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Aphex Twin acheva une chanson et commença la suivante : Zigomatic 17, dont les sonoritĂ©s court-circuitĂ©es esquissaient un Ă©lectroencĂ©phalogramme en forme de baobab phonique, et soudain je sus qui Ă©tait AliĂ©nor Malèze, et je prononçai ces paroles ailĂ©es, AliĂ©nor, tu es un baobab, c’est pour ça que tu ne bouges pas, les premiers hommes d’Afrique ont essayĂ© tous les arbres et chacun avait son utilitĂ© : tel brĂ»lait bien, tel faisait de bons arcs et de bons outils, tel gagnait Ă ĂŞtre mâchouillĂ© pendant des heures, tel poussait si vite qu’on dĂ©guisait un paysage en un an, tel, si on le râpait, parfumait la viande, tel lavait les cheveux, tel rendait sa virilitĂ© Ă celui qui l’avait perdue Ă la chasse, il n’y avait que le baobab qui dĂ©cidĂ©ment ne servait Ă rien, ce n’était pas faute d’avoir expĂ©rimentĂ© son bois, que fait-on d’un arbre bon Ă rien, que fait-on par ailleurs de ce qui n’est bon Ă rien, arbre ou homme, on dĂ©crète qu’il est sacrĂ©, voilĂ son utilitĂ©, il sert Ă ĂŞtre sacrĂ©, pas touche au baobab, il est sacrĂ©, on a besoin de sacrĂ©, tu sais c’est ce truc auquel on ne comprend rien mais qui aide on ne sait pas Ă quoi, ça aide, si ton cĹ“ur est oppressĂ©, va t’asseoir Ă l’ombre du baobab, prends exemple sur lui, sois grand et inutile que celui qui ne sert Ă rien, voilĂ , tu as compris, le grand est inutile, on a besoin de grandeur parce que c’est absolu, c’est une question de taille et non de structure, si le baobab rapetisse prodigieusement, il devient un brocoli, le brocoli peut ĂŞtre mangĂ©, le baobab est le brocoli cosmique dont parlait Salvador DalĂ, AliĂ©nor, elle, c’est la version humaine du phĂ©nomène, ses dimensions sont Ă mi-chemin entre le baobab et le brocoli, c’est pour ça que ses Ă©crits fascinent.
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