La Nuit Des Temps Quotes

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Nous, les Arabes, ne sommes pas paresseux. Nous prenons seulement le temps de vivre. Ce qui n'est pas le cas des Occidentaux. Pour eux, le temps, c'est de l'argent. Pour nous, le temps ça n'a pas de prix. Un verre de thé suffit à notre bonheur, alors qu'aucun bonheur ne leur suffit. Toute la différence est là.
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Yasmina Khadra (Ce que le jour doit Ă  la nuit)
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Vivre les malheurs Ă  l'avance, c'est les subir deux fois.
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René Barjavel (La Nuit des temps)
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They're us!They've repopulated the world, and now they've achieved the same state of idiocy they were in before, ready to blow themselves up all over again. Great, isn't it? That's the human race!
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René Barjavel (La Nuit des temps)
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inside this prison he lived in freedom
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René Barjavel (La Nuit des temps)
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Let those who want to dance, dance. Let those who can awaken, awake.
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René Barjavel (La Nuit des temps)
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Il serait peut-ĂȘtre bon, il serait peut-ĂȘtre temps de se demander si la perfection n’est pas dans l’enfance, si l’adulte n’est pas qu’un enfant qui a commencĂ© Ă  pourrir.
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René Barjavel (La Nuit des temps)
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Sous le pont Mirabeau coule la Seine Et nos amours Faut-il qu'il m'en souvienne La joie venait toujours aprÚs la peine Vienne la nuit sonne l'heure Les jours s'en vont je demeure Les mains dans les mains restons face à face Tandis que sous Le pont de nos bras passe des éternels regards l'onde si lasse Vienne la nuit sonne l'heure Les jours s'en vont je demeure l'amour s'en va comme cette eau courante L'amour s'en va Comme la vie est lente Et comme l'Espérance est violente Vienne la nuit sonne l'heure Les jours s'en vont je demeure Passent les jours et passent les semaines Ni temps passé Ni les amours reviennent Sous le pont Mirabeau coule la Seine Vienne la nuit sonne l'heure Les jours s'en vont je demeure
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Guillaume Apollinaire (Alcools)
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Ils Ă©taient onze, deux Noirs, deux Jaunes, quatre Blancs, et trois allant du cafĂ© au lait Ă  l’huile d’olive. Mais leurs onze sangs mĂȘlĂ©s dans une coupe n’eussent fait qu’un seul sang rouge.
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René Barjavel (La Nuit des temps)
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Je vais vous dire quelque chose au sujet des histoires. Elles ne sont pas qu'un amusement, ne vous y trompez pas. Elles sont tout ce que nous savons, voyez-vous, tout ce que nous savons pour combattre la maladie et la mort. Vous n'avez rien si vous n'avez pas les histoires. ( Leslie M. Silko)
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Mathias Malzieu (Maintenant qu'il fait tout le temps nuit sur toi)
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Ô temps ! suspends ton vol, et vous, heures propices ! Suspendez votre cours : Laissez-nous savourer les rapides dĂ©lices Des plus beaux de nos jours ! Assez de malheureux ici-bas vous implorent, Coulez, coulez pour eux ; Prenez avec leurs jours les soins qui les dĂ©vorent ; Oubliez les heureux. Mais je demande en vain quelques moments encore, Le temps m'Ă©chappe et fuit ; Je dis Ă  cette nuit : Sois plus lente ; et l'aurore Va dissiper la nuit.
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Alphonse de Lamartine (Poésies choisies)
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Comment on va faire maintenant qu'il fait tout le temps nuit sur toi? Qu'est-ce que ça veut dire la vie sans toi? Qu'est-ce qui se passe pour toi là? Dur Rien? Du vide? De la nuit, des choses de ciel, du réconfort?
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Mathias Malzieu (Maintenant qu'il fait tout le temps nuit sur toi)
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Oh! je voudrais tant que tu te souviennes Des jours heureux oĂč nous Ă©tions amis En ce temps-lĂ  la vie Ă©tait plus belle Et le soleil plus brĂ»lant qu'aujourd'hui. Les feuilles mortes se ramassent Ă  la pelle Tu vois, je n'ai pas oubliĂ© Les feuilles mortes se ramassent Ă  la pelle Les souvenirs et les regrets aussi. Et le vent du Nord les emporte, Dans la nuit froide de l'oubli. Tu vois je n'ai pas oubliĂ©, La chanson que tu me chantais... Les feuilles mortes se ramassent Ă  la pelle Les souvenirs et les regrets aussi, Mais mon amour silencieux et fidĂšle Sourit toujours et remercie la vie. Je t'aimais tant, tu Ă©tais si jolie, Comment veux-tu que je t'oublie? En ce temps-lĂ  la vie Ă©tait plus belle Et le soleil plus brĂ»lant qu'aujourd'hui. Tu Ă©tais ma plus douce amie Mais je n'ai que faire des regrets. Et la chanson que tu chantais, Toujours, toujours je l'entendrai. C'est une chanson qui nous ressemble, Toi tu m'aimais, moi je t'aimais Et nous vivions, tous deux ensemble, Toi qui m'aimais, moi qui t'aimais. Mais la vie sĂ©pare ceux qui s'aiment, Tout doucement, sans faire de bruit Et la mer efface sur le sable Les pas des amants dĂ©sunis. C'est une chanson qui nous ressemble, Toi tu m'aimais et je t'aimais Et nous vivions tous deux ensemble, Toi qui m'aimais, moi qui t'aimais. Mais la vie sĂ©pare ceux qui s'aiment, Tout doucement, sans faire de bruit Et la mer efface sur le sable Les pas des amants dĂ©sunis.
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Jacques Prévert
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Les jours passent, la nuit reste. Maintenant, tu me manques. Des fois c'est tes bras, des fois c'est tes pas dont je crois reconnaĂźtre le bruit. La plupart du temps, c'est toi en entier, avec ta voix et tes petites façons d'ĂȘtre ma mĂšre.
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Mathias Malzieu (Maintenant qu'il fait tout le temps nuit sur toi)
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Pour moi l'automne n'a jamais Ă©tĂ© une saison triste. Les feuilles mortes et les jours de plus en plus courts ne m'ont jamais Ă©voquĂ© la fin de quelque chose mais plutĂŽt une attente de l'avenir. Il y a de l'electricitĂ© dans l'air, Ă  Paris, les soires d'Octobre Ă  l'heure oĂč la nuit tombe. MĂȘme quand il pleut. Je n'ai pas le cafard Ă  cette heure-lĂ , ni le sentiment de la fuite du temps. J'ai l'impression que tout est possible. L'annĂ©e commence au mois d'octobre. C'est la rentrĂ©e des classes et je crois que c'est la saisons des projets.
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Patrick Modiano
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comment, et par quelle magie, l'espÚce humaine continue-t-elle de perdurer sachant ce qu'endure sa propre moitié ? Avec la misogynie décomplexée qui se répand depuis la nuit des temps, c'est un miracle que cette deuxiÚme moitié du monde ne se soit toujours pas réveillée en rage, consciente de sa blessure collective.
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Sophie Pointurier (Femme portant un fusil)
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Vivre les malheurs d’avance, c’est les subir deux fois. Le moment prĂ©sent Ă©tait un moment de joie, il ne fallait pas l’empoisonner.
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René Barjavel (La Nuit des temps)
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Ils venaient de prendre conscience de l'immensité de leur ignorance.
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Barjavel Rene (La Nuit des temps)
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Il ne faut pas comprendre, il faut voir. Paris vous guĂ©rira. PARIS VOUS GUÉRIRA DU PASSÉ !
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René Barjavel (La Nuit des temps)
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Sous cette brume empoisonnée par leurs fatigues d'hier, des millions d'hommes s'éveillent, déjà exténués d'aujourd'hui.
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René Barjavel (La Nuit des temps)
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Mais ces soucis étaient pour demain, pour tout à l'heure. Vivre les malheurs d'avance, c'est les subir deux fois. Le moment présent était un moment de joie, il ne fallait pas l'empoisonner.
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René Barjavel (La Nuit des temps)
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Moi, l'homme, je suis anglais ou patagon et heureux de l'ĂȘtre, mais je suis d'abord l'homme vivant, je ne veux pas tuer et je ne veux pas qu'on me tue. Je refuse la guerre, quelles qu'en soient les raisons.
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René Barjavel (La Nuit des temps)
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; et le petit chemin qu’il suit va ĂȘtre gravĂ© dans son souvenir par l’excitation qu’il doit Ă  des lieux nouveaux, Ă  des actes inaccoutumĂ©s, Ă  la causerie rĂ©cente et aux adieux sous la lampe Ă©trangĂšre qui le suivent encore dans le silence de la nuit, Ă  la douceur prochaine du retour.
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Marcel Proust (A la recherche du temps perdu)
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Puis il rĂ©flĂ©chit: la rĂ©alitĂ© ne coĂŻncide habituellement pas avec les prĂ©visions; avec une logique perverse, il en dĂ©duisit que prĂ©voir un dĂ©tail circonstanciel, c'est empĂȘcher que celui-ci se rĂ©alise. FidĂšle Ă  cette faible magie, il inventait, pour les empĂȘcher de se rĂ©aliser, des pĂ©ripĂ©ties atroces; naturellement, il finit par craindre que ces pĂ©ripĂ©ties ne fussent prophĂ©tiques. MisĂ©rable dans la nuit, il essayait de s'affirmer en quelque sorte dans la substance fugitive du temps. Il savait que celui-ci se prĂ©cipitait vers l'aube du 29; il raisonnait Ă  haute voix; je suis maintenant dans la nuit du 22; tant que durera cette nuit (et six nuits de plus) je suis invulnĂ©rable, immortel. Il pensait que les nuits de sommeil Ă©taient des piscines profondes et sombres dans lesquels il pouvait se plonger. Il souhaitait parfois avec impatience la dĂ©charge dĂ©finitive qui le libĂ©rerait tant bien que mal de son vain travail d'imagination.
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Jorge Luis Borges (Ficciones)
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Boire les Ă©toiles au goulot Ă©tait une technique pour bloquer la machine temporelle. Flouter le passĂ© et le futur quelques heures pour se poser dans l'hyper-prĂ©sent avec du whisky dĂ©guisĂ© en Coca, du rhum cachĂ© dans des feuilles de menthe. Je voyais mes dĂ©mons cavaler a travers les bulles, pieds au plancher comme l'hiver dernier. Je ne pensais qu'a une chose : retrouver un autre temps. Celui d'avant l'explosion de la centrale a rĂȘves. Avant le tremblement de tĂȘte, avant les attentats a rĂ©pĂ©tition. Quand on fabriquait des fusĂ©es sans ceintures de sĂ©curitĂ©. Quand on chevauchait jusqu’à ce que la nuit fonde pour laisser le jour Ă©tirer ses grands bras de lumiĂšre.
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Mathias Malzieu (Le plus petit baiser jamais recensé)
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Je me mis dĂšs lors Ă  lire avec aviditĂ© et bientĂŽt la lecture fut ma passion. Tous mes nouveaux besoins, toutes mes aspirations rĂ©centes, tous les Ă©lans encore vagues de mon adolescence qui s’élevaient dans mon Ăąme d’une façon si troublante et qui Ă©taient provoquĂ©s par mon dĂ©veloppement si prĂ©coce, tout cela, soudainement, se prĂ©cipita dans une direction, parut se satisfaire complĂštement de ce nouvel aliment et trouver lĂ  son cours rĂ©gulier. BientĂŽt mon cƓur et ma tĂȘte se trouvĂšrent si charmĂ©s, bientĂŽt ma fantaisie se dĂ©veloppa si largement, que j’avais l’air d’oublier tout ce qui m’avait entourĂ©e jusqu’alors. Il semblait que le sort lui mĂȘme m’arrĂȘtĂąt sur le seuil de la nouvelle vie dans laquelle je me jetais, Ă  laquelle je pensais jour et nuit, et, avant de m’abandonner sur la route immense, me faisait gravir une hauteur d’oĂč je pouvais contempler l’avenir dans un merveilleux panorama, sous une perspective brillante, ensorcelante. Je me voyais destinĂ©e Ă  vivre tout cet avenir en l’apprenant d’abord par les livres ; de vivre dans les rĂȘves, les espoirs, la douce Ă©motion de mon esprit juvĂ©nile. Je commençai mes lectures sans aucun choix, par le premier livre qui me tomba sous la main. Mais, le destin veillait sur moi. Ce que j’avais appris et vĂ©cu jusqu’à ce jour Ă©tait si noble, si austĂšre, qu’une page impure ou mauvaise n’eĂ»t pu dĂ©sormais me sĂ©duire. Mon instinct d’enfant, ma prĂ©cocitĂ©, tout mon passĂ© veillaient sur moi ; et maintenant ma conscience m’éclairait toute ma vie passĂ©e. En effet, presque chacune des pages que je lisais m’était dĂ©jĂ  connue, semblait dĂ©jĂ  vĂ©cue, comme si toutes ces passions, toute cette vie qui se dressaient devant moi sous des formes inattendues, en des tableaux merveilleux, je les avais dĂ©jĂ  Ă©prouvĂ©es. Et comment pouvais-je ne pas ĂȘtre entraĂźnĂ©e jusqu’à l’oubli du prĂ©sent, jusqu’à l’oubli de la rĂ©alitĂ©, quand, devant moi dans chaque livre que je lisais, se dressaient les lois d’une mĂȘme destinĂ©e, le mĂȘme esprit d’aventure qui rĂšgnent sur la vie de l’homme, mais qui dĂ©coulent de la loi fondamentale de la vie humaine et sont la condition de son salut et de son bonheur ! C’est cette loi que je soupçonnais, que je tĂąchais de deviner par toutes mes forces, par tous mes instincts, puis presque par un sentiment de sauvegarde. On avait l’air de me prĂ©venir, comme s’il y avait en mon Ăąme quelque chose de prophĂ©tique, et chaque jour l’espoir grandissait, tandis qu’en mĂȘme temps croissait de plus en plus mon dĂ©sir de me jeter dans cet avenir, dans cette vie. Mais, comme je l’ai dĂ©jĂ  dit, ma fantaisie l’emportait sur mon impatience, et, en vĂ©ritĂ©, je n’étais trĂšs hardie qu’en rĂȘve ; dans la rĂ©alitĂ©, je demeurais instinctivement timide devant l’avenir.
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Fyodor Dostoevsky (Netochka Nezvanova)
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Allez, en avant ! Il faut que tout s'accĂ©lĂšre. Ce soir j'en ai plus rien Ă  foutre des rĂȘves et de la rĂ©alitĂ©. Dormir, manger et toutes ces conneries d'ĂȘtre vivant, je veux plus en entre parler, fermez vos gueules, les morts, je me tire. Venez, les Ă©toiles, je vous prends une par une ! Allez, venez vous enfoncer dans ma bouche, je suis vide, j'ai de la place. Hantez, faĂźtes comme chez vous ! Brillez !
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Mathias Malzieu (Maintenant qu'il fait tout le temps nuit sur toi)
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Je crois que c'est ça que je reproche aux livres, en gĂ©nĂ©ral, c'est qu'ils ne sont pas libres. On le voit Ă  travers l'Ă©criture : ils sont fabriquĂ©s, ils sont organisĂ©s, rĂ©glementĂ©s, conformes on dirait. Une fonction de rĂ©vision que l'Ă©crivain a trĂšs souvent envers lui-mĂȘme. L'Ă©crivain, alors il devient son propre flic. J'entends par lĂ  la recherche de la bonne forme, c'est-Ă -dire de la forme la plus courante, la plus claire et la plus inoffensive. Il y a encore des gĂ©nĂ©rations mortes qui font des livres pudibonds. MĂȘme des jeunes : des livres "charmants", sans prolongement aucun, sans nuit. Sans silence. Autrement dit : sans vĂ©ritable auteur. Des livres de jour, de passe-temps, de voyage. Mais pas des livres qui s'incrustent dans la pensĂ©e et qui disent le deuil noir de toute vie, le lieu commun de toute pensĂ©e.
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Marguerite Duras
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Je ne me suis jamais vraiment intéressée à la psychogénéalogie ni aux phénomÚnes de répétition transmis d'une génération à une autre qui passionnent certains de mes amis. J'ignore comment ces choses (l'inceste, les enfants morts, le suicide, la folie) se transmettent. Le fait est qu'elles traversent les familles de part en part, comme d'impitoyables malédictions, laissent des empreintes qui résistent au temps et au déni.
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Delphine de Vigan (Rien ne s'oppose Ă  la nuit)
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Il s'Ă©tonna de rĂ©flĂ©chir sur des problĂšmes qu'il ne s'Ă©tait jamais posĂ©s. Et pourtant revenait contre lui, avec un murmure mĂ©lancolique, la masse des douceurs qu'il avait toujours Ă©cartĂ©es: un ocĂ©an perdu. "Tout cela est donc si proche?..." Il s'aperçut qu'il avait peu Ă  peu repoussĂ© vers la vieillesse, pour "quand il aurait le temps" ce qui fait douce la vie des hommes.(...) Mais il n'y a pas de paix. Il n'y a peut-ĂȘtre pas de victoire.
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Antoine de Saint-Exupéry
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Ce monde-ci Ă©tait bien meilleur que l'ancien, dirigĂ© par les hommes. Ici, personne ne lui criait dessus, et personne ne criait sur Nana. Personne ne les traitait comme des citoyennes de seconde zone. Dans ce monde, une fillette pouvait rentrer seule chez elle, mĂȘme Ă  la nuit tombĂ©e, sans avoir peur. Dans ce monde, le talent d'une petite fille pouvait se dĂ©velopper en mĂȘme temps que ses hanches et sa poitrine. Personne ne le tuerait sans l'Ɠuf.
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Stephen King (Sleeping Beauties)
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La plupart des savants le sont Ă  la maniĂšre des enfants. La vaste Ă©rudition rĂ©sulte moins d'une multitude d'idĂ©es que d'une multitude d'images. Les dates, les noms propres, les lieux, tous les objets isolĂ©s ou dĂ©nuĂ©s d'idĂ©es, se retiennent uniquement par la mĂ©moire des signes, et rarement se rappelle-t-on quelqu'une de ces choses sans voir en mĂȘme temps le recto ou le verso de la page oĂč on l'a lue, ou la figure sous laquelle on la vit la premiĂšre fois. Telle Ă©tait Ă  peu prĂšs la science Ă  la mode des siĂšcles derniers. Celle de notre siĂšcle est autre chose: on n'Ă©tudie plus, on n'observe plus; on rĂȘve, et l'on nous donne gravement pour de la philosophie les rĂȘves de quelques mauvaises nuits. On me dira que je rĂȘve aussi; j'en conviens: mais, ce que les autres n'ont garde de faire, je donne mes rĂȘves pour des rĂȘves, laissant chercher au lecteur s'ils ont quelque chose d'utile aux gens Ă©veillĂ©s.
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Jean-Jacques Rousseau (Emile, or On Education)
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autrefois, il y avait des galeries aux maisons. Et quelque-fois, les gens restaient assis, tard dans la nuit, bavardant s'ils en avaient envie, se balançant dans leurs fauteuils, silencieux s'ils n'éprouvaient pas le besoin de parler. parfois, ils restaient là, tranquillement, à réfléchir à ruminer. Mon oncle dit que les architectes ont supprimé les galeries pour des raisons d'esthétique. Mais mon oncle dit que c'est un prétexte, rien de plus; la véritable raison, cachée en dessous, c'est qu'on ne voulait pas voir des gens passer des heures assis à ne rien faire, à se balancer, à discuter; c'était une forme détestable de vie en commun. Les gens parlaient trop. Et ils avaient le temps de penser. Alors on a détruit les galeries. Et les jardins, aussi. Il ne reste presque plus de jardins...Et voyez les mobiliers. Plus de rocking-chairs. Ils sont trop confortables. Il faut obliger les gens à courir, à prendre de l'exercise.
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Ray Bradbury (Fahrenheit 451)
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Dans notre isolement de glace, nous avions oubliĂ© les haines misĂ©rables et stupides du monde. Elles s’étaient encore enflĂ©es et raidies pendant ces trois annĂ©es. Leur monstrueuse imbĂ©cillitĂ© Ă©voquait pour moi des chiens Ă©normes enchaĂźnĂ©s les uns en face des autres, chacun tirant sur sa chaĂźne en rĂąlant de fureur et ne pensant qu’à la rompre pour aller Ă©gorger le chien d’en face. Sans raison. Simplement parce que c’est un autre chien. Ou, peut-ĂȘtre, parce qu’il en a peur

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René Barjavel (La Nuit des temps)
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Tu viens d'incendier la BibliothĂšque ? - Oui. J'ai mis le feu lĂ . - Mais c'est un crime inouĂŻ ! Crime commis par toi contre toi-mĂȘme, infĂąme ! Mais tu viens de tuer le rayon de ton Ăąme ! C'est ton propre flambeau que tu viens de souffler ! Ce que ta rage impie et folle ose brĂ»ler, C'est ton bien, ton trĂ©sor, ta dot, ton hĂ©ritage Le livre, hostile au maĂźtre, est Ă  ton avantage. Le livre a toujours pris fait et cause pour toi. Une bibliothĂšque est un acte de foi Des gĂ©nĂ©rations tĂ©nĂ©breuses encore Qui rendent dans la nuit tĂ©moignage Ă  l'aurore. Quoi! dans ce vĂ©nĂ©rable amas des vĂ©ritĂ©s, Dans ces chefs-d'oeuvre pleins de foudre et de clartĂ©s, Dans ce tombeau des temps devenu rĂ©pertoire, Dans les siĂšcles, dans l'homme antique, dans l'histoire, Dans le passĂ©, leçon qu'Ă©pelle l'avenir, Dans ce qui commença pour ne jamais finir, Dans les poĂštes! quoi, dans ce gouffre des bibles, Dans le divin monceau des Eschyles terribles, Des HomĂšres, des jobs, debout sur l'horizon, Dans MoliĂšre, Voltaire et Kant, dans la raison, Tu jettes, misĂ©rable, une torche enflammĂ©e ! De tout l'esprit humain tu fais de la fumĂ©e ! As-tu donc oubliĂ© que ton libĂ©rateur, C'est le livre ? Le livre est lĂ  sur la hauteur; Il luit; parce qu'il brille et qu'il les illumine, Il dĂ©truit l'Ă©chafaud, la guerre, la famine Il parle, plus d'esclave et plus de paria. Ouvre un livre. Platon, Milton, Beccaria. Lis ces prophĂštes, Dante, ou Shakespeare, ou Corneille L'Ăąme immense qu'ils ont en eux, en toi s'Ă©veille ; Ébloui, tu te sens le mĂȘme homme qu'eux tous ; Tu deviens en lisant grave, pensif et doux ; Tu sens dans ton esprit tous ces grands hommes croĂźtre, Ils t'enseignent ainsi que l'aube Ă©claire un cloĂźtre À mesure qu'il plonge en ton coeur plus avant, Leur chaud rayon t'apaise et te fait plus vivant ; Ton Ăąme interrogĂ©e est prĂȘte Ă  leur rĂ©pondre ; Tu te reconnais bon, puis meilleur; tu sens fondre, Comme la neige au feu, ton orgueil, tes fureurs, Le mal, les prĂ©jugĂ©s, les rois, les empereurs ! Car la science en l'homme arrive la premiĂšre. Puis vient la libertĂ©. Toute cette lumiĂšre, C'est Ă  toi comprends donc, et c'est toi qui l'Ă©teins ! Les buts rĂȘvĂ©s par toi sont par le livre atteints. Le livre en ta pensĂ©e entre, il dĂ©fait en elle Les liens que l'erreur Ă  la vĂ©ritĂ© mĂȘle, Car toute conscience est un noeud gordien. Il est ton mĂ©decin, ton guide, ton gardien. Ta haine, il la guĂ©rit ; ta dĂ©mence, il te l'ĂŽte. VoilĂ  ce que tu perds, hĂ©las, et par ta faute ! Le livre est ta richesse Ă  toi ! c'est le savoir, Le droit, la vĂ©ritĂ©, la vertu, le devoir, Le progrĂšs, la raison dissipant tout dĂ©lire. Et tu dĂ©truis cela, toi ! - Je ne sais pas lire.
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Victor Hugo
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À chaque instant donnĂ© dans le temps, toutes les espĂšces animales – du moustique Ă  l'Ă©lĂ©phant – se trouvent rĂ©unies au complet. Elles se sont dĂ©jĂ  renouvelĂ©es des milliers de fois tout en restant les mĂȘmes. Elles ne savent rien de leurs semblables qui ont vĂ©cus avant elles et vivront aprĂšs elles. C'est l'espĂšce qui vit toujours. De mĂȘme que le monde disparaĂźt avec la tombĂ©e de la nuit, sans pour autant cesser d'ĂȘtre un seul instant, l'homme et l'animal paraissent disparaĂźtre aprĂšs la mort, alors que leur essence vĂ©ritable subsiste imperturbablement.
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Arthur Schopenhauer
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L'Horloge Horloge! dieu sinistre, effrayant, impassible, Dont le doigt nous menace et nous dit: "Souviens-toi! Les vibrantes Douleurs dans ton coeur plein d'effroi Se planteront bientĂŽt comme dans une cible; Le plaisir vaporeux fuira vers l'horizon Ainsi qu'une sylphide au fond de la coulisse ; Chaque instant te dĂ©vore un morceau du dĂ©lice A chaque homme accordĂ© pour toute sa saison. Trois mille six cents fois par heure, la Seconde Chuchote: Souviens-toi! - Rapide, avec sa voix D'insecte, Maintenant dit: Je suis Autrefois, Et j'ai pompĂ© ta vie avec ma trompe immonde! Remember! Souviens-toi, prodigue! Esto memor! (Mon gosier de mĂ©tal parle toutes les langues.) Les minutes, mortel folĂątre, sont des gangues Qu'il ne faut pas lĂącher sans en extraire l'or! Souviens-toi que le Temps est un joueur avide Qui gagne sans tricher, Ă  tout coup! c'est la loi. Le jour dĂ©croĂźt; la nuit augmente; souviens-toi! Le gouffre a toujours soif; la clepsydre se vide. TantĂŽt sonnera l'heure oĂč le divin Hasard, OĂč l'auguste Vertu, ton Ă©pouse encor vierge, OĂč le repentir mĂȘme (oh! la derniĂšre auberge!), OĂč tout te dira: Meurs, vieux lĂąche! il est trop tard!
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Charles Baudelaire (Les Fleurs du Mal)
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Depuis, plus personne ne parle du 27eme battalion. Pourtant, refusant de rejoindre le ciel, les fantÎmes, les demons nés de cette défaite continuent à errer parmi les buissons, à l'orée de la jungle, sur les rives du ruisseau. On a donné à ce coin de jungle perdu dans les brumes empoisonnées le nom effrayant de "terre des Ames hurlantes". De temps en temps, à l'occasion des cérémonies de l'enfer les morts se rassemblent sur cette langue de terre comme pour la revue des troupes. On peut entendre leurs voix dans le murmure du ruisseau, les plaintes étouffées, lancinantes de la jungle la nuit, les hurlements du vent à travers les gorges des montagnes. On peut les entendre, les comprendre.
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BáșŁo Ninh (The Sorrow of War)
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Autrement, Ă  la distance oĂč je suis de vous, de mĂȘme qu'Ă  celle oĂč vous ĂȘtes les uns des autres, toute existence apparaĂźt sans aucune espĂšce de signification, sans aucune raison d'ĂȘtre d'aucune espĂšce. Chaque existence est un problĂšme insoluble. Les voisins de palier rangĂ©s verticalement dans les immeubles, on se demande comment c'est possible et on fait partie des rangĂ©es. Ce qui remplit le temps c'est vraiment de le perdre. Tous ces jeunes qui sont plantĂ©s devant les Ă©glises, les places publiques, Darty, le Forum des Halles, et qui attendent, finalement ça fait moins de mal Ă  voir que les rangements de travailleurs dans les HLM des portes de Paris, que les sonneries des rĂ©veille-matin dans la nuit de l'hiver afin d'aller travailler pour continuer Ă  ĂȘtre vivant.
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Marguerite Duras (Practicalities)
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Êtes-vous ce qu’on appelle un heureux ? Eh bien, vous ĂȘtes triste tous les jours. Chaque jour a son grand chagrin ou son petit souci. Hier, vous trembliez pour une santĂ© qui vous est chĂšre, aujourd’hui vous craignez pour la vĂŽtre, demain ce sera une inquiĂ©tude d’argent, aprĂšs-demain la diatribe d’un calomniateur, l’autre aprĂšs-demain le malheur d’un ami ; puis le temps qu’il fait, puis quelque chose de cassĂ© ou de perdu, puis un plaisir que la conscience et la colonne vertĂ©brale vous reprochent ; une autre fois, la marche des affaires publiques. Sans compter les peines de cƓur. Et ainsi de suite. Un nuage se dissipe, un autre se reforme. À peine un jour sur cent de pleine joie et de plein soleil. Et vous ĂȘtes de ce petit nombre qui a le bonheur ! Quant aux autres hommes, la nuit stagnante est sur eux.
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Victor Hugo (Les Misérables)
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Mon temps autrefois m'appartenait entiÚrement, et aux livres. Aujourd'hui, chaque minute consacrée à lire ou à écrire est une minute que je ne passe pas avec ma fille; l'écriture s'accompagne désormais d'une hùte et d'une culpabilité détestables. C'est du temps que je lui dérobe, que je ne retrouverai pas, que j'aurais dû lui consacrer et que je n'aurai jamais passé avec elle. Depuis sa naissance, je me prends à penser au futur antérieur et au conditionnel passé, des temps compliqués qui sont le signe qu'on considÚre les choses sous un point de vue autre que celui depuis lequel on parle normalement : demain vu au passé, hier comme une possibilité. Elle dort. Je devrais profiter de ce moment pour écrire, je n'arrive qu'à m'abßmer dans le bruit des vagues. Je voudrais m'étendre sur le sable, rester là jusqu'à la nuit, me laisser emporter par la marée.
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Dominique Fortier
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- Ma mĂšre dit que le cinĂ©ma substituait Ă  notre regard un monde qui s'accordait Ă  nos dĂ©sirs... souffla-t-il. Mais Nuit et Brouillard ne cadrait pas avec cette dĂ©finition. - Le cinĂ©ma est plutĂŽt comme une bataille, dĂ©clara Fuji. - Une bataille contre quoi ? - Contre mille ennemis diffĂ©rents et contradictoires. Contre l'ennui. Contre la frĂ©nĂ©sie. Contre le quotidien dĂ©senchantĂ©. Contre les lendemains qui chantent. Contre les bourrasques qui avalent nos cauchemars. Contre les usines qui broient nos rĂȘves. Contre les laisses invisibles qui nous Ă©tranglent. Contre les habitudes qui nous ferment les yeux. Fuji soupira et reprit : - Et dans cette bataille, Nuit et Brouillard, avec son texte et ses images implacables, lutte aux avant-postes. Contre l'oubli. Contre les monstres du passĂ©. Contre l'effacement des crimes effroyables de l'Histoire. Nuit et Brouillard lutte contre tout cela. Et prouve que le cinĂ©ma peut abriter le temps.
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Guillaume Guéraud (La Brigade De L'oeil)
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Le tunnel qui mĂšne au centre-ville, il a vraiment un truc. Quand il fait nuit, c'est splendide. Tout simplement splendide. D'abord, t'es de l'autre cĂŽtĂ© de la montagne et il fait sombre, et la radio est Ă  fond. DĂšs que tu entres dans le tunnel, le vent disparaĂźt d'un coup et tu plisses les yeux Ă  cause des lumiĂšres au-dessus de toi. Quand tu t'habitues Ă  la lumiĂšre, tu peux voir le bout du tunnel au loin, et pendant ce temps, comme les ondes passent plus, le son de la radio faiblit. Alors tu te retrouves au milieu du tunnel au loin et tout devient trĂšs calme, comme un rĂȘve. Tu vois le bout qui se rapproche et t'as qu'une envie, c'est d'y arriver. Et finalement, juste au moment oĂč tu penses que tu l'atteindras jamais, tu vois la sortie devant toi. Et le vent t'attend. Et tu sors du tunnel Ă  toute vitesse, pour te retrouver sur le pont. Et elle est lĂ . La ville. Un million de lumiĂšres et d'immeubles, et tout Ă  l'air aussi excitant que la premiĂšre fois oĂč tu l'as vue. C'est vraiment une belle entrĂ©e en scĂšne.
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Stephen Chbosky (The Perks of Being a Wallflower)
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Wilhelm, que serait pour notre cƓur le monde sans l’amour ? Ce qu’une lanterne magique est sans lumiĂšre. A peine la petite lampe est-elle introduite, que les images les plus variĂ©es apparaissent sur la muraille blanche. Et ne fussent-elles que des fantĂŽmes passagers, cela fait pourtant notre bonheur, lorsque nous nous arrĂȘtons devant, comme des enfants joyeux, nous extasiant sur ces apparitions merveilleuses. Aujourd’hui je n’ai pu aller voir Charlotte : une sociĂ©tĂ© inĂ©vitable m’a retenu. Que faire ? J’ai envoyĂ© chez elle mon domestique, uniquement pour avoir quelqu’un prĂšs de moi qui eĂ»t approchĂ© d’elle aujourd’hui. Avec quelle impatience je l’attendais ! avec quelle joie je l’ai revu ! Je l’aurais embrassĂ©, si j’avais osĂ© m’en croire. On conte que la pierre de Bologne, si on l’expose au soleil, en absorbe les rayons, et qu’elle Ă©claire quelque temps pendant la nuit. Il en Ă©tait de mĂȘme pour moi de ce garçon. L’idĂ©e que les yeux de Charlotte s’étaient arrĂȘtĂ©s sur son visage, sur ses joues, sur les boutons de son habit et le collet de son surtout, me rendait tout cela prĂ©cieux et sacrĂ©. Dans ce moment, je n’aurais pas donnĂ© mon valet pour mille Ă©cus. Sa prĂ©sence nie faisait du bien
. Dieu te garde d’en rire ! Wilhelm, sont-ce lĂ  des fantĂŽmes, si nous sommes heureux ?
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Johann Wolfgang von Goethe (The Sorrows of Young Werther)
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MOI, TROUBADOUR Moi troubadour et la fille d'amour Nous errons la nuit autour des lanternes ; Signes de mouchoir, adieu sans retour À toi notre Ă©toile, astre de dĂ©veine. Nous allons ailleurs vers un sort meilleur Avant que le blĂ© ne sorte des graines Avant que les fleurs ne perdent couleur. Moi troubadour et la fille d'amour Qui de son caveau tirons la beautĂ© Marcherons Ă  prĂ©sent rompus, hĂ©bĂ©tĂ©s Par la vie, par l'astre et par la rengaine. Aux portes de l'ombre allons-nous buter Avant que le blĂ© ne sorte des graines Avant que le temps des moissons ne vienne ? Et dans le cƓur blanc des nuits de septembre Nous nous blottirons, icĂŽnes sans voix, Dans les coins perdus, dans l'oubli des chambres Nous rappellerons, frappant de nos doigts, Que de notre vie sont mortes les branches Avant que le blĂ© ne sorte des graines Avant que le temps des moissons ne vienne. Vous entendrez des mots silencieux Assis pensifs dans l'ombre et dans l'absence Mille soleils brĂ»leront dans vos cieux Hommes Ă  genoux dans un rĂȘve immense, Et ce jour viendra pour tous ceux, tous ceux Dont la vie fleurit, dont la vie commence Avant que le blĂ© ne sorte des graines Avant que le temps des moissons ne vienne. (p. 406-407 de L'Anthologie de la poĂ©sie yiddish de Charles Dobzynski)
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Itzik Manger
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Avant le chariot du supermarchĂ©, le qu'est-ce qu'on va manger ce soir, les Ă©conomies pour s'acheter un canapĂ©, une chaĂźne hi-fi, un appart. Avant les couches, le petit seau et la pelle sur la plage, les hommes que je ne vois plus, les revues de consommateurs pour ne pas se faire entuber, le gigot qu'il aime par-dessus tout et le calcul rĂ©ciproque des libertĂ©s perdues. Une pĂ©riode oĂč l'on peut dĂźner d'un yaourt, faire sa valise en une demi-heure pour un week-end impromptu, parler toute une nuit. Lire un dimanche entier sous les couvertures. S'amollir dans un cafĂ©, regarder les gens entrer et sortir, se sentir flotter entre ces existences anonymes. Faire la fĂȘte sans scrupule quand on a le cafard. Une pĂ©riode oĂč les conversations des adultes installĂ©s paraissent venir d'un univers futile, presque ridicule, on se fiche des embouteillages, des morts de la PentecĂŽte, du prix du bifteck et de la mĂ©tĂ©o. Personne ne vous colle aux semelles encore. Toutes les filles l'ont connue, cette pĂ©riode, plus ou moins longue, plus ou moins intense, mais dĂ©fendu de s'en souvenir avec nostalgie. Quelle honte ! Oser regretter ce temps Ă©goĂŻste, oĂč l'on n'Ă©tait responsable que de soi, douteux, infantile. La vie de jeune fille, ça ne s'enterre pas, ni chanson ni folklore lĂ -dessus, ça n'existe pas. Une pĂ©riode inutile.
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Annie Ernaux (A Frozen Woman)
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Rien, jamais, en effet, ne remplacera le compagnon perdu. On ne se crĂ©e point de vieux camarades. Rien ne vaut le trĂ©sor de tant de souvenirs communs, de tant de mauvaises heures vĂ©cues ensemble, de tant de brouilles, de rĂ©conciliations, de mouvements du cƓur. On ne reconstruit pas ces amitiĂ©s-lĂ . Il est vain, si l’on plante un chĂȘne, d’espĂ©rer s’abriter bientĂŽt sous son feuillage. Ainsi va la vie. Nous nous sommes enrichis d’abord, nous avons plantĂ© pendant des annĂ©es, mais viennent les annĂ©es oĂč le temps dĂ©fait ce travail et dĂ©boise. Les camarades, un Ă  un, nous retirent leur ombre. Et Ă  nos deuils se mĂȘle dĂ©sormais le regret secret de vieillir. Telle est la morale que Mermoz et d’autres nous ont enseignĂ©e. La grandeur d’un mĂ©tier est, peut-ĂȘtre, avant tout, d’unir des hommes : il n’est qu’un luxe vĂ©ritable, et c’est celui des relations humaines. En travaillant pour les seuls biens matĂ©riels, nous bĂątissons nous-mĂȘmes notre prison. Nous nous enfermons solitaires, avec notre monnaie de cendre qui procure rien qui vaille de vivre. Si je cherche dans mes souvenirs ceux qui m’ont laissĂ© un goĂ»t durable, si je fais le bilan des heures qui ont comptĂ©, Ă  coup sĂ»r je retrouve celles que nulle fortune ne m’eĂ»t procurĂ©es. On n’achĂšte pas l’amitiĂ© d’un Mermoz, d’un compagnon que les Ă©preuves vĂ©cues ensemble ont liĂ© Ă  nous pour toujours. Cette nuit de vol et ses cent mille Ă©toiles, cette sĂ©rĂ©nitĂ©, cette souverainetĂ© de quelques heures, l’argent ne les achĂšte pas. p35-p36
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Antoine de Saint-Exupéry (Tierra de los hombres)
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Un jour, avec des yeux vitreux, ma mĂšre me dit: « Lorsque tu seras dans ton lit, que tu entendras les aboiements des chiens dans la campagne, cache-toi dans ta couverture, ne tourne pas en dĂ©rision ce qu'ils font: ils ont soif insatiable de l'infini, comme toi, comme moi, comme le reste des humains, Ă  la figure pĂąle et longue. MĂȘme, je te permets de te mettre devant la fenĂȘtre pour contempler ce spectacle, qui est assez sublime » Depuis ce temps, je respecte le voeu de la morte. Moi, comme les chiens, j'Ă©prouve le besoin de l'infini... Je ne puis, je ne puis contenter ce besoin! Je suis fils de l'homme et de la femme, d'aprĂšs ce qu'on m'a dit. Ça m'Ă©tonne... je croyais ĂȘtre davantage! Au reste, que m'importe d'oĂč je viens? Moi, si cela avait pu dĂ©pendre de ma volontĂ©, j'aurais voulu ĂȘtre plutĂŽt le fils de la femelle du requin, dont la faim est amie des tempĂȘtes, et du tigre, Ă  la cruautĂ© reconnue: je ne serais pas si mĂ©chant. Vous, qui me regardez, Ă©loignez-vous de moi, car mon haleine exhale un souffle empoisonnĂ©. Nul n'a encore vu les rides vertes de mon front; ni les os en saillie de ma figure maigre, pareils aux arĂȘtes de quelque grand poisson, ou aux rochers couvrant les rivages de la mer, ou aux abruptes montagnes alpestres, que je parcourus souvent, quand j'avais sur ma tĂȘte des cheveux d'une autre couleur. Et, quand je rĂŽde autour des habitations des hommes, pendant les nuits orageuses, les yeux ardents, les cheveux flagellĂ©s par le vent des tempĂȘtes, isolĂ© comme une pierre au milieu du chemin, je couvre ma face flĂ©trie, avec un morceau de velours, noir comme la suie qui remplit l'intĂ©rieur des cheminĂ©es : il ne faut pas que les yeux soient tĂ©moins de la laideur que l'Etre suprĂȘme, avec un sourire de haine puissante, a mise sur moi.
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Comte de Lautréamont (Les Chants de Maldoror)
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Je tourne en rond autour d'un abĂźme, funambule sur le fil du rasoir, volcanologue hallucinĂ© au bord d'un cratĂšre en Ă©bullition ; je suis aux portes de la mĂ©moire, ces infinies bobines de rushes qui nous archivent, ces grands tiroirs obscurs oĂč sont stockĂ©s les hĂ©ros ordinaires que nous avons Ă©tĂ©, les mythes camusiens que nous n'avons pas su incarner, enfin les acteurs et les figurants que nous fĂ»mes tour Ă  tour, gĂ©niaux et grotesques, beaux et monstrueux, ployĂ©s sous le fardeau de nos petites lĂąchetĂ©s, de nos faits d'armes, de nos mensonges, de nos aveux, de nos serments et nos abjurations, de nos bravoures et nos dĂ©fections, de nos certitudes et nos doutes ; bref, de nos indomptables illusions... Que garder de ces rushes en vrac ? Que rejeter ? S'il n'y avait qu'un seul instant de notre vie Ă  emporter pour le grand voyage, lequel choisir ? Au dĂ©triment de quoi et de qui ? Et surtout, comment se reconnaĂźtre au milieu de tant d'ombres, tant de spectres, de tant de titans ?... Qui sommes nous au juste ? Ce que nous avons Ă©tĂ© ou bien ce que nous aurions aimĂ© ĂȘtre ? Le tord que nous avons causĂ© ou bien celui que nous avons subi ? Les rendez-vous que nous avons ratĂ©s ou les rencontres fortuites qui ont dĂ©viĂ© le cours de notre destin ? Les coulisses qui nous ont prĂ©servĂ©s de la vanitĂ© ou bien les feux de la rampe qui nous ont servi de bĂ»chers ? Nous sommes tout cela et en mĂȘme temps, toute la vie qui a Ă©tĂ© la nĂŽtre, avec ses hauts et ses bas, ses prouesses et ses vicissitudes ; nous sommes aussi l'ensemble des fantĂŽmes qui nous hantent... nous sommes plusieurs personnages en un, si convaincants dans les diffĂ©rents rĂŽles que nous avons assumĂ©s qu'il nous est impossible de savoir lequel nous avons Ă©tĂ© vraiment, lequel nous sommes devenus, lequel nous survivra.
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Yasmina Khadra (Ce que le jour doit Ă  la nuit)
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La plupart du temps, d'ailleurs, les femmes qui ont un compagnon fermĂ© sur le plan Ă©motionnel expriment un profond dĂ©sespoir. Quand Shere Hite a menĂ© son enquĂȘte auprĂšs de 4 500 femmes dans les annĂ©es 1970, 98 % de celles qui Ă©taient dans une relation avec un homme auraient souhait un « dialogue plus intime » avec lui ; elles auraient voulu qu'il leur parle davantage « de ses pensĂ©es, sentiments, projets, prĂ©occupations, et qu'il les interroge sur les leurs ». Certaines disaient ne s'ĂȘtre jamais senties aussi seules qu'au cours de leur mariage ; d'autres en pleuraient, la nuit, aux cĂŽtĂ©s de leur Ă©poux endormi. Il n'est pas certain que les choses aient radicalement changĂ© en cinquante ans (ni qu'elles soient trĂšs diffĂ©rentes de ce cĂŽtĂ©-ci de l'Atlantique). En fĂ©vrier 2021, dans le courrier du cƓur du site amĂ©ricain The Cut, baptistĂ© « Ask Polly », une trentenaire britannique partageait les dispositions dans lesquelles elle se sentait aprĂšs une rupture. Dans leur entourage, disait-elle, tout le monde les considĂ©rĂ©s, son ex-compagnon et elle, comme le couple idĂ©al. Et pourtant, son dĂ©sir d'intimitĂ© avait toujours Ă©tĂ© frustrĂ©. « Je pense qu'entretenir une relation profonde, intensĂ©ment nourrie, avec une autre personne fait partie des plus grandes joies que l'existence puisse vous apporter », Ă©crivait-elle. Elle estimait aussi que faire son propre « travail de l'ombre », essayer de se comprendre soi-mĂȘme, Ă©tait un des aspects « les plus fascinants et les plus urgents » du fait d'ĂȘtre en vie. Lui, en revanche ne comprenait pas ce qu'elle voulait de lui et trouvait qu'elle compliquait les choses inutilement. Autour d'elle, elle voyait un grand nombre d'autres couples dans lesquels la femme espĂ©rait elle aussi de son partenaire le mĂȘme investissement Ă©motionnel et rĂ©flexif que le sien - en vain. Elle en venait Ă  ne plus jamais vouloir ĂȘtre en couple avec un homme « qui n'aurait pas suivi une thĂ©rapie », clamait-elle. (p. 204-205)
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Mona Chollet (Réinventer l'amour: Comment le patriarcat sabote les relations hétérosexuelles)
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Porteurs Notre monde repose sur les Ă©paules de l'autre. Sur des enfants au travail, sur des plantations et des matiĂšres premiĂšres payĂ©es bon marchĂ© : des Ă©paules d'inconnus portent notre poids, obĂšse de disproportion de richesses. Je l'ai vu. Dans les ascensions qui durent bien des jours vers les camps de base des hautes altitudes, des hommes et aussi des femmes et des enfants portent notre poids dans des hottes tressĂ©es. Tables, chaises, vaisselle, tentes, cuisiniĂšres, combustibles cordes, matĂ©riel d'escalade, nourriture pour plusieurs semaines, en somme un village pour vivre lĂ  oĂč il n'y a rien. Ils portent notre poids pour le prix moyen de trois cents roupies nĂ©palaises par jour, moins de quatre euros. Les hottes pĂšsent quarante kilos, mais certains en portent de plus lourdes. Les Ă©tapes sont longues, elles fatiguent le voyageur avec son petit sac Ă  dos et le minimum nĂ©cessaire. Des porteurs de tout notre confort marchent avec des tongs ou bien pieds nus sur des pentes qui manquent d'oxygĂšne, la tempĂ©rature baissant. La nuit, ils campent en plein air autour d'un feu, ils font cuire du riz et des lĂ©gumes cueillis dans les parages, tant que quelque chose sort de terre. Au NĂ©pal, la vĂ©gĂ©tation monte jusqu'Ă  trois mille cinq cents mĂštres. Nous autres, nous dormons dans une tente avec un repas chaud cuisinĂ© par eux. Ils portent notre poids et ne perdent pas un gramme. Il ne manque pas un mouchoir au bagage remis en fin d'Ă©tape. Ils ne sont pas plus faits pour l'altitude que nous, la nuit je les entends tousser. Ce sont souvent des paysans des basses vallĂ©es de riziĂšres. Nous avançons pĂ©niblement en silence, eux ne renoncent pas Ă  se parler, Ă  raconter, tout en marchant. Nous habillĂ©s de couches de technologie lĂ©gĂšre, aĂ©rĂ©e, chaude, coupe-vent, et cetera, eux avec des vĂȘtements usĂ©s, des pulls en laine archiĂ©limĂ©s : ils portent notre poids et sourient cent plus que le plus extraverti de nos joyeux compĂšres. Ils nous prĂ©parent des pĂątes avec l'eau de la neige, ils nous ont mĂȘme apportĂ© des oeufs ici, Ă  cinq mille mĂštres. Sans eux, nous ne serions ni agiles, ni athlĂ©tiques, ni riches. Ils disparaissent en fin de transport, ils se dispersent dans les vallĂ©es, juste Ă  temps pour le travail du riz et de l'orge. (p. 11-12)
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Erri De Luca (Sulla traccia di Nives)
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PEER GYNT L'Ăąme, souffle et lumiĂšre du verbe, te viendra plus tard, ma fille Quand, en lettres d'or, sur le fond rose de l'Orient, apparaĂźtront ces mots : Voici le jour, alors commenceront les leçons ; ne crains rien, tu seras instruite. Mais je serais un sot de vouloir, dans le calme de cette tiĂšde nuit,me parer de quelques baillons d'un vieux savoir usĂ©, pour te traiter en maĂźtre d'Ă©cole. AprĂšs tout, le principal, quand on y rĂ©flĂ©chit, ce n'est point l'Ăąme, c'est le cƓur. ANITRA Parle seigneur. Quand tu parles, il me semble voir comme des lueurs d'opale. PBER GYNT La raison poussĂ©e Ă  l'excĂšs est de la bĂȘtise. La poltronnerie s'Ă©panouit en cruautĂ©. L'exagĂ©ration de la vĂ©ritĂ©, c'est de la sagesse Ă  l'envers. Oui, mon enfant, le diable m'emporte s'il n'y a pas de par le monde des ĂȘtres gavĂ©s d'Ăąme qui n'en ont que plus de peine Ă  voir clair. J'ai connu un individu de cette sorte, une vraie perle pourtant, qui a manquĂ© son but et perdu la boussole. Vois-tu ce dĂ©sert qui entoure l'oasis? Je n'aurais qu'Ă  agiter mon turban pour que les flots de l'OcĂ©an en comblassent toute l'Ă©tendue. Mais je serais un imbĂ©cile de crĂ©er ainsi des continents et des mers nouvelles. Sais-tu, ce que c'est que de vivre? ANITRA Enseigne-le-moi. PEER GYNT C'est planer au-dessus du temps qui coule, en descendre le courant sans se mouiller les pieds, et sans jamais rien perdre de soi-mĂȘme. Pour ĂȘtre celui qu'on est, ma petite amie, il faut la force de l'Ăąge! Un vieil aigle perd son piumage, une vieille rosse son allure, une vieille commĂšre ses dents. La peau se ride, et l'Ăąme aussi. Jeunesse ! jeunesse ! Par toi je veux rĂ©gner non sur les palmes et les vignes de quelque Gyntiana, mais sur la pensĂ©e vierge d'une femme dont je serai le sultan ardent et vigoureux. Je t'ai fait, ma petite, la grĂące de te sĂ©duire, d'Ă©lire ton cƓur pour y fonder un kalifat nouveau. Je veux ĂȘtre le maĂźtre de tes soupirs. Dans mon royaume, j'introduirai le rĂ©gime absolu. Nous sĂ©parer sera la mort... pour toi, s'entend. Pas une fibre, pas une parcelle de toi qei ne m'appartienne. Ni oui, ni non, tu n'auras d'autre volontĂ© que la mienne. Ta chevelure, noire comme la nuit, et tout ce qui, chez toi, est doux Ă  nommer, s'inclinera devant mon pouvoir souverain. Ce seront mes jardins de Babylone.
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Henrik Ibsen (Peer Gynt)
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en vĂ©ritĂ© il est trĂšs agrĂ©able de se rĂ©unir, de s’asseoir et de bavarder des intĂ©rĂȘts publics. Parfois mĂȘme je suis prĂȘt Ă  chanter de joie, quand je rentre dans la sociĂ©tĂ© et vois des hommes solides, sĂ©rieux, trĂšs bien Ă©levĂ©s, qui se sont rĂ©unis, parlent de quelque chose sans rien perdre de leur dignitĂ©. De quoi parlent-ils ? ça c’est une autre question. J’oublie mĂȘme, parfois, de pĂ©nĂ©trer le sens de la conversation, me contentant du tableau seul. Mais jusqu’ici, je n’ai jamais pu pĂ©nĂ©trer le sens de ce dont s’entretiennent chez nous les gens du monde qui n’appartiennent pas Ă  un certain groupe. Dieu sait ce que c’est. Sans doute quelque chose de charmant, puisque ce sont des gens charmants. Mais tout cela paraĂźt incomprĂ©hensible. On dirait toujours que la conversation vient de commencer ; comme si l’on accordait les instruments. On reste assis pendant deux heures et, tout ce temps, on ne fait que commencer la conversation. Parfois tous ont l’air de parler de choses sĂ©rieuses, de choses qui provoquent la rĂ©flexion. Mais ensuite, quand vous vous demandez de quoi ils ont parlĂ©, vous ĂȘtes incapable de le dire : de gants, d’agriculture, ou de la constance de l’amour fĂ©minin ? De sorte que, parfois, je l’avoue, l’ennui me gagne. On a l’impression de rentrer par une nuit sombre Ă  la maison en regardant tristement de cĂŽtĂ© et d’entendre soudain de la musique. C’est un bal, un vrai bal. Dans les fenĂȘtres brillamment Ă©clairĂ©es passent des ombres ; on entend des murmures de voix, des glissements de pas ; sur le perron se tiennent des agents. Vous passez devant, distrait, Ă©mu ; le dĂ©sir de quelque chose s’est Ă©veillĂ© en vous. Il vous semble avoir entendu le battement de la vie, et, cependant, vous n’emportez avec vous que son pĂąle motif, l’idĂ©e, l’ombre, presque rien. Et l’on passe comme si l’on n’avait pas confiance. On entend autre chose. On entend, Ă  travers les motifs incolores de notre vie courante, un autre motif, pĂ©nĂ©trant et triste, comme dans le bal des Capulet de Berlioz. L’angoisse et le doute rongent votre coeur, comme cette angoisse qui est au fond du motif lent de la triste chanson russe : Écoutez... d’autres sons rĂ©sonnent. Tristesse et orgie dĂ©sespĂ©rĂ©es... Est-ce un brigand qui a entonnĂ©, lĂ -bas, la chanson ? Ou une jeune fille qui pleure Ă  l’heure triste des adieux ? Non ; ce sont les faucheurs qui rentrent de leur travail... Autour sont les forĂȘts et les steppes de Saratov.
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Fyodor Dostoevsky
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Mais j’avais revu tantĂŽt l’une, tantĂŽt l’autre, des chambres que j’avais habitĂ©es dans ma vie, et je finissais par me les rappeler toutes dans les longues rĂȘveries qui suivaient mon rĂ©veil ; chambres d’hiver oĂč quand on est couchĂ©, on se blottit la tĂȘte dans un nid qu’on se tresse avec les choses les plus disparates : un coin de l’oreiller, le haut des couvertures, un bout de chĂąle, le bord du lit, et un numĂ©ro des DĂ©bats roses, qu’on finit par cimenter ensemble selon la technique des oiseaux en s’y appuyant indĂ©finiment ; oĂč, par un temps glacial, le plaisir qu’on goĂ»te est de se sentir sĂ©parĂ© du dehors (comme l’hirondelle de mer qui a son nid au fond d’un souterrain dans la chaleur de la terre), et oĂč, le feu Ă©tant entretenu toute la nuit dans la cheminĂ©e, on dort dans un grand manteau d’air chaud et fumeux, traversĂ© des lueurs des tisons qui se rallument, sorte d’impalpable alcĂŽve, de chaude caverne creusĂ©e au sein de la chambre mĂȘme, zone ardente et mobile en ses contours thermiques, aĂ©rĂ©e de souffles qui nous rafraĂźchissent la figure et viennent des angles, des parties voisines de la fenĂȘtre ou Ă©loignĂ©es du foyer et qui se sont refroidies ; – chambres d’étĂ© oĂč l’on aime ĂȘtre uni Ă  la nuit tiĂšde, oĂč le clair de lune appuyĂ© aux volets entr’ouverts, jette jusqu’au pied du lit son Ă©chelle enchantĂ©e, oĂč on dort presque en plein air, comme la mĂ©sange balancĂ©e par la brise Ă  la pointe d’un rayon – ; parfois la chambre Louis XVI, si gaie que mĂȘme le premier soir je n’y avais pas Ă©tĂ© trop malheureux, et oĂč les colonnettes qui soutenaient lĂ©gĂšrement le plafond s’écartaient avec tant de grĂące pour montrer et rĂ©server la place du lit ; parfois au contraire celle, petite et si Ă©levĂ©e de plafond, creusĂ©e en forme de pyramide dans la hauteur de deux Ă©tages et partiellement revĂȘtue d’acajou, oĂč, dĂšs la premiĂšre seconde, j’avais Ă©tĂ© intoxiquĂ© moralement par l’odeur inconnue du vĂ©tiver, convaincu de l’hostilitĂ© des rideaux violets et de l’insolente indiffĂ©rence de la pendule qui jacassait tout haut comme si je n’eusse pas Ă©tĂ© là ; – oĂč une Ă©trange et impitoyable glace Ă  pieds quadrangulaires barrant obliquement un des angles de la piĂšce se creusait Ă  vif dans la douce plĂ©nitude de mon champ visuel accoutumĂ© un emplacement qui n’y Ă©tait pas prĂ©vu ; – oĂč ma pensĂ©e, s’efforçant pendant des heures de se disloquer, de s’étirer en hauteur pour prendre exactement la forme de la chambre et arriver Ă  remplir jusqu’en haut son gigantesque entonnoir, avait souffert bien de dures nuits, tandis que j’étais Ă©tendu dans mon lit, les yeux levĂ©s, l’oreille anxieuse, la narine rĂ©tive, le cƓur battant ; jusqu’à ce que l’habitude eĂ»t changĂ© la couleur des rideaux, fait taire la pendule, enseignĂ© la pitiĂ© Ă  la glace oblique et cruelle, dissimulĂ©, sinon chassĂ© complĂštement, l’odeur du vĂ©tiver et notablement diminuĂ© la hauteur apparente du plafond.
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Marcel Proust (Du cÎté de chez Swann (à la recherche du temps perdu #1))
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Il faut que je vous Ă©crive, mon aimable Charlotte, ici, dans la chambre d’une pauvre auberge de village, oĂč je me suis rĂ©fugiĂ© contre le mauvais temps. Dans ce triste gĂźte de D., oĂč je me traĂźne au milieu d’une foule Ă©trangĂšre, tout Ă  fait Ă©trangĂšre Ă  mes sentiments, je n’ai pas eu un moment, pas un seul, oĂč le cƓur in’ait dit de vous Ă©crire : et maintenant, dans cette cabane, dans cette solitude, dans cette prison, tandis que la neige et la grĂȘle se dĂ©chaĂźnent contre ma petite fenĂȘtre, ici, vous avez Ă©tĂ© ma premiĂšre pensĂ©e. DĂšs que je fus entrĂ©, votre image, ĂŽ Charlotte, votre pensĂ©e m’a saisi, si sainte, si vivante ! Bon Dieu, c’est le premier instant de bonheur que je retrouve. Si vous me voyiez, mon amie, dans ce torrent de dissipations ! Comme toute mon Ăąme se dessĂšche ! Pas un moment oĂč le cƓur soit plein ! pas une heure fortunĂ©e ! rien, rien ! Je suis lĂ  comme devant une chambre obscure : je vois de petits hommes et de petits chevaux tourner devant moi, et je me demande souvent si ce n’est pas une illusion d’optique. Je m’en amuse, ou plutĂŽt on s’amuse de moi comme d’une ma"rionnette ; je prends quelquefois mon voisin par sa main de bois, et je recule en frissonnant. Le soir, je fais le projet d’aller voir lever le soleil, et je reste au lit ; le jour, je me promets le plaisir du clair de lune, et je m’oublie dans ma chambre. Je ne sais trop pourquoi je me lĂšve, pourquoi je me coucha. Le levain qui faisait fermenter ma vie, je ne l’ai plus ; le charme qui me tenait Ă©veillĂ© dans les nuits profondes s’est Ă©vanoui ; l’enchantement qui, le matin, m’arrachait au sommeil a fui loin de moi. Je n’ai trouvĂ© ici qu’une femme, une seule, Mlle de B. Elle vous ressemble, ĂŽ Charlotte, si l’on peut vous ressembler. «.Eh quoi ? direz-vous, le voilĂ  qui fait de jolis compliments ! » Cela n’est pas tout Ă  fait imaginaire : depuis quelque temps je suis trĂšs-aimable, parce que je ne puis faire autre chose ; j’ai beaucoup d’esprit, at les dames disent que personne ne sait louer aussi finement
. «Ni mentir, ajouterez-vous, car l’un ne va pas sans l’autre, entendez-vous ?
 » Je voulais parler de Mlle B. Elle a beaucoup d’ñme, on le voit d’abord Ă  la flamme de ses yeux bleus. Son rang lui est Ă  charge ; il ne satisfait aucun des vƓux de son cƓur. Elle aspire Ă  sortir de ce tumulte, et nous rĂȘvons, des heures entiĂšres, au mijieu de scĂšnes champĂȘtres, un bonheur sans mĂ©lange ; hĂ©las ! nous rĂȘvons Ă  vous, Charlotte ! Que de fois n’est-elle pas obligĂ©e de vous rendre hommage !
 Non pas obligĂ©e : elle le fait de bon grĂ© ; elle entend volontiers parler de vous ; elle vous aime. Oh ! si j’étais assis Ă  vos pieds, dans la petite chambre, gracieuse et tranquille ! si nos chers petits jouaient ensemble autour de moi, et, quand leur bruit vous fatiguerait, si je pouvais les rassembler en cercle et les calmer avec une histoire effrayante ! Le soleil se couche avec magnificence sur la contrĂ©e Ă©blouissante de neige ; l’orage est passĂ© ; et moi
. il faut que je rentre dans ma cage
. Adieu. Albert est-il auprĂšs de vous ? Et comment ?
 Dieu veuille me pardonner cette question !
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Johann Wolfgang von Goethe (The Sorrows of Young Werther)
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Le dĂ©ment - N'avez-vous pas entendu parler de ce dĂ©ment qui, dans la clartĂ© de midi alluma une lanterne, se prĂ©cipita au marchĂ© et cria sans discontinuer : « Je cherche Dieu ! Je cherche Dieu ! » –Étant donnĂ© qu'il y avait justement lĂ  beaucoup de ceux qui ne croient pas en Dieu, il dĂ©chaĂźna un Ă©norme Ă©clat de rire. S'est-il donc perdu ? disait l'un. S'est-il Ă©garĂ© comme un enfant ? disait l'autre. Ou bien s'est-il cachĂ© ? A-t-il peur de nous ? S'est-il embarquĂ© ? A-t-il Ă©migrĂ© ?–ainsi criaient-ils en riant dans une grande pagaille. Le dĂ©ment se prĂ©cipita au milieu d'eux et les transperça du regard. « OĂč est passĂ© Dieu ? lança-t-il, je vais vous le dire ! Nous l'avons tuĂ©,–vous et moi ! Nous sommes tous ses assassins ! Mais comment avons-nous fait cela ? Comment pĂ»mes-nous boire la mer jusqu'Ă  la derniĂšre goutte ? Qui nous donna l'Ă©ponge pour faire disparaĂźtre tout l'horizon ? Que fĂźmes-nous en dĂ©tachant cette terre de son soleil ? OĂč l'emporte sa course dĂ©sormais ? OĂč nous emporte notre course ? Loin de tous les soleils ? Ne nous abĂźmons-nous pas dans une chute permanente ? Et ce en arriĂšre, de cĂŽtĂ©, en avant, de tous les cĂŽtĂ©s ? Est-il encore un haut et un bas ? N'errons-nous pas comme Ă  travers un nĂ©ant infini ? L'espace vide ne rĂ©pand-il pas son souffle sur nous ? Ne s'est-il pas mis Ă  faire plus froid ? La nuit ne tombe-t-elle pas continuellement, et toujours plus de nuit ? Ne faut-il pas allumer des lanternes Ă  midi ? N'entendons-nous rien encore du bruit des fossoyeurs qui ensevelissent Dieu ? Ne sentons-nous rien encore de la dĂ©composition divine ?–les dieux aussi se dĂ©composent ! Dieu est mort ! Dieu demeure mort ! Et nous l'avons tuĂ© ! Comment nous consolerons-nous, nous, assassins entre les assassins ? Ce que le monde possĂ©dait jusqu'alors de plus saint et de plus puissant, nos couteaux l'ont vidĂ© de son sang,–qui nous lavera de ce sang ? Avec quelle eau pourrions-nous nous purifier ? Quelles cĂ©rĂ©monies expiatoires, quels jeux sacrĂ©s nous faudra-t-il inventer ? La grandeur de cet acte n'est-elle pas trop grande pour nous ? Ne nous faut-il pas devenir nous-mĂȘmes des dieux pour apparaĂźtre seulement dignes de lui ? Jamais il n'y eut acte plus grand,–et quiconque naĂźt aprĂšs nous appartient du fait de cet acte Ă  une histoire supĂ©rieure Ă  ce que fut jusqu'alors toute histoire ! » Le dĂ©ment se tut alors et considĂ©ra de nouveau ses auditeurs : eux aussi se taisaient et le regardaient dĂ©concertĂ©s. Il jeta enfin sa lanterne Ă  terre : elle se brisa et s'Ă©teignit. « Je viens trop tĂŽt, dit-il alors, ce n'est pas encore mon heure. Cet Ă©vĂ©nement formidable est encore en route et voyage,–il n'est pas encore arrivĂ© jusqu'aux oreilles des hommes. La foudre et le tonnerre ont besoin de temps, la lumiĂšre des astres a besoin de temps, les actes ont besoin de temps, mĂȘme aprĂšs qu'ils ont Ă©tĂ© accomplis, pour ĂȘtre vus et entendus. Cet acte est encore plus Ă©loignĂ© d'eux que les plus Ă©loignĂ©s des astres,–et pourtant ce sont eux qui l'ont accompli. » On raconte encore que ce mĂȘme jour, le dĂ©ment aurait fait irruption dans diffĂ©rentes Ă©glises et y aurait entonnĂ© son Requiem aeternam deo. ExpulsĂ© et interrogĂ©, il se serait contentĂ© de rĂ©torquer constamment ceci : « Que sont donc encore ces Ă©glises si ce ne sont pas les caveaux et les tombeaux de Dieu ? »
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Friedrich Nietzsche (The Gay Science: With a Prelude in Rhymes and an Appendix of Songs)
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Les hommes, disais-je, se plaignent souvent de compter peu de beaux jours et beaucoup de mauvais, et il me semble que, la plupart du temps, c’est mal Ă  propos. Si nous avions sans cesse le cƓur ouvert pour jouir des biens que Dieu nous dispense chaque jour, nous aurions assez de force pour supporter le mal quand il vient. — Mais nous ne sommes pas les maĂźtres de notre humeur, dit la mĂšre ; combien de choses dĂ©pendent de l’état du corps ! Quand on n’est pas bien, on est mal partout. » J’en tombai d’accord et j’ajoutai : « Eh bien, considĂ©rons la chose comme une maladie, et demandons-nous s’il n’y a point de remĂšde. — C’est parler sagement, dit Charlotte : pour moi, j’estime que nous y pouvons beaucoup. Je le sais par expĂ©rience. Si quelque chose me contrarie et veut me chagriner, je cours au jardin et me promĂšne, en chantant quelques contredanses : cela se passe aussitĂŽt. — C’est ce que je voulais dire, repris-je Ă  l’instant : il en est de la mauvaise humeur absolument comme de la paresse ; car c’est une sorte de paresse. Par notre nature, nous y sommes fort enclins, et cependant, si nous avons une fois la force de nous surmonter, le travail nous devient facile, et nous trouvons dans l’activitĂ© un vĂ©ritable plaisir. » FrĂ©dĂ©rique Ă©tait fort attentive, et le jeune homme m’objecta qu’on n’était pas maĂźtre de soi, et surtout qu’on ne pouvait commander Ă  ses sentiments. « II s’agit ici, rĂ©pliquai-je, d’un sentiment dĂ©sagrĂ©able, dont chacun est bien aise de se dĂ©livrer, et personne ne sait jusqu’oĂč ses forces s’étendent avant de les avoir essayĂ©es. AssurĂ©ment, celui qui est malade consultera tous les mĂ©decins, et il ne refusera pas les traitements les plus pĂ©nibles, les potions les plus amĂšres, pour recouvrer la santĂ© dĂ©sirĂ©e. [...] Vous avez appelĂ© la mauvaise humeur un vice : cela me semble exagĂ©rĂ©. — Nullement, lui rĂ©pondis-je, si une chose avec laquelle on nuit Ă  son prochain et Ă  soi-mĂȘme mĂ©rite ce nom. N’est-ce pas assez que nous ne puissions nous rendre heureux les uns les autres ? faut-il encore nous ravir mutuellement le plaisir que chacun peut quelquefois se procurer ? Et nommez-moi l’homme de mauvaise humeur, qui soit en mĂȘme temps assez ferme pour la dissimuler, la supporter seul, sans troubler la joie autour de lui ! N’est-ce pas plutĂŽt un secret dĂ©plaisir de notre propre indignitĂ©, un mĂ©contentement de nous-mĂȘmes, qui se lie toujours avec une envie aiguillonnĂ©e par une folle vanitĂ© ? Nous voyons heureux des gens qui ne nous doivent pas leur bonheur, et cela nous est insupportable. » Charlotte me sourit, en voyant avec quelle Ă©motion je parlais, et une larme dans les yeux de FrĂ©dĂ©rique m’excita Ă  continuer. « Malheur, m’écriai-je, Ă  ceux qui se servent de l’empire qu’ils ont sur un cƓur, pour lui ravir les joies innocentes dont il est lui-mĂȘme la source ! Tous les prĂ©sents, toutes les prĂ©venances du monde, ne peuvent compenser un moment de joie spontanĂ©e, que nous empoisonne une envieuse importunitĂ© de notre tyran. [...] Si seulement on se disait chaque jour : Tu ne peux rien pour tes amis que respecter leurs plaisirs et augmenter leur bonheur en le goĂ»tant avec eux. Peux-tu, quand le fond de leur ĂȘtre est tourmentĂ© par une passion inquiĂšte, brisĂ© par la souffrance, leur verser une goutte de baume consolateur ?
 Et, quand la derniĂšre, la plus douloureuse maladie surprendra la personne que tu auras tourmentĂ©e dans la fleur de ses jours, qu’elle sera couchĂ©e dans la plus dĂ©plorable langueur, que son Ɠil Ă©teint regardera le ciel, que la sueur de la mort passera sur son front livide, et que, debout devant le lit, comme un condamnĂ©, dans le sentiment profond qu’avec tout ton pouvoir tu ne peux rien, l’angoisse te saisira jusqu’au fond de l’ñme, Ă  la pensĂ©e que tu donnerais tout au monde pour faire passer dans le sein de la crĂ©ature mourante une goutte de rafraĂźchissement, une Ă©tincelle de courage !

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Johann Wolfgang von Goethe (The Sorrows of Young Werther)
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Car une femme et un homme qui, jusqu'Ă  la fin des temps, doivent ĂȘtre toi et moi, glisseront Ă  leur tour sans se retourner jamais jusqu'Ă  perte de sentier, dans la lueur oblique, aux confins de la vie et de l'oubli de la vie, dans l'herbe fine qui court devant nous Ă  l'arborescence. Elle est, cette herbe dentelĂ©e, faite de mil liens invisibles, intranchables, qui se sont trouvĂ©s unir ton systĂšme nerveux au mien dans la nuit profonde de la connaissance.
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André Breton
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Le dĂ©sastre commence au stade du faire-part de naissance : ce n'est plus Évelyne et Jacques qui font part de la venue au monde d'Antoine, mais Antoine qui fait savoir qu'il est arrivĂ© chez Évelyne et Jacques. Le parent Ă©merveillĂ© fait circuler sur Internet des photos de famille miĂšvres, montre Ă  qui veut (et qui ne veut pas) des films vidĂ©o de son enfant prenant le bain ou dĂ©ballant des cadeaux de NoĂ«l. Il circule avec un badge « bĂ©bĂ© Ă  bord » sur la lunette arriĂšre de son auto : une sorte d'image pieuse des temps modernes, aussi utile qu'un gri-gri magique pour conjurer le mauvais sort. Il prend au mot toute personne qui lui demande poliment « Comment va le petit ? », comme on dirait « bonjour », sans attendre forcĂ©ment de rĂ©ponse. Car le parent gaga se sent obligĂ© de tenir la terre entiĂšre au courant des progrĂšs fulgurants de sa progĂ©niture (« Oscar va sur le pot », « Alice fait ses nuits », « NoĂ© a dessinĂ© un bonhomme de neige incroyablement ressemblant », « Hier, Ulysse a dit Papa caca », « Malo passe en CM2 »).
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Corinne Maier (No Kid: Quarante raisons de ne pas avoir d'enfant)
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Le temps est caoutchouteux quand on a peur, il ressemble au tableau de Dali, il fond, il se déforme, il dégouline et on ne sait si c'est le jour ou la nuit, si ce sont des minutes qui s'écoulent ou des heures entiÚres.
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Nathacha Appanah (Rien ne t'appartient)
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Mais il serait peut-ĂȘtre bon, il serait peut-ĂȘtre temps de se demander si la perfection n'est pas dans l'enfance, si l'adulte n'est pas qu'un enfant qui a dĂ©jĂ  commencĂ© Ă  pourrir
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René Barjavel (La nuit des temps)
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Les livres sont comme un voyage dans le temps. Tous les vrais lecteurs savent cela. Mais ils ne vous ramĂšnent pas seulement Ă  l’époque oĂč ils ont Ă©tĂ© Ă©crits, ils peuvent aussi vous ramener Ă  d’autres versions de vous-mĂȘme. La derniĂšre fois que j’avais ouvert le livre que je tenais entre les mains, je devais avoir onze ou douze ans. J’aime Ă  penser que c’était l’étĂ© et que je veillais Ă  une heure tardive, dans ma chambre exiguĂ«, sous un simple drap, un moustique bourdonnant sĂ»rement dans un coin de la piĂšce. Mon pĂšre Ă©coutait ses disques dans le salon, trop fort, en fonction de son degrĂ© d’ébriĂ©tĂ©. La plupart des nuits se terminaient de la mĂȘme façon, ma mĂšre lui baissant sa musique - gĂ©nĂ©ralement du jazz, mĂȘme s’il lui arrivait d’écouter des groupes de fusion, comme Frank Zappa ou Weather Report - et mon pĂšre rĂąlant qu’elle ne le comprenait pas. Mais tout cela n’était qu’un bruit de fond, car je n’étais plus vraiment lĂ , dans ma chambre. J’étais en Floride, en 1963, traĂźnant parmi les promoteurs immobiliers vĂ©reux, les divorcĂ©es sexy, Ă  boire de grands verres de bourbon. Et voilĂ  qu’aujourd’hui, Ă  bientĂŽt quarante ans, mes yeux lisaient les mĂȘmes mots, mes mains tournaient les mĂȘmes pages que prĂšs de trente ans plus tĂŽt, ces pages qu’un homme d’affaires ou une mĂ©nagĂšre avaient tournĂ©es il y avait cinquante ans. Un voyage dans le temps.
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Peter Swanson
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Nous ne sommes pas paresseux. Nous prenons seulement le temps de vivre. Ce qui n'est pas le cas des Occidentaux. Pour eux, le temps, c'est de l'argent. Pour nous, le temps, ça n'a pas de prix. Un verre de thé suffit à notre bonheur, alors qu'aucun bonheur ne leur suffit.
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Yasmina Khadra (Ce que le jour doit Ă  la nuit)
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reĂźntoarcere din timpul steril Ăźnainte de a te pierde Ăźmi zdrobeßti nopĆŁile de piscurile răsărite sub tĂąmple degetele mĂąinii sub talpa ciocanului decojite zilele ies din miezul steril cu ochii Ăźnchißi puii de vrabie din oul Ăźn care au auzit ĂźntĂąia dată strigătul vĂąntului către tunet atunci Ăźmi aduci aminte de actul final punctul scurtei mele figuraĆŁii ca puiul din coaja oului matern voi ießi din scenă Ăźn secunda următoare nu mă vor Ăźnjunghia pe la spate voi simĆŁi trecutul carbonizat negativul meu se va atinge de fulgerul deschis Ăźn celălalt ochi va Ăźncepe să te privească. * retour dans le temps stĂ©rile avant de te perdre tu Ă©crases mes nuits contre les sommets surgis sous les tempes les doigts des mains sous la plante du pied du marteau pelĂ©s les jours sortent du noyau stĂ©rile les yeux fermĂ©s oisillons de moineau de l’Ɠuf oĂč ils ont entendu pour la premiĂšre fois le cri du vent adressĂ© au tonnerre c’est alors que tu me rappelles le dernier acte le point de ma courte figuration Ă  l’instar du poussin de l’Ɠuf materne je quitterai la scĂšne l’instant d’aprĂšs ils me poignarderont dans le dos je sentirai mon passĂ© carbonisĂ© mon nĂ©gatif touchera la foudre ouverte dans l’autre Ɠil il se mettra Ă  m’observer. (traduit en français par Gabrielle Danoux)
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Ioan Barb
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Vivre les malheurs d'avance, c'est les subir deux fois.
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René Barjavel (La Nuit des temps)
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—Et depuis quand les Ă©vĂȘques s'y connaissent-ils en femmes? —TrĂšs longue histoire. La nuit des temps —rĂ©pondit l'Ă©vĂȘque.
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Fred Vargas
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L’arbre de NoĂ«l Le sapin illuminĂ©, dĂ©corĂ© de guirlandes et de boules de couleur, est perçu Ă  tort comme un symbole religieux. En effet, l’arbre de NoĂ«l n’appartient pas Ă  la symbolique chrĂ©tienne : le culte de l’arbre de feu est cĂ©lĂ©brĂ© depuis l’aube des temps Ă  l’occasion du solstice d’hiver, pour fĂȘter le retour attendu de la lumiĂšre au plus profond des nuits hivernales. Cette pĂ©riode annonce la victoire du soleil sur les tĂ©nĂšbres et le retour prochain du printemps.
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Patrick Banon (Dico des signes et symboles religieux (French Edition))
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Le feu, une premiĂšre victoire des hommes sur les puissances cĂ©lestes Enfin les temps changent : un jour d’orage, la foudre tombe sur une forĂȘt et enflamme les arbres. Une arme extraordinaire est tombĂ©e du ciel. Les hommes ont domestiquĂ© le feu. C’est une premiĂšre victoire sur leur impitoyable environnement. DĂ©sormais, ils pourront avoir chaud en hiver et, la nuit, Ă©loigner les bĂȘtes sauvages. Depuis, le 25 dĂ©cembre, jour du solstice d’hiver, l’homme cĂ©lĂšbre avec le don du feu la victoire de la lumiĂšre sur les tĂ©nĂšbres. C’est notre fameux NoĂ«l, une fĂȘte vieille d’au moins dix mille ans, nĂ©e huit millĂ©naires avant l’anniversaire chrĂ©tien de la naissance de JĂ©sus-Christ. Les sapins de NoĂ«l n’étaient-ils pas jadis ornĂ©s de bougies pour commĂ©morer l’arbre de feu des origines du temps ?
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Patrick Banon (Dico des signes et symboles religieux (French Edition))
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Devant l'OpĂ©ra, la foule s'Ă©tait dispersĂ©e, il ne restait qu'une dizaine de passants et un petit groupe de viveurs qui buvaient bruyamment dans un coin de la Grand-Place. Je me postai prĂšs de la fontaine, restant en selle tandis que les chiens se dispersaient pour chercher la trace olfactive de ma femme. Le temps sembla se suspendre tandis que les bĂȘtes entraient dans les ruelles et en sortaient, flairant des milliers de pistes sans dĂ©tecter la bonne. La nuit avançait sans qu'ils la repĂšrent, une rage sourde me tenait droit malgrĂ© des relents d'ivresse, l'agressivitĂ© des chiens m'enflammait et je me surpris Ă  dĂ©sirer la mort de PhĂ©lie comme j'aurais souhaitĂ© celle d'un animal mystique – un Ă©lĂ©phant blanc ou un cerf Ă  trois bois –, non seulement pour le plaisir du meurtre, mais en me figurant ce sacrifice comme la mĂ©taphore d'un geste plus grand. L'horloge du campanile sonna une heure. Il se mit Ă  tomber une neige pĂąteuse qui collait aux vĂȘtements, mais fondait sur le pelage ras des mĂątins, et la tempĂ©rature chuta. Les chiens Ă©cumaient, une buĂ©e blanchĂątre s'exhalait de leur robe rendue moite par l'effort et quand, enfin, le braque halena PhĂ©lie et rappela Ă  son cĂŽtĂ© les quatre autres bĂȘtes, il poussa un hurlement terrible qui effraya les derniers passants. Les pharaons se prĂ©cipitĂšrent au devant du grand chien gris, lui ouvrant le chemin comme Ă  un empereur, et l'escadron s'engouffra dans une ruelle Ă©troite oĂč je le suivis avec peine.
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Audrée Wilhelmy (Les sangs)
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Bien qu’ils aient jouĂ© un rĂŽle capital pendant le siĂšge, on n’a pas sans doute assez insistĂ© sur l’aide prĂ©cieuse que les chiens de guet ont apportĂ©e aux dĂ©fenseurs du Mont. On le comprendra mieux si l’on observe que, en plus des remparts couvrant la partie est et sud-est du Mont, il fallait aussi surveiller, de nuit surtout pour Ă©viter toute surprise, les escarpements rocheux de l’ouest, et la pente nord, de part et d’autre de l’escalier fortifiĂ© de la fontaine Saint-Aubert (le petit bois qui la couvre n’existait pas alors) ; et que, pour la surveillance d’un aussi vaste pĂ©rimĂštre, les hommes astreints au guet Ă©taient peu nombreux. C’est pourquoi de tout temps, des chiens de garde, que l’on lĂąchait la nuit autour du Mont, complĂ©taient les rondes et surveillaient les grĂšves sur tout le pourtour de l’üle. Ces chiens Ă©taient vraisemblablement des dogues. Le document le plus dĂ©taillĂ© que nous ayons sur eux est de quelques annĂ©es postĂ©rieur au siĂšge. C’est le mandement que signa Louis XI, aprĂšs son troisiĂšme pĂšlerinage au Mont en 1473 : « (Le sire du Bouchage) nous a dit et remontrĂ© que, pour la garde et sĂ»retĂ© de notre place du Mont-Saint-Michel, on a de tout temps accoutumĂ© avoir et nourrir audit lieu certain nombre de grands chiens, lesquels sont par jour attachĂ©s et liĂ©s, et de nuit sont menĂ©s tous dĂ©tachĂ©s hors de ladite place et Ă  l’entour d’icelle pour, au long de la nuit, servir au guet et garde d’icelle place ; nous avons veu Ă  l’ueil et congneu que la nourriture et entretien desdits chiens est trĂšs fort utile et profittable Ă  la garde de la place dudit Mont-Saint-Michel, pour ces causes
 avons voulu et octroyĂ© par ces prĂ©sentes
 que le lieutenant dudit seigneur
 ayt et praigne dorĂ©navant par chacun an de la somme de 25 livres tournois des deniers de la revenue de notre vicomtĂ© d’Avranches
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Nicolas Goujon (Le Mont Saint-Michel : Mille Ans d'Histoire et de Ferveur)
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Cette nuit-lĂ , il est seul sans l’ĂȘtre vraiment, car les fantĂŽmes de son passĂ© font sentir leur prĂ©sence. Et le temps passe, comme il sait si bien le faire. Louis a perdu toute notion des heures. La nuit distend et tord le rĂ©el. Quand les premiĂšres lueurs de l’aube apparaissent, il est Ă©puisĂ©.
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Julie Turconi (Les Marches)
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Mais ils dormaient dĂ©jĂ , en vĂ©ritĂ©, et tout ce temps ne fut qu'un long sommeil. La ville Ă©tait peuplĂ©e de dormeurs Ă©veillĂ©s qui n'Ă©chappaient rĂ©ellement Ă  leur sort que ces rares fois oĂč, dans la nuit, leur blessure apparemment fermĂ©e se rouvrait brusquement. Et rĂ©veillĂ©s en sursaut, ils en tĂątaient alors, avec une sorte de distraction, les lĂšvres irritĂ©es, retrouvant en un Ă©clair leur souffrance, soudain rajeunie, et, avec elle, le visage bouleversĂ© de leur amour. Au matin, ils revenaient au flĂ©au, c'est-Ă -dire Ă  la routine. Mais de quoi, dira-t-on, ces sĂ©parĂ©s avaient-ils l'air ? Eh bien, cela est simple, ils n'avaient l'air de rien. Ou, si on prĂ©fĂšre, ils avaient l'air de tout le monde, un air tout Ă  fait gĂ©nĂ©ral. Ils partageaient la placiditĂ©, et les agitations puĂ©riles de la citĂ©. Ils perdaient les apparences du sens critique, tout en gagnant les apparences du sang-froid. On pouvait voir, par exemple, les plus intelligents d'entre eux faire mine de chercher comme tout le monde dans les journaux, ou bien dans les Ă©missions radiophoniques, des raisons de croire Ă  une fin rapide de la peste, et concevoir apparemment des espoirs chimĂ©riques, ou Ă©prouver des craintes sans fondement, Ă  la lecture de considĂ©rations qu'un journaliste avait Ă©crites un peu au hasard, en bĂąillant d'ennui. Pour le reste, ils buvaient leur biĂšre ou soignaient leurs malades, paressaient ou s'Ă©puisaient, classaient des fiches ou faisaient tourner des disques sans se distinguer autrement les uns des autres. Autrement dit, ils ne choisissaient plus rien. La peste avait supprimĂ© les jugements de valeur. Et cela se voyait Ă  la façon dont personne ne s'occupait plus de la qualitĂ© des vĂȘtements ou des aliments qu'on achetait. On acceptait tout en bloc.
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Albert Camus (The Plague)
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Il se laissait assoupir dans des odeurs de camphre et d'amandiers. Parfois, dans le calme de la nuit, il Ă©prouvait la nostalgie du passĂ©. Quand on Ă©voquait devant lui l'adolescent rĂȘvant Ă  de fabuleux trĂ©sors, croyant Ă  un destin extraordinaire, il ne se reconnaissait pas dans ce portrait. Il lui fallut beaucoup de temps avant de prĂȘter Ă  ces moments d'Ă©garement les audaces dĂ©licieuses de la jeunesse.
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Miguel Bonnefoy (Black Sugar)
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Elle Ă©tait lĂ  pourtant, mapuche depuis la nuit des temps, et les monstres qu'elle croyait bannir par sa seule volontĂ© Ă©tait revenus par la porte des Morts. Ils n'avaient jamais quittĂ© terre : ils rampaient au plus juste, s'enfonçaient dans les plaies les plus fraĂźches, jouissant du mal ou en s'arrangeant, empreinte de l'Ăąme humaine foulĂ©e par des dieux sans tĂȘte.
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Caryl Férey (Mapuche)
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Mon pÚre suppliait du regard; il demandait encore une heur, encore quelques minutes, il avait encore quelque chose à me dire -je demande que ton pardon me soit accordé... AprÚs celui qui possÚde mon ame pourra l'emporter ou il veut, dans ses jardin fleuris, dans ses riviÚres paisibles, ou la jeter dans le cratÚre d'un volcan. mais avant, accorde-moi la grùce de l'oublie. c'est cela le pardon, tu es libre à présent. va-t'en, quitte cette maison maudite, fais des voyages, vis!... vis! ... et ne retourne pas pour voir le désastre que je laisse. oublie et prends le temps de vivre... oublie cette ville... en cette nuit j'ai su que ton déstin serais meilleurs que celui de toutes les femmes de ce pays. je suis lucide, je n'invente rien. je vois ton visage auréollé d'une lumiÚre extraordinaire. tu viens de naitre, cette nuit... tu es une femme... laisse ta beauté te guider. il n'y a plus rien à craindre. la nuit du destin te nome Zahra, enfant de l'éternité tu ees le temps qui se maintient dans le versant du silence... sur le sommet du feu ...parmi les arbres... c'est toi que je vois ma fille c'est toi qui me tend la main Mon pÚre suppliait du regard; il demandait encore une heur, encore quelques minutes, il avait encore quelque chose à me dire -je demande que ton pardon me soit accordé... AprÚs celui qui possÚde mon ame pourra l'emporter ou il veut, dans ses jardin fleuris, dans ses riviÚres paisibles, ou la jeter dans le cratÚre d'un volcan. mais avant, accorde-moi la grùce de l'oublie. c'est cela le pardon, tu es libre à présent. va-t'en, quitte cette maison maudite, fais des voyages, vis!... vis! ... et ne retourne pas pour voir le désastre que je laisse. oublie et prends le temps de vivre... oublie cette ville... en cette nuit j'ai su que ton déstin serais meilleurs que celui de toutes les femmes de ce pays. je suis lucide, je n'invente rien. je vois ton visage auréollé d'une lumiÚre extraordinaire. tu viens de naitre, cette nuit... tu es une femme... laisse ta beauté te guider. il n'y a plus rien à craindre. la nuit du destin te nome Zahra, enfant de l'éternité tu ees le temps qui se maintient dans le versant du silence... sur le sommet du feu ...parmi les arbres... c'est toi que je vois ma fille c'est toi qui me tend la main
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Tahar Ben Jelloun
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Mon pÚre suppliait du regard; il demandait encore une heur, encore quelques minutes, il avait encore quelque chose à me dire -je demande que ton pardon me soit accordé... AprÚs celui qui possÚde mon ame pourra l'emporter ou il veut, dans ses jardin fleuris, dans ses riviÚres paisibles, ou la jeter dans le cratÚre d'un volcan. mais avant, accorde-moi la grùce de l'oublie. c'est cela le pardon, tu es libre à présent. va-t'en, quitte cette maison maudite, fais des voyages, vis!... vis! ... et ne retourne pas pour voir le désastre que je laisse. oublie et prends le temps de vivre... oublie cette ville... en cette nuit j'ai su que ton déstin serais meilleurs que celui de toutes les femmes de ce pays. je suis lucide, je n'invente rien. je vois ton visage auréollé d'une lumiÚre extraordinaire. tu viens de naitre, cette nuit... tu es une femme... laisse ta beauté te guider. il n'y a plus rien à craindre. la nuit du destin te nome Zahra, enfant de l'éternité tu ees le temps qui se maintient dans le versant du silence... sur le sommet du feu ...parmi les arbres... c'est toi que je vois ma fille c'est toi qui me tend la main
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Tahar Ben Jelloun (L'enfant de sable / La nuit sacrée)
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C'Ă©tait une vie sans but et faite avec des jours ajoutĂ©s. Plus rien n'Ă©tait mauvais, Ă  cause de l'habitude, mais surtout plus rien n'Ă©tait bon. Autrefois, il connaissait le repos de chaque soir, aprĂšs avoir battu le fer, et s'asseoir, dormir, se reformer pour le lendemain, cela mĂȘme Ă©tait un but, cela sĂ©parait la nuit du jour et semblait illustrer la vie. Mais les longs repos, la paresse entrant dans la chair, la dĂ©composition de la chair par la paresse! Le temps coule comme dans les conques marines, monotone et bĂȘte, en souvenir de la mer et des galets et l'on entend dans sa tĂȘte comme une fuite sans cause. Le temps s'en va son train et ressemble aux chiens errants qui trottinent en baissant l'oreille.
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Charles-Louis Philippe (Le PÚre Perdrix (Littérature Française) (French Edition))
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« J’imagine que vous avez dĂ©jĂ  appris, par les journaux ou la radio, la nouvelle douloureuse de la mort de RenĂ© GuĂ©non, survenue dans la nuit du 7 au 8 janvier. J’ai reçu votre lettre le 8 janvier en mĂȘme temps que la nouvelle de son agonie. Le jour suivant j’apprenais qu’il Ă©tait dĂ©cĂ©dĂ©. Il souffrait depuis plusieurs mois et avait cessĂ© toutes ses correspondances vers la fin novembre. Il souffrait d’un ƓdĂšme Ă  une jambe, causĂ© par des rhumatismes. En dĂ©cembre le danger semblait complĂštement Ă©cartĂ©, mais l’empoisonnement de son sang lui causa un abcĂšs Ă  la gorge et il semble que cela ait accĂ©lĂ©rĂ© sa fin, si cela n’en fut pas la cause. Il y a eu des moments durant ses derniers mois oĂč, comme je vous le disais, il Ă©tait clair que je le dĂ©rangeais et que je le fatiguais ; sa rĂ©sistance avait bien diminuĂ©. Mais il Ă©tait lucide jusqu’à ses derniers instants. « Voici quelques dĂ©tails bien touchants : durant ses derniers jours, il semble qu’il savait qu’il allait mourir, et dans l’aprĂšs-midi du 7 janvier il performa un dhikr trĂšs intense, soutenu de chaque cĂŽtĂ© par son Ă©pouse et un membre de sa famille. Les femmes Ă©taient fatiguĂ©es et s’épuisĂšrent avant lui. Elles racontent que ce jour lĂ , sa sueur avait l’odeur du parfum de fleurs. Finalement, il leur demanda avec insistance la permission de mourir, ce qui montre bien qu’il pouvait choisir le moment de sa mort. Les femmes le suppliĂšrent de rester en vie plus longtemps. Finalement, il demanda Ă  son Ă©pouse : « Ne puis-je mourir maintenant ? J’ai tellement souffert ! » Elle lui rĂ©pondit en acquiesçant : « Avec la protection de Dieu ! » Il mourut alors presque immĂ©diatement, aprĂšs qu’il fit une ou deux invocations de plus ! « Quelques dĂ©tails de plus : son chat, qui semblait en parfaite santĂ©, a commencĂ© Ă  gĂ©mir et mourut quelques heures plus tard. Le jour de sa mort, RenĂ© GuĂ©non avait rendu son Ă©pouse perplexe en lui disant qu’aprĂšs son dĂ©cĂšs elle devait laisser sa chambre inchangĂ©e. Personne ne devait toucher ses livres ou ses papiers. Il souligna qu’autrement il ne serait pas capable de la voir, elle et leurs enfants, mais dans cette chambre non perturbĂ©e il demeurerait assis Ă  son bureau et il pourrait continuer Ă  les voir, mĂȘme si eux ne pourraient le voir ! » – Michel VĂąlsan, lettre Ă  Vasile Lovinescu, 18 juin 1951.
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Michel VĂąlsan
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Je retrouve ma ville et je reste bouche bee. J'avais oublie sa beaute lascive, brunie par le soleil. Rome, ville superbe ou les hommes se deplacent avec la suavite des chats. Rome, aux murs ochre et aux statues d'eternite ou les bougainvilliers mangent avec harmonie les facades des palais. Rome, ou tout est patine par le temps et la douceur du ciel. Rome, ou cent mille esclaves s'echangent, jour et nuit, les odeurs de l'Empire. Rome, ville crasseuse de la puanteur de ses marches et luxueuse de l'or de ses conquetes.
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Laurent Gaudé (Les Oliviers du Négus)
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Mais le premier de tous est un savant illustre, qui n'appartient pas seulement Ă  la Bretagne, mais Ă  la France, le cĂ©lĂšbre voyageur en Égypte, M. Caillaud. DouĂ© de l'esprit le plus sagace et le plus pĂ©nĂ©trant, il a fait en histoire naturelle plusieurs dĂ©couvertes, une surtout, des plus intĂ©ressantes, pour laquelle la Hollande lui a dĂ©cernĂ©, il y a peu d'annĂ©es, un prix extraordinaire, la dĂ©couverte du procĂ©dĂ© de perforation des pholades. On avait jusqu'alors cru que les pholades, petits mollusques trĂšs-communs sur les cĂŽtes de Bretagne, employaient, pour percer le dur granit oĂč elles vivent, un acide qu'elles distillaient Ă  travers les valves de leur coquille. M. Caillaud eut des doutes Ă  ce sujet: il recueillit, prĂšs du Pouliguen, des pholades attachĂ©es Ă  des morceaux de roc (gneiss), les plaça dans un bocal d'eau de mer incessamment renouvelĂ©e, et attendit l'effet de leur travail. Huit jours, quinze jours se passĂšrent sans que les pholades donnassent signe de vie, lorsqu'une nuit il fut Ă©veillĂ© par un bruit de scie qui retentissait dans le bocal; il se lĂšve, et, Ă  la lueur d'une lampe, il voit un des petits animaux se tournant et se retournant Ă  droite et Ă  gauche, avec un mouvement rĂ©gulier, Ă  la maniĂšre d'une vrille qui perce un trou; puis, aprĂšs un certain temps, la pholade s'arrĂȘte, et un jet de poussiĂšre fine obscurcit l'eau du bocal; c'Ă©tait le rĂ©sidu de son travail, la partie du roc pulvĂ©risĂ© oĂč elle avait pĂ©nĂ©trĂ©, dont elle se dĂ©barrassait et qu'elle chassait au dehors. Et tour Ă  tour le savant, attentif et charmĂ©, surprend une Ă  une les pholades accomplissant leur patient ouvrage, et se creusant leur demeure, l'arrondissant et la polissant, comme avec la rĂąpe la plus dĂ©licate, sans autre instrument que leur coquille; et cette coquille, au lieu de se dĂ©tĂ©riorer par le frottement continu, se dĂ©veloppe Ă  mesure que le travail avance; Ă  la scie qui s'use une autre scie s'ajoute, puis une troisiĂšme, une quatriĂšme, et ainsi de suite jusqu'Ă  quarante, que M. Caillaud a comptĂ©es, et avec lesquelles le petit animal, Ă  force de tourner et retourner sa frĂȘle enveloppe, cette coquille que la pression d'un doigt d'enfant suffirait Ă  briser, perce Ă  jour le granit sur lequel s'Ă©mousse un ciseau de fer! phĂ©nomĂšne admirable qui confond la sagesse humaine,
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Anonymous
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Les longues nuits semblaient ne s'Ă©carter qu'Ă  regret de la ville, pour quelques heures. Une grise lumiĂšre d'aube ou de crĂ©puscule filtrant Ă  travers le plafond de nuĂ©es d'un blanc sale se rĂ©pandait alors sur les choses comme le reflet appauvri d'un lointain glacier. La neige mĂȘme, qui continuait Ă  tomber, Ă©tait sans lumiĂšre. Cet ensevelissement blanc, lĂ©ger et silencieux s'Ă©tendait Ă  l'infini dans l'espace et le temps. Il fallait dĂ©jĂ  allumer les veilleuses vers trois heures. Le soir Ă©paississait sur la neige des tons de cendre, des bleus opaques, des gris tenaces de vieilles pierres. La nuit s'imposait, inexorable et calmante : irrĂ©elle. Le delta reprenait dans ces tĂ©nĂšbres sa configuration gĂ©ographique. De noires falaises de pierre, cassĂ©es en angles droits, bordaient les canaux figĂ©s. Une sorte de phosphorescence sombre Ă©manait du large fleuve de glace. Parfois les vents du nord, venus du Spitzberg et de plus loin encore, du Groenland peut-ĂȘtre, peut-ĂȘtre du pĂŽle par l'OcĂ©an arctique, la NorvĂšge, la mer Blanche, poussaient leurs rafales sur l'estuaire morne de la Neva. Le froid mordait tout Ă  coup le granit, les lourdes brumes venues du sud par la Baltique s'Ă©vanouissaient tout Ă  coup et les pierres, la terre, les arbres dĂ©nudĂ©s se couvraient instantanĂ©ment de cristaux de givre dont chacun Ă©tait une merveille Ă  peine visible, faite de nombres, de lignes de force et de blancheur. La nuit changeait de face, dĂ©pouillant ses voiles d'irrĂ©alitĂ©. L'Ă©toile polaire apparaissait, les constellations ouvraient l'immensitĂ© du monde. Le lendemain, les cavaliers de bronze sur leurs socles de pierre, couverts d'une poudre d'argent, semblaient sortir d'une Ă©trange fĂȘte ; les hautes colonnes de granit de la cathĂ©drale Saint-Isaac, son fronton peuplĂ© de saints et jusqu'Ă  sa massive coupole dorĂ©e, tout Ă©tait givrĂ©. Les façades et les quais de granit rouge prenaient, sous ce revĂȘtement magnifique, des teintes de cendre rose et blanche. Les jardins, avec les filigranes purs de leurs ■ branchages, paraissaient enchantĂ©s. Cette fantasmagorie ravissait les yeux des gens sortis de leurs demeures Ă©touffantes ainsi qu'il y a des millĂ©naires, les hommes vĂȘtus de fourrures sortaient peureusement l'hiver des chaudes cavernes pleines d'une bonne puanteur animale. Pas une lumiĂšre dans des quartiers entiers. Des tĂ©nĂšbres prĂ©historiques.
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Victor Serge
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Ils et elles, poussĂ©s par leur instinct vers une nouvelle naissance, s'enfermaient, avant l'expulsion, dans des matrices chaudes et demi-obscures oĂč, secouĂ©s par des pulsations sonores, ils perdaient les derniers fragments de prĂ©jugĂ©s et de conventions qui leur collaient encore par-ici et par-lĂ  aux articulations, au sexe ou Ă  la cervelle.
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René Barjavel (La Nuit des temps)
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Les formes paraissaient étranges parce qu'elles étaient inconnues.
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René Barjavel (La Nuit des temps)
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Notre seule défense contre eux était de leur faire peur. Mais nous leur avoins fait TROP PEUR!...
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René Barjavel (La Nuit des temps)
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La loyautĂ© de chacun d'eux —dont personne ne doutait— serait garantie par la prĂ©sence des autres.
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René Barjavel (La Nuit des temps)
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—Écoutez, Coban, c'est terminĂ©. —C'est commencĂ©...
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René Barjavel (La Nuit des temps)
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C’est l’instant oĂč le malade qui a Ă©tĂ© obligĂ© de partir en voyage et a dĂ» coucher dans un hĂŽtel inconnu, rĂ©veillĂ© par une crise, se rĂ©jouit en apercevant sous la porte une raie de jour. Quel bonheur ! c’est dĂ©jĂ  le matin ! Dans un moment les domestiques seront levĂ©s, il pourra sonner, on viendra lui porter secours. L’espĂ©rance d’ĂȘtre soulagĂ© lui donne du courage pour souffrir. Justement il a cru entendre des pas ; les pas se rapprochent, puis s’éloignent. Et la raie de jour qui Ă©tait sous sa porte a disparu. C’est minuit ; on vient d’éteindre le gaz ; le dernier domestique est parti et il faudra rester toute la nuit Ă  souffrir sans remĂšde.
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Marcel Proust (Du cĂŽtĂ© de chez Swann : Édition intĂ©grale (À la recherche du temps perdu, #1&4-6))
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Nous avons dĂ©jĂ  parlĂ© de la notion temporelle propre Ă  chaque saison, l'Ă©tĂ© Ă©tant l'Ă©poque oĂč il ne faut plus attendre, quand la rĂ©colte est mĂ»re, pour la recueillir. J'ai ainsi connu des Ă©tĂ©s bretons oĂč les pluies risquaient de gĂącher le travail de toute une annĂ©e; les Recteurs, en chaire, autorisaient exceptionnellement le travail le dimanche. Cette pĂ©riode de rĂ©colte n'est pas une phase tranquille oĂč il suffit de contempler les champs de blĂ© mĂ»r, mais une pĂ©riode de travail impĂ©ratif pour mettre la rĂ©colte Ă  l'abri Ă  temps. Les cultivateurs de l'Ă©poque -- comme maintenant -- n'avaient pas toujours leur temps normal de sommeil; l'Ă©tĂ©, quand il fallait suivre les battages de ferme en ferme, les paysans finissaient Ă  la nuit pour reprendre Ă  l'aube dans la ferme suivante, ce qui ne les empĂȘchait pas, d'ailleurs, d'aller au bal le samedi et d'y gagner une nouvelle nuit blanche. La rĂ©colte n'attends pas, « quand le vin est tirĂ©, il faut le boire » ; si le fruit du travail psychologique n'est pas engrangĂ© en temps voulu, il risque d'ĂȘtre perdu. Psychologiquement, on peut dire que si le sujet ne prends pas conscience de certains progrĂšs, de certains Ă©volutions, aux moments oĂč ceux-ci se prĂ©sentent, ils risquent d'ĂȘtre perdus et de repartir dans l'inconscient. Il faudra un nouveau cycle pour retrouver Ă  nouveau les solutions nĂ©gligĂ©es. Il est nĂ©cessaire de reconnaĂźtre que les choses ont changĂ©. Ainsi, en faisant avec quelqu'un le bilan d'une annĂ©e d'entretiens et en se reportant aux problĂšmes qui se posaient un an plus tĂŽt, il est possible de mesurer le chemin parcouru, de s'apercevoir que des problĂšmes, cruciaux alors, sont pasĂ©s au second plan et ont Ă©tĂ© rĂ©solus. Il est permis d'espĂ©rer que les nouvelles questions qui se posent trouveront elles aussi leurs rĂ©ponses. Ainsi, le sujet n'a pas l'impression de nager continuellement dans la mĂȘme problĂ©matique, comme s'il tournait en rond, et pourra mĂȘme dĂ©couvrir que si certains questions reviennent Ă  l'ordre du jour, elles le font selon un mouvement spirale qui ne pose plus de problĂšmes de la mĂȘme façon que l'annĂ©e prĂ©cĂ©dente. C'est la prise de conscience du chemin parcouru hier qui peut donner le courage d'en entreprendre un nouveau demain.
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Marie-Claire Dolghin-Loyer
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Sous le pont Mirabeau coule la Seine Et nos amours Faut-il qu'il m'en souvienne La joie venait toujours aprÚs la peine Vienne la nuit sonne l'heure Les jours s'en vont je demeure Les mains dans les mains restons face à face Tandis que sous Le pont de nos bras passe Des éternels regards l'onde si lasse Vienne la nuit sonne l'heure Les jours s'en vont je demeure L'amour s'en va comme cette eau courante L'amour s'en va Comme la vie est lente Et comme l'Espérance est violente Vienne la nuit sonne l'heure Les jours s'en vont je demeure Passent les jours et passent les semaines Ni temps passé Ni les amours reviennent Sous le pont Mirabeau coule la Seine Vienne la nuit sonne l'heure Les jours s'en vont je demeure
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Guillaume Apollinaire
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L'idĂ©e qu'on puisse enseigner sans difficultĂ© tient Ă  une reprĂ©sentation Ă©thĂ©rĂ©e de l'Ă©lĂšve. La sagesse pĂ©dagogique devrait nous reprĂ©sente le cancre comme l'Ă©lĂšve le plus normal qui soit : celui qui justifie pleinement la fonction de professeur puisque nous avons tout Ă  lui apprendre, Ă  commencer par la nĂ©cessitĂ© mĂȘme d'apprendre ! Or, il n'en est rien. Depuis la nuit des temps scolaires l'Ă©lĂšve considĂ©rĂ© comme normal est l'Ă©lĂšve qui oppose le moins de rĂ©sistance Ă  l'enseignement, celui qui ne douterait pas de notre savoir et ne mettrait pas notre compĂ©tence Ă  l'Ă©preuve, un Ă©lĂšve acquis d'avance, douĂ© d'une comprĂ©hension immĂ©diate, qui nous Ă©pargnerait la recherche des voies d'accĂšs Ă  sa comprenette, un Ă©lĂšve naturellement habitĂ© par la nĂ©cessitĂ© d'apprendre, qui cesserait d'ĂȘtre un gosse turbulent ou un adolescent Ă  problĂšmes pendant notre heure de cours, un Ă©lĂšve convainc dĂšs le berceau qu'il faut juguler ses appĂ©tits et ses Ă©motions par l'exercice de sa raison si on ne veut pas vivre dans une jungle de prĂ©dateurs, un Ă©lĂšve assurĂ© que la vie intellectuelle est une source de plaisirs qu'on peut varier Ă  l'infini, raffiner Ă  l'extrĂȘme, quand la plupart de nos autres plaisirs sont vouĂ©s Ă  la monotonie de la rĂ©pĂ©tition ou Ă  l'usure du corps, bref un Ă©lĂšve qui aurait compris que le savoir est la seule solution : solution Ă  l'esclavage oĂč nous maintiendrait l'ignorance et consolation unique Ă  notre ontologique solitude. (p. 268-269)
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Daniel Pennac (Chagrin d'école)
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le corps est une fulgurance, un advenu qui devrait ĂȘtre pressenti, narrĂ©, aimĂ© par celle ou celui qui l'habite, avant que les autres ne s'y intĂ©ressent, l'extorquent, l'Ă©crasent, puis le traĂźnent dans un ravin oĂč d'autres pourrissent depuis la nuit des temps

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Makenzy Orcel (Une somme humaine)
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Il regarde autour de lui la ville dans la nuit, les silhouettes tranquilles des passants, ses bùtiments, ses éclairages, les voitures qu'il croise, les feux aux carrefours, égrenant, imperturbables, leur code de couleurs, tout cet ordonnancement, ce décorum nocturne, opérationnel de la civilisation industrielle, et il se demande comment tout ça tient encore debout, tous ces réseaux, cette énergie, cet assemblage complexe, tant cela lui semble relever d'un chùteau de cartes auquel on en rajoute sans cesse une autre puis une autre en pariant sur la stabilité de l'ensemble. Il est persuadé, Jourdan, que ça va se casser la gueule, que les lumiÚres s'éteindront, que les images saturant les écrans, les voix surgies du lointain n'arriveront plus nulle part, perdues dans d'infranchissables distances comme ces oueds absorbés par le désert. Il ne sait pas quand ni comment mais il est sûr que ça se produira, chaos climatique, incendies géants, épidémies, les conjugaisons du pire sont déjà imprimées, leurs rÚgles implacables connues de tous, au futur exclusivement. Temps barbare vers quoi on apprend encore des enfants à marcher.
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Hervé Le Corre (Traverser la nuit)
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Le photographe Hessling, ancien Ă©tudiant du Bauhaus, faisait la guerre, en 1943, dans les armĂ©es de son pays. La nuit de NoĂ«l, au village de Novimgorod, tous les habitants reçurent l'ordre de sortir dans la neige et de chanter leurs cantiques Ă  la lueur des flambeaux tandis que les SS crucifiaient une jeune femme sur la porte de l'Ă©glise. Son agonie dura la nuit entiĂšre. Au lever du jour, la beautĂ© surnaturelle de son visage Ă©tait inondĂ©e de sourire et de larmes. Hessling s'approcha, s'agenouilla et, comme elle semblait dire oui, il la photographia. Peu aprĂšs, il Ă©tait exĂ©cutĂ© Ă  Kiev comme anti-nazi, traĂźtre Ă  l'Allemagne. Il avait eu le temps de remettre son nĂ©gatif Ă  Wolfgang Borchert. Hessling savait qu'aucune photographie dans le monde ne pouvait ĂȘtre comparĂ©e Ă  celle-ci. Il fit promettre Ă  Borchert de la dĂ©velopper au retour de la guerre, de la regarder, puis de la jeter dans l'Elbe, afin que jamais, dans aucun musĂ©e, on ne pĂ»t s'arrĂȘter et contempler cette crucifixion. MĂȘme avec des larmes. C'est peut-ĂȘtre en pensant Ă  cela que Maurice Blanchot, beaucoup plus tard, note dans L'Ă©criture du dĂ©sastre : "Il y a une limite oĂč l'exercice d'un art, quel qu'il soit, devient une insulte au malheur. Autoportrait en lecteur (page 60)
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Marcel Cohen
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Sinaia (II) Les montagnes font un tourbillon d'eau contre ta joue ; tu en dĂ©taches le bouquet mouillĂ© sur les sapins aux genoux ployĂ©s, Ă  la criniĂšre de nuit, chevaux rĂ©tifs, hennissants et captifs. Sur les bords de l'Ă©tang aux longs cils, je sais des rires de femmes engloutis et des regards limpides verdis comme la terrine. Une flamme annonce l'imminence du vide, et le chemin cerne l'Ă©tang, comme un couteau. Que de sang ! Le temps, le temps Ă©clate sur le couchant ; la forĂȘt a ce soir la folle effervescence de la bonde. Les cerfs ne savent rien de l'automne roux, et dans leur sommeil, Ăąmes de feuille aux pieds nus, ils rĂȘvent limiers, cors et chasseurs redoutĂ©s, venus s'emparaient du bocage, de ses bois, de ses sabots – et la forĂȘt, abattue, pleure, les narines palpitantes.
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Benjamin Fondane (Privelisti -si inedite-)
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] Pendant seize ans, de 1835 jusqu'en 1851, la Moldavie a plus vĂ©cu qu'Ă  travers les 500 annĂ©es Ă©coulĂ©es depuis sa fondation par le voĂŻvode Dragoș, en 1359, et jusqu'Ă  nos jours. La vie de nos parents s'est dĂ©roulĂ©e comme celle de nos ancĂȘtres, sereine comme une riviĂšre qui coule Ă  travers les vergers et les jardins et se perd sans trop de bruit dans le Siret. Les Ă©vĂ©nements du monde avoisinant s'amenuisaient vers les frontiĂšres, le tourbillon de l'Ă©poque les dĂ©couvrait et les laissait tels quels. Notre vie n'a rien Ă  voir avec la leur ; on pourrait mĂȘme dire que nous ne sommes pas leurs enfants. Nos parents sont nĂ©s dans le berceau ancestral ; les hommes de 1835, qui inaugurent la gĂ©nĂ©ration d'aujourd'hui, sont issus de l'agitation de nouvelles idĂ©es. Le regard et la pensĂ©e des parents Ă©taient tournĂ©s vers l'Orient ; les nĂŽtres sont fixĂ©s vers l'Occident : la diffĂ©rence est grande. Il y a un dicton paysan qui circule en Moldavie depuis la nuit des temps : « Le pauvre roi Étienne, que dirait-il en les voyant ? » (traduit du roumain par Mălina Sgondea Vuillet)
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Alecu Russo (Opere complete)
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Une discothĂšque. La nuit. Nina danse avec Éli Hooker, un jeune homme. NINA.– Tu es si lĂ©ger. ÉLI.– J'aime danser. J'aime aussi prendre un bon livre de temps en temps. Entre Zigui. Il va s'asseoir Ă  l'Ă©cart, commence Ă  manger des cacahouĂštes tout en les observant. ÉLI.– Qu'est-ce que tu fais dans la vie ? NINA.– Rien de particulier. Je lis moi aussi. Et je sculpte. ÉLI.– Tu auscultes ? Et qu'est-ce que tu auscultes ? NINA.– Je sculpte. Je fais de la poterie. ÉLI.– Ah. NINA.– Je prends mon temps, je ne cours pas. Pourquoi me prĂ©cipiter comme tout le monde ? À quoi bon cette fuite en avant, Ă  quoi bon ? À quoi bon, je te le demande ? ÉLI.– Tu as raison. NINA.– Et toi, qu'est-ce que tu fais dans la vie ? ÉLI.– Je lis un peu, j'Ă©cris un peu. NINA.– Des poĂšmes ? ÉLI.– Pour moi, la nuit. NINA.– Et le matin ? ÉLI.– Je suis mĂ©decin. NINA.– Tu dis « mĂ©decin » avec un tel dĂ©dain. Tu n'es vraiment pas comme les autres, toi. ÉLI.– Parce que c'est quoi un mĂ©decin ? Un mythe, rien de plus. NINA.– Tu es vraiment diffĂ©rent. (p. 133, extrait de Sur les valises)
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Hanoch Levin (Théùtre choisi Tome 4: Comédies grinçantes)
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Le roi Hiang (Xiang Yu n.n.) avait Ă©tabli son camp et Ă©levĂ© des retranchements Ă  Kai-hia : ses soldats Ă©taient mal nourris et Ă©puisĂ©s. L’armĂ©e de Han et les troupes des seigneurs renfermĂšrent dans un cercle de plusieurs rangs d'Ă©paisseur. De nuit, le roi Hiang entendit que de toutes parts, dans l’armĂ©e de Han, on chantait des chants de Tch’ou ; il en fut fort effrayĂ© et dit : « Han a-t-il gagnĂ© Ă  lui toute la population de Tch’ou ? Comment va-t-il tant de gens de Tch’ou ? » Le roi Hiang se leva alors pendant la nuit pour boire dans sa tente ; il avait une belle femme, nommĂ©e Yu qui toujours l’accompagnait, et un excellent cheval nommĂ© Tchoei, que toujours il montait ; le roi Hiang chanta donc tristement ses gĂ©nĂ©reux regrets; il fit sur lui-mĂȘme ces vers : « Ma force dĂ©racinait les montagnes ; mon Ă©nergie dominait le monde ; Les temps ne me sont plus favorables ; Tchoei ne court plus ; Si Tchoei ne court plus, que puis-je faire ? Yu ! Yu ! Qu'allez-vous devenir ? » Il chanta plusieurs stances et sa belle femme chantait avec lui. Le roi Hiang versait d’abondantes larmes ; tous les assistants pleuraient et aucun d’eux ne pouvait lever la tĂȘte pour le regarder. Puis le roi Hiang monta Ă  cheval, et, avec une escorte d’environ huit cents cavaliers excellents de sa garde, il rompit, Ă  la tombĂ©e de la nuit, le cercle qui l’enserrait, sortit du cĂŽtĂ© du sud, et galopa jusqu’au jour

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China, Sima Qian, Xiang Yu
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Le roi Hiang (Xiang Yu n.n.) avait Ă©tabli son camp et Ă©levĂ© des retranchements Ă  Kai-hia : ses soldats Ă©taient mal nourris et Ă©puisĂ©s. L’armĂ©e de Han et les troupes des seigneurs renfermĂšrent dans un cercle de plusieurs rangs d'Ă©paisseur. De nuit, le roi Hiang entendit que de toutes parts, dans l’armĂ©e de Han, on chantait des chants de Tch’ou ; il en fut fort effrayĂ© et dit : « Han a-t-il gagnĂ© Ă  lui toute la population de Tch’ou ? Comment va-t-il tant de gens de Tch’ou ? » Le roi Hiang se leva alors pendant la nuit pour boire dans sa tente ; il avait une belle femme, nommĂ©e Yu qui toujours l’accompagnait, et un excellent cheval nommĂ© Tchoei, que toujours il montait ; le roi Hiang chanta donc tristement ses gĂ©nĂ©reux regrets; il fit sur lui-mĂȘme ces vers : « Ma force dĂ©racinait les montagnes ; mon Ă©nergie dominait le monde ; Les temps ne me sont plus favorables ; Tchoei ne court plus ; Si Tchoei ne court plus, que puis-je faire ? Yu ! Yu ! Qu'allez-vous devenir ? » Il chanta plusieurs stances et sa belle femme chantait avec lui. Le roi Hiang versait d’abondantes larmes ; tous les assistants pleuraient et aucun d’eux ne pouvait lever la tĂȘte pour le regarder. Puis le roi Hiang monta Ă  cheval, et, avec une escorte d’environ huit cents cavaliers excellents de sa garde, il rompit, Ă  la tombĂ©e de la nuit, le cercle qui l’enserrait, sortit du cĂŽtĂ© du sud, et galopa jusqu’au jour

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Sima Qian (Mémoires historiques - DeuxiÚme Section (French Edition))
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Dans cet espace, oĂč les masses de pierre semblent Ă©craser tout, la source se montre si frĂȘle, qu’il ne serait pas Ă©tonnant que sa vie s’éteignĂźt un instant aprĂšs. Étonnante est, au contraire, la tĂ©mĂ©ritĂ© avec laquelle elle affirme son existence face aux pics altiers. Dans la nuit saisie d’étonnement, l’Olt commence son histoire, digne d’ĂȘtre Ă©coutĂ©e, dans un recueillement absolu, par les montagnes, par les hommes, par l’univers entier. À l’éternitĂ© des montagnes, il oppose une autre Ă©ternitĂ© : celle de l’eau qui jaillit du rocher et qui, par ce dont elle est composĂ©e, est plus vieille que toutes les montagnes rĂ©unies. Des centaines et des milliers de siĂšcles sont condensĂ©s dans le chuchotement de la source, l’un sous l’autre, remontant de plus en plus loin, jusque dans la nuit et avant la nuit des temps. Dans ce lit d’ùres, l’eau coule sur son passĂ©, comme sur une roche gigantesque, dont la couche la plus profonde remonte Ă  l’instant oĂč la terre s’est dĂ©tachĂ©e du soleil. C’est alors qu’elle a commencĂ© Ă  exister, et, depuis lors, dans chaque molĂ©cule et dans son Ă©norme totalitĂ©, elle est restĂ©e la mĂȘme. Le mince filet de l’Olt provient directement des masses liquides gĂ©antes qui ont recouvert la planĂšte, Ă  l’époque oĂč les continents Ă©taient encore loin de naĂźtre. Depuis, dans les ruisseaux, dans les fleuves, dans les mers, l’eau est restĂ©e la mĂȘme : Ă©lĂ©mentaire, unique. (traduction Dolores Toma)
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Geo Bogza (Cartea Oltului)
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« Jamais plus je ne m'isolerai des humains, quoi qu'il arrive. Je souffrirai avec eux, en mĂȘme temps qu'eux, par compassion pour eux », pensa-t-elle, comprenant qu'elle n'Ă©tait pas exceptionnelle et qu'Ă  toute crĂ©ature humaine qui, malgrĂ© les Ă©checs, trouve en elle la force de chercher et de comprendre, il Ă©tait donnĂ© de connaĂźtre la joie. Ana sut qu'elle Ă©tait libre enfin, prĂȘte Ă  accepter la vie, et elle se sentit envahie par un sentiment de gratitude Ă  l'Ă©gard de ZoĂ© qui, elle aussi, tout en dĂ©truisant sa propre existence, avait pu la guider entre le jour et la nuit. (p. 286)
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Henriette Yvonne Stahl (Între zi Ɵi noapte)