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Que signifient pour nous tous la poésie, la littérature et la pensée politique de [Mihai] Eminescu que nous connaissons. Il serait inutile de nous en rappeler encore une fois. Toute la création qui a suivi, de Nicolae Iorga et Tudor Arghezi, à Vasile Pârvan, Nae Ionescu et Lucian Blaga porte l'empreinte du génie, de son esprit, tout au moins de la langue éminescienne. Rarement un peuple entier s'est retrouvé en un poète avec autant de spontanéité et autant de ferveur que celles avec lesquelles s'est retrouvé le peuple roumain dans l'œuvre de Eminescu. Nous aimons tous [Ion] Creangă nous admirons [Bogdan Petriceicu] Hașdeu nous apprenons écrire avec [Alexandru] Odobescu nous respectons Titu Maiorescu et nous pouvons difficilement laisser passer beaucoup de temps sans relire [Ion Luca] Caragiale. Mais, pour chacun d'entre nous, Eminescu est tout autre. Il nous a révélé d'autres visions et nous a fait connaître d'autres larmes. Lui, et lui seulement, nous a aidé à connaître la bataille du cœur. Il nous a permis de comprendre et de savourer la malchance d'être roumain. Pour nous, Eminescu n'est pas seulement notre plus grand poète et le plus brillant génie qu'aient engendré la terre, les eaux et le ciel roumains. Il est, en quelque sorte, la personnification même de ce ciel et de cette terre, avec toutes les douleurs, les beautés et les espoirs qui y ont poussé.
(Mircea Eliade, 1950, p. 305-306)
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