Avec Toi Quotes

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Si un ennemi est plus fort que toi, deviens son ami. Parle avec lui. Réfléchis. Comprends-le. Et quand le temps est venu, frappe.
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Pierre Bottero (Les Tentacules du mal (Les Mondes d'Ewilan, #3))
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Je dis : pourquoi moi ? Il dit  : parce tu n'es pas du tout comme les autres, parce qu'on ne voit que toi sans que tu t'en rendes compte. Il ajoute cette phrase, pour moi inoubliable  : parce que tu partiras et que nous resterons.
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Philippe Besson (« ArrĂȘte avec tes mensonges »)
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On s'ennuie de tout, mon ange, c'est une loi de la nature; ce n'est pas ma faute. Si donc, je m'ennuie aujourd'hui d'une aventure qui m'a occupĂ© entiĂšrement depuis quatre mortels mois, ce n'est pas ma faute. Si, par exemple, j'ai eu juste autant d'amour que toi de vertu, et c'est surement beaucoup dire, il n'est pas Ă©tonnant que l'un ait fini en mĂȘme temps que l'autre. Ce n'est pas ma faute. Il suit de lĂ , que depuis quelque temps je t'ai trompĂ©e: mais aussi ton impitoyable tendresse m'y forçait en quelque sorte! Ce n'est pas ma faute. Aujourd'hui, une femme que j'aime Ă©perdument exige que je te sacrifie. Ce n'est pas ma faute. Je sens bien que voilĂ  une belle occasion de crier au parjure: mais si la Nature n'a accordĂ© aux hommes que la constance, tandis qu'elle donnait aux femmes l'obstination, ce n'est pas ma faute. Crois-moi, choisis un autre amant, comme j'ai fait une maĂźtresse. Ce conseil est bon, trĂšs bon; si tu le trouve mauvais, ce n'est pas ma faute. Adieu, mon ange, je t'ai prise avec plaisir, je te quitte sans regrets: je te reviendrai peut-ĂȘtre. Ainsi va le monde. Ce n'est pas ma faute.
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Pierre Choderlos de Laclos (Les liaisons dangereuses)
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- CYRANO, regardant Christian : Si j'avais Pour exprimer mon Ăąme un pareil interprĂšte ! - CHRISTIAN, avec dĂ©sespoir : Il me faudrait de l'Ă©loquence ! - CYRANO, brusquement : Je t'en prĂȘte ! Toi, du charme physique et vainqueur, prĂȘte-m'en : Et faisons Ă  nous deux un hĂ©ros de roman !
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Edmond Rostand (Cyrano de Bergerac)
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Simplement te dire que, plusieurs fois, j'aurais aimĂ© ĂȘtre un personnage de fiction. Parce que dans un roman ou dans un film, le hĂ©ros aurait Ă©tĂ© moins maladroit pour faire comprendre Ă  l'hĂ©roĂŻne qu'elle lui plaisait vraiment, qu'il aimait parler avec elle et qu'il Ă©prouvait quelque chose de spĂ©cial lorsqu'il la regardait. Un mĂ©lange de douceur, de douleur et d'intensitĂ©. Une complicitĂ© troublante, une intimitĂ© bouleversante. Quelque chose de rare, qu'il n'avait jamais ressenti avant. Quelque chose dont il ne soupçonnait mĂȘme pas l'existence.
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Guillaume Musso (Que serais-je sans toi?)
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Te montrer à l'univers, le temps d'un éclair, puis m'enfermer avec toi, seul, et te regarder pendant l'éternité.
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René Barjavel
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À une passante La rue assourdissante autour de moi hurlait.‹ Longue, mince, en grand deuil, douleur majestueuse,‹ Une femme passa, d'une main fastueuse‹ Soulevant, balançant le feston et l'ourlet; Agile et noble, avec sa jambe de statue.‹ Moi, je buvais, crispĂ© comme un extravagant,‹ Dans son oeil, ciel livide oĂč germe l'ouragan,‹ La douceur qui fascine et le plaisir qui tue. Un Ă©clair . . . puis la nuit! — Fugitive beautĂ© ‹ Dont le regard m'a fait soudainement renaĂźtre,‹ Ne te verrai-je plus que dans l'Ă©ternitĂ©? Ailleurs, bien loin d'ici! trop tard! jamais peut-ĂȘtre!‹ Car j'ignore oĂč tu fuis, tu ne sais oĂč je vais,‹ Ô toi que j'eusse aimĂ©e, ĂŽ toi qui le savais!
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Charles Baudelaire (Les Fleurs du Mal)
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Une Ă©criture qui ne fait pas rĂȘver, n'est pas une Ă©criture. Toi par example, avec tes mots, tu nous balances dans une vague de nuages bleus, roses et surtout violets.
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ÙˆŰ§ŰłÙŠÙ†ÙŠ Ű§Ù„ŰŁŰč۱ۏ (Ű·ÙˆÙ‚ Ű§Ù„ÙŠŰ§ŰłÙ…ÙŠÙ†)
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Personne n'abandonnera personne. Si tu restes, je reste avec toi.
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Richard Adams (Watership Down (Watership Down, #1))
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- De toute ma vie, je ne me suis jamais sentie aussi bien. Et toi ? - Moi ? - Step l'embrasse trÚs fort. Super super bien. - Au point de pouvoir toucher le ciel avec un doigt ? - Non, pas à ce point. - Comment ça pas à ce point ? - Beaucoup plus. Au moins trois mÚtres au-dessus du ciel.
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Federico Moccia (Tre metri sopra il cielo)
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A qui Ă©cris-tu? -A toi. En fait, je ne t'Ă©cris pas vraiment, j'Ă©cris ce que j'ai envie de faire avec toi... Il y avait des feuilles partout. Autour d'elle, Ă  ses pieds, sur le lit. J'en ai pris une au hasard: "...Pique-niquer, faire la sieste au bord d'une riviĂšre, manger des pĂȘches, des crevettes, des croissants, du riz gluant, nager, danser, m'acheter des chaussures, de la lingerie, du parfum, lire le journal, lĂ©cher les vitrines, prendre le mĂ©tro, surveiller l'heure, te pousser quand tu prends toute la place, Ă©tendre le linge, aller Ă  l'OpĂ©ra, faire des barbecues, rĂąler parce que tu as oubliĂ© le charbon, me laver les dents en mĂȘme temps que toi, t'acheter des caleçons, tondre la pelouse, lire le journal par-dessus ton Ă©paule, t'empĂȘcher de manger trop de cacahuĂštes, visiter les caves de la Loire, et celles de la Hunter Valley, faire l'idiote, jacasser, cueillir des mĂ»res, cuisiner, jardiner, te rĂ©veiller encore parce que tu ronfles, aller au zoo, aux puces, Ă  Paris, Ă  Londres, te chanter des chansons, arrĂȘter de fumer, te demander de me couper les ongles, acheter de la vaisselle, des bĂȘtises, des choses qui ne servent Ă  rien, manger des glaces, regarder les gens, te battre aux Ă©checs, Ă©couter du jazz, du reggae, danser le mambo et le cha-cha-cha, m'ennuyer, faire des caprices, bouder, rire, t'entortiller autour de mon petit doigt, chercher une maison avec vue sur les vaches, remplir d'indĂ©cents Caddie, repeindre un plafond, coudre des rideaux, rester des heures Ă  table Ă  discuter avec des gens intĂ©ressants, te tenir par la barbichette, te couper les cheveux, enlever les mauvaises herbes, laver la voiture, voir la mer, t'appeler encore, te dire des mots crus, apprendre Ă  tricoter, te tricoter une Ă©charpe, dĂ©faire cette horreur, recueillir des chats, des chiens, des perroquets, des Ă©lĂ©phants, louer des bicyclettes, ne pas s'en servir, rester dans un hamac, boire des margaritas Ă  l'ombre, tricher, apprendre Ă  me servir d'un fer Ă  repasser, jeter le fer Ă  repasser par la fenĂȘtre, chanter sous la pluie, fuire les touristes, m'enivrer, te dire toute la vĂ©ritĂ©, me souvenir que toute vĂ©ritĂ© n'est pas bonne Ă  dire, t'Ă©couter, te donner la main, rĂ©cupĂ©rer mon fer Ă  repasser, Ă©couter les paroles des chansons, mettre le rĂ©veil, oublier nos valises, m'arrĂȘter de courir, descendre les poubelles, te demander si tu m'aimes toujours, discuter avec la voisine, te raconter mon enfance, faire des mouillettes, des Ă©tiquettes pour les pots de confiture..." Et ça continuais comme ça pendant des pages et des pages...
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Anna Gavalda (Someone I Loved (Je l'aimais))
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N'attache de prix qu'aux trésors que tu pourras emporter avec toi dans le paradis.
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Saadi (ŰšÙˆŰłŰȘŰ§Ù† ŰłŰčŰŻÛŒ)
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ce qui convainc de la nécessité de la vie future, ce ne sont pas les raisonnements mais ceci : tu marches dans la vie la main dans la main avec un homme, et tout à coup, cet homme disparaßt là-bas dans le néant, et toi tu restes devant cet abßme et tu y plonges ton regard (Guerre et Paix, livre deuxiÚme, 2iÚme partie, ch. XII)
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Leo Tolstoy
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Le peuple est un troupeau imbécile, tantÎt stupidement patient et tantÎt férocement révolté. On lui dit : «Amuse-toi.» Il s'amuse. On lui dit : «Va te battre avec le voisin.» Il va se battre. On lui dit : «Vote pour l'Empereur.» Il vote pour l'Empereur. Puis, on lui dit : «Vote pour la République.» Et il vote pour la République.
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Guy de Maupassant (The Horla)
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Je ne peux plus rien d'autre. Je ne les entends plus, tu sais. C'est sans doute qu'ils en ont fini avec moi. Fini: l'affaire est classĂ©e, je ne suis plus rien sur terre, mĂȘme plus un lĂąche. InĂšs, nous voilĂ  seuls: il n'y a plus que vous deux pour penser Ă  moi. Elle ne compte pas. Mais toi, toi qui me hais, si tu me crois, tu me sauves.
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Jean-Paul Sartre (No Exit)
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De tous les avions dans le monde entier, il fallait marcher dans la mienne. Vous ne saurez jamais combien j'ai besoin de toi. Je veux que tu restes ici, avec moi, pour toujours. Je pense que je suis tombé en amour avec toi, bébé.
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Dani Lovell (Sexy Berkeley (Sexy, #1))
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Tu ne recevras point de signe car la marque de la divinitĂ© dont tu dĂ©sires un signe c'est le silence mĂȘme. Et les pierre ne savent rien du temple qu'elles composent et n'en peuvent rien savoir. Ni le morceau d'Ă©corce, de l'arbre qu'il compose avec d'autres. Ni l'arbre lui-mĂȘme, ou telle demeure, du domaine qu'ils composent avec d'autres. Ni toi de Dieu.
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Antoine de Saint-Exupéry (Citadelle)
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Les jours passent, la nuit reste. Maintenant, tu me manques. Des fois c'est tes bras, des fois c'est tes pas dont je crois reconnaĂźtre le bruit. La plupart du temps, c'est toi en entier, avec ta voix et tes petites façons d'ĂȘtre ma mĂšre.
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Mathias Malzieu (Maintenant qu'il fait tout le temps nuit sur toi)
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Les hommes de chez toi, dit le petit prince, cultivent cinq mille roses dans un mĂȘme jardin... et ils n'y trouvent pas ce qu'ils cherchent... — Ils ne le trouvent pas, rĂ©pondis-je... — Et cependant ce qu'ils cherchent pourrait ĂȘtre trouvĂ© dans une seule rose ou un peu d'eau... — Bien sĂ»r, rĂ©pondis-je. Et le petit prince ajouta : — Mais les yeux sont aveugles. Il faut chercher avec le cƓur.
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Antoine de Saint-Exupéry (The Little Prince)
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Dis-moi, rose, d'oĂč vient qu'en toi-mĂȘme enclose, ta lente essence impose Ă  cet espace en prose tous ces transports aĂ©rien? Combien de fois cet air prĂ©tend que les choses le trouent, ou, avec une moue, il se montre amer. Tandis qu'autour de ta chair, rose, il fait la roue.
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Rainer Maria Rilke (The Complete French Poems of Rainer Maria Rilke)
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Un époux, c'est quelqu'un qui travaille au jardin avec toi et qui te réchauffe la nuit dans le lit conjugal. Un homme qui s'inquiÚte pour toi quand personne d'autre n'a remarqué que tu n'allais pas bien. Quelqu'un qui te tient la main quand tu es malade ou aux portes de la mort.
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David Farland (Wizardborn (Runelords, #3))
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Supprime donc en toi toute aversion pour ce qui ne dĂ©pend pas de nous et, cette aversion, reporte-la sur ce qui dĂ©pend de nous et n’est pas en accord avec la nature. Quant au dĂ©sir, pour le moment, supprime-le complĂštement. Car si tu dĂ©sires une chose qui ne dĂ©pend pas de nous, tu ne pourras qu’échouer, sans compter que tu te mettras dans l’impossibilitĂ© d’atteindre ce qui est Ă  notre portĂ©e et qu’il est plus sage de dĂ©sirer. Borne-toi Ă  suivre tes impulsions, tes rĂ©pulsions, mais fais-le avec lĂ©gĂšretĂ©, de façon non systĂ©matique et sans effort excessif.
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Epictetus (The Discourses)
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Je ne te veux pas dans l’ autre chambre,” I repeat. “Restez avec moi.” Stay with me. Her breasts brush my chest, the pad of her index finger tracing the contour of my upper lip. “You have a beautiful mouth.” “Toi aussi.” So do you. I feel my neck bow. Head bent down. Shoulders sag, body relaxed. “Je te veux plus que n’importe quoi que j’avais voulu dans ma vie.” I want you more than anything I’ve wanted in my entire fucking life.
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Sara Ney (The Learning Hours (How to Date a Douchebag, #3))
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Alors voilĂ , nous y sommes. Tu es gravĂ©e dans mon coeur, Clark. Tu l'as Ă©tĂ© dĂšs le premier jour oĂč tu es arrivĂ©e avec tes fringues Ă  la con, tes blagues moisies et ton incapacitĂ© absolue Ă  dissimuler ce que tu ressens. Tu as changĂ© ma vie infiniment plus que cet argent ne pourra changer la tienne.
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Jojo Moyes
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Représente-toi lŽinconscient comme une usine de forces motrices dans laquelle chaque pensée manie un levier lui permettant de mettre en action les énergies qui lui correspondent, créatrices ou destructrices. Le courant dŽénergie sera dŽautant plus soutenu que la pensée est répétée avec persistance.
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K.O. Schmidt (Le Hasard n'existe pas (French Edition))
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- DĂ©gage je t'ai dit ! - Je te fais une contre-proposition, lança Ellana que le poing brandi du barbu ne paraissait pas impressionner le moins du monde. Tu quittes l'auberge maintenant, sans bruit, avec la promesse de ne plus jamais y remettre les pieds, et je ne te casse pas en mille morceaux. Le colosse ouvrit la bouche pour un cri ou peut-ĂȘtre un rire, mais la voix de Jilano le lui vola. - C'est un marchĂ© de dupe ! s'Ă©cria-t-il sur un ton plein de verve. - Et pourquoi donc ? fit mine de se fĂącher Ellana. - Parce que mĂȘme si tu tapes fort, tu lui casseras au maximum une douzaine d'os. Allez, vingt parce que c'est toi. On est loin des mille morceaux que tu revendiques. Ellana soupira. - C'est une expression, il ne faut pas la prendre au pied de la lettre. - Sans doute, mais ce monsieur pourrait s'estimer grugĂ©. - TrĂšs bien. VoilĂ  ma contre-proposition rĂ©actualisĂ©e. Tu quittes l'auberge maintenant, sans bruit, avec la promesse de ne plus jamais y remettre les pieds et je ne te casse pas en douze morceaux. Peut-ĂȘtre vingt parce que c'est moi.
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Pierre Bottero (Ellana, l'Envol (Le Pacte des MarchOmbres, #2))
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Je te rencontre. Je me souviens de toi. Cette ville Ă©tait faite Ă  la taille de l'amour. Tu Ă©tais fait Ă  la taille de mon corps mĂȘme. Qui es-tu ? Tu me tues. J'avais faim. Faim d'infidĂ©litĂ©s, d'adultĂšres, de mensonges et de mourir. Depuis toujours. Je me doutais bien qu'un jour tu me tomberais dessus. Je t'attendais dans une impatience sans borne, calme. DĂ©vore-moi. DĂ©forme-moi Ă  ton image afin qu'aucun autre, aprĂšs toi, ne comprenne plus du tout le pourquoi de tant de dĂ©sir. Nous allons rester seuls, mon amour. La nuit ne va pas finir. Le jour ne se lĂšvera plus sur personne. Jamais. Jamais plus. Enfin. Tu me tues. Tu me fais du bien. Nous pleurerons le jour dĂ©funt avec conscience et bonne volontĂ©. Nous n'aurons plus rien d'autre Ă  faire, plus rien que pleurer le jour dĂ©funt. Du temps passera. Du temps seulement. Et du temps va venir. Du temps viendra. OĂč nous ne saurons plus du tout nommer ce qui nous unira. Le nom s'en effacera peu Ă  peu de notre mĂ©moire. Puis, il disparaĂźtra, tout Ă  fait.
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Marguerite Duras (Hiroshima mon amour)
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- Offre ton identitĂ© au Conseil, jeune apprentie. La voix Ă©tait douce, l’ordre sans appel. - Je m’appelle Ellana Caldin. - Ton Ăąge. Ellana hĂ©sita une fraction de seconde. Elle ignorait son Ăąge exact, se demandait si elle n’avait pas intĂ©rĂȘt Ă  se vieillir. Les apprentis qu’elle avait discernĂ©s dans l’assemblĂ©e Ă©taient tous plus ĂągĂ©s qu’elle, le Conseil ne risquait-il pas de la considĂ©rer comme une enfant ? Les yeux noirs d’Ehrlime fixĂ©s sur elle la dissuadĂšrent de chercher Ă  la tromper. - J’ai quinze ans. Des murmures Ă©tonnĂ©s s’élevĂšrent dans son dos. Imperturbable, Ehrlime poursuivit son interrogatoire. - Offre-nous le nom de ton maĂźtre. - Jilano AlhuĂŻn. Les murmures, qui s’étaient tus, reprirent. Plus marquĂ©s, Ehrlime leva une main pour exiger un silence qu’elle obtint immĂ©diatement. - Jeune Ellana, je vais te poser une sĂ©rie de questions. A ces questions, tu devras rĂ©pondre dans l’instant, sans rĂ©flĂ©chir, en laissant les mots jaillir de toi comme une cascade vive. Les mots sont un cours d’eau, la source est ton Ăąme. C’est en remontant tes mots jusqu’à ton Ăąme que je saurai discerner si tu peux avancer sur la voie des marchombres. Es-tu prĂȘte ? - Oui. Une esquisse de sourire traversa le visage ridĂ© d’Ehrlime. - Qu’y a-t-il au sommet de la montagne ? - Le ciel. - Que dit le loup quand il hurle ? - Joie, force et solitude. - À qui s’adresse-t-il ? - À la lune. - OĂč va la riviĂšre ? L’anxiĂ©tĂ© d’Ellana s’était dissipĂ©e. Les questions d’Ehrlime Ă©taient trop imprĂ©vues, se succĂ©daient trop rapidement pour qu’elle ait d’autre solution qu’y rĂ©pondre ainsi qu’on le lui avait demandĂ©. Impossible de tricher. Cette Ă©vidence se transforma en une onde paisible dans laquelle elle s’immergea, laissant Ehrlime remonter le cours de ses mots jusqu’à son Ăąme, puisque c’était ce qu’elle dĂ©sirait. - Remplir la mer. - À qui la nuit fait-elle peur ? - À ceux qui attendent le jour pour voir. - Combien d’hommes as-tu dĂ©jĂ  tuĂ©s ? - Deux. - Es-tu vent ou nuage ? - Je suis moi. - Es-tu vent ou nuage ? - Vent. - MĂ©ritaient-ils la mort ? - Je l’ignore. - Es-tu ombre ou lumiĂšre ? - Je suis moi. - Es-tu ombre ou lumiĂšre ? - Les deux. - OĂč se trouve la voie du marchombre ? - En moi. Ellana s’exprimait avec aisance, chaque rĂ©ponse jaillissant d’elle naturellement, comme une expiration aprĂšs une inspiration. FluiditĂ©. Le sourire sur le visage d’Ehrlime Ă©tait revenu, plus marquĂ©, et une pointe de jubilation perçait dans sa voix ferme. - Que devient une larme qui se brise ? - Une poussiĂšre d’étoiles. - Que fais-tu devant une riviĂšre que tu ne peux pas traverser ? - Je la traverse. - Que devient une Ă©toile qui meurt ? - Un rĂȘve qui vit. - Offre-moi un mot. - Silence. - Un autre. - Harmonie. - Un dernier. - FluiditĂ©. - L’ours et l’homme se disputent un territoire. Qui a raison ? - Le chat qui les observe. - Marie tes trois mots. - Marchombre.
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Pierre Bottero (Ellana (Le Pacte des MarchOmbres, #1))
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Joseph Voilà c'que c'est, mon vieux Joseph Que d'avoir pris la plus jolie Parmi les filles de Galilée Celle qu'on appelait Marie Tu aurais pu, mon vieux Joseph Prendre Sarah ou Déborah Et rien ne serait arrivé Mais tu as préféré Marie Tu aurais pu, mon vieux Joseph Rester chez toi, tailler ton bois PlutÎt que d'aller t'exiler Et te cacher avec Marie Tu aurais pu, mon vieux Joseph Faire des petits avec Marie Et leur apprendre ton métier Comme ton pÚre te l'avait appris Pourquoi a-t-il fallu, Joseph Que ton enfant, cet innocent Ait eu ces étranges idées Qui ont tant fait pleurer Marie Parfois je pense à toi, Joseph Mon pauvre ami, lorsque l'on rit De toi qui n'avais demandé Qu'à vivre heureux avec Marie
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Georges Moustaki
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Attends-toi à l'inattendu!" Voilà comment je peux concilier ma crainte de catastrophe réelle avec mon espoir, que je maintiens toujours, envers et contre tout.
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Edgar Morin
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J’avais un vide au ventre, comme si tu n’étais dĂ©jĂ  plus lĂ , comme si je devais nager avec toi - fantĂŽme - dans l’élĂ©ment de mon rĂȘve.
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Jacques Abeille (Les Jardins statuaires)
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besoin de toi. Je veux que tu restes ici, avec moi, pour toujours. Je pense que je suis tombé en amour avec toi, bébé.
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Dani Lovell (Sexy Berkeley (Sexy, #1))
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et puis on recommence encore le lendemain avec seulement la mĂȘme rĂšgle que la veille et qui est d'Ă©viter les grandes joies barbares de mĂȘme que les gr-andes douleurs comme un crapaud contourne une pierre sur son chemin. Mais toi, pour que tu vives, il te faut conquĂ©rir chaque jour Ă  nouveau la vie rĂ©tive, la vie qui piafĂźe et qui renĂącle, qui ne veut pas ĂȘtre asservie, dont seul un perpĂ©tuel miracle peut te li^T‱er la criniĂšre sauvage, les flancs humides et battants et les larges naseaux qui fument. — Toi, il faut que ta vie soit un acte d'amour,
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Charles Cros
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Un ami te déçoit ? Il cesse d’ĂȘtre ton ami. Le pays te déçoit ? Il cesse d’ĂȘtre ton pays. Et comme tu as la dĂ©ception facile, tu finiras par te retrouver sans amis, sans patrie. J’aimerais tant que mes paroles aient un quelconque effet sur toi. Qu’elles puissent te persuader de te montrer tolĂ©rant avec ce pays, de l’accepter comme il est. Ce sera toujours un pays de factions, de dĂ©sordre, de passe-droits, de nĂ©potisme, de corruption. Mais c’est aussi le pays de la douceur de vivre, de la chaleur humaine, de la gĂ©nĂ©rositĂ©. Et de tes amis les plus vrais.
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Amin Maalouf (Ű§Ù„ŰȘŰ§ŰŠÙ‡ÙˆÙ†)
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C'Ă©tait la premiĂšre fois que je souffrais de ce sort de n'ĂȘtre pas reconnue de toi, ce sort qu'une vie entiĂšre j'ai subi et avec lequel je m'en vais; inconnue, toujours inconnue Ă  tes yeux
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Stefan Zweig (Letter from an Unknown Woman and Other Stories)
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Elle devait partir, suivre son propre chemin. Grandir. Mais auparavant, elle voulait lui parler. Lui dire. Ces phrases qu'elle avait si souvent Ă©touffĂ©es : « Tu m'as sauvĂ©e, Jilano AlhuĂŻn. Tu m'as tirĂ©e de la nuit, tu m'as offert un toit, une protection, une prĂ©sence. Tu m'as rĂ©conciliĂ©e avec la vie, avec les hommes, avec moi-mĂȘme et, lorsque j'ai Ă©tĂ© guĂ©rie, tu t'es ouvert pour que je puise en toi, pour que je comble mes vides, pour que j'avance. Toujours plus loin. Ce que je sais, ce que je suis, je te le dois. Non, c'est plus que cela. Je te dois tout, Jilano AlhuĂŻn. Tout. » Il lui barra les lĂšvres d'un doigt avant qu'elle ait prononcĂ© le moindre mot. — C'est moi qui te remercie, Ellana. Pour la lumiĂšre et le sens dont tu as parĂ© ma vie. Le reste n'a aucune importance.
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Pierre Bottero (Ellana, l'Envol (Le Pacte des MarchOmbres, #2))
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Ça cesse comme ça a commencĂ©. Je supporte un autre jour avec toi, mais je n'y arriverai plus trĂšs longtemps, on ne peut rester si prĂšs d'une telle magie sans se laisser contaminer, ça fait trop peur
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Alexie Morin (Chien de fusil)
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Je t'aime tellement que je passerais l'éternité à essayer de te trouver, juste pour passer un moment avec toi." (I love you so much that I would spend eternity trying to find you, just to spend a while with you).
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Calia Read (Echoes of Time (Surviving Time #3))
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Je cherchais une Ăąme qui et me ressemblĂąt, et je ne pouvais pas la trouver. Je fouillais tous les recoins de la terre; ma persĂ©vĂ©rance Ă©tait inutile. Cependant, je ne pouvais pas rester seul. Il fallait quelqu’un qui approuvĂąt mon caractĂšre; il fallait quelqu’un qui eĂ»t les mĂȘmes idĂ©es que moi. C’était le matin; le soleil se leva Ă  l’horizon, dans toute sa magnificence, et voilĂ  qu’à mes yeux se lĂšve aussi un jeune homme, dont la prĂ©sence engendrait les fleurs sur son passage. Il s’approcha de moi, et, me tendant la main: "Je suis venu vers toi, toi, qui me cherches. BĂ©nissons ce jour heureux." Mais, moi: "Va-t’en; je ne t’ai pas appelĂ©: je n’ai pas besoin de ton amitiĂ©." C’était le soir; la nuit commençait Ă  Ă©tendre la noirceur de son voile sur la nature. Une belle femme, que je ne faisais que distinguer, Ă©tendait aussi sur moi son influence enchanteresse, et me regardait avec compassion; cependant, elle n’osait me parler. Je dis: "Approche-toi de moi, afin que je distingue nettement les traits de ton visage; car, la lumiĂšre des Ă©toiles n’est pas assez forte, pour les Ă©clairer Ă  cette distance." Alors, avec une dĂ©marche modeste, et les yeux baissĂ©s, elle foula l’herbe du gazon, en se dirigeant de mon cĂŽtĂ©. DĂšs que je la vis: "Je vois que la bontĂ© et la justice ont fait rĂ©sidence dans ton coeur: nous ne pourrions pas vivre ensemble. Maintenant, tu admires ma beautĂ©, qui a bouleversĂ© plus d’une; mais, tĂŽt ou tard, tu te repentirais de m’avoir consacrĂ© ton amour; car, tu ne connais pas mon Ăąme. Non que je te sois jamais infidĂšle: celle qui se livre Ă  moi avec tant d’abandon et de confiance, avec autant de confiance et d’abandon, je me livre Ă  elle; mais, mets-le dans ta tĂȘte, pour ne jamais l’oublier: les loups et les agneaux ne se regardent pas avec des yeux doux." Que me fallait-il donc, Ă  moi, qui rejetais, avec tant de dĂ©goĂ»t, ce qu’il y avait de plus beau dans l’humanitĂ©!
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Comte de Lautréamont (Les Chants de Maldoror)
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Et que faudrait-il faire ? Chercher un protecteur puissant, prendre un patron, Et comme un lierre obscur qui circonvient un tronc Et s'en fait un tuteur en lui lĂ©chant l'Ă©corce, Grimper par ruse au lieu de s'Ă©lever par force ? Non, merci ! DĂ©dier, comme tous ils le font, Des vers aux financiers ? se changer en bouffon Dans l'espoir vil de voir, aux lĂšvres d'un ministre, NaĂźtre un sourire, enfin, qui ne soit pas sinistre ? Non, merci ! DĂ©jeuner, chaque jour, d'un crapaud ? Avoir un ventre usĂ© par la marche ? une peau Qui plus vite, Ă  l'endroit des genoux, devient sale ? ExĂ©cuter des tours de souplesse dorsale ?... Non, merci ! D'une main flatter la chĂšvre au cou Cependant que, de l'autre, on arrose le chou, Et donneur de sĂ©nĂ© par dĂ©sir de rhubarbe, Avoir son encensoir, toujours, dans quelque barbe ? Non, merci ! Se pousser de giron en giron, Devenir un petit grand homme dans un rond, Et naviguer, avec des madrigaux pour rames, Et dans ses voiles des soupirs de vieilles dames ? Non, merci ! Chez le bon Ă©diteur de Sercy Faire Ă©diter ses vers en payant ? Non, merci ! S'aller faire nommer pape par les conciles Que dans des cabarets tiennent des imbĂ©ciles ? Non, merci ! Travailler Ă  se construire un nom Sur un sonnet, au lieu d'en faire d'autres ? Non, Merci ! Ne dĂ©couvrir du talent qu'aux mazettes ? Être terrorisĂ© par de vagues gazettes, Et se dire sans cesse : "Oh ! pourvu que je sois Dans les petits papiers du Mercure François" ?... Non, merci ! Calculer, avoir peur, ĂȘtre blĂȘme, PrĂ©fĂ©rer faire une visite qu'un poĂšme, RĂ©diger des placets, se faire prĂ©senter ? Non, merci ! non, merci ! non, merci ! Mais... chanter, RĂȘver, rire, passer, ĂȘtre seul, ĂȘtre libre, Avoir l'Ɠil qui regarde bien, la voix qui vibre, Mettre, quand il vous plaĂźt, son feutre de travers, Pour un oui, pour un non, se battre, - ou faire un vers ! Travailler sans souci de gloire ou de fortune, À tel voyage, auquel on pense, dans la lune ! N'Ă©crire jamais rien qui de soi ne sortĂźt, Et modeste d'ailleurs, se dire : mon petit, Sois satisfait des fleurs, des fruits, mĂȘme des feuilles, Si c'est dans ton jardin Ă  toi que tu les cueilles ! Puis, s'il advient d'un peu triompher, par hasard, Ne pas ĂȘtre obligĂ© d'en rien rendre Ă  CĂ©sar, Vis-Ă -vis de soi-mĂȘme en garder le mĂ©rite, Bref, dĂ©daignant d'ĂȘtre le lierre parasite, Lors mĂȘme qu'on n'est pas le chĂȘne ou le tilleul, Ne pas monter bien haut, peut-ĂȘtre, mais tout seul !
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Edmond Rostand (Cyrano de Bergerac)
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PoĂ©tise, poĂ©tise, fais-toi le grand cinĂ©ma de la libertĂ© passĂ©e. Vrai que j'aimais ma vie, que je voyais l'avenir sans dĂ©sespoir. Et je ne m'ennuyais pas. J'en ai rĂ©ellement prononcĂ© des propos dĂ©sabusĂ©s sur le mariage, le soir dans ma chambre, avec les copines Ă©tudiantes, une connerie, la mort, rien qu'Ă  voir la trombine des couples mariĂ©s au restau, ils bouffent l'un en face de l'autre sans parler, momifiĂ©s. Quand HĂ©lĂšne, licence de philo, concluait que c'Ă©tait tout de mĂȘme un mal nĂ©cessaire, pour avoir des enfants, je pensais qu'elle avait de drĂŽles d'idĂ©es, des arguments saugrenus. Moi je n'imaginais jamais la maternitĂ© avec ou sans mariage. Je m'irritais aussi quand presque toutes se vantaient de savoir bien coudre, repasser sans faux plis, heureuses de ne pas ĂȘtre seulement intellectuelles, ma fiertĂ© devant une mousse au chocolat rĂ©ussie avait disparu en mĂȘme temps que Brigitte, la leur m'horripilait. Oui, je vivais de la mĂȘme maniĂšre qu'un garçon de mon Ăąge, Ă©tudiant qui se dĂ©brouille avec l'argent de l'État, l'aide modeste des parents, le baby-sitting et les enquĂȘtes, va au cinĂ©ma, lit, danse, et bosse pour avoir ses examens, juge le mariage une idĂ©e bouffonne.
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Annie Ernaux (A Frozen Woman)
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- Les gens ont des Ă©toiles qui ne sont pas les mĂȘme. Pour les uns, qui voyagent, les Ă©toiles sont des guides. Pour d'autres elles ne sont rien que de petites lumiĂšres. Pour d'autres, qui sont savants, elles sont des problĂšmes.[...] Mais toutes ces Ă©toiles-lĂ  se taisent. Toi, tu auras des Ă©toiles comme personne n'en a... - Que veux-tu dire? - Quand tu regarderas le ciel, la nuit, puisque j'habiterai dan l'une d'elles, puisque je rirai dans l'une d'elles, alors ce sera pour toi comme si risaient toutes les Ă©toiles. Tu auras, toi, des Ă©toiles qui savent rire! Et il rit encore. - Et quand tu seras consolĂ© (on se console toujours) tu seras content de m'avoir connu. Tu seras toujours mon ami. Tu auras envie de rire avec moi.
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Antoine de Saint-Exupéry (Le Petit Prince (French Edition))
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Toute ma vie fut la promesse De cette rencontre avec toi. C’est Dieu qui t’envoie, je le sais Pour me garder jusqu’à la mort
 Tu apparaissais dans mes rĂȘves ; Sans te voir je te chĂ©rissais Ton regard me faisait languir, Ta voix rĂ©sonnait dans mon Ăąme Depuis toujours
 En vĂ©ritĂ© Je t’ai reconnu tout de suite. Ce fut pour moi un froid, un feu, Et dans mon cƓur, j’ai dit : c’est lui ! Je t’entendais dans le silence, Quand j’allais secourir les pauvres Ou quand la priĂšre apaisait L’angoisse de mon Ăąme en peine.
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Alexander Pushkin (Eugene Onegin)
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- Tu reviendras quand ? - Il y a deux rĂ©ponses Ă  ta question. Comme Ă  toutes les questions, tu le sais bien. Je commence par laquelle ? À l'extĂ©rieur, un bruit terrifiant s'Ă©leva. Le bruit des armes qui s'entrechoquent, fendent la chair, donnent la mort. La fillette tressaillit mais sa mĂšre, en lui caressant la joue, rĂ©ussit Ă  l'enfermer dans l'univers de son regard. - Laquelle ? - Celle du savant. - Je ne reviendrais peut ĂȘtre jamais, ma princesse. - Elle est nulle cette rĂ©ponse. Donne moi celle du poĂšte. Isaya se pencha pour lui murmurer Ă  l'oreille. - Je serai toujours avec toi. OĂč que tu te trouves, quoi que tu fasses, je serai lĂ . Toujours. Elle avait placĂ© la main sur sa poitrine. La petite la regarda avec attention. - Dans mon cƓur ? - Oui. - D'accord...
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Pierre Bottero (Ellana (Le Pacte des MarchOmbres, #1))
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– Exact, rĂ©pondit CĂ©crops avec amertume, comme s’il regrettait ses dĂ©cisions. Mes sujets Ă©taient les premiers AthĂ©niens, les gĂ©meaux. – Comme ton signe astrologique ? demanda Percy. Moi je suis Lion. – Mais non, dit LĂ©o. Tu dois ĂȘtre Poissons, toi. Lion, c’est pour LĂ©o.
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Rick Riordan (The Blood of Olympus (The Heroes of Olympus, #5))
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- Si j'Ă©tais toi, j'arrĂȘterais de mentir, lui conseillai-je. J'ai une longueur d'avance sur toi. - Ah vraiment ? Mais Ă  quel point ? Son visage portait un masque de superioritĂ© et de mĂ©pris. C'Ă©tait Ă©vident. Il avait peur. - Tu n'as pas idĂ©e, rĂ©pliquai-je avec un sourire.
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Sophie Cochin (Tempérance (Tempérance, #1))
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Il faudrait avoir des regrets. Croire que j'aurais mieux fait de me rebeller, mais non, je n'y arrive pas. Si c'était à refaire, je ne changerais rien. Avec toi, quelle qu'aurait été la maniÚre, je n'aurais pu échapper à la souffrance, à la pureté éclatante de la souffrance.
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Philippe Besson (Se résoudre aux adieux)
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Amour me tue... Amour me tue, et si je ne veux dire Le plaisant mal que ce m'est de mourir : Tant j'ai grand peur, qu'on veuille secourir Le mal, par qui doucement je soupire. Il est bien vrai, que ma langueur dĂ©sire Qu'avec le temps je me puisse guĂ©rir : Mais je ne veux ma dame requĂ©rir Pour ma santĂ© : tant me plaĂźt mon martyre. Tais-toi langueur je sens venir le jour, Que ma maĂźtresse, aprĂšs si long sĂ©jour, Voyant le soin qui ronge ma pensĂ©e, Toute une nuit, folĂątrement m'ayant Entre ses bras, prodigue, ira payant Les intĂ©rĂȘts de ma peine avancĂ©e.
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Pierre de Ronsard (Les Amours)
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Les hommes mĂ©connaissent bien des choses. Une jeune fille prĂ©fĂ©rera toujours un homme malheureux, parce que toute jeune fille est tentĂ©e par un amour actif
 Tu comprends ? Actif ! Les hommes sont trop occupĂ©s, l’amour pour eux est une chose de troisiĂšme plan. Bavarder avec sa femme, se promener avec elle au jardin, verser quelques larmes sur sa tombe – c’est tout. Et pour nous, l’amour est la vie mĂȘme. Je t’aime, cela signifie que je cherche Ă  dissiper ta tristesse, que je veux te suivre au bout du monde
 Tu escalades une montagne, je l’escalade avec toi, tu descends dans un ravin, je descends avec toi.
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Anton Chekhov (Ivanov (Plays for Performance Series))
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Les hommes de chez toi, dit le petit prince, cultivent cinq mille roses dans un mĂȘme jardin... et ils n'y trouvent pas ce qu'ils cherchent... [...] Et cependant ce qu'ils cherchent pourrait ĂȘtre trouvĂ© dans une seule rose ou un peu d'eau... [...] Mais les yeux sont aveugles. Il faut chercher avec le coeur.
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Antoine de Saint-Exupéry
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- Viens t’agenouiller avec moi prĂšs de la fenĂȘtre, David, et prions pour que ta maman se sente bien demain, et que rien n’arrive Ă  ton papa ce soir, et que toi et moi
 que toi et moi ne souffrions pas trop, ni demain, ni jamais. Cela m’avait l’air d’une priĂšre magnifique, alors j’ai regardĂ© par la fenĂȘtre et j’ai commencĂ©, mais mes yeux sont tombĂ©s sur la Bible de nĂ©on, en dessous de nous, et je n’ai pas pu continuer. Et puis j’ai vu les Ă©toiles du ciel qui brillaient autant que la belle priĂšre et j’ai recommencĂ©, et la priĂšre est venue sans que j’aie Ă  rĂ©flĂ©chir, et je l’ai offerte aux Ă©toiles et au ciel de la nuit.
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John Kennedy Toole (The Neon Bible)
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et quand tu m'auras lu, jette ce livre - et sors. Je voudrais qu'il t'eĂ»t donnĂ© le dĂ©sir de sortir - sortir de n'importe oĂč, de ta ville, de ta famille, de ta chambre, de ta pensĂ©e. N'emporte pas mon livre avec toi. ... Que mon livre t'enseigne Ă  t'intĂ©resser plus Ă  toi qu'a lui mĂȘme, - puis Ă  tout le reste plus qu'Ă  toi.
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André Gide
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Maman, j'ai essayĂ© de comprendre ta jalousie, et en guise de gratitude, tu ouvres devant moi le gouffre dans lequel tu es tombĂ©e, Ă  croire que tu cherches Ă  m'y faire chuter, mais tu n'y rĂ©ussiras pas, maman, je refuse de devenir comme toi, et je peux te dire que sans mĂȘme y ĂȘtre tombĂ©e, rien que de sentir l'appel de ce gouffre, j'ai si mal que je pourrais hurler, c'est comme la morsure du vide, maman, je comprends ta souffrance mais ce que je ne comprends pas, c'est ton peu d'Ă©gards pour moi, en vĂ©ritĂ© tu ne cherches pas Ă  partager ton mal avec moi, cela t'est juste Ă©gal que je souffre, tu ne le vois pas, c'est le dernier de tes soucis et c'est cela le pire.
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AmĂ©lie Nothomb (Frappe-toi le cƓur)
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Parfois, le destin ressemble Ă  une tempĂȘte de sable qui se dĂ©place sans cesse. Tu modifies ton allure pour lui Ă©chapper. Mais la tempĂȘte modifie aussi la sienne. Tu changes Ă  nouveau le rythme de ta marche, et la tempĂȘte change son rythme elle aussi. C'est sans fin, cela se rĂ©pĂšte un nombre incalculable de fois, comme une danse macabre avec le dieu de la Mort, juste avant l'aube. Pourquoi ? parce que la tempĂȘte n'est pas un phĂ©nomĂšne venu d'ailleurs sans aucun lien avec toi. Elle est toi mĂȘme et rien d'autre. elle vient de l'intĂ©rieur de toi. Alors la seule chose que tu puisses faire, c'est pĂ©nĂ©trer dĂ©libĂ©rĂ©ment dedans, fermer les yeux et te boucher les oreilles afin d'empĂȘcher le sable d'y entrer, et la traverser pas Ă  pas. Au coeur de cette tempĂȘte, il n'y a pas de soleil, il n'y a pas de lune, pas de repĂšre dans l'espace ; par moments, mĂȘme, le temps n'existe plus. Il n'y a que du sable blanc et fin comme des os broyĂ©s qui tourbillonne haut dans le ciel. VoilĂ  la tempĂȘte de sable que tu dois imaginer.
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Haruki Murakami (Kafka on the Shore)
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L'Amour qui n'est pas un mot Mon Dieu jusqu'au dernier moment Avec ce coeur dĂ©bile et blĂȘme Quand on est l'ombre de soi-mĂȘme Comment se pourrait-il comment Comment se pourrait-il qu'on aime Ou comment nommer ce tourment Suffit-il donc que tu paraisses De l'air que te fait rattachant Tes cheveux ce geste touchant Que je renaisse et reconnaisse Un monde habitĂ© par le chant Elsa mon amour ma jeunesse O forte et douce comme un vin Pareille au soleil des fenĂȘtres Tu me rends la caresse d'ĂȘtre Tu me rends la soif et la faim De vivre encore et de connaĂźtre Notre histoire jusqu'Ă  la fin C'est miracle que d'ĂȘtre ensemble Que la lumiĂšre sur ta joue Qu'autour de toi le vent se joue Toujours si je te vois je tremble Comme Ă  son premier rendez-vous Un jeune homme qui me ressemble M'habituer m'habituer Si je ne le puis qu'on m'en blĂąme Peut-on s'habituer aux flammes Elles vous ont avant tuĂ© Ah crevez-moi les yeux de l'Ăąme S'ils s'habituaient aux nuĂ©es Pour la premiĂšre fois ta bouche Pour la premiĂšre fois ta voix D'une aile Ă  la cime des bois L'arbre frĂ©mit jusqu'Ă  la souche C'est toujours la premiĂšre fois Quand ta robe en passant me touche Prends ce fruit lourd et palpitant Jettes-en la moitiĂ© vĂ©reuse Tu peux mordre la part heureuse Trente ans perdus et puis trente ans Au moins que ta morsure creuse C'est ma vie et je te la tends Ma vie en vĂ©ritĂ© commence Le jour que je t'ai rencontrĂ©e Toi dont les bras ont su barrer Sa route atroce Ă  ma dĂ©mence Et qui m'as montrĂ© la contrĂ©e Que la bontĂ© seule ensemence Tu vins au coeur du dĂ©sarroi Pour chasser les mauvaises fiĂšvres Et j'ai flambĂ© comme un geniĂšvre A la NoĂ«l entre tes doigts Je suis nĂ© vraiment de ta lĂšvre Ma vie est Ă  partir de toi
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Louis Aragon
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- Ciao, mon biquet, ce fut un plaisir de voyager avec toi. - Je te retrouverais, cracha le bone. Je te retrouverais et ce jour-lĂ , je te crĂšverai. En prenant tout mon temps ! - C'est ça, ironisa Salim, personne n'est pressĂ©. - Tu vas souffrir ! Beaucoup souffrir ! - Ça c'est cruel, s'indigna Salim, et ingrat. Je t'ai quand mĂȘme tenu dans mes bras pendant tout le trajet. D'ailleurs, Ă  ce sujet, tu devrais te laver plus souvent, tu sais ? Et encore... je crois que c'est de l'intĂ©rieur que tu pues ! Maintenant, si ça ne te fait rien, je te quitte. C'est pas que je m'ennuie mais je ne peux quand mĂȘme pas passer la journĂ©e avec tous les rigolos que je rencontre. À la prochaine, vieux !
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Pierre Bottero (La ForĂȘt des captifs (Les Mondes d'Ewilan, #1))
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Tu joues ? Oui, c'est ça, tu joues, tu t'amuses avec les gens qui t'entourent, c'est trÚs clair à présent, voilà comment tu considÚres le monde et tes proches, nous ne sommes pour toi que des personnages de roman, que des marionettes que tu mets en scÚne, rien d'autre que... que de la chair à fiction...c'est terriblement cruel... et méprisant.
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Laurent Bettoni (Écran total)
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Jamais je n’ai regrettĂ© ces nuits passĂ©es avec toi, jamais je n’ai blĂąmĂ© mon amour pour toi, je t’ai toujours aimĂ©, j’ai toujours bĂ©ni l’heure oĂč je t’ai rencontrĂ©. Et si je devais traverser une fois encore l’enfer de ces heures avec la conscience de ce qui m’attend, je le ferais encore, mon Amour, une fois encore, mille fois s’il le fallait !
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Stefan Zweig (Lettre d'une inconnue)
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Eh quoi! pensais-je alors, si ton Ăąme avec ton corps doit se dissoudre, rĂ©alise au plus tĂŽt la joie. Si peut-ĂȘtre elle est imortelle, n'auras-tu pas l'eternitĂ© pour t'occuper Ă  ce qui ne saurait intĂ©resser tes sens? Ce beau pays que tu traverses, vas-tu le dĂ©daigner, te refuser Ă  ses blandices, Ă  cause qu'elles te seront bientĂŽt enlevĂ©es? Plus rapide est la traversĂ©e, plus avide soit ton regard; plus precipitĂ©e est ta fuite, plus sublime soit ton Ă©treinte! Pourquoi donc, amant d'un instant, embrasserais-je moins amoureusement ce que je sais que je ne pourrai pas retenir? Âme inconstante, hĂąte-toi! Sache que la fleur la plus belle est aussi la plus tĂŽt fanĂ©e. Sur son parfum penche-toi vite. L'immortelle n'a pas d'odeur.
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André Gide (Les Nourritures terrestres: suivi de Les nouvelles nourritures)
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Mais toutes ces Ă©toiles-lĂ  elles se taisent. Toi, tu auras des Ă©toiles comme personne n’en a... - Que veux-tu dire ? - Quand tu regarderas le ciel, la nuit, puisque j’habiterai dans l’une d’elles, puisque je rirai dans l’une d’elles, alors ce sera pour toi comme si riaient toutes les Ă©toiles. Tu auras, toi, des Ă©toiles qui savent rire ! Et il rit encore. - Et quand tu seras consolĂ© (on se console toujours) tu seras content de m’avoir connu. Tu seras toujours mon ami. Tu auras envie de rire avec moi. Et tu ouvriras parfois ta fenĂȘtre, comme ça, pour le plaisir... Et tes amis seront bien Ă©tonnĂ©s de te voir rire en regardant le ciel. Alors tu leur diras: "Oui, les Ă©toiles, ça me fait toujours rire !" Et ils te croiront fou.
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Antoine de Saint-Exupéry (The Little Prince)
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AmputĂ©e!
 O soleil, si c’est vrai que je viens de toi, pourquoi m’as-tu faite amputĂ©e? Pourquoi m’as-tu faite une fille? Pourquoi ces seins, cette faiblesse, cette plaie ouverte au milieu de moi? N’aurait-il pas Ă©tĂ© beau le garçon MĂ©dĂ©e? N’aurait-il pas Ă©tĂ© fort? Le corps dur comme la pierre, fait pour prendre et partir aprĂšs, ferme, intact, entier, lui! Ah! il aurait pu venir, alors, Jason, avec ses grandes mains redoutables, il aurait pu tenter de les poser sur moi! Un couteau, chacun dans la sienne -oui!- et le plus fort tue l’autre et s’en va dĂ©livrĂ©. Pas cette lutte oĂč je ne voulais que toucher les Ă©paules, cette blessure que j’implorais. Femme! Femme! Chienne! Chair faite d’un peu de boue de d’une cĂŽte d’homme! Morceau d’homme! Putain!
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Jean Anouilh (Médée)
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A un moment j’ai mĂȘme laissĂ© Ă©chapper un son qui s’est prolongĂ© malgrĂ© moi en prenant de plus en plus de force, un son qui avait attendu ce jour prĂ©cis pour partir du fond de mes annĂ©es de tĂ©nĂšbres Ă  mal aimer des hommes qui m’ont mal aimĂ©e en retour et recouvrir ta poitrine comme une brĂ»lure ; c’était d’abord un son rauque et traĂźnant, une plainte animale qui n’avait rien du sanglot et qui en un vĂ©ritable appel Ă  la mort. A ce moment tout s’est arrĂȘtĂ©, je me suis soudain rappelĂ© cette mĂȘme scĂšne vĂ©cu avec toi alors qu’on venait de se rencontrer ; ce hurlement avait dĂ©jĂ  eu lieu et sa rĂ©pĂ©tition implacable m’a fait taire une fois pour toute. A ce moment aussi tu t’es Ă©cartĂ© de moi, sans doute pour la mĂȘme raison, tu t’es levĂ© dans une brusquerie qui a dĂ©logĂ© OrĂ©o de la chaise de ton bureau. Ne voulant pas te regarder dans les yeux, j’ai regardĂ© tes pieds. Mon hurlement avait tracĂ© une ligne infranchissable entre nous, en hurlant je venais de sonner le glas de notre histoire. Tu as dit des paroles que tu avais dĂ©jĂ  prononcĂ©es en d’autres circonstances et je suis partie, je savais que plus jamais on ne se reparlerait.
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Nelly Arcan (Folle)
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Je ris, Caesonia, quand je pense que, pendant des annĂ©es, Rome tout entiĂšre a Ă©vitĂ© de prononcer le nom de Drusilla. Car Rome s'est trompĂ©e pendant des annĂ©es. L'amour ne m'est pas suffisant, c'est cela que j'ai compris alors. C'est cela que je comprends aujourd'hui encore, en te regardant. Aimer un ĂȘtre, c'est accepter de vieillir avec lui. Je ne suis pas capable de cet amour. Drusilla vieille, c'Ă©tait bien pis que Drusilla morte. On croit qu'un homme souffre parce que l'ĂȘtre qu'il aime meurt en un jour. Mais sa vraie souffrance est moins futile : c'est de s'apercevoir que le chagrin non plus ne dure pas. MĂȘme la douleur est privĂ©e de sens. Tu vois, je n'avais pas d'excuses, pas mĂȘme l'ombre d'un amour, ni l'amertume de la mĂ©lancolie. Je suis sans alibi. Mais aujourd'hui, me voilĂ  encore plus libre qu'il y a des an-nĂ©es, libĂ©rĂ© que je suis du souvenir et de l'illusion. (Il rit d'une façon passionnĂ©e.) Je sais que rien ne dure ! Savoir cela ! Nous sommes deux ou trois dans l'histoire Ă  en avoir fait vraiment l'expĂ©rience, accompli ce bonheur dĂ©ment. Ceasonia, tu as suivi jusqu'au bout une bien curieuse tragĂ©die. Il est temps que pour toi le rideau se baisse.
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Albert Camus (Caligula)
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Un jour viendra, ai-je dit, oĂč nous serons tous morts. Tous. Un jour viendra oĂč il ne restera plus aucun ĂȘtre humain pour se rappeler l'existence des hommes. Un jour viendra oĂč il ne restera plus personne pour se souvenir d'Aristote ou de ClĂ©opĂątre, encore moins de toi. Tout ce qui a Ă©tĂ© fait, construit, Ă©crit, pensĂ© ou dĂ©couvert sera oubliĂ©, et tout ça, ai-je ajoutĂ© avec un geste large, n'aura servi Ă  rien. Ce jour viendra bientĂŽt ou dans des millions d'annĂ©es. Quoi qu'il arrive, mĂȘme si nous survivons Ă  la fin du soleil, nous ne survivrons pas toujours. Du temps s'est Ă©coulĂ© avant que les organismes acquiĂšrent une conscience et il s'en Ă©coulera aprĂšs. Alors si l'oubli inĂ©luctable de l'humanitĂ© t'inquiĂšte, je te conseille de ne pas y penser. C'est ce que tout le monde fait.
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John Green (The Fault in Our Stars)
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Eau, tu n’as ni goĂ»t, ni couleur, ni arĂŽme, on ne peut pas te dĂ©finir, on te goĂ»te sans te connaĂźtre. Tu n’es pas nĂ©cessaire Ă  la vie, tu es la vie ! Tu nous pĂ©nĂštres d’un plaisir qui ne s’explique point par le sens. Avec toi rentrent en nous tous les pouvoirs auxquels nous avions renoncĂ©. Par ta grĂące, s’ouvrent en nous toutes les sources taries de notre cƓur. Tu es la plus grande richesse qui soit au monde, et tu es aussi la plus dĂ©licate, toi si pure au ventre de la Terre. On peut mourir sur une source d’eau magnĂ©sienne. On peut mourir Ă  deux pas d’un lac d’eau salĂ©e. On peut mourir malgrĂ© deux litres de rosĂ©e qui retiennent en suspend quelques sels. Tu n’acceptes point de mĂ©lange, tu ne supportes point l’altĂ©ration, tu es une ombrageuse divinitĂ©. Mais tu rĂ©pands en nous un bonheur infiniment simple.
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Antoine de Saint-Exupéry (Wind, Sand and Stars)
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Toi, Ă  qui Allah a accordĂ© une femme, ne lĂšve jamais la voix sur elle, elle ta tellement offert avec sa prĂ©sence Ă  tes cotĂ©s, par son amour qui te rappel chaque jour qu'elle est ta moitiĂ©, une moitiĂ© retrouvĂ©e un jour oĂč tu Ă©tait perdu, elle ta tellement offert si tu savais, elle fĂ»t la cause afin que tu soit pĂšre, n......'oublie jamais ce cadeau, car elle est la princesse qui ta dĂ©livrĂ© du donjon de la solitude.
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votre soeur
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J’ai arpentĂ© les galeries sans fin des grandes bibliothĂšque, les rues de cette ville qui fĂ»t la nĂŽtre, celle oĂč nous partagions presque tous nos souvenirs depuis l’enfance. Hier, j’ai marchĂ© le long des quais, sur les pavĂ©s du marchĂ© Ă  ciel ouvert que tu aimais tant. Je me suis arrĂȘtĂ© par-ci par-lĂ , il me semblait que tu m’accompagnais, et puis je suis revenu dans ce petit bar prĂšs du port, comme chaque vendredi. Te souviendras-tu ? Je ne sais pas oĂč tu es. Je ne sais pas si tout ce que nous avons vĂ©cu avait un sens, si la vĂ©ritĂ© existe, mais si tu trouves ce petit mot un jour, alors tu sauras que j’ai tenu ma promesse, celle que je t’ai faite. A mon tour de te demander quelque chose, tu me le dois bien. Oublie ce que je viens d’écrire, en amitiĂ© on ne doit rien. Mais voici nĂ©anmoins ma requĂȘte : Dis-lui, dis-lui que quelque part sur cette terre, loin de vous, de votre temps, j’ai arpentĂ© les mĂȘmes rues, ri avec toi autour des mĂȘmes tables, et puisque les pierres demeurent, dis-lui que chacune de celles oĂč nous avons posĂ© nos mais et nos regards contient Ă  jamais une part de notre histoire. Dis-lui, que j’étais ton ami, que tu Ă©tais mon frĂšre, peut-ĂȘtre mieux encore puisque nous nous Ă©tions choisis, dis-lui que rien n’a jamais pu nous sĂ©parer, mĂȘme votre dĂ©part si soudain.
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Marc Levy (La prochaine fois)
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Elles disent, malheureuse, ils t'ont chassée du monde des signes, et cependant ils t'ont donné des noms, ils t'ont appelée esclave, toi malheureuse esclave. Comme des maßtres ils ont exercé leur droit de maßtre. Ils écrivent de ce droit de donner des noms qu'il va si loin que l'on peut considérer l'origine du langage comme un acte d'autorité émanant de ceux qui dominent. Ainsi ils disent qu'ils ont dit, ceci est telle ou telle chose, ils ont attaché à un objet et à un fait tel vocable et par là ils se le sont pour ainsi dire appropriés. Elles disent, ce faisant ils ont gueulé hurlé de toutes leurs forces pour te réduire au silence. Elles disent, le langage que tu parles t'empoisonne la glotte la langue le palais les lÚvres. Elles disent le langage que tu parles est fait de mots qui te tuent. Elles disent, le langage que tu parles est fait de signes qui à proprement parler désignent ce qu'ils se sont appropriés. Ce sur quoi ils n'ont pas mis la main, ce sur quoi ils n'ont pas fondu comme des rapaces aux yeux multiples, cela n'apparaßt pas dans le langage que tu parles. Cela se manifeste juste dans l'intervalle que les maßtres n'ont pas pu combler avec leurs mots de propriétaires et de possesseurs, cela peut se chercher dans la lacune, dans tout ce qui n'est pas la continuité de leurs discours, dans le zéro, le O, le cercle parfait que tu inventes pour les emprisonner et pour les vaincre.
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Monique Wittig (Les GuérillÚres)
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Que ce soit dimanche ou lundi Soir ou matin minuit midi Dans l'enfer ou le paradis Les amours aux amours ressemblent C'Ă©tait hier que je t'ai dit Nous dormirons ensemble C'Ă©tait hier et c'est demain Je n'ai plus que toi de chemin J'ai mis mon cƓur entre tes mains Avec le tien comme il va l'amble Tout ce qu'il a de temps humain Nous dormirons ensemble Mon amour ce qui fut sera Le ciel est sur nous comme un drap J'ai refermĂ© sur toi mes bras Et tant je t'aime que j'en tremble Aussi longtemps que tu voudras Nous dormirons ensemble.
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Louis Aragon (Le fou d'Elsa)
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14 juillet. – FĂȘte de la RĂ©publique. Je me suis promenĂ© par les rues. Les pĂ©tards et les drapeaux m’amusaient comme un enfant. C’est pourtant fort bĂȘte d’ĂȘtre joyeux, Ă  date fixe, par dĂ©cret du gouvernement. Le peuple est un troupeau imbĂ©cile, tantĂŽt stupidement patient et tantĂŽt fĂ©rocement rĂ©voltĂ©. On lui dit : "Amuse-toi." Il s’amuse. On lui dit : "Va te battre avec le voisin." Il va se battre. On lui dit : "Vote pour l’Empereur." Il vote pour l’Empereur. Puis, on lui dit : "Vote pour la RĂ©publique." Et il vote pour la RĂ©publique.
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Guy de Maupassant (The Horla)
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L'Horloge Horloge! dieu sinistre, effrayant, impassible, Dont le doigt nous menace et nous dit: "Souviens-toi! Les vibrantes Douleurs dans ton coeur plein d'effroi Se planteront bientĂŽt comme dans une cible; Le plaisir vaporeux fuira vers l'horizon Ainsi qu'une sylphide au fond de la coulisse ; Chaque instant te dĂ©vore un morceau du dĂ©lice A chaque homme accordĂ© pour toute sa saison. Trois mille six cents fois par heure, la Seconde Chuchote: Souviens-toi! - Rapide, avec sa voix D'insecte, Maintenant dit: Je suis Autrefois, Et j'ai pompĂ© ta vie avec ma trompe immonde! Remember! Souviens-toi, prodigue! Esto memor! (Mon gosier de mĂ©tal parle toutes les langues.) Les minutes, mortel folĂątre, sont des gangues Qu'il ne faut pas lĂącher sans en extraire l'or! Souviens-toi que le Temps est un joueur avide Qui gagne sans tricher, Ă  tout coup! c'est la loi. Le jour dĂ©croĂźt; la nuit augmente; souviens-toi! Le gouffre a toujours soif; la clepsydre se vide. TantĂŽt sonnera l'heure oĂč le divin Hasard, OĂč l'auguste Vertu, ton Ă©pouse encor vierge, OĂč le repentir mĂȘme (oh! la derniĂšre auberge!), OĂč tout te dira: Meurs, vieux lĂąche! il est trop tard!
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Charles Baudelaire (Les Fleurs du Mal)
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Eh bien, toi, qu'est-ce qui t'arrive ? Il fait si beau temps. [...] Quelle mouche t'a piqué ? - Je n'ai rien, dit Joachim. Mais tu as l'air échauffé. Je crois que c'en soit fini de ta baisse de température." En effet, c'en était fini. La dépression humiliante de l'organisme de Hans Castorp était surmontée par le salut qu'il avait échangé avec Clawdia Chauchat, et, à proprement parler, c'était à la conscience qu'il avait de ce fait que tenait en réalité sa satisfaction. Oui. Joachim avait eu raison : le mercure reprenait son ascension. Lorsque Hans Castorp, de retour de sa promenade, le consulta, il monta jusqu'à 38 degrés.
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Thomas Mann (The Magic Mountain)
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finalement, Ă©perdu d'amour et au comble de la frĂ©nĂ©sie Ă©rotique, je m'assis dans l'herbe et j'enlevai un de mes souliers en caoutchouc. — Je vais le manger pour toi, si tu veux. Si elle le voulait I Ha! Mais bien sĂ»r qu'elle le voulait, voyons! C'Ă©tait une vraie petite femme. --- Elle posa son cerceau par terre et s'assit sur ses ta-lons. Je crus voir dans ses yeux une lueur d'estime. Je n'en demandais pas plus. Je pris mon canif et enta-mai le caoutchouc. Elle me regardait faire. — Tu vas le manger cru ? — Oui. J'avalai un morceau, puis un autre. Sous son regard enfin admiratif, je me sentais devenir vraiment un homme. Et j'avais raison. Je venais de faire mon apprentissage. J'entamai le caoutchouc encore plus profondĂ©ment, soufflant un peu, entre les bouchĂ©es, et je continuai ainsi un bon moment, jusqu'Ă  ce qu'une sueur froide me montĂąt au front. Je continuai mĂȘme un peu au-delĂ , serrant les dents, luttant contre la nausĂ©e, ramassant toutes mes forces pour demeurer sur le terrain, comme il me fallut le faire tant de fois, depuis, dans mon mĂ©tier d'homme. Je fus trĂšs malade, on me transporta Ă  l'hĂŽpital, ma mĂšre sanglotait, Aniela hurlait, les filles de l'atelier geignaient, pendant qu'on me mettait sur un brancard dans l'ambulance. J'Ă©tais trĂšs fier de moi. Mon amour d'enfant m'inspira vingt ans plus tard mon premier roman Éducation europĂ©enne, et aussi certains passages du Grand Vestiaire. Pendant longtemps, Ă  travers mes pĂ©rĂ©grinations, j'ai transportĂ© avec moi un soulier d'enfant en caoutchouc, entamĂ© au couteau. J'avais vingt-cinq ans, puis trente, puis quarante, mais le soulier Ă©tait toujours lĂ , Ă  portĂ©e de la main. J'Ă©tais toujours prĂȘt Ă  m'y attabler, Ă  donner, une fois de plus, le meilleur de moi-mĂȘme. Ça ne s'est pas trouvĂ©. Finalement, j'ai abandonnĂ© le soulier quelque part derriĂšre moi. On ne vit pas deux fois. (La promesse de l'aube, ch. XI)
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Romain Gary (Promise at Dawn)
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Tu es mon foyer, Oliver. Quand je suis avec toi et que nous sommes bien ensemble, je ne dĂ©sire rien de plus. Tu me fais aimer celui que je suis, celui que je deviens quand tu es avec moi. S’il existe une vĂ©ritĂ© dans le monde, elle est lĂ  quand je suis avec toi, et si je trouve un jour le courage de t’avouer ma vĂ©ritĂ©, rappelle-moi d’allumer un cierge en action de grĂąces devant chaque autel de Rome. Il ne me vint pas Ă  l’esprit que si un mot de lui pouvait me rendre si heureux, un autre pouvait tout aussi aisĂ©ment me briser, que si je ne voulais pas ĂȘtre malheureux, je devais apprendre Ă  me mĂ©fier aussi de ces joies prĂ©caires.
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André Aciman (Call Me By Your Name (Call Me By Your Name, #1))
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Alors toi, le moins qu'on puisse dire, c'est que je t'aurais mĂ©ritĂ©e. Primo, ça faisait des annĂ©es que je t'attendais. Des annĂ©es que j'avais juste le droit de tremper mes lĂšvres dans le bonheur et puis pas plus. Deusio, quand je te rencontre il faut que tu sois maquĂ©e avec un poulpe qui te colle de partout. Et tertio, quand enfin mademoiselle est dispo, il faut que tu me fasses poireauter des semaines et des semaines, genre laisse-moi digĂ©rer mon histoire avec Dudulle et faire mon rot. Tu crois que ça peut ĂȘtre simple ? Comme Ă  la tĂ©lĂ© ou sur grand Ă©cran ? Ils se rencontrent, ils se plaisent, ils s'aiment, allez zou ! emballez, c'est pesĂ©. Eh ben, nan ! Il faut que ça soit compliquĂ©, il faut que mademoiselle prenne tout son temps, qu'elle s'Ă©broue un peu, qu'elle remette de l'ordre sans sa tĂȘte, qu'elle fasse une pose, alors que moi, je suis lĂ , tendu comme un arc, les pieds bien calĂ©s dans les starting-blocks, les doigts bien posĂ©s sur la ligne, concentrĂ©, parce qu'un dĂ©but d'histoire, faut surtout pas le rater, faut se donner Ă  fond, je le sais, c'est pas une premiĂšre pour moi, avec toutes les histoires foireuses que je viens d'enquiller, j'ai largement eu le temps de m'entraĂźner. Comme un sportif, je me suis entraĂźnĂ©. Je suis prĂȘt, moi. Y a plus qu'Ă  donner le dĂ©part. Quand mademoiselle sera disposĂ©e.
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David Thomas (La Patience des buffles sous la pluie)
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Lady Maccon se leva pour l’aider Ă  passer sa cape, mais se rassit avant de pouvoir le faire. Elle ne tenait toujours pas bien sur ses jambes. Lord Maccon cessa aussitĂŽt de secouer le vĂȘtement pour le dĂ©plier et s’agenouilla, nu, devant elle. « Qu’est-ce qui ne va pas ? cria-t-il presque. — Quoi ? » Ivy se retourna pour voir ce qui se passait, aperçut le derriĂšre nu du comte, poussa un cri aigu et se dĂ©tourna en s’éventant avec une main gantĂ©e. « Ne t’inquiĂšte pas, Conall. Tu troubles Ivy, grommela lady Maccon. — Il y a toujours quelque chose pour troubler Mlle Hisselpenny. Toi, c’est diffĂ©rent. Tu ne fais pas ce genre de choses, femme. Tu n’es pas fĂ©minine Ă  ce point.
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Gail Carriger (Changeless (Parasol Protectorate, #2))
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-Les choses que tu veux. On peut les voir, les lire, et puis, mĂȘme si je n'avais pas compris... C'est ton coeur qui me les a suggĂ©rĂ©es. -Je me demande bien ce qu'il t'a dit... Parfois il ment. -Avec moi, il a Ă©tĂ© sincĂšre... GoĂ»te, c'est dĂ©licieux. Tu m'embrasses ? - Niki, mais moi... - Chut... Qu'est-ce qu'il y a de plus simple qu'un baiser ? -Mais toi et moi... c'est compliquĂ©. - Chut... Laisse parler ton coeur. Niki s'approche, pose sa main sur le coeur d'Alessandro. Puis son oreille. Elle l'Ă©coute. Il bat fort, ce coeur Ă©mu. Niki sourit. - Écoute, je l'entends. Elle s'Ă©carte de son torse et le regarde dans les yeux. Elle sourit dans la pĂ©nombre de la terasse. - Il a dit non... - Non quoi ? - Qu'entre toi et moi, ce n'est pas compliquĂ©.
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Frederico Moccia
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Je veux que tu en aies toi-mĂȘme la preuve par expĂ©rience, sans la chercher ailleurs. Quand on n'aime pas pour son propre compte, on voit d'un oeil chagrin l'humeur des amants. Il y a encore en moi quelque ardeur amoureuse, mon corps a toujours de la sĂšve; et mes sens ne sont pas Ă©teints pour les agrĂ©ments et les plaisirs de la vie. Je suis un rieur de bon goĂ»t, un convive agrĂ©able; dans un dĂźner, je ne coupe jamais la parole Ă  personne; j'ai le bon esprit de ne pas me rendre importun aux convives; je sais prendre part Ă  la conversation avec mesure, et me taire Ă  propos, quand c'est Ă  d'autres Ă  parler; je ne suis point cracheur ni pituiteux, et point roupieux le moins du monde; enfin, je suis d'ÉphĂšse, et non pas d'Apulie (53), je ne suis pas un « petit coeur ».
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Plautus (Miles Gloriosus)
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Anastase passa son pouce sur ma lĂšvre infĂ©rieure ; ses traits virils, son regard pĂ©nĂ©trant me brĂ»lait. — Laisse-toi aller, MikhaĂŻl. Personne ne surveille tes faits et gestes. Personne ne dira rien ni ne te jugera. Sois toi-mĂȘme, abaisse tes barriĂšres. J’inspirai profondĂ©ment et collai sa mĂšche de cheveux Ă  mon nez, m’apaisant. — Vivre dans un fort n’est pas vivre, les plus belles sensations sont celles de pleine libertĂ©. Tu peux toucher qui tu veux. Rire avec qui cela te plaĂźt. Agir comme un enfant si c’est ce dont tu as envie. Je plissai le nez. — Non merci, je laisse ça Ă  Matt et Jimmy, deux enfants, c’est bien assez Ă  gĂ©rer. Nous sourĂźmes tous deux. Le brun me posa un baiser sur la joue, et peu de temps aprĂšs, la porte s’ouvrit Ă  nouveau. — Hey ! Moi aussi je veux des cĂąlins !
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Phoenix Pharell (Des Ă©chos de sang et de crocs (French Edition))
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« Écoute, Egor PĂ©trovitch, lui dit-il. Qu’est ce que tu fais de toi ? Tu te perds seulement avec ton dĂ©sespoir. Tu n’as ni patience ni courage. Maintenant, dans un accĂšs de tristesse, tu dis que tu n’as pas de talent. Ce n’est pas vrai. Tu as du talent ; je t’assure que tu en as. Je le vois rien qu’à la façon dont tu sens et comprends l’art. Je te le prouverai par toute ta vie. Tu m’as racontĂ© ta vie d’autrefois. À cette Ă©poque aussi le dĂ©sespoirte visitait sans que tu t’en rendisses compte. À cette Ă©poque aussi, ton premier maĂźtre, cet homme Ă©trange, dont tu m’as tant parlĂ©, a Ă©veillĂ© en toi, pour la premiĂšre fois, l’amour de l’art et a devinĂ© ton talent. Tu l’as senti alors aussi fortement que maintenant. Mais tu ne savais pas ce qui se passait en toi. Tu ne pouvais pas vivre dans la maison du propriĂ©taire, et tu ne savais toi-mĂȘme ce que tu dĂ©sirais. Ton maĂźtre est mort trop tĂŽt. Il t’a laissĂ© seulement avec des aspirations vagues et, surtout, il ne t’a pas expliquĂ© toimĂȘme. Tu sentais le besoin d’une autre route plus large, tu pressentais que d’autres buts t’étaient destinĂ©s, mais tu ne comprenais pas comment tout cela se ferait et, dans ton angoisse, tu as haĂŻ tout ce qui t’entourait alors. Tes six annĂ©es de misĂšre ne sont pas perdues. Tu as travaillĂ©, pensĂ©, tu as reconnu et toi-mĂȘme et tes forces ; tu comprends maintenant l’art et ta destination. Mon ami, il faut avoir de la patience et du courage. Un sort plus enviĂ© que le mien t’est rĂ©servĂ©. Tu es cent fois plus artiste que moi, mais que Dieu te donne mĂȘme la dixiĂšme partie de ma patience. Travaille, ne bois pas, comme te le disait ton bonpropriĂ©taire, et, principalement, commence par l’a, b, c. « Qu’est-ce qui te tourmente ? La pauvretĂ©, la misĂšre ? Mais la pauvretĂ© et la misĂšre forment l’artiste. Elles sont insĂ©parables des dĂ©buts. Maintenant personne n’a encore besoin de toi ; personne ne veut te connaĂźtre. Ainsi va le monde. Attends, ce sera autre chose quand on saura que tu as du talent. L’envie, la malignitĂ©, et surtout la bĂȘtise t’opprimeront plus fortement que la misĂšre. Le talent a besoin de sympathie ; il faut qu’on le comprenne. Et toi, tu verras quelles gens t’entoureront quand tu approcheras du but. Ils tĂącheront de regarder avec mĂ©pris ce qui s’est Ă©laborĂ© en toi au prix d’un pĂ©nible travail, des privations, des nuits sans sommeil. Tes futurs camarades ne t’encourageront pas, ne te consoleront pas. Ils ne t’indiqueront pas ce qui en toi est bon et vrai. Avec une joie maligne ils relĂšveront chacune de tes fautes. Ils te montreront prĂ©cisĂ©ment ce qu’il y a de mauvais en toi, ce en quoi tu te trompes, et d’un air calme et mĂ©prisant ils fĂȘteront joyeusement chacune de tes erreurs. Toi, tu esorgueilleux et souvent Ă  tort. Il t’arrivera d’offenser une nullitĂ© qui a de l’amour-propre, et alors malheur Ă  toi : tu seras seul et ils seront plusieurs. Ils te tueront Ă  coups d’épingles. Moi mĂȘme, je commence Ă  Ă©prouver tout cela. Prends donc des forces dĂšs maintenant. Tu n’es pas encore si pauvre. Tu peux encore vivre ; ne nĂ©glige pas les besognes grossiĂšres, fends du bois, comme je l’ai fait un soir chez de pauvres gens. Mais tu es impatient ; l’impatience est ta maladie. Tu n’as pas assez de simplicitĂ© ; tu ruses trop, tu rĂ©flĂ©chis trop, tu fais trop travailler ta tĂȘte. Tu es audacieux en paroles et lĂąche quand il faut prendra l’archet en main. Tu as beaucoup d’amour-propre et peu de hardiesse. Sois plus hardi, attends, apprends, et si tu ne comptes pas sur tes forces, alors va au hasard ; tu as de la chaleur, du sentiment, peut-ĂȘtre arriveras-tu au but. Sinon, va quand mĂȘme au hasard. En tout cas tu ne perdras rien, si le gain est trop grand. Vois-tu, aussi, le hasard pour nous est une grande chose. »
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Fyodor Dostoevsky (Netochka Nezvanova)
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Il ne faut pas t'Ă©tonner qu'aucune femme ne veuille, Rufus, glisser sa cuisse lĂ©gĂšre sous la tienne mĂȘme si tu la soudoyais en lui offrant une robe splendide ou une pierre diaphane et raffinĂ©e. C'est qu'une sale histoire te porte tort, selon laquelle un bouc sauvage logerait sous tes aisselles. On le redoute, et ce n'est pas surprenant : la bĂȘte est trĂšs mĂ©chante et aucune fille ne coucherait avec. Alors dĂ©barrasse-toi de cette calamitĂ© redoutable pour les narines, ou cesse de t'Ă©tonner que l'on te fuie.
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Catullus (The Complete Poems)
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Parfois, le destin ressemble Ă  une tempĂȘte de sable qui se dĂ©place sans cesse. Tu modifies ton allure pour lui Ă©chapper. Mais la tempĂȘte modifie aussi la sienne. Tu changes Ă  nouveau le rythme de ta marche, et la tempĂȘte change son rythme elle aussi. C'est sans fin, cela se rĂ©pĂšte un nombre incalculable de fois, comme une danse macabre avec le dieu de la Mort, juste avant l'aube. Pourquoi? Parce que cette tempĂȘte n'est pas un phĂ©nomĂšne venu d'ailleurs, sans aucun lien avec toi. Elle est toi-mĂȘme, et rien d'autre. Elle vient de l'intĂ©rieur de toi. Alors, la seule chose que tu puisses faire, c'est pĂ©nĂ©trer dĂ©libĂ©rĂ©ment dedans, fermer les yeux et te boucher les oreilles afin d"empĂȘcher le sale d'y rentrer, et la traverser pas Ă  pas. Au coeur de cette tempĂȘte, il n'y a pas de soleil, il n'y a pas de lune, pas de repĂšres dans l'espace ; par moments, mĂȘme le temps n'existe plus. Il n'y a que du sable blanc et fin comme des os broyĂ©s qui tourbillonne haut dans le ciel. VoilĂ  la tempĂȘte de sable que tu dois imaginer.
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Haruki Murakami (Kafka on the Shore)
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Dans tout mon langage, dans tout mon langage avec toi, il y a eu dĂšs le dĂ©but ce noyau de silence. Je ne dis pas cela pour me charger ni pour dĂ©charger qui que ce soit. L’effort que me coĂ»te d’écrire ces mots me garantit une sorte de paix, au-delĂ  de tout jugement. C’est ainsi, ce noyau de silence Ă©tait en moi, il faisait partie de moi. Je l’ai, lui aussi, apportĂ© avec tout le reste dans notre histoire et comme je ne pouvais rien contre lui, il y a pris sa place, s’est installĂ© et s’est imposĂ©. Je faisais naturellement semblant de ne pas le voir mais il Ă©tait lĂ . Je le recouvrais de discours de protection, diversion, il Ă©tait toujours lĂ , parfois invisible, parfois tacitement oubliĂ©, mais toujours lĂ . Il ne trompait personne parmi les intĂ©ressĂ©s. Il ne te trompait pas, en tout cas malgrĂ© tous les efforts pour conclure avec lui et moi Ă  demi-mots, un pacte d’oubli. Au fond de tout tu l’as acceptĂ© avec moi, mais tu ne l’as jamais acceptĂ© ; tu ne pouvais pas. Tu as fait tout ton possible en ton pouvoir pour le rĂ©duire, puis pour l’oublier. Un moment est venu oĂč tu n’as plus pu rĂ©sister au silence que par le silence, par un second silence sans aucun rapport avec le premier mais un silence. Un silenzio l’unico modo di non tacere.
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Louis Althusser
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S’il est quelquefois logique de s’en rapporter Ă  l’apparence des phĂ©nomĂšnes, ce premier chant finit ici. Ne soyez pas sĂ©vĂšre pour celui qui ne fait encore qu’essayer sa lyre : elle rend un son si Ă©trange ! Cependant, si vous voulez ĂȘtre impartial, vous reconnaĂźtrez dĂ©jĂ  une empreinte forte, au milieu des imperfections. Quant Ă  moi, je vais me remettre au travail, pour faire paraĂźtre un deuxiĂšme chant, dans un laps de temps qui ne soit pas trop retardĂ©. La fin du dix-neuviĂšme siĂšcle verra son poĂšte (cependant, au dĂ©but, il ne doit pas commencer par un chef d’Ɠuvre, mais suivre la loi de la nature) ; il est nĂ© sur les rives amĂ©ricaines, Ă  l’embouchure de la Plata, lĂ  oĂč deux peuples, jadis rivaux, s’efforcent actuellement de se surpasser par le progrĂšs matĂ©riel et moral. Buenos-Ayres, la reine du Sud, et Montevideo, la coquette, se tendent une main amie, Ă  travers les eaux argentines du grand estuaire. Mais, la guerre Ă©ternelle a placĂ© son empire destructeur sur les campagnes, et moissonne avec joie des victimes nombreuses. Adieu, vieillard, et pense Ă  moi, si tu m’as lu. Toi, jeune homme, ne dĂ©sespĂšre point ; car, tu as un ami dans le vampire, malgrĂ© ton opinion contraire. En comptant l’acarus sarcopte qui produit la gale, tu auras deux amis !
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Comte de Lautréamont (Les Chants de Maldoror)
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Dehbia connaĂźt bien les siens Il n'ont de chrĂ©tien que le nom. L'un des premiers d'entre eux, converti au dĂ©but du siĂšcle et qui a d'ailleurs sa croix au cimetiĂšre de la paroisse, leur traça une ligne de conduite que beaucoup suivent ingĂ©nieusement. Jadis, racontent-ils, ce nĂ©ophyte Ă  peine dĂ©grossi fut surpris par un PĂšre faisant Ă  la mosquĂ©e sa priĂšre parmi les musulmans. - C'Ă©tait bien toi, hier soir, Ă  la mosquĂ©e? - Oui, mon pĂšre. - Tu n'es pas musulman. - Pourquoi pas, mon pĂšre ? Je le suis de naissance. Il paraĂźt que le PĂšre n'a pas beaucoup insistĂ©. Actuellement, ils ne vont plus Ă  la mosquĂ©e mais ils jurent par les saints du pays, pratiquent la circoncision comme les bons musulmans et cĂ©lĂšbrent es AĂŻds aussi bien que la NoĂ«l. Leurs femmes, aussi superstitieuses que toutes les autres, croient aux pratiques des bonnes vieilles et, pour connaĂźtre l'avenir, rendent visite aux mĂȘmes derviches. Tout cela, Dehbia le sait et beaucoup d'autres choses. Bien sĂ»r qu'ils ont reçu le baptĂȘme et avec le baptĂȘme un nom chrĂ©tien. Les PĂšres leur ont distribuĂ© gĂ©nĂ©reusement des "Marie", des "Jean", et surtout des "Augustin", des "Monique" comme cela se devait en pays berbĂšre, mais Ă  cĂŽtĂ© de ces noms, existe toujours le nom kabyle, Mohammed, Akli, Rabah, SaĂŻd, et la facultĂ© de s'en servir.
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Mouloud Feraoun
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JULIETTE. — A quelle heure enverrai-je vers toi, demain ? ROMÉO. — À neuf heures. JULIETTE. — Je n’y manquerai pas. D’ici Ă  ce moment, il va s’écouler vingt ans. J’ai oubliĂ© pourquoi je t’avais rappelĂ©. ROMÉO.— Permets-moi de rester ici jusqu’à ce que tu te le rappelles. JULIETTE. — J’oublierai encore, afin de te faire rester, et ne me souviendrai que de l’amour que j’ai pour ta compagnie. ROMÉO. — Et moi je resterai, pour te faire oublier encore, oublieux moi-mĂȘme que j’ai un autre logis que ce jardin JULIETTE. — Il est presque matin ; je voudrais que tu fusses parti, et cependant pas plus loin que l’oiseau d’une jeune folle qui le laisse s’éloigner un peu de sa main, pareil Ă  un pauvre prisonnier dans ses entraves, et qui le ramĂšne avec un fil de soie, tant elle est amoureusement jalouse de sa libertĂ©. ROMÉO. — Je voudrais ĂȘtre ton oiseau. JULIETTE. — ChĂ©ri, je le voudrais aussi : cependant, je te tuerais par trop de caresses. Ronne nuit ! bonne nuit ! la sĂ©paration est une si dĂ©licieuse douleur que je dirais bonne nuit jusqu’à demain. (Elle, se retire de la fenĂȘtre.) ROMÉO. — Que le sommeil descende sur tes yeux et la paix dans ton sein ! Que ne suis-je le sommeil et la paix pour goĂ»ter un si doux repos ! Je vais d’ici me rentre Ă  la cellule de mon pieux confesseur, pour implorer son aide, et lui dire mon heureuse fortune. (Il sort.)
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William Shakespeare (Romeo & Juliet)
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Mais les signes de ce qui m'attendait rĂ©ellement, je les ai tous nĂ©gligĂ©s. Je travaille mon diplĂŽme sur le surrĂ©alisme Ă  la bibliothĂšque de Rouen, je sors, je traverse le square Verdrel, il fait doux, les cygnes du bassin ont reparu, et d'un seul coup j'ai conscience que je suis en train de vivre peut-ĂȘtre mes derniĂšres semaines de fille seule, libre d'aller oĂč je veux, de ne pas manger ce midi, de travailler dans ma chambre sans ĂȘtre dĂ©rangĂ©e. Je vais perdre dĂ©finitivement la solitude. Peut-on s'isoler facilement dans un petit meublĂ©, Ă  deux. Et il voudra manger ses deux repas par jour. Toutes sortes d'images me traversent. Une vie pas drĂŽle finalement. Mais je refoule, j'ai honte, ce sont des idĂ©es de fille unique, Ă©gocentrique, soucieuse de sa petite personne, mal Ă©levĂ©e au fond. Un jour, il a du travail, il est fatiguĂ©, si on mangeait dans la chambre au lieu d'aller au restau. Six heures du soir cours Victor-Hugo, des femmes se prĂ©cipitent aux Docks, en face du Montaigne, prennent ci et ça sans hĂ©sitation, comme si elles avaient dans la tĂȘte toute la programmation du repas de ce soir, de demain peut-ĂȘtre, pour quatre personnes ou plus aux goĂ»ts diffĂ©rents. Comment font-elles ? [...] Je n'y arriverai jamais. Je n'en veux pas de cette vie rythmĂ©e par les achats, la cuisine. Pourquoi n'est-il pas venu avec moi au supermarchĂ©. J'ai fini par acheter des quiches lorraines, du fromage, des poires. Il Ă©tait en train d'Ă©couter de la musique. Il a tout dĂ©ballĂ© avec un plaisir de gamin. Les poires Ă©taient blettes au coeur, "tu t'es fait entuber". Je le hais. Je ne me marierai pas. Le lendemain, nous sommes retournĂ©s au restau universitaire, j'ai oubliĂ©. Toutes les craintes, les pressentiments, je les ai Ă©touffĂ©s. SublimĂ©s. D'accord, quand on vivra ensemble, je n'aurai plus autant de libertĂ©, de loisirs, il y aura des courses, de la cuisine, du mĂ©nage, un peu. Et alors, tu renĂącles petit cheval tu n'es pas courageuse, des tas de filles rĂ©ussissent Ă  tout "concilier", sourire aux lĂšvres, n'en font pas un drame comme toi. Au contraire, elles existent vraiment. Je me persuade qu'en me mariant je serai libĂ©rĂ©e de ce moi qui tourne en rond, se pose des questions, un moi inutile. Que j'atteindrai l'Ă©quilibre. L'homme, l'Ă©paule solide, anti-mĂ©taphysique, dissipateur d'idĂ©es tourmentantes, qu'elle se marie donc ça la calmera, tes boutons mĂȘme disparaĂźtront, je ris forcĂ©ment, obscurĂ©ment j'y crois. Mariage, "accomplissement", je marche. Quelquefois je songe qu'il est Ă©goĂŻste et qu'il ne s'intĂ©resse guĂšre Ă  ce que je fais, moi je lis ses livres de sociologie, jamais il n'ouvre les miens, Breton ou Aragon. Alors la sagesse des femmes vient Ă  mon secours : "Tous les hommes sont Ă©goĂŻstes." Mais aussi les principes moraux : "Accepter l'autre dans son altĂ©ritĂ©", tous les langages peuvent se rejoindre quand on veut.
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Annie Ernaux (A Frozen Woman)
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Le Roi des Aulnes Quel est ce chevalier qui file si tard dans la nuit et le vent ? C'est le pĂšre avec son enfant ; Il serre le petit garçon dans son bras, Il le serre bien, il lui tient chaud. « Mon fils, pourquoi caches-tu avec tant d'effroi ton visage ? — PĂšre, ne vois-tu pas le Roi des Aulnes ? Le Roi des Aulnes avec sa traĂźne et sa couronne ? — Mon fils, c'est un banc de brouillard. — Cher enfant, viens, pars avec moi ! Je jouerai Ă  de trĂšs beaux jeux avec toi, Il y a de nombreuses fleurs de toutes les couleurs sur le rivage, Et ma mĂšre possĂšde de nombreux habits d'or. — Mon pĂšre, mon pĂšre, et n'entends-tu pas, Ce que le Roi des Aulnes me promet Ă  voix basse ? — Sois calme, reste calme, mon enfant ! C'est le vent qui murmure dans les feuilles mortes. — Veux-tu, gentil garçon, venir avec moi ? Mes filles s'occuperont bien de toi Mes filles mĂšneront la ronde toute la nuit, Elles te berceront de leurs chants et de leurs danses. — Mon pĂšre, mon pĂšre, et ne vois-tu pas lĂ -bas Les filles du Roi des Aulnes dans ce lieu sombre ? — Mon fils, mon fils, je vois bien : Ce sont les vieux saules qui paraissent si gris. — Je t'aime, ton joli visage me charme, Et si tu ne veux pas, j'utiliserai la force. — Mon pĂšre, mon pĂšre, maintenant il m'empoigne ! Le Roi des Aulnes m'a fait mal ! » Le pĂšre frissonne d'horreur, il galope Ă  vive allure, Il tient dans ses bras l'enfant gĂ©missant, Il arrive Ă  grand-peine Ă  son port ; Dans ses bras l'enfant Ă©tait mort.
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Charles Nodier
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Dans la critique de la preuve ontologique de Dieu, l'erreur consiste Ă  ne pas voir qu'imaginer un objet quelconque n'est nullement la mĂȘme chose que concevoir de l'absolu, ou l'Absolu en soi : car ce qui prime ici, ce n'est pas le jeu subjectif de notre esprit, c'est essentiellement l'Objet absolu qui le dĂ©termine et qui constitue mĂȘme, en derniĂšre analyse, la raison d'ĂȘtre de l'intelligence humaine. Sans un Dieu rĂ©el, point d'homme possible. En parlant de l'argument ontologique, nous pensons Ă  la thĂšse essentielle et non aux raisonnements en partie problĂ©matiques qui sont censĂ©s l'Ă©tayer. Au fond, la base de l'argument est l'analogie entre le mĂ©ta-macrocosme et le microcosme, ou entre Dieu et l'Ăąme : sous un certain rapport, nous somme ce qui est et par consĂ©quent nous pouvons connaĂźtre tout ce qui est, donc l'Être en soi ; car s'il y a le rapport d'incommensurabilitĂ©, il y a aussi celui d'analogie et mĂȘme celui d'identitĂ©, sans quoi nous serions le nĂ©ant pur et simple. Le principe de connaissance n'implique par lui-mĂȘme aucune limitation ; connaĂźtre, c'est connaĂźtre tout le connaissable, et celui-ci coincide avec le rĂ©el Ă©tant donnĂ© qu'a priori et dans l'Absolu le sujet et l'objet se confondent : connaĂźtre c'est ĂȘtre, et inversement. Ce qui nous ramĂšne Ă  la sentence arabe : « Qui connaĂźt son Ăąme, connaĂźt son Seigneur. » ; sans oublier la formule du sanctuaire de Delphe : « Connais-toi toi-mĂȘme »... Si l'on nous dit que l'Absolu est inconnaissable, cela se rapporte non Ă  notre facultĂ© intellective de principe mais Ă  telle modalitĂ© de facto de cette facultĂ© ; Ă  telle Ă©corce, non Ă  la substance.
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Frithjof Schuon (To Have a Center (Library of Traditional Wisdom))
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Caligula! Toi aussi, toi aussi, tu es coupable. Alors, n'est-ce pas, un peu plus, un peu moins! Mais qui oserait me condamner dans ce monde sans juge, oĂč personne n'est innocent! (Avec tout l'accent de la dĂ©tresse, se pressant contre le miroir.) Tu le vois bien, HĂ©licon n'est pas venu. Je n'aurai pas la lune. Mais qu'il est amer d'avoir raison et de devoir aller jusqu'Ă  la consommation. Car j'ai peur de la consommation. Des bruits d'armes! C'est l'innocence qui prĂ©pare son triomphe. Que ne suis-je Ă  leur place! J'ai peur. Quel dĂ©-goĂ»t, aprĂšs avoir mĂ©prisĂ© les autres, de se sentir la mĂȘme lĂąchetĂ© dans l'Ăąme. Mais cela ne fait rien. La peur non plus ne dure pas. Je vais retrouver ce grand vide oĂč le coeur s'apaise. Tout a l'air si compliquĂ©. Tout est si simple pourtant. Si j'avais eu la lune, si l'amour suffisait, tout serait changĂ©. Mais oĂč Ă©tancher cette soif ? Quel coeur, quel dieu auraient pour moi la profondeur d'un lac ? (S'agenouillant et pleu-rant.) Rien dans ce monde, ni dans l'autre, qui soit Ă  ma me-sure. Je sais pourtant, et tu le sais aussi (il tend les mains vers le miroir en pleurant), qu'il suffirait que l'impossible soit. L'impossible! Je l'ai cherchĂ© aux limites du monde, aux confins de moi-mĂȘme. J'ai tendu mes mains (criant), je tends mes mains et c'est toi que je rencontre, toujours toi en face de moi, et je suis pour toi plein de haine. Je n'ai pas pris la voie qu'il fallait, je n'aboutis Ă  rien. Ma libertĂ© n'est pas la bonne. HĂ©licon! HĂ©licon! Rien! rien encore. Oh, cette nuit est lourde! HĂ©licon ne viendra pas: nous serons coupa-bles Ă  jamais! Cette nuit est lourde comme la douleur hu-maine.
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Albert Camus (Caligula)
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Qu’un galop rapide, coursiers aux pieds brĂ»lants, vous emporte vers le palais du Soleil: de son fouet, un conducteur tel que PhaĂ©ton vous aurait prĂ©cipitĂ©s vers le couchant et aurait ramenĂ© la sombre Nuit. Étends ton Ă©pais rideau. Nuit qui couronne l’amour; ferme les yeux errants, et que RomĂ©o puisse voler dans mes bras sans qu’on le dise et sans qu’on le voie. La lumiĂšre de leurs mutuelles beautĂ©s suffit aux amants pour accomplir leurs amoureux mystĂšres; ou si l’Amour est aveugle, il ne s’en accorde que mieux avec la Nuit. Viens, Nuit obligeante, matrone aux vĂȘtements modestes, tout en noir, apprends-moi Ă  perdre au jeu de qui perd gagne, oĂč l’enjeu est deux virginitĂ©s sans tache; couvre de ton obscur manteau mes joues oĂč se rĂ©volte mon sang effarouchĂ©, jusqu’à ce que mon craintif amour, devenu plus hardi dans l’épreuve d’un amour fidĂšle, n’y voie plus qu’un chaste devoir.—Viens, ĂŽ Nuit; viens, RomĂ©o; viens, toi qui es le jour au milieu de la nuit; car sur les ailes de la nuit tu arriveras plus Ă©clatant que n’est sur les plumes du corbeau la neige nouvellement tombĂ©e. Viens, douce nuit; viens, nuit amoureuse, le front couvert de tĂ©nĂšbres: donne-moi mon RomĂ©o; et quand il aura cessĂ© de vivre, reprends-le, et, partage-le en petites Ă©toiles, il rendra la face des cieux si belle, que le monde deviendra amoureux de la nuit et renoncera au culte du soleil indiscret. Oh! j’ai achetĂ© une demeure d’amour, mais je n’en suis pas encore en possession, et celui qui m’a acquise n’est pas encore en jouissance. Ce jour est aussi ennuyeux que la veille d’une fĂȘte pour l’enfant qui a une robe neuve et qui ne peut encore la mettre.
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William Shakespeare (Romeo and Juliet)
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Un jour, avec des yeux vitreux, ma mĂšre me dit: « Lorsque tu seras dans ton lit, que tu entendras les aboiements des chiens dans la campagne, cache-toi dans ta couverture, ne tourne pas en dĂ©rision ce qu'ils font: ils ont soif insatiable de l'infini, comme toi, comme moi, comme le reste des humains, Ă  la figure pĂąle et longue. MĂȘme, je te permets de te mettre devant la fenĂȘtre pour contempler ce spectacle, qui est assez sublime » Depuis ce temps, je respecte le voeu de la morte. Moi, comme les chiens, j'Ă©prouve le besoin de l'infini... Je ne puis, je ne puis contenter ce besoin! Je suis fils de l'homme et de la femme, d'aprĂšs ce qu'on m'a dit. Ça m'Ă©tonne... je croyais ĂȘtre davantage! Au reste, que m'importe d'oĂč je viens? Moi, si cela avait pu dĂ©pendre de ma volontĂ©, j'aurais voulu ĂȘtre plutĂŽt le fils de la femelle du requin, dont la faim est amie des tempĂȘtes, et du tigre, Ă  la cruautĂ© reconnue: je ne serais pas si mĂ©chant. Vous, qui me regardez, Ă©loignez-vous de moi, car mon haleine exhale un souffle empoisonnĂ©. Nul n'a encore vu les rides vertes de mon front; ni les os en saillie de ma figure maigre, pareils aux arĂȘtes de quelque grand poisson, ou aux rochers couvrant les rivages de la mer, ou aux abruptes montagnes alpestres, que je parcourus souvent, quand j'avais sur ma tĂȘte des cheveux d'une autre couleur. Et, quand je rĂŽde autour des habitations des hommes, pendant les nuits orageuses, les yeux ardents, les cheveux flagellĂ©s par le vent des tempĂȘtes, isolĂ© comme une pierre au milieu du chemin, je couvre ma face flĂ©trie, avec un morceau de velours, noir comme la suie qui remplit l'intĂ©rieur des cheminĂ©es : il ne faut pas que les yeux soient tĂ©moins de la laideur que l'Etre suprĂȘme, avec un sourire de haine puissante, a mise sur moi.
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Comte de Lautréamont (Les Chants de Maldoror)
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En honorant l'Ă©cole Ă  l'excĂšs, c'est toi [l'Ă©lĂšve excellent] que tu flattes en douce, tu te poses plus ou moins consciemment en Ă©lĂšve idĂ©al. Ce faisant, tu masques les innombrables paramĂštres qui nous font tellement inĂ©gaux dans l'acquisition du savoir : circonstances, entourage, pathologies, tempĂ©rament
 Ah ! l'Ă©nigme du tempĂ©rament ! « Je dois tout Ă  l'Ă©cole de la RĂ©publique ! » Serait-ce que tu voudrais faire passer tes aptitudes pour des vertus ? (Les unes et les autres n'Ă©tant d'ailleurs pas incompatibles
) RĂ©duire ta rĂ©ussite Ă  une question de volontĂ©, de tĂ©nacitĂ©, de sacrifice, c'est ça que tu veux ? Il est vrai que tu fus un Ă©lĂšve travailleur et persĂ©vĂ©rant, et que le mĂ©rite t'en revient, mais c'est, aussi, pour avoir joui trĂšs tĂŽt de ton aptitude Ă  comprendre, Ă©prouvĂ© dĂšs tes premiĂšres conforntations au travail scolaire la joie immense d'avoir compris, et que l'effort portait en lui-mĂȘme la promesse de cette joie ! À l'heure oĂč je m'asseyais Ă  ma table Ă©crasĂ© par la conviction de mon idiotie, tu t'installais Ă  la tienne vibrant d'impatience, impatience de passer Ă  autre chose aussi, car ce problĂšme de math sur lequel je m'endormais tu l'expĂ©diais, toi, en un tournemain. Nos devoirs, qui Ă©taient les tremplins de ton esprit, Ă©taient les sables mouvants oĂč s'enlisait le mien. Ils te laissaient libre comme l'air, avec la satisfaction du devoir accompli, et moi hĂ©bĂ©tĂ© d'ignorance, maquillant un vague brouillon en copie dĂ©finitive, Ă  grand renfort de traits soigneusement tirĂ©s qui ne trompaient personne. À l'arrivĂ©e, tu Ă©tais le travailleur, j'Ă©tais le paresseux. C'Ă©tait donc ça, la paresse ? Cet enlisement en soi-mĂȘme ? Et le travail, qu'Ă©tait-ce donc ? Comment s'y prenaient-ils, ceux qui travaillaient bien ? OĂč puisaient-ils cette force ? Ce fut l'Ă©nigme de mon enfance. L'effort, oĂč je m'anĂ©antissais, te fut d'entrĂ©e de jeu un gage d'Ă©panouissement. Nous ignorions toi et moi qu'« il faut rĂ©ussir pour comprendre », selon le mot si clair de Piaget, et que nous Ă©tions, toi comme moi, la vivante illustration de cet axiome. (p. 271-272)
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Daniel Pennac (Chagrin d'Ă©cole)
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Cependant, au milieu de ces circonstances, la rĂ©solution de quitter la vie avait pris toujours plus de force dans l’urne de Werther. Depuis son retour auprĂšs de Charlotte, cette rĂ©solution avait toujours Ă©tĂ© sa perspective et son espĂ©rance suprĂȘme ; mais il s’était dit que ce ne devait pas ĂȘtre une action soudaine, prĂ©cipitĂ©e ; qu’il voulait faire ce pas avec la plus sĂ©rieuse conviction, avec la rĂ©solution la plus calme. Ses doutes, ses combats intĂ©rieurs se rĂ©vĂšlent dans un petit billet, qui paraĂźt ĂȘtre le commencement d’une lettre Ă  Wilhelm, et qui s’est trouvĂ©, sans date, parmi ses papiers. « Sa prĂ©sence, sa destinĂ©e, l’intĂ©rĂȘt qu’elle prend Ă  la mienne, expriment la derniĂšre larme de mon cerveau calcinĂ©. « Lever le rideau et passer derriĂšre
. voilĂ  tout ! Et pourquoi craindre et balancer ? Parce qu’on ne sait pas ce qu’il y a derriĂšre ? parce qu’on n’en revient pas ? et que c’est le propre de notre esprit d’imaginer que tout est confusion et tĂ©nĂšbres, aux lieux dont nous ne savons rien de certain ? » Enfin il s’accoutuma et se familiarisa toujours plus avec cette triste pensĂ©e, et l’on trouve un tĂ©moignage de sa rĂ©solution ferme et irrĂ©vocable dans cette lettre ambiguĂ«, qu’il Ă©crivait Ă  son ami : 20 dĂ©cembre. « Je rends grice Ă  ton amitiĂ©, Wilhelm, d’avoir entendu ce mot comme tu l’as fait. Oui, tu as raison : le meilleur pour moi serait de partir. La proposition que tu me fais de retourner auprĂšs de vous ne me plaĂźt pas tout Ă  fait ; du moins je voudrais faire encore un dĂ©tour, d’autant plus que nous pouvons espĂ©rer une gelĂ©e soutenue et de bons chemins. Il m’est aussi trĂšsagrĂ©able que tu veuilles venir me chercher : seulement, laisse encore passer quinze jours, et attends encore une lettre de moi avec d’autres avis. Il ne faut rien cueillir avant qu’il soit mĂ»r, et quinze jours de plus ou de moins font beaucoup. Tu diras Ă  ma mĂšre de prier pour son fils, et de vouloir bien me pardonner tous les chagrins que je lui ai faits. C’était ma destinĂ©e d’affliger ceux que le devoir m’appelait Ă  rendre heureux. Adieu, mon trĂšs-cher ami. Que le ciel rĂ©pande sur toi toutes ses bĂ©nĂ©dictions ! Adieu. »
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Johann Wolfgang von Goethe (The Sorrows of Young Werther)
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Maldoror, Ă©coute-moi. Remarque ma figure, calme comme un miroir, et je crois avoir une intelligence Ă©gale Ă  la tienne. Un jour, tu m’appelas le soutien de ta vie. Depuis lors, je n’ai pas dĂ©menti la confiance que tu m’avais vouĂ©e. Je ne suis qu’un simple habitant des roseaux, c’est vrai ; mais, grĂące Ă  ton propre contact, ne prenant que ce qu’il y avait de beau en toi, ma raison s’est agrandie, et je puis te parler. Je suis venu vers toi, afin de te retirer de l’abĂźme. Ceux qui s’intitulent tes amis te regardent, frappĂ©s de consternation, chaque fois qu’ils te rencontrent, pĂąle et voĂ»tĂ©, dans les thĂ©Ăątres, dans les places publiques, ou pressant, de deux cuisses nerveuses, ce cheval qui ne galope que pendant la nuit, tandis qu’il porte son maĂźtre-fantĂŽme, enveloppĂ© dans un long manteau noir. Abandonne ces pensĂ©es, qui rendent ton cƓur vide comme un dĂ©sert ; elles sont plus brĂ»lantes que le feu. Ton esprit est tellement malade que tu ne t’en aperçois pas, et que tu crois ĂȘtre dans ton naturel, chaque fois qu’il sort de ta bouche des paroles insensĂ©es, quoique pleines d’une infernale grandeur. Malheureux ! qu’as-tu dit depuis le jour de ta naissance ? Ô triste reste d’une intelligence immortelle, que Dieu avait crĂ©Ă©e avec tant d’amour ! Tu n’as engendrĂ© que des malĂ©dictions, plus affreuses que la vue de panthĂšres affamĂ©es ! Moi, je prĂ©fĂ©rerais avoir les paupiĂšres collĂ©es, mon corps manquant des jambes et des bras, avoir assassinĂ© un homme, que ne pas ĂȘtre toi ! Parce que je te hais. Pourquoi avoir ce caractĂšre qui m’étonne ? De quel droit viens-tu sur cette terre, pour tourner en dĂ©rision ceux qui l’habitent, Ă©pave pourrie, ballottĂ©e par le scepticisme ? Si tu ne t’y plais pas, il faut retourner dans les sphĂšres d’oĂč tu viens. Un habitant des citĂ©s ne doit pas rĂ©sider dans les villages, pareil Ă  un Ă©tranger. Nous savons que, dans les espaces, il existe des sphĂšres plus spacieuses que la nĂŽtre, et donc les esprits ont une intelligence que nous ne pouvons mĂȘme pas concevoir. Eh bien, va-t’en !
 retire-toi de ce sol mobile !
 montre enfin ton essence divine, que tu as cachĂ©e jusqu’ici ; et, le plus tĂŽt possible, dirige ton vol ascendant vers la sphĂšre, que nous n’envions point, orgueilleux que tu es ! Car, je ne suis pas parvenu Ă  reconnaĂźtre si tu es un homme ou plus qu’un homme ! Adieu donc ; n’espĂšre plus retrouver le crapaud sur ton passage. Tu es la cause de ma mort. Moi, je pars pour l’éternitĂ©, afin d’implorer ton pardon !
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Comte de Lautréamont
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Wilhelm, on deviendrait furieux de voir qu’il y ait des hommes incapables de goĂ»ter et de sentir le peu de biens qui ont encore quelque valeur sur la terre. Tu connais les noyers sous lesquels je me .suis assis avec Charlotte, Ă  St
, chez le bon pasteur, ces magnifiques noyers, qui, Dieu le sait, me remplissaient toujours d’une joie calme et profonde. Quelle paix, quelle fraĂźcheur ils rĂ©pandaient sur le presbytĂšre ! Que les rameaux Ă©taient majestueux ! Et le souvenir enfin des vĂ©nĂ©rables pasteurs qui les avaient plantĂ©s, tant d’annĂ©es auparavant !
 Le maĂźtre d’école nous a dit souvent le nom de l’un d’eux, qu’il avait appris de son grand-pĂšre. Ce fut sans doute un homme vertueux, et, sous ces arbres, sa mĂ©moire me fut toujours sacrĂ©e. Eh bien, le maĂźtre d’école avait hier les larmes aux yeux, comme nous parlions ensemble de ce qu’on les avait abattus. Abattus ! j’en suis furieux, je pourrais tuer le chien qui a portĂ© le premier coup de hache. Moi, qui serais capable de prendre le deuil, si, d’une couple d’arbres tels que ceux-lĂ , qui auraient existĂ© dans ma cour, l’un venait Ă  mourir de vieillesse, il faut que je voie une chose pareille !
 Cher Wilhelm, il y a cependant une compensation. Chose admirable que l’humanitĂ© ! Tout le village murmure, et j’espĂšre que la femme du pasteur s’apercevra au beurre, aux Ɠufs et autres marques d’amitiĂ©, de la blessure qu’elle a faite Ă  sa paroisse. Car c’est elle, la femme du nouveau pasteur (notre vieux est mort), une personne sĂšche, maladive, qui fait bien de ne prendre au monde aucun intĂ©rĂȘt, attendu que personne n’en prend Ă  elle. Une folle, qui se pique d’ĂȘtre savante ; qui se mĂȘle de l’étude du canon ; qui travaille Ă©normĂ©ment Ă  la nouvelle rĂ©formation morale et critique du christianisme ; Ă  qui les rĂȘveries de Lavater font lever les Ă©paules ; dont la santĂ© est tout Ă  fait dĂ©labrĂ©e, et qui ne goĂ»te, par consĂ©quent, aucune joie sur la terre de Dieu ! Une pareille crĂ©ature Ă©tait seule capable de faire abattre mes noyers. Vois-tu, je n’en reviens pas. Figure-toi que les feuilles tombĂ©es lui rendent la cour humide et malpropre ; les arbres interceptent le jour Ă  madame, et, quand les noix sont mĂ»res, les enfants y jettent des pierres, et cela lui donne sur les nerfs, la trouble dans ses profondes mĂ©ditations, lorsqu’elle pĂšse et met en parallĂšle Kennikot, Semler et MichaĂ«lis. Quand j’ai vu les gens du village, surtout les vieux, si mĂ©contents, je leur ai dit : « Pourquoi l’avez-vous souffert ?— A la campagne, m’ontils rĂ©pondu, quand le maire veut quelque chose, que peut-on /aire ? * Mais voici une bonne aventure. : le- pasteur espĂ©rait aussi tirer quelque avantage des caprices de sa femme, qui d’ordinaire ne rendent pas sa soupe plus grasse, et il croyait partager le produit avec le maire ; la chambre des domaines en fut avertie et dit : « A moi, s’il vous plaĂźt ! » car elle avait d’anciennes prĂ©tentions sur la partie du presbytĂšre oĂč les arbres Ă©taient plantĂ©s, et elle les a vendus aux enchĂšres. Ils sont Ă  bas ! Oh ! si j’étais prince, la femme du pasteur, le maire, la chambre des domaines, apprendraient
. Prince !
 Eh ! si j’étais prince, que m’importeraient les arbres de mon pays ?
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Johann Wolfgang von Goethe (The Sorrows of Young Werther)
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FRÈRE LAURENCE.—Un arrĂȘt moins rigoureux s’est Ă©chappĂ© de sa bouche: ce n’est pas la mort de ton corps, mais son bannissement. ROMÉO.—Ah! le bannissement! aie pitiĂ© de moi; dis la mort. L’aspect de l’exil porte avec lui plus de terreur, beaucoup plus que la mort. Ah! ne me dis pas que c’est le bannissement. FRÈRE LAURENCE.—Tu es banni de VĂ©rone. Prends patience; le monde est grand et vaste. ROMÉO.—Le monde n’existe pas hors des murs de VĂ©rone; ce n’est plus qu’un purgatoire, une torture, un vĂ©ritable enfer. Banni de ce lieu, je le suis du monde, c’est la mort. Oui, le bannissement, c’est la mort sous un faux nom; et ainsi, en nommant la mort un bannissement, tu me tranches la tĂȘte avec une hache d’or, et souris au coup qui m’assassine. FRÈRE LAURENCE.—O mortel pĂ©chĂ©! ĂŽ farouche ingratitude! Pour ta faute, notre loi demandait la mort; mais le prince indulgent, prenant ta dĂ©fense, a repoussĂ© de cĂŽtĂ© la loi, et a changĂ© ce mot funeste de mort en celui de bannissement: c’est une rare clĂ©mence, et tu ne veux pas la reconnaĂźtre. ROMÉO.—C’est un supplice et non une grĂące. Le ciel est ici, oĂč vit Juliette: les chats, les chiens, la moindre petite souris, tout ce qu’il y a de plus misĂ©rable vivra ici dans le ciel, pourra la voir; et RomĂ©o ne le peut plus! La mouche qui vit de charogne jouira d’une condition plus digne d’envie, plus honorable, plus relevĂ©e que RomĂ©o; elle pourra s’ébattre sur les blanches merveilles de la chĂšre main de Juliette, et dĂ©rober le bonheur des immortels sur ces lĂšvres oĂč la pure et virginale modestie entretient une perpĂ©tuelle rougeur, comme si les baisers qu’elles se donnent Ă©taient pour elles un pĂ©chĂ©; mais RomĂ©o ne le peut pas, il est banni! Ce que l’insecte peut librement voler, il faut que je vole pour le fuir; il est libre et je suis banni; et tu me diras encore que l’exil n’est pas la mort!
 N’as-tu pas quelque poison tout prĂ©parĂ©, quelque poignard affilĂ©, quelque moyen de mort soudaine, fĂ»t-ce la plus ignoble? Mais banni! me tuer ainsi! banni! O moine, quand ce mot se prononce en enfer, les hurlements l’accompagnent.—Comment as-tu le coeur, toi un prĂȘtre, un saint confesseur, toi qui absous les fautes, toi mon ami dĂ©clarĂ©, de me mettre en piĂšces par ce mot bannissement? FRÈRE LAURENCE.—Amant insensĂ©, Ă©coute seulement une parole. ROMÉO.—Oh! tu vas me parler encore de bannissement. FRÈRE LAURENCE.—Je veux te donner une arme pour te dĂ©fendre de ce mot: c’est la philosophie, ce doux baume de l’adversitĂ©; elle te consolera, quoique tu sois exilĂ©. ROMÉO.—Encore l’exil! Que la philosophie aille se faire pendre: Ă  moins que la philosophie n’ait le pouvoir de crĂ©er une Juliette, de dĂ©placer une ville, ou de changer l’arrĂȘt d’un prince, elle n’est bonne Ă  rien, elle n’a nulle vertu; ne m’en parle plus. FRÈRE LAURENCE.—Oh! je vois maintenant que les insensĂ©s n’ont point d’oreilles. ROMÉO.—Comment en auraient-ils, lorsque les hommes sages n’ont pas d’yeux? FRÈRE LAURENCE.—Laisse-moi discuter avec toi ta situation. ROMÉO.—Tu ne peux parler de ce que tu ne sens pas. Si tu Ă©tais aussi jeune que moi, amant de Juliette, mariĂ© seulement depuis une heure, meurtrier de Tybalt, Ă©perdu d’amour comme moi, et comme moi banni, alors tu pourrais parler; alors tu pourrais t’arracher les cheveux et te jeter sur la terre comme je fais, pour prendre la mesure d’un tombeau qui n’est pas encore ouvert.
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William Shakespeare (Romeo and Juliet)
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ROMÉO. — Elle parle : oh, parle encore, ange brillant ! car lĂ  oĂč tu es, au-dessus de ma tĂȘte, tu me parais aussi splendide au sein de cette nuit que l’est un messager ailĂ© du ciel aux-regards Ă©tonnĂ©s des mortels ; lorsque rejetant leurs tĂȘtes en arriĂšre, on ne voit plus que le blanc de leurs yeux, tant leurs prunelles sont dirigĂ©es-en haut pour le contempler, pendant qu’il chevauche sur les nuages Ă  la marche indolente et navigue sur le sein de l’air. JULIETTE. — Ô RomĂ©o, RomĂ©o ! pourquoi es-tu RomĂ©o ? Renie ton pĂšre, ou rejette ton nom ; ou si tu ne veux pas, lie-toi seulement par serment Ă  mon amour, et je ne serai pas plus longtemps une Capulet. ROMÉO, Ă  part. — En entendrai-je davantage, ou rĂ©pondrai-je Ă  ce qu’elle rient de dire JULIETTE. — C’est ton nom seul qui est mon ennemi. AprĂšs tout tu es toi-mĂȘme, et non un Montaigu. Qu’est-ce qu’un Montaigu ? Ce n’est ni une main, ni un pied, ni un bras, ni un, visage, ni toute autre partie du corps appartenant Ă  un homme. Oh ! porte un autre nom ! Qu’y a-t-il dans un nom ? La fleur que nous nommons la rose, sentirait tout aussi bon sous un autre nom ; ainsi RomĂ©o, quand bien mĂȘme il ne serait pas appelĂ© RomĂ©o, n’en garderait pas moins la prĂ©cieuse perfection : qu’il possĂšde. Renonce Ă  ton nom RomĂ©o, et en place de ce nom qui ne fait pas partie de toi, prends-moi toute entiĂšre. ROMÉO. — Je te prends au mot : appelle-moi seulement : ton amour, et je serai rebaptisĂ©, et dĂ©sormais je ne voudrai plus ĂȘtre RomĂ©o. JULIETTE. — Qui es-tu, toi qui, protĂ©gĂ© par la nuit, viens ainsi surprendre les secrets de mon Ăąme ? ROMÉO. — Je ne sais de quel nom me servir pour te dire qui je suis : mon nom, chĂšre sainte, m’est odieux Ă  moi-mĂȘme, parce qu’il t’est ennemi ; s’il Ă©tait Ă©crit, je dĂ©chirerais le mot qu’il forme. JULIETTE. — Mes oreilles n’ont pas encore bu cent paroles de cette voix, et cependant j’en reconnais le son n’es-tu pas RomĂ©o, et un Montaigu ? ROMÉO. — Ni l’un, ni l’autre, belle vierge, si l’un ou l’autre te dĂ©plaĂźt. JULIETTE. — Comment es-tu venu ici, dis-le-moi, et pourquoi ? Les murs du jardin sont Ă©levĂ©s et difficiles Ă  escalader, et considĂ©rant qui tu es, cette place est mortelle pour toi, si quelqu’un de mes parents t’y trouve. ROMÉO. — J’ai franchi ces murailles avec les ailes lĂ©gĂšres de l’amour, car des limites de pierre ne peuvent arrĂȘter l’essor de l’amour ; et quelle chose l’amour peut-il oser qu’il ne puisse aussi exĂ©cuter ? tes parents ne me, sont donc pas un obstacle. JULIETTE. — S’ils te voient, ils t’assassineront. ROMÉO. — HĂ©las ! il y a plus de pĂ©rils, dans tes yeux que dans vingt de leurs Ă©pĂ©es : veuille seulement abaisser un doux regard sĂ»r moi, et je suis cuirassĂ© contre leur inimitiĂ©. JULIETTE. — Je ne voudrais pas, pour le monde entier, qu’ils te vissent ici. ROMÉO. — J’ai le manteau de la nuit pour me dĂ©rober Ă  leur vue et d’ailleurs, Ă  moins que tu ne m’aimes, ils peuvent me trouver, s’ils veulent : mieux vaudrait que leur haine mĂźt fin Ă  ma vie, que si ma mort Ă©tait retardĂ©e, sans que j’eusse ton amour ; JULIETTE. — Quel est celui qui t’a enseignĂ© la direction de cette place ? ROMÉO. — C’est l’Amour, qui m’a excitĂ© Ă  la dĂ©couvrir ; il m’a prĂȘtĂ© ses conseils, et je lui ai prĂȘtĂ© mes yeux. Je ne suis pas pilote ; cependant fusses-tu aussi Ă©loignĂ©e que le vaste rivage baignĂ© par la plus lointaine nier, je m’aventurerais pour une marchandise telle que toi.
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William Shakespeare (Romeo and Juliet)
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JULIETTE.—Oh! manque, mon coeur! Pauvre banqueroutier, manque pour toujours; emprisonnez-vous, mes yeux; ne jetez plus un seul regard sur la libertĂ©. Terre vile, rends-toi Ă  la terre; que tout mouvement s’arrĂȘte, et qu’une mĂȘme biĂšre presse de son poids et RomĂ©o et toi. LA NOURRICE.—O Tybalt, Tybalt! le meilleur ami que j’eusse! O aimable Tybalt, honnĂȘte cavalier, faut-il que j’aie vĂ©cu pour te voir mort! JULIETTE.—Quelle est donc cette tempĂȘte qui souffle ainsi dans les deux sens contraires? RomĂ©o est-il tuĂ©, et Tybalt est-il mort? Mon cousin chĂ©ri et mon Ă©poux plus cher encore? Que la terrible trompette sonne donc le jugement universel. Qui donc est encore en vie, si ces deux-lĂ  sont morts? LA NOURRICE.—Tybalt est mort, et RomĂ©o est banni: RomĂ©o, qui l’a tuĂ©, est banni. JULIETTE.—O Dieu! la main de RomĂ©o a-t-elle versĂ© le sang de Tybalt? LA NOURRICE.—Il l’a fait, il l’a fait! O jour de malheur! il l’a fait! JULIETTE.—O coeur de serpent cachĂ© sous un visage semblable Ă  une fleur! jamais dragon a-t-il choisi un si charmant repaire? Beau tyran, angĂ©lique dĂ©mon, corbeau couvert des plumes d’une colombe, agneau transportĂ© de la rage du loup, mĂ©prisable substance de la plus divine apparence, toi, justement le contraire de ce que tu paraissais Ă  juste titre, damnable saint, traĂźtre plein d’honneur! O nature, qu’allais-tu donc chercher en enfer, lorsque de ce corps charmant, paradis sur la terre, tu fis le berceau de l’ñme d’un dĂ©mon? Jamais livre contenant une aussi infĂąme histoire porta-t-il une si belle couverture? et se peut-il que la trahison habite un si brillant palais? LA NOURRICE.—Il n’y a plus ni sincĂ©ritĂ©, ni foi, ni honneur dans les hommes; tous sont parjures, corrompus, hypocrites. Ah! oĂč est mon valet? Donnez-moi un peu d’aqua vité
.. Tous ces chagrins, tous ces maux, toutes ces peines me vieillissent. Honte soit Ă  RomĂ©o! JULIETTE.—Maudite soit ta langue pour un pareil souhait! Il n’est pas nĂ© pour la honte: la honte rougirait de s’asseoir sur son front; c’est un trĂŽne oĂč on peut couronner l’honneur, unique souverain de la terre entiĂšre. Oh! quelle brutalitĂ© me l’a fait maltraiter ainsi? LA NOURRICE.—Quoi! vous direz du bien de celui qui a tuĂ© votre cousin? JULIETTE.—Eh! dirai-je du mal de celui qui est mon mari? Ah! mon pauvre Ă©poux, quelle langue soignera ton nom, lorsque moi, ta femme depuis trois heures, je l’ai ainsi dĂ©chirĂ©? Mais pourquoi, traĂźtre, as-tu tuĂ© mon cousin? Ah! ce traĂźtre de cousin a voulu tuer mon Ă©poux.—Rentrez, larmes insensĂ©es, rentrez dans votre source; c’est au malheur qu’appartient ce tribut que par mĂ©prise vous offrez Ă  la joie. Mon Ă©poux vit, lui que Tybalt aurait voulu tuer; et Tybalt est mort, lui qui aurait voulu tuer mon Ă©poux. Tout ceci est consolant, pourquoi donc pleurĂ©-je? Ah! c’est qu’il y a lĂ  un mot, plus fatal que la mort de Tybalt, qui m’a assassinĂ©e.—Je voudrais bien l’oublier; mais, ĂŽ ciel! il pĂšse sur ma mĂ©moire comme une offense digne de la damnation sur l’ñme du pĂ©cheur. Tybalt est mort, et RomĂ©o est
.. banni! Ce banni, ce seul mot banni, a tuĂ© pour moi dix mille Tybalt. La mort de Tybalt Ă©tait un assez grand malheur, tout eĂ»t-il fini lĂ ; ou si les cruelles douleurs se plaisent Ă  marcher ensemble, et qu’il faille nĂ©cessairement que d’autres peines les accompagnent, pourquoi, aprĂšs m’avoir dit: «Tybalt est mort,» n’a-t-elle pas continuĂ©: «ton pĂšre aussi, ou ta mĂšre, ou tous les deux?» cela eĂ»t excitĂ© en moi les douleurs ordinaires. Mais par cette arriĂšre-garde qui a suivi la mort de Tybalt, RomĂ©o est banni; par ce seul mot, pĂšre, mĂšre, Tybalt, RomĂ©o, Juliette, tous sont assassinĂ©s, tous morts. RomĂ©o banni! Il n’y a ni fin, ni terme, ni borne, ni mesure dans la mort qu’apporte avec lui ce mot, aucune parole ne peut sonder ce malheur.
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William Shakespeare (Romeo and Juliet)
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Les deux femmes, vĂȘtues de noir, remirent le corps dans le lit de ma sƓur, elles jetĂšrent dessus des fleurs et de l’eau bĂ©nite, puis, lorsque le soleil eut fini de jeter dans l’appartement sa lueur rougeĂątre et terne comme le regard d’un cadavre, quand le jour eut disparu de dessus les vitres, elles allumĂšrent deux petites bougies qui Ă©taient sur la table de nuit, s’agenouillĂšrent et me dirent de prier comme elles. Je priai, oh ! bien fort, le plus qu’il m’était possible ! mais rien
 LĂ©lia ne remuait pas ! Je fus longtemps ainsi agenouillĂ©, la tĂȘte sur les draps du lit froids et humides, je pleurais, mais bas et sans angoisses ; il me semblait qu’en pensant, en pleurant, en me dĂ©chirant l’ñme avec des priĂšres et des vƓux, j’obtiendrais un souffle, un regard, un geste de ce corps aux formes indĂ©cises et dont on ne distinguait rien si ce n’est, Ă  une place, une forme ronde qui devait ĂȘtre La tĂȘte, et plus bas une autre qui semblait ĂȘtre les pieds. Je croyais, moi, pauvre naĂŻf enfant, je croyais que la priĂšre pouvait rendre la vie Ă  un cadavre, tant j’avais de foi et de candeur ! Oh ! on ne sait ce qu’a d’amer et de sombre une nuit ainsi passĂ©e Ă  prier sur un cadavre, Ă  pleurer, Ă  vouloir faire renaĂźtre le nĂ©ant ! On ne sait tout ce qu’il y a de hideux et d’horrible dans une nuit de larmes et de sanglots, Ă  la lueur de deux cierges mortuaires, entourĂ© de deux femmes aux chants monotones, aux larmes vĂ©nales, aux grotesques psalmodies ! On ne sait enfin tout ce que cette scĂšne de dĂ©sespoir et de deuil vous remplit le cƓur : enfant, de tristesse et d’amertume ; jeune homme, de scepticisme ; vieillard, de dĂ©sespoir ! Le jour arriva. Mais quand le jour commença Ă  paraĂźtre, lorsque les deux cierges mortuaires commençaient Ă  mourir aussi, alors ces deux femmes partirent et me laissĂšrent seul. Je courus aprĂšs elles, et me traĂźnant Ă  leurs pieds, m’attachant Ă  leurs vĂȘtements : — Ma sƓur ! leur dis-je, eh bien, ma sƓur ! oui, LĂ©lia ! oĂč est-elle ? Elles me regardĂšrent Ă©tonnĂ©es. — Ma sƓur ! vous m’avez dit de prier, j’ai priĂ© pour qu’elle revienne, vous m’avez trompĂ© ! — Mais c’était pour son Ăąme ! Son Ăąme ? Qu’est-ce que cela signifiait ? On m’avait souvent parlĂ© de Dieu, jamais de l’ñme. Dieu, je comprenais cela au moins, car si l’on m’eĂ»t demandĂ© ce qu’il Ă©tait, eh bien, j’aurais pris La linotte de LĂ©lia, et, lui brisant la tĂȘte entre mes mains, j’aurais dit : « Et moi aussi, je suis Dieu ! » Mais l’ñme ? l’ñme ? qu’est-ce cela ? J’eus la hardiesse de le leur demander, mais elles s’en allĂšrent sans me rĂ©pondre. Son Ăąme ! eh bien, elles m’ont trompĂ©, ces femmes. Pour moi, ce que je voulais, c’était LĂ©lia, LĂ©lia qui jouait avec moi sur le gazon, dans les bois, qui se couchait sur la mousse, qui cueillait des fleurs et puis qui les jetait au vent ; c’était Lelia, ma belle petite sƓur aux grands yeux bleus, LĂ©lia qui m’embrassait le soir aprĂšs sa poupĂ©e, aprĂšs son mouton chĂ©ri, aprĂšs sa linotte. Pauvre sƓur ! c’était toi que je demandais Ă  grands cris, en pleurant, et ces gens barbares et inhumains me rĂ©pondaient : « Non, tu ne la reverras pas, tu as priĂ© non pour elle, mais tu as priĂ© pour son Ăąme ! quelque chose d’inconnu, de vague comme un mot d’une langue Ă©trangĂšre ; tu as priĂ© pour un souffle, pour un mot, pour le nĂ©ant, pour son Ăąme enfin ! » Son Ăąme, son Ăąme, je la mĂ©prise, son Ăąme, je la regrette, je n’y pense plus. Qu’est-ce que ça me fait Ă  moi, son Ăąme ? savez-vous ce que c’est que son Ăąme ? Mais c’est son corps que je veux ! c’est son regard, sa vie, c’est elle enfin ! et vous ne m’avez rien rendu de tout cela. Ces femmes m’ont trompĂ©, eh bien, je les ai maudites. Cette malĂ©diction est retombĂ©e sur moi, philosophe imbĂ©cile qui ne sais pas comprendre un mot sans L’épeler, croire Ă  une Ăąme sans la sentir, et craindre un Dieu dont, semblable au PromĂ©thĂ©e d’Eschyle, je brave les coups et que je mĂ©prise trop pour blasphĂ©mer.
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Gustave Flaubert (La derniÚre heure : Conte philosophique inachevé)