient pas seulement dues aux annĂ©es et aux intempĂ©ries : elles indiquaient Ă  ne pas s'y tromper les endroits oĂč la chair ou la graisse avait fondu et oĂč la peau s'Ă©tait dĂ©tendue. Le cou Ă©tait simplement une surface oĂč s'entrecroisaient les sillons et les rides et portait les traces laissĂ©es par le soleil brĂ»lant du dĂ©sert. L'ExtrĂȘme-Orient, les Tropiques, le dĂ©sert, chaque rĂ©gion laissait sa marque colorĂ©e. Mais toutes les trois Ă©taient diffĂ©rentes ; et un Ɠil qui avait su une fois pouvait ainsi les distinguer aisĂ©ment. La pĂąleur bistrĂ©e pour le premier ; le brun rouge et violent pour la seconde ; et pour le troisiĂšme, le hĂąle sombre et profond qui avait pris, semblait-il, le caractĂšre d'une coloration permanente. Mr. Corbeck avait une grosse tĂȘte pleine et massive ; avec des cheveux en dĂ©sordre, d'un brun-rouge foncĂ©, dĂ©garnis sur les tempes. Son front Ă©tait beau, haut et large ; et pour employer les termes de la physiognomonie, le sinus frontal Ă©tait hardiment marquĂ©. Sa forme carrĂ©e traduisait l'esprit raisonneur ; et la plĂ©nitude sous les yeux le don des langues. Il avait le nez court et large qui dĂ©note l'Ă©nergie ; le menton carrĂ© - qu'on discernait malgrĂ© la barbe Ă©paisse et non soignĂ©e - et la mĂąchoire massive qui montrent l'esprit de dĂ©cision. « Un homme pas mal pour le dĂ©sert ! » me disais-je en le regardant.
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Bram Stoker (Oeuvres)
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JEANNE ENDORMIE. -- I LA SIESTE Elle fait au milieu du jour son petit somme; Car l'enfant a besoin du rĂȘve plus que l'homme, Cette terre est si laide alors qu'on vient du ciel ! L'enfant cherche Ă  revoir ChĂ©rubin, Ariel, Ses camarades, Puck, Titania, les fĂ©es, Et ses mains quand il dort sont par Dieu rĂ©chauffĂ©es. Oh ! comme nous serions surpris si nous voyions, Au fond de ce sommeil sacrĂ©, plein de rayons, Ces paradis ouverts dans l'ombre, et ces passages D'Ă©toiles qui font signe aux enfants d'ĂȘtre sages, Ces apparitions, ces Ă©blouissements ! Donc, Ă  l'heure oĂč les feux du soleil sont calmants, Quand toute la nature Ă©coute et se recueille, Vers midi, quand les nids se taisent, quand la feuille La plus tremblante oublie un instant de frĂ©mir, Jeanne a cette habitude aimable de dormir; Et la mĂšre un moment respire et se repose, Car on se lasse, mĂȘme Ă  servir une rose. Ses beaux petits pieds nus dont le pas est peu sĂ»r Dorment; et son berceau, qu'entoure un vague azur Ainsi qu'une aurĂ©ole entoure une immortelle, Semble un nuage fait avec de la dentelle; On croit, en la voyant dans ce frais berceau-lĂ , Voir une lueur rose au fond d'un falbala; On la contemple, on rit, on sent fuir la tristesse, Et c'est un astre, ayant de plus la petitesse; L'ombre, amoureuse d'elle, a l'air de l'adorer; Le vent retient son souffle et n'ose respirer. Soudain, dans l'humble et chaste alcĂŽve maternelle, Versant tout le matin qu'elle a dans sa prunelle, Elle ouvre la paupiĂšre, Ă©tend un bras charmant, Agite un pied, puis l'autre, et, si divinement Que des fronts dans l'azur se penchent pour l'entendre, Elle gazouille...-Alors, de sa voix la plus tendre, Couvrant des yeux l'enfant que Dieu fait rayonner, Cherchant le plus doux nom qu'elle puisse donner À sa joie, Ă  son ange en fleur, Ă  sa chimĂšre: -Te voilĂ  rĂ©veillĂ©e, horreur ! lui dit sa mĂšre.
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Victor Hugo (L'Art d'ĂȘtre grand-pĂšre)
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Il faut que je vous Ă©crive, mon aimable Charlotte, ici, dans la chambre d’une pauvre auberge de village, oĂč je me suis rĂ©fugiĂ© contre le mauvais temps. Dans ce triste gĂźte de D., oĂč je me traĂźne au milieu d’une foule Ă©trangĂšre, tout Ă  fait Ă©trangĂšre Ă  mes sentiments, je n’ai pas eu un moment, pas un seul, oĂč le cƓur in’ait dit de vous Ă©crire : et maintenant, dans cette cabane, dans cette solitude, dans cette prison, tandis que la neige et la grĂȘle se dĂ©chaĂźnent contre ma petite fenĂȘtre, ici, vous avez Ă©tĂ© ma premiĂšre pensĂ©e. DĂšs que je fus entrĂ©, votre image, ĂŽ Charlotte, votre pensĂ©e m’a saisi, si sainte, si vivante ! Bon Dieu, c’est le premier instant de bonheur que je retrouve. Si vous me voyiez, mon amie, dans ce torrent de dissipations ! Comme toute mon Ăąme se dessĂšche ! Pas un moment oĂč le cƓur soit plein ! pas une heure fortunĂ©e ! rien, rien ! Je suis lĂ  comme devant une chambre obscure : je vois de petits hommes et de petits chevaux tourner devant moi, et je me demande souvent si ce n’est pas une illusion d’optique. Je m’en amuse, ou plutĂŽt on s’amuse de moi comme d’une ma"rionnette ; je prends quelquefois mon voisin par sa main de bois, et je recule en frissonnant. Le soir, je fais le projet d’aller voir lever le soleil, et je reste au lit ; le jour, je me promets le plaisir du clair de lune, et je m’oublie dans ma chambre. Je ne sais trop pourquoi je me lĂšve, pourquoi je me coucha. Le levain qui faisait fermenter ma vie, je ne l’ai plus ; le charme qui me tenait Ă©veillĂ© dans les nuits profondes s’est Ă©vanoui ; l’enchantement qui, le matin, m’arrachait au sommeil a fui loin de moi. Je n’ai trouvĂ© ici qu’une femme, une seule, Mlle de B. Elle vous ressemble, ĂŽ Charlotte, si l’on peut vous ressembler. «.Eh quoi ? direz-vous, le voilĂ  qui fait de jolis compliments ! » Cela n’est pas tout Ă  fait imaginaire : depuis quelque temps je suis trĂšs-aimable, parce que je ne puis faire autre chose ; j’ai beaucoup d’esprit, at les dames disent que personne ne sait louer aussi finement
. «Ni mentir, ajouterez-vous, car l’un ne va pas sans l’autre, entendez-vous ?
 » Je voulais parler de Mlle B. Elle a beaucoup d’ñme, on le voit d’abord Ă  la flamme de ses yeux bleus. Son rang lui est Ă  charge ; il ne satisfait aucun des vƓux de son cƓur. Elle aspire Ă  sortir de ce tumulte, et nous rĂȘvons, des heures entiĂšres, au mijieu de scĂšnes champĂȘtres, un bonheur sans mĂ©lange ; hĂ©las ! nous rĂȘvons Ă  vous, Charlotte ! Que de fois n’est-elle pas obligĂ©e de vous rendre hommage !
 Non pas obligĂ©e : elle le fait de bon grĂ© ; elle entend volontiers parler de vous ; elle vous aime. Oh ! si j’étais assis Ă  vos pieds, dans la petite chambre, gracieuse et tranquille ! si nos chers petits jouaient ensemble autour de moi, et, quand leur bruit vous fatiguerait, si je pouvais les rassembler en cercle et les calmer avec une histoire effrayante ! Le soleil se couche avec magnificence sur la contrĂ©e Ă©blouissante de neige ; l’orage est passĂ© ; et moi
. il faut que je rentre dans ma cage
. Adieu. Albert est-il auprĂšs de vous ? Et comment ?
 Dieu veuille me pardonner cette question !
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Johann Wolfgang von Goethe (The Sorrows of Young Werther)
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C’est un endroit charmant, remarqua-t-il alors qu’ils tournaient Ă  gauche et dĂ©bouchaient en plein soleil. Les fenĂȘtres de Victor Hugo donnaient sur ce jardin, comme vous devez dĂ©jĂ  le savoir.
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Michelle Gable (L'appartement oublié)
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C’est lĂ  qu’elle avait lu des paroles de Qohelet, fils de David. FumĂ©e de fumĂ©es, dit Qohelet Havel hevelim Havel dit Qohelet tout est fumĂ©e. Tous les torrents vont Ă  la mer et la mer n’est pas pleine. Les torrents vont Ă  la mer oĂč ils ne cessent d’aller Ce qui a Ă©tĂ©, cela sera, ce qui s’est fait, cela se refera : Il n’y a rien de neuf sous le soleil.
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Hervé Le Tellier (L'Anomalie)
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Je soulĂšve donc de mes Ă©paules le fardeau du temps et, par la mĂȘme occasion, celui des performances que l'on exige de moi. Ma vie n'est pas quelque chose que l'on doive mesurer. Ni le saut du cabri ni le lever du soleil ne sont des performances. Une vie humaine n'est pas non plus une performance, mais quelque chose qui grandit et cherche Ă  atteindre la perfection. Et ce qui est parfait n'accomplit pas de performance : ce qui est parfait Ɠuvre en Ă©tat de repos. Il est absurde de prĂ©tendre que la mer soit faite pour porter des armadas et des dauphins. Certes, elle le fait- mais en conservant sa libertĂ©. Il est Ă©galement absurde de prĂ©tendre que l'homme soit fait pour autre chose que pour vivre. Certes, il approvisionne des machines et il Ă©crit des livres, mais il pourrait tout aussi bien faire autre chose. L'important est qu'il fasse ce qu'il fait en toute libertĂ© et en pleine conscience de ce que, comme tout autre dĂ©tail de la crĂ©ation, il est une fin en soi. Il repose en lui-mĂȘme comme une pierre sur le sable.
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Stig Dagerman (Il nostro bisogno di consolazione)
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La primautĂ© de l’intention divine — donc du message — dans l’ordre des apparences, implique une consĂ©quence fort paradoxale, mais nĂ©anmoins pertinente, Ă  savoir l’existence d’une « double rĂ©alitĂ© » qui fait penser Ă  la « double vĂ©ritĂ© » des scolastiques. C’est-Ă -dire qu'il faut distinguer, dans certains cas, entre une « rĂ©alitĂ© de fait » et une « rĂ©alitĂ© d’apparence » : que la terre soit ronde et qu’elle tourne autour du soleil, c’est un fait, mais qu’elle soit plate et que le soleil voyage d'un horizon Ă  l’autre, n’en est pas moins, dans l’intention divine, une rĂ©alitĂ© pour nous ; sans quoi l’expĂ©rience de l’homme — crĂ©ature centrale et partant « omnisciente » — ne se bornerait pas, a priori et « naturellement », Ă  ces constatations physiquement illusoires mais symboliquement pleines de sens. Encore que l’illusion physique soit relative, Ă  un certain point de vue, car la terre, pour l’homme, est incontestablement faite de rĂ©gions plates dont seulement la somme — imperceptible aux crĂ©atures terrestres — constitue une sphĂšre ; si bien qu’on devrait dire que la terre est plate et ronde Ă  la fois. Quant au symbolisme traditionnel, il implique une portĂ©e morale, ce qui nous permet de conclure que l’homme n’a droit, en principe et a priori, qu’à une connaissance qu’il supporte, c’est-Ă -dire qu’il est capable d’assimiler ; donc d’intĂ©grer dans la connaissance totale et spirituelle qu’il est censĂ© possĂ©der en sa qualitĂ© d’homo sapiens (19)". 19. Incontestablement, la science moderne regorge de connaissances, mais la preuve est faite que l’homme ne les supporte pas, ni intellectuellement ni moralement. Ce n’est pas pour rien que les Écritures sacrĂ©es sont volontiers aussi naĂŻves que possible, ce qui excite sans doute la moquerie des sceptiques mais n’empĂȘche ni les simples ni les sages de dormir tranquilles.
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Frithjof Schuon (To Have a Center (Library of Traditional Wisdom))
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le jour, deja tout plein de soleil, m'a frappe comme une gifle. (52)
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Albert Camus
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Violettes sauvages La fĂ©e du printemps, cette annĂ©e aussi, de banalitĂ©s plein le sac, s’est prĂ©sentĂ©e, malgrĂ© cela, nous nous sommes rĂ©jouis comme si pour la premiĂšre fois elle Ă©tait arrivĂ©e. En me grondant moi-mĂȘme, enfin, car je risquais d’abĂźmer mes souliers dans la boue, je suis allĂ©e voir quelles fleurs Ă©taient en train d’éclore dans le vaste parc, tout prĂšs de chez nous. C’était depuis longtemps que je n’avais plus senti ce dĂ©sir de vivre, cette hĂąte fĂ©brile, j’avais l’impression que sous mes pieds a frĂ©mi la terre que le soleil saurait rendre fertile. Les arbres nus me semblaient tout Ă  fait charmants, j’aurais voulu les prendre dans mes bras, les [embrasser]. Je passais prĂšs d’eux, comme ça, auparavant, autant de fois, mais sans vraiment les regarder. Difficile Ă  dire pourquoi Ă©tait si beau le ciel bleu comme les robes dont se lavent les couleurs, je l’ai regardĂ©, la tĂȘte renversĂ©e vers le dos, et je l’ai trouvĂ© absolument enchanteur. Ensuite, j’ai dĂ©couvert les violettes sauvages, prĂšs d’un chĂȘne : elles Ă©taient dĂ©licates et bleues, des miettes de ciel dont le printemps de passage nous fait don, parmi les troncs ombrageux. Le cƓur battant vite, je me suis inclinĂ©e, j’étais sur le point de toucher Ă  leurs feuilles, et je ne sais pourquoi, par l’esprit m’est passĂ©e l’idĂ©e que le verre n’est pour elles qu’un cercueil. Vers la maison, je suis revenue, les pas alourdis par un fatiguĂ© bonheur, et si mes mains Ă©taient aussi vides qu’au dĂ©but, j’avais des violettes sauvages dans le cƓur. (traduit par Elisabeta Isanos)
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Magda Isanos
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En haut, au cƓur de la montagne, la Couleuvre rampa et se blottit. LovĂ©e au sein d’une crevasse humide, elle regardait la mer. Le soleil brillait haut dans le ciel. Dans le ciel les sommets exhalaient leur chaleur. A leurs pieds les vagues venaient se briser... Au fond d’une gorge noyĂ©e d’obscuritĂ© et d’embruns, dans un tonnerre de pierres, un torrent se prĂ©cipitait vers la mer
 Tout en Ă©cume blanche, puissant et grisonnant, il fendait la roche et, hurlant de colĂšre, se jetait dans les flots. Soudain du ciel, dans la crevasse oĂč la Couleuvre se blottissait, tomba le Faucon, la poitrine dĂ©chirĂ©e, les plumes ensanglantĂ©es... Dans un cri bref, il s’était Ă©crasĂ©, et, plein de colĂšre impuissante, frappait de sa poitrine l’ñpretĂ© de la pierre... D'abord, la Couleuvre effrayĂ©e recula, mais bientĂŽt elle comprit que l’oiseau blessĂ© n’avait plus longtemps Ă  vivre
 Elle rampa et, fixant le Faucon droit dans les yeux, lui siffla : - Quoi, voilĂ  donc que tu meurs ? - Oui, je meurs ! lui rĂ©pondit l’oiseau dans un profond soupir. Je meurs mais j’ai vĂ©cu dans la gloire !... J'ai connu la fĂ©licitĂ© !
 J’ai combattu vaillamment !
 J'ai vu le ciel comme jamais tu ne sauras t’en approcher !... Pauvre crĂ©ature ! - Le ciel !?
 Qu'est-ce le ciel pour moi ? Un espace vide oĂč je ne puis ramper. Ici je me sens bien : il y fait si douillettement chaud et humide ! Ainsi rĂ©pondit la Couleuvre Ă  l'oiseau Ă©pris de libertĂ©, gloussant au fond d’elle-mĂȘme de devoir Ă©couter de pareilles sornettes. Ainsi pensait l’ophidien : "Qu’on vole ou bien qu’on rampe, chacun connaĂźt ici la fin : tous nous reposerons sous terre et tout finira en poussiĂšre..." Mais le Faucon tenta de se soulever, dressa la tĂȘte et porta son regard alentour. Au fond de cette gorge, dans cette obscuritĂ©, l'eau suintait entre les pierres grises, l’air Ă©tait suffocant et puait la charogne. Alors le Faucon rassemblant toutes ses forces laissa Ă©chapper un cri de douleur et de chagrin : - Oh, que ne puis-je une derniĂšre fois m’envoler et rejoindre le ciel ! LĂ , j’étreindrais mon ennemi
 contre ma poitrine et... il s’étoufferait de mon sang ! Ô, Ivresse de la bataille !... L’entendant ainsi gĂ©mir la Couleuvre se dit : "Comme il doit ĂȘtre bon de vivre dans le ciel !" Elle proposa Ă  l’oiseau Ă©pris de libertĂ© : "Va, approche-toi du gouffre et prĂ©cipite-toi dans le vide. Et qui sait ? tes ailes te porteront. Ainsi te sera-t-il donnĂ© de vivre encore un instant dans ce monde qui est le tien." Le Faucon frĂ©mit et fiĂšrement dans un cri s'approcha de l’abĂźme, s’agrippant de ses griffes, rampant sur la pierre glissante. ArrivĂ© au bord du prĂ©cipice, il dĂ©ploya ses ailes, prit une profonde inspiration ; ses yeux clignĂšrent plusieurs fois et il se jeta dans le vide. Il tomba plus vite qu’une pierre et se brisa les ailes, dĂ©valant et roulant sur les roches, y laissant ses plumes
 Le flot du ruisseau le saisit, le lava de son sang et l’inondant d’écume l’emporta vers la mer. Dans un rugissement de douleur, les vagues amĂšres battaient contre les pierres... Le corps de l’oiseau Ă  tout jamais disparut dans le vaste ocĂ©an
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Maxime Gorki (Le bourg d'Okourov)
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En haut, au cƓur de la montagne, la Couleuvre rampa et se blottit. LovĂ©e au sein d’une crevasse humide, elle regardait la mer. Le soleil brillait haut dans le ciel. Dans le ciel les sommets exhalaient leur chaleur. A leurs pieds les vagues venaient se briser... Au fond d’une gorge noyĂ©e d’obscuritĂ© et d’embruns, dans un tonnerre de pierres, un torrent se prĂ©cipitait vers la mer
 Tout en Ă©cume blanche, puissant et grisonnant, il fendait la roche et, hurlant de colĂšre, se jetait dans les flots. Soudain du ciel, dans la crevasse oĂč la Couleuvre se blottissait, tomba le Faucon, la poitrine dĂ©chirĂ©e, les plumes ensanglantĂ©es... Dans un cri bref, il s’était Ă©crasĂ©, et, plein de colĂšre impuissante, frappait de sa poitrine l’ñpretĂ© de la pierre... D'abord, la Couleuvre effrayĂ©e recula, mais bientĂŽt elle comprit que l’oiseau blessĂ© n’avait plus longtemps Ă  vivre
 Elle rampa et, fixant le Faucon droit dans les yeux, lui siffla : - Quoi, voilĂ  donc que tu meurs ? - Oui, je meurs ! lui rĂ©pondit l’oiseau dans un profond soupir. Je meurs mais j’ai vĂ©cu dans la gloire !... J'ai connu la fĂ©licitĂ© !
 J’ai combattu vaillamment !
 J'ai vu le ciel comme jamais tu ne sauras t’en approcher !... Pauvre crĂ©ature ! - Le ciel !?
 Qu'est-ce le ciel pour moi ? Un espace vide oĂč je ne puis ramper. Ici je me sens bien : il y fait si douillettement chaud et humide ! Ainsi rĂ©pondit la Couleuvre Ă  l'oiseau Ă©pris de libertĂ©, gloussant au fond d’elle-mĂȘme de devoir Ă©couter de pareilles sornettes. Ainsi pensait l’ophidien : "Qu’on vole ou bien qu’on rampe, chacun connaĂźt ici la fin : tous nous reposerons sous terre et tout finira en poussiĂšre..." Mais le Faucon tenta de se soulever, dressa la tĂȘte et porta son regard alentour. Au fond de cette gorge, dans cette obscuritĂ©, l'eau suintait entre les pierres grises, l’air Ă©tait suffocant et puait la charogne. Alors le Faucon rassemblant toutes ses forces laissa Ă©chapper un cri de douleur et de chagrin : - Oh, que ne puis-je une derniĂšre fois m’envoler et rejoindre le ciel ! LĂ , j’étreindrais mon ennemi
 contre ma poitrine et... il s’étoufferait de mon sang ! Ô, Ivresse de la bataille !... L’entendant ainsi gĂ©mir la Couleuvre se dit : "Comme il doit ĂȘtre bon de vivre dans le ciel !" Elle proposa Ă  l’oiseau Ă©pris de libertĂ© : "Va, approche-toi du gouffre et prĂ©cipite-toi dans le vide. Et qui sait ? tes ailes te porteront. Ainsi te sera-t-il donnĂ© de vivre encore un instant dans ce monde qui est le tien." Le Faucon frĂ©mit et fiĂšrement dans un cri s'approcha de l’abĂźme, s’agrippant de ses griffes, rampant sur la pierre glissante. ArrivĂ© au bord du prĂ©cipice, il dĂ©ploya ses ailes, prit une profonde inspiration ; ses yeux clignĂšrent plusieurs fois et il se jeta dans le vide. Il tomba plus vite qu’une pierre et se brisa les ailes, dĂ©valant et roulant sur les roches, y laissant ses plumes
 Le flot du ruisseau le saisit, le lava de son sang et l’inondant d’écume l’emporta vers la mer. Dans un rugissement de douleur, les vagues amĂšres battaient contre les pierres... Le corps de l’oiseau Ă  tout jamais disparut dans le vaste ocĂ©an

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Maxime Gorki
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De bon matin, on peut la voir sur les chemins, tirant son cheval par le licol. Toute dĂ©gingandĂ©e, la pauvre femme ; les joues criblĂ©es de variole, brĂ»lĂ©es par le soleil et le grand air. Elle avance Ă  longues enjambĂ©es ; on entend sonner ses bottes raides, pleines de bosselures racornies. [Dis-de-dimineaƣă o vezi pe drum, tĂąrĂąndu-ßi calul de căpăstru. Femeia e Ăźnaltă, uscată cu obrajii stricaĆŁi de vărsat, arßi de soare ßi de vĂąnt. Păßeßte larg, tropotind cu cizmele tari, pline de umflături uscate.] (Fefeleaga)
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Ion AgĂąrbiceanu
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D’une prison Ă  l’autre, le mitard se prĂ©sentait diffĂ©remment. Celui de Ghencea Ă©tait une simple et redoutable guĂ©rite : surchauffĂ©e en Ă©tĂ©, parce que en plein soleil (une fois, ils y ont entassĂ© dix ou douze tsiganes : la guĂ©rite a fini par tomber, et les femmes y sont restĂ©es ainsi, couchĂ©es en sandwich, une journĂ©e entiĂšre...), elle se transformait, l’hiver, en congĂ©lateur. Debout, Ă  trois, nous y Ă©tions Ă  l’aise, mais nous ne pouvions nous asseoir que deux par deux. De toute façon, il faisait beaucoup trop froid, nous ne pouvions pas rester sans bouger. Au-dessus de nous, un mirador.
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Oana Orlea (Les années volées: Dans le goulag roumain à 16 ans (French Edition))
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La mort de la prophĂ©tesse Je vous ai laissĂ©s avec le soleil et les eaux aux rames, et je vous retrouve tuĂ©s avec les faux et les lames. C’est Ă  vous et Ă  vous que j’ai laissĂ© ce jardin plein de grenades et de rosĂ©e, pour en faucher l’herbe, pour en cueillir les fruits, et vivre unis ! Mais Ă  peine ai-je fermĂ© la porte, et mes cendres balayĂ©es, le vent les emporte. À peine j’ai franchi le seuil, au dĂ©part, et vous avez dĂ©chirĂ© mon livre et mon Ă©tendard. La cour, je ne l’avais pas encore quittĂ©e, et quelqu’un est sorti pour s’assurer que je n’étais pas de retour. Un autre regardait le ciel par la bouche du four, dans l’espace apercevant ma cheville, sur des ponts d’argent. Suivie par les cyclones qui me mettent en chasse, je reviendrais par la voie des navires, mais elle pĂšse sur moi, la Mer des Sargasses, muraille que l’OcĂ©an seul peut bĂątir. (traduit du roumain par Elisabeta Isanos)
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Magda Isanos (Cantarea muntilor)
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Vous vous demandez, avec un doute plein de terreur, si c’est vous qui ĂȘtes sans yeux ou si c’est le monde qui est sans soleil. Question terrible. Chacun se la pose. Personne ne rĂ©pond.
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Victor Hugo (Choses Vues 1830-1848)
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Ah, qu'elle fut bien la reine des Iles, du Labyrinthe et du Moulin Ă  vent! Ce qui Ă©tait royal, c'Ă©tait son rire. C'Ă©tait une grande fille souriante qui avait l'air tendre, intelligent, ironique et grave des Françaises. Elle sentait la pipe, la lavande, l'eau de Javel et l'herbe mouillĂ©e. Et on aimait ce mĂ©lange dĂšs qu'on approchait d'elle. Je n'oublierai jamais non plus ses mains trop longues, ses cheveux lourds et ses dents blanches. Mais on ne la connaissait pas tant qu'on ne l'avait pas entendue rire. Car son rire ne lui ressemblait pas, du moins se le figurait-on la premiĂšre fois qu'on l'entendait. Parce qu'elle avait l'air d'un maigre adolescent, on s'attendait Ă  un rire Ăąpre, aigu, ou mĂȘme mĂ©chant, ou ironique tout au moins, qui eĂ»t senti, comme ses mains, le chlore et la lavande. Et c'Ă©tait tout le contraire. Il s'Ă©panouissait comme des grappes de lilas, et quand il Ă©clatait en plein c'Ă©tait comme un jardin de juin, de pivoines, de roses, de fleurs rouges, avec des timbres d'instruments, dorĂ©s, ambrĂ©s, des cuivres et des cordes, un carillon et un reposoir de FĂȘte-Dieu, un rire de reine, je ne sais comment dire. Si bien que son corps de plante grimpante, son menton de chat, ses yeux de fĂ©lin, tout ce qu'il y avait en elle de pĂąle et d'anguleux, son regard vert, son teint d'aquarelle, n'avaient plus l'air que de l'alibi de la femme inattendue qui se cachait en elle, - et qui devait ĂȘtre la vraie, car le rire est une chose sĂ©rieuse, - et que l'harmonie du tout rappelait celle d'une eau verte qui reflĂšte le grand soleil (il fallait de l'eau pour l'expliquer, sa fluiditĂ©, ses contrastes). Si son fiancĂ© avait fait d'elle, je ne sais trop pourquoi, la reine des Choses qui Volent, elle ne m'est jamais apparue que comme la reine des Choses Liquides, celles qui coulent et qui s'enfuient, - mais qui reflĂštent les chĂąteaux et les villes, - la reine des brumes, des eaux, des algues. Et son rire, au milieu de cet ocĂ©an vert, Ă©tait comme une Ăźle de corail.
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Alexandre Vialatte (Les Fruits du Congo)
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Je suis trop ardent et trop consumĂ© de mes propres pensĂ©es : j’y perds souvent haleine. Alors il me faut aller au grand air et quitter les chambres pleines de poussiĂšre. Mais ils sont assis au frais, Ă  l’ombre fraĂźche : ils veulent partout n’ĂȘtre que des spectateurs et se gardent bien de s’asseoir oĂč le soleil darde sur les marches. Semblables Ă  ceux qui stationnent dans la rue et qui bouche bĂ©e regardent les gens qui passent : ainsi ils attendent aussi, bouche bĂ©e, les pensĂ©es des autres.
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Friedrich Nietzsche (Ainsi parlait Zarathoustra / Crépuscule des idoles / Ecce homo)
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Notre vie est dĂ©jĂ  pleine de morts, et pour chacun le plus mort des morts est le petit garçon qu'il fut. Et pourtant l'heure venue, c'est lui qui reprendra sa place Ă  la tĂȘte de ma vie, rassemblera mes pauvres annĂ©es jusqu'Ă  la derniĂšre, et comme un jeune chef ses vĂ©tĂ©rans, ralliant la troupe en dĂ©sordre entrera le premier dans la maison du PĂšre.
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Georges Bernanos (7 romans de Georges Bernanos : Sous le soleil de Satan, L’Imposture, La Joie, Un crime, Journal d’un curĂ© de campagne, Nouvelle Histoire de Mouchette, Monsieur Ouine)
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« Bonsoir madame, entrez vite, je me prĂ©sente : Albert Camus". 

 M. Albert demande un jour Ă  parcourir le cahier Ă  la couverture tachĂ©e. Il trouve les listes d’ingrĂ©dients imagĂ©es, les notes ajoutĂ©es en coin de page et les noms enchanteurs de certains plats, emplis de poĂ©sie : la rĂŽtie de grives de la paillette, le gratin de courge soleil, la caillette aux herbes, le boudin Richelieu, le relief d’ortolan et autres escargots Margot
 « Vous aussi, vous savez Ă©crire », dit-il Ă  AndrĂ©e rougissante. 
. Un courrier lui apprend une triste nouvelle, il vient s’asseoir Ă  la table de la cuisine oĂč AndrĂ©e dispose les tranches fines de pommes sur la pĂąte : « Mon ami George Orwell est mort. Il faisait partie du petit nombre d’hommes avec qui je partageais quelque chose. » AndrĂ©e essuie ses mains pleines de farine sur son tablier, prend deux verres dans le vaisselier, la bouteille de cĂŽtes-du-rhĂŽne. Elle ne connaĂźt pas ce Monsieur mais se souvient combien la perte d’un ami est douloureuse

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Valérie Paturaud (La cuisiniÚre des Kennedy (French Edition))
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longs cheveux, un trĂ©sor depuis l’enfance ? HĂ©lĂšne en Ă©tait pleine de ce temps comptĂ©, de ces bouts de quotidien qui composaient le casse-tĂȘte de sa vie. Par moments, elle repensait Ă  son adolescence, les flemmes autorisĂ©es d’à quinze ans, les indolences du dimanche, et plus tard les lendemains de cuite Ă  glander. Cette pĂ©riode engloutie qui avait tellement durĂ© et semblait rĂ©trospectivement si brĂšve. Sa mĂšre l’enguirlandait alors parce qu’elle passait des heures Ă  s’étirer dans son lit au lieu de profiter du soleil dehors. À prĂ©sent, le rĂ©veil sonnait Ă  six heures tous les jours de la semaine et le week-end, tel un automate, elle se rĂ©veillait Ă  six heures quand mĂȘme.
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Nicolas Mathieu (Connemara)
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{Rugăciunea lingurii Dă forƣă mĂąinii să nu mă reverse, să fiu un lac tăcut pe-a cărui faƣă cresc sori ßi lune fumegĂąnd. Nu mă toci, Ăźngăduie-mi să fiu mereu adĂąncă ßi’nĆŁeleaptă precum văzduhul unui suflet drept, iar malurile mele să rămĂąnă de-a pururi blĂąnde gurii care tremură ßi celei Ăźnfricate ßi flămĂąnde ßi să fiu plină totdeauna pentru acei care, oglindindu-se Ăźn mine, ßi-ascultă inimile obosite ßi‘ncet mă sorb gĂąndindu-se la viaƣă. Să-mi fulgere Ăźn timpul zilei o rĂąndunică de senin Ăźntinsul, iar noaptea, Ăźn adĂąncul meu să-ßi clatine sporindu-ßi grĂąul de lumină, stelele. Dă forƣă mĂąinii celui care tremură ßi care, ĂźncercĂąnd să mă ridice, mă’mprăßtie ßi fără să-ßi dea seama, mă umple-ochi cu lacrimile lui ßi-apoi le soarbe dus pe gĂąnduri.} * La priĂšre de la cuillĂšre Donne de la force Ă  la main pour qu'elle ne me verse pas, que je sois un lac silencieux sur la face duquel poussent des soleils et des lunes fumants. Ne m’use pas, permets-moi d'ĂȘtre toujours profonde et sage comme le ciel d'une Ăąme juste, et que mes bords restent Ă  jamais tendres Ă  la bouche qui tremble et Ă  celle effrayĂ©e et affamĂ©e et que je sois toujours pleine pour ceux qui, se mirant en moi, Ă©coutent leurs cƓurs fatiguĂ©s et lentement me hument en pensant Ă  la vie. Que le jour, une hirondelle de clartĂ© m’éclaire l'Ă©tendue, et que la nuit, dans ma profondeur s'Ă©branlent, multipliant leur blĂ© de lumiĂšre, les Ă©toiles. Donne de la force Ă  la main de celui qui tremble et qui, tĂąchant de me lever, m’éparpille et sans se rendre compte, me remplit jusqu'au bord de ses larmes, et ensuite les avale plongĂ© dans ses pensĂ©es. (traduit du roumain par Ileana Vulpescu)
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Eugen Jebeleanu