Rien Faire Quotes

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Je n'ai jamais écrit, croyant le faire, je n'ai jamais aimé, croyant aimer, je n'ai jamais rien fait qu'attendre devant la porte fermée.
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Marguerite Duras (The Lover)
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C'est drÎlement dangereux de s'attacher à quelqu'un. C'est incroyable ce que ça peut faire mal. Rien que la peur de perdre l'autre est douloureuse.
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Marc Levy (Le Voleur d'ombres)
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On meurt toujours trop tĂŽt ― ou trop tard. Et cependant la vie est lĂ , terminĂ©e: le trait est tirĂ©, il faut faire la somme. Tu n'es rien d'autre que ta vie.
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Jean-Paul Sartre (No Exit)
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Donc, il faudra que je meure et flotte comme Ă©cume sur la mer et n'entende jamais plus la musique des vagues, ne voit plus les fleurs ravissantes et le rouge soleil. Ne puis-je rien faire pour gagner une vie Ă©ternelle?
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Hans Christian Andersen
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Un bon livre, au contraire, ne cherche pas Ă  vous captiver, il vous fait regarder vers le haut (le ciel sans nuage d'Ă©tĂ©) tout en plongeant au fond de vous-mĂȘme.
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Dany LaferriĂšre (L'art presque perdu de ne rien faire)
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Nous ne faisions rien de mal cet aprĂšs-midi-lĂ . Et c'est cela Ă  mon avis le seul sens Ă  donner Ă  sa vie: trouver son bonheur sans augmenter la douleur du monde.
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Dany LaferriĂšre (L'art presque perdu de ne rien faire)
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comme il n'existe point de marchands d'amis, les hommes n'ont plus d'amis. Si tu veux un ami, apprivoise-moi! Que faut-il faire? Dit le petit prince. Il faut ĂȘtre trĂšs patient, rĂ©pondit le renard. Tu t'assoiras d'abord un peu loin de moi, comme ça, dans l'herbe. Je te regarderai du coin de l'Ɠil et tu ne diras rien. Le langage est source de malentendus. Mais, chaque jour, tu pourras t'asseoir un peu plus prĂšs...
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Antoine de Saint-Exupéry (Le Petit Prince)
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Faire, et en faisant se faire et n'ĂȘtre rien que ce qu'on fait
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Jean-Paul Sartre
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Tu n'as rien appris, sinon que la solitude n'apprend rien, que l'indiffĂ©rence n'apprend rien: c'Ă©tait un leurre, une illusion fascinante et piĂ©gĂ©e. Tu Ă©tais seul et voilĂ  tout et tu voulais te protĂ©ger: qu'entre le monde et toi les ponts soient Ă  jamais coupĂ©s. Mais tu es si peu de chose et le monde est un si grand mot: tu n'as jamais fait qu'errer dans une grande ville, que longer sur quelques kilomĂštres des façades, des devantures, des parcs et des quais. L'indiffĂ©rence est inutile. Tu peux vouloir ou ne pas vouloir, qu'importe! Faire ou ne pas faire une partie de billard Ă©lectrique, quelqu'un, de toute façon, glissera une piĂšce de vingt centimes dans la fente de l'appareil. Tu peux croire qu'Ă  manger chaque jour le mĂȘme repas tu accomplis un geste dĂ©cisif. Mais ton refus est inutile. Ta neutralitĂ© ne veut rien dire. Ton inertie est aussi vaine que ta colĂšre.
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Georges Perec (Un Homme qui dort)
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Autant pas se faire d'illusions, les gens n'ont rien Ă  se dire, ils ne se parlent que de leurs peines Ă  eux chacun, c'est entendu. Chacun pour soi, la terre pour tous.
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Louis-Ferdinand CĂ©line (Journey to the End of the Night)
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Vous ĂȘtes tout les deux les personnes que j'ai le plus aimĂ©es au monde et j'ai fait de mon mieux possible, croyez-le. Serrez bien contre vous vos beaux enfants. Lucile PS : [...] Je sais bien que ça va vous faire de la peine mais c'est inĂ©luctable Ă  plus ou moins de temps et je prĂ©fĂšre mourir vivante.
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Delphine de Vigan (Rien ne s'oppose Ă  la nuit)
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Je n'ai envie de rien, je ne sais pas quoi faire, je ne veux pas dormir, je ne veux pas rester Ă©veillĂ©e. Je n'ai pas faim. Je ne veux pas ĂȘtre seule, je ne veux voir personne. J'ai l'impression d'ĂȘtre en sursis. Je suis juste complĂštement dĂ©foncĂ©e. La vĂ©ritĂ© se fait jour avec lenteur et me laisse vide... A... mĂȘme A... ce que je m'en fiche.
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Lolita Pille
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Et c'est quoi la différence entre art et culture? L'art n'arrive que si on met sa culture en danger
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Dany LaferriĂšre (L'art presque perdu de ne rien faire)
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Aussi terrible que puisse paraĂźtre, je pense que l'heure de notre mort est inscrite quelque part et qu'on ne peu rien faire pour y Ă©chapper.
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Guillaume Musso (Je reviens te chercher)
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Elle avançait dans leur salon et tout Ă©tait lĂ . À l'identique. Rien n'avait bougĂ©. La couverture toujours sur le canapĂ©. La thĂ©iĂšre aussi sur la table basse, avec le livre qu'elle Ă©tait en train de lire. Et fut saisie tout particuliĂšrement par la vision du marque-page. Le livre Ă©tait ainsi coupĂ© en deux ; la premiĂšre partie avait Ă©tĂ© lue du vivant de François. Et Ă  la page 321, il Ă©tait mort. Que fallait-il faire ? Peut-on poursuivre la lecture d'un livre interrompu par la mort de son mari ?
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David Foenkinos (Delicacy)
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Si tu as peur de te faire mal, tu augmentes les chances, justement, de te faire mal. Regarde les funambules, tu crois qu'ils pensent au fait qu'ils vont peut-ĂȘtre tomber lorsqu'ils marchent sur la corde raide ? Non, ils acceptent ce risque, et goĂ»tent le plaisir que braver le danger leur procure. Si tu passes ta vie Ă  faire attention de ne rien te casser, tu vas terriblement t'ennuyer tu sais...
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Mathias Malzieu (La MĂ©canique du cƓur)
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La religion fait peut-ĂȘtre aimer Dieu mais rien n'est plus fort qu'elle pour faire dĂ©tester l'homme et haĂŻr l'humanitĂ©.
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Boualem Sansal (2084: La fin du monde)
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Seules la passion et la joie peuvent ĂȘtre honnĂȘtes. Rien de ce qu'on m'a forcĂ©e Ă  faire n'a jamais apportĂ© de joie. Ni Ă  moi ni Ă  ceux qui m'entourent.
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Tove Jansson
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Le plus grand effort de ma vie a toujours été de parvenir à désespérer complÚtement. Il n'y a rien à faire. Il y a toujours en moi quelque chose qui continue à sourire.
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Romain Gary (Promise at Dawn)
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Est-ce en exemple que tu te proposes? Peut-on se remplir comme les roses, en multipliant sa subtile matiĂšre qu'on avait faite pour ne rien faire? Car ce n'est pas travailler que d'ĂȘtre une rose, dirait-on. Dieu, en regardant par la fenĂȘtre, fait la maison.
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Rainer Maria Rilke (The Complete French Poems of Rainer Maria Rilke)
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Voyager, c'est bien utile, ça fait travailler l'imagination. Tout le reste n'est que dĂ©ceptions et fatigues. Notre voyage Ă  nous est entiĂšrement imaginaire. VoilĂ  sa force. Il va de la vie Ă  la mort. Hommes, bĂȘtes, villes et choses, tout est imaginĂ©. C'est un roman, rien qu'une histoire fictive. LittrĂ© le dit, qui ne se trompe jamais. Et puis d'abord tout le monde peut en faire autant. Il suffit de fermer les yeux. C'est de l'autre cĂŽtĂ© de la vie.
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Louis-Ferdinand CĂ©line (Voyage au bout de la nuit)
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Un bon livre se retrouve toujours entre les mains d'un lecteur libre. Sinon il n'y reste pas longtemps, le mauvais lecteur cherche Ă  se dĂ©barrasser de tout ce qui ne ressemble pas Ă  ce qu'il a dĂ©jĂ  lu. Lire n'est pas nĂ©cessaire pour le corps (cela peut mĂȘme se rĂ©vĂ©ler nocif), seul l'oxygĂšne l'est. Mais un bon livre oxygĂšne l'esprit.
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Dany LaferriĂšre (L'art presque perdu de ne rien faire)
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« La grande faiblesse de la mort, c’est qu’elle ne peut venir Ă  bout que de la matiĂšre. Elle ne peut rien contre les souvenirs et les sentiments. Au contraire, elle les ravive et les ancre en nous pour toujours, comme pour se faire pardonner en nous disant : C’est vrai, je vous enlĂšve beaucoup, mais regardez tout ce que je vous laisse. »
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Joël Dicker (L'Affaire Alaska Sanders)
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Dans ta vie tu rencontreras beaucoup de cons. S'ils te blessent, dis-toi que c'est la bĂȘtise qui les pousse Ă  te faire du mal. Ça t'Ă©vitera de rĂ©pondre Ă  leur mĂ©chancetĂ©. Car il n'y a rien de pire au monde que l'amertume et la vengeance. .. Reste toujours digne et intĂšgre Ă  toi mĂȘme.
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Marjane Satrapi (The Complete Persepolis)
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Comment on va faire maintenant qu'il fait tout le temps nuit sur toi? Qu'est-ce que ça veut dire la vie sans toi? Qu'est-ce qui se passe pour toi là? Dur Rien? Du vide? De la nuit, des choses de ciel, du réconfort?
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Mathias Malzieu (Maintenant qu'il fait tout le temps nuit sur toi)
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Mais c'est faire un pacte avec le diable, car il perd son Ăąme, celui qui veut ĂȘtre religieusement aimĂ©. Elles m'ont obligĂ© Ă  feindre la mĂ©chancetĂ©, je ne leur pardonnerai jamais ! Mais que faire ? J'avais besoin d'elles, si belles quand elles dorment, besoin de leurs adorables gestes de pĂ©dĂ©raste, besoin de leurs pudeurs, si vite suivies d'Ă©tonnantes docilitĂ©s dans la pĂ©nombre des nuits, car rien ne les surprend ni ne les effraie qui soit service d'amour.
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Albert Cohen (Belle du Seigneur)
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Le monde cessa aussitĂŽt d’ĂȘtre mot pour se faire peau. L’ombre blĂȘme des moustiquaires, le clapotis de la pluie, les lointaines rumeurs des jardins et de la ville, rien de tout cela n’existait plus pour OphĂ©lie. Emma seule chose dont elle avait une perception aiguĂ«, c’etait Thorn et elle, leurs mains dĂ©faisant l’une aprĂšs l’autre chaque retenue, chaque apprĂ©hension, chaque timiditĂ©
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Christelle Dabos (La MĂ©moire de Babel (La Passe-Miroir, #3))
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. . . car il n'est point vrai que l'oeuvre de l'homme est finie que nous n'avons rien à faire au monde que nous parasitons le monde qu'il suffit que nous nous mettions au pas du monde mais l'oeuvre de l'homme vient seulement de commencer et il reste à l'homme à conquérir toute interdiction immobilisée aux coins de sa ferveur et aucune race ne possÚde le monopole de la beauté, de l'intelligence, de la force . . .
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Aimé Césaire (Cahier d'un retour au pays natal)
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A qui Ă©cris-tu? -A toi. En fait, je ne t'Ă©cris pas vraiment, j'Ă©cris ce que j'ai envie de faire avec toi... Il y avait des feuilles partout. Autour d'elle, Ă  ses pieds, sur le lit. J'en ai pris une au hasard: "...Pique-niquer, faire la sieste au bord d'une riviĂšre, manger des pĂȘches, des crevettes, des croissants, du riz gluant, nager, danser, m'acheter des chaussures, de la lingerie, du parfum, lire le journal, lĂ©cher les vitrines, prendre le mĂ©tro, surveiller l'heure, te pousser quand tu prends toute la place, Ă©tendre le linge, aller Ă  l'OpĂ©ra, faire des barbecues, rĂąler parce que tu as oubliĂ© le charbon, me laver les dents en mĂȘme temps que toi, t'acheter des caleçons, tondre la pelouse, lire le journal par-dessus ton Ă©paule, t'empĂȘcher de manger trop de cacahuĂštes, visiter les caves de la Loire, et celles de la Hunter Valley, faire l'idiote, jacasser, cueillir des mĂ»res, cuisiner, jardiner, te rĂ©veiller encore parce que tu ronfles, aller au zoo, aux puces, Ă  Paris, Ă  Londres, te chanter des chansons, arrĂȘter de fumer, te demander de me couper les ongles, acheter de la vaisselle, des bĂȘtises, des choses qui ne servent Ă  rien, manger des glaces, regarder les gens, te battre aux Ă©checs, Ă©couter du jazz, du reggae, danser le mambo et le cha-cha-cha, m'ennuyer, faire des caprices, bouder, rire, t'entortiller autour de mon petit doigt, chercher une maison avec vue sur les vaches, remplir d'indĂ©cents Caddie, repeindre un plafond, coudre des rideaux, rester des heures Ă  table Ă  discuter avec des gens intĂ©ressants, te tenir par la barbichette, te couper les cheveux, enlever les mauvaises herbes, laver la voiture, voir la mer, t'appeler encore, te dire des mots crus, apprendre Ă  tricoter, te tricoter une Ă©charpe, dĂ©faire cette horreur, recueillir des chats, des chiens, des perroquets, des Ă©lĂ©phants, louer des bicyclettes, ne pas s'en servir, rester dans un hamac, boire des margaritas Ă  l'ombre, tricher, apprendre Ă  me servir d'un fer Ă  repasser, jeter le fer Ă  repasser par la fenĂȘtre, chanter sous la pluie, fuire les touristes, m'enivrer, te dire toute la vĂ©ritĂ©, me souvenir que toute vĂ©ritĂ© n'est pas bonne Ă  dire, t'Ă©couter, te donner la main, rĂ©cupĂ©rer mon fer Ă  repasser, Ă©couter les paroles des chansons, mettre le rĂ©veil, oublier nos valises, m'arrĂȘter de courir, descendre les poubelles, te demander si tu m'aimes toujours, discuter avec la voisine, te raconter mon enfance, faire des mouillettes, des Ă©tiquettes pour les pots de confiture..." Et ça continuais comme ça pendant des pages et des pages...
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Anna Gavalda (Someone I Loved (Je l'aimais))
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Puisque c'est ainsi. Puisque le temps sĂ©pare ceux qui s'aiment et que rien ne dure. Ce que nous vivions lĂ , et nous en Ă©tions conscients tous les quatre, c'Ă©tait un peu de rab. Un sursis, une parenthĂšse, un moment de grĂące. Quelques heures volĂ©es aux autres... Pendant combien de temps aurions-nous l'Ă©nergie de nous arracher ainsi du quotidien pour faire le mur? Combien de permissions la vie nous accorderait-elle encore? Combien de pieds de nez? Combien de petites grattes? Quand allions-nous nous perdre et comment les liens se distendraient-ils? Encore combien d'annĂ©es avant d'ĂȘtre vieux?
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Anna Gavalda (L'ÉchappĂ©e belle)
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- Vous ĂȘtes sur qu'on ne peut rien pour elle ? Duom rĂ©flĂ©chit un instant. - Si, tu peux faire quelque chose pour l'aider. - Quoi ? - Tais-toi.
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Pierre Bottero (D'un monde Ă  l'autre (La QuĂȘte d'Ewilan, #1))
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Il n'y a rien de mieux qu'un roman pour faire comprendre que la rĂ©alitĂ© est mal faite, qu’elle n’est pas suffisante pour satisfaire les dĂ©sirs, les appĂ©tits, les rĂȘves humains.
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Mario Vargas Llosa
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comment faire comprendre d'ailleurs qu'un enfant pauvre puisse avoir parfois honte sans jamais rien envier ?
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Albert Camus (The First Man)
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Si les gens ne sont pas fichus de s’occuper de leurs mioches, ils n’avaient qu’à Ă©viter d’en faire.
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Marie Desplechin (Le journal d'Aurore, tome 3 : Rien ne va plus (French Edition))
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Mieux vaut faire, et se repentir - que se repentir, et rien faire.
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Mellin de Saint-Gelais
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Les gens n'attendent en général qu'une seule chose de vous: que vous leur renvoyiez l'image de ce qu'ils veulent que vous soyez. Et cette image que je leur proposais, ils n'en voulaient surtout pas. C'était une vue du monde d'en haut, une vue qui n'avait rien à faire ici. Alors s'il y a une leçon que j'ai bien apprise en prÚs de vingt-huit ans de présence sur cette Terre, c'est que l'habit doit faire le moine et peu importe ce que cache la soutane.
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Jean-Paul Didierlaurent (Le Liseur du 6h27)
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Il s’était tant de fois entendu dire ces choses, qu’elles n’avaient pour lui rien d’original. Emma ressemblait Ă  toutes les maĂźtresses ; et le charme de la nouveautĂ©, peu Ă  peu tombant comme un vĂȘtement, laissait voir Ă  nu l’éternelle monotonie de la passion, qui a toujours les mĂȘmes formes et le mĂȘme langage. Il ne distinguait pas, cet homme si plein de pratique, la dissemblance des sentiments sous la paritĂ© des expressions. Parce que des lĂšvres libertines ou vĂ©nales lui avaient murmurĂ© des phrases pareilles, il ne croyait que faiblement Ă  la candeur de celles-lĂ  ; on en devait rabattre, pensait-il, les discours exagĂ©rĂ©s cachant les affections mĂ©diocres ; comme si la plĂ©nitude de l’ñme ne dĂ©bordait pas quelquefois par les mĂ©taphores les plus vides, puisque personne, jamais, ne peut donner l’exacte mesure de ses besoins, ni de ses conceptions, ni de ses douleurs, et que la parole humaine est comme un chaudron fĂȘlĂ© oĂč nous battons des mĂ©lodies Ă  faire danser les ours, quand on voudrait attendrir les Ă©toiles.
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Gustave Flaubert (Madame Bovary)
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Il est bon de savoir quelque chose des moeurs de divers peuples, afin de juger des notres plus sainement et que nous ne pensions pas que tout ce qui est contre nos modes soit ridicule et contre raison, ainsi qu'ont coutume de faire ceux qui n'ont rien vu; mais lorsqu'on emploie trop de temps à voyager on devient enfin étranger en son pays; et lorsqu'on est trop curieux des choses qui se pratiquaient aux siÚcles passés, on demeure ordinairement fort ignorant de celles qui se pratiquent en celui-ci.
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René Descartes (Discours de la méthode: suivi des Méditations métaphysiques)
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Elle avait réussi à donner un sens à ma vie en la transformant en un bordel perpétuel. Sa trajectoire était claire, elle avait mille directions, des millions d'horizons, mon rÎle consistait à faire suivre l'intendance en cadence, à lui donner les moyens de vivre ses démences et de ne se préoccuper de rien.
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Olivier Bourdeaut (En attendant Bojangles)
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Tout homme qui dirige, qui fait quelque chose, a contre lui ceux qui voudraient faire la mĂȘme chose, ceux qui font prĂ©cisĂ©ment le contraire et surtout la grande armĂ©e des gens, d'autant plus sĂ©vĂšres, qu'ils ne font rien du tout.
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Jules Clarétie
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Mais
 chanter, RĂȘver, rire, passer, ĂȘtre seul, ĂȘtre libre, Avoir l’Ɠil qui regarde bien, la voix qui vibre, Mettre, quand il vous plaĂźt, son feutre de travers, Pour un oui, pour un non, se battre, – ou faire un vers ! Travailler sans souci de gloire ou de fortune, À tel voyage, auquel on pense, dans la lune ! N’écrire jamais rien qui de soi ne sortĂźt
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Edmond Rostand (Cyrano de Bergerac)
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Claque un peu ton bec mon Golgotheau, t’as rien vĂ©cu t’as juste de la gueule, le premier furvent t’étais raclĂ© devant papa-maman, alors laisse-moi faire, tu me dois tout, je vais lui grĂ©mir les vertĂšbres, Ă  la Traceuse, et te la basculer latĂ©ral, d'un coup de reins comme t’en as jamais vu frangin, Ă  se dĂ©boĂźter le tronc, chuis le meilleur, ancre ça, le premier du monde.
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Alain Damasio (La Horde du Contrevent)
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Des milliers de filles ont monté un escalier, frappé à une porte derriÚre laquelle il y avait une femme dont elles ne savaient rien, à qui elles allaient abandonner leur sexe et leur ventre. Et cette femme, la seule personne alors capable de faire passer le malheur, ouvrait la porte, en tablier et en pantoufles à pois, un torchon à la main : "C'est pour quoi, mademoiselle?
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Annie Ernaux (L'événement)
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..enseignements qui lui serviraient Ă  l’avenir : Il faut toujours prendre soin de simplifier les enjeux, de faire preuve de souplesse, et de rĂ©agir vite. Il ne sert Ă  rien de monter les problĂšmes en Ă©pingle ni de se remplir l’esprit de peurs infondĂ©es. En sachant dĂ©celer les signes annonciateurs de changement, on se prĂ©pare d’autant mieux Ă  d’éventuels bouleversements.
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Spencer Johnson (Who Moved My Cheese? An Amazing Way to Deal with Change in Your Work and in Your Life...)
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Oui, moi aussi, je m'Ă©tais souvent demandĂ©: comment font les gents? Et Ă  vrai dire, si ces questions Ă©taient modifiĂ©es, elles n'avaient jamais cessĂ©: comment font les gents, pour Ă©crire, aimer, dormir d'une seule traite, varier les menus de leurs enfants, les laisser grandir, les laisser partir sans s'accrocher Ă  eux, aller une fois par an chez le dentiste, faire du sport, rester fidĂšle, ne pas recommencer Ă  fumer, lire des livres + des bandes dessinĂ©es + des magazines + un quotidien, ne pas ĂȘtre totalement dĂ©passĂ© en matiĂšre de musique, apprendre Ă  respirer, ne pas s'exposer au soleil sans protection, faire leurs courses une seule fois par semaine sans rien oublier?
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Delphine de Vigan (D'aprĂšs une histoire vraie)
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Et rien ne peut faire que ce qui a été vécu dans un monde, celui d'avant 1968, et condamné par les rÚgles de ce monde, puisse changer radicalement de sens dans un autre monde. Cela reste un événement sexuel singulier, dont la honte est insoluble dans la doxa du nouveau siÚcle.
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Annie Ernaux (MĂ©moire de fille)
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nos besoins sont nos petits rĂȘves quotidiens. Ce sont nos petites choses Ă  faire, qui nous projettent Ă  demain, Ă  aprĂšs-demain, dans le futur ; ces petits rien qu’on achĂštera la semaine prochaine et qui nous permettent de penser que la semaine prochaine, on sera encore vivants.
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Grégoire Delacourt (La Liste de mes envies)
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Et voilĂ . Maintenant le ressort est bandĂ©. Cela n'a plus qu'Ă  se dĂ©rouler tout seul. C'est cela qui est commode dans la tragĂ©die. On donne le petit coup de pouce pour que cela dĂ©marre, rien, un regard pendant une seconde Ă  une fille qui passe et lĂšve les bras dans la rue, une envie d'honneur un beau matin, au rĂ©veil, comme de quelque chose qui se mange, une question de trop qu'on se pose un soir
 C'est tout. AprĂšs, on n'a plus qu'Ă  laisser faire. On est tranquille. Cela roule tout seul. C'est minutieux, bien huilĂ© depuis toujours. La mort, la trahison, le dĂ©sespoir sont lĂ , tout prĂȘts, et les Ă©clats, et les orages, et les silences, tous les silences : le silence quand le bras du bourreau se lĂšve Ă  la fin, le silence au commencement quand les deux amants sont nus l'un en face de l'autre pour la premiĂšre fois, sans oser bouger tout de suite, dans la chambre sombre, le silence quand les cris de la foule Ă©clatent autour du vainqueur - et on dirait un film dont le son s'est enrayĂ©, toutes ces bouches ouvertes dont il ne sort rien, toute cette clameur qui n'est qu'une image, et le vainqueur, dĂ©jĂ  vaincu, seul au milieu de son silence

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Jean Anouilh
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DÚs lors qu'elle dépend à la fois de sa propre conscience et des opinions des autres, il faut qu'elle apprenne à comparer ces deux rÚgles, à les concilier, et à ne préférer la premiÚre que quand elles sont en opposition. [...] Rien de tout cela ne peut bien se faire sans cultiver son esprit ou sa raison.
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Jean-Jacques Rousseau
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J’écris de chez les moches, pour les moches, les vieilles, les camionneuses, les frigides, les mal baisĂ©es, les imbaisables, les hystĂ©riques, les tarĂ©es, toutes les exclues du grand marchĂ© Ă  la bonne meuf. Et je commence par lĂ  pour que les choses soient claires : je ne m’excuse de rien, je ne viens pas me plaindre. Je n’échangerais ma place contre aucune autre parce qu’ĂȘtre Virginie Despentes me semble ĂȘtre une affaire plus intĂ©ressante Ă  mener que n’importe quelle autre affaire. Je trouve ça formidable qu’il y ait aussi des femmes qui aiment sĂ©duire, qui sachent sĂ©duire, d’autres se faire Ă©pouser, des qui sentent le sexe et d’autres le gĂąteau du goĂ»ter des enfants qui sortent de l’école. Formidable qu’il y en ait de trĂšs douces, d’autres Ă©panouies dans leur fĂ©minitĂ©, qu’il y en ait de jeunes, trĂšs belles, d’autres coquettes et rayonnantes. Franchement, je suis bien contente pour toutes celles Ă  qui les choses telles qu’elles sont conviennent. C’est dit sans la moindre ironie. Il se trouve simplement que je ne fais pas partie de celles-lĂ . Bien sĂ»r que je n’écrirais pas ce que j’écris si j’étais belle, belle Ă  changer l’attitude de tous les hommes que je croise. C’est en tant que prolotte de la fĂ©minitĂ© que je parle, que j’ai parlĂ© hier et que je recommence aujourd’hui (p. 9-10).
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Virginie Despentes (King Kong théorie)
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Alors, elle s'aperçut qu'elle n'avait plus rien à faire, plus jamais rien à faire... La douce réalité des premiers jours allait devenir la réalité quotidienne qui ferait la porte aux espoirs indéfinis,aux charmantes inquiétudes de l'inconnu. Oui, c'était fini d'attendre. Alors plus rien à faire aujourd'hui, ni demain, ni jamais.
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Guy de Maupassant (Une vie)
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- Ne t'en fais pas, je connais la vĂ©ritĂ©. - La vĂ©ritĂ© sur quoi ? Il recula d'un pas. - Tu as envie de dire oui mais tu n'es pas encore prĂȘte. J'en restai comme deux ronds de flan. - Ce n'est rien. (Son sourire se fit provocateur.) Je suis peut-ĂȘtre difficile Ă  manipuler mais je peux t'assurer que tu prendras beaucoup de plaisir Ă  le faire.
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Jennifer L. Armentrout (Wait for You (Wait for You, #1))
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Mais ils ne demandaient rien de plus, c’était cela, ils le savaient, il ne fallait rien attendre, rien demander, c’était ainsi, il n’y avait rien de plus, c’était cela, « la vie ». Rien d’autre, rien de plus, ici ou lĂ , ils le savaient maintenant. Il ne fallait pas se rĂ©volter, rĂȘver, attendre, faire des efforts, s’enfuir, il fallait juste choisir attentivement (le garçon attendait), serait-ce une grenadine ou un cafĂ© ? crĂšme ou nature ? en acceptant modestement de vivre – ici ou lĂ  – et de laisser passer le temps.
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Nathalie Sarraute (Tropismes)
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Joseph Voilà c'que c'est, mon vieux Joseph Que d'avoir pris la plus jolie Parmi les filles de Galilée Celle qu'on appelait Marie Tu aurais pu, mon vieux Joseph Prendre Sarah ou Déborah Et rien ne serait arrivé Mais tu as préféré Marie Tu aurais pu, mon vieux Joseph Rester chez toi, tailler ton bois PlutÎt que d'aller t'exiler Et te cacher avec Marie Tu aurais pu, mon vieux Joseph Faire des petits avec Marie Et leur apprendre ton métier Comme ton pÚre te l'avait appris Pourquoi a-t-il fallu, Joseph Que ton enfant, cet innocent Ait eu ces étranges idées Qui ont tant fait pleurer Marie Parfois je pense à toi, Joseph Mon pauvre ami, lorsque l'on rit De toi qui n'avais demandé Qu'à vivre heureux avec Marie
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Georges Moustaki
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Nous vivons dans une sociĂ©tĂ© sexiste qui fait de l'apparence physique des femmes une question centrale et oĂč la domination plastique s'exerce particuliĂšrement lourdement. Car nous le constatons au quotidien, la beautĂ© physique est extrĂȘmement valorisĂ©e dans l'identitĂ© fĂ©minine. Une femme, ça doit ĂȘtre beau et faire attention Ă  soi, sinon ça ne sert Ă  rien.
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Rokhaya Diallo (Racisme: mode d'emploi)
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Tu t'imagines qu'un mensonge en vaut un autre, mais tu as tort. Je peux inventer n'importe quoi, me payer la tĂȘte des gens, monter toutes sortes de mystifications, faire toutes sortes de blagues, je n'ai pas l'impression d'ĂȘtre un menteur ; ces mensonges-lĂ , si tu veux appeler cela des mensonges, c'est moi, tel que je suis ; avec ces mensonges-lĂ , je ne dissimule rien, avec ces mensonges-lĂ  je dis en fait la vĂ©ritĂ©. Mais il y a des choses Ă  propos desquelles je ne peux pas mentir. IL y a des choses que je connais Ă  fond, dont j'ai compris le sens, et que j'aime. Je ne plaisante pas avec ces choses-lĂ . Mentir lĂ -dessus, ce serait m'abaisser moi-mĂȘme, et je ne le peux pas, n'exige pas ça de moi, je ne le ferai.
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Milan Kundera (Laughable Loves)
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Et faire de la science, ce n'est rien d'autre que de s'acharner à découvrir des différences. On ne saurait mieux définir son essence. Pour nous, hommes de science, rien de plus important que d'établir des distinctions; la science, c'est l'art des distinctions. Ainsi, découvrir sur chaque homme les caractÚres qui le distinguent des autres, c'est apprendre à le connaßtre. (p. 50-51)
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Hermann Hesse (Narcissus and Goldmund)
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J’écris donc d’ici, de chez les invendues, les tordues, celles qui ont le crĂąne rasĂ©e, celles qui ne savent pas s’habiller, celles qui ont peur de puer, celles qui ont les chicots pourris, celles qui ne savent pas s’y prendre, celles Ă  qui les hommes ne font pas de cadeau, celles qui baiseraient n’importe qui voulant bien d’elles, les grosses putes, les petites salopes, les femmes Ă  chatte toujours sĂšche, celles qui ont un gros bides, celles qui voudraient ĂȘtre des hommes, celles qui se prennent pour des hommes, celles qui rĂȘvent de faire hardeuses, celles qui n’en ont rien Ă  foutre des mecs mais que leurs copines intĂ©ressent, celles qui ont un gros cul, celles qui ont les poils drus et bien noirs et qui ne vont pas se faire Ă©piler, les femmes brutales, bruyantes, celles qui cassent tout sur leur passage, celles qui n’aiment pas les parfumeries, celles qui se mettent du rouge trop rouge, celles qui sont trop mal foutues pour pouvoir se saper comme des chaudasses mais qui en crĂšvent d’envie, celles qui veulent porter des fringues d’hommes et la barbe dans la rue, celles qui veulent tout montrer, celles qui sont pudiques par complexe, celles qui ne savent pas dire non, celles qu’on enferme pour les mater, celles qui font peur, celles qui font pitiĂ©, celles qui ne font pas envie, celles qui ont la peau flasque, des rides plein la face, celles qui rĂȘvent de se faire lifter, liposucer, pĂ©ter le nez pour le refaire mais qui n’ont pas l’argent pour le faire, celles qui ne ressemblent Ă  rien, celles qui ne comptent que sur elles-mĂȘmes pour se protĂ©ger, celles qui ne savent pas ĂȘtre rassurantes, celles qui s’en foutent de leurs enfants, celles qui aiment boire jusqu’à se vautrer par terre dans les bars, celles qui ne savent pas se tenir.
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Virginie Despentes (King Kong théorie)
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Le jour oĂč je me suis aimĂ© pour de vrai, J’ai compris qu'en toutes circonstances, J’étais Ă  la bonne place, au bon moment. Et alors, j'ai pu me relaxer. Aujourd'hui je sais que cela s'appelle... l'Estime de soi. Le jour oĂč je me suis aimĂ© pour de vrai, J’ai pu percevoir que mon anxiĂ©tĂ© et ma souffrance Ă©motionnelle N’étaient rien d'autre qu'un signal Lorsque je vais Ă  l'encontre de mes convictions. Aujourd'hui je sais que cela s'appelle... l'AuthenticitĂ©. Le jour oĂč je me suis aimĂ© pour de vrai, J'ai cessĂ© de vouloir une vie diffĂ©rente Et j'ai commencĂ© Ă  voir que tout ce qui m'arrive Contribue Ă  ma croissance personnelle. Aujourd'hui, je sais que cela s'appelle... la MaturitĂ©. Le jour oĂč je me suis aimĂ© pour de vrai, J’ai commencĂ© Ă  percevoir l'abus Dans le fait de forcer une situation ou une personne, Dans le seul but d'obtenir ce que je veux, Sachant trĂšs bien que ni la personne ni moi-mĂȘme Ne sommes prĂȘts et que ce n'est pas le moment... Aujourd'hui, je sais que cela s'appelle... le Respect. Le jour oĂč je me suis aimĂ© pour de vrai, J’ai commencĂ© Ă  me libĂ©rer de tout ce qui n'Ă©tait pas salutaire, personnes, situations, tout ce qui baissait mon Ă©nergie. Au dĂ©but, ma raison appelait cela de l'Ă©goĂŻsme. Aujourd'hui, je sais que cela s'appelle... l'Amour propre. Le jour oĂč je me suis aimĂ© pour de vrai, J’ai cessĂ© d'avoir peur du temps libre Et j'ai arrĂȘtĂ© de faire de grands plans, J’ai abandonnĂ© les mĂ©ga-projets du futur. Aujourd'hui, je fais ce qui est correct, ce que j'aime Quand cela me plait et Ă  mon rythme. Aujourd'hui, je sais que cela s'appelle... la SimplicitĂ©. Le jour oĂč je me suis aimĂ© pour de vrai, J’ai cessĂ© de chercher Ă  avoir toujours raison, Et je me suis rendu compte de toutes les fois oĂč je me suis trompĂ©. Aujourd'hui, j'ai dĂ©couvert ... l'HumilitĂ©. Le jour oĂč je me suis aimĂ© pour de vrai, J’ai cessĂ© de revivre le passĂ© Et de me prĂ©occuper de l'avenir. Aujourd'hui, je vis au prĂ©sent, LĂ  oĂč toute la vie se passe. Aujourd'hui, je vis une seule journĂ©e Ă  la fois. Et cela s'appelle... la PlĂ©nitude. Le jour oĂč je me suis aimĂ© pour de vrai, J’ai compris que ma tĂȘte pouvait me tromper et me dĂ©cevoir. Mais si je la mets au service de mon coeur, Elle devient une alliĂ©e trĂšs prĂ©cieuse ! Tout ceci, c'est... le Savoir vivre. Nous ne devons pas avoir peur de nous confronter. Du chaos naissent les Ă©toiles.
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Charlie Chaplin
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Je te rencontre. Je me souviens de toi. Cette ville Ă©tait faite Ă  la taille de l'amour. Tu Ă©tais fait Ă  la taille de mon corps mĂȘme. Qui es-tu ? Tu me tues. J'avais faim. Faim d'infidĂ©litĂ©s, d'adultĂšres, de mensonges et de mourir. Depuis toujours. Je me doutais bien qu'un jour tu me tomberais dessus. Je t'attendais dans une impatience sans borne, calme. DĂ©vore-moi. DĂ©forme-moi Ă  ton image afin qu'aucun autre, aprĂšs toi, ne comprenne plus du tout le pourquoi de tant de dĂ©sir. Nous allons rester seuls, mon amour. La nuit ne va pas finir. Le jour ne se lĂšvera plus sur personne. Jamais. Jamais plus. Enfin. Tu me tues. Tu me fais du bien. Nous pleurerons le jour dĂ©funt avec conscience et bonne volontĂ©. Nous n'aurons plus rien d'autre Ă  faire, plus rien que pleurer le jour dĂ©funt. Du temps passera. Du temps seulement. Et du temps va venir. Du temps viendra. OĂč nous ne saurons plus du tout nommer ce qui nous unira. Le nom s'en effacera peu Ă  peu de notre mĂ©moire. Puis, il disparaĂźtra, tout Ă  fait.
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Marguerite Duras (Hiroshima mon amour)
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Donc pas d'erreur Ce qu'on faisait Ă  se tirer dessus comme ça sans mĂȘme se voir n'Ă©tait pas dĂ©fendu Cela faisait partie des choses qu'on peut faire sans mĂ©riter une bonne engueulade. C'Ă©tait mĂȘme reconnu encouragĂ© sans doute par les gens sĂ©rieux comme le tirage au sort les fiançailles la chasse Ă  courre ... Rien Ă  dire. Je venais de dĂ©couvrir d'un coup la guerre tout entiĂšre. Je venais d'ĂȘtre dĂ©pucelĂ©.
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Louis-Ferdinand CĂ©line (Journey to the End of the Night)
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Ce qui est pire c’est qu’on se demande comment le lendemain on trouvera assez de force pour continuer Ă  faire ce qu’on a fait la veille et depuis dĂ©jĂ  tellement trop longtemps, oĂč on trouvera la force pour ces dĂ©marches imbĂ©ciles, ces mille projets qui n’aboutissent Ă  rien, ces tentatives pour sortir de l’accablante nĂ©cessitĂ©, tentatives qui toujours avortent, et toutes pour aller se convaincre une fois de plus que le destin est insurmontable, qu’il faut retomber au bas de la muraille, chaque soir, sous l’angoisse de ce lendemain, toujours plus prĂ©caire, plus sordide. C’est l’ñge aussi qui vient peut-ĂȘtre, le traĂźtre, et nous menace du pire. On n’a plus beaucoup de musique en soi pour faire danser la vie, voilĂ . Toute la jeunesse est allĂ©e mourir dĂ©jĂ  au bout du monde dans le silence de vĂ©ritĂ©. Et oĂč aller dehors, je vous le demande, dĂšs qu’on a plus en soi la somme suffisante de dĂ©lire ? La vĂ©ritĂ©, c’est une agonie qui n’en finit pas. La vĂ©ritĂ© de ce monde c’est la mort. Il faut choisir, mourir ou mentir.
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Louis-Ferdinand CĂ©line
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A vrai dire, je souffrais tout le temps. Ça fait mal de ne pas pouvoir respirer comme une personne normale, d'ĂȘtre obligĂ©e de rappeler sans cesse Ă  ses poumons de faire leur boulot de poumons, de se forcer Ă  accepter qu'il n'y a rien Ă  faire contre cette douleur dĂ©chirante qui entre et sort inlassablement de votre poitrine sous-oxygĂ©nĂ©e. Conclusion, je ne mentais pas vraiment. Je choisissais juste une vĂ©ritĂ© parmi d'autres.
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John Green (The Fault in Our Stars)
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Et que faudrait-il faire ? Chercher un protecteur puissant, prendre un patron, Et comme un lierre obscur qui circonvient un tronc Et s'en fait un tuteur en lui lĂ©chant l'Ă©corce, Grimper par ruse au lieu de s'Ă©lever par force ? Non, merci ! DĂ©dier, comme tous ils le font, Des vers aux financiers ? se changer en bouffon Dans l'espoir vil de voir, aux lĂšvres d'un ministre, NaĂźtre un sourire, enfin, qui ne soit pas sinistre ? Non, merci ! DĂ©jeuner, chaque jour, d'un crapaud ? Avoir un ventre usĂ© par la marche ? une peau Qui plus vite, Ă  l'endroit des genoux, devient sale ? ExĂ©cuter des tours de souplesse dorsale ?... Non, merci ! D'une main flatter la chĂšvre au cou Cependant que, de l'autre, on arrose le chou, Et donneur de sĂ©nĂ© par dĂ©sir de rhubarbe, Avoir son encensoir, toujours, dans quelque barbe ? Non, merci ! Se pousser de giron en giron, Devenir un petit grand homme dans un rond, Et naviguer, avec des madrigaux pour rames, Et dans ses voiles des soupirs de vieilles dames ? Non, merci ! Chez le bon Ă©diteur de Sercy Faire Ă©diter ses vers en payant ? Non, merci ! S'aller faire nommer pape par les conciles Que dans des cabarets tiennent des imbĂ©ciles ? Non, merci ! Travailler Ă  se construire un nom Sur un sonnet, au lieu d'en faire d'autres ? Non, Merci ! Ne dĂ©couvrir du talent qu'aux mazettes ? Être terrorisĂ© par de vagues gazettes, Et se dire sans cesse : "Oh ! pourvu que je sois Dans les petits papiers du Mercure François" ?... Non, merci ! Calculer, avoir peur, ĂȘtre blĂȘme, PrĂ©fĂ©rer faire une visite qu'un poĂšme, RĂ©diger des placets, se faire prĂ©senter ? Non, merci ! non, merci ! non, merci ! Mais... chanter, RĂȘver, rire, passer, ĂȘtre seul, ĂȘtre libre, Avoir l'Ɠil qui regarde bien, la voix qui vibre, Mettre, quand il vous plaĂźt, son feutre de travers, Pour un oui, pour un non, se battre, - ou faire un vers ! Travailler sans souci de gloire ou de fortune, À tel voyage, auquel on pense, dans la lune ! N'Ă©crire jamais rien qui de soi ne sortĂźt, Et modeste d'ailleurs, se dire : mon petit, Sois satisfait des fleurs, des fruits, mĂȘme des feuilles, Si c'est dans ton jardin Ă  toi que tu les cueilles ! Puis, s'il advient d'un peu triompher, par hasard, Ne pas ĂȘtre obligĂ© d'en rien rendre Ă  CĂ©sar, Vis-Ă -vis de soi-mĂȘme en garder le mĂ©rite, Bref, dĂ©daignant d'ĂȘtre le lierre parasite, Lors mĂȘme qu'on n'est pas le chĂȘne ou le tilleul, Ne pas monter bien haut, peut-ĂȘtre, mais tout seul !
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Edmond Rostand (Cyrano de Bergerac)
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Il n'y a que deux ou trois crimes Ă  faire dans le monde, dit Curval, et, ceux-lĂ  faits, tout est dit; le reste est infĂ©rieur et l'on ne sent plus rien. Combien de fois, sacredieu, n'ai-je pas dĂ©sirĂ© qu'on pĂ»t attaquer le soleil, en priver l'univers, ou s'en servir pour embraser le monde? Ce serait des crimes cela, et non pas les petits Ă©carts oĂč nous nous livrons, qui se bornent Ă  mĂ©tamorphoser au bout de l'an une douzaine de crĂ©atures en mottes de terre.
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Marquis de Sade (The 120 Days of Sodom)
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Bien sĂ»r, rien n'interdit Ă  une femme d'avoir des enfants et de se rĂ©aliser en mĂȘme temps dans d'autres domaines. Au contraire, vous y ĂȘtes mĂȘme vivement encouragĂ©e : en posant la cerise de l'accomplissement personnel sur le gĂąteau de la maternitĂ©, vous flatterez notre bonne conscience et notre narcissisme collectif. Nous n'aimons pas nous avouer que nous voyons les femmes avant tout comme des reproductrices. [
] Mais alors, vous avez intĂ©rĂȘt Ă  avoir beaucoup d'Ă©nergie, un bon sens de l'organisation et une grande capacitĂ© de rĂ©sistance Ă  la fatigue ; vous avez intĂ©rĂȘt Ă  ne pas trop aimer dormir ou paresser, Ă  ne pas dĂ©tester les horaires, Ă  savoir faire plusieurs choses Ă  la fois. (p. 82)
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Mona Chollet (SorciÚres : La puissance invaincue des femmes)
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Parce qu'il y a certaines habitudes qui deviennent vitales. Aussi futiles soient elles, elles deviennent des points de repĂšres, des choses sur lesquelles on se base pour avancer. Faire sonner trois fois son rĂ©veil le matin avant de se lever. Avoir une marque de cafĂ© favorite. Être assis toujours Ă  la mĂȘme place Ă  table. Lacer sa chaussure gauche avant la droite. Des gestes qui se transforment en rituels et si ça foire un jour plus rien ne va et on se sent perdu.
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Camille L. (DĂ©gradation (DĂ©gradation, #1))
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autrefois, il y avait des galeries aux maisons. Et quelque-fois, les gens restaient assis, tard dans la nuit, bavardant s'ils en avaient envie, se balançant dans leurs fauteuils, silencieux s'ils n'éprouvaient pas le besoin de parler. parfois, ils restaient là, tranquillement, à réfléchir à ruminer. Mon oncle dit que les architectes ont supprimé les galeries pour des raisons d'esthétique. Mais mon oncle dit que c'est un prétexte, rien de plus; la véritable raison, cachée en dessous, c'est qu'on ne voulait pas voir des gens passer des heures assis à ne rien faire, à se balancer, à discuter; c'était une forme détestable de vie en commun. Les gens parlaient trop. Et ils avaient le temps de penser. Alors on a détruit les galeries. Et les jardins, aussi. Il ne reste presque plus de jardins...Et voyez les mobiliers. Plus de rocking-chairs. Ils sont trop confortables. Il faut obliger les gens à courir, à prendre de l'exercise.
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Ray Bradbury (Fahrenheit 451)
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On n'a qu'à regarder certains hommes pour s'en défier, on les sent ténébreux à leurs deux extrémités. Ils sont inquiets derriÚre eux et menaçants devant eux. Il y a en eux de l'inconnu. On ne peut pas plus répondre de ce qu'ils ont fait que de ce qu'ils feront. L'ombre qu'ils ont dans le regard les dénonce. Rien qu'en les entendant dire un mot ou qu'en les voyant faire un geste on entrevoit de sombres secrets dans leur passé et de sombres mystÚres dans leur avenir.
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Victor Hugo (Les Misérables, tome I/3)
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- Bardamu, qu'il me fait alors gravement et un peu triste, nos pĂšres nous valaient bien, n'en dis pas de mal !... - T'as raison, Arthur, pour ça t'as raison ! Haineux et dociles, violĂ©s, volĂ©s, Ă©tripĂ©s et couillons toujours, ils nous valaient bien ! Tu peux le dire ! Nous ne changeons pas ! Ni de chaussettes, ni de maĂźtres, ni d'opinions, ou bien si tard, que ça n'en vaut plus la peine. On est nĂ©s fidĂšles, on en crĂšve nous autres ! Soldats gratuits, hĂ©ros pour tout le monde et singes parlants, mots qui souffrent, on est nous les mignons du Roi MisĂšre. C'est lui qui nous possĂšde ! Quand on est pas sage, il serre... On a ses doigts autour du cou, toujours, ça gĂȘne pour parler, faut faire bien attention si on tient Ă  pouvoir manger... Pour des riens, il vous Ă©trangle... C'est pas une vie... - Il y a l'amour, Bardamu ! - Arthur, l'amour c'est l'infini mis Ă  la portĂ©e des caniches et j'ai ma dignitĂ© moi ! que je lui rĂ©ponds.
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Louis-Ferdinand CĂ©line
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Ah! je voulais te dire aussi, n'aie pas peur de leur sabir. Le sabir du pauvre d'aujourd'hui, c'est l'argot du pauvre d'hier, ni plus ni moins. Depuis toujours le pauvre parle argot. Sais-tu pourquoi? Pour faire croire au riche qu'il a quelque chose à lui cacher. Il n'a rien à cacher, bien sûr, il est beaucoup trop pauvre, rien que des petits trafics par-ci par-là, des broutilles, mais il tient à faire croire que c'est un monde entier qu'il cache, un univers qui nous serait interdit, et si vaste qu'il aurait besoin de toute une langue pour l'exprimer. Mais il n'y a pas de monde, bien sûr, et pas de langue. Rien qu'un petit lexique de connivence, histoire de se tenir chaud, de camoufler le désespoir.
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Daniel Pennac
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Il y a ceux que le malheur effondre. Il y a ceux qui en deviennent tout rĂȘveurs. Il y a ceux qui parlent de tout et de rien au bord de la tombe, et ça continue dans la voiture, de tout et de rien, pas mĂȘme du mort, de petits propos domestiques, il y a ceux qui se suicideront aprĂšs et ça ne se voit pas sur leur visage, il y a ceux qui pleurent beaucoup et cicatrisent vite, ceux qui se noyent dans les larmes qu'ils versent, il y a ceux qui sont contents, dĂ©barrassĂ©s de quelqu'un, il y a ceux qui ne peuvent plus voir le mort, ils essayent mais ils ne peuvent plus, le mort a emportĂ© son image, il y a ceux qui voient le mort partout, ils voudraient l'effacer, ils vendent ses nippes, brĂ»lent ses photos, dĂ©mĂ©nagent, changent de continent, rebelotent avec un vivant, mais rien Ă  faire, le mort est toujours lĂ , dans le rĂ©troviseur, il y a ceux qui pique-niquent au cimetiĂšre et ceux qui le contournent parce qu'ils ont une tombe creusĂ©e dans la tĂȘte, il y a ceux qui ne mangent plus, il y a ceux qui boivent, il y a ceux qui se demandent si leur chagrin est authentique ou fabriquĂ©, il y a ceux qui se tuent au travail et ceux qui prennent enfin des vacances, il y a ceux qui trouvent la mort scandaleuse et ceux qui la trouvent naturelle avec un Ăąge pour, des circonstances qui font que, c'est la guerre, c'est la maladie, c'est la moto, la bagnole, l'Ă©poque, la vie, il y a ceux qui trouvent que la mort c'est la vie. Et il y a ceux qui font n'importe quoi. Qui se mettent Ă  courrir, par exemple. À courir comme s'ils ne devaient jamais plus s'arrĂȘter. C'est mon cas.
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Daniel Pennac (La fata carabina)
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On est tous seuls, ici, Ă  Paris, ou ailleurs. On peut essayer de fuir la solitude, dĂ©mĂ©nagĂ©, faire tout pour rencontrer des gens, cela ne change rien. A la fin de la journĂ©e, chacun rentre chez soi. Ceux qui vivent en couple ne se rendent pas compte de leur chance. Ils ont oubliĂ© les soirĂ©es devant un plateau-repas, l’angoisse du week-end qui arrive, le dimanche Ă  espĂ©rer que le tĂ©lĂ©phone sonne. Nous sommes des millions comme ça dans toutes les capitales du monde. La seule bonne nouvelle c’est qu’il n’y a pas de quoi se sentir si diffĂ©rents des autres.
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Marc Levy (Mes amis, mes amours)
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Alors j'ai pensĂ© aux adverbes et aux conjonctions de coordination qui indiquent une rupture dans le temps (soudain, tout Ă  coup), une opposition (nĂ©antmoins, en revanche, par contre, cependant) ou une concession (alors que , mĂȘme si, quand bien mĂȘme), je n'ai plus pensĂ© qu'Ă  ça, j'ai cherchĂ© Ă  les Ă©numĂ©rer dans ma tĂȘte, Ă  en faire l'inventaire, je ne pouvais rien dire, rien du tout, parce que ça se brouillait autour de moi, les murs et la lumiere. Alors, j'ai pensĂ© que la grammaire a tout prĂ©vu, les dĂ©senchantements, les defaites et les emmerdements en gĂ©nĂ©ral.
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Delphine de Vigan (No and Me)
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Il paraĂźt qu'Ă  soixante-dix ans, c'est le meilleur souvenir qu'il vous reste. Le sexe. C'est ma grand-mĂšre qui m'a dit ça. Elle m'a dit, tu sais quand on a mon Ăąge, les plus beaux souvenirs qu'il vous reste ce sont les nuits d'amour. C'est ses mots Ă  elle, mais je sais bien ce que ça veut dire. Ça veut dire qu'il n'y a rien de tel, aprĂšs avoir bien pris son pied, que de se coller contre un homme en lui tenant la bite encore toute chaude comme un petit Ă©cureuil endormi. Tricote-toi des souvenirs, elle me dit, ma grand-mĂšre, alors moi, je fais comme elle me dit et je me tricote des souvenirs pour me faire des pulls et des pulls pour quand je serai vieille et que j'aurai toujours froid. Parce que les vieux, ils ont toujours froid. Ils ont froid de ne plus pouvoir vivre les choses. C'est ça, qui donne froid, c'est de plus pouvoir s'assouvir, de plus pouvoir se donner Ă  fond Ă  ce qu'on a envie de vivre.
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David Thomas (La Patience des buffles sous la pluie)
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Quand on s’attend au pire, le moins pire a une saveur toute particuliĂšre, que vous dĂ©gusterez avec plaisir, mĂȘme si ce n’est pas le meilleur. *** Ce n'est pas la vie qui est belle, c'est nous qui la voyons belle ou moins belle. Ne cherchez pas Ă  atteindre un bonheur parfait, mais contentez vous des petites choses de la vie, qui, mises bout Ă  bout, permettent de tenir la distance
 Les tout petit riens du quotidien, dont on ne se rend mĂȘme plus compte mais qui font que, selon la façon dont on les vit, le moment peut ĂȘtre plaisant et donne envie de sourire. Nous avons tous nos petits riens Ă  nous. Il faut juste en prendre conscience. *** Le silence a cette vertu de laisser parler le regard, miroir de l’ñme. On entend mieux les profondeurs quand on se tait. *** Au temps des sorciĂšres, les larmes d’homme devaient ĂȘtre trĂšs recherchĂ©es. C’est rare comme la bave de crapaud. Ce qu’elles pouvaient en faire, ça, je ne sais pas. Une potion pour rendre plus gentil ? Plus humain ? Moins avare en Ă©motion ? Ou moins poilu ? *** Quand un silence s’installe, on dit qu’un ange passe
 *** Vide. Je me sens vide et Ă©teinte. J’ai l’impression d’ĂȘtre un peu morte, moi aussi. D’ĂȘtre un champ de bataille. Tout a brĂ»lĂ©, le sol est irrĂ©gulier, avec des trous bĂ©ants, des ruines Ă  perte de vue. Le silence aprĂšs l’horreur. Mais pas le calme aprĂšs la tempĂȘte, quand on se sent apaisĂ©. Moi, j’ai l’impression d’avoir sautĂ© sur une mine, d’avoir explosĂ© en mille morceaux, et de ne mĂȘme pas savoir comment je vais faire pour les rassembler, tous ses morceaux, ni si je les retrouverai tous. *** Accordez-vous le droit de vivre votre chagrin. Il y a un temps pour tout. *** Ce n’est pas d’intuition dont est dotĂ© Romain, mais d’attention. *** ÒȘa fait toujours plaisir un cadeau, surtout de la part des gens qu’on aime.
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AgnĂšs Ledig (Juste avant le bonheur)
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Maman, j'ai essayĂ© de comprendre ta jalousie, et en guise de gratitude, tu ouvres devant moi le gouffre dans lequel tu es tombĂ©e, Ă  croire que tu cherches Ă  m'y faire chuter, mais tu n'y rĂ©ussiras pas, maman, je refuse de devenir comme toi, et je peux te dire que sans mĂȘme y ĂȘtre tombĂ©e, rien que de sentir l'appel de ce gouffre, j'ai si mal que je pourrais hurler, c'est comme la morsure du vide, maman, je comprends ta souffrance mais ce que je ne comprends pas, c'est ton peu d'Ă©gards pour moi, en vĂ©ritĂ© tu ne cherches pas Ă  partager ton mal avec moi, cela t'est juste Ă©gal que je souffre, tu ne le vois pas, c'est le dernier de tes soucis et c'est cela le pire.
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AmĂ©lie Nothomb (Frappe-toi le cƓur)
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Parfois, le destin ressemble Ă  une tempĂȘte de sable qui se dĂ©place sans cesse. Tu modifies ton allure pour lui Ă©chapper. Mais la tempĂȘte modifie aussi la sienne. Tu changes Ă  nouveau le rythme de ta marche, et la tempĂȘte change son rythme elle aussi. C'est sans fin, cela se rĂ©pĂšte un nombre incalculable de fois, comme une danse macabre avec le dieu de la Mort, juste avant l'aube. Pourquoi ? parce que la tempĂȘte n'est pas un phĂ©nomĂšne venu d'ailleurs sans aucun lien avec toi. Elle est toi mĂȘme et rien d'autre. elle vient de l'intĂ©rieur de toi. Alors la seule chose que tu puisses faire, c'est pĂ©nĂ©trer dĂ©libĂ©rĂ©ment dedans, fermer les yeux et te boucher les oreilles afin d'empĂȘcher le sable d'y entrer, et la traverser pas Ă  pas. Au coeur de cette tempĂȘte, il n'y a pas de soleil, il n'y a pas de lune, pas de repĂšre dans l'espace ; par moments, mĂȘme, le temps n'existe plus. Il n'y a que du sable blanc et fin comme des os broyĂ©s qui tourbillonne haut dans le ciel. VoilĂ  la tempĂȘte de sable que tu dois imaginer.
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Haruki Murakami (Kafka on the Shore)
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Mais le revenu annuel de toute sociĂ©tĂ© est toujours prĂ©cisĂ©ment Ă©gal Ă  la valeur Ă©changeable de tout le produit annuel de son industrie, ou plutĂŽt c'est prĂ©cisĂ©ment la mĂȘme chose que cette valeur Ă©changeable. Par consĂ©quent, puisque chaque individu tĂąche, le plus qu'il peut, 1° d'employer son capital Ă  faire valoir l'industrie nationale, et - 2° de diriger cette industrie de maniĂšre Ă  lui faire produire la plus grande valeur possible, chaque individu travaille nĂ©cessairement Ă  rendre aussi grand que possible le revenu annuel de la sociĂ©tĂ©. A la vĂ©ritĂ©, son intention, en gĂ©nĂ©ral, n'est pas en cela de servir l'intĂ©rĂȘt public, et il ne sait mĂȘme pas jusqu'Ă  quel point il peut ĂȘtre utile Ă  la sociĂ©tĂ©. En prĂ©fĂ©rant le succĂšs de l'industrie nationale Ă  celui de l'industrie Ă©trangĂšre, il ne pense qu'Ă  se donner personnellement une plus grande sĂ»retĂ© ; et en dirigeant cette industrie de maniĂšre Ă  ce que son produit ait le plus de valeur possible, il ne pense qu'Ă  son propre gain ; en cela, comme dans beaucoup d'autres cas, il est conduit par une main invisible Ă  remplir une fin qui n'entre nullement dans ses intentions ; et ce n'est pas toujours ce qu'il y a de plus mal pour la sociĂ©tĂ©, que cette fin n'entre pour rien dans ses intentions. Tout en ne cherchant que son intĂ©rĂȘt personnel, il travaille souvent d'une maniĂšre bien plus efficace pour l'intĂ©rĂȘt de la sociĂ©tĂ©, que s'il avait rĂ©ellement pour but d'y travailler. Je n'ai jamais vu que ceux qui aspiraient, dans leurs entreprises de commerce, Ă  travailler pour le bien gĂ©nĂ©ral, aient fait beaucoup de bonnes choses. Il est vrai que cette belle passion n'est pas trĂšs commune parmi les marchands, et qu'il ne faudrait pas de longs discours pour les en guĂ©rir.
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Adam Smith (An Inquiry into the Nature and Causes of the Wealth of Nations)
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Mais je comprends aussi que rien de ce qui concerne l'homme ne se compte, ni ne se mesure. L'Ă©tendue vĂ©ritable n'est point pour l'Ɠil, elle n'est accordĂ©e qu'Ă  l'esprit. Elle vaut ce que vaut le langage, car c'est le langage qui noue les choses. Il me semble dĂ©sormais entrevoir mieux ce qu'est une civilisation. Une civilisation est un hĂ©ritage de croyances, de coutumes et de connaissances, lentement acquises au cours des siĂšcles, difficiles parfois Ă  justifier par la logique, mais qui se justifient d'elles-mĂȘmes, comme des chemins, s'ils conduisent quelque part, puisqu'elles ouvrent Ă  l'homme son Ă©tendue intĂ©rieure. Une mauvaise littĂ©rature nous a parlĂ© du besoin d'Ă©vasion. Bien sĂ»r, on s'enfuit en voyage Ă  la recherche de l'Ă©tendue. Mais l'Ă©tendue ne se trouve pas. Elle se fonde. Et l'Ă©vasion n'a jamais conduit nulle part. Quand l'homme a besoin, pour se sentir homme, de courir des courses, de chanter en chƓur, ou de faire la guerre, ce sont dĂ©jĂ  des liens qu'il s'impose afin de se nouer Ă  autrui et au monde. Mais combien pauvres ! Si une civilisation est forte, elle comble l'homme, mĂȘme si le voilĂ  immobile.
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Antoine de Saint-Exupéry (Pilote de Guerre)
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C'est Ă©trange que les choses en soient venues Ă  ce point Ă  notre Ă©poque, et que la philosophie ne soit, mĂȘme pour les gens intelligents, qu'un mot creux et chimĂ©rique, qui ne soit d'aucune utilitĂ© et n'ait aucune valeur, ni dans l'opinion gĂ©nĂ©rale, ni dansla rĂ©alitĂ©. Je crois que la cause en est que ses grandes avenues ont Ă©tĂ© occupĂ©es par des discussions oiseuses. On a grand tort de la dĂ©crire comme quelque chose d'inaccessible aux enfants, et de lui faire un visage renfrognĂ©, sourcilleux et terrible : qui donc lui a mis ce masque d'un visage blĂȘme et hideux? Il n'est rien de plus gai, de plus allĂšgre et de plus enjouĂ©, et pour un peu, je dirais mĂȘme : folĂątre... Elle ne prĂȘche que la fĂȘte et le bon temps. Une mine triste et abattue : voila qui montre bien que ce n'est pas laqu'elle habite.
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Michel de Montaigne
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J'ai Ă©crit le mot  : amour. J'ai bien envisagĂ© d'en employer un autre. Au moins parce que c'est une notion curieuse, l'amour  ; difficile Ă  dĂ©finir, Ă  cerner, Ă  Ă©tablir. Il en existe tant de degrĂ©s, tant de variations. J'aurais pu me contenter d'affirmer que j'Ă©tais attendri (et il est exact que T.   savait Ă  merveille me faire faiblir, flĂ©chir), ou charmĂ© (il s'y entendait comme personne pour attirer Ă  lui, conquĂ©rir, flatter, et mĂȘme ensorceler), ou troublĂ© (il provoquait souvent un mĂ©lange de perplexitĂ© et d'Ă©moi, renversait les situations), ou sĂ©duit (il m'attirait dans ses filets, me bluffait, me gagnait Ă  ses causes), ou Ă©pris (j'Ă©tais bĂȘtement enjouĂ©, je pouvais m'enflammer pour un rien)  ; ou mĂȘme aveuglĂ© (je mettais de cĂŽtĂ© ce qui m'embarrassait, je minimisais ses dĂ©fauts, portais aux nues ses qualitĂ©s), perturbĂ© (je n'Ă©tais plus tout Ă  fait moi-mĂȘme), ce qui aurait un sens moins favorable. J'aurais pu expliquer qu'il ne s'agissait que d'affection, que je me contentais d'avoir le «  bĂ©guin  », une formulation suffisamment floue pour englober n'importe quoi. Mais ce serait me payer de mots. La vĂ©ritĂ©, la vĂ©ritĂ© toute nue, c'est que j'Ă©tais amoureux. Autant employer les mots prĂ©cis.
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Philippe Besson (« ArrĂȘte avec tes mensonges »)
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Je me suis figurĂ© qu’une femme devait faire plus de cas de son Ăąme que de son corps, contre l’usage gĂ©nĂ©ral qui veut qu’elle permette qu’on l’aime avant d’avouer qu’elle aime, et qu’elle abandonne ainsi le trĂ©sor de son coeur avant de consentir Ă  la plus lĂ©gĂšre prise sur celui de sa beautĂ©. J’ai voulu, oui, voulu absolument tenter de renverser cette marche uniforme ; la nouveautĂ© est ma rage. Ma fantaisie et ma paresse, les seuls dieux dont j’aie jamais encensĂ© les autels, m’ont vainement laissĂ© parcourir le monde, poursuivi par ce bizarre dessein ; rien ne s’offrait Ă  moi. Peut-ĂȘtre je m’explique mal. J’ai eu la singuliĂšre idĂ©e d’ĂȘtre l’époux d’une femme avant d’ĂȘtre son amant. J’ai voulu voir si rĂ©ellement il existait une Ăąme assez orgueilleuse pour demeurer fermĂ©e lorsque les bras sont ouverts, et livrer la bouche Ă  des baisers muets ; vous concevez que je ne craignais que de trouver cette force Ă  la froideur. Dans toutes les contrĂ©es qu’aime le soleil, j’ai cherchĂ© les traits les plus capables de rĂ©vĂ©ler qu’une Ăąme ardente y Ă©tait enfermĂ©e : j’ai cherchĂ© la beautĂ© dans tout son Ă©clat, cet amour qu’un regard fait naĂźtre ; j’ai dĂ©sirĂ© un visage assez beau pour me faire oublier qu’il Ă©tait moins beau que l’ĂȘtre invisible qui l’anime ; insensible Ă  tout, j’ai rĂ©sistĂ© Ă  tout,... exceptĂ© Ă  une femme, – Ă  vous, Laurette, qui m’apprenez que je me suis un peu mĂ©pris dans mes idĂ©es orgueilleuses ; Ă  vous, devant qui je ne voulais soulever le masque qui couvre ici-bas les hommes qu’aprĂšs ĂȘtre devenu votre Ă©poux. – Vous me l’avez arrachĂ©, je vous supplie de me pardonner, si j’ai pu vous offenser. ( Le prince )
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Alfred de Musset (La nuit vénitienne)
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Eh bien, c'est l'histoire d'un petit ourson qui s'appelle
 Arthur. Et y'a une fĂ©e, un jour, qui vient voir le petit ourson et qui lui dit : Arthur tu vas partir Ă  la recherche du Vase Magique. Et elle lui donne une Ă©pĂ©e hmm
 magique (ouais, parce qu'y a plein de trucs magiques dans l'histoire, bref) alors le petit ourson il se dit : "Heu, chercher le Vase Magique ça doit ĂȘtre drĂŽlement difficile, alors il faut que je parte dans la forĂȘt pour trouver des amis pour m'aider." Alors il va voir son ami Lancelot
 le cerf (parce que le cerf c'est majestueux comme ça), heu, Bohort le faisan et puis LĂ©odagan
 heu
 l'ours, ouais c'est un ours aussi, c'est pas tout Ă  fait le mĂȘme ours mais bon. Donc LĂ©odagan qui est le pĂšre de la femme du petit ourson, qui s'appelle GueniĂšvre la truite
 non, non, parce que c'est la fille de
 non c'est un ours aussi puisque c'est la fille de l'autre ours, non parce qu'aprĂšs ça fait des machins mixtes, en fait un ours et une truite
 non en fait ça va pas. Bref, sinon y'a Gauvain le neveu du petit ourson qui est le fils de sa sƓur Anna, qui est restĂ©e Ă  Tintagel avec sa mĂšre Igerne la
 bah non, ouais du coup je suis obligĂ© de foutre des ours de partout sinon on pige plus rien dans la famille
 Donc c'est des ours, en gros, enfin bref
 Ils sont tous lĂ  et donc Petit Ourson il part avec sa troupe Ă  la recherche du Vase Magique. Mais il le trouve pas, il le trouve pas parce qu'en fait pour la plupart d'entre eux c'est
 c'est des nazes : ils sont hyper mous, ils sont bĂȘtes, en plus y'en a qu'ont la trouille. Donc il dĂ©cide de les faire bruler dans une grange pour s'en dĂ©barrasser
 Donc la fĂ©e revient pour lui dire : "Attention petit ourson, il faut ĂȘtre gentil avec ses amis de la forĂȘt" quand mĂȘme c'est vrai, et du coup Petit Ourson il lui met un taquet dans la tĂȘte Ă  la fĂ©e, comme ça : "BAH !". Alors la fĂ©e elle est comme ça et elle s'en va
 et voilĂ  et en fait il trouve pas le vase. En fait il est
 il trouve pas
 et Petit Ourson il fait de la dĂ©pression et tous les jours il se demande s'il va se tuer ou
 pas

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Alexandre Astier (Kaamelott, livre 3, premiùre partie : Épisodes 1 à 50)
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Tacite se moquait des Germains qui tentaient d'arrĂȘter un torrent avec leur boucliers ; ce n'est pourtant pas plus naĂŻf que de croire Ă  l'Ă©migration planĂ©taire, ou de croire Ă  l'installation, avec des moyens purement humains, d'une sociĂ©tĂ© humaine dĂ©finitivement satisfaite et parfaitement inoffensive, et continuant indĂ©finiment Ă  progresser. Tout cela prouve que l'homme, s'il est forcĂ©ment devenu moins naĂŻf pour certaines choses, n'a pourtant rien appris quant Ă  l'essentiel, pour dire le moins ; la seule chose dont l'homme livrĂ© Ă  lui-mĂȘme soit capable, c'est de "faire les pĂ©chĂ©s les plus anciens de la maniĂšre la plus nouvelle", comme dirait Shakespeare. Et le monde Ă©tant ce qu'il est, ce n'est sans doute pas commettre un truisme que d'ajouter qu'il vaut mieux aller naĂŻvement au Ciel que d'aller intelligemment en enfer.
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Frithjof Schuon (Light on the Ancient Worlds: A New Translation with Selected Letters (Library of Perennial Philosophy))
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Le but de la fĂȘte est de nous faire oublier que nous sommes solitaires, misĂ©rables et promis Ă  la mort. Autrement dit, de nous transformer en animaux. C'est pourquoi le primitif a un sens de la fĂȘte trĂšs dĂ©veloppĂ©. Une bonne flambĂ©e de plantes hallucinogĂšnes, trois tambourins, et le tour est jouĂ© : un rien l'amuse. À l’opposĂ©, l'Occidental moyen n'aboutit Ă  une extase insuffisante qu'Ă  l'issue de raves interminables dont il ressort sourd et droguĂ© : il n'a pas du tout le sens de la fĂȘte. ProfondĂ©ment conscient de lui-mĂȘme, radicalement Ă©tranger aux autres, terrorisĂ© par l’idĂ©e de la mort, il est bien incapable d’accĂ©der Ă  une quelconque fusion. Cependant, il s'obstine. La perte de sa condition animale l'attriste, il en conçoit honte et dĂ©pit ; il aimerait ĂȘtre un fĂȘtard, ou du moins passer pour tel. Il est dans une sale situation.
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Michel Houellebecq (Interventions 2020)
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[Le] jour qui vient de passer, tout dĂ©bordant d'activitĂ© qu'il ait Ă©tĂ©, ne manque jamais, Ă  la seconde ou enfin le sommeil va m'assommer, de me sembler suspect, dĂ©nuĂ© de toute valeur, de me faire trembler de peur. C'est toujours avec angoisse que j'anticipe le retour de la nuit, le moment de la grande rencontre avec moi-mĂȘme, le moment d'ajouter un autre zĂ©ro au total du passĂ©, le moment de me rapprocher de tout un pas de la frontiĂšre au-dela de laquelle il n'y a plus rien, mĂȘme plus de futur.
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Réjean Ducharme (L'avalée des avalés)
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Et c’est lĂ , en effet, un des grands et merveilleux caractĂšres des beaux livres (et qui nous fera comprendre le rĂŽle Ă  la fois essentiel et limitĂ© que la lecture peut jouer dans notre vie spirituelle) que pour l’auteur ils pourraient s’appeler « Conclusions » et pour le lecteur « Incitations ». Nous sentons trĂšs bien que notre sagesse commence oĂč celle de l’auteur finit, et nous voudrions qu’il nous donnĂąt des rĂ©ponses, quand tout ce qu’il peut faire est de nous donner des dĂ©sirs. Et ces dĂ©sirs, il ne peut les Ă©veiller en nous qu’en nous faisant contempler la beautĂ© suprĂȘme Ă  laquelle le dernier effort de son art lui a permis d’atteindre. Mais par une loi singuliĂšre et d’ailleurs providentielle de l’optique des esprits (loi qui signifie peut-ĂȘtre que nous ne pouvons recevoir la vĂ©ritĂ© de personne, et que nous devons la crĂ©er nous-mĂȘme), ce qui est le terme de leur sagesse ne nous apparaĂźt que comme le commencement de la nĂŽtre, de sorte que c’est au moment oĂč ils nous ont dit tout ce qu’ils pouvaient nous dire qu’ils font naĂźtre en nous le sentiment qu’ils ne nous ont encore rien dit.
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Marcel Proust (Days of Reading (Penguin Great Ideas))
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Il est possible qu'Ă  des Ă©poques antĂ©rieures, oĂč les ours Ă©taient nombreux, la virilitĂ© ait pu jouer un rĂŽle spĂ©cifique et irremplaçable; mais depuis quelques siĂšcles, les hommes ne servaient visiblement Ă  peu prĂšs plus Ă  rien. Ils trompaient parfois leur ennui en faisant des parties de tennis, ce qui Ă©taient un moindre mal; mais parfois aussi ils estimaient utile de faire avancer l'histoire, c'est-Ă -dire essentiellement de provoquer des rĂ©volutions et des guerres. Outre les souffrances absurdes qu'elles provoquaient, les rĂ©volutions et les guerres dĂ©truisaient le meilleurs du passĂ©, obligeant Ă  chaque fois Ă  faire table rase pour rebĂątir. Non inscrite dans le cours rĂ©gulier d'une ascension progressive, l'Ă©volution humaine acquĂ©rait ainsi un tour chaotique, dĂ©structurĂ©, irrĂ©gulier et violent. Tout cela les hommes (avec leur goĂ»t du risque et du jeu, leur vanitĂ© grotesque, leur irresponsabilitĂ©, leur violence fonciĂšre) en Ă©taient directement et exclusivement responsables. Un monde composĂ© de femmes serait Ă  tous points de vue infiniment supĂ©rieur; il Ă©voluerait plus lentement, mais avec rĂ©gularitĂ©, sans retours en arriĂȘre et sans remises en cause nĂ©fastes, vers un Ă©tat de bonheur commun.
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Michel Houellebecq
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Du reste, la majoritĂ© des orientalistes ne sont et ne veulent ĂȘtre que des Ă©rudits ; tant qu’ils se bornent Ă  des travaux historiques ou philologiques, cela n’a pas grande importance ; il est Ă©vident que des ouvrages de ce genre ne peuvent servir de rien pour atteindre le but que nous envisageons ici, mais leur seul danger, en somme, est celui qui est commun Ă  tous les abus de l’érudition, nous voulons dire la propagation de cette « myopie intellectuelle » qui borne tout savoir Ă  des recherches de dĂ©tail, et le gaspillage d’efforts qui pourraient ĂȘtre mieux employĂ©s dans bien des cas. Mais ce qui est beaucoup plus grave Ă  nos yeux, c’est l’action exercĂ©e par ceux des orientalistes qui ont la prĂ©tention de comprendre et d’interprĂ©ter les doctrines, et qui les travestissent de la façon la plus incroyable, tout en assurant parfois qu’ils les comprennent mieux que les Orientaux eux-mĂȘmes (comme Leibnitz s’imaginait avoir retrouvĂ© le vrai sens des caractĂšres de Fo-hi), et sans jamais songer Ă  prendre l’avis des reprĂ©sentants autorisĂ©s des civilisations qu’ils veulent Ă©tudier, ce qui serait pourtant la premiĂšre chose Ă  faire, au lieu de se comporter comme s’il s’agirait de reconstituer des civilisations disparues.
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René Guénon (East and West)
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De l’espĂšce d’ñme qui a la plus haute autoritĂ© en nous, voici l’idĂ©e qu’il faut s’en faire : c’est que Dieu nous l’a donnĂ©e comme un gĂ©nie, et c’est le principe que nous avons dit logĂ© au sommet de notre corps, et qui nous Ă©lĂšve de la terre vers notre parentĂ© cĂ©leste, car nous sommes une plante du ciel, non de la terre, nous pouvons l’affirmer en toute vĂ©ritĂ©. Car Dieu a suspendu notre tĂȘte et notre racine Ă  l’endroit oĂč l’ñme fut primitivement engendrĂ©e et a ainsi dressĂ© tout notre corps vers le ciel. Or, quand un homme s’est livrĂ© tout entier Ă  ses passions ou Ă  ses ambitions et applique tous ses efforts Ă  les satisfaire, toutes ses pensĂ©es deviennent nĂ©cessairement mortelles, et rien ne lui fait dĂ©faut pour devenir entiĂšrement mortel, autant que cela est possible, puisque c’est Ă  cela qu’il s’est exercĂ©. Mais lorsqu’un homme s’est donnĂ© tout entier Ă  l’amour de la science et Ă  la vraie sagesse et que, parmi ses facultĂ©s, il a surtout exercĂ© celle de penser Ă  des choses immortelles et divines, s’il parvient Ă  atteindre la vĂ©ritĂ©, il est certain que, dans la mesure oĂč il est donnĂ© Ă  la nature humaine de participer Ă  l’immortalitĂ©, il ne lui manque rien pour y parvenir ; et, comme il soigne toujours la partie divine et maintient en bon Ă©tat le gĂ©nie qui habite en lui, il doit ĂȘtre supĂ©rieurement heureux.
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Plato (Timaeus)
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Il y a quelqu'un que je n'ai encore jamais eu envie de tuer. C'est toi. Tu peux marcher dans les rues, tu peux boire et marcher dans les rues, je ne te tuerai pas. N'aie pas peur. La ville est sans danger. Le seul danger dans la ville, c'est moi. Je marche, je marche dans les rues, je tue. Mais toi, tu n'as rien Ă  craindre. Si je te suis, c'est parce que j'aime le rythme de tes pas. Tu titubes. C'est beau. On pourrait dire que tu boites. Et que tu es bossu. Tu ne l'es pas vraiment. De temps en temps tu te redresses, et tu marches droit. Mais moi, je t'aime dans les heures avancĂ©es de la nuit, quand tu es faible, quand tu trĂ©buches, quand tu te voĂ»tes. Je te suis, tu trembles. De froid ou de peur. Il fait chaud pourtant. Jamais, presque jamais, peut-ĂȘtre jamais il n'avait fait si chaud dans notre ville. Et de quoi pourrais-tu avoir peur? De moi? Je ne suis pas ton ennemi. Je t'aime. Et personne d'autre ne pourrait te faire du mal. N'aie pas peur. je suis lĂ . Je te protĂšge. Pourtant, je souffre aussi. Mes larmes - grosses gouttes de pluie - me coulent sur le visage. La nuit me voile. La lune m'Ă©claire. Les nuages me cachent. Le vent me dĂ©chire. J'ai une sorte de tendresse pour toi. Cela m'arrive parfois. Tres rarement. Pourquoi pour toi? Je n'en sais rien. Je veux te suivre trĂšs loin, partout, longtemps. Je veux te voir souffrir encore plus. Je veux que tu en aies assez de tout le reste. Je veux que tu viennes me supplier de te prendre. Je veux que tu me dĂ©sires. Que tu aies envie de moi, que tu m'aimes, que tu m'appelles. Alors, je te prendrai dans mes bras, je te serrerai sur mon coeur, tu seras mon enfant, mon amant, mon amour. Je t'emporterai. Tu avais peur de naĂźtre, et maintenant tu as peur de mourir. Tu as peur de tout. Il ne faut pas avoir peur. Il y a simplement une grande roue qui tourne. Elle s'appelle ÉternitĂ©. C'est moi qui fais tourner la grande roue. Tu ne dois pas avoir peur de moi. Ni de la grande roue. La seule chose qui puisse faire peur, qui puisse faire mal, c'est la vie, et tu la connais dĂ©jĂ .
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Ágota Kristóf
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Peindre d'abord une cage Avec une porte ouverte peindre ensuite quelque chose de joli quelque chose de simple quelque chose de beau quelque chose d'utile pour l'oiseau placer ensuite la toile contre un arbre dans un jardin dans un bois ou dans une forĂȘt se cacher derriĂšre l'arbre sans rien dire sans bouger... Parfois l'oiseau arrive vite mais il peut aussi bien mettre de longues annĂ©es avant de se dĂ©cider Ne pas se dĂ©courager attendre attendre s’il Ie faut pendant des annĂ©es la vitesse ou la lenteur de l'arrivĂ©e de l'oiseau n’ayant aucun rapport avec la rĂ©ussite du tableau Quand l'oiseau arrive s'il arrive observer le plus profond silence attendre que l'oiseau entre dans la cage et quand il est entrĂ© fermer doucement la porte avec le pinceau puis effacer un Ă  un tous les barreaux en ayant soin de ne toucher aucune des plumes de l'oiseau Faire ensuite le portrait de l'arbre en choisissant la plus belle de ses branches pour l'oiseau peindre aussi le vert feuillage et la fraĂźcheur du vent la poussiĂšre du soleil et le bruit des bĂȘtes de l'herbe dans la chaleur de l'Ă©tĂ© et puis attendre que l'oiseau se dĂ©cide Ă  chanter Si l'oiseau ne chante pas c'est mauvais signe signe que le tableau est mauvais mais s'il chante c'est bon signe signe que vous pouvez signer Alors vous arrachez tout doucement une des plumes de l'oiseau et vous Ă©crivez votre nom dans un coin du tableau.
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Jacques Prévert (Paroles)
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J'ai encore un vif souvenir de Freud me disant : "Mon cher Jung, promettez-moi de ne jamais abandonner la thĂ©orie sexuelle. C'est le plus essentiel ! Voyez-vous, nous devons en faire un dogme, un bastion inĂ©branlable." Il me disait cela plein de passion et sur le ton d'un pĂšre disant : "Promets-moi une chose, mon cher fils : va tous les dimanches Ă  l'Ă©glise !" Quelque peu Ă©tonnĂ©, je lui demandai : "Un bastion -- contre quoi ?" Il me rĂ©pondit : "Contre le flot de vase noire de
" Ici il hĂ©sita un moment pour ajouter : "
 de l'occultisme !" Ce qui m'alarma d'abord, c'Ă©tait le "bastion" et le "dogme" ; un dogme c'est-Ă -dire une profession de foi indiscutable, on ne l'impose que lĂ  oĂč l'on veut une fois pour toutes Ă©craser un doute. Cela n'a plus rien d'un jugement scientifique, mais relĂšve uniquement d'une volontĂ© personnelle de puissance. Ce choc frappa au cƓur notre amitiĂ©. Je savais que je ne pourrais jamais faire mienne cette position. Freud semblait entendre par "occultisme" Ă  peu prĂšs tout ce que la philosophie et la religion -- ainsi que la parapsychologie qui naissait vers cette Ă©poque -- pouvaient dire de l'Ăąme. Pour moi, la thĂ©orie sexuelle Ă©tait tout aussi "occulte" -- c'est-Ă -dire non dĂ©montrĂ©e, simple hypothĂšse possible, comme bien d'autres conceptions spĂ©culatives. Une vĂ©ritĂ© scientifique Ă©tait pour moi une hypothĂšse momentanĂ©ment satisfaisante, mais non un article de foi Ă©ternellement valable. (p. 244)
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C.G. Jung (Memories, Dreams, Reflections)
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On a dit qu’une citĂ© dont les membres auront une Ă©gale rĂ©partition de bien et d'Ă©ducation prĂ©sentera aux regards de la DivinitĂ© un spectacle au-dessus du spectacle de la citĂ© de nos pĂšres. La folie du moment est d'arriver Ă  l'unitĂ© des peuples et de ne faire qu’un seul homme de l'espĂšce entiĂšre, soit ; mais en acquĂ©rant des facultĂ©s gĂ©nĂ©rales, toute une sĂ©rie de sentiments privĂ©s ne pĂ©rira-t-elle pas ? Adieu les douceurs du foyer ; adieu les charmes de la famille ; parmi tous ces ĂȘtres blancs, jaunes, noirs, rĂ©putĂ©s vos compatriotes, vous ne pourriez vous jeter au cou d’un frĂšre. N’y avait-il rien dans la vie d’autrefois, rien dans cet espace bornĂ© que vous aperceviez de votre fenĂȘtre encadrĂ©e de lierre ? Au-delĂ  de votre horizon vous soupçonniez des pays inconnus dont vous parlait Ă  peine l’oiseau du passage, seul voyageur que vous aviez vu Ă  l’automne. C’était bonheur de songer que les collines qui vous environnaient ne disparaĂźtraient pas Ă  vos yeux ; qu’elles renfermeraient vos amitiĂ©s et vos amours ; que le gĂ©missement de la nuit autour de votre asile serait le seul bruit auquel vous vous endormiriez ; que jamais la solitude de votre Ăąme ne serait troublĂ©e, que vous y rencontreriez toujours les pensĂ©es qui vous y attendent pour reprendre avec vous leur entretien familier. Vous saviez oĂč vous Ă©tiez nĂ©, vous saviez oĂč Ă©tait votre tombe ; en pĂ©nĂ©trant dans la forĂȘt vous pouviez dire : Beaux arbres qui m’avez vu naĂźtre, BientĂŽt vous me verrez mourir
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François-René de Chateaubriand (Mémoires d'Outre-Tombe)
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Ce n’est pas des gens comme Aoki que j’ai peur. Des types de son espĂšce, il y en a partout. Je suis rĂ©signĂ© au fait qu’il en existe. Quand j’en aperçois un, je m’arrange simplement pour ne pas croiser son chemin. Avec eux, le salut est dans la fuite. Ça ne m’est pas bien difficile de les Ă©viter, je les repĂšre au premier coup d’Ɠil. D’un autre cĂŽtĂ©, il m’arrive aussi de trouver que les gens comme Aoki sont trĂšs forts. Cette capacitĂ© Ă  attendre tapi dans l’ombre qu’une occasion se prĂ©sente, leur habiletĂ© Ă  manipuler l’esprit des autres, tout le monde n’a pas ce don. Je dĂ©teste ce genre de types, ils me font vomir, mais je leur reconnais un certain talent. Non, en fait, ce qui me fait vraiment peur, ce sont les autres, ceux qui gobent sans le moindre esprit critique tout ce qu’un Aoki peut leur raconter. Incapables de se forger leur propre opinion, ou de comprendre quoi que ce soit par eux-mĂȘmes, ils avalent l’avis de beaux parleurs convaincants comme Aoki et mettent leurs propos en action en groupe. Il ne leur vient jamais Ă  l’idĂ©e, mĂȘme briĂšvement, qu’ils pourraient se tromper, faire une erreur, non. Ou qu’ils pourraient causer un mal dĂ©finitif Ă  quelqu’un, pour rien. Ils sont totalement irresponsables, ne se questionnent jamais sur les consĂ©quences de leurs actes. Ce sont eux qui me font vraiment peur. Ces gens que je vois en rĂȘve n’ont pas de visage. Leur silence envahit tout comme une eau glaciale. Dans ce silence, tout se met Ă  fondre et Ă  disparaĂźtre. Moi aussi je fonds au milieu d’eux, et j’ai beau hurler, personne ne m’entend.
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Haruki Murakami (The Silence)
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Avec le temps, j'ai simplement aperçu que mĂȘme ceux qui Ă©taient meilleurs que d'autres ne pouvaient s'empĂȘcher aujourd'hui de tuer ou de laisser tuer parce que c'Ă©tait dans la logique oĂč ils vivaient, et que nous ne pouvions pas faire un geste en ce monde sans risquer de faire mourir. Oui, j'ai continuĂ© d'avoir honte, j'ai appris cela, que nous Ă©tions tous dans la peste, et j'ai perdu la paix. Je la cherche encore aujourd'hui, essayant de les comprendre tous et de n'ĂȘtre l'ennemi mortel de personne. Je sais seulement qu'il faut faire ce qu'il faut pour ne plus ĂȘtre un pestifĂ©rĂ© et que c'est lĂ  ce qui peut, seul, nous faire espĂ©rer la paix, ou une bonne mort Ă  son dĂ©faut. C'est cela qui peut soulager les hommes et, sinon les sauver, du moins leur faire le moins de mal possible et mĂȘme parfois un peu de bien. Et c'est pourquoi j'ai dĂ©cidĂ© de refuser tout ce qui, de prĂšs ou de loin, pour de bonnes ou de mauvaises raisons, fait mourir ou justifie qu'on fasse mourir. « C'est pourquoi encore cette Ă©pidĂ©mie ne m'apprend rien, sinon qu'il faut la combattre Ă  vos cĂŽtĂ©s. Je sais de science certaine (oui, Rieux, je sais tout de la vie, vous le voyez bien) que chacun la porte en soi, la peste, parce que personne, non, personne au monde n'en est indemne. Et qu'il faut se surveiller sans arrĂȘt pour ne pas ĂȘtre amenĂ©, dans une minute de distraction, Ă  respirer dans la figure d'un autre et Ă  lui coller l'infection. Ce qui est naturel, c'est le microbe. Le reste, la santĂ©, l'intĂ©gritĂ©, la puretĂ©, si vous voulez, c'est un effet de la volontĂ© et d'une volontĂ© qui ne doit jamais s'arrĂȘter.
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Albert Camus (The Plague)
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Qu’est-ce qui peut seul ĂȘtre notre doctrine ? — Que personne ne donne Ă  l’homme ses qualitĂ©s, ni Dieu, ni la sociĂ©tĂ©, ni ses parents et ses ancĂȘtres, ni lui-mĂȘme (— le non-sens de l’« idĂ©e », rĂ©futĂ© en dernier lieu, a Ă©tĂ© enseignĂ©, sous le nom de « libertĂ© intelligible par Kant et peut-ĂȘtre dĂ©jĂ  par Platon).Personne n’est responsable du fait que l’homme existe, qu’il est conformĂ© de telle ou telle façon, qu’il se trouve dans telles conditions, dans tel milieu. La fatalitĂ© de son ĂȘtre n’est pas Ă  sĂ©parer de la fatalitĂ© de tout ce qui fut et de tout ce qui sera. L’homme n’est pas la consĂ©quence d’une intention propre, d’une volontĂ©, d’un but ; avec lui on ne fait pas d’essai pour atteindre un « idĂ©al d’humanitĂ© », un « idĂ©al de bonheur », ou bien un « idĂ©al de moralitĂ© », — il est absurde de vouloir faire dĂ©vier son ĂȘtre vers un but quelconque. Nous avons inventĂ© l’idĂ©e de « but » : dans la rĂ©alitĂ© le « but » manque
 On est nĂ©cessaire, on est un morceau de destinĂ©e, on fait partie du tout, on est dans le tout, — il n’y a rien qui pourrait juger, mesurer, comparer, condamner notre existence, car ce serait lĂ  juger, mesurer, comparer et condamner le tout
Mais il n’y a rien en dehors du tout ! — Personne ne peut plus ĂȘtre rendu responsable, les catĂ©gories de l’ĂȘtre ne peuvent plus ĂȘtre ramenĂ©es Ă  une cause premiĂšre, le monde n’est plus une unitĂ©, ni comme monde sensible, ni comme « esprit » : cela seul est la grande dĂ©livrance, — par lĂ  l’innocence du devenir est rĂ©tablie
 L’idĂ©e de « Dieu » fut jusqu’à prĂ©sent la plus grande objection contre l’existence
 Nous nions Dieu, nous nions la responsabilitĂ© en Dieu : par lĂ  seulement nous sauvons le monde.
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Friedrich Nietzsche (Twilight of the Idols)
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Augmentez la dose de sports pour chacun, dĂ©veloppez l'esprit d'Ă©quipe, de compĂ©tition, et le besoin de penser est Ă©liminĂ©, non ? Organiser, organisez, super-organisez des super-super-sports. Multipliez les bandes dessinĂ©es, les films; l'esprit a de moins en moins d'appĂ©tits. L'impatience, les autos-trades sillonnĂ©es de foules qui sont ici, lĂ , partout, nulle part. Les rĂ©fugiĂ©s du volant. Les villes se transforment en auberges routiĂšres; les hommes se dĂ©placent comme des nomades suivant les phases de la lune, couchant ce soir dans la chambre oĂč tu dormais Ă  midi et moi la veille. (1re partie) On vit dans l'immĂ©diat. Seul compte le boulot et aprĂšs le travail l'embarras du choix en fait de distractions. Pourquoi apprendre quoi que ce soit sinon Ă  presser les boutons, brancher des commutateurs, serrer des vis et des Ă©crous ? Nous n'avons pas besoin qu'on nous laisse tranquilles. Nous avons besoin d'ĂȘtre sĂ©rieusement tracassĂ©s de temps Ă  autre. Il y a combien de temps que tu n'as pas Ă©tĂ© tracassĂ©e sĂ©rieusement ? Pour une raison importante je veux dire, une raison valable ? - Tu dois bien comprendre que notre civilisation est si vaste que nous ne pouvons nous permettre d'inquiĂ©ter ou de dĂ©ranger nos minoritĂ©s. Pose-toi la question toi-mĂȘme. Que recherchons-nous, par-dessus tout, dans ce pays ? Les gens veulent ĂȘtre heureux, d'accord ? Ne l'as-tu pas entendu rĂ©pĂ©ter toute la vie ? Je veux ĂȘtre heureux, dĂ©clare chacun. Eh bien, sont-ils heureux ? Ne veillons-nous pas Ă  ce qu'ils soient toujours en mouvement, toujours distraits ? Nous ne vivons que pour ça, c'est bien ton avis ? Pour le plaisir, pour l'excitation. Et tu dois admettre que notre civilisation fournit l'un et l'autre Ă  satiĂ©tĂ©. Si le gouvernement est inefficace, tyrannique, vous Ă©crase d'impĂŽts, peu importe tant que les gens n'en savent rien. La paix, Montag. Instituer des concours dont les prix supposent la mĂ©moire des paroles de chansons Ă  la mode, des noms de capitales d'État ou du nombre de quintaux de maĂŻs rĂ©coltĂ©s dans l'Iowa l'annĂ©e prĂ©cĂ©dente. Gavez les hommes de donnĂ©es inoffensives, incombustibles, qu'ils se sentent bourrĂ©s de "faits" Ă  Ă©clater, renseignĂ©s sur tout. Ensuite, ils s'imagineront qu'ils pensent, ils auront le sentiment du mouvement, tout en piĂ©tinant. Et ils seront heureux, parce que les connaissances de ce genre sont immuables. Ne les engagez pas sur des terrains glissants comme la philosophie ou la sociologie Ă  quoi confronter leur expĂ©rience. C'est la source de tous les tourments. Tout homme capable de dĂ©monter un Ă©cran mural de tĂ©lĂ©vision et de le remonter et, de nos jours ils le sont Ă  peu prĂšs tous, est bien plus heureux que celui qui essais de mesurer, d'Ă©talonner, de mettre en Ă©quations l'univers ce qui ne peut se faire sans que l'homme prenne conscience de son infĂ©rioritĂ© et de sa solitude. Nous sommes les joyeux drilles, les boute-en-train, toi, moi et les autres. Nous faisons front contre la marĂ©e de ceux qui veulent plonger le monde dans la dĂ©solation en suscitant le conflit entre la thĂ©orie et la pensĂ©e. Nous avons les doigts accrochĂ©s au parapet. Tenons bon. Ne laissons pas le torrent de la mĂ©lancolie et de la triste philosophie noyer notre monde. Nous comptons sur toi. Je ne crois pas que tu te rendes compte de ton importance, de notre importance pour protĂ©ger l'optimisme de notre monde actuel.
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Ray Bradbury (Fahrenheit 451)
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Cher Monsieur Waters, Je reçois votre courrier Ă©lectronique en date du 14 avril dernier et suis comme il se doit impressionnĂ© par la complexitĂ© shakespearienne de votre drame. Chaque personnage dans votre histoire a une harmatia en bĂ©ton. La sienne : ĂȘtre trop malade. La vĂŽtre : ĂȘtre trop bien portant. FĂ»t-ce le contraire, vos Ă©toiles n'auraient pas Ă©tĂ© aussi contrariĂ©es, mais c'est dans la natures des Ă©toiles d'ĂȘtre contrariĂ©es. A ce propos, Shakespeare ne s'est jamais autant trompĂ© qu'en mettant ces mots dans la bouche de Cassius : « La faute, cher Brutus, n'en est pas Ă  nos Ă©toiles ; elle en est Ă  nous-mĂȘmes. » Facile Ă  dire lorsqu'on est un noble romain (ou Shakespeare!), mais nos Ă©toiles ne sont jamais Ă  court de tort. Puisque nous en sommes au chapitre des dĂ©faillances de ce cher vieux William, ce que vous me dites de la jeune Hazel me rappelle le sonnet 55, qui commence, bien entendu ainsi : « Ni le marbre, ni les mausolĂ©es dorĂ©s des princes ne dureront plus longtemps que ma rime puissante. Vous conserverez plus d'Ă©clat dans ces mesures que sous la dalle non balayĂ©e que le temps barbouille de sa lie. (Hors sujet, mais : quel cochon, ce temps ! Il bousille tout le monde.) Un bien joli poĂšme, mais trompeur : nul doute que la rime puissante de Shakespeare nous reste en mĂ©moire, mais que nous rappelons-nous de l'homme qu'il cĂ©lĂšbre ? Rien. Nous sommes certains qu'il Ă©tait de sexe masculin, le reste n'est qu'une hypothĂšse. Shakespeare nous raconte des clopinettes sur l'homme qu'il a enseveli Ă  l'intĂ©rieur de son sarcophage linguistique. (Remarquez que, lorsque nous parlons littĂ©rature, nous utilisons le prĂ©sent. Quand nous parlons d'un mort, nous ne sommes pas aussi gentils.) On ne peut pas immortaliser ceux qui nous ont quittĂ©s en Ă©crivant sur eux. La langue enterre, mais ne ressuscite pas. (Avertissement : je ne suis pas le premier Ă  faire cette observation, cf le poĂšme d'Archibald MacLeish « Ni le marbre, ni les mausolĂ©es dorĂ©s » qui renferme ce vers hĂ©roĂŻque : « Vous mourrez et nul ne se souviendra de vous ») Je m'Ă©loigne du sujet, mais votre le problĂšme : les morts ne sont visibles que dans l’Ɠil dĂ©nuĂ© de paupiĂšre de la mĂ©moire. Dieu merci, les vivants conservent l'aptitude de surprendre et de dĂ©cevoir. Votre Hazel est vivante, Waters, et vous ne pouvez imposer votre volontĂ© contre la dĂ©cision de quelqu'un d'autre, qui plus est lorsque celle-ci est mĂ»rement rĂ©flĂ©chie. Elle souhaite vous Ă©pargner de la peine et vous devriez l'accepter. Il se peut que la logique de la jeune Hazel ne vous convainque pas, mais j'ai parcouru cette vallĂ©e de larmes plus longtemps que vous, et de mon point de vue, Hazel n'est pas la moins saine d'esprit. Bien Ă  vous Peter Van Houten
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John Green (The Fault in Our Stars)