Nuit Blanche Quotes

We've searched our database for all the quotes and captions related to Nuit Blanche. Here they are! All 33 of them:

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During the nuit blanche I think: Henry, my love, I can love you better now that you cannot hurt me. I can love you more gaily. More loosely. I can endure space and distance and betrayals. Only the best, the best and the strongest. Henry, my love, the wanderer, the artist, the faithless one who has loved me so well. Believe me, nothing has changed in me toward you except my courage. I cannot walk with one love ever. My head is strong, my head, but to walk, to walk into love I need miracles, the miracles of excess, and white heat, and two-ness! Lie here, breathing into my hair, over my neck. No hurt will come from me. No criticalness, no judgment. I bear you in my womb.
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AnaĂŻs Nin (Incest: From "A Journal of Love": The Unexpurgated Diary of AnaĂŻs Nin, 1932-1934)
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Nuit Blanche" A music coaxed from humming strings would please; Not plucked, but drawn in creeping cadences Across a sunset wall where some Marquise Picks a pale rose amid strange silences. Ghostly and vaporous her gown sweeps by The twilight dusking wall, I hear her feet Delaying on the gravel, and a sigh, Briefly permitted, touches the air like sleet And it is dark, I hear her feet no more. A red moon leers beyond the lily-tank. A drunken moon ogling a sycamore, Running long fingers down its shining flank. A lurching moon, as nimble as a clown, Cuddling the flowers and trees which burn like glass. Red, kissing lips, I feel you on my gown— Kiss me, red lips, and then pass—pass. Music, you are pitiless to-night. And I so old, so cold, so languorously white.
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Amy Lowell (The Complete Poetical Works of Amy Lowell)
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Tu es blanche, et je suis noir ; mais le jour a besoin de s’unir à la nuit pour enfanter l’aurore et le couchant qui sont plus beaux que lui !
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Victor Hugo (Bug-Jargal (Broadview Editions))
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Lasse de ma lassitude, blanche lune dernière, seul regret, même pas. Être mort, avant elle, sur elle, avec elle, et tourner, mort sur morte, autour des pauvres hommes, et n’avoir plus jamais à mourir, d’entre les mourants. Même pas, même pas ça. Ma lune fut ici-bas, ici bien bas, le peu que j’aie su désirer. Et un jour, bientôt, une nuit de terre, bientôt, sous la terre, un mourant dira, comme moi, au clair de terre, Même pas, même pas ça, et mourra, sans avoir pu trouver un regret.
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Samuel Beckett (Malone Dies)
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Alexia remarqua que quelque chose clochait. « On nous suit, n’est-ce pas ? » Mme Lefoux hocha la tête. Alexia s’arrêta au milieu du pont et jeta un coup d’œil nonchalant par-dessus son épaule en utilisant son ombrelle pour dissimuler le geste. « S’ils veulent se cacher, ils ne devraient pas porter ces ridicules chemises de nuit blanches. Sortir en public dans une telle tenue, franchement. » Floote corrigea sa maîtresse. « Ce sont de Saintes Tuniques de Piété et de Foi, madame. — Des chemises de nuit », insista Alexia avec fermeté.
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Gail Carriger (Blameless (Parasol Protectorate, #3))
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L'obscurité était sereine. Pas un nuage au zénith. Qu'importe que la terre soit rouge, la lune reste blanche. Ce sont là les indifférences du ciel. Dans les prairies, des branches d'arbre cassées par la mitraille mais non tombées et retenues par l'écorce se balançaient doucement au vent de la nuit. Une haleine, presque une respiration, remuait les brousailles. Il y avait dans l'herbe des frissons qui ressemblaient à des départs d'âmes.
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Victor Hugo (Les Misérables)
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La mort ne faisait pas souffrir. C'était la vie, cette atroce sensation d'étouffement : c'était le dernier coup que devait lui porter la vie. Ses mains et ses pieds, dans un dernier sursaut de volonté, se mirent à battre, à faire bouillonner l'eau, faiblement, spasmodiquement. Mais malgré ses efforts désespérés, il ne pourrait jamais plus remonter ; il était trop bas, trop loin. Il flottait languissement, bercé par un flot de visions très douces. Des couleurs, une radieuse lumière l'enveloppaient, le baignaient, le pénétraient. Qu'était-ce ? On aurait dit un phare. Mais non, c'était dans son cerveau, cette éblouissante lumière blanche. Elle brillait de plus en plus resplendissante. Il y eut un long grondement, et il lui sembla glisser sur une interminable pente. Et, tout au fond, il sombra dans la nuit. Ça, il le sut encore : il avait sombré dans la nuit. Et au moment même où il le sut, il cessa de le savoir.
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Jack London (Martin Eden)
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D’où vient tu, Été qui n’es plus là quand même ce serait ta saison, et qui soudain nous effleures et nous gagnes ? toi qui te vêts des plus lourds, des plus fastueux atours, des feuilles les plus larges et des denses poussières, Été à la trop courte nuit, renversant villes et campagnes sous des ciels où s’effrite longuement la lumière, nuit inventant des labyrinthes pour les amants, levant des futaies pour de blanches larmes de lune, et toi oublié ou absent, soudain faisant mentir le poids des jours, l’effluve du tilleul chevauchant une imperceptible brise serait ta résidence parmi nous ? (Poèmes des saisons)
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Paul de Roux
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Ils proclamaient avec furie le droit ; ils voulaient, fût-ce par le tremblement et l’épouvante, forcer le genre humain au paradis. Ils semblaient des barbares et ils étaient des sauveurs. Ils réclamaient la lumière avec le masque de la nuit. En regard de ces hommes, farouches, nous en convenons, et effrayants, mais farouches et effrayants pour le bien, il y a d’autres hommes, souriants, brodés, dorés, enrubannés, constellés, en bas de soie, en plumes blanches, en gants jaunes, en souliers vernis, qui, accoudés à une table de velours au coin d’une cheminée de marbre, insistent doucement pour le maintien et la conservation du passé, du moyen âge, du droit divin, du fanatisme, de l’ignorance, de l’esclavage, de la peine de mort, de la guerre, glorifiant à demi-voix et avec politesse le sabre, le bûcher et l’échafaud. Quant à nous, si nous étions forcé à l’option entre les barbares de la civilisation et les civilisés de la barbarie, nous choisirions les barbares.
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Victor Hugo (Les Misérables)
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Wilhelm, que serait pour notre cœur le monde sans l’amour ? Ce qu’une lanterne magique est sans lumière. A peine la petite lampe est-elle introduite, que les images les plus variées apparaissent sur la muraille blanche. Et ne fussent-elles que des fantômes passagers, cela fait pourtant notre bonheur, lorsque nous nous arrêtons devant, comme des enfants joyeux, nous extasiant sur ces apparitions merveilleuses. Aujourd’hui je n’ai pu aller voir Charlotte : une société inévitable m’a retenu. Que faire ? J’ai envoyé chez elle mon domestique, uniquement pour avoir quelqu’un près de moi qui eût approché d’elle aujourd’hui. Avec quelle impatience je l’attendais ! avec quelle joie je l’ai revu ! Je l’aurais embrassé, si j’avais osé m’en croire. On conte que la pierre de Bologne, si on l’expose au soleil, en absorbe les rayons, et qu’elle éclaire quelque temps pendant la nuit. Il en était de même pour moi de ce garçon. L’idée que les yeux de Charlotte s’étaient arrêtés sur son visage, sur ses joues, sur les boutons de son habit et le collet de son surtout, me rendait tout cela précieux et sacré. Dans ce moment, je n’aurais pas donné mon valet pour mille écus. Sa présence nie faisait du bien…. Dieu te garde d’en rire ! Wilhelm, sont-ce là des fantômes, si nous sommes heureux ?
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Johann Wolfgang von Goethe (The Sorrows of Young Werther)
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De cette assise sortent les spirales des liserons à cloches blanches, les brindilles de la bugrane rose, mêlées de quelques fougères, de quelques jeunes pousses de chêne aux feuilles magnifiquement colorées et lustrées ; toutes s’avancent prosternées, humbles comme des saules pleureurs, timides et suppliantes comme des prières. Au-dessus, voyez les fibrilles déliées, fleuries, sans cesse agitées de l’amourette purpurine qui verse à flots ses anthères presque jaunes ; les pyramides neigeuses du paturin des champs et des eaux, la verte chevelure des bromes stériles, les panaches effilés de ces agrostis nommés les épis du vent ; violâtres espérances dont se couronnent les premiers rêves et qui se détachent sur le fond gris de lis où la lumière rayonne autour de ces herbes en fleurs. Mais déjà plus haut, quelques roses du Bengale clairsemées parmi les folles dentelles du daucus, les plumes de la linaigrette, les marabous de la reine des prés, les ombellules du cerfeuil sauvage, les blonds cheveux de la clématite en fruits, les mignons sautoirs de la croisette au blanc de lait, les corymbes des millefeuilles, les tiges diffuses de la fumeterre aux fleurs roses et noires, les vrilles de la vigne, les brins tortueux des chèvrefeuilles ; enfin tout ce que ces naïves créatures ont de plus échevelé, de plus déchiré, des flammes et de triples dards, des feuilles lancéolées, déchiquetées, des tiges tourmentées comme les désirs entortillés au fond de l’âme. Du sein de ce prolixe torrent d’amour qui déborde, s’élance un magnifique double pavot rouge accompagné de ses glands prêts à s’ouvrir, déployant les flammèches de son incendie au- dessus des jasmins étoilés et dominant la pluie incessante du pollen, beau nuage qui papillote dans l’air en reflétant le jour dans ses mille parcelles luisantes ! Quelle femme enivrée par la senteur d’Aphrodise cachée dans la flouve, ne comprendra ce luxe d’idées soumises, cette blanche tendresse troublée par des mouvements indomptés, et ce rouge désir de l’amour qui demande un bonheur refusé dans les luttes cent fois recommencées de la passion contenue, infatigable, éternelle ? Mettez ce discours dans la lumière d’une croisée, afin d’en montrer les frais détails, les délicates oppositions, les arabesques, afin que la souveraine émue y voie une fleur plus épanouie et d’où tombe une larme ; elle sera bien près de s’abandonner, il faudra qu’un ange ou la voix son enfant la retienne au bord de l’abîme. Que donne-t-on à Dieu ? des parfums, de la lumière et des chants, les expressions les plus épurées de notre nature. Eh! bien, tout ce qu’on offre à Dieu n’était-il pas offert à l’amour dans ce poème de fleurs lumineuses qui bourdonnait incessamment ses mélodies au cœur, en y caressant des voluptés cachées, des espérances inavouées, des illusions qui s’enflamment et s’éteignent comme des fils de la vierge par une nuit chaude.
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Honoré de Balzac
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La montagne lui parle, mais elle ne lui parle pas d'amour.
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Mirela Vardi (La Nuit Blanche de Zoé)
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Liberté Sur mes cahiers d'écolier Sur mon pupitre et les arbres Sur le sable de neige J'écris ton nom Sur toutes les pages lues Sur toutes les pages blanches Pierre sang papier ou cendre J'écris ton nom Sur les images dorées Sur les armes des guerriers Sur la couronne des rois J'écris ton nom Sur la jungle et le désert Sur les nids sur les genêts Sur l'écho de mon enfance J'écris ton nom Sur les merveilles des nuits Sur le pain blanc des journées Sur les saisons fiancées J'écris ton nom Sur tous mes chiffons d'azur Sur l'étang soleil moisi Sur le lac lune vivante J'écris ton nom Sur les champs sur l'horizon Sur les ailes des oiseaux Et sur le moulin des ombres J'écris ton nom Sur chaque bouffées d'aurore Sur la mer sur les bateaux Sur la montagne démente J'écris ton nom Sur la mousse des nuages Sur les sueurs de l'orage Sur la pluie épaisse et fade J'écris ton nom Sur les formes scintillantes Sur les cloches des couleurs Sur la vérité physique J'écris ton nom Sur les sentiers éveillés Sur les routes déployées Sur les places qui débordent J'écris ton nom Sur la lampe qui s'allume Sur la lampe qui s'éteint Sur mes raisons réunies J'écris ton nom Sur le fruit coupé en deux Du miroir et de ma chambre Sur mon lit coquille vide J'écris ton nom Sur mon chien gourmand et tendre Sur ses oreilles dressées Sur sa patte maladroite J'écris ton nom Sur le tremplin de ma porte Sur les objets familiers Sur le flot du feu béni J'écris ton nom Sur toute chair accordée Sur le front de mes amis Sur chaque main qui se tend J'écris ton nom Sur la vitre des surprises Sur les lèvres attendries Bien au-dessus du silence J'écris ton nom Sur mes refuges détruits Sur mes phares écroulés Sur les murs de mon ennui J'écris ton nom Sur l'absence sans désir Sur la solitude nue Sur les marches de la mort J'écris ton nom Sur la santé revenue Sur le risque disparu Sur l'espoir sans souvenir J'écris ton nom Et par le pouvoir d'un mot Je recommence ma vie Je suis né pour te connaître Pour te nommer Liberté
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Paul Éluard
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h 30. S. n'a pas appelé encore. Je suis exactement dans l'état de mes vingt, vingt-deux ans, après une nuit blanche. À Jersey, pas dormi une minute dans cette chambre glaciale donnant sur la mer. Impossible de me dépêtrer de la soirée de la veille, avec H.S., dans le restaurant chinois, puis le taxi. Je suis toujours aussi faible devant le désir, je l'ai embrassé, j'ai laissé sa main sur ma cuisse dans le taxi. Mais j'ai refusé qu'il monte à la guest-house. Comme d'habitude, je sais que ce n'est pas lui, H.S., que j'ai dans la peau, mais l'autre, S.
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Annie Ernaux (Se perdre (French Edition))
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— Je te devais soixante francs, te voilà payé, voleur ! dit la Maheude, enragée parmi les autres. Tu ne me refuseras plus crédit… Attends ! attends ! il faut que je t’engraisse encore. De ses dix doigts, elle grattait la terre, elle en prit deux poignées, dont elle lui emplit la bouche, violemment. — Tiens ! mange donc !… Tiens ! mange, mange, toi qui nous mangeais ! Les injures redoublèrent, pendant que le mort, étendu sur le dos, regardait, immobile, de ses grands yeux fixes, le ciel immense d’où tombait la nuit. Cette terre, tassée dans sa bouche, c’était le pain qu’il avait refusé. Et il ne mangerait plus que de ce pain-là, maintenant. Ça ne lui avait guère porté bonheur, d’affamer le pauvre monde. Mais les femmes avaient à tirer de lui d’autres vengeances. Elles tournaient en le flairant, pareilles à des louves. Toutes cherchaient un outrage, une sauvagerie qui les soulageât. On entendit la voix aigre de la Brûlé. — Faut le couper comme un matou ! — Oui, oui ! au chat ! au chat !… Il en a trop fait, le salaud ! Déjà, la Mouquette le déculottait, tirait le pantalon, tandis que la Levaque soulevait les jambes. Et la Brûlé, de ses mains sèches de vieille, écarta les cuisses nues, empoigna cette virilité morte. Elle tenait tout, arrachant, dans un effort qui tendait sa maigre échine et faisait craquer ses grands bras. Les peaux molles résistaient, elle dut s’y reprendre, elle finit par emporter le lambeau, un paquet de chair velue et sanglante, qu’elle agita, avec un rire de triomphe : — Je l’ai ! je l’ai ! Des voix aiguës saluèrent d’imprécations l’abominable trophée. Ah ! bougre, tu n’empliras plus nos filles ! — Oui, c’est fini de te payer sur la bête, nous n’y passerons plus toutes, à tendre le derrière pour avoir un pain. — Tiens ! je te dois six francs, veux-tu prendre un acompte ? moi, je veux bien, si tu peux encore ! Cette plaisanterie les secoua d’une gaieté terrible. Elles se montraient le lambeau sanglant, comme une bête mauvaise, dont chacune avait eu à souffrir, et qu’elles venaient d’écraser enfin, qu’elles voyaient là, inerte, en leur pouvoir. Elles crachaient dessus, elles avançaient leurs mâchoires, en répétant, dans un furieux éclat de mépris : — Il ne peut plus ! il ne peut plus !… Ce n’est plus un homme qu’on va foutre dans la terre… Va donc pourrir, bon à rien ! La Brûlé, alors, planta tout le paquet au bout de son bâton ; et, le portant en l’air, le promenant ainsi qu’un drapeau, elle se lança sur la route, suivie de la débandade hurlante des femmes. Des gouttes de sang pleuvaient, cette chair lamentable pendait, comme un déchet de viande à l’étal d’un boucher. En haut, à la fenêtre, Mme Maigrat ne bougeait toujours pas ; mais sous la dernière lueur du couchant, les défauts brouillés des vitres déformaient sa face blanche, qui semblait rire. Battue, trahie à chaque heure, les épaules pliées du matin au soir sur un registre, peut-être riait-elle, quand la bande des femmes galopa, avec la bête mauvaise, la bête écrasée, au bout d’un bâton. Cette mutilation affreuse s’était accomplie dans une horreur glacée.
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Émile Zola (Germinal)
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Quand j'habitais Alger, je patientais toujours dans l'hiver parce que je savais qu'en une nuit, une seule nuit froide et pure de février, les amandiers de la vallée des Consuls se couvriraient de fleurs blanches. Je m'émerveillais de voir ensuite cette neige fragile résister à toutes les pluies et au vent de la mer. Chaque année, pourtant, elle persistait, juste ce qu'il fallait pour préparer le fruit.
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Albert Camus (L'été - Les Essais LXVIII)
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Souvent il arrivait que papa et Jacky martèlent de concert. Pas un mot, pas un cri, juste des souffles mêlés comme font les amants. De lourds coups sur l’acier, de petits sur l’enclume, en rythme cadencé, sorte de concerto pour enclume et marteaux où la basse continue n’était autre que celle de leurs respirations. Et puis ces escarbilles, toujours ces escarbilles, petites étoiles filantes que chacun d’eux apprivoisait pour qu’elles n’aillent pas, comme des baisers voraces, mordre le corps de l’autre. Et assis sur un banc ou sur un tas de ferraille, un enfant de cinq ans regarde leurs poitrails, écoute leurs silences dans cet orage d’acier et ne croit plus à rien, ni à Dieu, ni à Diable, ni à tous ces héros que déjà il pressent puisqu’il sent bien, ce gosse, qu’il arrive à la vie de parfois défaillir, ou simplement faillir, et qu’il faut certains soirs, pour supporter son poids, accepter les légendes et les mythes qu’ont inventés les hommes afin de s’endormir un petit peu plus grand et à peine moins mortel. Heureusement pour lui, foin d’Ulysse, de Titans, de dragons flamboyants et de dieux en jupette plus ou moins ridicules, il les a sous les yeux ces lares de pleine chair qui dressent des éclairs et créent des épopées avec chaque barre de fer. L’odeur de la limaille, du fer chauffé à rouge, du fer chauffé à blanc, l’odeur des corps en sueur qui parfois s’effaçaient derrière la fumée blanche, l’odeur des grains d’acier en gerbes braisillantes, l’odeur même des marteaux, masses, pinces, massettes, et l’odeur de l’enclume qui les recueillait tous. Papa et Jacky, ferronniers d’art ; ils maîtrisaient le feu mais ignoraient Vulcain, Prométhée et Wotan, Zeus ou Héphaïstos. Les dieux du Walhalla, d’Olympe ou de l’Iliade leur étaient inconnus. Même saint Éloi, patron des forgerons, ne les concernait pas. Ils étaient incultes, c’est-à-dire intelligents mais sans les livres capables de leur nommer, soit cette intelligence, soit cette inculture. Ils s’en moquaient, de tout cela, des trois divinités, des quatre horizons, des douze travaux d’Hercule ou des Mille et Une Nuits. À quoi bon s’inventer des dieux de pacotille quand on en a sous la main et que l’on parvient, à coups brefs et précis, à leur donner la forme que l’on veut. Pas besoin de légende, ils se créaient la leur, façonnant dans l’acier les mots pour la chanter. Et l’enfant de cinq ans lorsqu’il lui adviendra, plus tard, beaucoup plus tard, d’apercevoir Tarzan sautant de liane en liane en se frappant le torse à grands coups de battoir pour ne rien forger d’autre qu’un long cri ridicule, rira comme un beau diable s’il est vrai qu’il s’avère, dans l’Hadès ou ailleurs, qu’un diable puisse être beau.
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Guy Boley (Fils du feu)
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Feia una nit meravellosa, d'aquelles que potser només es donen quan som joves, estimat lector. El cel era tan estrellat, estava tan il·luminat que, en veure'l, no quedava més remei que preguntar-se: com pot ser que sota un cel com aquest pugui viure-hi gent capritxosa i enrabiada per tota mena de coses?
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Fyodor Dostoevsky (Les Nuits blanches)
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Sur une carte postale Passe pour chaque coin recoin de France d’être un Monument aux Morts Passe pour l’enfance blanche de grandir dans leur ombre mémorable vivant bourrage de crâne d’une revanche à prendre Passe pour le crétin d’Allemand de se promettre d’avoir la peau du Français et d’en faire des sauts de lits Pour le crétin de Français de se promettre d’avoir la peau de l’Allemand et d’en faire des sauts de lit Passe pour tout élan patriotique à la bière brune au pernod fils mais quelle bonne dynamite fera sauter la nuit les monuments comme champignons qui poussent aussi chez moi
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LĂ©on-Gontran Damas (PIGMENTS-NEVRALGIES)
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Chambre moulée dans la chaleur, mezcal, sourde lueur, langue de feu à ton chevet, l'ombre du ventilateur un immense papillon, dans l'oubliette de la fenêtre tarentule giflant le mur dans la nuit blanche noire étoile, oiseaux de grand chemin, bourdons assassinés dans leurs palais de cire, insectes pétillantes brindilles, longues fourmis s'insinuant. (Le Chantimane, 1997)
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Masson
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Les longues nuits semblaient ne s'écarter qu'à regret de la ville, pour quelques heures. Une grise lumière d'aube ou de crépuscule filtrant à travers le plafond de nuées d'un blanc sale se répandait alors sur les choses comme le reflet appauvri d'un lointain glacier. La neige même, qui continuait à tomber, était sans lumière. Cet ensevelissement blanc, léger et silencieux s'étendait à l'infini dans l'espace et le temps. Il fallait déjà allumer les veilleuses vers trois heures. Le soir épaississait sur la neige des tons de cendre, des bleus opaques, des gris tenaces de vieilles pierres. La nuit s'imposait, inexorable et calmante : irréelle. Le delta reprenait dans ces ténèbres sa configuration géographique. De noires falaises de pierre, cassées en angles droits, bordaient les canaux figés. Une sorte de phosphorescence sombre émanait du large fleuve de glace. Parfois les vents du nord, venus du Spitzberg et de plus loin encore, du Groenland peut-être, peut-être du pôle par l'Océan arctique, la Norvège, la mer Blanche, poussaient leurs rafales sur l'estuaire morne de la Neva. Le froid mordait tout à coup le granit, les lourdes brumes venues du sud par la Baltique s'évanouissaient tout à coup et les pierres, la terre, les arbres dénudés se couvraient instantanément de cristaux de givre dont chacun était une merveille à peine visible, faite de nombres, de lignes de force et de blancheur. La nuit changeait de face, dépouillant ses voiles d'irréalité. L'étoile polaire apparaissait, les constellations ouvraient l'immensité du monde. Le lendemain, les cavaliers de bronze sur leurs socles de pierre, couverts d'une poudre d'argent, semblaient sortir d'une étrange fête ; les hautes colonnes de granit de la cathédrale Saint-Isaac, son fronton peuplé de saints et jusqu'à sa massive coupole dorée, tout était givré. Les façades et les quais de granit rouge prenaient, sous ce revêtement magnifique, des teintes de cendre rose et blanche. Les jardins, avec les filigranes purs de leurs ■ branchages, paraissaient enchantés. Cette fantasmagorie ravissait les yeux des gens sortis de leurs demeures étouffantes ainsi qu'il y a des millénaires, les hommes vêtus de fourrures sortaient peureusement l'hiver des chaudes cavernes pleines d'une bonne puanteur animale. Pas une lumière dans des quartiers entiers. Des ténèbres préhistoriques.
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Victor Serge
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Je suis debout et Te regarde et je hais la blancheur de Ton front et l'innocence incommensurable de Tes yeux. Tu es blanche et Tu aveugles mes yeux. Je veux me pencher impitoyablement et laisser mon âme passer au-dessus de Toi et graver des rides dans Ton âme. Je veux ensanglanter Ton coeur avec le sang des espoirs blessés et inconsolables et avec la déchirure inguérissable des pensées désespérées. Tu es blanche et tu aveugles mes yeux ! Et je veux Te serrer des nuits entières entre mes bras et qu'au matin tu t'en ailles, inconnue et désespérée avec une blessure inguérissable dans un coin de Ton coeur et un désir infini de mort dans Tes grands yeux si beaux. Façonner Ta pensée et souiller Ton coeur et jeter Ton âme dans la matrice corrompue où mon âme s'est jetée. Je me sens la puissance, une nuit, de le corrompre tout entière. Que tu deviennes un écho de ma souffrance, une création de la corruption de mon âme, un lys au parfum perdu, au duvet souillé et aux feuilles déchirées comme si, toute la nuit, était passé sur lui un ouragan sans fin. ~ P 56
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Nikos Kazantzakis (Le lys et le serpent)
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Nous avons déjà parlé de la notion temporelle propre à chaque saison, l'été étant l'époque où il ne faut plus attendre, quand la récolte est mûre, pour la recueillir. J'ai ainsi connu des étés bretons où les pluies risquaient de gâcher le travail de toute une année; les Recteurs, en chaire, autorisaient exceptionnellement le travail le dimanche. Cette période de récolte n'est pas une phase tranquille où il suffit de contempler les champs de blé mûr, mais une période de travail impératif pour mettre la récolte à l'abri à temps. Les cultivateurs de l'époque -- comme maintenant -- n'avaient pas toujours leur temps normal de sommeil; l'été, quand il fallait suivre les battages de ferme en ferme, les paysans finissaient à la nuit pour reprendre à l'aube dans la ferme suivante, ce qui ne les empêchait pas, d'ailleurs, d'aller au bal le samedi et d'y gagner une nouvelle nuit blanche. La récolte n'attends pas, « quand le vin est tiré, il faut le boire » ; si le fruit du travail psychologique n'est pas engrangé en temps voulu, il risque d'être perdu. Psychologiquement, on peut dire que si le sujet ne prends pas conscience de certains progrès, de certains évolutions, aux moments où ceux-ci se présentent, ils risquent d'être perdus et de repartir dans l'inconscient. Il faudra un nouveau cycle pour retrouver à nouveau les solutions négligées. Il est nécessaire de reconnaître que les choses ont changé. Ainsi, en faisant avec quelqu'un le bilan d'une année d'entretiens et en se reportant aux problèmes qui se posaient un an plus tôt, il est possible de mesurer le chemin parcouru, de s'apercevoir que des problèmes, cruciaux alors, sont pasés au second plan et ont été résolus. Il est permis d'espérer que les nouvelles questions qui se posent trouveront elles aussi leurs réponses. Ainsi, le sujet n'a pas l'impression de nager continuellement dans la même problématique, comme s'il tournait en rond, et pourra même découvrir que si certains questions reviennent à l'ordre du jour, elles le font selon un mouvement spirale qui ne pose plus de problèmes de la même façon que l'année précédente. C'est la prise de conscience du chemin parcouru hier qui peut donner le courage d'en entreprendre un nouveau demain.
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Marie-Claire Dolghin-Loyer
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Métamorphoses la nuit je veux l'enrouler autour de moi comme un drap chaud elle avec ses étoiles blanches, avec sa malédiction grise avec ses bouts ondoyants, qui traquent les coqs des jours, je pends dans les charpentes aussi raide qu'une chauve-souris, je me laisse tomber dans l'air et je pars en chasse. Homme, j'ai rêvé de ton sang, je te mords jusqu'à la blessure, je me love dans tes cheveux et j'aspire ta bouche. Au-dessus des tours émondées les cimes du ciel sont noires. De leurs troncs dénudés suinte de la résine vitreuse vers des coupes invisibles de porto. Dans mes yeux marron demeure le reflet, Avec mes yeux marron doré je pars chercher ma proie, je capture poisson dans les tombes, celles qui se tiennent entre les maisons je capture poisson dans la mer : et la mer est une place plus loin avec des mats brisés, des amours noyés. Les lourdes cloches du navire sonnent venant de la forêt des algues. Sous la forme du navire se fige une forme d'enfant, dans ses mains du limon, au front une lumière. Entre nous les eaux voyagent, je ne te garde pas. Derrière des vitres gelées luisent des lampes bariolées et blanches, des cuillères livides coulent dans le bol, glace multicolore ; je vous appâte avec des fruits rouges, faits avec mes lèvres je suis un petit en-cas dans le gobelet de la nuit.
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Gertrud Kolmar
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Astrid sommeille dans la vase d’un marécage, lit bourbeux, puis la conscience balbutiante chasse les fragments de la nuit, petites miettes insouciantes, reprend forme, et soudain, le silence, partout, qui foudroie et dit l’absence, la vérité blanche. Les bruits de la vie sont dehors. Plus à l’intérieur.
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Marie Pavlenko (Traverser les montagnes et venir naître ici)
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Le suicide. Noirceur, nuit blanche, point d'ombre, jour mort. Le suicide supprime ce qui suit, ce qui succède, ce qui menace, ce qui allait venir. Conséquences fatales ne viendront jamais sanctionner leurs causes, ni rectifier la logique des choses. Ce qui se paie restera impayable. Ce qui suit ne suivra plus. Les lendemains éclatent soudain dans une poussière d'impossibilité. Vraiment, le suicide est une grande invention: et je défie qui que ce soit.
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Hubert Aquin (Journal, 1948-1971)
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Testament d’un rebelle donne-moi une plume que je puisse chanter que la vie n’est pas vaine donne-moi une saison pour regarder l'air dans les yeux lorsque le pêcher vomit sa plénitude blanche une tyrannie s'écroule laisse pleurer les mères laissent les seins dessécher tarir les girons lorsque l'échafaud sèvre pour la dernière fois donne-moi un amour qui ne pourrisse jamais entre les doigts donne-moi un amour comme celui que je veux te donner donne-moi un cœur qui batte sans arrêt batte batte plus fort que le battement blanc d’un pigeon craintif dans la nuit battra plus sec que les plombs amers donne-moi un cœur, une petite fabrique de sang qui peut cracher des fleurs de joie car le sang est doux est beau jamais vrai ou faux je veux mourir avant d'être mort lorsque mon sang est encore fertile et rouge avant que ne tombe la lie noire du doute donne-moi deux lèvres et de l’encre claire pour ma langue qui couvrira de lait une grande lettre d’amour pour la terre qui sera de jour en jour plus douce exorcisera toute l'amertume qui brûlera plus doux comme l'été laisse alors venir l'été sans bandeau ni corbeau laisse le pilori le pêcher donner ses fruits rouges en paix et offre-moi un lai de colombes de satisfaction que je puisse chanter de mon pis que la vie n'est pas vaine car comme je meurs les yeux ouverts ma chanson rouge ne périra pas 22.2.66 (pp. 36-37)
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Breyten Breytenbach (Feu froid)
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La peur est là, on ne la voit pas, on ne la sent pas, on peut la sentir sur les routes la nuit. C’est la dame blanche.
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Virginie Despentes (FĂłllame)
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Ils chantent les chansons entendues partout, et dont beaucoup de voyageurs étrangers fredonnent les refrains, en écoutant, debout sur le pont, ils chantent, naturellement, Santa Lucia, Addio, mia bella Napoli, Margherita, mais c'est l'Italie qui nous salue ainsi à notre départ, avec sa musique toute spirituelle, dont on ne sait pas au juste si c'est de la joie contenue ou des larmes prêtes à couler. Minuit sonne à Saint-Marc ; c'est le seul bruit que Venise nous envoie. Les habituels préparatifs de la mise en marche s'accomplissent sans trop de grincement. Un petit torpilleur, avec trois lanternes aux couleurs italiennes, s'est placé derrière la Vénus et, au départ, il nous escorte rasant le bord extrême d'écume blanche que fait l'hélice en mouvement. En mer. Une heure du matin. Je monte sur le pont désert. Les vers de Laforgue Ah! que la nuit est lointainement pleine De silencieuse infinité claire ... Viennent naturellement à l'esprit : la pleine lune, dans le ciel pur, confond la mer et le ciel en une même teinte grise, transparente et délicate. On ne voit plus rien de la côte, qu'un phare lointain, sur la gauche. Le petit torpilleur avec ses lumières verte, blanche et rouge, ne nous suit plus. Le navire est tout seul dans la vaste clarté lunaire.
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Valery Larbaud (Journal)
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Je suis un personnage. J’ai commencé à préparer mon suicide. Je me laisse un an. Finir le livre. Ensuite, me tuer. Il faut bien prévoir. Ne rien oublier. Je dois classer les fichiers. Je rêve d’une anthologie posthume. Tous mes textes rassemblés sous une même couverture. Tout y mettre. Toutes ces pistes éclaircies par un quelconque lecteur attentif. Je m’énerve moi-même avec le suicide. J’en ai tellement parlé. Partout. Dans tous mes livres. Durant chacune de mes nuits blanches. Deux-trois fois par semaine en hiver. Un peu moins en été. J’ai contourné le problème. Soulevé les coins. Approché doucement au début. Puis je m’y suis lancée quelques fois. Deux, officiellement. Deux petites fois ratées. C’est très difficile de se tuer. On croit qu’on peut toujours mourir. Comme ça, juste par la force de la pensée. Mais non. On ne se vide pas de son sang avec une coupure d’un pouce. On ne meurt plus de caler un pot d’antidépresseurs. On ne peut plus mourir (Mille, p. 133).
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Maude Veilleux (Corps)
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Il travaille pour se libérer de la nécessité de travailler, il se rend esclave pour se libérer de la servitude, et ce tragique paradoxe sera dorénavant la formule de sa vie : écrire pour être dispensé d’écrire ; amasser beaucoup d’argent pour ne plus être contraint de songer à l’argent ; épargner pour pouvoir dépenser ; se retrancher du monde pour avoir les moyens de le conquérir ; bûcher, bûcher, bûcher jour et nuit, sans trêve, sans joie, sans vie, pour vivre enfin la vie réelle…
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Jean-Marc Ligny (La Dame Blanche)
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des désignations spécifiques qui, jusqu’à cette nuit-là, étaient demeurées mystérieuses à mes yeux : grappe blanche, grand arôme, tafia, coco-merlo, cœur-de-chauffe et, quand il se voulait précieux, devant des étrangers venus de l’En-Ville par exemple, eau-de-vie de canne à sucre. Il
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Raphaël Confiant (Régisseur du rhum)
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Un jour et une nuit. Jamais, à quatorze ans, je n'avais eu cette page blanche, cette liberté sans limites, ce temps qui m'appartenait entièrement. Il a suffi qu'on me donne ce temps de solitude, dans un petit royaume au bord de l'eau, pour que l'imaginaire et la vie s'abattent sur moi et ne me lâchent plus.
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Timothée de Fombelle (Le Livre de Perle)