Cette Fille Quotes

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On la connaßt tous... Cette solitude qui nous mine parfois. Qui sabote notre sommeil ou pourrit nos petits matins. C'est la tristesse du premier jour d'école. C'est lorsqu'il embrasse une fille plus belle dans la cour du lycée. C'est Orly ou la gare de l'Est à la fin d'un amour. C'est l'enfant qu'on ne fera jamais ensemble. C'est quelquefois moi. C'est quelquefois vous. Mais il suffit parfois d'une rencontre...
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Guillaume Musso (Que serais-je sans toi?)
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Elle est trop belle. Trop intelligente. Mais trop jeune. Cette fille sera ta perte . . .” She is too beautiful. Too smart. But too young. This girl will be your undoing . . .
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Kate Stewart (One Last Rainy Day: The Legacy of a Prince (Ravenhood Legacy, #1))
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Elle se répÚte: "change de tactique, ma fille, cesse de souffrir, t'es pas obligée de ramasser autant." Mais rien n'y fait. Il y a des gens qui se torturent mieux que d'autres. Dans cette catégorie, au moins, elle se sent championne absolue.
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Virginie Despentes (Bye Bye Blondie)
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Les liens se font et se dĂ©font, c'est la vie. Un matin, l'un reste et l'autre part, sans que l'on sache toujours pourquoi. Je ne peux pas tout donner Ă  l'autre avec cette Ă©pĂ©e de DamoclĂšs au-dessus de la tĂȘte. Je ne veux pas bĂątir ma vie sur les sentiments parce que les sentiments changent. Ils sont fragiles et incertains. Tu les crois profonds et ils sont soumis Ă  une jupe qui passe, Ă  un sourire enjĂŽleur. Je fais de la musique parce que la musique ne partira jamais de ma vie. J'aime les livres, parce que les livres seront toujours lĂ . Et puis... des gens qui s'aiment pour la vie, moi, je n'en connais pas.
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Guillaume Musso (La fille de papier)
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Comment se faisait-il que je ne l'aie jamais rencontrĂ©e? À quoi me servait-il de connaĂźtre tant de monde si cette fille n'en faisait pas partie? Il faisait froid sur le parvis
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Frédéric Beigbeder (L'amour dure trois ans (Marc Marronnier, #3))
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BientÎt la conversation reprit entre les trois dames, que la présence de cette fille avait rendues subitement amies, presque intimes. Elles devaient faire, leur semblait-il, comme un faisceau de leurs dignités d'épouses en face de cette vendue sans vergogne; car l'amour légal le prend toujours de haut avec son libre confrÚre.
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Guy de Maupassant
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Coup d'Ɠil dans la vitrine d'une bijouterie, pleine d'or et de rĂ©veils. C'est entre effroi et amusement. Sa propre allure. Elle ressemble Ă  d'autres filles qu'elle. Jamais auparavant elle n'avait cru que c'Ă©tait possible, sortir comme ça et que personne ne s'exclame : « Mais qu'est-ce que c'est que cette imposture ? » Cette allure qu'elle a, jambes sublimĂ©es, silhouette transformĂ©e. Et personne ne se rend compte qu'elle n'est pas du tout comme ça. C'est la premiĂšre fois qu'elle comprend, qu'en fait aucune fille n'est comme ça.
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Virginie Despentes (Les jolies choses)
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Des milliers de filles ont monté un escalier, frappé à une porte derriÚre laquelle il y avait une femme dont elles ne savaient rien, à qui elles allaient abandonner leur sexe et leur ventre. Et cette femme, la seule personne alors capable de faire passer le malheur, ouvrait la porte, en tablier et en pantoufles à pois, un torchon à la main : "C'est pour quoi, mademoiselle?
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Annie Ernaux (L'événement)
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Je regrettais la mort de cette fille comme on regrette la destruction totale d'une belle Ɠuvre.
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Alexandre Dumas
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TraĂźne pas trop sous la pluie C'est pas Bogota c'est Paris Il y avait du cygne blanc dans cette fille-lĂ  et puis du cygne noir
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Richard Bohringer (TraĂźne pas trop sous la pluie)
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En somme, si on voulait ĂȘtre cohĂ©rent, il faudrait soit lever le pied sur l'Ă©ducation des filles, soit intĂ©grer Ă  leur formation un sĂ©rieux entraĂźnement Ă  la guĂ©rilla contre le patriarcat, tout en s'employant activement Ă  faire en sorte que cette situation change.
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Mona Chollet (SorciÚres : La puissance invaincue des femmes)
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Et voilĂ . Maintenant le ressort est bandĂ©. Cela n'a plus qu'Ă  se dĂ©rouler tout seul. C'est cela qui est commode dans la tragĂ©die. On donne le petit coup de pouce pour que cela dĂ©marre, rien, un regard pendant une seconde Ă  une fille qui passe et lĂšve les bras dans la rue, une envie d'honneur un beau matin, au rĂ©veil, comme de quelque chose qui se mange, une question de trop qu'on se pose un soir
 C'est tout. AprĂšs, on n'a plus qu'Ă  laisser faire. On est tranquille. Cela roule tout seul. C'est minutieux, bien huilĂ© depuis toujours. La mort, la trahison, le dĂ©sespoir sont lĂ , tout prĂȘts, et les Ă©clats, et les orages, et les silences, tous les silences : le silence quand le bras du bourreau se lĂšve Ă  la fin, le silence au commencement quand les deux amants sont nus l'un en face de l'autre pour la premiĂšre fois, sans oser bouger tout de suite, dans la chambre sombre, le silence quand les cris de la foule Ă©clatent autour du vainqueur - et on dirait un film dont le son s'est enrayĂ©, toutes ces bouches ouvertes dont il ne sort rien, toute cette clameur qui n'est qu'une image, et le vainqueur, dĂ©jĂ  vaincu, seul au milieu de son silence

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Jean Anouilh
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Et pourtant, au dessus du regard souriant d'une jeune fille, qu'y a-t-il de plus beaux que cette couronne bouclée de violettes noires ?
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Marcel Proust (La PrisonniĂšre)
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Maman me parle de cette pĂ©riode avec nostalgie, et la petite fille de cinq ans que je suis ne comprend pas pourquoi quand on est heureux quelque part, on n’y reste pas toute sa vie.
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Yves Montmartin (La mauvaise herbe)
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Cette femme avait des Ă©tonnements d'enfant pour les moindres choses. Il y avait des jours oĂč elle courait dans le jardin, comme une fille de dix ans, aprĂšs un papillon ou une demoiselle.
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Alexandre Dumas fils
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Je me suis dit cette fille, je ne l`aimais pas. Je me suis mis à la voir comme un agencement habile d`organs, de muscles, de tubes, de conduits, de reflexes de toutes sortes et ça m`a fichu une nausée terrible. Tu vois, avec Scapone, je ne vois pas les organes, je vois au delà de ça. Ce que je vois c`est son ùme et son ùme me réchauffele coeur. La chair n`a rien à voir là-dedans.
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Thomas Gunzig (Mort d'un parfait bilingue)
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Ni soumission ni consentement, seulement l'effarement du reel qui fait tout juste se dire "qu'est-ce qui m'arrive" ou "c'est a moi que ça arrive" sauf qu'il ny'a plus de moi en cette circonstance, ou ce n'est plus le meme deja.
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Annie Ernaux (Mémoire de fille)
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- Tu connais beaucoup d'homme qui pourraient résister aux avances d'une gamine avec le physique de Leo ? - Oui. Toutes les créatures surnaturelles masculines de cette ville qui savent que c'est ta fille. Là, elle marquait un point.
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Cassandra O'Donnell (Ancestral (Rebecca Kean, #4))
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« Tu sais, cette pauvre fille qui chantait si bien, elle est morte de chagrin. Et ce fameux poĂšte qui disait de si belles choses, il s'est suicidĂ©. C'est grand dommage, ma femme
 Tous ces gens-lĂ  finissent mal. C'est nous, les simples, qui sommes les gens heureux ... »
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George Sand (Elle et lui)
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J’allais ouvrir la bouche et aborder cette fille , quand quelqu’un me toucha l’épaule. Je me retournai, surpris, et j’aperçus un homme d’aspect ordinaire, ni jeune ni vieux, qui me regardait d’un air triste. — Je voudrais vous parler, dit-il. Je fis une grimace qu’il vit sans doute, car il ajouta : — « C’est important. » Je me levai et le suivis Ă  l’autre bout du bateau : — « Monsieur, reprit-il, quand l’hiver approche avec les froids, la pluie et la neige, votre mĂ©decin vous dit chaque jour : « Tenez-vous les pieds bien chauds, gardez-vous des refroidissements, des rhumes, des bronchites, des pleurĂ©sies. » Alors vous prenez mille prĂ©cautions, vous portez de la flanelle, des pardessus Ă©pais, des gros souliers, ce qui ne vous empĂȘche pas toujours de passer deux mois au lit. Mais quand revient le printemps avec ses feuilles et ses fleurs, ses brises chaudes et amollissantes, ses exhalaisons des champs qui vous apportent des troubles vagues, des attendrissements sans cause, il n’est personne qui vienne vous dire : « Monsieur, prenez garde Ă  l’amour ! Il est embusquĂ© partout ; il vous guette Ă  tous les coins ; toutes ses ruses sont tendues, toutes ses armes aiguisĂ©es, toutes ses perfidies prĂ©parĂ©es ! Prenez garde Ă  l’amour !
 Prenez garde Ă  l’amour ! Il est plus dangereux que le rhume, la bronchite et la pleurĂ©sie ! Il ne pardonne pas, et fait commettre Ă  tout le monde des bĂȘtises irrĂ©parables. » Oui, monsieur, je dis que, chaque annĂ©e, le gouvernement devrait faire mettre sur les murs de grandes affiches avec ces mots : « Retour du printemps. Citoyens français, prenez garde Ă  l’amour ; » de mĂȘme qu’on Ă©crit sur la porte des maisons : « Prenez garde Ă  la peinture ! » — Eh bien, puisque le gouvernement ne le fait pas, moi je le remplace, et je vous dis : « Prenez garde Ă  l’amour ; il est en train de vous pincer, et j’ai le devoir de vous prĂ©venir comme on prĂ©vient, en Russie, un passant dont le nez gĂšle. » Je demeurai stupĂ©fait devant cet Ă©trange particulier, et, prenant un air digne : — « Enfin, monsieur, vous me paraissez vous mĂȘler de ce qui ne vous regarde guĂšre. » Il fit un mouvement brusque, et rĂ©pondit : — « Oh ! monsieur ! monsieur ! si je m’aperçois qu’un homme va se noyer dans un endroit dangereux, il faut donc le laisser pĂ©rir ?
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Guy de Maupassant
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Je me sentais Ă©chauffĂ©. Je ne voyais aucun moyen de me sortir de cette inextricable situation : une jeune fille presque nue qui n’avait pas l’air d’avoir froid, une conversation trĂšs propre Ă  exciter un vieux sanglier dans mon genre, mais je ne pouvais dĂ©cidĂ©ment faire des avances Ă  une fille aussi jeune.
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Jean-Marie Rouart
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But, you will say, what a dreadful person you are, with your impossible religious notions and idiotic scruples. If my ideas are impossible or idiotic then I would like nothing better than to be rid of them. But this is roughly the way I actually see things. In Le philosophe sous les toits by Souvestre you can read what a man of the people, a simple craftsman, pitiful if you will, thinks of his country: ‘Tu n’as peut-ĂȘtre jamais pensĂ© ĂĄ ce que c’est la patrie, reprit-il, en me posant une main sur l’épaule; c’est tout ce qui t’entoure, tout ce qui t’a Ă©levĂ© et nourri, tout ce que tu as aimĂ©. Cette campagne que tu vois, ces maisons, ces arbres, ces jeunes filles qui passent lĂĄ en riant, c’est la patrie! Les lois qui te protĂ©gent, le pain qui paye ton travail, les paroles que tu Ă©changes, la joie et la tristesse qui te viennent des hommes et des choses parmi lesquels tu vis, c’est la patrie! La petite chambre oĂș tu as autrefois vu ta mere, les souvenirs qu’elle t’a laisses, la terre oĂș elle repose, c’est la patrie! Tu la vois, tu la respires partout! Figure toi, tes droits et tes devoirs, tes affections et tes besoins, tes souvenirs et ta reconnaissance, rĂ©unis tout ça sous un seul nom et ce nom sera la patrie.
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Vincent van Gogh
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Elle a sans doute une maison de poupĂ©es bien cauchemardesques lĂ -dedans, oĂč les poupĂ©es s’animent la nuit. C’est peut-ĂȘtre l’une d’elles qui me tuera. OK, je suis ridicule. Cette petite fille est probablement extrĂȘmement gentille. Ce n’est pas sa faute si on l’habille en fantĂŽme victorien qui fait flipper.
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Freida McFadden (The Housemaid (The Housemaid, #1))
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Émilie partit faire un tour avec sa meilleure amie Vanessa dans les bois. En pleine discussion entre filles, Émilie ne prĂȘta aucune attention au danger qu’elle courait dans cette zone dĂ©serte jusqu’au moment oĂč elle poussa un cri Ă©poustouflant ne laissant aucun de ses camarades indiffĂ©rent: un scorpion l'avait piquĂ©!
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Ikrame Selkani (Il Ă©tait une fois Émilie
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Je ne dis pas que la fille de Constantine Ă©tait nĂ©e blanche comme neige ; je veux seulement montrer que l'amour que Constantine avait pour moi est nĂ© de l'absence de cette enfant. c'est peut-ĂȘtre Ă  cela qu'il devait d'ĂȘtre si unique, si profond. Peu importe que je sois blanche. Elle voulait que sa fille lui soit rendue, je voulais que maman ne soit pas déçue par moi.
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Kathryn Stockett (The Help)
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AmputĂ©e!
 O soleil, si c’est vrai que je viens de toi, pourquoi m’as-tu faite amputĂ©e? Pourquoi m’as-tu faite une fille? Pourquoi ces seins, cette faiblesse, cette plaie ouverte au milieu de moi? N’aurait-il pas Ă©tĂ© beau le garçon MĂ©dĂ©e? N’aurait-il pas Ă©tĂ© fort? Le corps dur comme la pierre, fait pour prendre et partir aprĂšs, ferme, intact, entier, lui! Ah! il aurait pu venir, alors, Jason, avec ses grandes mains redoutables, il aurait pu tenter de les poser sur moi! Un couteau, chacun dans la sienne -oui!- et le plus fort tue l’autre et s’en va dĂ©livrĂ©. Pas cette lutte oĂč je ne voulais que toucher les Ă©paules, cette blessure que j’implorais. Femme! Femme! Chienne! Chair faite d’un peu de boue de d’une cĂŽte d’homme! Morceau d’homme! Putain!
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Jean Anouilh (Médée)
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Voisine Je peux rester des aprĂšs-midi entiers Ă  regarder cette fille, cachĂ© derriĂšre mon rideau. Je me demande ce qu'elle peut Ă©crire sur son ordinateur. A quoi elle pense quand elle regarde par la fenĂȘtre. Je me demande ce qu'elle mange, ce qu'elle utilise comme dentifrice, ce qu'elle Ă©coute comme musique. Un jour, je l'ai vue danser toute seule. Je me demande si elle a des frĂšres et sƓurs, si elle met la radio quand elle se lĂšve le matin, si elle prĂ©fĂšre l'Espagne ou l'Italie, si elle garde son mouchoir en boule dans sa main quand elle pleure et si elle aime Thomas Bernhard. Je me demande comment elle dort et comment elle jouit. Je me demande comment est son corps de prĂšs. Je me demande si elle s'Ă©pile ou si au contraire elle a une grosse toison. Je me demande si elle lit des livres en anglais. Je me demande ce qui la fait rire, ce qui la met hors d'elle, ce qui la touche et si elle a du goĂ»t. Qu'est-ce qu'elle peut bien en penser, cette fille, de la hausse du baril de pĂ©trole et des Farc, et que dans trente ans il n'y aura sans doute plus de gorilles dans les montagnes du Rwanda ? Je me demande Ă  quoi elle pense quand je la vois fumer sur son canapĂ©, et ce qu'elle fume comme cigarettes. Est-ce que ça lui pĂšse d'ĂȘtre seule ? Est-ce qu'elle a un homme dans sa vie ? Et si c'est le cas, pourquoi c'est elle qui va toujours chez lui ? Pourquoi il n'y a jamais d'homme chez elle ? Je me demande comment elle se voit dans vingt ans. Je me demande quel sens elle donne Ă  sa vie. Qu'est-ce qu'elle pense de sa vie quand elle est comme ça, toute seule, chez elle ? Si ça se trouve, elle n'a aucun intĂ©rĂȘt, cette fille.
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David Thomas (La Patience des buffles sous la pluie)
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Il eut soudain envie d'abandonner ses projets, de sortir dans la nuit et de partir. Il allait traverser les montagnes enneigĂ©es, sans s'arrĂȘter, et parcourir les cents lieus qui le sĂ©paraient de l'Auvergne, et lĂ -bas se rĂ©fugier dans sa vieille caverne et s'y endormir pour ne jamais se rĂ©veiller. Mais il n'en fit rien. Il resta assis et ne cĂ©da pas, parce que c'Ă©tait chez lui une envie ancienne, de partir et de se rĂ©fugier dans sa caverne. Il connaissait cela. Ce qu'en revanche il ne connaissait pas encore, c'Ă©tait de possĂ©der un parfum humain, aussi magnifique que le parfum de la jeune fille derriĂšre le mur. Et quoiqu'il sĂ»t devoir payer cruellement la possession de ce parfum de sa perte ultĂ©rieure, cette possession et cette perte lui parurent plus dĂ©sirables que de renoncer abruptement Ă  l'une comme Ă  l'autre. Car il avait passĂ© sa vie Ă  renoncer. Tandis que jamais encore il n'avait possĂ©dĂ© et perdu.
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Patrick SĂŒskind (Perfume: The Story of a Murderer)
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L’homme doit Ă©tudier les Kama Sutra et les arts et sciences qui s’y rattachent, concurremment avec les arts et sciences relatifs Ă  Dharma et Artha. Les jeunes filles doivent aussi Ă©tudier les Kama Sutra, ainsi que les arts et sciences accessoires, avant leur mariage, puis continuer cette Ă©tude avec le consentement de leurs maris. Ici des savants interviennent, disant que les femmes, auxquelles il est interdit d’étudier aucune science, ne doivent pas Ă©tudier les Kama Sutra.
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Mallanaga Vātsyāyana (The Kama Sutra of Vatsyayana)
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Il ne faut pas t'Ă©tonner qu'aucune femme ne veuille, Rufus, glisser sa cuisse lĂ©gĂšre sous la tienne mĂȘme si tu la soudoyais en lui offrant une robe splendide ou une pierre diaphane et raffinĂ©e. C'est qu'une sale histoire te porte tort, selon laquelle un bouc sauvage logerait sous tes aisselles. On le redoute, et ce n'est pas surprenant : la bĂȘte est trĂšs mĂ©chante et aucune fille ne coucherait avec. Alors dĂ©barrasse-toi de cette calamitĂ© redoutable pour les narines, ou cesse de t'Ă©tonner que l'on te fuie.
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Catullus (The Complete Poems)
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Cette humanitĂ© qu’a mĂ»rie la femme dans la douleur et dans l’humiliation verra le jour quand la femme aura fait tomber les chaĂźnes de sa condition sociale. Et les hommes qui ne sentent pas venir ce jour seront surpris et vaincus. Un jour [
], la jeune fille sera; la femme sera. Et ces mots « jeune fille », « femme » ne signifient plus seulement le contraire du mĂąle, mais quelque chose de propre, valant en soi-mĂȘme; non point un simple complĂ©ment, mais une forme complĂšte de la vie: la femme dans sa vĂ©ritable humanitĂ©.
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Rainer Maria Rilke (Lettres Ă  un jeune poĂšte de Rainer Maria Rilke (Essai et dossier))
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- Maman, pourquoi les nuages vont dans un sens et nous dans l'autre ? Isaya sourit, caressa la joue de sa fille du bout des doigts. - Il y a deux rĂ©ponses Ă  ta question. Comme Ă  toutes les questions, tu le sais bien. Laquelle veux-tu entendre ? - Les deux. -Laquelle en premier alors ? La fillette plissa le nez. - Celle du savant. - Nous allons vers le nord parce que nous cherchons une terre oĂč nous Ă©tablir. Un endroit oĂč construire une belle maison, Ă©lever des coureurs et cultiver des racines de niam. C'est notre rĂȘve depuis des annĂ©es et nous avons quittĂ© Al-Far pour le vivre. - Je n’aime pas les galettes de niam... - Nous planterons aussi des fraises, promis. Les nuages, eux, n'ont pas le choix. Ils vont vers le sud parce que le vent les pousse et, comme ils sont trĂšs trĂšs lĂ©gers, il sont incapables de lui rĂ©sister. - Et la rĂ©ponse du poĂšte ? - Les hommes sont comme les nuages. Ils sont chassĂ©s en avant par un vent mystĂ©rieux et invisible face auquel ils sont impuissants. Ils croient maĂźtriser leur route et se moquent de la faiblesse des nuages, mais leur vent Ă  eux est mille fois plus fort que celui qui souffle lĂ -haut. La fillette croisa les bras et parut se dĂ©sintĂ©resser de la conversation afin d'observer un vol de canards au plumage chatoyant qui se posaient sur la riviĂšre proche. Indigo, Ă©meraude ou vert pĂąle, ils se bousculaient dans une cacophonie qui la fit rire aux Ă©clats. Lorsque les chariots eurent dĂ©passĂ© les volatiles, elle se tourna vers sa mĂšre. - Cette fois, je prĂ©fĂšre la rĂ©ponse du savant. -Pourquoi ? demande Isaya qui avait attendu sereinement la fin de ce qu'elle savait ĂȘtre une intense rĂ©flexion. - J'aime pas qu'on me pousse en cachette.
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Pierre Bottero (Ellana (Le Pacte des MarchOmbres, #1))
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L.T Woodward a raison de voir une forme de sadisme psychologique chez les femmes d'aujourd’hui qui "mettent leur corps bien en vue, mais en y ajoutant l'inscription symbolique "interdit de toucher". On trouve partout des adeptes de cette forme de tourment sexuel : la fille qui se prĂ©sente en bikini rĂ©duit au minimum, la dame au dĂ©colletĂ© provocant, la gamine qui ondule dans la rue les fesses moulĂ©es par un pantalon trĂšs collant ou avec une "minijupe" qui laisse voir plus de la moitiĂ© des cuisses, dĂ©sirant ĂȘtre regardĂ©e mais non touchĂ©e, et toutes prĂȘtes Ă  s'indigner.
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Julius Evola (Eros and the Mysteries of Love: The Metaphysics of Sex)
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Jadis, alors qu’il recevait chez lui des femmes, il avait composĂ© un boudoir oĂč, au milieu des petits meubles sculptĂ©s dans le pĂąle camphrier du Japon, sous une espĂšce de tente en satin rose des Indes, les chairs se coloraient doucement aux lumiĂšres apprĂȘtĂ©es que blutait l’étoffe. Cette piĂšce oĂč des glaces se faisaient Ă©cho et se renvoyaient Ă  perte de vue, dans les murs, des enfilades de boudoirs roses, avait Ă©tĂ© cĂ©lĂšbre parmi les filles qui se complaisaient Ă  tremper leur nuditĂ© dans ce bain d’incarnat tiĂšde qu’aromatisait l’odeur de menthe dĂ©gagĂ©e par le bois des meubles.
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Joris-Karl Huysmans
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responsabilitĂ© de l'offre qu'elle venait lui faire. L'employĂ© fut pris en effet d'une sourde irritation. —Voyons, achĂšve! dit-il. Pourquoi veut-on marier cette jeune fille? —Elle sortait de pension, reprit la courtiĂšre d'une voix dolente, un homme l'a perdue, Ă  la campagne, chez les parents d'une de ses amies. Le pĂšre vient de s'apercevoir de la faute. Il voulait la tuer. La tante, pour sauver la chĂšre enfant, s'est faite complice, et, Ă  elles deux, elles ont contĂ© une histoire au pĂšre, elles lui ont dit que le coupable Ă©tait un honnĂȘte garçon qui ne demandait qu'Ă  rĂ©parer son Ă©garement d'une heure.
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Émile Zola (La curĂ©e (French Edition))
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Tout Ă©tait possible aprĂšs tout, dans une soirĂ©e si peu protocolaire, n'importe quel imprĂ©vu romanesque, totalement Ă©tranger au monde oĂč elle vivait. Qu'y avait-il, dans le secret de cette valse, qui l'attirait ainsi vers l'intĂ©rieur de la maison? qu'allait)il arriver maintenant, au cours de ces heures indĂ©cises? Quelqu'un peut-ĂȘtre? Une invitĂ©e inattendue, une crĂ©ature irrĂ©elle, d'une essence si rare qu'elle ne pouvait qu'Ă©blouir, une jeune fille au rayonnement intact, qui d'un seul regard vers Gatsby, un regard neuf, en un bref instant d'affrontement magique, lui ferait oublier cinq ans d'absolue dĂ©votion.
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F. Scott Fitzgerald (The Great Gatsby)
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Oh ! aimer une femme ! ĂȘtre prĂȘtre ! ĂȘtre haĂŻ ! l’aimer de toutes les fureurs de son Ăąme, sentir qu’on donnerait pour le moindre de ses sourires son sang, ses entrailles, sa renommĂ©e, son salut, l’immortalitĂ© et l’éternitĂ©, cette vie et l’autre ; regretter de ne pas ĂȘtre roi, gĂ©nie, empereur, archange, dieu, pour lui mettre un plus grand esclave sous les pieds ; l’étreindre nuit et jour de ses rĂȘves et de ses pensĂ©es ; et la voir amoureuse d’une livrĂ©e de soldat ! et n’avoir Ă  lui offrir qu’une sale soutane de prĂȘtre dont elle aura peur et dĂ©goĂ»t ! Être prĂ©sent, avec sa jalousie et sa rage, tandis qu’elle prodigue Ă  un misĂ©rable fanfaron imbĂ©cile des trĂ©sors d’amour et de beautĂ© ! Voir ce corps dont la forme vous brĂ»le, ce sein qui a tant de douceur, cette chair palpiter et rougir sous les baisers d’un autre ! Ô ciel ! aimer son pied, son bras, son Ă©paule, songer Ă  ses veines bleues, Ă  sa peau brune, jusqu’à s’en tordre des nuits entiĂšres sur le pavĂ© de sa cellule, et voir toutes les caresses qu’on a rĂȘvĂ©es pour elle aboutir Ă  la torture ! N’avoir rĂ©ussi qu’à la coucher sur le lit de cuir ! Oh ! ce sont lĂ  les vĂ©ritables tenailles rougies au feu de l’enfer ! Oh ! bienheureux celui qu’on scie entre deux planches, et qu’on Ă©cartĂšle Ă  quatre chevaux ! — Sais-tu ce que c’est que ce supplice que vous font subir, durant les longues nuits, vos artĂšres qui bouillonnent, votre cƓur qui crĂšve, votre tĂȘte qui rompt, vos dents qui mordent vos mains ; tourmenteurs acharnĂ©s qui vous retournent sans relĂąche, comme sur un gril ardent, sur une pensĂ©e d’amour, de jalousie et de dĂ©sespoir ! Jeune fille, grĂące ! trĂȘve un moment ! un peu de cendre sur cette braise ! Essuie, je t’en conjure, la sueur qui ruisselle Ă  grosses gouttes de mon front ! Enfant ! torture-moi d’une main, mais caresse-moi de l’autre ! Aie pitiĂ©, jeune fille ! aie pitiĂ© de moi !
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Victor Hugo (Notre-Dame de Paris (French Edition))
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Il serra ses mains en poings et se força Ă  marcher Ă  pas lents et mesurĂ©s vers la tombe et commença Ă  haleter. Bon sang, il ne pouvait pas s’écrouler. Il voulait le faire, il avait besoin de le faire, besoin de voir ce qu’il pourrait retirer de ce rappel physique de sa propre mortalitĂ© Ă©phĂ©mĂšre. Peut-ĂȘtre que cela lui donnerait envie de vivre Ă  nouveau. Il lut les dates de dĂ©cĂšs marquĂ©es sur les pierres tombales, en faisant attention Ă  ne pas marcher sur les tombes des autres pauvres enfants morts, d’annĂ©e en annĂ©e, jusqu’à ce qu’il voit son nom. JULIETTE ANNE MARTIN 14 aoĂ»t 1991-9 octobre 2008 Fille bien-aimĂ©e. Il n’y avait pas d’ours, de plaques ou mĂȘme d’anges comme il en avait vu sur les autres pierres tombales, alors qu’il cherchait la sienne. Elle Ă©tait gris foncĂ©, en marbre et trĂšs Ă©lĂ©gante. Ses jambes se dĂ©robĂšrent sous lui quand il rĂ©alisa que son amie, sa Juliette, gisait Ă  ses pieds, et il atterrit sur la terre molle Ă  cĂŽtĂ© d’elle. Les fleurs oubliĂ©es tombĂšrent au sol et des sanglots secs ravagĂšrent son corps. Il ne pleurerait pas, il le savait. Il Ă©tait incapable de pleurer depuis cette nuit-lĂ . Tout comme il ne supportait plus d’ĂȘtre touchĂ©, il ne pouvait Ă©prouver le plus petit soulagement que les pleurs lui auraient accordĂ©.
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J.P. Barnaby (Aaron: Histoire d'un survivant #1 (French Edition))
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C'est pour cette raison que je suis devenue une putain, a-t-elle expliquĂ© en continuant Ă  dessiner. J'avais tellement peur d'ĂȘtre envoyĂ©e Ă  l'asile. Je couchais avec tous les hommes que je pouvais trouver. On n'essaie pas de guĂ©rir une femme qui couche avec des hommes. On la paie. Le plus drĂŽle, c'Ă©tait que mes parents, ça les dĂ©rangeait pas que j'aille avec des dizaines et des dizaines d'hommes. Ils trouvaient ça moins honteux que d'aller avec une fille. (...) Ne laisse pas un telle chose t'arriver, Betty. N'aie pas peur d'ĂȘtre toi-mĂȘme. Faut pas que tu vives aussi longtemps pour t'apercevoir Ă  la fin que tu n'as pas vĂ©cu du tout.
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Tiffany McDaniel, Betty
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je n'ai jamais contemplĂ© l'inceste sous cette terrible lueur de caveau et de damnation Ă©ternelle qu'une fausse morale s'est dĂ©libĂ©rĂ©ment appliquĂ©e Ă  jeter sur une forme d'exubĂ©rance sexuelle qui, pour moi, n'occupe qu'une place extrĂȘmement modeste dans l'Ă©chelle monumentale de nos dĂ©gradations. Toutes les frĂ©nĂ©sies de l'inceste me paraissent infiniment plus acceptables que celles d'Hiroshima, de Buchenwald, des pelotons d'exĂ©cution, de la terreur et de la torture policiĂšres, mille fois plus aimables que les leucĂ©mies et autres belles consĂ©quences gĂ©nĂ©tiques probables des efforts de nos savants. Personne ne me fera jamais voir dans le comportement sexuel des ĂȘtres le critĂšre du bien et du mal. La funeste physionomie d'un certain physicien illustre recommandant au monde civilisĂ© de poursuivre les explosions nuclĂ©aires m'est incomparablement plus odieuse que l'idĂ©e d'un fils couchant avec sa mĂšre. A cĂŽtĂ© des aberrations intellectuelles, scientifiques, idĂ©ologiques de notre siĂšcle, toutes celles de la sexualitĂ© Ă©veillent dans mon coeur les plus tendres pardons. Une fille qui se fait payer pour ouvrir ses cuisses au peuple me paraĂźt une soeur de charitĂ© et une honnĂȘte dispensatrice de bon pain lorsqu'on compare sa modeste vĂ©nalitĂ© Ă  la prostitution des savants prĂȘtant leurs cerveaux Ă  l'Ă©laboration de l'empoisonnement gĂ©nĂ©tique et de la terreur atomique. A cĂŽtĂ© de la perversion de l'Ăąme, de l'esprit et de l'idĂ©al Ă  laquelle se livrent ces traĂźtres Ă  l'espĂšce, nos Ă©lucubrations sexuelles, vĂ©nales ou non, incestueuses ou non, prennent, sur les trois humbles sphincters dont dispose notre anatomie, toute l'innocence angĂ©lique d'un sourire d'enfant. (La promesse de l'aube, ch. X)
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Romain Gary (Promise at Dawn)
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Revenons donc Ă  nos poncifs, ou plutĂŽt Ă  quelques-uns d’entre eux : 1° Le XIXe siĂšcle est le siĂšcle de la science. 2° Le XIXe siĂšcle est le siĂšcle du progrĂšs. 3° Le XIXe siĂšcle est le siĂšcle de la dĂ©mocratie, qui est progrĂšs et progrĂšs continu. 4° Les tĂ©nĂšbres du moyen Ăąge. 5° La RĂ©volution est sainte, et elle a Ă©mancipĂ© le peuple français. 6° La dĂ©mocratie, c’est la paix. Si tu veux la paix, prĂ©pare la paix. 7° L’avenir est Ă  la science. La Science est toujours bienfaisante. 8° L’instruction laĂŻque, c’est l’émancipation du peuple. 9° La religion est la fille de la peur. 10° Ce sont les États qui se battent. Les peuples sont toujours prĂȘts Ă  s’accorder. 11° Il faut remplacer l’étude du latin et du grec, qui est devenue inutile, par celle des langues vivantes, qui est utile. 12° Les relations de peuple Ă  peuple vont sans cesse en s’amĂ©liorant. Nous courons aux États-Unis d’Europe. 13° La science n’a ni frontiĂšres, ni patrie. 14° Le peuple a soif d’égalitĂ©. 15° Nous sommes Ă  l’aube d’une Ăšre nouvelle de fraternitĂ© et de justice. 16° La propriĂ©tĂ©, c’est le vol. Le capital, c’est la guerre. 17° Toutes les religions se valent, du moment qu’on admet le divin. 18° Dieu n’existe que dans et par la conscience humaine. Cette conscience crĂ©e Dieu un peu plus chaque jour. 19° L’évolution est la loi de l’univers. 20° Les hommes naissent naturellement bons. C’est la sociĂ©tĂ© qui les pervertit. 21° Il n’y a que des vĂ©ritĂ©s relatives, la vĂ©ritĂ© absolue n’existe pas. 22° Toutes les opinions sont bonnes et valables, du moment que l’on est sincĂšre. Je m’arrĂȘte Ă  ces vingt-deux Ăąneries, auxquelles il serait aisĂ© de donner une suite, mais qui tiennent un rang majeur par les innombrables calembredaines du XIXe siĂšcle, parmi ce que j’appellerai ses idoles. Idoles sur chacune desquelles on pourrait mettre un ou plusieurs noms.
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Léon Daudet (Le Stupide XIXe siÚcle (French Edition))
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Esther n'Ă©tait certainement pas bien Ă©duquĂ©e au sens habituel du terme, jamais l'idĂ©e ne lui serait venue de vider un cendrier ou de dĂ©barrasser le relief de ses repas, et c'est sans la moindre gĂȘne qu'elle laissait la lumiĂšre allumĂ©e derriĂšre elle dans les piĂšces qu'elle venait de quitter (il m'est arrivĂ©, suivant pas Ă  pas son parcours dans ma rĂ©sidence de San Jose, d'avoir Ă  actionner dix-sept commutateurs); il n'Ă©tait pas davantage question de lui demander de penser Ă  faire un achat, de ramener d'un magasin oĂč elle se rendait une course non destinĂ©e Ă  son propre usage, ou plus gĂ©nĂ©ralement de rendre un service quelconque. Comme toutes les trĂšs jolies jeunes filles elle n'Ă©tait au fond bonne qu'Ă  baiser, et il aurait Ă©tĂ© stupide de l'employer Ă  autre chose, de la voir autrement que comme un animal de luxe, en tout choyĂ© et gĂ„tĂ©, protĂ©gĂ© de tout souci comme de toute tĂąche ennuyeuse ou pĂ©nible afin de mieux pouvoir se consacrer Ă  son service exclusivement sexuel. Elle n'en Ă©tait pas moins trĂšs loin d'ĂȘtre ce monstre d'arrogance, d'Ă©goĂŻsme absolu et froid, au, pour parler en termes plus baudelairiens, cette infernale petite salope que sont la plupart des trĂšs jolies jeunes filles; il y avait en elle la conscience de la maladie, de la faiblesse et de la mort. Quoique belle, trĂšs belle, infiniment Ă©rotique et dĂ©sirable, Esther n'en Ă©tait pas moins sensible aux infirmitĂ©s animales, parce qu'elle les connaissait ; c'est ce soir-lĂ  que j'en pris conscience, et que je me mis vĂ©ritablement Ă  l'aimer. Le dĂ©sir physique, si violent soit-il, n'avait jamais suffi chez moi Ă  conduire Ă  l'amour, il n'avait pu atteindre ce stade ultime que lorsqu'il s'accompagnait, par une juxtaposition Ă©trange, d'une compassion pour l'ĂȘtre dĂ©sirĂ© ; tout ĂȘtre vivant, Ă©videmment, mĂ©rite la compassion du simple fait qu'il est en vie et se trouve par lĂ -mĂȘme exposĂ© Ă  des souffrances sans nombre, mais face Ă  un ĂȘtre jeune et en pleine santĂ© c'est une considĂ©ration qui paraĂźt bien thĂ©orique. Par sa maladie de reins, par sa faiblesse physique insoupçonnable mais rĂ©elle, Esther pouvait susciter en moi une compassion non feinte, chaque fois que l'envie me prendrait d'Ă©prouver ce sentiment Ă  son Ă©gard. Étant elle-mĂȘme compatissante, ayant mĂȘme des aspirations occasionnelles Ă  la bontĂ©, elle pouvait Ă©galement susciter en moi l'estime, ce qui parachevait l'Ă©difice, car je n'Ă©tais pas un ĂȘtre de passion, pas essentiellement, et si je pouvais dĂ©sirer quelqu'un de parfaitement mĂ©prisable, s'il m'Ă©tait arrivĂ© Ă  plusieurs reprises de baiser des filles dans l'unique but d'assurer mon emprise sur elles et au fond de les dominer, si j'Ă©tais mĂȘme allĂ© jusqu'Ă  utiliser ce peu louable sentiment dans des sketches, jusqu'Ă  manifester une comprĂ©hension troublante pour ces violeurs qui sacrifient leur victime immĂ©diatement aprĂšs avoir disposĂ© de son corps, j'avais par contre toujours eu besoin d'estimer pour aimer, jamais au fond je ne m'Ă©tais senti parfaitement Ă  l'aise dans une relation sexuelle basĂ©e sur la pure attirance Ă©rotique et l'indiffĂ©rence Ă  l'autre, j'avais toujours eu besoin, pour me sentir sexuellement heureux, d'un minimum - Ă  dĂ©faut d'amour - de sympathie, d'estime, de comprĂ©hension mutuelle; l'humanitĂ© non, je n'y avais pas renoncĂ©. (La possibilitĂ© d'une Ăźle, Daniel 1,15)
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Michel Houellebecq
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La jalousie ne m'est pas un sentiment inconnu, il est nĂ©anmoins trĂšs Ă©loignĂ© de moi. Je ne connais pas la possessivitĂ©, n'estimant pas qu'on dispose de prĂ©rogatives sur les ĂȘtres, je ne suis pas Ă  l'aise avec la notion mĂȘme de propriĂ©tĂ©. Je respecte au plus haut point la libertĂ© de chacun (probablement parce que je ne supporterais pas qu'on entame la mienne). Je suis capable aussi, me semble-t-il, de discernement, et mĂȘme de dĂ©tachement. En tout cas, ce sont des qualitĂ©s qu'on m'attribue, mĂȘme Ă  cet Ăąge-lĂ . GĂ©nĂ©ralement, je ne me comporte pas en envieux et j'ai toujours trouvĂ© avilissante l'agressivitĂ© hideuse des mĂ©gĂšres. Sauf que tous mes beaux principes s'Ă©croulent en une seconde, la seconde de la jeune fille sautant au cou de Thomas. Parce que cette scĂšne tĂ©moigne d'une vie vĂ©cue en dehors de moi. Et me renvoie au vide, Ă  l'inexistence de la façon la plus cruelle. Parce qu'elle montre ce qui m'est dissimulĂ© habituellement. Parce qu'elle raconte le charme du garçon tĂ©nĂ©breux et le nombre des tentatives qui doivent se produire afin de s'en approcher. Parce qu'elle offre une alternative au garçon dĂ©boussolĂ©, tiraillĂ©. En rĂ©alitĂ©, je ne supporte pas l'idĂ©e qu'on pourrait me le ravir. Que je pourrais le perdre. Je dĂ©couvre –  pauvre imbĂ©cile  – la morsure du sentiment amoureux.
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Philippe Besson (« ArrĂȘte avec tes mensonges »)
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Avant le chariot du supermarchĂ©, le qu'est-ce qu'on va manger ce soir, les Ă©conomies pour s'acheter un canapĂ©, une chaĂźne hi-fi, un appart. Avant les couches, le petit seau et la pelle sur la plage, les hommes que je ne vois plus, les revues de consommateurs pour ne pas se faire entuber, le gigot qu'il aime par-dessus tout et le calcul rĂ©ciproque des libertĂ©s perdues. Une pĂ©riode oĂč l'on peut dĂźner d'un yaourt, faire sa valise en une demi-heure pour un week-end impromptu, parler toute une nuit. Lire un dimanche entier sous les couvertures. S'amollir dans un cafĂ©, regarder les gens entrer et sortir, se sentir flotter entre ces existences anonymes. Faire la fĂȘte sans scrupule quand on a le cafard. Une pĂ©riode oĂč les conversations des adultes installĂ©s paraissent venir d'un univers futile, presque ridicule, on se fiche des embouteillages, des morts de la PentecĂŽte, du prix du bifteck et de la mĂ©tĂ©o. Personne ne vous colle aux semelles encore. Toutes les filles l'ont connue, cette pĂ©riode, plus ou moins longue, plus ou moins intense, mais dĂ©fendu de s'en souvenir avec nostalgie. Quelle honte ! Oser regretter ce temps Ă©goĂŻste, oĂč l'on n'Ă©tait responsable que de soi, douteux, infantile. La vie de jeune fille, ça ne s'enterre pas, ni chanson ni folklore lĂ -dessus, ça n'existe pas. Une pĂ©riode inutile.
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Annie Ernaux (A Frozen Woman)
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Mon pĂšre, AndrĂ© PĂ©trovitch Grineff, aprĂšs avoir servi dans sa jeunesse sous le comte Munich, avait quittĂ© l’état militaire en 17
 avec le grade de premier major. Depuis ce temps, il avait constamment habitĂ© sa terre du gouvernement de Simbirsk, oĂč il Ă©pousa Mlle Avdotia, 1ere fille d’un pauvre gentilhomme du voisinage. Des neuf enfants issus de cette union, je survĂ©cus seul ; tous mes frĂšres et sƓurs moururent en bas Ăąge. J’avais Ă©tĂ© inscrit comme sergent dans le rĂ©giment SĂ©mĂ©nofski par la faveur du major de la garde, le prince B
, notre proche parent. Je fus censĂ© ĂȘtre en congĂ© jusqu’à la fin de mon Ă©ducation. Alors on nous Ă©levait autrement qu’aujourd’hui. DĂšs l’ñge de cinq ans je fus confiĂ© au piqueur SavĂ©liitch, que sa sobriĂ©tĂ© avait rendu digne de devenir mon menin. GrĂące Ă  ses soins, vers l’ñge de douze ans je savais lire et Ă©crire, et pouvais apprĂ©cier avec certitude les qualitĂ©s d’un lĂ©vrier de chasse. À cette Ă©poque, pour achever de m’instruire, mon pĂšre prit Ă  gages un Français, M. BeauprĂ©, qu’on fit venir de Moscou avec la provision annuelle de vin et d’huile de Provence. Son arrivĂ©e dĂ©plut fort Ă  SavĂ©liitch. « Il semble, grĂące Ă  Dieu, murmurait-il, que l’enfant Ă©tait lavĂ©, peignĂ© et nourri. OĂč avait-on besoin de dĂ©penser de l’argent et de louer un moussiĂ©, comme s’il n’y avait pas assez de domestiques dans la maison ? »
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Alexander Pushkin (The Captain's Daughter)
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Il y a quelque chose d’ineffablement touchant dans notre campagne pĂ©tersbourgeoise, quand, au printemps, elle dĂ©ploie soudain toute sa force, s’épanouit, se pare, s’enguirlande de fleurs. Elle me fait songer Ă  ces jeunes filles languissantes, anĂ©miĂ©es, qui n’excitent que la pitiĂ©, parfois l’indiffĂ©rence, et brusquement, du jour au lendemain, deviennent inexprimablement merveilleuses de beautĂ©: vous demeurez stupĂ©faits devant elles, vous demandant quelle puissance a mis ce feu inattendu dans ces yeux tristes et pensifs, qui a colorĂ© d’un sang rose ces joues pĂąles naguĂšre, qui a rĂ©pandu cette passion sur ces traits qui n’avaient pas d’expression, pourquoi s’élĂšvent et s’abaissent si profondĂ©ment ces jeunes seins ? Mon Dieu ! qui a pu donner Ă  la pauvre fille cette force, cette soudaine plĂ©nitude de vie, cette beautĂ© ? Qui a jetĂ© cet Ă©clair dans ce sourire ? Qui donc fait ainsi Ă©tinceler cette gaietĂ© ? Vous regardez autour de vous, vous cherchez quelqu’un, vous devinez... Mais que les heures passent et peut-ĂȘtre demain retrouverezvous le regard triste et pensif d’autrefois, le mĂȘme visage pĂąle, les mĂȘmes allures timides, effacĂ©es : c’est le sceau du chagrin, du repentir, c’est aussi le regret de l’épanouissement Ă©phĂ©mĂšre... et vous dĂ©plorez que cette beautĂ© se soit fanĂ©e si vite : quoi ! vous n’avez pas mĂȘme eu le temps de l’aimer !...
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Fyodor Dostoevsky
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J’ai essayĂ© plus d’une fois, comme tous mes amis, de m’enfermer dans un systĂšme pour y prĂȘcher Ă  mon aise. Mais un systĂšme est une espĂšce de damnation qui nous pousse Ă  une abjuration perpĂ©tuelle ; il en faut toujours inventer un autre, et cette fatigue est un cruel chĂątiment. Et toujours mon systĂšme Ă©tait beau, vaste, spacieux, commode, propre et lisse surtout ; du moins il me paraissait tel. Et toujours un produit spontanĂ©, inattendu, de la vitalitĂ© universelle venait donner un dĂ©menti Ă  ma science enfantine et vieillotte, fille dĂ©plorable de l’utopie. J’avais beau dĂ©placer ou Ă©tendre le criterium, il Ă©tait toujours en retard sur l’homme universel, et courait sans cesse aprĂšs le beau multiforme et versicolore, qui se meut dans les spirales infinies de la vie. CondamnĂ© sans cesse Ă  l’humiliation d’une conversion nouvelle, j’ai pris un grand parti. Pour Ă©chapper Ă  l’horreur de ces apostasies philosophiques, je me suis orgueilleusement rĂ©signĂ© Ă  la modestie : je me suis contentĂ© de sentir ; je suis revenu chercher un asile dans l’impeccable naĂŻvetĂ©. J’en demande humblement pardon aux esprits acadĂ©miques de tout genre qui habitent les diffĂ©rents ateliers de notre fabrique artistique. C’est lĂ  que ma conscience philosophique a trouvĂ© le repos ; et, au moins, je puis affirmer, autant qu’un homme peut rĂ©pondre de ses vertus, que mon esprit jouit maintenant d’une plus abondante impartialitĂ©.
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Charles Baudelaire (Curiosités Esthétiques: Salon 1845-1859 (French Edition))
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Mais les signes de ce qui m'attendait rĂ©ellement, je les ai tous nĂ©gligĂ©s. Je travaille mon diplĂŽme sur le surrĂ©alisme Ă  la bibliothĂšque de Rouen, je sors, je traverse le square Verdrel, il fait doux, les cygnes du bassin ont reparu, et d'un seul coup j'ai conscience que je suis en train de vivre peut-ĂȘtre mes derniĂšres semaines de fille seule, libre d'aller oĂč je veux, de ne pas manger ce midi, de travailler dans ma chambre sans ĂȘtre dĂ©rangĂ©e. Je vais perdre dĂ©finitivement la solitude. Peut-on s'isoler facilement dans un petit meublĂ©, Ă  deux. Et il voudra manger ses deux repas par jour. Toutes sortes d'images me traversent. Une vie pas drĂŽle finalement. Mais je refoule, j'ai honte, ce sont des idĂ©es de fille unique, Ă©gocentrique, soucieuse de sa petite personne, mal Ă©levĂ©e au fond. Un jour, il a du travail, il est fatiguĂ©, si on mangeait dans la chambre au lieu d'aller au restau. Six heures du soir cours Victor-Hugo, des femmes se prĂ©cipitent aux Docks, en face du Montaigne, prennent ci et ça sans hĂ©sitation, comme si elles avaient dans la tĂȘte toute la programmation du repas de ce soir, de demain peut-ĂȘtre, pour quatre personnes ou plus aux goĂ»ts diffĂ©rents. Comment font-elles ? [...] Je n'y arriverai jamais. Je n'en veux pas de cette vie rythmĂ©e par les achats, la cuisine. Pourquoi n'est-il pas venu avec moi au supermarchĂ©. J'ai fini par acheter des quiches lorraines, du fromage, des poires. Il Ă©tait en train d'Ă©couter de la musique. Il a tout dĂ©ballĂ© avec un plaisir de gamin. Les poires Ă©taient blettes au coeur, "tu t'es fait entuber". Je le hais. Je ne me marierai pas. Le lendemain, nous sommes retournĂ©s au restau universitaire, j'ai oubliĂ©. Toutes les craintes, les pressentiments, je les ai Ă©touffĂ©s. SublimĂ©s. D'accord, quand on vivra ensemble, je n'aurai plus autant de libertĂ©, de loisirs, il y aura des courses, de la cuisine, du mĂ©nage, un peu. Et alors, tu renĂącles petit cheval tu n'es pas courageuse, des tas de filles rĂ©ussissent Ă  tout "concilier", sourire aux lĂšvres, n'en font pas un drame comme toi. Au contraire, elles existent vraiment. Je me persuade qu'en me mariant je serai libĂ©rĂ©e de ce moi qui tourne en rond, se pose des questions, un moi inutile. Que j'atteindrai l'Ă©quilibre. L'homme, l'Ă©paule solide, anti-mĂ©taphysique, dissipateur d'idĂ©es tourmentantes, qu'elle se marie donc ça la calmera, tes boutons mĂȘme disparaĂźtront, je ris forcĂ©ment, obscurĂ©ment j'y crois. Mariage, "accomplissement", je marche. Quelquefois je songe qu'il est Ă©goĂŻste et qu'il ne s'intĂ©resse guĂšre Ă  ce que je fais, moi je lis ses livres de sociologie, jamais il n'ouvre les miens, Breton ou Aragon. Alors la sagesse des femmes vient Ă  mon secours : "Tous les hommes sont Ă©goĂŻstes." Mais aussi les principes moraux : "Accepter l'autre dans son altĂ©ritĂ©", tous les langages peuvent se rejoindre quand on veut.
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Annie Ernaux (A Frozen Woman)
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On veut confondre de tels hommes avec les torĂ©adors ou les joueurs. On vante leur mĂ©pris de la mort. Mais je me moque bien du mĂ©pris de la mort. S’il ne tire pas ses racines d’une responsabilitĂ© acceptĂ©e, il n’est que signe de pauvretĂ© ou d’excĂšs de jeunesse. J’ai connu un suicidĂ© jeune. Je ne sais plus quel chagrin d’amour lavait poussĂ© Ă  se tirer soigneusement une balle dans le cƓur. Je ne sais Ă  quelle tentation littĂ©raire il avait cĂ©dĂ© en habillant ses mains de gants blancs, mais je me souviens d’avoir ressenti en face de cette triste parade une impression non de noblesse mais de misĂšre. Ainsi, derriĂšre ce visage aimable, sous ce crĂąne d’homme, il n’y avait rien eu, rien. Sinon l’image de quelque sotte petite fille semblable Ă  d’autres. Face Ă  cette destinĂ©e maigre, je me rappelai une vraie mort d’homme. Celle d’un jardinier, qui me disait « Vous savez.., parfois je suais quand je bĂȘchais. Mon rhumatisme me tirait la jambe, et je pestais contre cet esclavage. Eh bien, aujourd’hui, je voudrais bĂȘcher, bĂȘcher dans la terre. BĂȘcher ça me paraĂźt tellement beau ! On est tellement libre quand on bĂȘche ! Et puis, qui va tailler aussi mes arbres ? » Il laissait une terre en friche. Il laissait une planĂšte en friche. Il Ă©tait liĂ© d’amour Ă  toutes les terres et Ă  tous les arbres de la terre. C’était lui le gĂ©nĂ©reux, le prodigue, le grand seigneur !  C’était lui, comme Guillaumet, l’homme courageux, quand il luttait au nom de sa CrĂ©ation, contre la mort.
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Antoine de Saint-Exupéry (Terre des hommes (French Edition))
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... Une nuit d'automne, cinq ans plus tĂŽt. Ils longeaient une rue, et les feuilles mortes tombaient autour d'eux, et ils sont arrivĂ©s Ă  un endroit sans arbres, oĂč le trottoir Ă©tait blanc sous la lune. Ils se sont arrĂȘtĂ©s. Ils se sont tournĂ©s l'un vers l'autre. C'Ă©tait une nuit silencieuse, traversĂ©e par ce mystĂ©rieux battement de fiĂšvre, qui souligne deux fois par an les changements de saison. Les douces lumiĂšres des maisons ronronnaient dans l'obscuritĂ©, et l'on devinait dans le ciel un tournoiement d'Ă©toiles. À la frange de son regard, Gatsby dĂ©couvrait l'alignement des trottoirs, qui dessinait comme une Ă©chelle, et cette Ă©chelle conduisait vers un lieu secret au-dessus des arbres — il pouvait y monter, s'il y montait seul, et l'ayant atteint, boire la vie Ă  sa source mĂȘme, se gorger du lait transcendant des prodiges. Le visage clair de Daisy se levait lentement vers lui, et il sentait son cƓur battre de plus en plus vite. Il savait qu'au moment oĂč il embrassait cette jeune fille, au moment oĂč ses rĂȘves sublimes Ă©pouseraient se souffle fragile, son esprit perdrait Ă  jamais l'agilitĂ© miraculeuse de l'esprit de Dieu. Il avait alors attendu, Ă©coutĂ© encore un moment la vibration du diapason qui venait de heurter une Ă©toile, puis il l'avait embrassĂ©e, et Ă  l'instant prĂ©cis oĂč ses lĂšvres touchaient les siennes, il avait senti qu'elle s'Ă©panouissait comme une fleur Ă  son contact et l'incarnation s'Ă©tait achevĂ©e. À travers ce qu'il disait, et malgrĂ© une sentimentalitĂ© excessive, je retrouvais quelque chose, Ă  mon tour — une cadence insaisissable, des fragments de mots oubliĂ©s, quelque chose qui s'Ă©tait passĂ© bien des annĂ©es auparavant. J'ai senti pendant un moment qu'une phrase cherchait Ă  prendre forme dans ma bouche, et j'ai ouvert les lĂšvres, comme un muet, sous la pression d'une force bien au-delĂ  d'une simple respiration et qui cherchait Ă  s'Ă©chapper. Mais elles ne formĂšrent aucun son, et ce dont j'Ă©tais sur le point de me souvenir est restĂ© indicible Ă  jamais.
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F. Scott Fitzgerald (The Great Gatsby)
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PEER GYNT L'Ăąme, souffle et lumiĂšre du verbe, te viendra plus tard, ma fille Quand, en lettres d'or, sur le fond rose de l'Orient, apparaĂźtront ces mots : Voici le jour, alors commenceront les leçons ; ne crains rien, tu seras instruite. Mais je serais un sot de vouloir, dans le calme de cette tiĂšde nuit,me parer de quelques baillons d'un vieux savoir usĂ©, pour te traiter en maĂźtre d'Ă©cole. AprĂšs tout, le principal, quand on y rĂ©flĂ©chit, ce n'est point l'Ăąme, c'est le cƓur. ANITRA Parle seigneur. Quand tu parles, il me semble voir comme des lueurs d'opale. PBER GYNT La raison poussĂ©e Ă  l'excĂšs est de la bĂȘtise. La poltronnerie s'Ă©panouit en cruautĂ©. L'exagĂ©ration de la vĂ©ritĂ©, c'est de la sagesse Ă  l'envers. Oui, mon enfant, le diable m'emporte s'il n'y a pas de par le monde des ĂȘtres gavĂ©s d'Ăąme qui n'en ont que plus de peine Ă  voir clair. J'ai connu un individu de cette sorte, une vraie perle pourtant, qui a manquĂ© son but et perdu la boussole. Vois-tu ce dĂ©sert qui entoure l'oasis? Je n'aurais qu'Ă  agiter mon turban pour que les flots de l'OcĂ©an en comblassent toute l'Ă©tendue. Mais je serais un imbĂ©cile de crĂ©er ainsi des continents et des mers nouvelles. Sais-tu, ce que c'est que de vivre? ANITRA Enseigne-le-moi. PEER GYNT C'est planer au-dessus du temps qui coule, en descendre le courant sans se mouiller les pieds, et sans jamais rien perdre de soi-mĂȘme. Pour ĂȘtre celui qu'on est, ma petite amie, il faut la force de l'Ăąge! Un vieil aigle perd son piumage, une vieille rosse son allure, une vieille commĂšre ses dents. La peau se ride, et l'Ăąme aussi. Jeunesse ! jeunesse ! Par toi je veux rĂ©gner non sur les palmes et les vignes de quelque Gyntiana, mais sur la pensĂ©e vierge d'une femme dont je serai le sultan ardent et vigoureux. Je t'ai fait, ma petite, la grĂące de te sĂ©duire, d'Ă©lire ton cƓur pour y fonder un kalifat nouveau. Je veux ĂȘtre le maĂźtre de tes soupirs. Dans mon royaume, j'introduirai le rĂ©gime absolu. Nous sĂ©parer sera la mort... pour toi, s'entend. Pas une fibre, pas une parcelle de toi qei ne m'appartienne. Ni oui, ni non, tu n'auras d'autre volontĂ© que la mienne. Ta chevelure, noire comme la nuit, et tout ce qui, chez toi, est doux Ă  nommer, s'inclinera devant mon pouvoir souverain. Ce seront mes jardins de Babylone.
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Henrik Ibsen (Peer Gynt)
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en vĂ©ritĂ© il est trĂšs agrĂ©able de se rĂ©unir, de s’asseoir et de bavarder des intĂ©rĂȘts publics. Parfois mĂȘme je suis prĂȘt Ă  chanter de joie, quand je rentre dans la sociĂ©tĂ© et vois des hommes solides, sĂ©rieux, trĂšs bien Ă©levĂ©s, qui se sont rĂ©unis, parlent de quelque chose sans rien perdre de leur dignitĂ©. De quoi parlent-ils ? ça c’est une autre question. J’oublie mĂȘme, parfois, de pĂ©nĂ©trer le sens de la conversation, me contentant du tableau seul. Mais jusqu’ici, je n’ai jamais pu pĂ©nĂ©trer le sens de ce dont s’entretiennent chez nous les gens du monde qui n’appartiennent pas Ă  un certain groupe. Dieu sait ce que c’est. Sans doute quelque chose de charmant, puisque ce sont des gens charmants. Mais tout cela paraĂźt incomprĂ©hensible. On dirait toujours que la conversation vient de commencer ; comme si l’on accordait les instruments. On reste assis pendant deux heures et, tout ce temps, on ne fait que commencer la conversation. Parfois tous ont l’air de parler de choses sĂ©rieuses, de choses qui provoquent la rĂ©flexion. Mais ensuite, quand vous vous demandez de quoi ils ont parlĂ©, vous ĂȘtes incapable de le dire : de gants, d’agriculture, ou de la constance de l’amour fĂ©minin ? De sorte que, parfois, je l’avoue, l’ennui me gagne. On a l’impression de rentrer par une nuit sombre Ă  la maison en regardant tristement de cĂŽtĂ© et d’entendre soudain de la musique. C’est un bal, un vrai bal. Dans les fenĂȘtres brillamment Ă©clairĂ©es passent des ombres ; on entend des murmures de voix, des glissements de pas ; sur le perron se tiennent des agents. Vous passez devant, distrait, Ă©mu ; le dĂ©sir de quelque chose s’est Ă©veillĂ© en vous. Il vous semble avoir entendu le battement de la vie, et, cependant, vous n’emportez avec vous que son pĂąle motif, l’idĂ©e, l’ombre, presque rien. Et l’on passe comme si l’on n’avait pas confiance. On entend autre chose. On entend, Ă  travers les motifs incolores de notre vie courante, un autre motif, pĂ©nĂ©trant et triste, comme dans le bal des Capulet de Berlioz. L’angoisse et le doute rongent votre coeur, comme cette angoisse qui est au fond du motif lent de la triste chanson russe : Écoutez... d’autres sons rĂ©sonnent. Tristesse et orgie dĂ©sespĂ©rĂ©es... Est-ce un brigand qui a entonnĂ©, lĂ -bas, la chanson ? Ou une jeune fille qui pleure Ă  l’heure triste des adieux ? Non ; ce sont les faucheurs qui rentrent de leur travail... Autour sont les forĂȘts et les steppes de Saratov.
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Fyodor Dostoevsky
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À huit heures et demie du soir, deux tables Ă©taient dressĂ©es. La jolie madame des Grassins avait rĂ©ussi Ă  mettre son fils Ă  cĂŽtĂ© d’EugĂ©nie. Les acteurs de cette scĂšne pleine d’intĂ©rĂȘt, quoique vulgaire en apparence, munis de cartons bariolĂ©s, chiffrĂ©s, et de jetons en verre bleu, semblaient Ă©couter les plaisanteries du vieux notaire, qui ne tirait pas un numĂ©ro sans faire une remarque ; mais tous pensaient aux millions de monsieur Grandet. Le vieux tonnelier contemplait vaniteusement les plumes roses, la toilette fraĂźche de madame des Grassins, la tĂȘte martiale du banquier, celle d’Adolphe, le prĂ©sident, l’abbĂ©, le notaire, et se disait intĂ©rieurement : − Ils sont lĂ  pour mes Ă©cus. Ils viennent s’ennuyer ici pour ma fille. HĂ© ! ma fille ne sera ni pour les uns ni pour les autres, et tous ces gens-lĂ  me servent de harpons pour pĂȘcher ! Cette gaietĂ© de famille, dans ce vieux salon gris, mal Ă©clairĂ© par deux chandelles ; ces rires, accompagnĂ©s par le bruit du rouet de la grande Nanon, et qui n’étaient sincĂšres que sur les lĂšvres d’EugĂ©nie ou de sa mĂšre ; cette petitesse jointe Ă  de si grands intĂ©rĂȘts ; cette jeune fille qui, semblable Ă  ces oiseaux victimes du haut prix auquel on les met et qu’ils ignorent, se trouvait traquĂ©e, serrĂ©e par des preuves d’amitiĂ© dont elle Ă©tait la dupe ; tout contribuait Ă  rendre cette scĂšne tristement comique. N’est-ce pas d’ailleurs une scĂšne de tous les temps et de tous les lieux, mais ramenĂ©e Ă  sa plus simple expression ? La figure de Grandet exploitant le faux attachement des deux familles, en tirant d’énormes profits, dominait ce drame et l’éclairait. N’était-ce pas le seul dieu moderne auquel on ait foi, l’Argent dans toute sa puissance, exprimĂ© par une seule physionomie ? Les doux sentiments de la vie n’occupaient lĂ  qu’une place secondaire, ils animaient trois cƓurs purs, ceux de Nanon, d’EugĂ©nie et sa mĂšre. Encore, combien d’ignorance dans leur naĂŻvetĂ© ! EugĂ©nie et sa mĂšre ne savaient rien de la fortune de Grandet, elles n’estimaient les choses de la vie qu’à la lueur de leurs pĂąles idĂ©es, et ne prisaient ni ne mĂ©prisaient l’argent, accoutumĂ©es qu’elles Ă©taient Ă  s’en passer. Leurs sentiments, froissĂ©s Ă  leur insu mais vivaces, le secret de leur existence, en faisaient des exceptions curieuses dans cette rĂ©union de gens dont la vie Ă©tait purement matĂ©rielle. Affreuse condition de l’homme ! il n’y a pas un de ses bonheurs qui ne vienne d’une ignorance quelconque. Au moment oĂč madame Grandet gagnait un lot de seize sous, le plus considĂ©rable qui eĂ»t jamais Ă©tĂ© pontĂ© dans cette salle, et que la grande Nanon riait d’aise en voyant madame empochant cette riche somme, un coup de marteau retentit Ă  la porte de la maison, et y fit un si grand tapage que les femmes sautĂšrent sur leurs chaises.
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Honoré de Balzac (Eugénie Grandet)
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— Je te devais soixante francs, te voilĂ  payĂ©, voleur ! dit la Maheude, enragĂ©e parmi les autres. Tu ne me refuseras plus crĂ©dit
 Attends ! attends ! il faut que je t’engraisse encore. De ses dix doigts, elle grattait la terre, elle en prit deux poignĂ©es, dont elle lui emplit la bouche, violemment. — Tiens ! mange donc !
 Tiens ! mange, mange, toi qui nous mangeais ! Les injures redoublĂšrent, pendant que le mort, Ă©tendu sur le dos, regardait, immobile, de ses grands yeux fixes, le ciel immense d’oĂč tombait la nuit. Cette terre, tassĂ©e dans sa bouche, c’était le pain qu’il avait refusĂ©. Et il ne mangerait plus que de ce pain-lĂ , maintenant. Ça ne lui avait guĂšre portĂ© bonheur, d’affamer le pauvre monde. Mais les femmes avaient Ă  tirer de lui d’autres vengeances. Elles tournaient en le flairant, pareilles Ă  des louves. Toutes cherchaient un outrage, une sauvagerie qui les soulageĂąt. On entendit la voix aigre de la BrĂ»lĂ©. — Faut le couper comme un matou ! — Oui, oui ! au chat ! au chat !
 Il en a trop fait, le salaud ! DĂ©jĂ , la Mouquette le dĂ©culottait, tirait le pantalon, tandis que la Levaque soulevait les jambes. Et la BrĂ»lĂ©, de ses mains sĂšches de vieille, Ă©carta les cuisses nues, empoigna cette virilitĂ© morte. Elle tenait tout, arrachant, dans un effort qui tendait sa maigre Ă©chine et faisait craquer ses grands bras. Les peaux molles rĂ©sistaient, elle dut s’y reprendre, elle finit par emporter le lambeau, un paquet de chair velue et sanglante, qu’elle agita, avec un rire de triomphe : — Je l’ai ! je l’ai ! Des voix aiguĂ«s saluĂšrent d’imprĂ©cations l’abominable trophĂ©e. Ah ! bougre, tu n’empliras plus nos filles ! — Oui, c’est fini de te payer sur la bĂȘte, nous n’y passerons plus toutes, Ă  tendre le derriĂšre pour avoir un pain. — Tiens ! je te dois six francs, veux-tu prendre un acompte ? moi, je veux bien, si tu peux encore ! Cette plaisanterie les secoua d’une gaietĂ© terrible. Elles se montraient le lambeau sanglant, comme une bĂȘte mauvaise, dont chacune avait eu Ă  souffrir, et qu’elles venaient d’écraser enfin, qu’elles voyaient lĂ , inerte, en leur pouvoir. Elles crachaient dessus, elles avançaient leurs mĂąchoires, en rĂ©pĂ©tant, dans un furieux Ă©clat de mĂ©pris : — Il ne peut plus ! il ne peut plus !
 Ce n’est plus un homme qu’on va foutre dans la terre
 Va donc pourrir, bon Ă  rien ! La BrĂ»lĂ©, alors, planta tout le paquet au bout de son bĂąton ; et, le portant en l’air, le promenant ainsi qu’un drapeau, elle se lança sur la route, suivie de la dĂ©bandade hurlante des femmes. Des gouttes de sang pleuvaient, cette chair lamentable pendait, comme un dĂ©chet de viande Ă  l’étal d’un boucher. En haut, Ă  la fenĂȘtre, Mme Maigrat ne bougeait toujours pas ; mais sous la derniĂšre lueur du couchant, les dĂ©fauts brouillĂ©s des vitres dĂ©formaient sa face blanche, qui semblait rire. Battue, trahie Ă  chaque heure, les Ă©paules pliĂ©es du matin au soir sur un registre, peut-ĂȘtre riait-elle, quand la bande des femmes galopa, avec la bĂȘte mauvaise, la bĂȘte Ă©crasĂ©e, au bout d’un bĂąton. Cette mutilation affreuse s’était accomplie dans une horreur glacĂ©e.
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Émile Zola (Germinal)
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Quand on me retrouvera, les yeux brĂ»lĂ©s on imaginera que j'ai beaucoup appelĂ© et beaucoup souffert. Mais les Ă©lans, mais les regrets, mais les tendres souffrances, ce sont encore des richesses. Et moi je n'ai plus de richesses. Les fraĂźches jeunes filles, au soir de leur premier amour, connaissent le chagrin et pleurent. Le chagrin est liĂ© aux frĂ©missements de la vie. Et moi je n'ai plus de richesses. Les fraĂźches jeunes filles, au soir de leur premier amour, connaissent le chagrin et pleurent. Le chagrin est liĂ© aux frĂ©missements de la vie. Et moi je n'ai plus de chagrin. Le dĂ©sert, c'est moi. Je ne forme plus de salive, mais je ne forme plus, non plus, les images douces vers lesquelles j'aurais pu gĂ©mir. Le soleil a sĂ©chĂ© en moi la source des larmes. [...] Je regarde PrĂ©vot. Il est frappĂ© du mĂȘme Ă©tonnement que moi, mais il ne comprend pas non plus ce qu'il Ă©prouve. [...] Nous sommes sauvĂ©s, il y a des traces dans le sable !... Ah ! nous avions perdu la piste de l'espĂšce humaine, nous Ă©tions retranchĂ©s d'avec la tribu, nous nous Ă©tions retrouvĂ©s seuls au monde, oubliĂ©s par une migration universelle, et voici que nous dĂ©couvrons, imprimĂ©s dans le sable, les pieds miraculeux de l'homme. [...] Et cependant, nous ne sommes point sauvĂ©s encore. Il ne nous suffit pas d'attendre. Dans quelques heures, on ne pourra plus nous secourir. La marche de la soif, une fois la toux commencĂ©e, est trop rapide. Et notre gorge. Mais je crois en cette caravane, qui se balance quelque part, dans le dĂ©sert. Nous avons donc marchĂ© encore, et tout Ă  coup j'ai entendu le chant du coq. Guillaumet m'avait dit : « Vers la fin, j'entendais des coqs dans les Andes. J'entendais aussi des chemins de fer. » Je me souviens de son rĂ©cit Ă  l'instant mĂȘme oĂč le coq chante et je me dis : « Ce sont mes yeux qui m'ont trompĂ© d'abord. C'est sans doute l'effet de la soif. Mes oreilles ont mieux rĂ©sistĂ©. » Mais PrĂ©vot m'a saisi par le bras : « Vous avez entendu ? - Quoi ? - Le coq ! - Alors... Alors... » Alors, bien sĂ»r, imbĂ©cile, c'est la vie... J'ai eu une derniĂšre hallucination : celle de trois chiens qui se poursuivaient. PrĂ©vot, qui regardait aussi, n'a rien vu. Mais nous sommes deux Ă  tendre les bras vers ce BĂ©douin. Nous sommes deux Ă  user vers lui tout le souffle de nos poitrines. Nous sommes deux Ă  rire de bonheur !... Mais nos voix ne portent pas Ă  trente mĂštres. Nos cordes vocales sont dĂ©jĂ  sĂšches. Nous nous parlions tout bas l'un Ă  l'autre, et nous ne l'avions mĂȘme pas remarquĂ© ! Mais ce BĂ©douin et son chameau, qui viennent de se dĂ©masquer de derriĂšre le tertre, voilĂ  que lentement, lentement, ils s'Ă©loignent. Peut-ĂȘtre cet homme est-il seul. Un dĂ©mon cruel nous l'a montrĂ© et le retire... Et nous ne pourrions plus courir ! Un autre Arabe apparaĂźt de profil sur la dune. Nous hurlons, mais tout bas. Alors, nous agitons les bras et nous avons l'impression de remplir le ciel de signaux immenses. Mais ce BĂ©douin regarde toujours vers la droite... Et voici que, sans hĂąte, il a amorcĂ© un quart de tour. À la seconde mĂȘme oĂč il se prĂ©sentera de face, tout sera accompli. À la seconde mĂȘme oĂč il regardera vers nous, il aura dĂ©jĂ  effacĂ© en nous la soif, la mort et les mirages. Il a amorcĂ© un quart de tour qui, dĂ©jĂ , change le monde. Par un mouvement de son seul buste, par la promenade de son seul regard, il crĂ©e la vie, et il me paraĂźt semblable Ă  un dieu... C'est un miracle... Il marche vers nous sur le sable, comme un dieu sur la mer... L'Arabe nous a simplement regardĂ©s. Il a pressĂ©, des mains, sur nos Ă©paules, et nous lui avons obĂ©i. Nous nous sommes Ă©tendus. Il n'y a plus ici ni races, ni langages, ni divisions. Il y a ce nomade pauvre qui a posĂ© sur nos Ă©paules des mains d'archange.
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Antoine de Saint-Exupéry
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Être aimĂ© d'une jeune fille chaste, lui rĂ©vĂ©ler le premier cet Ă©trange mystĂšre de l'amour, certes, c'est une grande fĂ©licitĂ©, mais c'est la chose du monde la plus simple. S'emparer d'un cƓur qui n'a pas l'habitude des attaques, c'est entrer dans une ville ouverte et sans garnison. L'Ă©ducation, le sentiment des devoirs et la famille sont de trĂšs fortes sentinelles ; mais il n'y a sentinelles si vigilantes que ne trompe une fille de seize ans, Ă  qui, par la voix de l'homme qu'elle aime, la nature donne ses premiers conseils d'amour qui sont d'autant plus ardents qu'ils paraissent plus purs. Plus la jeune fille croit au bien, plus elle s'abandonne facilement, sinon Ă  l'amant, du moins Ă  l'amour, car Ă©tant sans dĂ©fiance, elle est sans force, et se faire aimer d'elle est un triomphe que tout homme de vingt-cinq ans pourra se donner quand il voudra. Et cela est si vrai que voyez comme on entoure les jeunes filles de surveillance et de remparts ! Les couvents n'ont pas de murs assez hauts, les mĂšres de serrures assez fortes, la religion de devoirs assez continus pour renfermer tous ces charmants oiseaux dans leur cage, sur laquelle on ne se donne mĂȘme pas la peine de jeter des fleurs. Aussi comme elles doivent dĂ©sirer ce monde qu'on leur cache, comme elles doivent croire qu'il est tentant, comme elles doivent Ă©couter la premiĂšre voix qui, Ă  travers les barreaux, vient leur en raconter les secrets, et bĂ©nir la main qui lĂšve, la premiĂšre, un coin du voile mystĂ©rieux. Mais ĂȘtre rĂ©ellement aimĂ© d'une courtisane, c'est une victoire bien autrement difficile. Chez elles, le corps a usĂ© l'Ăąme, les sens ont brĂ»lĂ© le cƓur, la dĂ©bauche a cuirassĂ© les sentiments. Les mots qu'on leur dit, elles les savent depuis longtemps ; les moyens que l'on emploie, elles les connaissent, l'amour mĂȘme qu'elles inspirent, elles l'ont vendu. Elles aiment par mĂ©tier et non par entraĂźnement. Elles sont mieux gardĂ©es par leurs calculs qu'une vierge par sa mĂšre et son couvent ; aussi ont-elles inventĂ© le mot caprice pour ces amours sans trafic qu'elles se donnent de temps en temps comme repos, comme excuse, ou comme consolation ; semblables Ă  ces usuriers qui rançonnent mille individus, et qui croient tout racheter en prĂȘtant un jour vingt francs Ă  quelque pauvre diable qui meurt de faim, sans exiger d'intĂ©rĂȘt et sans lui demander de reçu. Puis, quand Dieu permet l'amour Ă  une courtisane, cet amour, qui semble d'abord un pardon, devient presque toujours pour elle un chĂątiment. Il n'y a pas d'absolution sans pĂ©nitence. Quand une crĂ©ature, qui a tout son passĂ© Ă  se reprocher, se sent tout Ă  coup prise d'un amour profond, sincĂšre, irrĂ©sistible, dont elle ne se fĂ»t jamais crue capable ; quand elle a avouĂ© cet amour, comme l'homme aimĂ© ainsi la domine ! Comme il se sent fort avec ce droit cruel de lui dire : « vous ne faites pas plus pour de l'amour que vous n'avez fait pour de l'argent. » Alors elles ne savent quelles preuves donner. Un enfant, raconte la fable, aprĂšs s'ĂȘtre longtemps amusĂ© dans un champ Ă  crier : « au secours ! » Pour dĂ©ranger des travailleurs, fut dĂ©vorĂ© un jour par un ours, sans que ceux qu'il avait trompĂ©s si souvent crussent cette fois aux cris rĂ©els qu'il poussait. Il en est de mĂȘme de ces malheureuses filles, quand elles aiment sĂ©rieusement. Elles ont menti tant de fois qu'on ne veut plus les croire, et elles sont, au milieu de leurs remords, dĂ©vorĂ©es par leur amour. De lĂ , ces grands dĂ©vouements, ces austĂšres retraites dont quelques-unes ont donnĂ© l'exemple. Mais, quand l'homme qui inspire cet amour rĂ©dempteur a l'Ăąme assez gĂ©nĂ©reuse pour l'accepter sans se souvenir du passĂ©, quand il s'y abandonne, quand il aime enfin, comme il est aimĂ©, cet homme Ă©puise d'un coup toutes les Ă©motions terrestres, et aprĂšs cet amour son cƓur sera fermé à tout autre.
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Alexandre Dumas fils (La dame aux camélias)
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Quel pays est le mien? Celui de mon pĂšre? Celui de mon enfance? Ai-je droit Ă  une patrie? Il m'arrive parfois de sortir ma carte d'identitĂ© - non, on dit: "carte nationale d'identitĂ©". En haut et en majuscules: RÉPUBLIQUE FRANÇAISE. Je suis fille de cette rĂ©publique-lĂ . Nom, prĂ©nom(s), nĂ©(e) le, Ă , taille, signes particuliers, domicile, fait le, par, signature du titulaire. Signes particuliers: nĂ©ant. Ils n'ont rien mentionnĂ©. Cela veut-il dire que je ne suis rien? Pas mĂȘme "rebelle" ou "Beur en colĂšre"? [...] Mais Ă  quoi bon se mettre en colĂšre quand personne ne vous Ă©coute?
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Tahar Ben Jelloun (Les Raisins de la galĂšre)
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Les hommes avaient cette odeur et je l'absorbais en touchant les algues, les flotteurs en liĂšge, les nasses. Alors, pas de savon ni de shampoing, c'Ă©taient la mer et le sable bouillant qui s'occupaient de nettoyer le corps. Les cils jaunissaient, les cheveux se dĂ©coloraient en blond, la peau prenait la consistance d'une gousse de caroube. La libertĂ© Ă©tait de s'Ă©paissir, d'avoir une Ă©corce qui grouillait de poils jaunes. L'Ăźle apprenait Ă  ĂȘtre une bĂȘte pour soi, elle donnait au cours la force d'une frontiĂšre. [...] Loin de son rayon, je suis un Ă©tranger. La derniĂšre saison Ă  l’ñge de dix-sept ans environ, avant de me dĂ©tacher de tout, une fille observait mes grains de beautĂ© et y voyait des constellations. Elle appelait ma peau du nom d'un ciel du Sud et un soir, aprĂšs beaucoup de mer, elle l'a embrassĂ©e en disant plus Ă  elle qu'Ă  moi-mĂȘme: "Comme elles sont salĂ©es tes Ă©toiles.
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Erri De Luca (Il piĂč e il meno)
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Des milliers de filles ont monté un escalier, frappé à une porte derriÚre laquelle il y avait une femme dont elles ne savaient rien, à qui elles allaient abandonner leur sexe et leur ventre. Et cette femme, la seule personne alors capable de faire passer le malheur, ouvrait la porte, en tablier et en pantoufles à pois, un torchon à la main : « C'est pour quoi, mademoiselle ? »
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Annie Ernaux
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- J'ai eu une petite fille mais Dieu me l'a déliée. - Es-tu triste ? - Pourquoi ? Le vieux ne manque pas de petits enfants. Ce n'est qu'un soucis de plus. On ne peut ni travailler ni rien faire. Ce n'est qu'un fardeau. Cette réponse avait paru monstrueuse à Daria, de la part de cette jeune femme au bon et joli visage. Mais elle y trouvait une part de vérité.
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Tolstoi Lev Nikolaevich (Anna Karenina)
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laisse au juge le droit d'infliger aux coupables l'une de ces trois peines: l'amende, le fouet ou le mariage; et s'il en faut croire les registres des anciens tribunaux de New-Haven, les poursuites de cette nature n'Ă©taient pas rares; on trouve, Ă  la date du 1er mai 1660, un jugement portant amende et rĂ©primande contre une jeune fille qu'on accusait d'avoir prononcĂ© quelques paroles indiscrĂštes et de s'ĂȘtre laissĂ© donner un baiser. Le code de 1650 abonde en mesures prĂ©ventives. La paresse et l'ivrognerie y sont sĂ©vĂšrement punies.
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Alexis de Tocqueville (De La DĂ©mocratie En AmĂ©rique (INCLUANT TOUS LES TOMES, ANNOTÉ D’UNE BIOGRAPHIE))
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Adam passa la main dans ses cheveux ras. Il sentit qu'en faisant cela, il ressemblait Ă  un AmĂ©ricain. 'Vous savez quoi?' dit-il; 'vous savez quoi? Nous passons notre temps Ă  faire de la saloperie de cinĂ©ma. Du cinĂ©ma, oui. Du théùtre aussi, et du roman psychologique. Nous n’avons plus grand-chose de simple, nous sommes des cafards, des demi-portions. De vieilles loques. On dirait que nous sommes nĂ©s sous la plume d’un Ă©crivain des annĂ©es trente, prĂ©cieux, beaux, raffinĂ©s, pleins de culture, pleins de cette saloperie de culture. Ça me colle dans les dos comme un manteau mouillĂ©. Ça me colle partout.' 'Eh - qu'est-ce qui est simple, Ă  ce compte-lĂ ?' intervint, assez mal Ă  propos, l'Ă©tudiant Ă  lunettes. 'Comment, qu'est-ce qui est simple? Vous ne le savez pas? Vous ne vous en doutez donc pas quand mĂȘme un peu, vous?' Adam eut un geste vers sa poche pour prendre le paquet de cigarettes, mais, nerveusement, sa main s'arrĂȘta. 'Vous ne la voyez donc pas, cette vie, cette putain de vie, autour de vous? Vous ne voyez pas que les gens vivent, qu'ils vivent, qu'ils mangent, etc? Qu'ils sont heureux? Vous ne voyez pas que celui qui a Ă©crit, "la terre est bleue comme une orange" est un fou, ou un imbĂ©cile? - Mais non , vous vous dites, c'est un gĂ©nie, il a disloquĂ© la rĂ©alitĂ© en deux mots. Ça dĂ©colle de la rĂ©alitĂ©. C'est un charme infantile. Pas de maturitĂ©. Tout ce que vous voudrez. Mais moi, j'ai besoin de systĂšmes, ou alors je deviens fou. Ou bien la terre est orange, ou bien l'orange est bleue. Mais dans le systĂšme qui consiste Ă  se servir de la parole, la terre est bleu et les oranges sont orange. Je suis arrivĂ© Ă  un point oĂč je ne peux plus souffrir d'incartades. Vous comprenez, j'ai trop de mal Ă  trouver la rĂ©alitĂ©. Je manque d'humour? Parce que d'aprĂšs vous il faut de l'humour pour comprendre ça? Vous savez ce que je dis? Je manque si peu d'humour que je suis allĂ© beaucoup plus loin que vous. Et voilĂ . J'en reviens ruinĂ©. Mon humour, Ă  moi, il Ă©tait dans l'indicible. Il Ă©tait cachĂ© et je ne pouvais le dire. Et comme je ne pouvais le mettre en mots, il Ă©tait beaucoup plus Ă©norme que le vĂŽtre. Hein. En fait il n'avait pas de dimensions. Vous savez. Moi je fais tout comme ça. La terre est bleue comme une orange, mais le ciel est nu comme une pendule, l'eau rouge comme un grĂȘlon. Et mĂȘme mieux: le ciel colĂ©optĂšre inonde les bractĂ©es. Vouloir dormir. Cigarette cigare galvaude les Ăąmes. 11Ăš. 887. A, B, C, D, E, F, G, H, I, J, K, L, M, N, O, P, Q, R, S, T, U, V, W, X, Y, Z. et Cie.' 'Attendez, attendez un moment, je -' commença la jeune fille. Adam continua: 'Je voudrais arrĂȘter ce jeu stupide. Si vous saviez comme je voudrais. Je suis Ă©crasĂ©, bientĂŽt presque Ă©crasĂ©..." dit-il, la voix non pas plus faible, mais plus impersonnelle.
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J.M.G. Le Clézio (Le Proces-Verbal (Collection Folio) (French Edition) by Jean-Marie Gustave Le Clezio(1973-03-16))
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The second we connect, a tidal wave of awareness crashes into me. That’s when I see it, fucking feel it, and I’m not the only one. A heartbeat later, Delphine confirms it with a French whispered warning. “Elle est trop belle. Trop intelligente. Mais trop jeune. Cette fille sera ta perte . . .” She is too beautiful. Too smart. But too young. This girl will be your undoing . . .
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Kate Stewart (One Last Rainy Day: The Legacy of a Prince (Ravenhood Legacy, #1))
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Elle est trop belle. Trop intelligente. Mais trop jeune. Cette fille sera ta perte
” She is too beautiful. Too smart. But too young. This girl will be your undoing.
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Kate Stewart (Flock (The Ravenhood, #1))
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Elle est trop belle. Trop intelligente. Mais trop jeune. Cette fille sera ta perte . . .” She is too beautiful. Too smart. But too young. This girl will be your undoing . .
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Kate Stewart (One Last Rainy Day: The Legacy of a Prince (Ravenhood Legacy, #1))
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« J'Ă©tais parti sans manteau, avec ce sac et rien d'autre, inconsolable. J'avais abandonnĂ© mon vĂ©lo dans l'herbe pour quitter les routes, oublier cette fille, et rejoindre le monde sauvage. (
) Parfois, je sentais ma tristesse s'Ă©puiser, comme si le souvenir de la fille peinait Ă  me suivre dans cette jungle, et le bruit doux de sa respiration s'Ă©loignait derriĂšre moi. »
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Timothée de Fombelle (Le Livre de Perle)
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Roy, vous ne comprenez pas. Je n’ai plus rien Ă  dire Ă  cette fille. — Vous ĂȘtes terrible, Goldman : vous ĂȘtes jeune, vous ĂȘtes riche, vous ĂȘtes beau, vous ĂȘtes un Ă©crivain cĂ©lĂšbre et que faites-vous ? Vous vous plaignez. Vous gĂ©missez ! Cessez de jouer les pleureuses grecques, voulez-vous ?
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Joël Dicker (Le Livre des Baltimore (French Edition))
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— Je ne veux pas remettre ça sur le tapis, mais MĂ©dĂ©e a vraiment dit « agape » cette fois-ci, dĂ©clare Deimos. Ella affiche un large sourire amusĂ©. — Amour, on en a dĂ©jĂ  discutĂ©, MĂ©dĂ©e n’a que cinq mois. — Et alors ? Elle est en avance sur tout mortel de son Ăąge, bien sĂ»r. C’est notre fille. — Oui, tu es exceptionnelle ma puce, mais papa dit n’importe quoi. MĂ©dĂ©e, elle, gazouille, au comble du bonheur d’avoir ses deux parents penchĂ©s sur elle.
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Liv Stone (Insoumise Méroé (Witch and God, #3))
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Ainsi s’approchait-il du gouffre, aprĂšs avoir Ă©tĂ© tentĂ© par le gouffre, ne sachant plus qu’il en Ă©tait un. Et leur roman, le roman d’AurĂ©lien et de BĂ©rĂ©nice Ă©tait dominĂ© par cette contradiction dont leur premiĂšre entrevue avait portĂ© le signe : la dissemblance entre la BĂ©rĂ©nice qu’il voyait et la BĂ©rĂ©nice que d’autres pouvaient voir, le contraste entre cette enfant spontanĂ©e, gaie, innocente et l’enfer qu’elle portait en elle, la dissonance de BĂ©rĂ©nice et de son ombre. Peut-ĂȘtre Ă©tait-ce lĂ  ce qui expliquait ses deux visages, cette nuit et ce jour qui paraissaient deux femmes diffĂ©rentes. Cette petite fille qui s’amusait d’un rien, cette femme qui ne se contentait de rien. Car BĂ©rĂ©nice avait le goĂ»t de l’absolu.
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Louis Aragon (Aurélien)
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The view of the strange city with its peculiar architecture, such as he had never seen before, filled Napoleon with the rather envious and uneasy curiosity men feel when they see an alien form of life that has no knowledge of them. This city was evidently living with the full force of its own life. By the indefinite signs which, even at a distance, distinguish a living body from a dead one, Napoleon from the Poklonny Hill perceived the throb of life in the town and felt, as it were, the breathing of that great and beautiful body. Every Russian looking at Moscow feels her to be a mother; every foreigner who sees her, even if ignorant of her significance as the mother city, must feel her feminine character, and Napoleon felt it. "Cette ville asiatique aux innombrables eglises, Moscou la sainte. La voila done enfin, cette fameuse ville! Il etait temps," * said he, and dismounting he ordered a plan of Moscow to be spread out before him, and summoned Lelorgne d'Ideville, the interpreter. * "That Asiatic city of the innumerable churches, holy Moscow! Here it is then at last, that famous city. It was high time." "A town captured by the enemy is like a maid who has lost her honor," thought he (he had said so to Tuchkov at Smolensk). From that point of view he gazed at the Oriental beauty he had not seen before. It seemed strange to him that his long-felt wish, which had seemed unattainable, had at last been realized. In the clear morning light he gazed now at the city and now at the plan, considering its details, and the assurance of possessing it agitated and awed him.
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Leo Tolstoy (War and Peace)
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Daniel hocha la tĂȘte et rĂ©flĂ©chit un moment avant de rĂ©pondre : « Moi aussi, je dirais que nous avons affaire Ă  des hommes. Une femme peut piĂ©ger l’enfant, mais en gĂ©nĂ©ral le meurtre proprement dit est une affaire d’hommes – des hommes ayant dĂ©jĂ  une certaine situation mais dĂ©sirant grimper d’autres Ă©chelons : un membre du parlement qui veut devenir ministre ; un ministre assistant qui veut devenir ministre Ă  part entiĂšre ; un directeur adjoint qui veut devenir directeur ; un homme d’affaires qui prĂ©voit d’étendre ses activitĂ©s – ce genre de choses. Mais tu as quand mĂȘme raison : il peut aussi s’agir d’une femme en quĂȘte de pouvoir : est-ce que l’assassin prĂ©sumĂ© de cette petite fille, Ă  Sanoko, n’était pas censĂ© ĂȘtre une femme ? » Nancy eut une idĂ©e. « Est-ce qu’il peut s’agir d’un ministre, d’un directeur ou d’un homme d’affaires dĂ©sirant se maintenir lĂ  oĂč il est – pour Ă©viter de se faire renverser, si l’on peut dire ? — C’est Ă©galement possible, dit Amantle. Tu as raison ; bien sĂ»r, tu as raison. »
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Unity Dow (The Screaming of the Innocent)
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Mais cette fois-ci, j'ai l'impression d'ĂȘtre au bout du voyage et je l'accepte. J'accepte que prenne fin cet impossible dialogue parsemĂ© d'embĂ»ches, de cris, de peines, de lettres, de traversĂ©es de l'Atlantique. J'accepte mĂȘme que ma mĂšre disparaisse sans que je puisse la revoir, la toucher, la cajoler, qu'elle s'en aille dans l'au-delĂ  sans que je sois lĂ  pour l'aider Ă  franchir le pas. J'accepte, mieux, je la remercie. de m'avoir mise au monde, de m'avoir Ă©levĂ©e, du mieux qu'elle pouvoir, de m'avoir forcĂ©e Ă  avoir une profession, pour ĂȘtre autonome, de m'avoir appris Ă  lutter, Ă  ne pas courber ni la tĂȘte ni le dos. Et je pardonne. Dieu que j'ai du mal Ă  pardonner! Je pardonne, pour les baisers et les cĂąlins que je n'ai pas reçus, pour les histoires qu'elle ne m'a pas lues lorsque j'Ă©tais petite fille, pour la robe de mariĂ©e que je n'ai pas choisie avec elle, pour le temps qui lui manquait pour moi, pour l'amour qu'elle ne savait pas me montrer. Je pardonne.
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Nicole Balvay-Haillot
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En avançant dans l’écoute [d’un enregistrement d’une rĂ©union qui s’était tenue chez François] cependant j’ai commencĂ© Ă  faire la grimace. Du haut de mes trente-quatre ans, forte de mes lectures, de mon Ă©criture, baignĂ©e dans l’ùre post #metoo, l’ambiance m’est enfin apparue dans ce qu’elle avait de violent. Cette culture de la vanne bien placĂ©e, des rires gras, des piques incessantes, ne faisait aucune place Ă  un partage sincĂšre d’émotions. L’ironie Ă©tait partout, Ă©puisante. Dans les accents de ma voix j’ai reconnu le contentement, le si pathĂ©tique contentement, que je ressentais Ă  chaque fois que je parvenais avec l’une de mes rĂ©pliques Ă  tirer quelques Ă©clats de rire. J’ai reconnu la fiertĂ© que j’avais d’ĂȘtre cette jeune fille qui se fait sa place au milieu des hommes. Ça m’a frappĂ©, la façon que j’avais de m’occuper, seule, du bien-ĂȘtre de tous, « quelqu’un veut quelque chose Ă  boire ? », de l’avancement du repas, « Vincent, tu peux mettre la table ? ». Oh c’était subtile, ils ne restaient pas tous assis le cul sur leur chaise, sinon ça aurait Ă©tĂ© trop remarquable et je me serais insurgĂ©e, mais c’était en mĂȘme temps tout Ă  fait flagrant. Je ne parle mĂȘme pas des autres fonctions que je ne remplissais, la naĂŻve, la bourgeoise, sans que je ne me prenne jamais au sĂ©rieux, ni que d’autres le fassent Ă  ma place. Pendant que j’écoutais cette version plus jeune de moi-mĂȘme se tordre pour occuper la place qu’elle Ă©tait si avide de se faire, je me suis rendu compte d’une chose Ă©tonnante. Je ressentais pour elle de la pitiĂ©. Mieux : de l’indulgence. Pour la premiĂšre fois, je sentais la domination masculine, non comme quelque chose ayant une existence extĂ©rieure Ă  moi, apprĂ©hendĂ©e seulement par la raison, mais comme quelque chose dont j’avais fait l’expĂ©rience. Le fĂ©minisme m’était entrĂ© dans le corps. Ce qui valait pour ma place Ă  Fakir valait aussi pour ma relation avec François, et dans ce domaine-lĂ  aussi, la duretĂ© avec laquelle je m’étais jugĂ©e moi-mĂȘme a disparu. (p. 85-86)
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Johanna Silva (L'amour et la révolution)
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Tomber menstruĂ©e." Cette expression-lĂ  m'a longtemps titillĂ©e. C'est bizarre, parce que ça me rappelle une expression que ma grand-mĂšre disait souvent : "Tomber, c'est aussi se relever." C'est peut-ĂȘtre parce que j'ai cette idĂ©e-lĂ  en tĂȘte que j'imagine les menstruations comme une course Ă  obstacles. Des fois, on saute une journĂ©e, parfois on vise mal et on coule dans nos culottes, parfois on a chaud... Ça rend la semaine plus facile, de la voir comme un parcours d'athlĂ©tisme. Et puis, c'est drĂŽle, mais Ă  cause de cette image de course, j'ai toujours pensĂ© que les filles Ă©taient de bien meilleures cascadeuses que les garçons.
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GeneviĂšve Morin (Ma premiĂšre fois - Huit nouvelles pour changer les rĂšgles:)
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Le Chant du Cygne et du Corbeau Ils se disaient poĂštes, Ils Ă©taient d'excellents grammairiens, Ils parlaient trĂšs bien avec la bouche, Mais, Ils ne parlaient pas avec le cƓur, Et la princesse Cherchait l'Étoile Alpine, Par le Nord, par le Sud, Par l'Est et par l'Ouest, Mais ils ne l'ont pas trouvĂ©e, Des terres oĂč les hommes, Ont oubliĂ© leur Amour pour la Guerre, Et ont appris Ă  aimer l'or davantage, Plus que l'Amour lui-mĂȘme, Maintenant, ils perdent des guerres et gagnent des AumĂŽnes, Et vendent leur beautĂ© nordique et mĂ©diterranĂ©enne, Pour ĂȘtre aimĂ©s Ă  l'Autel d'Aphrodite, Mais, Aphrodite, Aimait la Guerre et a Ă©pousĂ© le Forgeron boiteux, Qui lui donnait des aumĂŽnes (d'affection) Et de la Rose volĂ©e, De la Fille du Roi de PhĂ©nicie, EmmenĂ©e aux Tropiques, Des Fils de CĂ©sar, Vers les Terres Tropicales, Naquit une ProgĂ©niture d'HadĂšs, Qui abritait l'obscuritĂ© en lui, Mais gardait aussi un amour infini, Et il Regardait tout cela, Et contemplait tant de fois, Le Visage de MĂ©duse, Que son regard transformait en Pierre, Tout ce qu'il ne pouvait pas voir, Et ce qui est restĂ© immobile, A tout dĂ©mĂ©nagĂ©, A dĂ©placĂ© Georgios, Qui Ă©coutait la douce musique, Des Satyres en Carnaval, Et blasphĂ©mait, Se moquait et lançait des pierres sur ceux, Les Bacchantes, Car le vin n'enivrait plus, Il est devenu jus, La musique, comme l'Eau, Doit couler, Car Bacchus de cette terre, En a fait sa Demeure, Et a banni les autres Dieux, Et a dit que dans l'Éden terrestre, Il n'y aurait que l'ivresse et l'indolence, Et tout le monde Ă©tait heureux, Mais, ils ont dĂ©couvert que, MĂȘme dans les Terres Bacchiques, On entend le Triste souffrir, Car dans les FĂȘtes, Il n'y avait pas de joie, C'Ă©taient des bals masquĂ©s, OĂč tout le monde pleurait, Mais les masques montraient de la joie, Et des Miroirs Ă©taient placĂ©s sur les murs, Narcisse, cependant, Refusait de voir son image, Il savait que se noyer de nouveau, Dans sa propre vanitĂ©, RamĂšnerait la Pomme, La pomme d'or, Et les DĂ©esses, Guerroieraient, Et il n'y aurait plus de paix, Dans cette Guerre Constante, Et nous avons Ă©tĂ© faits captifs, De l'ivresse, SurveillĂ©s et pourchassĂ©s, Car, Le Visage du Roi a Ă©tĂ© GardĂ©, GuĂ©ri de la LĂšpre, Mais, Sa maladie Ă©tait l'Amour, L'amour pour ces chrĂ©tiens, Qui ne croyaient plus en Dieu, Des prĂȘtres qui ont perdu la Foi, Des Filles d'Ève qui se sont Ă©touffĂ©es, Avec la pomme, Et des fils d'Adam, Qui dans la caverne la plus profonde d'ÉrĂšbe, Furent liĂ©s, Et voyant l'ombre des lumiĂšres lointaines, Furent aveuglĂ©s, Et mĂȘme si, Comme Argos, Ils avaient cent yeux, Ils n'auraient rien vu, Au-delĂ  de ce que leurs maigres esprits, Et leurs maigres cƓurs, Étaient incapables de ConnaĂźtre.
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ST221
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- Plus on le lit, plus on l'aime, tu as remarquĂ© ? - C'est vrai, dit Clara. C'est parce qu'on se fait Ă  son rythme. Au dĂ©but, on est lĂ , Je comprends pas, cette phrase devrait s'arrĂȘter et elle continue, mais c'est parce qu'on le lit trop vite, c'est une erreur. Il faut prendre son temps, faire des pauses. Maintenant, quand je le lis, j'ai l'impression de l'entendre me parler. - Une vraie proustienne...Et son humour, tu as remarquĂ© comme il est drĂŽle ? - Oui ! C'est trĂšs visuel, on est vraiment dans un film par moments. Quand il descend de son fiacre parce qu'il a vu une fille sur le trottoir et qu'il tombe sur la Verdurin qui croit que c'est pour elle qu'il a accouru. - C'est merveilleux ! Tu vas voir, c'est de plus en plus drĂŽle. Tu as commencĂ© Le cĂŽtĂ© de Guermantes ? - Oui, j'ai lu le dĂ©but que j'ai adorĂ© mais je me suis arrĂȘtĂ©e pour relire Un amour de Swann. Je ne sais pas pourquoi j'ai eu envie. - Ça arrive avec ce grand livre. On Ă©prouve souvent le besoin de revenir en arriĂšre. Sans doute pour ĂȘtre sĂ»r qu'on n'a rien loupĂ©.
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Stéphane Carlier (Clara Reads Proust)
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A l'Ă©poque de la rĂ©volution rĂ©ligieuse qui changea la face de l'Angleterre, sous Henri VIII, presque toutes les communautĂ©s charitables du royaume furent supprimĂ©es, et comme les biens de es communautĂ©s passĂšrent aux nobles et ne furent point partagĂ©s entre les mains du peuple, il s'ensuivit que le nombre de pauvres alors existants resta le mĂȘme, tandis que les moyens de pourvoir Ă  leurs besoins Ă©taient en partie dĂ©truits. Le nombre des pauvres s'accrut donc outre mesure, et Elisabeth, la fille de Henri VIII, frappĂ©e de l'aspect repoussant des misĂšres du peuple, songea Ă  substituer aux aumĂŽnes que la suppression des couvents avait fort rĂ©duites, une subvention annuelle, fournie par les communes. Une loi promulguĂ©e dans la quarante-troisiĂšme annĂ©e de la rĂšgne de cette princesse dispose que dans chaque paroisse des inspecteurs des pauvres seront nommĂ©s; que ces inspecteurs auront le droit de taxer les habitants Ă  l'effet de nourrir les indigents infirmes, et de fournir du travail aux autres. A mesure que le temps avançait dans sa marche, l'Angleterre Ă©tait de plus en plus entraĂźnĂ©e Ă  adopter le principe de la charitĂ© lĂ©gale. Le paupĂ©risme croissait plus rapidement dans la Grande-Bretagne que partout ailleurs.
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Alexis de Tocqueville (Sur le paupérisme)
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Un soupir. Un seul. Long et profond. Il résonne fort dans le silence de cette nuit qui précÚde Noël. Penchés tout contre notre petite fille, Loïc et moi retenons notre souffle pour recueillir le sien. Le dernier. Thaïs vient de mourir. A Dieu petite Thaïs.
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Anne-Dauphine Julliand (Deux petits pas sur le sable mouillé)
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Cela ressemblait moins que jamais Ă  une jungle, ou alors une jungle froide, de bois et de boue, avec des animaux crottĂ©s, et des monstres de mĂ©tal au loin, sous le crachin. Pas le genre qui fait rĂȘver, avec les perroquets et les feuilles vertes et grasses, oĂč on transpire dans une odeur d’humus. Une jungle du pauvre. Ici, il n’y avait pas un arbre, pas une feuille, pas de chaleur. Rien n’avait de couleur. C’était gris. Ça puait la fumĂ©e et les ordures. Et aujourd'hui, c’était silencieux. Cette jungle qui avait Ă©tĂ© un chaos oĂč des milliers de personnes vivaient, mangeaient, parlaient, se battaient, Ă©tait devenue un dĂ©sert, oĂč ils Ă©taient seuls, tous les six.
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Delphine Coulin (Une fille dans la jungle)
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Mon pÚre suppliait du regard; il demandait encore une heur, encore quelques minutes, il avait encore quelque chose à me dire -je demande que ton pardon me soit accordé... AprÚs celui qui possÚde mon ame pourra l'emporter ou il veut, dans ses jardin fleuris, dans ses riviÚres paisibles, ou la jeter dans le cratÚre d'un volcan. mais avant, accorde-moi la grùce de l'oublie. c'est cela le pardon, tu es libre à présent. va-t'en, quitte cette maison maudite, fais des voyages, vis!... vis! ... et ne retourne pas pour voir le désastre que je laisse. oublie et prends le temps de vivre... oublie cette ville... en cette nuit j'ai su que ton déstin serais meilleurs que celui de toutes les femmes de ce pays. je suis lucide, je n'invente rien. je vois ton visage auréollé d'une lumiÚre extraordinaire. tu viens de naitre, cette nuit... tu es une femme... laisse ta beauté te guider. il n'y a plus rien à craindre. la nuit du destin te nome Zahra, enfant de l'éternité tu ees le temps qui se maintient dans le versant du silence... sur le sommet du feu ...parmi les arbres... c'est toi que je vois ma fille c'est toi qui me tend la main Mon pÚre suppliait du regard; il demandait encore une heur, encore quelques minutes, il avait encore quelque chose à me dire -je demande que ton pardon me soit accordé... AprÚs celui qui possÚde mon ame pourra l'emporter ou il veut, dans ses jardin fleuris, dans ses riviÚres paisibles, ou la jeter dans le cratÚre d'un volcan. mais avant, accorde-moi la grùce de l'oublie. c'est cela le pardon, tu es libre à présent. va-t'en, quitte cette maison maudite, fais des voyages, vis!... vis! ... et ne retourne pas pour voir le désastre que je laisse. oublie et prends le temps de vivre... oublie cette ville... en cette nuit j'ai su que ton déstin serais meilleurs que celui de toutes les femmes de ce pays. je suis lucide, je n'invente rien. je vois ton visage auréollé d'une lumiÚre extraordinaire. tu viens de naitre, cette nuit... tu es une femme... laisse ta beauté te guider. il n'y a plus rien à craindre. la nuit du destin te nome Zahra, enfant de l'éternité tu ees le temps qui se maintient dans le versant du silence... sur le sommet du feu ...parmi les arbres... c'est toi que je vois ma fille c'est toi qui me tend la main
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Tahar Ben Jelloun
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Mon pÚre suppliait du regard; il demandait encore une heur, encore quelques minutes, il avait encore quelque chose à me dire -je demande que ton pardon me soit accordé... AprÚs celui qui possÚde mon ame pourra l'emporter ou il veut, dans ses jardin fleuris, dans ses riviÚres paisibles, ou la jeter dans le cratÚre d'un volcan. mais avant, accorde-moi la grùce de l'oublie. c'est cela le pardon, tu es libre à présent. va-t'en, quitte cette maison maudite, fais des voyages, vis!... vis! ... et ne retourne pas pour voir le désastre que je laisse. oublie et prends le temps de vivre... oublie cette ville... en cette nuit j'ai su que ton déstin serais meilleurs que celui de toutes les femmes de ce pays. je suis lucide, je n'invente rien. je vois ton visage auréollé d'une lumiÚre extraordinaire. tu viens de naitre, cette nuit... tu es une femme... laisse ta beauté te guider. il n'y a plus rien à craindre. la nuit du destin te nome Zahra, enfant de l'éternité tu ees le temps qui se maintient dans le versant du silence... sur le sommet du feu ...parmi les arbres... c'est toi que je vois ma fille c'est toi qui me tend la main
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Tahar Ben Jelloun (L'enfant de sable / La nuit sacrée)
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Amy crut opportun de nous expliquer combien elle souffrait de son exil. Ce qui lui manquait le plus ? Le peanut butter, dit-elle sans rire. Chacune de ses phrases commençait par « In Portland  ». Les trois garçons l’écoutaient poliment alors qu’à l’évidence, ils ignoraient sur quelle cĂŽte amĂ©ricaine se situait ce bled et s’en fichaient. Quant Ă  moi, je haĂŻssais l’antiamĂ©ricanisme primaire puis songeai que m’interdire de dĂ©tester cette fille pour ce motif constituerait une forme immonde d’antiamĂ©ricanisme primaire : je me laissai donc aller Ă  une exĂ©cration naturelle.
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Amélie Nothomb (Ni d'Ève ni d'Adam)
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L’hindouisme contient notamment un enseignement eschatologique qui lui est propre, exprimĂ©e dans la doctrine des avĂątaras, et qui est loi d’avoir livrĂ© tous ses secrets. La faiblesse relative de cette forme traditionnelle tient plutĂŽt Ă  l’anachronisme de ses structures, qui est comme la rançon de son excellence primordiale. Son rayonnement est parfois contrariĂ© par les particularitĂ©s d’un symbolisme qui requiert une transposition pour acquĂ©rir sa dimension universelle. Ce n’est certes pas nous qui nierons l’intĂ©rĂȘt que prĂ©sente la « petite fille de neuf ans » et le «dieu au cou de cheval », mais on reconnaĂźtra que ce sont lĂ  des enseignements Ă©tranges que l’on ne peut prĂ©senter comme tels en dehors de leur contexte originel.
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Charles-André Gilis (L'intégrité islamique : Ni intégrisme ni intégration)
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Il nous faut encore expliquer quels liens unissaient Tristana, car tel Ă©tait le nom de la jolie jeune fille, au grand don Lope, seigneur et maĂźtre de ce groupe, qui ne constituait pas Ă  proprement parler une famille. Dans le voisinage, et parmi les rares personnes qui dĂ©barquaient un moment chez don Lope pour faire une visite ou pour espionner, il y avait des versions pour tous les goĂ»ts. On voyait l’emporter tour Ă  tour, sur ce point capital, telle ou telle opinion ; durant un laps de temps de deux ou trois moi on tient pour vĂ©ritĂ© d’Evangile que cette demoiselle Ă©tait la niĂšce de notre personnage, et il se trouva que des voisins qui l’avaient entendu dire « papa », comme les poupĂ©es qui parlent.
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Benito Pérez Galdós (Tristana)
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Je suis cette fille solaire qui court sur le sable tiĂšde de Palombaggia. Je suis le vent qui fait claquer les voiles d'un bateau en partance. La mer infinie de nuages qui donne le vertige derriĂšre le hublot. Je suis un feu de joie qui brĂ»le Ă  la Saint-Jean. Les galets d'Étretat qui roulent sur la plage. Une lanterne vĂ©nitienne rĂ©sistant aux tempĂȘtes. Je suis une comĂšte qui embrase le ciel. Une feuille d'or que les rafales emportent. Un refrain entraĂźnant fredonnĂ© par la foule. Je suis les alizĂ©s qui caressent les eaux. Les vents chauds qui balaient les dunes. Une bouteille Ă  la mer perdue dans l'Atlantique. Je suis l'odeur vanille des vacances Ă  la mer et l'effluve entĂȘtant de la terre mouillĂ©e. Je suis le battement d'ailes du Bleu-nacrĂ© d'Espagne. Le feu follet fugace qui court sur les marais. La poussiĂšre d'une Ă©toile blanche et trop tĂŽt tombĂ©e.
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Guillaume Musso
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Dans les lignĂ©es les plus pures et les plus Ă©levĂ©es du tantrisme, la petite fille de neuf ans est la thĂ©ophanie essentielle. Elle est l'identitĂ© secrĂšte de la Grande DĂ©esse et n'est connue extĂ©rieurement que par son attribut de LalitĂą : "Celle qui joue". Elle manifeste l'autoritĂ© suprĂȘme, absolument inconditionnĂ©e, de l'Essence divine. Elle fait souverainement ce qu'elle veut, sans aucun arbitraire, mais d'une maniĂšre qui Ă©chappe Ă  toute connaissance extĂ©rieure (...) Au sein de l'hindouisme, ces lignĂ©es reprĂ©sentent un aspect informel, ainsi qu'un retour Ă  la puretĂ© de la tradition originelle. A ce point de vue, leur fonction dans la tradition hindoue est analogue Ă  celle de l'islĂąm au sein des autres formes traditionnelles, car ces lignĂ©es comportent une rĂ©actualisation de la spiritualitĂ© primordiale, destinĂ©e Ă  la fin du prĂ©sent cycle. Cette analogie se vĂ©rifie aussi bien pour la doctrine que pour la mĂ©thode, et se reflĂšte mĂȘme dans les sciences cosmologiques. Au sein du tasawwuf, l'aspect doctrinal permettant d'intĂ©grer l'enseignement mĂ©taphysique liĂ© Ă  cette thĂ©ophanie est celui qui concerne la mashĂź'a ou VolontĂ© divine suprĂȘme envisagĂ©e comme "perfection passive" de l'Essence, source de la misĂ©ricorde existenciatrice universelle. La rĂ©alisation initiatique correspondante est celle de la "servitude parfaite" ('ubĂ»da)
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Charles-AndrĂ© Gilis (La petite fille de neuf ans - suivi d’une Ă©tude sur «Le souffre rouge»)
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Un fluide insaisissable coule d'une gĂ©nĂ©ration Ă  l'autre. Lorsque nous dĂ©veloppons nos antennes et apprenons Ă  dĂ©celer partout la trace d'autres passants, d'autres humains vivants ou morts, alors notre façon d'ĂȘtre au monde se dilate et s'agrandit. Je suis le tĂ©moin de la scĂšne suivante : Un ami de longue date, Richard Baker Roshi, hĂ©ritier dharma de Suzuki Roshi, et sa fille de trois ans sont installĂ©s Ă  la table du petit dĂ©jeuner chez nous. Sophie commence avec son couteau Ă  rayer la table. Et grĂące Ă  ce geste qui ne m'as guĂšre enchantĂ©e, voilĂ  que j'assiste Ă  une leçon de transmission. Le pĂšre arrĂȘte avec douceur la petite main. "Halte, Sophie, Ă  qui est cette table ?" Alors la petite fille boudeuse : "Je sais ! A Christiane. - Non, mais avant Christiane !... Elle est ancienne cette table, n'est-ce pas ? D'autres ont dĂ©jeunĂ© lĂ ... - Oui, les parents, les grands-parents, les.... - ... Mais ce n'est pas tout !.... Avant encore ?... Elle a appartenu Ă  l'Ă©bĂ©niste qui en avait acquis le bois. Mais d'oĂč venait-il ce bois ?... Oui, d'un arbre qu'avait abattu le bĂ»cheron... mais l'arbre, Ă  qui appartenait-il ?... A la forĂȘt qui l'a protĂ©gĂ©... Oui... et Ă  la terre qui l'a nourri... Ă  l'air, Ă  la lumiĂšre, Ă  l'univers entier... ! ... Et puis, Sophie, elle appartient Ă  d'autres... la table... Ă  ceux qui ne sont pas encore nĂ©s et qui viendront aprĂšs nous... ici mĂȘme quand nous seront partis et quand nous serons morts." Un cercle aprĂšs l'autre se forme, comme aprĂšs le jet d'une pierre dans un Ă©tang. Et les yeux de Sophie aussi s'agrandissent, se dilatent. L'hommage aux origines. Ainsi commence tout processus d'humanisation. (p. 15-16
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Christiane Singer (N'oublie pas les chevaux écumants du passé)
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C’était aussi pour cette raison que j’avais adorĂ© devenir pĂšre. Avoir un enfant est un antidote Ă  cette nostalgie et Ă  cette fraĂźcheur fanĂ©e. Avoir un enfant vous oblige Ă  vous dĂ©lester d’un passĂ© trop lourd, seule condition pour vous projeter vers demain. Avoir un enfant signifie que son avenir devient plus important que votre passĂ©. Avoir un enfant, c’est ĂȘtre certain que le passĂ© ne triomphera plus jamais sur l’avenir.
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Guillaume Musso (La fille de Brooklyn)
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- J’aidais justement Ghezumi et Kassergh Ă  bĂąter l’hypocras : du vin au miel avec de la cannelle et du gingembre mĂ©langĂ© Ă  du musc, de l’ambre gris, de la cardamome, du poivre long, de la graine de paradis et de la fleur de muscade. On ne trouve cette variĂ©tĂ© qu’à Chaz. - J’ignorais que les sujets de Sahr’Lim consommaient l’hypocras, avoua le hĂ©risson gĂ©ant. - Ha ! Certes non, nous n’en buvons pas ! le dĂ©trompa Dazhirk d’un ton affable. Mais cela se vend bien dans l’empire de Tawag, demandez donc Ă  votre compagne. - Effectivement les gens de notre empire en sont friands, affirma Selamawit, et il arrive aussi que les sujets du royaume de Kambu l’achĂštent quand ils s’approchent de nos frontiĂšres. - C’est pourquoi j’en transporte souvent, cela assure dĂ©jĂ  les frais de caravane. Mais c’est trĂšs dĂ©licat au dĂ©part, confia Dazhirk avec un regard soucieux vers les lĂ©zards gĂ©ants qui acceptaient docilement leur chargement. - Comment cela ? questionna Nyssa. - Il faut soigneusement sangler les lĂ©zards, jeune damoiselle, rĂ©pondit-il aprĂšs un silence pendant lequel il scruta attentivement la jeune fille. Ni trop lĂąche, ni trop serrĂ© avec ces reptiles dont le corps se gonfle une fois chargĂ©. Puis, il faut Ă©quilibrer trĂšs exactement les charges, les envelopper dans une toile Ă©paisse qui les protĂšge de la lumiĂšre et de la chaleur, enfin ficeler correctement le tout. Cela fait, on peut alors accomplir des journĂ©es entiĂšres de voyage sans crainte de semer tout le chargement au long du parcours ou de le renverser, ce qui casserait les rĂ©cipients et nous ferait perdre notre investissement.
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Cyrille Mendes (Les Épieurs d'Ombre)
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J'etais arrete a regarder, dans une exposition d'oeuvres de Rodin, une enorme main de bronze, la ,,Main de Dieu''.La paume en etait a moitie fermee et dans cette paume, extatiques, enlaces, luttaient et se melaient un homme et une femme. Une jeune fille s'approcha et s'arreta a cote de moi.Troublee elle aussi, elle regardait l'inquietant et eternel enlacement de l'homme et de la femme.Elle etait mince, bien habillee, avec d'epais cheveux blonds, un menton fort, des levres etroites.Elle avait quelque chose de decide et de viril.Et moi qui deteste engager des conversations faciles, je ne sais ce qui me poussa.Je me retournai: -A quoi pensez-vous? -Si on pouvait s'echapper! murmura-t-elle avec depit. -Pour aller ou?La main de Dieu est partout.Pas de salut.Vous le regrettez? -Non.Il se peut que l'amour soit la joie la plus intense sur cette terre.C'est possible.Mais maintenant que je vois cette main de bronze, je voudrais m'echapper. -Vous preferez la liberte? -Oui. -Mais si ce n'est que lorsqu'on obeit a la main de bronze qu'on est libres?Si le mot "Dieu" n'avait pas le sens commode que lui donne la masse? Elle me regarda,inquiete.Ses yeux etaient d'un gris metallique, ses levres seches et ameres. -Je ne comprends pas, dit-elle, et elle s'eloigna, comme effrayee. Elle disparut.[...]Oui , je m'etais mal conduit, Zorba avait raison.C'etait un bon pretexte que cette main de bronze, la premiere prise de contact etait reussie, les premieres douces paroles amorcees, et nous aurions pu, sans en prendre conscience ni l'un ni l'autre, noue etreindre et nous unir en toute tranquillite dans la paume de Dieu.Mais moi je m'etais elance brusquement de la terre vers le ciel et la femme effarouchee s'etait enfuie.
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Nikos Kazantzakis
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En rentrant lentement Ă  la maison, Alain observait les jeunes filles qui, toutes, montraient leur nombril dĂ©nudĂ© entre le pantalon ceinturĂ© trĂšs bas et le tee-shirt coupĂ© trĂšs court. Comme si leur pouvoir de sĂ©duction ne se concentrait plus dans leurs cuisses, ni dans leurs fesses, ni dans leurs seins, mais dans ce petit trou rond situĂ© au milieu du corps. Je me rĂ©pĂšte? Je commence ce chapitre par les mĂȘmes mots que j’ai employĂ©s au tout dĂ©but de ce roman? Je le sais. Mais mĂȘme si j’ai dĂ©jĂ  parlĂ© de la passion d’Alain pour l’énigme du nombril, je ne veux pas cacher que cette Ă©nigme le prĂ©occupe toujours, comme vous ĂȘtes vous aussi prĂ©occupes pendant des mois, sinon des annĂ©es, par les mĂȘmes problĂšmes (certainement beaucoup plus nuls que celui qui obsĂšde Alain). En dĂ©ambulant dans les rues, donc, il pensait souvent au nombril, sans gĂȘne de se rĂ©pĂ©ter, et mĂȘme avec une Ă©trange obstination; car le nombril rĂ©veillait en lui un lointain souvenir: le souvenir de sa derniĂšre rencontre avec sa mĂšre.
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Milan Kundera (The Festival of Insignificance)
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VoilĂ  comment commence la division. Selon elles, Bambolina, Ă  cinq ans seulement, devrait dĂ©jĂ  bouger diffĂ©remment, rester bien sage, les yeux baissĂ©s, pour cultiver en elle la demoiselle de demain. Comme au couvent, lois, prisons, histoire Ă©difiĂ©e par les hommes. Mais c'est la femme qui a acceptĂ© de tenir les clefs, gardienne inflexible de la parole de l'homme. Au couvent, Modesta a dĂ©testĂ© ses géÎliĂšres d'une haine d'esclave, haine humiliante mais nĂ©cessaire. Aujourd'hui, c'est avec dĂ©tachement et assurance qu'elle dĂ©fend Bambolina des garçons et des femmes, elle ne tient qu'Ă  elle, en cette enfant elle se dĂ©fend elle-mĂȘme, elle dĂ©fend son passĂ©, la fille qui un jour pourrait naĂźtre d'elle... Tu te souviens, Carlo, tu te souviens, quand je t'ai dit que seule la femme pouvait aider la femme, et que toi, dans ton orgueil d'homme, tu ne comprenais pas? Tu comprends maintenant? Maintenant que tu as une fille, tu comprends? (p.319)
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Goliarda Sapienza
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Ce sont des gosses en Ă©chec scolaire, m'explique-t-il, la mĂšre est seule le plus souvent, certains ont dĂ©jĂ  eu des ennuis avec la police, ils ne veulent pas entendre parler des adultes, ils se retrouvent dans des classes relais, quelque chose comme tes classes amĂ©nagĂ©es des annĂ©es soixante-dix, je suppose. Je prends les caĂŻds, les petits chefs de quinze ou seize ans, je les isole provisoirement du groupe, parce que c'est le groupe qui les tue, toujours, il les empĂȘche des e constituer, je leur colle une camĂ©ra dans les mains et je leur confie un de leurs potes Ă  interviewer, un gars qu'ils choisissent eux-mĂȘmes. Ils font l'interview seuls dans un coin, loin des regards, ils reviennent, et nous visionnons le film tous ensemble, avec le groupe, cette fois. Ça ne rate jamais : l'interviewĂ© joue la comĂ©die habituelle devant l'objectif, et celui qui filme entre dans son jeu. Ils font les mariolles, ils en rajoutent sur leur accent, ils roulent des mĂ©caniques dans leur vocabulaire de quatre sous en gueulant le plus fort possible, comme moi quand j'Ă©tais mĂŽme, ils en font des caisses, comme s'ils s'adressaient au groupe, comme si le seul spectateur possible, c'Ă©tait le groupe, et pendant la projection leurs copains se marrent. Je projette le film une deuxiĂšme, une troisiĂšme, une quatriĂšme fois. Les rires s'espacent, deviennent moins assurĂ©s. L'intervieweur et l'interviewĂ© sentent monter quelque chose de bizarre, qu'ils n'arrivent pas Ă  identifier. À la cinquiĂšme ou Ă  la sixiĂšme projection, une vraie gĂȘne s'installe entre leur public et eux. À la septiĂšme ou Ă  la huitiĂšme (je t'assure, il m'est arrivĂ© de projeter neuf fois le mĂȘme film !), ils ont tous compris, sans que je le leur explique, que ce qui remonte Ă  la surface de ce film, c'est la frime, le ridicule, le faux, leur comĂ©die ordinaire, leurs mimiques de groupe, toutes leurs Ă©chappatoires habituelles, et que ça n'a pas d'intĂ©rĂȘt, zĂ©ro, aucune rĂ©alitĂ©. Quand ils ont atteint ce stade de luciditĂ©, j'arrĂȘte les projections et je les renvoie avec la camĂ©ra refaire l'interview, sans explication supplĂ©mentaire. Cette fois on obtient quelque chose de plus sĂ©rieux, qui a un rapport avec leur vie rĂ©elle ; ils se prĂ©sentent, ils disent leur nom, leur prĂ©nom, ils parlent de leur famille, de leur situation scolaire, il y ades silences, ils cherchent leurs mots, on les voit rĂ©flĂ©chir, celui qui rĂ©pond autant que celui qui questionne, et, petit Ă  petit, on voit apparaĂźtre l'adolescence chez ces adolescents, ils cessent d'ĂȘtre des jeunes quis 'amusent Ă  faire peur, ils redeviennent des garçons et des filles ed leur Ăąge, quinze ans, seize ans, leur adolescence traverse leur apparence, elle s'impose, leurs vĂȘtements, leurs casquettes redeviennent des accessoires, leur gestuelle s'attĂ©nue, instinctivement celui qui filme resserre le cadre, il zoome, c'est leur visage qui compte maintenant, on dirait que l'interviewer Ă©coute le visage de l'autre, et sur ce visage, ce qui apparaĂźt, c'est l'effort de comprendre, comme s'ils s'envisageaient pour la premiĂšre fois tels qu'ils sont : lis font connaissance avec la complexitĂ©. (p. 236-237)
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Daniel Pennac (Chagrin d'école)
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Une image me terrifiait, je le voyais danser avec des femmes d'une quelconque dĂ©lĂ©gation (comme nous, en URSS), j'Ă©tais exclue, toujours la mĂȘme histoire (Et comme j'ai souffert de cela, avec Philippe, ces soirs oĂč il ne rentrait pas, c'Ă©tait donc l'enfer ? Ou bien, ce n'Ă©tait pas pire que maintenant ? Simplement identique ?) Je me souvenais de la chambre de Bordeaux, la dĂ©couverte des draps avec le sang de la virginitĂ© de cette fille (Annie comment ? j'ai oubliĂ©), ma douleur.
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Annie Ernaux (Se perdre (French Edition))
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Les pauvres de ThĂšbes auront froid, cet hiver, CrĂ©on. En apprenant la mort de son fils, la reine a posĂ© ses aiguilles, sagement, aprĂšs avoir terminĂ© son rang, posĂ©ment, comme tout ce qu'elle fait, un peu plus tranquillement peut-ĂȘtre que d'habitude. Et puis elle est passĂ©e dans sa chambre, sa chambre Ă  l'odeur de lavande, aux petits napperons brodĂ©s et aux cadres de peluche, pour s'y couper la gorge, CrĂ©on. Elle est Ă©tendue maintenant sur un des petits lits jumeaux dĂ©modĂ©s, Ă  la mĂȘme place oĂč tu l'as vue jeune fille un soir, et avec le mĂȘme sourire, Ă  peine un peu plus triste. Et s'il n'y avait pas cette large tache rouge sur les linges autour de son cou, on pourrait croire qu'elle dort.
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Anouilh, Jean
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Ado, j'ai passĂ© plus de temps Ă  rĂȘver ma vie qu'Ă  la vivre. J'aurais changĂ© de place avec n'importe qui. J'aurais tout donnĂ© pour juster arrĂȘter d'ĂȘtre moi. D'ĂȘtre cette fille-lĂ .
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Laurence Beaudoin-Masse (Rentrer son ventre et sourire)
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Ah ! c’était beau, je vous jure, cette fille comme un gros fruit, et ce sein aimable et chariteux, et ce tĂ©tĂ© goulu.
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Jean Giono (Un de Baumugnes (Les Cahiers Rouges) (French Edition))
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Cette petite fille n’avait de mot que le prĂ©nom de sa maĂźtresse qu’elle a eu en maternelle pendant deux ans en CP la nommant encore et toujours quand on lui demande qui est ta maĂźtresse l’institution dĂ©cide de la faire retourner en maternelle quelques heures par jour la maĂźtresse est toujours lĂ  la maĂźtresse vit trĂšs mal tombe malade elle adore cette petite fille elle pleure son abandon elle pleure chaque jour quand Ă  la sortie de l’école la petite fille lui saute dans les bras et la serre tellement fort elle dit non Ă  l’institution on lui reproche son manque de travail d'Ă©quipe ça dĂ©gĂ©nĂšre dans sa tĂȘte elle comprend qu’on lui demande de pallier toutes les incompĂ©tences et dĂ©faillances elle est coincĂ©e on lui parle de professionnalisme de laisser ses Ă©motions de cĂŽtĂ© quand pendant deux ans tout le monde semblait ravi que la maĂźtresse sorte des cadres affectifs donne Ă  la petite fille ce qu'elle ne trouvait nulle part d'autre tout le monde semblait content d'avoir la paix de cette petite fille comprise au moins par une personne la maĂźtresse c'est pour ça qu'elle dĂ©cide de changer de mĂ©tier (p. 50)
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Aline Recoura (La cloche a sonné)
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Le jour de NoĂ«l, je passais par le jardin de l’IcĂŽne. Silence et sentiers blancs, sinueux, derriĂšre des arbres sombres
 Devant moi, la longue façade blanche et pittoresque, de l’école du centre. À la fenĂȘtre du milieu, une petite fille, en robe sombre, la tĂȘte appuyĂ©e contre la vitre, regardait
 VoilĂ  une gamine privĂ©e d’enfance
 Je m’en allai, les yeux baissĂ©s, emportant avec moi cette scĂšne simple et sympathique. Il est Ă©tonnant de voir combien d’énergie on perd Ă  la recherche d’un sujet d’écriture. C’est surtout avec les peintres que je ne peux pas ĂȘtre d’accord. Le beau, le naĂŻf, le sympathique : partout. Partout oĂč l’on tourne les regards, de l’ombre, de la lumiĂšre, des formes vibrantes de charme
 Grigorescu*, tout l’a Ă©mu. VoilĂ  un poĂšte. À partir de ses toiles, d’une Ă©loquence surprenante, on peut reconstituer toute sa vie, notant exactement ce qu’il a ressenti sur tous les sentiers et dans toutes les petites villes oĂč il s’est arrĂȘtĂ© pour quelques jours, pour quelques heures. Il y a une affinitĂ© si grande entre cette scĂšne et le maĂźtre qu’elle commence Ă  me paraĂźtre non pas telle que je l’ai vue, mais telle qu’il l’aurait saisie dans le cadre, douce, poĂ©tique, dans une lumiĂšre claire et tremblante. (traduction de Dolores Toma * il s’agit de Nicolae Grigorescu, le peintre)
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Barbu Ștefănescu Delavrancea (Hagi-Tudose. Nuvele ßi schiĆŁe)
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L'irrĂ©vĂ©rence des jeunes filles devrait ĂȘtre l'objet de toutes nos attentions, elle devrait ĂȘtre archivĂ©e et transmise. Il faudrait les chĂ©rir, ces trop courtes annĂ©es durant lesquelles les jeunes filles ignorent la prudence, le respect et le remords.
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Lola Lafon (Quand tu écouteras cette chanson)