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[N.B : « Michel au banquet » est une lĂ©gende historique dont la traduction a Ă©tĂ© effectuĂ©e par l'auteur lui-mĂȘme (cf. « Brises d'Orient » Ă©ditions Dentru, Paris 1866) et qui ne respecte donc pas rigoureusement la version originale en roumain. Michel le Brave, prince de Valachie (1593-1601), vainqueur de l'armĂ©e ottomane lors de la bataille de CÄlugÄreni (1595), parvient Ă rĂ©unir pour une brĂšve pĂ©riode, sous sa domination, les trois provinces roumaines. Victime d'une trahison, il est assassinĂ© par son alliĂ© le gĂ©nĂ©ral Basta.]
La lune s'Ă©levait comme une sphĂšre d'or,
Et l'armée au sommeil s'abandonnait encor.
Sur un sombre rocher, sous la céleste voûte,
Dans un banquet, Michel, silencieux, Ă©coute ;
Il est assis Ă table avec ses capitans,
Et se rappelle encore le cours de ses beaux ans.
Quand l'espoir nous sourit, la vie humaine passe
Comme les fleurs des champs qu'un doux soleil efface.
Ainsi coulait le temps, et tranquille et joyeux,
Et les sombres soucis s'étaient éloignés d'eux.
La lune répandait sur eux sa clarté pure
Et l'auster caressait leur large chevelure.
On verse dans la coupe un vin couleur de sang,
On boit à la santé du prince tout-puissant.
Michel prend une coupe et parle de la sorte :
â « Ce toast, ĂŽ mes amis, Ă la mort je le porte !
Car la vie ici-bas, amis, sans liberté,
Est un jour sans soleil, une nuit sans clarté.
Ceux qui, malgré le jour, s'attachent à la vie,
Ne seront inspirer ni l'amour ni l'envie ;
Le Roumain ne veut point des champs vastes, sans fleurs,
Des jours longs et mĂȘlĂ©s de tristesse et de pleurs.
Ainsi, le roi des airs, ayant l'aile brisée
Doit préférer la mort à cette vie usée.
Ainsi sont les Roumains, et j'aime mieux mourir
Que de porter le joug et vivre pour souffrir. »
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