“
Dans la bouche de ces prétendus représentants du prolétariat, toutes les formules socialistes perdent leur sens réel. La lutte de classe reste toujours le grand principe ; mais elle doit être subordonnée à la solidarité nationale1. L’internationalisme est un article de foi en l’honneur duquel les plus modérés se déclarent prêts à prononcer les serments les plus solennels; mais le patriotisme impose aussi des devoirs sacrés2. L’émancipation des travailleurs doit être l’œuvre des travailleurs eux-mêmes, comme on l’imprime encore tous les jours, mais la véritable émancipation consiste à voter pour un professionnel de la politique, à lui assurer les moyens de se faire une bonne situation, à se donner un maître. Enfin l’État doit disparaître et on se garderait de contester ce qu’Engels a écrit là-dessus; mais cette disparition aura lieu seulement dans un avenir si lointain que l’on doit s’y préparer en utilisant provisoirement l’État pour gaver les politiciens de bons morceaux ; et la meilleure politique pour faire disparaître l’État consiste provisoirement à renforcer la machine gouvernementale ; Gribouille, qui se jette à l’eau pour ne pas être mouillé par la pluie, n’aurait pas raisonné autrement. Etc, etc.
”
”
Georges Sorel (Reflections on Violence (Dover Books on History, Political and Social Science))