Euxes Quotes

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Nous, les Arabes, ne sommes pas paresseux. Nous prenons seulement le temps de vivre. Ce qui n'est pas le cas des Occidentaux. Pour eux, le temps, c'est de l'argent. Pour nous, le temps ça n'a pas de prix. Un verre de thé suffit à notre bonheur, alors qu'aucun bonheur ne leur suffit. Toute la différence est là.
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Yasmina Khadra (Ce que le jour doit Ă  la nuit)
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La vie est humiliante de simplicité : on fait tout pour échapper à ses parents, et puis on devient eux.
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Frédéric Beigbeder (99 francs)
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L'amitiĂ©, dit-il, ce n'est pas d'ĂȘtre avec ses amis quand ils ont raison, c'est ĂȘtre avec eux mĂȘme quand ils ont tord.
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André Malraux
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Passer les miroirs, ça demande de s'affronter soi-mĂȘme. Il faut des tripes, t'sais, pour se regarder droit dans les mirettes, se voir tel qu'on est, plonger dans son propre reflet. Ceux qui se voilent la face, ceux qui se mentent Ă  eux-mĂȘmes, ceux qui se voient mieux qu'ils sont, ils pourront jamais. Alors crois-moi, ça ne court pas les trottoirs !
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Christelle Dabos (Les Fiancés de l'hiver (La Passe-Miroir, #1))
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A l'adolescence, on rĂȘve du jour oĂč l'on quittera ses parents, un autre jour ce sont vos parents qui vous quittent. Alors, on ne rĂȘve plus qu'Ă  pouvoir redevenir, ne serait-ce qu'un instant, l'enfant qui vivait sous leur toit, les prendre dans vos bras, leur dire sans pudeur qu'on les aime, se serrer contre eux pour qu'ils vous rassurent encore une fois.
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Marc Levy (Le Voleur d'ombres)
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Un petit nuage rose descendait de l'air et s'approchait d'eux. "J'y vais! proposa-t-il. -vas-y", dit Colin. Et le nuage les enveloppa. A l'intérieur, il faisait chaud et ça sentait le sucre à la cannelle.
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Boris Vian (L'Écume des jours)
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Apprenez Ă  aimer vos Ă©checs, Marcus, car ce sont eux qui vous bĂątiront. Ce sont vos Ă©checs qui donneront toute leur saveur Ă  vos victoires.
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Joël Dicker (La Vérité sur l'Affaire Harry Quebert (Marcus Goldman, #1))
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Le seul véritable voyage, le seul bain de Jouvence, ce ne serait pas d'aller vers de nouveaux paysages, mais d'avoir d'autres yeux, de voir l'univers avec les yeux d'un autre, de cent autres, de voir les cent univers que chacun d'eux voit, que chacun d'eux est;
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Marcel Proust (La PrisonniĂšre)
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Les dieux ont enseignĂ© aux hommes Ă  se contempler eux-mĂȘmes dans le spectacle comme les dieux se contemplent eux-mĂȘmes dans l'imagination des hommes.
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Pierre Klossowski
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Je croyais voir des choses invisibles aux yeux des autres, j'Ă©tais encore plus aveugle qu'eux.
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Marc Levy (Le Voleur d'ombres)
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Il faut longtemps pour que resurgisse Ă  la lumiĂšre ce qui a Ă©tĂ© effacĂ©. Des traces subsistent dans des registres et l'on ignore oĂč ils sont cachĂ©s et quels gardiens veillent sur eux et si ces gardiens consentiront Ă  vous les montrer. Ou peut-ĂȘtre ont-ils oubliĂ© tout simplement que ces registres existaient
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Patrick Modiano (Dora Bruder)
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Cette recommandation (Aime ton prochain comme toi-mĂȘme) paraĂźt, Ă  premiĂšre vue, irrĂ©prochable mais Ă  voir ce que la plupart des gens font de leur vie, Ă  voir ce qu'ils font de leur intelligence, je n'ai pas envie qu'ils m'aiment comme eux-mĂȘmes.
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Amin Maalouf (Balthasar's Odyssey)
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Le bonheur est Ă  ceux qui se suffisent Ă  eux-mĂȘmes.
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Aristotle
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Et le problùme avec ceux qui sont trop cons pour se faire leur propre opinion, c’est qu’ils adoptent souvent celle de plus cons qu’eux.
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David Goudreault (Ta mort Ă  moi)
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Quand on a beaucoup médité sur l'homme, par métier ou par vocation, il arrive qu'on éprouve de la nostalgie pour les primates. Ils n'ont pas, eux, d'arriÚre-pensées.
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Albert Camus (La Chute)
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Autant pas se faire d'illusions, les gens n'ont rien Ă  se dire, ils ne se parlent que de leurs peines Ă  eux chacun, c'est entendu. Chacun pour soi, la terre pour tous.
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Louis-Ferdinand CĂ©line (Journey to the End of the Night)
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La loi n'a jamais rendu les hommes plus justes d'un iota ; et, Ă  cause du respect qu'ils lui marquent, les ĂȘtres bien disposĂ©s eux-mĂȘme deviennent les agents de l'injustice.
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Henry David Thoreau (Civil Disobedience and Other Essays)
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A cet instant, il se produisit un événement comme il en arrive un ou deux dans une vie. Un coup de foudre. Il n'y a pas d'autre mot pour qualifier ce qui se passa entre eux. Ils se regardÚrent longtemps.
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Jean-Michel Guenassia (Le Club des incorrigibles optimistes)
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Mais, enfin, les Anglais ont des idées à eux, en amitié, en amour, en tout.
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Charlotte Brontë (Villette)
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La meilleure facon d'imposer une idée aux autres, c'est de leur faire croire qu'elle vient d'eux
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Alphonse Daudet
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J'ai toujours cru que certains endroits sont des aimants et que vous ĂȘtes attirĂ©s vers eux si vous marchez dans leurs parages.
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Patrick Modiano (Dans le café de la jeunesse perdue)
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Ophélie ne comprenait rien à ce jargon. Sur Anima, les téléphones se débrouillaient sagement entre eux, et puis voilà.
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Christelle Dabos
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L’enfer, ce n’est pas les autres, c’est l’obligation de vivre avec eux.
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Sylvain Tesson (Petit traité sur l'immensité du monde)
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Cependant Quenu se rappelait une phrase de Charvet, cette fois, qui dĂ©clarait que "ces bourgeois empĂątĂ©s, ces boutiquiers engraissĂ©s, prĂȘtant leur soutien Ă  un gouvernement d' indigestion gĂ©nĂ©rale, devaient ĂȘtres jetĂ©s les premiers au cloaque." C' Ă©tait grĂące Ă  eux, grĂące Ă  leur Ă©goĂŻsme du ventre, que le despotisme s' imposait et rongeait une nation.
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Émile Zola (The Belly of Paris (Les Rougon-Macquart, #3))
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Tu finiras sĂ»rement par le trouver le truc qui leur fait si peur, Ă  eux tous, Ă  tous ces salauds lĂ , autant qu'ils sont et qui doit ĂȘtre au bout de la nuit, et c'est pour ça qu'ils n'y vont pas, au bout de la nuit.
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Louis-Ferdinand CĂ©line (Journey to the End of the Night)
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Je crois, je suis sĂ»r que beaucoup d’hommes n’engagent jamais leur ĂȘtre, leur sincĂ©ritĂ© profonde. Ils vivent Ă  la surface d’eux-mĂȘmes, et le sol humain est si riche que cette mince couche superficielle suffit pour une maigre moisson, qui donne l’illusion d’une vĂ©ritable destinĂ©e.
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Georges Bernanos (The Diary of a Country Priest)
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Il y a dans l'Histoire une singuliÚre lignée, toujours renouvelée, de fanatiques de l'ordre. Voués à une idole abstraite et absolue, pour eux les vie humaines ne sont d'aucune valeur si elles attentent au dogme des institutions; et l'on dirait qu'ils ont oublié que la collectivité qu'ils servent est composée d'hommes. (partie 2, chapitre 9)
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Maurice Druon (Les Rois maudits)
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Les canards, eux, Ă©voquent la stabilitĂ© du mĂ©nage bourgeois. Ils glissent endimanchĂ©s, deux par deux, saluant lĂ©gĂšrement de la tĂȘte les autres couples.
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Sylvain Tesson (Dans les forĂȘts de SibĂ©rie)
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L’Africain a Ă©tĂ© le premier homme sur la Terre, les autres races ne sont venues qu'aprĂšs. Tous les hommes sont donc des immigrĂ©s, sauf les Africains qui sont chez eux ici-bas.
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Alain Mabanckou (Black bazar)
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Ce n'est pas parce que les autres sont morts que notre affection pour eux s'affaiblit, c'est parce que nous mourrons nous-mĂȘmes.
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Marcel Proust
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C'est la grande faiblesse des hommes de projeter ce qu'ils ont refoulé en eux - sur les autres.
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Jean Anouilh (Oedipe ou Le roi boiteux)
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Le vieillard: Maintenant... vous voyez aussi les morts. Pierre: Comment les distingue-t-on des vivants? Le vieillard: C'est bien simple: les vivants, eux, sonts toujours pressés.
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Jean-Paul Sartre (Les jeux sont faits)
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Ô temps ! suspends ton vol, et vous, heures propices ! Suspendez votre cours : Laissez-nous savourer les rapides dĂ©lices Des plus beaux de nos jours ! Assez de malheureux ici-bas vous implorent, Coulez, coulez pour eux ; Prenez avec leurs jours les soins qui les dĂ©vorent ; Oubliez les heureux. Mais je demande en vain quelques moments encore, Le temps m'Ă©chappe et fuit ; Je dis Ă  cette nuit : Sois plus lente ; et l'aurore Va dissiper la nuit.
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Alphonse de Lamartine (Poésies choisies)
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Ma vision de l'amour n'a pas changĂ©, mais ma vision du monde, oui. C'est super agrĂ©able d'ĂȘtre lesbienne. Je me sens moins concernĂ©e par la fĂ©minitĂ©, par l'approbation des hommes, par tous ces trucs qu'on s'impose pour eux. Et je me sens aussi moins prĂ©occupĂ©e par mon Ăąge : c'est plus dur de vieillir quand on est hĂ©tĂ©ro. La sĂ©duction existe entre filles, mais elle est plus cool, on n'est pas dĂ©chue Ă  40 ans.
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Virginie Despentes
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Le voilĂ  le grand drame de notre sociĂ©tĂ©: MĂȘme les riches ne font plus envie. Ils sont gros, moches, et vulgaires, leurs femmes sont liftĂ©es, ils vont en prison, leurs enfants se droguent, ils ont des goĂ»ts de ploucs, ils posent pour Gala. Les riches d'aujourd'hui ont oubliĂ© que l'argent est un moyen non une fin. Ils ne savent plus quoi en faire. Au moins quand on est pauvre, on peut se dire qu'avec du fric, tout s'arrangerait. Mais quand on est riche, on ne peut pas se dire qu'avec une nouvelle baraque dans le Midi, une autre voiture de sport, une paire de pompes Ă  12000 balles, ou un mannequin supplĂ©mentaire, tout s'arrangerait. Quand on est riche, on n'a plus d'excuse. C'est pour ça que tout les milliardaires sont sous Prozac ; parce qu'ils ne font plus rĂȘver personne, mĂȘme pas eux !
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Frédéric Beigbeder (L'amour dure trois ans (Marc Marronnier, #3))
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Tous ces vacanciers tassés les uns contre les autres sur une minuscule plage, ou en train de se battre en tenue de soirée devant le buffet, horrifiés à l'idée que le voisin ronfleur ne vole la derniÚre saucisse, ces gens heureux d'avoir été enfermés une dizaine d'heures dans une carlingue avec des gamins braillards autour d'eux, tout ça me donnait envie de vomir.
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AgnÚs Martin-Lugand (Les gens heureux lisent et boivent du café)
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C’est une folie de haĂŻr toutes les roses parce que une Ă©pine vous a piquĂ©, d’abandonner tous les rĂȘves parce que l’un d’entre eux ne s’est pas rĂ©alisĂ©, de renoncer Ă  toutes les tentatives parce qu’on a Ă©choué  C‘est une folie de condamner toutes les amitiĂ©s parce qu’une d’elles vous a trahi, de ne croire plus en l’amour juste parce qu’un d’entre eux a Ă©tĂ© infidĂšle, de jeter toutes les chances d’ĂȘtre heureux juste parce que quelque chose n’est pas allĂ© dans la bonne direction. Il y aura toujours une autre occasion, un autre ami, un autre amour, une force nouvelle. Pour chaque fin il y a toujours un nouveau dĂ©part.
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Antoine de Saint-Exupéry
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Je m’intĂ©resse peu aux hommes Ă  leur opinion et mĂȘme pas du tout
 c’est leur trognon qui m’intĂ©resse, pas ce qu’ils disent mais ce qu’ils sont
 la chose — l’homme en soi
 presque toujours le contraire de ce qu’ils racontent. C’est lĂ  que je trouve ma musique
 dans les ĂȘtres
 mais malgrĂ© eux et pas dans l’angle qu’ils me prĂ©sentent — Je les viole
 en toute gentillesse bien sĂ»r mais sans pitié 
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Louis-Ferdinand CĂ©line (Lettres (Bibliotheque de la Pleiade) (French Edition))
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Rien n'est jamais acquis à l'homme Ni sa force Ni sa faiblesse ni son coeur Et quand il croit Ouvrir ses bras son ombre est celle d'une croix Et quand il croit serrer son bonheur il le broie Sa vie est un étrange et douloureux divorce Il n'y a pas d'amour heureux Sa vie Elle ressemble à ces soldats sans armes Qu'on avait habillés pour un autre destin A quoi peut leur servir de se lever matin Eux qu'on retrouve au soir désoeuvrés incertains Dites ces mots Ma vie Et retenez vos larmes Il n'y a pas d'amour heureux Mon bel amour mon cher amour ma déchirure Je te porte dans moi comme un oiseau blessé Et ceux-là sans savoir nous regardent passer Répétant aprÚs moi les mots que j'ai tressés Et qui pour tes grands yeux tout aussitÎt moururent Il n'y a pas d'amour heureux Le temps d'apprendre à vivre il est déjà trop tard Que pleurent dans la nuit nos coeurs à l'unisson Ce qu'il faut de malheur pour la moindre chanson Ce qu'il faut de regrets pour payer un frisson Ce qu'il faut de sanglots pour un air de guitare Il n'y a pas d'amour heureux Il n'y a pas d'amour qui ne soit à douleur Il n'y a pas d'amour dont on ne soit meurtri Il n'y a pas d'amour dont on ne soit flétri Et pas plus que de toi l'amour de la patrie Il n'y a pas d'amour qui ne vive de pleurs Il n'y a pas d'amour heureux Mais c'est notre amour à tous les deux
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Louis Aragon (La Diane française: En Étrange Pays dans mon pays lui-mĂȘme)
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Un guerrier n'est pas ce que vous croyez. Ce n'est pas quelqu'un qui part faire la guerre pour prendre la vie des autres. Pour nous un guerrier c'est quelqu'un qui sacrifie tout de lui pour le bien-ĂȘtre des autres. Il protĂšge et prend soin des aĂźnĂ©s, de ceux qui sont sans dĂ©fense, de ceux qui ne peuvent le faire pour eux-mĂȘmes et par dessus tout les enfants qui sont le futur de notre humanitĂ©.
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Sitting Bull
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La pensĂ©e ne doit jamais se soumettre, ni Ă  un dogme, ni Ă  un parti, ni Ă  une passion, ni Ă  un intĂ©rĂȘt, ni Ă  une idĂ©e prĂ©conçue, ni Ă  quoi que ce soit, si ce n'est aux faits eux-mĂȘmes, parce que, pour elle, se soumettre, ce serait cesser d'ĂȘtre.
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Henri Poincaré
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Je lis des vieux livres parce que les pages tournĂ©es de nombreuses fois et marquĂ©es par les doigts ont plus de poids pour les yeux, parce que chaque exemplaire d'un livre peut appartenir Ă  plusieurs vies. Les livres devraient rester sans surveillance dans les endroits publics pour se dĂ©placer avec les passants qui les apporteraient un moment avec eux, puis ils devraient mourir comme eux, usĂ©s par les malheurs, contaminĂ©s, noyĂ©s en tombant d'un pont avec les suicidĂ©s, fourrĂ©s dans un poĂȘle l'hiver, dĂ©chirĂ©s par les enfants pour en faire des petits bateaux, bref ils devraient mourir n'importe comment sauf d'ennui et de propriĂ©tĂ© privĂ©e, condamnĂ©s Ă  vie Ă  l’étagĂšre. (p.22)
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Erri De Luca (Tre cavalli)
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J'Ă©tais bien. Je regardais les miens. Je pouvais sentir battre leur cƓur et respirer leur souffle. AuprĂšs d'eux je me sentais en paix. J'avais le sentiment qu'ils protĂ©geaient ma vie, tous les trois Ă  leur façon. Je voulais qu'ils sachent Ă  quel point je les aimais.
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Jean-Paul Dubois (Tous les hommes n'habitent pas le monde de la meme facon)
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Pourquoi ? demanda-t-il à l'armurier. Que suis-je pour eux ? — Un chevalier qui s'est souvenu de ses vƓux.
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George R.R. Martin
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J'aurais dû traverser l'existence avec ce privilÚge que donne la beauté, de pouvoir prendre les hommes et les jeter. Au lieu de quoi c'étaient eux qui m'abandonnaient ou mouraient. Ou bien se mariaient.
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Ian McEwan (Sweet Tooth)
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L'action, pour certains hommes, est d'autant plus impraticable que le dĂ©sir est plus fort. La mĂ©fiance d'eux-mĂȘmes les embarrasse, la crainte de dĂ©plaire les Ă©pouvante; d’ailleurs, les affections profondes ressemblent aux honnĂȘtes femmes; elles ont peur d’ĂȘtre dĂ©couvertes, et passent dans la vie les yeux baissĂ©s.
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Gustave Flaubert (Sentimental Education)
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Je détestais lui faire du mal. La plupart du temps, je parvenais à oublier cette inéluctable vérité : certes, mes parents étaient heureux de m'avoir auprÚs d'eux, mais j'étais aussi à moi seule leur souffrance.
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John Green (The Fault in Our Stars)
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Je ne ressens pas la moindre honte de ne pas ĂȘtre une super bonne meuf. En revanche, je suis verte de rage qu'en tant qu fille qui intĂ©resse peu les hommes, on cherche sans cesse Ă  me faire savoir que je ne devrais mĂȘme pas ĂȘtre lĂ . On a toujours existĂ©. MĂȘme s'il n'est pas question de nous dans les romans d'hommes, qui n'imaginent que des femmes avec qui ils voudraient coucher. On a toujours existĂ©, on n'a jamais parlĂ©. MĂȘme aujourd'hui que les femmes publient beaucoup de romans, on rencontre rarement de personnage fĂ©minins aux physiques ingrats ou mĂ©diocres, inaptes Ă  aimer les hommes ou Ă  s'en faire aimer. Au contraire les hĂ©roines contemporaines aiment les hommes, les rencontrent facilement couchent avec eux en deux chapitres, elles jouissent en quatre lignes et elles aiment toutes le sexe. La figure de la looseuse de la fĂ©minitĂ© m'est plus que sympathique, elle m'est essentielle.
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Virginie Despentes (King Kong théorie)
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Elle se mordit la langue quand Thorn pressa sa bouche contre la sienne. Sur le moment, elle ne comprit plus rien. Elle sentit sa barbe lui piquer le menton, son odeur de dĂ©sinfectant lui monter Ă  la tĂȘte, mais la seule pensĂ©e qui la traversa, stupide et Ă©vidente, fut quenelle avait une botte plantĂ©e dans son tibia. Elle voulut se reculer; Thorn l’en empĂȘcha. Il referma ses mains de part et d’autre de son visage, les doigts dans ses cheveux, prenant appui sur sa nuque avec une urgence qui les dĂ©sĂ©quilibra tous les deux. La bibliothĂšque dĂ©versa une pluie de documents sur eux. Quand Thorn s’écarte finalement, le souffle court, ce fut pour clouer un regard de fer dans ses lunettes. - je vous prĂ©viens. Les mots que vous m’avez dits, je ne vous laisserai pas revenir dessus. Sa voix Ă©tait Ăąpre, mais sous l’autoritĂ© des paroles il y avait comme une fĂȘlure. OphĂ©lie pouvait percevoir le pouls prĂ©cipitĂ© des mains qu’il appuyait maladroitement sur ses joues. Elle devait reconnaĂźtre que son propre cƓur jouait Ă  la balançoire. Thorn Ă©tait sans doute l’homme le plus dĂ©concertant qu’elle avait jamais rencontrĂ©, mais il l’a faisait se sentir formidablement vivante. - je vous aime, rĂ©pĂ©ta-y-elle d’un ton inflexible. C’est ce que j’aurais du vous rĂ©pondre quand vous vouliez connaĂźtre la raison de ma prĂ©sence Ă  Babel c’est ce que j’en aurais du vous rĂ©pondre chaque fois que vous vouliez savoir ce que j’en avais vraiment Ă  vous dire. Bien sĂ»r que je dĂ©sire percer les mystĂšres de Dieu et reprendre le contrĂŽle de ma vie, mais... vous faites partie de ma vie, justement. Je vous ai traitĂ© d’égoĂŻste et Ă  aucun moment je ne me suis mise, moi, Ă  votre place. Je vous demande pardon. 
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Christelle Dabos (La MĂ©moire de Babel (La Passe-Miroir, #3))
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À des milliers de kilomĂštres d'eux, Sayanel ferma les yeux de Nillem. Avec la mĂȘme douceur qu'il avait dĂ©ployĂ© pour dĂ©poser Destan dans son berceau. Une infinie douceur. Une douleur infinie. - Je te demande pardon, murmura-t-il.
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Pierre Bottero (Ellana, la Prophétie (Le Pacte des MarchOmbres, #3))
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À eux deux, la femme, nerveuse et hypocrite, l'homme, sanguin et vivant en brute, ils faisaient un couple puissamment liĂ©. Ils se complĂ©taient, se protĂ©geaient mutuellement. Le soir, Ă  table, dans les clartĂ©s pĂąles de la lampe, on sentait la force de leur union, Ă  voir le visage Ă©pais et souriant de Laurent, en face du masque muet et impĂ©nĂ©trable de ThĂ©rĂšse.
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Émile Zola (ThĂ©rĂšse Raquin)
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Les dessinateurs se dont appropriĂ©s l’Imagination, la liant dans la conscience collective au don qu’ils possĂšdent. Et si l’Imagination Ă©tait bien plus que cela ? Une porte vers des ailleurs que mĂȘme les plus douĂ©s d’entre eux ne perçoivent pas ?
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Pierre Bottero (Les Tentacules du mal (Les Mondes d'Ewilan, #3))
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Sur un mĂȘme ring de boxe sont rĂ©unis Mike Tyson, le champion du monde en titre des poids lourds, et un chĂŽmeur bengali sous-alimentĂ©. Que disent les ayatollahs du dogme nĂ©olibĂ©ral ? Justice est assurĂ©e, puisque les gants de boxe des deux protagonistes sont de mĂȘme facture, le temps du combat Ă©gal pour eux, l'espace de l'affrontement unique, et les rĂšgles du jeu constantes. Alors que le meilleur gagne ! L'arbitre impartial, c'est le marchĂ©. L'absurditĂ© du dogme nĂ©olibĂ©ral saute aux yeux. (p. 193)
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Jean Ziegler (Destruction massive : GĂ©opolitique de la faim)
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quels soucis de gloire, quel intĂ©rĂȘt, quelles satisfactions, et elles sont nombreuses, la lutte lui apporte? Sans la guerre il n y aurait pas de dĂ©bouchĂ©s pour les nombreuses qualitĂ©s viriles dĂ©veloppĂ©es par la lutte; se battre ainsi demeure une caractĂ©ristique du sexe masculin [...] c est, disent certains la contrepartie de l instinct maternel, qu il ne peuvent, eux, partager
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Virginia Woolf (Three Guineas)
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Oui, moi aussi, je m'Ă©tais souvent demandĂ©: comment font les gents? Et Ă  vrai dire, si ces questions Ă©taient modifiĂ©es, elles n'avaient jamais cessĂ©: comment font les gents, pour Ă©crire, aimer, dormir d'une seule traite, varier les menus de leurs enfants, les laisser grandir, les laisser partir sans s'accrocher Ă  eux, aller une fois par an chez le dentiste, faire du sport, rester fidĂšle, ne pas recommencer Ă  fumer, lire des livres + des bandes dessinĂ©es + des magazines + un quotidien, ne pas ĂȘtre totalement dĂ©passĂ© en matiĂšre de musique, apprendre Ă  respirer, ne pas s'exposer au soleil sans protection, faire leurs courses une seule fois par semaine sans rien oublier?
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Delphine de Vigan (D'aprĂšs une histoire vraie)
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AthĂ©es: Noms que les thĂ©ologiens donnent assez libĂ©ralement Ă  quiconque ne pense pas comme eux sur la divinitĂ©, ou ne la croit pas telle qu’ils l’ont arrangĂ©e dans le creux de leurs infaillibles cerveaux. En gĂ©nĂ©ral un athĂ©e c’est tout homme qui ne croit pas au dieu des prĂȘtres.
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Paul-Henri Thiry (La Théologie portative ou Dictionnaire abrégé de la religion chrétienne)
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La distinction traditionnelle entre guerres "justes" et guerres "injustes" est dĂ©sormais obsolĂšte. La cruautĂ© des moyens dĂ©passe aujourd'hui tout objectif imaginable. Aucune frontiĂšre nationale, aucune idĂ©ologie, aucun "mode de vie" ne peut justifier la disparition de millions de vies que la guerre moderne, nuclĂ©aire ou conventionnelle, entraĂźne inĂ©vitablement. Les prĂ©textes classiques sont soit trop confus soit trop changeants pour que l'on meure pour eux. Les systĂšmes changent, les politiques changent. Les distinctions entre le bien et le mal proclamĂ©es par les politiciens ne sont pas assez Ă©videntes pour justifier que des gĂ©nĂ©rations d'ĂȘtre humains meurent pour prouver leur caractĂšre sacro-saint. MĂȘme une guerre de lĂ©gitime dĂ©fense, la plus moralement justifiable des guerres, perd tout caractĂšre moral lorsqu'elle exige un sacrifice collectif si Ă©norme qu'il frise le suicide.
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Howard Zinn (Disobedience and Democracy: Nine Fallacies on Law and Order (Radical 60s))
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D’oĂč viennent ces influences mystĂ©rieuses qui changent en dĂ©couragement notre bonheur et notre confiance en dĂ©tresse ? On dirait que l’air, l’air invisible est plein d’inconnaissables Puissances, dont nous subissons les voisinages mystĂ©rieux. Je m’éveille plein de gaietĂ©, avec des envies de chanter dans la gorge. – Pourquoi ? – Je descends le long de l’eau ; et soudain, aprĂšs une courte promenade, je rentre dĂ©solĂ©, comme si quelque malheur m’attendait chez moi. – Pourquoi ? – Est-ce un frisson de froid qui, frĂŽlant ma peau, a Ă©branlĂ© mes nerfs et assombri mon Ăąme ? Est-ce la forme des nuages, ou la couleur du jour, la couleur des choses, si variable, qui, passant par mes yeux, a troublĂ© ma pensĂ©e ? Sait-on ? Tout ce qui nous entoure, tout ce que nous voyons sans le regarder, tout ce que nous frĂŽlons sans le connaĂźtre, tout ce que nous touchons sans le palper, tout ce que nous rencontrons sans le distinguer, a sur nous, sur nos organes et, par eux, sur nos idĂ©es, sur notre cƓur lui-mĂȘme, des effets rapides, surprenants et inexplicables ?
”
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Guy de Maupassant (Le Horla et autres contes fantastiques (Classiques hachette))
“
(...)ils ont des siĂšcles d'esclavage derriĂšre eux. (...) Je parle des blancs. Ça fait deux siĂšcles qu'ils sont esclaves des idĂ©es reçues, des prĂ©jugĂ©s sacro-saints pieusement transmis de pĂšre en fils, (...). J'essaie de me dominer pendant qu'on m'explique une fois de plus que "vous ne pouvez pas comprendre, vous n'avez pas dix-sept millions de Noirs en France". C'est vrai : mais nous avons cinquante millions de français, ce qui n'est pas jojo non plus.
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Romain Gary
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HĂ© quoi ? vous ne ferez nulle distinction Entre l'hypocrisie et la dĂ©votion? Vous les voulez traiter d'un semblable langage, Et rendre mĂȘme honneur au masque qu'au visage, Égaler l'artifice Ă  la sincĂ©ritĂ©, Confondre l'apparence avec la vĂ©ritĂ©, Estimer le fantĂŽme autant que la personne, Et la fausse monnaie Ă  l'Ă©gal de la bonne ? Les hommes la plupart sont Ă©trangement faits ! Dans la juste nature on ne les voit jamais ; La raison a pour eux des bornes trop petites ; En chaque caractĂšre ils passent ses limites ; Et la plus noble chose, ils la gĂątent souvent Pour la vouloir outrer et pousser trop avant.
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MoliĂšre (The Misanthrope)
“
C'est toi qui prĂ©pares en toi plus que toi, ton ultime essence. Ce qui sort de toi, ton ultime essence. Ce qui sort de toi, ce troublant Ă©moi, c'est ta danse. Chaque pĂ©tale consent et fait dans le vent quelques pas odorants invisibles. Ô musiques des yeux, toute entourĂ©e d'eux, tu deviens au milieu intangible.
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Rainer Maria Rilke (The Complete French Poems of Rainer Maria Rilke)
“
Craignez-vous pour vos vers la censure publique ? Soyez-vous Ă  vous-mĂȘme un sĂ©vĂšre critique. L’ignorance toujours est prĂȘte Ă  s’admirer. Faites-vous des amis prompts Ă  vous censurer ; Qu’ils soient de vos Ă©crits les confidents sincĂšres, Et de tous vos dĂ©fauts les zĂ©lĂ©s adversaires. DĂ©pouillez devant eux l’arrogance d’auteur, Mais sachez de l’ami discerner le flatteur : Tel vous semble applaudir, qui vous raille et vous joue. Aimez qu’on vous conseille, et non pas qu’on vous loue.
”
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Nicolas Boileau (L'Art Poétique)
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Ces derniÚres siÚcles, les Européens, ils sont allés un peu partout, ils ont fondé des commerces un peu partout, ils ont volé un peu partout, ils ont creusé un peu partout, ils ont construit un peu partout, ils se sont reproduits un peu partout, ils ont colonisé un peu partout, et maintenant, ils s'offusqueraient qu'on vienne chez eux ? Mais je n'en crois pas mes oreilles ! Leur territoire, les Européens, ils sont venus l'agrandir chez nous sans vergogne, non ? Ce sont eux qui ont commencé à déplacer les frontiÚres. Maintenant, c'est notre tour à nous, va falloir qu'ils s'habituent, parce qu'on va tous venir chez eux, les Africains, les Arabes, les Latinos, les Asiatiques. Moi, à la différence d'eux, je ne traverse pas la frontiÚre avec des armes, des soldats ou la noble mission de changer leur langue, leurs lois, leur religion.
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Éric-Emmanuel Schmitt
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« On ne raconte pas aux enfants ce qui s'est passé avant eux. d'abord ils sont trop petits pour comprendre, ensuite ils sont trop grands pour écouter, puis ils n'ont plus le temps, aprÚs c'est trop tard. C'et le propre de la vie de famille. On vit cÎte à cÎte comme si on se connaissait mais on ignore tout les uns des autres. On espÚre des miracles de notre consanguinité : des harmonies impossibles, des confidences absolues, des fusions viscérales. On se contente du mensonge rassurant de notre parenté. »
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Jean-Michel Guenassia
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Accepter que tel ou tel ĂȘtre, que nous aimions, soit mort. Accepter que tel et tel, vivants, aient eu leurs faiblesses, leurs bassesses, leurs erreurs, que nous essayons vainement de recourvrir de pieux mensonges, un peu par respect et par pitiĂ© pour eux, beaucoup par pitiĂ© pour nous-mĂȘmes, et pour la vaine gloire d’avoir aimĂ© seulement la perfection, l’intelligence ou la beautĂ©. Accepter qu’ils soient morts avant leur temps, parce qu’il n’y a pas de temps. Accepter de les oublier, puisque l’oubli fait partie de l’ordre des choses. Accepter de s’en souvenir, puisqu’en secret la mĂ©moire se cĂąche au fond de l’oubli. Accepter mĂȘme, mais en se promettant de faire mieux la prochaine fois, et Ă  la prochaine rencontre, de les avoir maladroitement ou mĂ©diocrement aimĂ©s.
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Marguerite Yourcenar (Pellegrina e straniera)
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- Chers amis, s'exclama-t-il en descendant vers eux. GoĂ»tez vous notre hospitalitĂ© ? J'ose espĂ©rer que oui. N'hĂ©sitez surtout pas Ă  me faire appeler si vous avez le moindre dĂ©sir, la moindre envie... - J'aimerais rentrer chez moi, lui lança Ellana. - Ah! L'humour alavarien ! Quelle merveilleuse chose ! À ValingaĂŻ, nous manquons cruellement d'humour, c'est peut-ĂȘtre notre plus gros dĂ©faut.
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Pierre Bottero (Les Tentacules du mal (Les Mondes d'Ewilan, #3))
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De nos jours, rien n'est plus mensonger que cette étiquette "pro-vie" dont s'affublent les militants antiavortements : un grand nombre d'entre eux sont aussi favorables à la peine de mort ou, aux Etats-Unis, à la libre circulation des armes (plus de quinze mille morts en 2017), et on ne le voit pas militer avec tant d'ardeur contre les guerres ni contre la pollution, dont on estime qu'elle a été responsable d'une mort sur six dans le monde en 2015. La vie ne les passionne que lorsqu'il s'agit de pourrir celles des femmes. Le natalisme est affaire de pouvoir, et non d'amour de l'humanité.
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Mona Chollet (SorciÚres : La puissance invaincue des femmes)
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Combien de gens exercent-ils le travail de leur choix ? Certains scientifiques, artistes, quelques travailleurs trĂšs qualifiĂ©s ou certaines professions libĂ©rales ont peut-ĂȘtre cette satisfaction, mais la plupart des gens ne sont pas libres de choisir leur activitĂ©. C'est la nĂ©cessitĂ© Ă©conomique qui les y oblige. C'est pourquoi on peut parler de "travail aliĂ©nĂ©". En outre, la plupart des travailleurs produisent des biens et des services destinĂ©s Ă  devenir des marchandises qu'ils n'ont pas eux-mĂȘmes choisi de produire et qui appartiennent Ă  un autre : le capitaliste qui les emploie. Les travailleurs sont donc, en outre, parfaitement Ă©trangers au produit de leur labeur. Le travail s'effectue dans des conditions industrielles modernes qui privilĂ©gient la concurrence plutĂŽt que la collaboration et l'isolement plutĂŽt que l'association. Les travailleurs sont donc Ă©galement Ă©trangers les uns aux autres. ConcentrĂ©s dans les villes et les usines, ils sont pour finir Ă©trangers Ă  la nature.
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Howard Zinn (Disobedience and Democracy: Nine Fallacies on Law and Order (Radical 60s))
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- Vous ĂȘtes plus pessimiste qu'autrefois ? - Pessimisme et optimisme, encore deux mots que je rĂ©cuse. Il s'agit d'avoir les yeux ouverts. Le mĂ©decin qui analyse le sang et les selles d'un malade, mesure sa fiĂšvre et prend sa tension, n'est ni optimiste ni pessimiste : il fait de son mieux Ă  partir de ce qui est. Mais, si l'on peut employer ce misĂ©rable mot, je me sens pessimiste quand je constate combien la masse humaine a peu changĂ© depuis des millĂ©naires. Les plus grands rĂ©formateurs se sont gĂ©nĂ©ralement heurtĂ©s Ă  cette quasi-impossibilitĂ© de changer l'homme, et leur leçon s'est gĂ©nĂ©ralement perdue aprĂšs eux. (p.240)
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Marguerite Yourcenar (Les Yeux ouverts : Entretiens avec Matthieu Galey)
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Don Juan : [...] Les voilĂ , mes spectres, les spectres de ce que je ne suis pas. Ce sont eux qui me persĂ©cutent et m'Ă©coeurent, et qui me survivront. Ils vivront, car il sont le mensonge. Mais si je dois payer ma vie au prix de toutes les sottises et de tous les mensonges qu'on aura dits sur moi, peut-ĂȘtre vaudrait-il mieux n'avoir pas vĂ©cu. Je vais changer d'habit et mettre mon beau costume. Il faut ĂȘtre bien vĂȘtu quand on va ĂȘtre arrĂȘtĂ©.
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Henry de Montherlant (La Mort qui fait le trottoir [Don Juan])
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Lorsque j’ai commencĂ© Ă  voyager en Gwendalavir aux cĂŽtĂ©s d'EwĂŹlan et de Salim, je savais que, au fil de mon Ă©criture, ma route croiserait celle d'une multitude de personnages. Personnages attachants ou irritants, discrets ou hauts en couleurs, pertinents ou impertinents, sympathiques ou malĂ©fiques... Je savais cela et je m'en rĂ©jouissais. Rien, en revanche, ne m'avait prĂ©parĂ© Ă  une rencontre qui allait bouleverser ma vie. Rien ne m'avait prĂ©parĂ© Ă  Ellana. Elle est arrivĂ©e dans la QuĂȘte Ă  sa maniĂšre, tout en finesse tonitruante, en dĂ©licatesse remarquable, en discrĂ©tion Ă©tincelante. Elle est arrivĂ©e Ă  un moment clef, elle qui se moque des serrures, Ă  un moment charniĂšre, elle qui se rit des portes, au sein d’un groupe constituĂ©, elle pourtant pĂ©trie d’indĂ©pendance, son caractĂšre forgĂ© au feu de la solitude. Elle est arrivĂ©e, s'est glissĂ©e dans la confiance d'Ewilan avec l'aisance d'un songe, a captĂ© le regard d’Edwin et son respect, a sĂ©duit Salim, conquis maĂźtre Duom... Je l’ai regardĂ©e agir, admiratif ; sans me douter un instant de la toile que sa prĂ©sence, son charisme, sa beautĂ© tissaient autour de moi. Aucun calcul de sa part. Ellana vit, elle ne calcule pas. Elle s'est contentĂ©e d'ĂȘtre et, ce faisant, elle a tranquillement troquĂ© son statut de personnage secondaire pour celui de figure emblĂ©matique d'une double trilogie qui ne portait pourtant pas son nom. Convaincue du pouvoir de l'ombre, elle n'a pas cherchĂ© la lumiĂšre, a Ă©paulĂ© Ewilan dans sa quĂȘte d'identitĂ© puis dans sa recherche d'une parade au danger qui menaçait l'Empire. Sans elle, Ewilan n'aurait pas retrouvĂ© ses parents, sans elle, l'Empire aurait succombĂ© Ă  la soif de pouvoir des Valinguites, mais elle n’en a tirĂ© aucune gloire, trop Ă©quilibrĂ©e pour ignorer que la victoire s'appuyait sur les Ă©paules d'un groupe de compagnons soudĂ©s par une indĂ©fectible amitiĂ©. Lorsque j'ai posĂ© le dernier mot du dernier tome de la saga d'Ewilan, je pensais que chacun de ses compagnons avait mĂ©ritĂ© le repos. Que chacun d'eux allait suivre son chemin, chercher son bonheur, vivre sa vie de personnage libĂ©rĂ© par l'auteur aprĂšs une Ă©prouvante aventure littĂ©raire. Chacun ? Pas Ellana. Impossible de la quitter. Elle hante mes rĂȘves, se promĂšne dans mon quotidien, fluide et insaisissable, transforme ma vision des choses et ma perception des autres, crochĂšte mes pensĂ©es intimes, escalade mes dĂ©sirs secrets... Un auteur peut-il tomber amoureux de l'un de ses personnages ? Est-ce moi qui ai crĂ©Ă© Ellana ou n'ai-je vraiment commencĂ© Ă  exister que le jour oĂč elle est apparue ? Nos routes sont-elles liĂ©es Ă  jamais ? — Il y a deux rĂ©ponses Ă  ces questions, souffle le vent Ă  mon oreille. Comme Ă  toutes les questions. Celle du savant et celle du poĂšte. — Celle du savant ? Celle du poĂšte ? Qu'est-ce que... — Chut... Écris.
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Pierre Bottero (Ellana (Le Pacte des MarchOmbres, #1))
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Il admirait le curieux aveuglement par quoi les hommes, si renseignĂ©s pourtant sur ce qui change en eux, imposent Ă  leurs amis l'image qu'une fois pour toutes ils se sont faite d'eux. Pour lui, on le jugeait selon ce qu'il avait Ă©tĂ©. Comme un chien ne change pas de caractĂšre, les hommes sont des chiens pour l'homme. Et dans la mesure mĂȘme oĂč CĂ©leste, RenĂ© et les autres l'avaient beaucoup connu, il leur devenait aussi Ă©tranger et aussi fermĂ© qu'une planĂšte inhabitĂ©e.
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Albert Camus (A Happy Death)
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Un guerrier ThĂŒl sortit du rang. Il leva les bras Ă  la hauteur de son visage et, avec force, claqua ses mains l'une contre l'autre. Comme un Frontalier. Un Frontalier s'avança Ă  son tour. Il dĂ©gaina son sabre et, se calquant sur le rythme du ThĂŒl, en abattit le pommeau sur son fourreau. Comme un homme de la LĂ©gion Noire. Un LĂ©gionnaire s'approcha d'eux en boitant, se campa fiĂšrement Ă  leurs cĂŽtĂ©s et, de son poing fermĂ©, frappa sa poitrine de vargelite. Comme un ThĂŒl.
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Pierre Bottero (Ellana, la Prophétie (Le Pacte des MarchOmbres, #3))
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Vient un moment de la vie - mais lequel ? Il diffĂšre pour chacun, trĂšs tĂŽt pour les uns, trĂšs tard pour les autres, parfois jamais pour de rares Ă©lus comblĂ©s, mourant les mains, la mĂ©moire et le cƓur pleins -, vient donc un moment de la vie oĂč nous nous apercevons que les amitiĂ©s, les amours, les sentiments et jusqu'aux lieux et aux mots que nous croyons perdre par une maladresse dĂ©primante, en rĂ©alitĂ© nous quittent d'eux mĂȘmes, animĂ©s d'une sournoise volontĂ© de fuite.
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Michel DĂ©on
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Tu ne peux pas comprendre. Qu'importe ? Je sortirai peut-ĂȘtre de lĂ . Mais je sens monter en moi des ĂȘtres sans nom. Que ferais-je contre eux ? (Il se retourne vers elle.) Oh ! Caesonia, je savais qu'on pouvait ĂȘtre dĂ©sespĂšre, mais j'ignorais ce que ce mot voulait dire. Je croyais comme tout le monde que c'Ă©tait une maladie de l'Ăąme. Mais non, c'est le corps qui souffre. Ma peau me fait mal, ma poitrine, mes membres. J'ai la tĂȘte creuse et le coeur soulevĂ©. Et le plus affreux, c'est ce goĂ»t dans la bouche. Ni sang, ni mort, ni fiĂšvre, mais tout cela Ă  la fois. Il suffit que je remue la langue pour que tout redevienne noir et que les ĂȘtres me rĂ©pu-gnent. Qu'il est dur, qu'il est amer de devenir un homme!
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Albert Camus (Caligula)
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Et par contre, si je communique Ă  mes hommes l’amour de la marche sur la mer, et que chacun d’eux soit ainsi en pente Ă  cause d’un poids dans le cƓur, alors tu les verras bientĂŽt se diversifier selon leurs mille qualitĂ©s particuliĂšres. Celui-lĂ  tissera des toiles, l’autre dans la forĂȘt par l’éclair de sa hache couchera l’arbre. L’autre, encore, forgera des clous, et il en sera quelque part qui observeront les Ă©toiles afin d’apprendre Ă  gouverner. Et tous cependant ne seront qu’un. CrĂ©er le navire ce n’est point tisser les toiles, forger les clous, lire les astres, mais bien donner le goĂ»t de la mer qui est un, et Ă  la lumiĂšre duquel il n’est plus rien qui soit contradictoire mais communautĂ© dans l’amour.
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Antoine de Saint-Exupéry (Citadelle)
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La guerre est la soumission la plus difficile de la libertĂ© de l'homme aux lois de Dieu. La simplicitĂ© est la soumission Ă  Dieu. On n'Ă©chappe pas Ă  lui. Et EUX ils ne parlent pas, ils agissent. La parole prononcĂ©e est d'argent, celle qui n'est pas prononcĂ©e est d'or. L'homme n'a pouvoir sur rien tant qu'il a peur de la mort. Et celui qui n'a pas peur de la mort possĂšde tout. Si la souffrance n'existait pas, l'homme ne se connaĂźtrait pas de limites, il ne se connaĂźtrait pas lui-mĂȘme. (Guerre et Paix, livre troisiĂšme, 3Ăšme partie, ch. IX)
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Leo Tolstoy
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Avez-vous remarquĂ© que la mort seule rĂ©veille nos sentiments? Comme nous aimons les amis qui viennent de nous quitter, n’est-ce pas? Comme nous admirons ceux de nos maĂźtres qui ne parlent plus, la bouche pleine de terre! L’hommage vient alors tout naturellement, cet hommage que, peut-ĂȘtre, ils avaient attendu de nous toute leur vie. Mais savez-vous pourquoi nous sommes toujours plus justes et plus gĂ©nĂ©reux avec les morts? La raison est simple ! Avec eux, il n’y a pas d’obligation. Ils nous laissent libres, nous pouvons prendre notre temps, caser l’hommage entre le cocktail et une gentille maĂźtresse, Ă  temps perdu, en somme. S’ils nous obligeaient Ă  quelque chose, ce serait Ă  la mĂ©moire, et nous avons la mĂ©moire courte. Non, c’est le mort frais que nous aimons chez nos amis, le mort douloureux, notre Ă©motion, nous-mĂȘmes enfin!
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Albert Camus (The Fall)
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En dĂ©pit de toutes les profondes diffĂ©rences de leurs natures, tous deux avaient beaucoup appris l'un de l'autre; entre eux, Ă  cĂŽtĂ© de la langue de la raison, il s'Ă©tait peu Ă  peu formĂ© un parler de l'Ăąme, un langage de signes, de mĂȘme que, entre deux agglomĂ©rations, il y a bien une route sur laquelle circulent les voitures et les cavaliers, mais Ă  cĂŽtĂ© se tracent beaucoup de petites sentes, de chemins de traverse, de sentiers dĂ©tournĂ©s; chemins pour les enfants, sentiers pour les amoureux, sentes Ă  peine visibles pour les chiens et les chats. (p. 49-50)
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Hermann Hesse (Narcissus and Goldmund)
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Si il y avait bien une chose que l'Occupation nous avait apprise, c'Ă©tait Ă  nous taire. A ne jamais montrer ce que nous pensions du IIIĂšme Reich et de cette guerre. Nous n'Ă©tions que des dĂ©tenus dans nos propres maisons, dans notre pays. Plus libres d'avoir une opinion. Parce que mĂȘme nos pensĂ©es pouvaient nous enchaĂźner. Ce soir, je l'avais oubliĂ©. Pourtant il ne m'arrĂȘta pas. Il ne me demanda pas de le suivre pour un petit interrogatoire. AprĂšs tout, il n'y avait que les rĂ©sistants pour tenir un discours si tranchĂ©, non? Il n'y avait qu'eux pour oser dire de telles choses devant un caporal de la Wehrmacht. Alors pourquoi me tendit-il simplement sa fourche? Puisque la mienne Ă©tait inutilisable... J'hĂ©sitai Ă  la prendre. Quand je le fis, il refusa de la lĂącher. Nous restĂąmes lĂ , une seconde. Nos mains se frĂŽlant sur le manche en bois et nos regards accrochĂ©s. - Je ne suis pas innocent c'est vrai, m'avoua-t-il. Je ne le serai jamais plus et je devrai vivre avec toutes mes fautes. J'ai tuĂ©, je tuerai sans doute encore. J'ai blessĂ© et je blesserai encore. J'ai menti et je mentirai encore. Non, c'est vrai, il n'y a plus rien d'innocent en moi. Mais je l'ai Ă©tĂ©. Au dĂ©but. Avant la guerre. Je l'Ă©tais vraiment, vous savez. Innocent. Sa voix n'Ă©tait qu'un murmure. - Pourquoi me dites-vous ça? - Pour que vous le sachiez. - Mais pourquoi? demandai-je encore. Il recula d'un pas. - Bonne soirĂ©e, monsieur Lambert, dit-il sans me rĂ©pondre. Il quitta les Ă©curies sans un bruit. Aussi discrĂštement qu'il Ă©tait arrivĂ©.
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Lily Haime (À l'ombre de nos secrets)
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Et sans doute une guerre est certainement trop bête, mais cela ne l’empêche pas de durer. La bêtise insiste toujours, on s’en apercevrait si l’on ne pensait pas toujours à soi. Nos concitoyens à cet égard étaient comme tout le monde, ils pensaient à eux-mêmes, autrement dit ils étaient humanistes : ils ne croyaient pas aux fléaux. Le fléau n’est pas à la mesure de l’homme, on se dit donc que le fléau est irréel, c’est un mauvais rêve qui va passer. Mais il ne passe pas toujours et, de mauvais rêve en mauvais rêve, ce sont les hommes qui passent, et les humanistes en premier lieu, parce qu’ils n’ont pas pris leurs précautions.
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Albert Camus (The Plague)
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Les cinq degrés de l'amour****** Les Sufis sont les grands maßtres de l'art d'aimer de la civilisation musulmane. Selon Ad-Daylami, l'amour est une fulgurante source de lumiÚre et " celui qui aime est éclairé dans son génie et illuminé dans sa nature". Cependant, tot amour n'est pas équivalent: " L'amour dont s'aiment entre eux les humains est de cinq espÚces pour cinq catégories différentes [ d'hommes]: - Un amour divin pour ceux qui sont parvenus à l'unité. - Un amour intellectuel pour ceux qui possÚdent la connaissance. - Un amour spirituel pour l'élite des hommes. - Un amour naturel pour la masse des humains. - Un amour bestial pour les natures abjectes".
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Fatema Mernissi (L'Amour dans les pays musulmans : A travers le miroir des textes anciens)
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Dans les Ă©paisseurs de la nuit sĂšche et froide, des milliers d'Ă©toiles se formaient sans trĂȘve et leurs glaçons Ă©tincelants, aussitĂŽt dĂ©tachĂ©s, commençaient de glisser insensiblement vers l'horizon. Janine ne pouvait s'arracher Ă  la contemplation de ces feux Ă  la dĂ©rive. Elle tournait avec eux et le mĂȘme cheminement immobile la rĂ©unissait peu Ă  peu Ă  son ĂȘtre le plus profond, oĂč le froid et le dĂ©sir maintenant se combattaient. Devant elle, les Ă©toiles tombaient, une Ă  une, puis s'Ă©teignaient parmi les pierres du dĂ©sert, et Ă  chaque fois Janine s'ouvrait un peu plus Ă  la nuit. Elle respirait, elle oubliait le froid, le poids des ĂȘtres, la vie dĂ©mente ou figĂ©e, la longue angoisse de vivre et de mourir.
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Albert Camus (Exile and the Kingdom)
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«Je m’appelle Paloma, j’ai douze ans, j’habite au 7 rue de Grenelle dans un appartement de riches. Mais malgrĂ© toute cette chance et toute cette richesse, depuis trĂšs longtemps, je sais que la destination finale, c’est le bocal Ă  poissons; la vacuitĂ© et l’ineptie de l’existence. Comment est-ce que je le sais ? Il se trouve que je suis trĂšs intelligente. Exceptionnellement intelligente, mĂȘme. MĂȘme si on compare avec les adultes, je suis beaucoup plus maligne que la plupart d’entre eux. C’est comme ça. Je n’en suis pas spĂ©cialement fiĂšre parce que je n’y suis pour rien. Mais ce qui est certain, c’est que dans le bocal, je n’irais pas. C’est une dĂ©cision bien rĂ©flĂ©chie. MĂȘme pour une personne aussi intelligente que moi, aussi douĂ©e pour les Ă©tudes, aussi diffĂ©rente des autres et aussi supĂ©rieure Ă  la plupart, la vie est dĂ©jĂ  toute tracĂ©e et c’est triste Ă  pleurer : personne ne semble avoir songĂ© au fait que si l’existence est absurde, y rĂ©ussir brillamment n’a pas plus de valeur qu’y Ă©chouer. C’est seulement plus confortable. Et encore : je crois que la luciditĂ© rend le succĂšs amer alors que la mĂ©diocritĂ© espĂšre toujours quelque chose.»
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Muriel Barbery (The Elegance of the Hedgehog)
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Qu'est-ce que le roman, en effet, sinon cet univers oĂč l'action trouve sa forme, oĂč les mots de la fin sont prononcĂ©s, les ĂȘtres livrĂ©s aux ĂȘtres, oĂč toute vie prend le visage du destin. Le monde romanesque n'est que la correction de ce monde-ci, suivant le dĂ©sir profond de l'homme. Car il s'agit bien du mĂȘme monde. La souffrance est la mĂȘme, le mensonge et l'amour. Les hĂ©ros ont notre langage, nos faiblesses, nos forces. Leur univers n'est ni plus beau ni plus Ă©difiant que le nĂŽtre. Mais eux, du moins, courent jusqu'au bout de leur destin, et il n'est mĂȘme jamais de si bouleversants hĂ©ros que ceux qui vont jusqu'Ă  l'extrĂ©mitĂ© de leur passion.[...] Voici donc un monde imaginaire, mais crĂ©Ă© par la correction de celui-ci, un monde oĂč la douleur peut, si elle le veut, durer jusqu'Ă  la mort, oĂč les passions ne sont jamais distraites, oĂč les ĂȘtres sont livrĂ©s Ă  l'idĂ©e fixe et toujours prĂ©sents les uns aux autres. L'homme s'y donne enfin Ă  lui-mĂȘme la forme et la limite apaisante qu'il poursuit en vain dans sa condition. Le roman fabrique du destin sur mesure. C'est ainsi qu'il concurrence la crĂ©ation et qu'il triomphe, provisoirement, de la mort.
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Albert Camus (The Rebel)
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Je dĂ©couvris qu'en bluffant les psychiatres on pouvait tirer des trĂ©sors inĂ©puisables de divertissement gratifiants: vous les menez habilement en bateau, leur cachez soigneusement que vous connaissez toutes les ficelles du mĂ©tier; vous inventez Ă  leur intention des rĂȘves Ă©laborĂ©s, de purs classiques du genre qui provoquent chez eux, ces extorqueurs de rĂȘves, de tels cauchemars qu'ils se rĂ©veillent en hurlant; vous les affriolez avec des "scĂšnes primitives" apocryphes; le tout sans jamais leur permettre d'entrevoir si peu que ce soit le vĂ©ritable Ă©tat de votre sexualitĂ©. En soudoyant une infirmiĂšre, j'eus accĂšs Ă  quelques dossiers et dĂ©couvris, avec jubilation, des fiches me qualifiant d' "homosexuel en puissance" et d' "impuissant invĂ©tĂ©rĂ©". Ce sport Ă©tait si merveilleux, et ses rĂ©sultats - dans mon cas - si mirifiques, que je restai un bon mois supplĂ©mentaire aprĂšs ma guĂ©rison complĂšte (dormant admirablement et mangeant comme une Ă©coliĂšre). Puis j'ajoutai encore une semaine rien que pour le plaisir de me mesurer Ă  un nouveau venu redoutable, une cĂ©lĂ©britĂ© dĂ©placĂ©e (et manifestement Ă©garĂ©e) comme pour son habiletĂ© Ă  persuader ses patients qu'ils avaient Ă©tĂ© tĂ©moins de leur propre conception.
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Vladimir Nabokov (Lolita)
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Eh bien, c'est l'histoire d'un petit ourson qui s'appelle
 Arthur. Et y'a une fĂ©e, un jour, qui vient voir le petit ourson et qui lui dit : Arthur tu vas partir Ă  la recherche du Vase Magique. Et elle lui donne une Ă©pĂ©e hmm
 magique (ouais, parce qu'y a plein de trucs magiques dans l'histoire, bref) alors le petit ourson il se dit : "Heu, chercher le Vase Magique ça doit ĂȘtre drĂŽlement difficile, alors il faut que je parte dans la forĂȘt pour trouver des amis pour m'aider." Alors il va voir son ami Lancelot
 le cerf (parce que le cerf c'est majestueux comme ça), heu, Bohort le faisan et puis LĂ©odagan
 heu
 l'ours, ouais c'est un ours aussi, c'est pas tout Ă  fait le mĂȘme ours mais bon. Donc LĂ©odagan qui est le pĂšre de la femme du petit ourson, qui s'appelle GueniĂšvre la truite
 non, non, parce que c'est la fille de
 non c'est un ours aussi puisque c'est la fille de l'autre ours, non parce qu'aprĂšs ça fait des machins mixtes, en fait un ours et une truite
 non en fait ça va pas. Bref, sinon y'a Gauvain le neveu du petit ourson qui est le fils de sa sƓur Anna, qui est restĂ©e Ă  Tintagel avec sa mĂšre Igerne la
 bah non, ouais du coup je suis obligĂ© de foutre des ours de partout sinon on pige plus rien dans la famille
 Donc c'est des ours, en gros, enfin bref
 Ils sont tous lĂ  et donc Petit Ourson il part avec sa troupe Ă  la recherche du Vase Magique. Mais il le trouve pas, il le trouve pas parce qu'en fait pour la plupart d'entre eux c'est
 c'est des nazes : ils sont hyper mous, ils sont bĂȘtes, en plus y'en a qu'ont la trouille. Donc il dĂ©cide de les faire bruler dans une grange pour s'en dĂ©barrasser
 Donc la fĂ©e revient pour lui dire : "Attention petit ourson, il faut ĂȘtre gentil avec ses amis de la forĂȘt" quand mĂȘme c'est vrai, et du coup Petit Ourson il lui met un taquet dans la tĂȘte Ă  la fĂ©e, comme ça : "BAH !". Alors la fĂ©e elle est comme ça et elle s'en va
 et voilĂ  et en fait il trouve pas le vase. En fait il est
 il trouve pas
 et Petit Ourson il fait de la dĂ©pression et tous les jours il se demande s'il va se tuer ou
 pas

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Alexandre Astier (Kaamelott, livre 3, premiùre partie : Épisodes 1 à 50)
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Mais quelle Ă©trange leçon de gĂ©ographie je reçus lĂ ! Guillaumet ne m'enseignait pas l'Espagne; il me faisait de l'Espagne une amie. Il ne me parlait ni d'hydrographie, nie de populations, ni de cheptel. Il ne me parlait pas de Guadix, mais des trois orangers qui, prĂšs de Guadix, bordent un champ : " MĂ©fie-toi d'eux, marque-les sur ta carte... " Et les trois orangers y tenaient dĂ©sormais plus de place que la Sierra Nevada. Il ne me parlait pas de Lorca, mais d'une simple ferme prĂšs de Lorca. D'une ferme vivante. Et de son fermier. Et de sa fermiĂšre. Et ce couple prenait, perdu dans l'espace, Ă  quinze cents kilomĂštres de nous, une importance dĂ©mesurĂ©e. Bien installĂ©s sur le versant de leur montagne, pareils Ă  des gardiens de phare, ils Ă©taient prĂȘts, sous leur Ă©toiles, Ă  porter secours Ă  des hommes. (Terre des Hommes, ch. I)
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Antoine de Saint-Exupéry
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Elle se mordit la langue quand Thorn pressa sa bouche contre la sienne. Sur le moment, elle ne comprit plus rien. Elle sentit sa barbe lui piquer le menton, son odeur de dĂ©sinfectant lui monter Ă  la tĂȘte, mais la seule pensĂ©e qui la traversa, stupide et Ă©vidente, fut quenelle avait une botte plantĂ©e dans son tibia. Elle voulut se reculer; Thorn l’en empĂȘcha. Il referma ses mains de part et d’autre de son visage, les doigts dans ses cheveux, prenant appui sur sa nuque avec une urgence qui les dĂ©sĂ©quilibra tous les deux. La bibliothĂšque dĂ©versa une pluie de documents sur eux. Quand Thorn s’écarte finalement, le souffle court, ce fut pour clouer un regard de fer dans ses lunettes. - je vous prĂ©viens. Les mots que vous m’avez dits, je ne vous laisserai pas revenir dessus. Sa voix Ă©tait Ăąpre, mais sous l’autoritĂ© des paroles il y avait comme une fĂȘlure. OphĂ©lie pouvait percevoir le pouls prĂ©cipitĂ© des mains qu’il appuyait maladroitement sur ses joues. Elle devait reconnaĂźtre que son propre cƓur jouait Ă  la balançoire. Thorn Ă©tait sans doute l’homme le plus dĂ©concertant qu’elle avait jamais rencontrĂ©, mais il l’a faisait se sentir formidablement vivante. - je vous aime, rĂ©pĂ©ta-y-elle d’un ton inflexible. C’est ce que j’aurais du vous rĂ©pondre quand vous vouliez connaĂźtre la raison de ma prĂ©sence Ă  Babel c’est ce que j’en aurais du vous rĂ©pondre chaque fois que vous vouliez savoir ce que j’en avais vraiment Ă  vous dire. Bien sĂ»r que je dĂ©sire percer les mystĂšres de Dieu et reprendre le contrĂŽle de ma vie, mais... vous faites partie de ma vie, justement. Je vous ai traitĂ© d’égoĂŻste et Ă  aucun moment je ne me suis mise, moi, Ă  votre place. Je vous demande pardon. 
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Dabos Christelle
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Je peux exĂ©crer ce shah, mais ce n'est pas contre lui que je me bats. Triompher d'un despote ne peut ĂȘtre le but ultime, je me bats pour que les Persans aient conscience d'ĂȘtre des hommes libres, des fils d'Adam, comme nous disons ici, qu'ils aient foi en eux-mĂȘmes, en leur force, qu'ils retrouvent une place dans le monde d'aujourd'hui. C'est ce que j'ai voulu rĂ©ussir ici. Cette ville a rejetĂ© la tutelle du monarque et des chefs religieux, elle a dĂ©fiĂ© les Puissances, partout elle a suscitĂ© la solidaritĂ© et l'admiration des hommes de coeur. Les gens de Tabriz Ă©taient sur le point de gagner, mais on ne veut pas les laisser gagner, on a trop peur de leur exemple, on veut les humilier, cette population fiĂšre devra se prosterner devant les soldats du tsar pour obtenir son pain. Toi qui es nĂ© libre dans un pays libre, tu devrais comprendre.
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Amin Maalouf (Samarkand)
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Une trĂšs jolie jeune fille, traitĂ©e avec des Ă©gards constants et des attentions dĂ©mesurĂ©es par l'ensemble de la population masculine, y compris par ceux - l'immense majoritĂ© - qui n'ont plus aucun espoir d'en obtenir une faveur d'ordre sexuel, et mĂȘme Ă  vrai dire tout particuliĂšrement par eux, avec une Ă©mulation abjecte confinant chez certains quinquagĂ©naires au gĂątisme pur et simple, une trĂšs jolie jeune fille devant qui tous les visages s'ouvrent, toutes les difficultĂ©s s'aplanissent, accueillie partout comme si elle Ă©tait la reine du monde, devient naturellement une espĂšce de monstre d'Ă©goĂŻsme et de vanitĂ© autosatisfaite. La beautĂ© physique joue ici exactement Ie mĂȘme rĂŽle que la noblesse de sang sous l'Ancien RĂ©gime, et la brĂšve conscience qu'elles pourraient prendre Ă  l'adolescence de l'origine purement accidentelle de leur rang cĂšde rapidement la place chez la plupart des trĂšs jolies jeunes filles Ă  une sensation de supĂ©rioritĂ© innĂ©e, naturelle, instinctive, qui les place entiĂšrement en dehors, et largement au-dessus du reste de l'humanitĂ©. Chacun autour d'elle n'ayant pour objectif que de lui Ă©viter toute peine, et de prĂ©venir Ie moindre de ses dĂ©sirs, c'est tout uniment (sic) qu'une trĂšs jolie jeune fille en vient Ă  considĂ©rer Ie reste du monde comme composĂ© d'autant de serviteurs, elle-mĂȘme n'ayant pour seule tĂąche que d'entretenir sa propre valeur Ă©rotique - dans l'attente de rencontrer un garçon digne d'en recevoir l'hommage. La seule chose qui puisse la sauver sur le plan moral, c'est d'avoir la responsabilitĂ© concrĂšte d'un ĂȘtre plus faible, d'ĂȘtre directement et personnellement responsable de la satisfaction de ses besoins physiques, de sa santĂ©, de sa survie - cet ĂȘtre pouvant ĂȘtre un frĂšre ou une soeur plus jeune, un animal domestique, peu importe. (La possibilitĂ© d'une Ăźle, Daniel 1,15)
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Michel Houellebecq
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« Il faut dire qu’un sĂ©jour continuel dans un État bien organisĂ© a quelque chose d’absolument fantĂŽmal ; on ne peut sortir dans la rue, boire un verre d’eau ou monter dans le tram sans toucher aux leviers subtilement Ă©quilibrĂ©s d’un gigantesque appareil de lois et de relations, les mettre en branle ou se faire maintenir par eux dans la tranquillitĂ© de son existence ; on n’en connaĂźt qu’un trĂšs petit nombre, ceux qui pĂ©nĂštrent profondĂ©ment dans l’intĂ©rieur et se perdent Ă  l’autre bout dans un rĂ©seau dont aucun homme, jamais, n’a dĂ©brouillĂ© l’ensemble ; c’est d’ailleurs pourquoi on le nie, comme le citadin nie l’air, affirmant qu’il n’est que du vide ; mais il semble que ce soit justement parce que tout ce que l’on nie, tout ce qui est incolore, inodore, insipide, sans poids et sans moeurs, comme l’eau, l’air, l’espace, l’argent et la fuite du temps, est en rĂ©alitĂ© l’essentiel que la vie prend ce caractĂšre spectral. »
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Robert Musil (The Man Without Qualities)
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O dieses ist das Tier, das es nicht giebt. Sie wußtens nicht und habens jeden Falls – sein Wandeln, seine Haltung, seinen Hals, bis in des stillen Blickes Licht – geliebt. Zwar war es nicht. Doch weil sie’s liebten, ward ein reines Tier. Sie ließen immer Raum. Und in dem Raume, klar und ausgespart, erhob es leicht sein Haupt und brauchte kaum zu sein È questo l’animale favoloso, che non esiste. Non veduto mai, ne amaron le movenze, il collo, il passo: fino la luce dello sguardo calmo. Pure “non era”. Ma perchĂš lo amarono, divenne. Intatto. Gli lasciavan sempre piĂč spazio. E in quello spazio chiaro, etereo: serbato a lui – levĂČ, leggiero, il capo. And here we have the creature that is not. But they did not allow this , and as it happens - his gait and bearing, his arched neck, even the light in his eyes - they loved it all. Yet truly he was not. But because they loved him the beast was seen. And always they made room. And in that space, empty and unbounded, he raised an elegant head, yet hardly fought for his existence. Oh ! C'est elle, la bĂȘte qui n'existe pas. Eux, ils n'en savaient rien, et de toutes façons - son allure et son port, son col et mĂȘme la lumiĂšre calme de son regard - ils l'ont aimĂ©e. Elle, c'est vrai, n'existait point. Mais parce qu'ils l'aimaient bĂȘte pure, elle fut. Toujours ils lui laissaient l'espace. Et dans ce clair espace Ă©pargnĂ©, doucement, Elle leva la tĂȘte, ayant Ă  peine besoin d'ĂȘtre.
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Rainer Maria Rilke
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Tu viens d'incendier la BibliothĂšque ? - Oui. J'ai mis le feu lĂ . - Mais c'est un crime inouĂŻ ! Crime commis par toi contre toi-mĂȘme, infĂąme ! Mais tu viens de tuer le rayon de ton Ăąme ! C'est ton propre flambeau que tu viens de souffler ! Ce que ta rage impie et folle ose brĂ»ler, C'est ton bien, ton trĂ©sor, ta dot, ton hĂ©ritage Le livre, hostile au maĂźtre, est Ă  ton avantage. Le livre a toujours pris fait et cause pour toi. Une bibliothĂšque est un acte de foi Des gĂ©nĂ©rations tĂ©nĂ©breuses encore Qui rendent dans la nuit tĂ©moignage Ă  l'aurore. Quoi! dans ce vĂ©nĂ©rable amas des vĂ©ritĂ©s, Dans ces chefs-d'oeuvre pleins de foudre et de clartĂ©s, Dans ce tombeau des temps devenu rĂ©pertoire, Dans les siĂšcles, dans l'homme antique, dans l'histoire, Dans le passĂ©, leçon qu'Ă©pelle l'avenir, Dans ce qui commença pour ne jamais finir, Dans les poĂštes! quoi, dans ce gouffre des bibles, Dans le divin monceau des Eschyles terribles, Des HomĂšres, des jobs, debout sur l'horizon, Dans MoliĂšre, Voltaire et Kant, dans la raison, Tu jettes, misĂ©rable, une torche enflammĂ©e ! De tout l'esprit humain tu fais de la fumĂ©e ! As-tu donc oubliĂ© que ton libĂ©rateur, C'est le livre ? Le livre est lĂ  sur la hauteur; Il luit; parce qu'il brille et qu'il les illumine, Il dĂ©truit l'Ă©chafaud, la guerre, la famine Il parle, plus d'esclave et plus de paria. Ouvre un livre. Platon, Milton, Beccaria. Lis ces prophĂštes, Dante, ou Shakespeare, ou Corneille L'Ăąme immense qu'ils ont en eux, en toi s'Ă©veille ; Ébloui, tu te sens le mĂȘme homme qu'eux tous ; Tu deviens en lisant grave, pensif et doux ; Tu sens dans ton esprit tous ces grands hommes croĂźtre, Ils t'enseignent ainsi que l'aube Ă©claire un cloĂźtre À mesure qu'il plonge en ton coeur plus avant, Leur chaud rayon t'apaise et te fait plus vivant ; Ton Ăąme interrogĂ©e est prĂȘte Ă  leur rĂ©pondre ; Tu te reconnais bon, puis meilleur; tu sens fondre, Comme la neige au feu, ton orgueil, tes fureurs, Le mal, les prĂ©jugĂ©s, les rois, les empereurs ! Car la science en l'homme arrive la premiĂšre. Puis vient la libertĂ©. Toute cette lumiĂšre, C'est Ă  toi comprends donc, et c'est toi qui l'Ă©teins ! Les buts rĂȘvĂ©s par toi sont par le livre atteints. Le livre en ta pensĂ©e entre, il dĂ©fait en elle Les liens que l'erreur Ă  la vĂ©ritĂ© mĂȘle, Car toute conscience est un noeud gordien. Il est ton mĂ©decin, ton guide, ton gardien. Ta haine, il la guĂ©rit ; ta dĂ©mence, il te l'ĂŽte. VoilĂ  ce que tu perds, hĂ©las, et par ta faute ! Le livre est ta richesse Ă  toi ! c'est le savoir, Le droit, la vĂ©ritĂ©, la vertu, le devoir, Le progrĂšs, la raison dissipant tout dĂ©lire. Et tu dĂ©truis cela, toi ! - Je ne sais pas lire.
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Victor Hugo
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- Je te croyais morte. La voix d'Edwin avait Ă©tĂ© un murmure, le premier souffle hĂ©sitant d'un espoir qui renaissait. Ellana laissa son regard dĂ©river vers le corps ensanglantĂ© d'Essindra. Une flambĂ©e de haine embrasa son cƓur et, durant un bref instant, elle souhaita que la mercenaire soit encore vivante pour pouvoir la tuer Ă  nouveau. Puis Essindra disparut de son esprit et elle embrassa Edwin. Un baiser brĂ»lant Ă  l'improbable parfum de miracle. Un baiser douceur tout en promesses d'Ă©ternitĂ©. Un baiser aveu. Peur, tĂ©nĂšbres et solitude. PassĂ©es. Edwin la serra contre lui, enfouit le visage dans son cou, se perdit dans son parfum et les cheveux fous derriĂšre sa nuque. Sentir son corps, percevoir les battements de son cƓur... Il revint doucement Ă  la vie. - Je t'aime. Ils avaient chuchotĂ© ensemble. Tressaillirent ensemble en entendant l'autre Ă©noncer ce qui Ă©tat l'origine, le centre et l'avenir du monde. - Je t'aime. Autour d'eux l'univers avait pĂąli devant cette Ă©vidence. - Je t'aime. - Ne meurs plus jamais. S'il-te-plaĂźt. Plus jamais. - Je ne peux pas mourir, je t'aime. Leur Ă©treinte devint plus pressante, leurs lĂšvres se cherchĂšrent pour un nouveau baiser, plus intense, plus sensuel, plus... Destan, coincĂ© entre son pĂšre et sa mĂšre, Ă©mit un petit cri de protestation. Sans que leurs Ăąmes ne se dĂ©tachent, Ellana et Edwin s'Ă©cartĂšrent pour contempler leur fils. Peut-on mourir de bonheur ? La question avait dĂ©jĂ  Ă©tĂ© posĂ©. Si les larmes qui embuaient les yeux d'Ellana et celles qui roulaient sur le visage d'Edwin avaient su parler, elles auraient sans doute rĂ©pondu.
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Pierre Bottero (Ellana, la Prophétie (Le Pacte des MarchOmbres, #3))
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- Maman, pourquoi les nuages vont dans un sens et nous dans l'autre ? Isaya sourit, caressa la joue de sa fille du bout des doigts. - Il y a deux rĂ©ponses Ă  ta question. Comme Ă  toutes les questions, tu le sais bien. Laquelle veux-tu entendre ? - Les deux. -Laquelle en premier alors ? La fillette plissa le nez. - Celle du savant. - Nous allons vers le nord parce que nous cherchons une terre oĂč nous Ă©tablir. Un endroit oĂč construire une belle maison, Ă©lever des coureurs et cultiver des racines de niam. C'est notre rĂȘve depuis des annĂ©es et nous avons quittĂ© Al-Far pour le vivre. - Je n’aime pas les galettes de niam... - Nous planterons aussi des fraises, promis. Les nuages, eux, n'ont pas le choix. Ils vont vers le sud parce que le vent les pousse et, comme ils sont trĂšs trĂšs lĂ©gers, il sont incapables de lui rĂ©sister. - Et la rĂ©ponse du poĂšte ? - Les hommes sont comme les nuages. Ils sont chassĂ©s en avant par un vent mystĂ©rieux et invisible face auquel ils sont impuissants. Ils croient maĂźtriser leur route et se moquent de la faiblesse des nuages, mais leur vent Ă  eux est mille fois plus fort que celui qui souffle lĂ -haut. La fillette croisa les bras et parut se dĂ©sintĂ©resser de la conversation afin d'observer un vol de canards au plumage chatoyant qui se posaient sur la riviĂšre proche. Indigo, Ă©meraude ou vert pĂąle, ils se bousculaient dans une cacophonie qui la fit rire aux Ă©clats. Lorsque les chariots eurent dĂ©passĂ© les volatiles, elle se tourna vers sa mĂšre. - Cette fois, je prĂ©fĂšre la rĂ©ponse du savant. -Pourquoi ? demande Isaya qui avait attendu sereinement la fin de ce qu'elle savait ĂȘtre une intense rĂ©flexion. - J'aime pas qu'on me pousse en cachette.
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Pierre Bottero (Ellana (Le Pacte des MarchOmbres, #1))
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L'isolement Souvent sur la montagne, Ă  l'ombre du vieux chĂȘne, Au coucher du soleil, tristement je m'assieds ; Je promĂšne au hasard mes regards sur la plaine, Dont le tableau changeant se dĂ©roule Ă  mes pieds. Ici gronde le fleuve aux vagues Ă©cumantes ; Il serpente, et s'enfonce en un lointain obscur ; LĂ  le lac immobile Ă©tend ses eaux dormantes OĂč l'Ă©toile du soir se lĂšve dans l'azur. Au sommet de ces monts couronnĂ©s de bois sombres, Le crĂ©puscule encor jette un dernier rayon ; Et le char vaporeux de la reine des ombres Monte, et blanchit dĂ©jĂ  les bords de l'horizon. Cependant, s'Ă©lançant de la flĂšche gothique, Un son religieux se rĂ©pand dans les airs : Le voyageur s'arrĂȘte, et la cloche rustique Aux derniers bruits du jour mĂȘle de saints concerts. Mais Ă  ces doux tableaux mon Ăąme indiffĂ©rente N'Ă©prouve devant eux ni charme ni transports ; Je contemple la terre ainsi qu'une ombre errante Le soleil des vivants n'Ă©chauffe plus les morts. De colline en colline en vain portant ma vue, Du sud Ă  l'aquilon, de l'aurore au couchant, Je parcours tous les points de l'immense Ă©tendue, Et je dis : " Nulle part le bonheur ne m'attend. " Que me font ces vallons, ces palais, ces chaumiĂšres, Vains objets dont pour moi le charme est envolĂ© ? Fleuves, rochers, forĂȘts, solitudes si chĂšres, Un seul ĂȘtre vous manque, et tout est dĂ©peuplĂ© ! Que le tour du soleil ou commence ou s'achĂšve, D'un oeil indiffĂ©rent je le suis dans son cours ; En un ciel sombre ou pur qu'il se couche ou se lĂšve, Qu'importe le soleil ? je n'attends rien des jours. Quand je pourrais le suivre en sa vaste carriĂšre, Mes yeux verraient partout le vide et les dĂ©serts : Je ne dĂ©sire rien de tout ce qu'il Ă©claire; Je ne demande rien Ă  l'immense univers. Mais peut-ĂȘtre au-delĂ  des bornes de sa sphĂšre, Lieux oĂč le vrai soleil Ă©claire d'autres cieux, Si je pouvais laisser ma dĂ©pouille Ă  la terre, Ce que j'ai tant rĂȘvĂ© paraĂźtrait Ă  mes yeux ! LĂ , je m'enivrerais Ă  la source oĂč j'aspire ; LĂ , je retrouverais et l'espoir et l'amour, Et ce bien idĂ©al que toute Ăąme dĂ©sire, Et qui n'a pas de nom au terrestre sĂ©jour ! Que ne puĂźs-je, portĂ© sur le char de l'Aurore, Vague objet de mes voeux, m'Ă©lancer jusqu'Ă  toi ! Sur la terre d'exil pourquoi restĂ©-je encore ? Il n'est rien de commun entre la terre et moi. Quand lĂ  feuille des bois tombe dans la prairie, Le vent du soir s'Ă©lĂšve et l'arrache aux vallons ; Et moi, je suis semblable Ă  la feuille flĂ©trie : Emportez-moi comme elle, orageux aquilons !
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Alphonse de Lamartine (Antologija francuskog pjesniĆĄtva)
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Qui vous le dit, qu’elle (la vie) ne vous attend pas ? Certes, elle continue, mais elle ne vous oblige pas Ă  suivre le rythme. Vous pouvez bien vous mettre un peu entre parenthĂšses pour vivre ce deuil
 accordez-vous le temps. *** Parce que Ò«a me fait plaisir. Parce que je sais aussi que l’entourage peut se montrer trĂšs discret dans pareille situation, et que de se changer les idĂ©es de temps en temps fait du bien. Parce que je sais que vous aimez la montagne et que vous n’iriez pas toute seule. *** Oui. Si vous perdez une jambe, Ò«a se voit, les gens sont conciliants. Et encore, pas tous. Mais quand c’est un morceau de votre cƓur qui est arrachĂ©, Ò«a ne se voit pas de l’extĂ©rieur, et c’est au moins aussi douloureux
 Ce n’est pas de la faute des gens. Ils ne se fient qu’aux apparences. Il faut gratter pour voir ce qu’il y a au fond. Si vous jetez une grosse pierre dans une mare, elle va faire des remous Ă  la surface. Des gros remous d'abord, qui vont gifler les rives, et puis des remous plus petits, qui vont finir par disparaĂźtre. Peu Ă  peu, la surface redevient lisse et paisible. Mais la grosse pierre est quand mĂȘme au fond. La grosse pierre est quand mĂȘme au fond. *** La vie s’apparente Ă  la mer. Il y a les bruit des vagues, quand elles s’abattent sur la plage, et puis le silence d’aprĂšs, quand elles se retirent. Deux mouvement qui se croissent et s’entrecoupent sans discontinuer. L’un est rapide, violent, l’autre est doux et lent. Vous aimeriez vous retirer, dans le mĂȘme silence des vagues, partir discrĂštement, vous faire oublier de la vie. Mais d’autres vague arrivent et arriveront encore et toujours. Parce que c’est Ò«a la vie
 C’est le mouvement, c’est le rythme, le fracas parfois, durant la tempĂȘte, et le doux clapotis quand tout est calme. Mais le clapotis quand mĂȘme Un bord de mer n'est jamais silencieux, jamais. La vie non plus, ni la vĂŽtre, ni la mienne. Il y a les grains de sables exposĂ©s aux remous et ceux protĂ©gĂ©s en haut de la plage. Lesquels envier? Ce n'est pas avec le sable d'en haut, sec et lisse, que l'on construit les chĂąteaux de sable, c'est avec celui qui fraye avec les vagues car ses particules sont coalescentes. Vous arriverez Ă  reconstruire votre chĂąteau, vous le construirez avec des grains qui vous ressemblent, qui ont aussi connu les dĂ©ferlantes de la vie, parce qu'avec eux, le ciment est solide.. *** « Tu ne sais jamais Ă  quel point tu es fort jusqu’au jour oĂč ĂȘtre fort reste la seule option. » C’est Bob Marley qui a dit Ò«a. *** Manon ne referme pas violemment la carte du restaurant. Elle n’éprouve pas le besoin qu’il lui lise le menu pour qu’elle ne voie pas le prix, et elle trouvera Ă©gal que chaque bouchĂ©e vaille cinq euros. Manon profite de la vie. Elle accepte l’invitation avec simplicitĂ©. Elle dĂ©fend la place des femmes sans ĂȘtre une fĂ©ministe acharnĂ©e et cela ne lui viendrait mĂȘme pas Ă  l’idĂ©e de payer sa part. D’abord, parce qu’elle sait que Paul s’en offusquerait, ensuite, parce qu’elle aime ces petites marques de galanterie, qu’elle regrette de voir disparaĂźtre avec l’évolution d’une sociĂ©tĂ© en pertes de repĂšres.
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AgnĂšs Ledig (Juste avant le bonheur)
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Cher Monsieur Waters, Je reçois votre courrier Ă©lectronique en date du 14 avril dernier et suis comme il se doit impressionnĂ© par la complexitĂ© shakespearienne de votre drame. Chaque personnage dans votre histoire a une harmatia en bĂ©ton. La sienne : ĂȘtre trop malade. La vĂŽtre : ĂȘtre trop bien portant. FĂ»t-ce le contraire, vos Ă©toiles n'auraient pas Ă©tĂ© aussi contrariĂ©es, mais c'est dans la natures des Ă©toiles d'ĂȘtre contrariĂ©es. A ce propos, Shakespeare ne s'est jamais autant trompĂ© qu'en mettant ces mots dans la bouche de Cassius : « La faute, cher Brutus, n'en est pas Ă  nos Ă©toiles ; elle en est Ă  nous-mĂȘmes. » Facile Ă  dire lorsqu'on est un noble romain (ou Shakespeare!), mais nos Ă©toiles ne sont jamais Ă  court de tort. Puisque nous en sommes au chapitre des dĂ©faillances de ce cher vieux William, ce que vous me dites de la jeune Hazel me rappelle le sonnet 55, qui commence, bien entendu ainsi : « Ni le marbre, ni les mausolĂ©es dorĂ©s des princes ne dureront plus longtemps que ma rime puissante. Vous conserverez plus d'Ă©clat dans ces mesures que sous la dalle non balayĂ©e que le temps barbouille de sa lie. (Hors sujet, mais : quel cochon, ce temps ! Il bousille tout le monde.) Un bien joli poĂšme, mais trompeur : nul doute que la rime puissante de Shakespeare nous reste en mĂ©moire, mais que nous rappelons-nous de l'homme qu'il cĂ©lĂšbre ? Rien. Nous sommes certains qu'il Ă©tait de sexe masculin, le reste n'est qu'une hypothĂšse. Shakespeare nous raconte des clopinettes sur l'homme qu'il a enseveli Ă  l'intĂ©rieur de son sarcophage linguistique. (Remarquez que, lorsque nous parlons littĂ©rature, nous utilisons le prĂ©sent. Quand nous parlons d'un mort, nous ne sommes pas aussi gentils.) On ne peut pas immortaliser ceux qui nous ont quittĂ©s en Ă©crivant sur eux. La langue enterre, mais ne ressuscite pas. (Avertissement : je ne suis pas le premier Ă  faire cette observation, cf le poĂšme d'Archibald MacLeish « Ni le marbre, ni les mausolĂ©es dorĂ©s » qui renferme ce vers hĂ©roĂŻque : « Vous mourrez et nul ne se souviendra de vous ») Je m'Ă©loigne du sujet, mais votre le problĂšme : les morts ne sont visibles que dans l’Ɠil dĂ©nuĂ© de paupiĂšre de la mĂ©moire. Dieu merci, les vivants conservent l'aptitude de surprendre et de dĂ©cevoir. Votre Hazel est vivante, Waters, et vous ne pouvez imposer votre volontĂ© contre la dĂ©cision de quelqu'un d'autre, qui plus est lorsque celle-ci est mĂ»rement rĂ©flĂ©chie. Elle souhaite vous Ă©pargner de la peine et vous devriez l'accepter. Il se peut que la logique de la jeune Hazel ne vous convainque pas, mais j'ai parcouru cette vallĂ©e de larmes plus longtemps que vous, et de mon point de vue, Hazel n'est pas la moins saine d'esprit. Bien Ă  vous Peter Van Houten
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John Green (The Fault in Our Stars)
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Sans doute, l’amitiĂ©, l’amitiĂ© qui a Ă©gard aux individus, est une chose frivole, et la lecture est une amitiĂ©. Mais du moins c’est une amitiĂ© sincĂšre, et le fait qu’elle s’adresse Ă  un mort, Ă  un absent, lui donne quelque chose de dĂ©sintĂ©ressĂ©, de presque touchant. C’est de plus une amitiĂ© dĂ©barrassĂ©e de tout ce qui fait la laideur des autres. Comme nous ne sommes tous, nous les vivants, que des morts qui ne sont pas encore entrĂ©s en fonctions, toutes ces politesses, toutes ces salutations dans le vestibule que nous appelons dĂ©fĂ©rence, gratitude, dĂ©vouement et oĂč nous mĂȘlons tant de mensonges, sont stĂ©riles et fatigantes. De plus, – dĂšs les premiĂšres relations de sympathie, d’admiration, de reconnaissance, – les premiĂšres paroles que nous prononçons, les premiĂšres lettres que nous Ă©crivons, tissent autour de nous les premiers fils d’une toile d’habitudes, d’une vĂ©ritable maniĂšre d’ĂȘtre, dont nous ne pouvons plus nous dĂ©barrasser dans les amitiĂ©s suivantes ; sans compter que pendant ce temps-lĂ  les paroles excessives que nous avons prononcĂ©es restent comme des lettres de change que nous devons payer, ou que nous paierons plus cher encore toute notre vie des remords de les avoir laissĂ© protester. Dans la lecture, l’amitiĂ© est soudain ramenĂ©e Ă  sa puretĂ© premiĂšre. Avec les livres, pas d’amabilitĂ©. Ces amis-lĂ , si nous passons la soirĂ©e avec eux, c’est vraiment que nous en avons envie. Eux, du moins, nous ne les quittons souvent qu’à regret. Et quand nous les avons quittĂ©s, aucune de ces pensĂ©es qui gĂątent l’amitiĂ© : Qu’ont-ils pensĂ© de nous ? – N’avons-nous pas manquĂ© de tact ? – Avons-nous plu ? – et la peur d’ĂȘtre oubliĂ© pour tel autre. Toutes ces agitations de l’amitiĂ© expirent au seuil de cette amitiĂ© pure et calme qu’est la lecture. Pas de dĂ©fĂ©rence non plus ; nous ne rions de ce que dit MoliĂšre que dans la mesure exacte oĂč nous le trouvons drĂŽle ; quand il nous ennuie nous n’avons pas peur d’avoir l’air ennuyĂ©, et quand nous avons dĂ©cidĂ©ment assez d’ĂȘtre avec lui, nous le remettons Ă  sa place aussi brusquement que s’il n’avait ni gĂ©nie ni cĂ©lĂ©britĂ©. L’atmosphĂšre de cette pure amitiĂ© est le silence, plus pur que la parole. Car nous parlons pour les autres, mais nous nous taisons pour nous-mĂȘmes. Aussi le silence ne porte pas, comme la parole, la trace de nos dĂ©fauts, de nos grimaces. Il est pur, il est vraiment une atmosphĂšre. Entre la pensĂ©e de l’auteur et la nĂŽtre il n’interpose pas ces Ă©lĂ©ments irrĂ©ductibles, rĂ©fractaires Ă  la pensĂ©e, de nos Ă©goĂŻsmes diffĂ©rents. Le langage mĂȘme du livre est pur (si le livre mĂ©rite ce nom), rendu transparent par la pensĂ©e de l’auteur qui en a retirĂ© tout ce qui n’était pas elle-mĂȘme jusqu’à le rendre son image fidĂšle, chaque phrase, au fond, ressemblant aux autres, car toutes sont dites par l’inflexion unique d’une personnalitĂ© ; de lĂ  une sorte de continuitĂ©, que les rapports de la vie et ce qu’ils mĂȘlent Ă  la pensĂ©e d’élĂ©ments qui lui sont Ă©trangers excluent et qui permet trĂšs vite de suivre la ligne mĂȘme de la pensĂ©e de l’auteur, les traits de sa physionomie qui se reflĂštent dans ce calme miroir. Nous savons nous plaire tour Ă  tour aux traits de chacun sans avoir besoin qu’ils soient admirables, car c’est un grand plaisir pour l’esprit de distinguer ces peintures profondes et d’aimer d’une amitiĂ© sans Ă©goĂŻsme, sans phrases, comme en soi-mĂȘme.
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Marcel Proust (Days of Reading (Penguin Great Ideas))