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[N.B : « Mihne et la sorciĂšre » est une lĂ©gende historique dont la traduction a Ă©tĂ© effectuĂ©e par l'auteur lui-mĂȘme (cf. « Brises d'Orient » Ă©ditions Dentru, Paris 1866) et qui ne respecte donc pas rigoureusement la version originale en roumain. MĂ©tamorphosĂ©e en sorciĂšre, la mĂšre d'un jeune soldat tuĂ© Ă la guerre jette un mauvais sort Ă son souverain, Mihne, tyran sanguinaire des Carpates. Ne pouvant transgresser les derniĂšres volontĂ©s de son fils, qui refuse la vengeance, elle tente de se servir des dĂ©mons de l'enfer afin d'attraper Mihne. Au terme d'une terrible cavalcade, ces dĂ©mons sont sur le point d'y parvenir quand l'aube se lĂšve les rĂ©duisant Ă l'impuissance. Les vĆux du soldat sont ainsi exaucĂ©s.]
La vieille
â « J'ai promis de te dire, ĂŽ seigneur, l'avenir ;
C'était pour te contraindre, Î mon maßtre, à venir.
Ăcoute si tu peux : j'avais dans ton armĂ©e
Un fils dont la bravoure eut de la renommée,
Pur comme un ciel serein et beau comme la fleur ;
Pour lui seul je restais en ces lieux de douleur.
Il était mon seul Dieu ! Pour lui, dont j'étais fiÚre,
Je me suis transformée en horrible sorciÚre.
Il est mort, il est mort ! Tu fus son assassin !
Veux-tu mon sang encore ? Tiens, frappe donc ce sein !
Des à présent ma vie est affreuse et flétrie.
Oh ! Que ne puis-je boire et ton sang et ta vie !
à son dernier soupir : « MÚre » a dit mon enfant,
« Pardonne. » Contre moi son pardon le défend.
« Mais, as-tu toujours soif ? dit la sorciÚre à Mihne ;
Prends ce vase écumant dans ta main assassine ;
Meurtrier, bois le sang vivant de mon fils mort !
Qu'il verse dans ton sang le poison du remords ! »
[...]
La cime du rocher par degrés se colore,
Et déjà le jour luit !
La cohorte vaincue, aux rayons de l'aurore,
Retombe dans sa nuit.
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