Cet Quotes

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Il est bon de n'avoir pas à alimenter une conversation. D'où vient la difficulté de la vie en société? De cet impératif de trouver toujours quelque chose à dire.
Sylvain Tesson (Dans les forêts de Sibérie)
Ce matin, l'idée m'est venue pour la première fois que mon corps, ce fidèle compagnon, cet ami plus sûr, mieux connu de moi que mon âme, n'est qu'un monstre sournois qui finira par dévorer son maître.
Marguerite Yourcenar (Memoirs of Hadrian)
Victor Hugo n’est pas uniquement reconnu pour ses œuvres, cet intellectuel engagé et influent est reconnu surtout pour sa carrière politique très importante et son influence énorme sur l’histoire de la France.
Mouloud Benzadi
Quand j'arrive à la gare de l'Est, j'espère toujours secrètement qu'il y aura quelqu'un pour m'attendre. C'est con. J'ai beau savoir que ma mère est encore au boulot à cette heure-là et que Marc est pas du genre à traverser la banlieue pour porter mon sac, j'ai toujours cet espoir débile. [...] Je voudrais que quelqu'un m'attende quelque part... C'est quand même pas compliqué.
Anna Gavalda (I Wish Someone Were Waiting for Me Somewhere)
Nous ne faisions rien de mal cet après-midi-là. Et c'est cela à mon avis le seul sens à donner à sa vie: trouver son bonheur sans augmenter la douleur du monde.
Dany Laferrière (L'art presque perdu de ne rien faire)
La pensée n'est qu'un écliar au milieu d'une longue nuit. Mais c'est cet éclair qui est tout. Thought is only a flash in the middle of a long night. But this flash means everything.
Henri Poincaré (The Value of Science: Essential Writings of Henri Poincare (Modern Library Science))
Je crois que c'est moi qui ai changé: c'est la solution la plus simple. La plus désagréable aussi. Mais einfin je dois reconnaître que je suis sujet à ces transformations soudaines. Ce qu'il y a, c'est que je pense très rarement; alors une foule depetites métamorphoses s'accumulent en moi sans que j'y prenne garde et puis, un beau jour, il se produit une véritable révolution. C'est ce qui a donné à ma vie cet aspect huerté, incohérent.
Jean-Paul Sartre (Nausea)
Non, Thérèse, non, il n’est point de Dieu, la nature se suffit à elle-même ; elle n’a nullement besoin d’un auteur, cet auteur supposé n’est qu’une décomposition de ses propres forces
Marquis de Sade (Justine ou les malheurs de la vertu)
Un peu, beaucoup, passionnément. Une femme veut toujours son enfant. Mais elle en a peur quand l'amour rassurant n'est pas là. Cet amour qui pousse les poussettes, qui cueille des noisettes et s'inquiète à la première rougeole.
Malek Haddad (L'élève Et La Leçon)
Ce n'est pas pour devenir écrivain qu'on écrit. C'est pour rejoindre en silence cet amour qui manque à tout amour. C'est pour rejoindre le sauvage, l'écorché, le limpide. On écrit une langue simple. On ne fait aucune différence entre l'amour, la langue et le chant. Le chant c'est l'amour. L'amour c'est un fleuve. Il disparaît parfois. Il s'enfonce dans la terre. Il poursuit son cours dans l'épaisseur d'une langue. Il réapparaît ici ou là, invincible, inaltérable.
Christian Bobin (La part manquante)
On aime sa mère presque sans le savoir, et on ne prend conscience de toute la profondeur des racines de cet amour qu au moment de la séparation dernière.
Guy de Maupassant
Les médias reflètent ce que disent les gens, les gens reflètent ce que disent les médias. Ne va-t-on jamais se lasser de cet abrutissant jeu de miroirs?
Amin Maalouf (The First Century After Beatrice)
Cet homme paraissait être tellement fatigué de sa vie qu'il ne voulait même pas vivre ses dernières heures éveillé.
Patrick Süskind (Perfume: The Story of a Murderer)
Le même sentiment d'inappartenance, de jeu inutile, où que j'aille : je feins de m'intéresser à ce qui ne m'importe guère, je me trémousse par automatisme ou par charité, sans jamais être dans le coup, sans jamais être quelque part. Ce qui m'attire est ailleurs, et cet ailleurs je ne sais ce qu'il est.
Emil M. Cioran
Je laisse Sisyphe au bas de la montagne ! On retrouve toujours son fardeau. Mais Sisyphe enseigne la fidélité supérieure qui nie les dieux et soulève les rochers. Lui aussi juge que tout est bien. Cet univers désormais sans maître ne lui paraît ni stérile ni fertile. Chacun des grains de cette pierre, chaque éclat minéral de cette montagne pleine de nuit, à lui seul, forme un monde. La lutte elle-même vers les sommets suffit à remplir un cœur d'homme. Il faut imaginer Sisyphe heureux.
Albert Camus (The Myth of Sisyphus and Other Essays)
Je n'ai pas rêvé cet héroïsme. Je l'ai choisi. On est ce qu'on veut.
Jean-Paul Sartre (No Exit)
La nature et les circonstances semblaient avoir fait cette femme pour cet homme, et les avoir poussés l'un vers l'autre.
Émile Zola (Thérèse Raquin)
A cet instant, il se produisit un événement comme il en arrive un ou deux dans une vie. Un coup de foudre. Il n'y a pas d'autre mot pour qualifier ce qui se passa entre eux. Ils se regardèrent longtemps.
Jean-Michel Guenassia (Le Club des incorrigibles optimistes)
مرگ حاصل از پرخوری هیچ نظری را برنمی‌انگیزد، نادان زیستن است این، وحشیگریِ هر روزه است. ابداع باید کرد مدام و طرد کرد هرآنچه حاضر و آماده است؛ هم در زندگی و هم در کتاب‌ها
Yann Andréa (Cet Amour-là)
On veut gagner de l'argent pour vivre heureux et tout l'effort et le meilleur d'une vie se concentrent pour le gain de cet argent. le bonheur est oublié, le moyen pris pour la fin.
Albert Camus (The Myth of Sisyphus)
Le grand monde a son argot. Mais cet argot s'appelle le style.
Honoré de Balzac (Splendeurs et miseres des courtisanes. Ou menent les mauvais chemins)
J'ai consulté mon téléphone: je n'avais aucun message. C'est à cela que servent les téléphones portables, à se rendre compte que personne ne pense à vous. Avant, on pouvait toujours rêver que quelqu'un cherchait à vous joindre, à vous parler, à vous aimer. Nous vivons maintenant avec cet objet qui matérialise notre solitude.
David Foenkinos (La tête de l'emploi)
Pour elle, aimer, c'était prendre tous les risques et donner notre vie pour quelqu'un, oui, l'amour était une chose de cet ordre. Mais dans la vie, cela ne se produisait qu'une seule fois.
Orhan Pamuk (The Museum of Innocence)
Rayner avait sans doute une dizaine d'années de plus que moi. Ce qui ne pose en soi aucun problème. J'entretiens des relations chaleureuses, sans bras cassés, avec quantité de personnes de cet âge.
Hugh Laurie (The Gun Seller)
Il disparut à jamais, cet être sans défense à qui personne n'avait jamais témoigné d'affection, ni porté le moindre intérêt, non, personne, pas même l'un de ces naturalistes toujours prêts à épingler la plus banale des mouches pour l'examiner au microscope.
Nikolai Gogol (The Overcoat)
En une seule fleur Enchantée de cet artifice, ton abondance l’avait osé. Tu étais assez riche, pour devenir cent fois toi-même en une seule fleur; c’est l’état de celui qui aime Mais tu n’as pas pensé ailleurs.
Rainer Maria Rilke (The Complete French Poems of Rainer Maria Rilke)
Le coeur peut s'émouvoir souvent à la rencontre d'un autre être,car chacun exerce sur chacun des attractions et des répulsions.Toutes ces influences font naître l'amitié,les caprices,des envies de possession,des ardeurs vives et passagères,mais non pas l'amour véritable.Pour qu'il existe cet amour,il faut que les deux êtres soient tellement nés l'un pour l'autre,se trouvent accrochés l'un à l'autre par tant de points,par tant de goûts pareils,par tant d'affinités de chair,de l'esprit,du caractère,se sentent liés par tant de choses de toute nature,que cela forme un faisceau d'attaches.
Guy de Maupassant (Fort comme la mort)
A quatre heures du matin, on ne fait rien en général et l’on dort, même si la nuit a été une nuit de trahison. Oui, on dort à cette heure-là, et cela est rassurant puisque le grand désir d’un coeur inquiet est de posséder interminablement l’être qu’il aime ou de pouvoir plonger cet être, quand le temps de l’absence est venu, dans un sommeil sans rêves qui ne puisse prendre fin qu’au jour de la réunion.
Albert Camus (The Plague)
Sonnez, grelots; sonnez, clochettes; sonnez, cloches! Car mon rêve impossible a pris corps et je l’ai Entre mes bras pressé : le Bonheur, cet ailé Voyageur qui de l’Homme évite les approches, - Sonnez grelots; sonnez, clochettes, sonnez, cloches! Le Bonheur a marché côte à côte avec moi; Mais la FATALITÉ ne connaît point de trêve : Le ver est dans le fruit, le réveil dans le rêve, Et le remords est dans l’amour : telle est la loi. - Le Bonheur a marché côte à côte avec moi.
Paul Verlaine (Poèmes saturniens)
Y a-t-il au monde un bien plus précieux que l'amitié ? Cet amour désintéressé qui ne souhaite que le bonheur de l'ami et ne cesse de se réjouir de sa présence ?
Frédéric Lenoir (Coeur de cristal)
Je méprise un homme qui peut être satisfait par une moelle épinière, cet homme ne mérite pas un cerveau humain.
Albert Einstein (The World As I See It)
Nécessité absolue trouver origine de cet emmerdement [It is absolutely necessary to find the origin of this pain in the ass]. —Jacques Monod
Siddhartha Mukherjee (The Gene: An Intimate History)
Il était encore trop jeune pour savoir que la mémoire du cœur efface les mauvais souvenirs et embellit les bons, et que c'est grâce à cet artifice que l'on parvient à accepter le passé.
Gabriel García Márquez (Love in the Time of Cholera)
Parfois, c'est l'humilité qui commande notre silence. Pas la glorieuse humilité des analystes professionnels, mais la conscience intime, solitaire, presque douloureuse, que cette lecture-ci, que cet auteur-là, viennent, comme on dit, de « changer ma vie » !
Daniel Pennac (Comme un roman)
Il y a des époques fatales où la prière, cet hymne naturel que Dieu a mis au fond du cœur de l’homme, devient suspecte aux yeux des hommes, car la prière est un acte d’espoir ou de reconnaissance.
Alexandre Dumas (The Knight of Maison-Rouge)
Ellana songea que si l'harmonie d'un être résidait dans son équilibre, cet équilibre ne se réduisait pas à des capacités physiques ou mentales. On le retrouvait partout. Dans sa façon de vivre sa relation aux autres, de voyager, de dormir, de manger, ou, pourquoi pas, d'aimer.
Pierre Bottero (Ellana, l'Envol (Le Pacte des MarchOmbres, #2))
Ce n’est pas lui, cette bête déchaînée. Pourtant, il s’est rarement senti aussi bien que pendant cet accès de rage… comme s’il était enfin lui-même. Mais quel genre de monstre faut-il être pour éprouver ces choses-là ?
Myra Eljundir (Kaleb (Kaleb, #1))
Je t'ai vu en companie de cet homme, et le regard que tu lui portais était celui que j'aurais rêvé voir dans tes yeux alors que tu me regardais. Il avait l'air si grand à tes côtés, et moi si petit dans cette allée. Si j'avais pu être cet homme, je t'aurais tout donné, mais je n'étais que moi, l'ombre de celui que tu avais aimé alors que nous étions enfants, l'ombre de l'adulte que j'étais devenu.
Marc Levy (Le Voleur d'ombres)
Nos vies sont les mêmes. Nos vies se débattent, crient dans la nuit, hurlent et tremblent de peur. Infiniment nous cherchons un abri. Un lieu où le vent siffle moins fort. Un endroit où aller. Et cet abri est un visage, et ce visage nous suffit.
Olivier Adam
C'est pourtant nous qui t'avons proposé de remplir ton calice. Enchantée de cet artifice, ton abondance l'avait osé. Tu étais assez riche, pour devenir cent fois toi-même en une seule fleur; c'est l'état de celui qui aime ... Mais tu n'as pas pensé ailleurs.
Rainer Maria Rilke (The Complete French Poems of Rainer Maria Rilke)
«Sophie, s'exclama à nouveau Bruno, sais-tu ce que Nietzsche a écrit de Shakespeare? "Ce que cet homme a dû souffrir pour éprouver un tel besoin de faire le pitre!..." Shakespeare m'a toujours paru un auteur surfait; mais c'est, en effet, un pitre considérable.» II s'interrompit, prit conscience avec surprise qu'il commençait réellement à souffrir. Les femmes, parfois, étaient tellement gentilles; elles répondaient à l'agressivité par la compréhension, au cynisme par la douceur. Quel homme se serait comporté ainsi?
Michel Houellebecq (The Elementary Particles)
J'ai écouté le sermon du prêtre qui officiait devant la tombe de ma mère. On ne perd jamais ses parents, même après leur mort ils vivent encore en vous. Ceux qui vous ont conçu, qui vous ont donné tout cet amour afin que vous surviviez ne peuvent pas disparaître. Le prêtre avait raison, mais l'idée de savoir qu'il n'est plus d'endroit dans le monde où ils respirent, que vous n'entendrez plus leur voix, que les volets de votre maison d'enfance seront clos à jamais, vous plonge dans une solitude que même Dieu n'avait pu concevoir.
Marc Levy (Le Voleur d'ombres)
Cet inconnu me regarde pendant que j'éprouve une émotion ; vite cessons ce spectacle indigne
Éric Dupont (La Fiancée américaine)
Cet homme est dangereux, il croit tout ce qu'il dit.
Honoré-Gabriel Riqueti
Il s’était tant de fois entendu dire ces choses, qu’elles n’avaient pour lui rien d’original. Emma ressemblait à toutes les maîtresses ; et le charme de la nouveauté, peu à peu tombant comme un vêtement, laissait voir à nu l’éternelle monotonie de la passion, qui a toujours les mêmes formes et le même langage. Il ne distinguait pas, cet homme si plein de pratique, la dissemblance des sentiments sous la parité des expressions. Parce que des lèvres libertines ou vénales lui avaient murmuré des phrases pareilles, il ne croyait que faiblement à la candeur de celles-là ; on en devait rabattre, pensait-il, les discours exagérés cachant les affections médiocres ; comme si la plénitude de l’âme ne débordait pas quelquefois par les métaphores les plus vides, puisque personne, jamais, ne peut donner l’exacte mesure de ses besoins, ni de ses conceptions, ni de ses douleurs, et que la parole humaine est comme un chaudron fêlé où nous battons des mélodies à faire danser les ours, quand on voudrait attendrir les étoiles.
Gustave Flaubert (Madame Bovary)
Quelles sont les probabilités de se perdre dans la campagne irlandaise sur un trajet de moins de dix kilomètres ? Très faibles. Cette probabilité devient nulle lorsqu'on s'arme d'un système de localisation dernière génération. Et pourtant je peux désormais dire que j'ai réussi cet exploit.
Elisia Blade (Hollywood en Irlande (Crush Story #1))
Monfleury est en vente, je perds cinquante mille francs, s'il le faut, mais je suis tout joyeux, je quitte cet enfer d'hypocrisie et de tracasseries. Je vais chercher la solitude et la paix champêtre au seul lieu où elles existent en France, dans un quatrième étage donnant sur les Champs-Élysées.
Stendhal (The Red and the Black)
ce qui convainc de la nécessité de la vie future, ce ne sont pas les raisonnements mais ceci : tu marches dans la vie la main dans la main avec un homme, et tout à coup, cet homme disparaît là-bas dans le néant, et toi tu restes devant cet abîme et tu y plonges ton regard (Guerre et Paix, livre deuxième, 2ième partie, ch. XII)
Leo Tolstoy
Essayez donc de vous dégager de tout ce qui vous enferme, faites cet effort surhumain de sortir vivant de votre corps, de vos intérêts, de vos pensées et de l’humanité tout entière, pour regarder ailleurs, et vous comprendrez combien ont peu d’importance les querelles des romantiques et des naturalistes, et la discussion du budget. »
Guy de Maupassant (Bel-Ami)
L'idéal de l'amour est certainement la fidélité éternelle. Les lois morales et religieuses ont voulu consacrer cet idéal; les faits matériels le troublent, les loi civiles sont faites de maniére à le rendre souvent impossible ou illusoire.
George Sand
Temperee, riante, (comme le sont celles d'automne dans la tres gracieuse ville de Buenos Aires) resplendissait la matinee de ce 28 avril: dix heures venait de sonner aux horloges et, a cet instant, eveillee, gesticulant sous le soleil matinal, la Grande Capitale du Sud etait un epi d'hommes qui se disputaient a grands cris la possession du jour et de la terre.
Leopoldo Marechal (Adán Buenosayres)
Il y a cet entassement des corps dans le wagon cette lancinante douleur dans le genou droit. Les jours les nuits. Je fais un effort et j'essaye de compter les jours de compter les nuits. Ca m'aidera peut-être à y voir clair. Quatre jours cinq nuits. Mais j'ai dû mal compter ou alors il y a des jours qui se sont changés en nuits. J'ai des nuits en trop des nuits à revendre.
Jorge Semprún (The Long Voyage)
Et la jeune fille s’était dressée comme pour aller à son tour se tuer, se jeter à son tour dans la mer et après elle avait pleuré parce qu’elle avait pensé à cet homme de Cholen et elle n’avait pas été sûre tout à coup de ne pas l’avoir aimé d’un amour qu’elle n’avait pas vu parce qu’il s’était perdu dans l’histoire comme l’eau dans le sable et qu’elle le retrouvait seulement maintenant à cet instant de la musique jetée à travers la mer. Comme plus tard l’éternité du petit frère à travers la mort
Marguerite Duras (The Lover)
Le vin est la gaieté, dit-on ; comment cet océan de vin qui submerge la commune de Bercy n’égaye-t-il pas un peu ces navrants paysages ? Tout Bacchus est là ; Bacchus, chanté avec tant de constance par nos poètes ébriolants. Bacchus ne peut-il rasséréner ces horizons en deuil ? ou faut-il croire que Bacchus lui-même, ennemi de l’eau, est incommodé par le voisinage de la rivière ?
Paul Féval père (Le Chevalier Ténèbre (French Edition))
Elle aura donc menti jusqu'au bout! Où est-elle! Pas là... pas au ciel... pas anéantie...où? Oh! tu disais que tu n'avais pas souci de mes souffrances. Et moi, je fais une prière... je la répète jusqu'à ce que ma langue s'engourdisse : Catherine Earnshaw, puisses-tu ne pas trouver le repos tant que je vivrais! Tu dis que je t'ai tuée, hante-moi alors! Les victimes hantent leurs meurtrier, je crois. Je sais que des fantômes ont erré sur la terre. Sois toujours avec moi... prends n'importe quelle forme... rends-moi fou! mais ne me laisse pas dans cet abîme où je ne puis te trouver. Oh! Dieu! c'est indicible! je ne peux pas vivre sans ma vie! je ne peux pas vivre sans mon âme!
Emily Brontë (Wuthering Heights)
Dis-moi, rose, d'où vient qu'en toi-même enclose, ta lente essence impose à cet espace en prose tous ces transports aérien? Combien de fois cet air prétend que les choses le trouent, ou, avec une moue, il se montre amer. Tandis qu'autour de ta chair, rose, il fait la roue.
Rainer Maria Rilke (The Complete French Poems of Rainer Maria Rilke)
Alors voilà, nous y sommes. Tu es gravée dans mon coeur, Clark. Tu l'as été dès le premier jour où tu es arrivée avec tes fringues à la con, tes blagues moisies et ton incapacité absolue à dissimuler ce que tu ressens. Tu as changé ma vie infiniment plus que cet argent ne pourra changer la tienne.
Jojo Moyes
Le sentiment d'être élu est présent, par exemple, dans toute relation amoureuse. car l'amour, par définition, est un cadeau non mérité ; être aimé sans mérite, c'est même la preuve d'un vrai amour. Si une femme me dit : je t'aime parce que tu es intelligent, parce que tu es honnête, parce que tu m'achètes des cadeaux, parce que tu ne dragues pas, parce que tu fais la vaiselle, je suis déçu ; cet amour a l'air de quelque chose d'intéressé. Combien il est plus beau d'entendre : je suis folle de toi bien que tu ne sois ni intelligent ni honnête, bien que tu sois menteur, égoïste, salaud. (chapitre 15)
Milan Kundera (Slowness)
Le mariage pour moi n'est pas une chaîne, mais une association. J'entends être libre, tout à fait libre de mes actes, de mes démarches, de mes sorties, toujours. Je ne pourrais tolérer ni contrôle, ni jalousie, ni discussion sur ma conduite. Je m'engagerais, bien entendu, à ne jamais compromettre le nom de l'homme que j'aurais épousé, à ne jamais le rendre odieux ou ridicule. Mais il faudrait aussi que cet homme s'engageât à voir en moi une égale, une alliée, et non pas une inférieure ni une épouse obéissante et soumise. Mes idées, je le sais, ne sont pas celles de tout le monde, mais je n'en changerai point. Voilà.
Guy de Maupassant
Dans chaque démocratie libérale s'est élaboré un imaginaire de citoyenneté au sein duquel la projection dans l'avenir est devenue plus significative que le poids du passé. Cet imaginaire s'est traduit par des normes juridiques, et a même pénétré par la suite à l'intérieur du système éducatif étatique.[...] La souffrance du passé justifie le prix exigé de la part des citoyens dans le présent. L'héroïsme des temps qui s'éloignent promet un avenir rayonnant pour l'individu, du moins sûrement pour la nation. L'idée nationale est devenue, avec l'aide des historiens, une idéologie optimiste par nature. De là, notamment, vient son succès.
Shlomo Sand (The Invention of the Jewish People)
De fait il [le prénom "Yugrthen"] a dû être couramment en usage au moins jusqu'au VIIIe siècle de l'Hégire (XIVe siècle de l'ère chrétienne), comme l'atteste un document notarial marocain * daté de l'année musulmane 731, où un "Yugrthen" est cité par les ayants droit à un héritage, en fin de liste, place que lui assigne sa qualité de benjamin. * Cet acte notarial a fait partie des manuscrits exposés en 1979 par le ministère marocain de la Culture. La Bibliothèque générale de Rabat en détient un microfilm.
Mohammed Chafik (من أجل مغارب مغاربية بالأولوية - Pour un maghreb d'abord maghrébin)
Paul l'a écoutée, sans ciller, sans répliquer ; son beau visage détruit est demeuré impassible. A la fin, il a seulement glissé : "Je me demandais quand tu te déciderais à me faire cet aveu. Je me demandais lequel de vous deux viendrait le faire. Ce que tu m'annonces, je le sais depuis longtemps. Je le sais depuis le jour de mon retour, depuis la seconde exacte où tu as posé ton regard sur moi. C'était sur toi, l'effroi, la honte, la gêne, et puis aussi la légèreté des femmes amoureuses. C'était immanquable.
Philippe Besson (La Trahison de Thomas Spencer)
... m'emplissait d'un bonheur vivant, d'un vrai bonheur. J'en avais sur la peau, j'en avais dans la chair, j'en avais dans le sang; il descendait jusque dans l'âme. A cet âge-là on est ignorant. Mais je sentais bien que ma joie de vivre était plus grande que mon corps, et je me disais: "Pascalet, c'est l'ange du Bon Dieu qui remue de plaisir en toi. Traite-le bien." Pascalet ~ "L'enfant et la rivière Traduction en grecque: ... με γέμιζε με μια ευτυχία ζωντανή, με μια πραγματική ευτυχία. Την αισθανόμουν πάνω στο δέρμα μου, μέσα στη σάρκα μου, μέσα στο αίμα μου · κατέβαινε μέχρι την ψυχή μου. Δεν ήξερα τι είναι η ψυχή. Σε αυτή την ηλικία δε γνωρίζουμε πολλά. Όμως αισθανόμουν έντονα ότι η χαρά του να ζω ήταν μεγαλύτερη από το σώμα μου και έλεγα στον εαυτό μου: "Πασκαλέ, είναι ο άγγελος του Καλού Θεού που κινεί την ευτυχία μέσα σου. Φέρσου της καλά".
Henri Bosco (L'enfant et la rivière)
Joseph Voilà c'que c'est, mon vieux Joseph Que d'avoir pris la plus jolie Parmi les filles de Galilée Celle qu'on appelait Marie Tu aurais pu, mon vieux Joseph Prendre Sarah ou Déborah Et rien ne serait arrivé Mais tu as préféré Marie Tu aurais pu, mon vieux Joseph Rester chez toi, tailler ton bois Plutôt que d'aller t'exiler Et te cacher avec Marie Tu aurais pu, mon vieux Joseph Faire des petits avec Marie Et leur apprendre ton métier Comme ton père te l'avait appris Pourquoi a-t-il fallu, Joseph Que ton enfant, cet innocent Ait eu ces étranges idées Qui ont tant fait pleurer Marie Parfois je pense à toi, Joseph Mon pauvre ami, lorsque l'on rit De toi qui n'avais demandé Qu'à vivre heureux avec Marie
Georges Moustaki
Si votre pensée s’élance dans l’espace et dans le temps ; si elle embrasse l’infinie simultanéité des faits qui se passent sur toute la surface de la terre, qui n’est qu’une planète tournant autour du soleil, – qui n’est lui-même qu’un centre particulier au milieu de l’espace ; si vous songez que cet infini simultané n’est qu’un instant de l’éternité, qui est un autre infini, que tout cela vous apparaît différemment, suivant le point de vue où vous vous placez, et qu’il y en a une infinité de points de vue ; si vous songez que la raison de tout cela, l’essence de toutes ces choses vous est inconnue, et si vous agitez dans votre esprit ces éternels problèmes, qu’est-ce que tout cela ? que suis-je moi-même au milieu de cet infini?
Pierre Loti (Aziyadé : suivi de Fantôme d'Orient)
We shouldn’t have tried to create new symbols,” he said. We should’ve realized we weren’t supposed to introduce uncertainties into accepted belief, that we weren’t supposed to stir up curiosity about God. We are daily confronted by the terrifying instability of all things human, yet we permit our religions to grow more rigid and controlled, more conforming and oppressive. What is this shadow across the highway of Divine Command? It is a warning that institutions endure, that symbols endure when their meaning is lost, that there is no summa of all attainable knowledge. "Admission" of C.E.T. Chairman Toure Bomoko, in "Appendix II: The Religion of Dune
Frank Herbert (Dune (Dune, #1))
L'Avion est une machine sans doute, mais quel instrument d'analyse! Cet instrument nous a fait découvrir le vrai visage de la terre. Les routes, en effet, durant des siècles, nous ont trompés. Nous ressemblions à cette souveraine qui désira visiter ses sujets et connaître s'ils se réjouissaient de son règne. Ses courtisans, afin de l'abuser, dressèrent sur son chemin quelques heureux décors et payèrent des figurants pour y danser. Hors du mince fil conducteur, elle n'entrevit rien de son royaume, et ne sut point qu'au large des campagnes ceux qui mourraient de faim la maudissaient. (Terre des Hommes, ch. IV)
Antoine de Saint-Exupéry
Une goutte de pluie tomba dans la mer, et fut tout interdite. "Ô mer, s'écria-t-elle, je suis si peu de chose dans ton immensité!" Pour la récompense de son humilité, Dieu ordonna à un coquillage de l'abriter et de la nourrir. Elle se transforma en une perle splendide, que l'on incrusta dans la couronne d'un roi. Dieu lui fit cet honneur, parce qu'elle avait été humble. Elle vécut, parce qu'elle s'était comparée au néant.
Saadi (بوستان سعدی)
Je me suis dit, pour la énième fois, que le corps s'éteignait quand la douleur devenait insoutenable, que la conscience était un état fugitif, que ça allait passer. Mais, comme chaque fois, je n'ai pas baissé le rideau. Je suis restée sur la grève à me faire lessiver par les vagues, sans me noyer. (…) Crier ne faisait qu'empirer les choses. Toutes les stimulations, en fait. La seule solution était de défaire le monde, de le rendre noir et silencieux, inhabité, de revenir au moment qui avait précédé le big bang, au commencement où était le Verbe, et de vivre dans cet espace vide et non existant avec le Verbe. On parle souvent du courage des malades du cancer, et je ne nie pas ce courage. Ça faisait des années que, malgré les coups et le poison dans mes veines, j'étais toujours sur pied. Mais vous pouvez me croire, à cet instant, j'aurais été ravie de mourir. 
John Green (The Fault in Our Stars)
Ce chaton en peluche, par exemple, accroché à la clef des toilettes : voilà un objet qui ne joue assurément qu'un rôle mineur dans l'histoire de l'humanité... mais, puisque la propriétaire de ce café l'a jugé digne d'être préposé à cet emploi, il doit signifier quelque chose pour elle. L'a-t-elle acheté elle-même? reçu en cadeau? Lui a-t-il fait pensé à un chat qu'elle a aimé, enfant, et qui est mort écrasé par une voiture ou massacré par un chien?
Nancy Huston
Considérez dans son martyre spirituel cet être qui gît les yeux clos, disloqué comme la victime d'un accident brutal qui ne nécessite plus ni attention ni secours. Dénombrez les coups de couteau de la hideuse déception dans l'imagination humaine. Auscultez ce désert songeur où alternent le râle et le silence. Apitoyez-vous sur la douleur qui appelle non seulement la mort, mais une mort disgraciée, et recevez, ô Monde, ce poids de rêve piétiné dans le paradis sans conscience de votre vaine éternité ! -Prière
Anna de Noailles (L'Offrande)
Je disais que le monde est absurde et j'allais trop vite. ce monde en lui-même n'est pas raisonnable, c'est tout ce qu'on en peut dire. Mais ce qui est absurde, c'est la confrontation de cet irrationnel et de ce désir éperdu de clarté dont l'appel résonne au plus profond de l'homme. L'absurde dépend autant de l'homme que du monde. Il est pour le moment leur seul lien. Il les scelle l'un à l'autre comme la haine seule peut river les êtres. C'est tout ce que je puis discerner clairement dans cet univers sans mesure où mon aventure se poursuit.
Albert Camus (The Myth of Sisyphus)
Avez-vous remarqué que la mort seule réveille nos sentiments? Comme nous aimons les amis qui viennent de nous quitter, n’est-ce pas? Comme nous admirons ceux de nos maîtres qui ne parlent plus, la bouche pleine de terre! L’hommage vient alors tout naturellement, cet hommage que, peut-être, ils avaient attendu de nous toute leur vie. Mais savez-vous pourquoi nous sommes toujours plus justes et plus généreux avec les morts? La raison est simple ! Avec eux, il n’y a pas d’obligation. Ils nous laissent libres, nous pouvons prendre notre temps, caser l’hommage entre le cocktail et une gentille maîtresse, à temps perdu, en somme. S’ils nous obligeaient à quelque chose, ce serait à la mémoire, et nous avons la mémoire courte. Non, c’est le mort frais que nous aimons chez nos amis, le mort douloureux, notre émotion, nous-mêmes enfin!
Albert Camus (The Fall)
Songez à la ruse de la mer et à la manière dont ses créatures les plus redoutables glissent sous l’eau, à peu près invisibles, traîtreusement cachées par les plus suaves tons d’azur. Songez à la beauté et à l’éclat satanique de ses plus impitoyables tribus, à la forme exquise de certains requins. Songez au cannibalisme universel qui règne dans la mer où les créatures de proie s’entre-dévorent, menant une guerre éternelle depuis l’origine du monde. Songez à tout cela et tournez alors vos regards vers cette terre aimable et verte infiniment docile, songez à l’Océan et à la terre, ne retrouvez-vous pas en vous-même leurs pareils ? Car de même que cet océan de terreur entoure les verts continents, de même l’âme de l’homme enferme une Tahiti, île de paix et de joie, cernée par les horreurs sans nombre d’une vie à demi inconnue. Que Dieu te garde ! Ne pousse pas au large de cette île, tu n’y pourrais jamais revenir !
Herman Melville (Moby Dick)
Je sentis que le seul homme avec qui je pouvais parler sur cet objet, sans me compromettre, était mon Contesseur. Aussitôt je pris mon parti; je surmontai ma petite honte; et me vantant d'une faute que je n'avais pas commise, je m'accusai d'avoir fait tout ce que font les femmes. Ce fut mon expression; mais en parlant ainsi je ne savais en vérité quelle idée j'exprimais. Mon espoir ne fut ni tout à fait trompé, ni entièrement rempli; la crainte de me trahir m'empêchait de m'éclairer : mais le bon Père me fit le mal si grand que j'en conclus que le plaisir devait être extrême; et au désir de le connaitre succéda celui de le goûter.
Pierre Choderlos de Laclos (Les Liaisons dangereuses)
Et sans doute une guerre est certainement trop bête, mais cela ne l’empêche pas de durer. La bêtise insiste toujours, on s’en apercevrait si l’on ne pensait pas toujours à soi. Nos concitoyens à cet égard étaient comme tout le monde, ils pensaient à eux-mêmes, autrement dit ils étaient humanistes : ils ne croyaient pas aux fléaux. Le fléau n’est pas à la mesure de l’homme, on se dit donc que le fléau est irréel, c’est un mauvais rêve qui va passer. Mais il ne passe pas toujours et, de mauvais rêve en mauvais rêve, ce sont les hommes qui passent, et les humanistes en premier lieu, parce qu’ils n’ont pas pris leurs précautions.
Albert Camus (The Plague)
Préface J'aime l'idée d'un savoir transmis de maître à élève. J'aime l'idée qu'en marge des "maîtres institutionnels" que sont parents et enseignants, d'autres maîtres soient là pour défricher les chemins de la vie et aider à y avancer. Un professeur d'aïkido côtoyé sur un tatami, un philosophe rencontré dans un essai ou sur les bancs d'un amphi-théâtre, un menuisier aux mains d'or prêt à offrir son expérience... J'aime l'idée d'un maître considérant comme une chance et un honneur d'avoir un élève à faire grandir. Une chance et un honneur d'assister aux progrès de cet élève. Une chance et un honneur de participer à son envol en lui offrant des ailes. Des ailes qui porteront l'élève bien plus haut que le maître n'ira jamais. J'aime cette idée, j'y vois une des clefs d'un équilibre fondé sur la transmission, le respect et l'évolution. Je l'aime et j'en ai fait un des axes du "Pacte des MarchOmbres". Jilano, qui a été guidé par Esîl, guide Ellana qui, elle-même, guidera Salim... Transmission. Ellana, personnage ô combien essentiel pour moi (et pour beaucoup de mes lecteurs), dans sa complexité, sa richesse, sa volonté, ne serait pas ce qu elle est si son chemin n avait pas croisé celui de Jilano. Jilano qui a su développer les qualités qu'il décelait en elle. Jilano qui l'a poussée, ciselée, enrichie, libérée, sans chercher une seule fois à la modeler, la transformer, la contraindre. Respect. q Jilano, maître marchombre accompli. Maître accompli et marchombre accompli. Il sait ce qu'il doit à Esîl qui l'a formé. Il sait que sans elle, il ne serait jamais devenu l'homme qu'il est. L'homme accompli. Elle l'a poussé, ciselé, enrichi, libéré, sans chercher une seule fois à le modeler, le transformer, le contraindre. Respect. Évolution. Esîl, uniquement présente dans les souvenirs de Jilano, ne fait qu'effleurer la trame du Pacte des Marchombres. Nul doute pourtant qu'elle soit parvenue à faire découvrir la voie à Jilano et à lui offrir un élan nécessaire pour qu'il y progresse plus loin qu'elle. Jilano agit de même avec Ellana. Il sait, dès le départ, qu'elle le distancera et attend ce moment avec joie et sérénité. Ellana est en train de libérer les ailes de Salim. Jusqu'où s envolera-t-il grâce à elle ? J'aime cette idée, dans les romans et dans la vie, d’un maître transmettant son savoir à un élève afin qu a terme il le dépasse. J'aime la générosité qu'elle induit, la confiance qu'elle implique en la capacité des hommes à s'améliorer. J'aime cette idée, même si croiser un maître est une chance rare et même s'il existe bien d'autres manières de prendre son envol. Lire. Écrire. S'envoler. Pierre Bottero
Pierre Bottero (Ellana, l'Envol (Le Pacte des MarchOmbres, #2))
Ils niaient tranquillement, contre toute évidence, que nous ayons jamais connu ce monde insensé où le meurtre d’un homme était aussi quotidien que celui des mouches, cette sauvagerie bien définie, ce délire calculé, cet emprisonnement qui apportait avec lui une affreuse liberté à l’égard de tout ce qui n’était pas le présent, cette odeur de mort qui stupéfiait tous ceux qu’elle ne tuait pas, ils niaient enfin que nous ayons été ce peuple abasourdi dont tous les jours une par- tie, entassée dans la gueule d’un four, s’évaporait en fumées grasses, pendant que l’autre, chargée des chaînes de l’impuissance et de la peur, attendait son tour.
Albert Camus (The Plague)
« On ne raconte pas aux enfants ce qui s'est passé avant eux. d'abord ils sont trop petits pour comprendre, ensuite ils sont trop grands pour écouter, puis ils n'ont plus le temps, après c'est trop tard. C'et le propre de la vie de famille. On vit côte à côte comme si on se connaissait mais on ignore tout les uns des autres. On espère des miracles de notre consanguinité : des harmonies impossibles, des confidences absolues, des fusions viscérales. On se contente du mensonge rassurant de notre parenté. »
Jean-Michel Guenassia
Dans l’automne de l’année 1816, John Melmoth, élève du collège de la Trinité, à Dublin, suspendit momentanément ses études pour visiter un oncle mourant, et de qui dépendaient toutes ses espérances de fortune. John, qui avait perdu ses parents, était le fils d’un cadet de famille, dont la fortune médiocre suffisait à peine pour payer les frais de son éducation ; mais son oncle était vieux, célibataire et riche. Depuis sa plus tendre enfance, John avait appris, de tous ceux qui l’entouraient, à regarder cet oncle avec ce sentiment qui attire et repousse à la fois, ce respect mêlé du désir de plaire, que l’on éprouve pour l’être qui tient en quelque sorte en ses mains le fil de notre existence.
Charles Robert Maturin (Melmoth, l'homme errant)
[...] vous savez bien que je n'en voudrai pas de cet homme car je ne veux que ce que je ne peux pas avoir, comme vous par exemple, je vous veux parce je ne vous aurai jamais, c'est simple et sans issue, c'est désespérément logique, le désir qui ne connaît de réalité que lui-même, et vous voyez bien que je mérite la mort pour cet entêtement de rat qui ne sait pas rebrousser chemin, pour cet acharnement de bestiole aveugle qui finira par crever d'avoir trop avancé, vous verrez bien, je mourrai de ce compromis que je ne veux pas faire, et tant pis pour tous les hommes sains et équilibrés qui m'aimeront et tant pis pour moi surtout qui en aimerai d'autres, on finit tous par mourir de la discordance de nos amours.
Nelly Arcan (Putain)
En réalité, la psychanalyse ne peut avoir pour effet que d’amener à la surface, en le rendant clairement conscient, tout le contenu de ces « bas-fonds » de l’être qui forment ce qu’on appelle le « subconscient » ; cet être, d’ailleurs, est déjà psychiquement faible par hypothèse, puisque, s’il en était autrement, il n’éprouverait aucunement le besoin de recourir à un traitement de cette sorte ; il est donc d’autant moins capable de résister à cette « submersion », et il risque fort de sombrer irrémédiablement dans ce chaos de forces ténébreuses imprudemment déchaînées ; si cependant il parvient malgré tout à y échapper, il en gardera du moins, pendant toute sa vie, une empreinte qui sera en lui comme une « souillure » ineffaçable.
René Guénon (Articles Et Comptes Rendus: Tome I,[Parus Dans] Le "Voile D'isis" [Puis Dans Les] Études Traditionnelles])
Eh bien, monsieur de Rastignac, traitez ce monde comme il mérite de l'être. Vous voulez parvenir, je vous aiderai. Vous sonderez combien est profonde la corruption féminine, vous toiserez la largeur de la misérable vanité des hommes. Quoique j'aie bien lu dans ce livre du monde, il y avait des pages qui cependant m'étaient inconnues. Maintenant je sais tout. Plus froidement vous calculerez, plus avant vous irez. Frappez sans pitié, vous serez craint. N'acceptez les hommes et les femmes que comme des chevaux de poste que vous laisserez crever à chaque relais, vous arriverez ainsi au faîte de vos désirs. Voyez-vous, vous ne serez rien ici si vous n'avez pas une femme qui s'intéresse à vous. Il vous la faut jeune, riche, élégante. Mais si vous avez un sentiment vrai, cachez-le comme un trésor ; ne le laissez jamais soupçonner, vous seriez perdu. Vous ne seriez plus le bourreau, vous deviendriez la victime. Si jamais vous aimiez, gardez bien votre secret ! ne le livrez pas avant d'avoir bien su à qui vous ouvrirez votre cœur. Pour préserver par avance cet amour qui n'existe pas encore, apprenez à vous méfier de ce monde-ci...
Honoré de Balzac (Père Goriot)
J’aime beaucoup les cimetières, moi, ça me repose et me mélancolise j’en ai besoin. Et puis, il y a aussi de bons amis là dedans, de ceux qu’on ne va plus voir ; et j’y vais encore, moi, de temps en temps. Justement, dans ce cimetière Montmartre, j’ai une histoire de cœur, une maîtresse qui m’avait beaucoup pincé, très ému, une charmante petite femme dont le souvenir, en même temps qu’il me peine énormément, me donne des regrets… des regrets de toute nature. Et je vais rêver sur sa tombe… C’est fini pour elle. Et puis, j’aime aussi les cimetières, parce que ce sont des villes monstrueuses, prodigieusement habitées. Songez donc à ce qu’il y a de morts dans ce petit espace, à toutes les générations de Parisiens qui sont logés là, pour toujours, troglodytes définitifs enfermés dans leurs petits caveaux, dans leurs petits trous couverts d’une pierre ou marqués d’une croix, tandis que les vivants occupent tant de place et font tant de bruit, ces imbéciles. Me voici donc entrant dans le cimetière Montmartre, et tout à coup imprégné de tristesse, d’une tristesse qui ne faisait pas trop, de mal, d’ailleurs, une de ces tristesses qui vous font penser, quand on se porte bien : « Ça n’est pas drôle, cet endroit-là, mais le moment n’en est pas encore venu pour moi… » L’impression de l’automne, de cette humidité tiède qui sent la mort des feuilles et le soleil affaibli, fatigué, anémique, aggravait en la poétisant la sensation de solitude et de fin définitive flottant sur ce lieu, qui sent la mort des hommes.
Guy de Maupassant (La Maison Tellier)
Qu'est-ce que le roman, en effet, sinon cet univers où l'action trouve sa forme, où les mots de la fin sont prononcés, les êtres livrés aux êtres, où toute vie prend le visage du destin. Le monde romanesque n'est que la correction de ce monde-ci, suivant le désir profond de l'homme. Car il s'agit bien du même monde. La souffrance est la même, le mensonge et l'amour. Les héros ont notre langage, nos faiblesses, nos forces. Leur univers n'est ni plus beau ni plus édifiant que le nôtre. Mais eux, du moins, courent jusqu'au bout de leur destin, et il n'est même jamais de si bouleversants héros que ceux qui vont jusqu'à l'extrémité de leur passion.[...] Voici donc un monde imaginaire, mais créé par la correction de celui-ci, un monde où la douleur peut, si elle le veut, durer jusqu'à la mort, où les passions ne sont jamais distraites, où les êtres sont livrés à l'idée fixe et toujours présents les uns aux autres. L'homme s'y donne enfin à lui-même la forme et la limite apaisante qu'il poursuit en vain dans sa condition. Le roman fabrique du destin sur mesure. C'est ainsi qu'il concurrence la création et qu'il triomphe, provisoirement, de la mort.
Albert Camus (The Rebel)
Je me mis dès lors à lire avec avidité et bientôt la lecture fut ma passion. Tous mes nouveaux besoins, toutes mes aspirations récentes, tous les élans encore vagues de mon adolescence qui s’élevaient dans mon âme d’une façon si troublante et qui étaient provoqués par mon développement si précoce, tout cela, soudainement, se précipita dans une direction, parut se satisfaire complètement de ce nouvel aliment et trouver là son cours régulier. Bientôt mon cœur et ma tête se trouvèrent si charmés, bientôt ma fantaisie se développa si largement, que j’avais l’air d’oublier tout ce qui m’avait entourée jusqu’alors. Il semblait que le sort lui même m’arrêtât sur le seuil de la nouvelle vie dans laquelle je me jetais, à laquelle je pensais jour et nuit, et, avant de m’abandonner sur la route immense, me faisait gravir une hauteur d’où je pouvais contempler l’avenir dans un merveilleux panorama, sous une perspective brillante, ensorcelante. Je me voyais destinée à vivre tout cet avenir en l’apprenant d’abord par les livres ; de vivre dans les rêves, les espoirs, la douce émotion de mon esprit juvénile. Je commençai mes lectures sans aucun choix, par le premier livre qui me tomba sous la main. Mais, le destin veillait sur moi. Ce que j’avais appris et vécu jusqu’à ce jour était si noble, si austère, qu’une page impure ou mauvaise n’eût pu désormais me séduire. Mon instinct d’enfant, ma précocité, tout mon passé veillaient sur moi ; et maintenant ma conscience m’éclairait toute ma vie passée. En effet, presque chacune des pages que je lisais m’était déjà connue, semblait déjà vécue, comme si toutes ces passions, toute cette vie qui se dressaient devant moi sous des formes inattendues, en des tableaux merveilleux, je les avais déjà éprouvées. Et comment pouvais-je ne pas être entraînée jusqu’à l’oubli du présent, jusqu’à l’oubli de la réalité, quand, devant moi dans chaque livre que je lisais, se dressaient les lois d’une même destinée, le même esprit d’aventure qui règnent sur la vie de l’homme, mais qui découlent de la loi fondamentale de la vie humaine et sont la condition de son salut et de son bonheur ! C’est cette loi que je soupçonnais, que je tâchais de deviner par toutes mes forces, par tous mes instincts, puis presque par un sentiment de sauvegarde. On avait l’air de me prévenir, comme s’il y avait en mon âme quelque chose de prophétique, et chaque jour l’espoir grandissait, tandis qu’en même temps croissait de plus en plus mon désir de me jeter dans cet avenir, dans cette vie. Mais, comme je l’ai déjà dit, ma fantaisie l’emportait sur mon impatience, et, en vérité, je n’étais très hardie qu’en rêve ; dans la réalité, je demeurais instinctivement timide devant l’avenir.
Fyodor Dostoevsky (Netochka Nezvanova)
Je me suis figuré qu’une femme devait faire plus de cas de son âme que de son corps, contre l’usage général qui veut qu’elle permette qu’on l’aime avant d’avouer qu’elle aime, et qu’elle abandonne ainsi le trésor de son coeur avant de consentir à la plus légère prise sur celui de sa beauté. J’ai voulu, oui, voulu absolument tenter de renverser cette marche uniforme ; la nouveauté est ma rage. Ma fantaisie et ma paresse, les seuls dieux dont j’aie jamais encensé les autels, m’ont vainement laissé parcourir le monde, poursuivi par ce bizarre dessein ; rien ne s’offrait à moi. Peut-être je m’explique mal. J’ai eu la singulière idée d’être l’époux d’une femme avant d’être son amant. J’ai voulu voir si réellement il existait une âme assez orgueilleuse pour demeurer fermée lorsque les bras sont ouverts, et livrer la bouche à des baisers muets ; vous concevez que je ne craignais que de trouver cette force à la froideur. Dans toutes les contrées qu’aime le soleil, j’ai cherché les traits les plus capables de révéler qu’une âme ardente y était enfermée : j’ai cherché la beauté dans tout son éclat, cet amour qu’un regard fait naître ; j’ai désiré un visage assez beau pour me faire oublier qu’il était moins beau que l’être invisible qui l’anime ; insensible à tout, j’ai résisté à tout,... excepté à une femme, – à vous, Laurette, qui m’apprenez que je me suis un peu mépris dans mes idées orgueilleuses ; à vous, devant qui je ne voulais soulever le masque qui couvre ici-bas les hommes qu’après être devenu votre époux. – Vous me l’avez arraché, je vous supplie de me pardonner, si j’ai pu vous offenser. ( Le prince )
Alfred de Musset (La nuit vénitienne)
Que se serait-il passé ? Lol ne va pas loin dans l'inconnu sur lequel s'ouvre cet instant. Elle ne dispose d'aucun souvenir même imaginaire, elle n'a aucune idée sur cet inconnu. Mais ce qu'elle croit, c'est qu'elle devait y pénétrer, que c'était ce qu'il lui fallait faire, que ç'aurait été pour toujours, pour sa tête et pour son corps, leur plus grande douleur et leur plus grande joie confondues jusque dans leur définition devenue unique mais innommable faute d'un mot. J'aime à croire, comme je l'aime, que si Lol est silencieuse dans la vie c'est qu'elle a cru, l'espace d'un éclair, que ce mot pouvait exister. Faute de son existence, elle se tait. Ç'aurait été un mot-absence, un mot-trou, creusé en son centre d'un trou, de ce trou où tous les autres mots auraient été enterrés. On n'aurait pas pu le dire mais on aurait pu le faire résonner. Immense, sans fin, un gong vide, il aurait retenu ceux qui voulaient partir, il les aurait convaincus de l'impossible, il les aurait assourdis à tout autre vocable que lui-même, en une fois il les aurait nommés, eux, l'avenir et l'instant. Manquant, ce mot, il gâche tous les autres, les contamine, c'est aussi le chien mort de la plage en plein midi, ce trou de chair.
Marguerite Duras (The Ravishing of Lol Stein)
Une très jolie jeune fille, traitée avec des égards constants et des attentions démesurées par l'ensemble de la population masculine, y compris par ceux - l'immense majorité - qui n'ont plus aucun espoir d'en obtenir une faveur d'ordre sexuel, et même à vrai dire tout particulièrement par eux, avec une émulation abjecte confinant chez certains quinquagénaires au gâtisme pur et simple, une très jolie jeune fille devant qui tous les visages s'ouvrent, toutes les difficultés s'aplanissent, accueillie partout comme si elle était la reine du monde, devient naturellement une espèce de monstre d'égoïsme et de vanité autosatisfaite. La beauté physique joue ici exactement Ie même rôle que la noblesse de sang sous l'Ancien Régime, et la brève conscience qu'elles pourraient prendre à l'adolescence de l'origine purement accidentelle de leur rang cède rapidement la place chez la plupart des très jolies jeunes filles à une sensation de supériorité innée, naturelle, instinctive, qui les place entièrement en dehors, et largement au-dessus du reste de l'humanité. Chacun autour d'elle n'ayant pour objectif que de lui éviter toute peine, et de prévenir Ie moindre de ses désirs, c'est tout uniment (sic) qu'une très jolie jeune fille en vient à considérer Ie reste du monde comme composé d'autant de serviteurs, elle-même n'ayant pour seule tâche que d'entretenir sa propre valeur érotique - dans l'attente de rencontrer un garçon digne d'en recevoir l'hommage. La seule chose qui puisse la sauver sur le plan moral, c'est d'avoir la responsabilité concrète d'un être plus faible, d'être directement et personnellement responsable de la satisfaction de ses besoins physiques, de sa santé, de sa survie - cet être pouvant être un frère ou une soeur plus jeune, un animal domestique, peu importe. (La possibilité d'une île, Daniel 1,15)
Michel Houellebecq
Modern civilization seems to be incapable of producing people endowed with imagination, intelligence, and courage. In practically every country there is a decrease in the intellectual and moral caliber of those who carry the responsibility of public affairs. The financial, industrial, and commercial organizations have reached a gigantic size. They are influenced not only by the conditions of the country where they are established, but also by the state of the neighboring countries and of the entire world. In all nations, economic and social conditions undergo extremely rapid changes. Nearly everywhere the existing form of government is again under discussion. The great democracies find themselves face to face with formidable problems--problems concerning their very existence and demanding an immediate solution. And we realize that, despite the immense hopes which humanity has placed in modern civilization, such a civilization has failed in developing men of sufficient intelligence and audacity to guide it along the dangerous road on which it is stumbling. Human beings have not grown so rapidly as the institutions sprung from their brains. It is chiefly the intellectual and moral deficiencies of the political leaders, and their ignorance, which endanger modern nations.
Alexis Carrel (L'homme cet inconnu)
Les jeunes filles d’aujourd’hui étaient plus avisées et plus rationnelles. Elles se préoccupaient avant tout de leur réussite scolaire, tâchaient avant tout de s’assurer un avenir professionnel décent. Les sorties avec les garçons n’étaient pour elles qu’une activité de loisirs, un divertissement où intervenaient à parts plus ou moins égales le plaisir sexuel et la satisfaction narcissique. Par la suite elles s’attachaient à conclure un mariage raisonné, sur la base d’une adéquation suffisante des situations socio-professionnelles et d’une certaine communauté de goûts. Bien entendu elles se coupaient ainsi de toute possibilité de bonheur – celui-ci étant indissociable d’états fusionnels et régressifs incompatibles avec l’usage pratique de la raison – mais elles espéraient ainsi échapper aux souffrances sentimentales et morales qui avaient torturé leurs devancières. Cet espoir était d’ailleurs rapidement déçu, la disparition des tourments passionnels laissait en effet le champ libre à l’ennui, à la sensation de vide, à l’attente angoissée du vieillissement et de la mort.
Michel Houellebecq (The Elementary Particles)
J’allais ouvrir la bouche et aborder cette fille , quand quelqu’un me toucha l’épaule. Je me retournai, surpris, et j’aperçus un homme d’aspect ordinaire, ni jeune ni vieux, qui me regardait d’un air triste. — Je voudrais vous parler, dit-il. Je fis une grimace qu’il vit sans doute, car il ajouta : — « C’est important. » Je me levai et le suivis à l’autre bout du bateau : — « Monsieur, reprit-il, quand l’hiver approche avec les froids, la pluie et la neige, votre médecin vous dit chaque jour : « Tenez-vous les pieds bien chauds, gardez-vous des refroidissements, des rhumes, des bronchites, des pleurésies. » Alors vous prenez mille précautions, vous portez de la flanelle, des pardessus épais, des gros souliers, ce qui ne vous empêche pas toujours de passer deux mois au lit. Mais quand revient le printemps avec ses feuilles et ses fleurs, ses brises chaudes et amollissantes, ses exhalaisons des champs qui vous apportent des troubles vagues, des attendrissements sans cause, il n’est personne qui vienne vous dire : « Monsieur, prenez garde à l’amour ! Il est embusqué partout ; il vous guette à tous les coins ; toutes ses ruses sont tendues, toutes ses armes aiguisées, toutes ses perfidies préparées ! Prenez garde à l’amour !… Prenez garde à l’amour ! Il est plus dangereux que le rhume, la bronchite et la pleurésie ! Il ne pardonne pas, et fait commettre à tout le monde des bêtises irréparables. » Oui, monsieur, je dis que, chaque année, le gouvernement devrait faire mettre sur les murs de grandes affiches avec ces mots : « Retour du printemps. Citoyens français, prenez garde à l’amour ; » de même qu’on écrit sur la porte des maisons : « Prenez garde à la peinture ! » — Eh bien, puisque le gouvernement ne le fait pas, moi je le remplace, et je vous dis : « Prenez garde à l’amour ; il est en train de vous pincer, et j’ai le devoir de vous prévenir comme on prévient, en Russie, un passant dont le nez gèle. » Je demeurai stupéfait devant cet étrange particulier, et, prenant un air digne : — « Enfin, monsieur, vous me paraissez vous mêler de ce qui ne vous regarde guère. » Il fit un mouvement brusque, et répondit : — « Oh ! monsieur ! monsieur ! si je m’aperçois qu’un homme va se noyer dans un endroit dangereux, il faut donc le laisser périr ?
Guy de Maupassant
Je ris, Caesonia, quand je pense que, pendant des années, Rome tout entière a évité de prononcer le nom de Drusilla. Car Rome s'est trompée pendant des années. L'amour ne m'est pas suffisant, c'est cela que j'ai compris alors. C'est cela que je comprends aujourd'hui encore, en te regardant. Aimer un être, c'est accepter de vieillir avec lui. Je ne suis pas capable de cet amour. Drusilla vieille, c'était bien pis que Drusilla morte. On croit qu'un homme souffre parce que l'être qu'il aime meurt en un jour. Mais sa vraie souffrance est moins futile : c'est de s'apercevoir que le chagrin non plus ne dure pas. Même la douleur est privée de sens. Tu vois, je n'avais pas d'excuses, pas même l'ombre d'un amour, ni l'amertume de la mélancolie. Je suis sans alibi. Mais aujourd'hui, me voilà encore plus libre qu'il y a des an-nées, libéré que je suis du souvenir et de l'illusion. (Il rit d'une façon passionnée.) Je sais que rien ne dure ! Savoir cela ! Nous sommes deux ou trois dans l'histoire à en avoir fait vraiment l'expérience, accompli ce bonheur dément. Ceasonia, tu as suivi jusqu'au bout une bien curieuse tragédie. Il est temps que pour toi le rideau se baisse.
Albert Camus (Caligula)
Les Poets de Sept ans Et la Mère, fermant le livre du devoir, S'en allait satisfaite et très fière sans voir, Dans les yeux bleus et sous le front plein d'éminences, L'âme de son enfant livrée aux répugnances. Tout le jour, il suait d'obéissance ; très Intelligent ; pourtant des tics noirs, quelques traits Semblaient prouver en lui d'âcres hypocrisies. Dans l'ombre des couloirs aux tentures moisies, En passant il tirait la langue, les deux poings A l'aine, et dans ses yeux fermés voyait des points. Une porte s'ouvrait sur le soir : à la lampe On le voyait, là-haut, qui râlait sur la rampe, Sous un golfe de jour pendant du toit. L'été Surtout, vaincu, stupide, il était entêté A se renfermer dans la fraîcheur des latrines: Il pensait là, tranquille et livrant ses narines. Quand, lavé des odeurs du jour, le jardinet Derrière la maison, en hiver, s'illunait , Gisant au pied d'un mur, enterré dans la marne Et pour des visions écrasant son oeil darne, Il écoutait grouiller les galeux espaliers. Pitié ! Ces enfants seuls étaient ses familiers Qui, chétifs, fronts nus, oeil déteignant sur la joue, Cachant de maigres doigts jaunes et noirs de boue Sous des habits puant la foire et tout vieillots, Conversaient avec la douceur des idiots ! Et si, l'ayant surpris à des pitiés immondes, Sa mère s'effrayait, les tendresses profondes, De l'enfant se jetaient sur cet étonnement. C'était bon. Elle avait le bleu regard, - qui ment! A sept ans, il faisait des romans, sur la vie Du grand désert où luit la Liberté ravie, Forêts, soleils, rives, savanes ! - Il s'aidait De journaux illustrés où, rouge, il regardait Des Espagnoles rire et des Italiennes. Quand venait, l'Oeil brun, folle, en robes d'indiennes, -Huit ans -la fille des ouvriers d'à côté, La petite brutale, et qu'elle avait sauté, Dans un coin, sur son dos, en secouant ses tresses, Et qu'il était sous elle, il lui mordait les fesses, Car elle ne portait jamais de pantalons; - Et, par elle meurtri des poings et des talons, Remportait les saveurs de sa peau dans sa chambre. Il craignait les blafards dimanches de décembre, Où, pommadé, sur un guéridon d'acajou, Il lisait une Bible à la tranche vert-chou; Des rêves l'oppressaient, chaque nuit, dans l'alcôve. Il n'aimait pas Dieu; mais les hommes qu'au soir fauve, Noirs, en blouse, il voyait rentrer dans le faubourg Où les crieurs, en trois roulements de tambour, Font autour des édits rire et gronder les foules. - Il rêvait la prairie amoureuse, où des houles Lumineuses, parfums sains, pubescences d'or, Font leur remuement calme et prennent leur essor ! Et comme il savourait surtout les sombres choses, Quand, dans la chambre nue aux persiennes closes, Haute et bleue, âcrement prise d'humidité, Il lisait son roman sans cesse médité, Plein de lourds ciels ocreux et de forêts noyées, De fleurs de chair aux bois sidérals déployées, Vertige, écroulement, déroutes et pitié ! - Tandis que se faisait la rumeur du quartier, En bas, - seul et couché sur des pièces de toile Écrue et pressentant violemment la voile!
Arthur Rimbaud
Le fait de ne pas prolonger l’expérience amoureuse n’est pas un critère de validité en soi. Dans la rencontre attentionnée avec l’autre, l’individu est électrisé. Dans la rencontre de deux corps s’exalte une sensation de vie intense. Aussi la passion n’est-elle pas toujours liée à la suite de l’événement : il est fréquent de rencontrer sensuellement quelqu’un sans vivre ensuite avec lui. Il faut disjoindre la grâce de la rencontre, qui est éblouissement réciproque, des suites d’une relation. Deux êtres peuvent s’estimer trop différents, trop éloignés, pour décider de former une relation durable, malgré un échange merveilleux. Les partenaires savent que, « sans lendemain », cet échange se suffit à lui-même, qu’il procure une énergie fabuleuse. C’est néanmoins un moment magique. « Une volupté vraie est aussi difficile à réussir qu’un mariage d’amour », estime Vladimir Jankélévitch (1949). Il ne s’agit pas de ce que l’on appelle communément l’état amoureux, aussi cette forme de relation est toujours niée, vulgarisée, ramenée à un échange libertin, de pur sexe, instrumental, intéressé, etc. Pourtant l’apport émotionnel, sensuel, énergétique, affectif, amoureux peut avoir des répercussions plus grandes dans l’histoire de vie de la personne que des années de vie conjugale.
Serge Chaumier (L'amour fissionnel : Le nouvel art d'aimer)
Moral sense is almost completely ignored by modern society. We have, in fact, suppressed its manifestations. All are imbued with irresponsibility. Those who discern good and evil, who are industrious and provident, remain poor and are looked upon as morons. The woman who has several children, who devotes herself to their education, instead of to her own career, is considered weak-minded. If a man saves a little money for his wife and the education of his children, this money is stolen from him by enterprising financiers. Or taken by the government and distributed to those who have been reduced to want by their own improvidence and the shortsightedness of manufacturers, bankers, and economists. Artists and men of science supply the community with beauty, health, and wealth. They live and die in poverty. Robbers enjoy prosperity in peace. Gangsters are protected by politicians and respected by judges. They are the heroes whom children admire at the cinema and imitate in their games. A rich man has every right. He may discard his aging wife, abandon his old mother to penury, rob those who have entrusted their money to him, without losing the consideration of his friends. ...Ministers have rationalized religion. They have destroyed its mystical basis. But they do not succeed in attracting modern men. In their half-empty churches they vainly preach a weak morality. They are content with the part of policemen, helping in the interest of the wealthy to preserve the framework of present society. Or, like politicians, they flatter the appetites of the crowd.
Alexis Carrel (L'Homme, cet inconnu (French Edition))
L'homme ne vit pas seulement sa vie personnelle comme individu, mais consciemment ou inconsciemment il participe aussi à celle de son époque et de ses contemporains, et même s'il devait considérer les bases générales et impersonnelles de son existence comme des données immédiates, les tenir pour naturelles et être aussi éloigné de l'idée d'exercer contre elles une critique que le bon Hans Castorp l'était réellement, il est néanmoins possible qu'il sente son bien-être moral vaguement affecté par leurs défauts. L'individu peut envisager toute sorte de buts personnels, de fins, d'espérances, de perspectives où il puise une impulsion à de grands efforts et à son activité, mais lorsque l'impersonnel autour de lui, l'époque elle-même, en dépit de son agitation, manque de buts et d'espérances, lorsqu'elle se révèle en secret désespérée, désorientée et sans issue, lorsqu'à la question, posée consciemment ou inconsciemment, mais finalement posée en quelque manière, sur le sens suprême, plus que personnel et inconditionné, de tout effort et de toute activité, elle oppose le silence du vide, cet état de choses paralysera justement les efforts d'un caractère droit, et cette influence, par-delà l'âme et la morale, s'étendra jusqu'à la partie physique et organique de l'individu. Pour être disposé à fournir un effort considérable qui dépasse la mesure de ce qui est communément pratiqué, sans que l'époque puisse donner une réponse satisfaisante à la question " à quoi bon? ", il faut une solitude et une pureté morales qui sont rares et d'une nature héroïque, ou une vitalité particulièrement robuste. Hans Castorp ne possédait ni l'une ni l'autre, et il n'était ainsi donc qu'un homme malgré tout moyen, encore que dans un sens des plus honorables. (ch. II)
Thomas Mann (The Magic Mountain)
« Écoute, Egor Pétrovitch, lui dit-il. Qu’est ce que tu fais de toi ? Tu te perds seulement avec ton désespoir. Tu n’as ni patience ni courage. Maintenant, dans un accès de tristesse, tu dis que tu n’as pas de talent. Ce n’est pas vrai. Tu as du talent ; je t’assure que tu en as. Je le vois rien qu’à la façon dont tu sens et comprends l’art. Je te le prouverai par toute ta vie. Tu m’as raconté ta vie d’autrefois. À cette époque aussi le désespoirte visitait sans que tu t’en rendisses compte. À cette époque aussi, ton premier maître, cet homme étrange, dont tu m’as tant parlé, a éveillé en toi, pour la première fois, l’amour de l’art et a deviné ton talent. Tu l’as senti alors aussi fortement que maintenant. Mais tu ne savais pas ce qui se passait en toi. Tu ne pouvais pas vivre dans la maison du propriétaire, et tu ne savais toi-même ce que tu désirais. Ton maître est mort trop tôt. Il t’a laissé seulement avec des aspirations vagues et, surtout, il ne t’a pas expliqué toimême. Tu sentais le besoin d’une autre route plus large, tu pressentais que d’autres buts t’étaient destinés, mais tu ne comprenais pas comment tout cela se ferait et, dans ton angoisse, tu as haï tout ce qui t’entourait alors. Tes six années de misère ne sont pas perdues. Tu as travaillé, pensé, tu as reconnu et toi-même et tes forces ; tu comprends maintenant l’art et ta destination. Mon ami, il faut avoir de la patience et du courage. Un sort plus envié que le mien t’est réservé. Tu es cent fois plus artiste que moi, mais que Dieu te donne même la dixième partie de ma patience. Travaille, ne bois pas, comme te le disait ton bonpropriétaire, et, principalement, commence par l’a, b, c. « Qu’est-ce qui te tourmente ? La pauvreté, la misère ? Mais la pauvreté et la misère forment l’artiste. Elles sont inséparables des débuts. Maintenant personne n’a encore besoin de toi ; personne ne veut te connaître. Ainsi va le monde. Attends, ce sera autre chose quand on saura que tu as du talent. L’envie, la malignité, et surtout la bêtise t’opprimeront plus fortement que la misère. Le talent a besoin de sympathie ; il faut qu’on le comprenne. Et toi, tu verras quelles gens t’entoureront quand tu approcheras du but. Ils tâcheront de regarder avec mépris ce qui s’est élaboré en toi au prix d’un pénible travail, des privations, des nuits sans sommeil. Tes futurs camarades ne t’encourageront pas, ne te consoleront pas. Ils ne t’indiqueront pas ce qui en toi est bon et vrai. Avec une joie maligne ils relèveront chacune de tes fautes. Ils te montreront précisément ce qu’il y a de mauvais en toi, ce en quoi tu te trompes, et d’un air calme et méprisant ils fêteront joyeusement chacune de tes erreurs. Toi, tu esorgueilleux et souvent à tort. Il t’arrivera d’offenser une nullité qui a de l’amour-propre, et alors malheur à toi : tu seras seul et ils seront plusieurs. Ils te tueront à coups d’épingles. Moi même, je commence à éprouver tout cela. Prends donc des forces dès maintenant. Tu n’es pas encore si pauvre. Tu peux encore vivre ; ne néglige pas les besognes grossières, fends du bois, comme je l’ai fait un soir chez de pauvres gens. Mais tu es impatient ; l’impatience est ta maladie. Tu n’as pas assez de simplicité ; tu ruses trop, tu réfléchis trop, tu fais trop travailler ta tête. Tu es audacieux en paroles et lâche quand il faut prendra l’archet en main. Tu as beaucoup d’amour-propre et peu de hardiesse. Sois plus hardi, attends, apprends, et si tu ne comptes pas sur tes forces, alors va au hasard ; tu as de la chaleur, du sentiment, peut-être arriveras-tu au but. Sinon, va quand même au hasard. En tout cas tu ne perdras rien, si le gain est trop grand. Vois-tu, aussi, le hasard pour nous est une grande chose. »
Fyodor Dostoevsky (Netochka Nezvanova)
Ce qui est tout à fait extraordinaire, c’est la rapidité avec laquelle la civilisation du Moyen-Âge tomba dans le plus complet oubli ; les hommes du XVIIe siècle n’en avaient plus la moindre notion, et les monuments qui en subsistaient ne représentaient plus rien à leurs yeux, ni dans l’ordre intellectuel, ni même dans l’ordre esthétique ; on peut juger par là combien la mentalité avait été changée dans l’intervalle. Nous n’entreprendrons pas de rechercher ici les facteurs, certainement fort complexes, qui concoururent à ce changement, si radical qu’il semble difficile d’admettre qu’il ait pu s’opérer spontanément et sans l’intervention d’une volonté directrice dont la nature exacte demeure forcément assez énigmatique ; il y a, à cet égard, des circonstances bien étranges, comme la vulgarisation, à un moment déterminé, et en les présentant comme des découvertes nouvelles, de choses qui étaient connues en réalité depuis fort longtemps, mais dont la connaissance, en raison de certains inconvénients qui risquaient d’en dépasser les avantages, n’avait pas été répandue jusque là dans le domaine public (1). Il est bien invraisemblable aussi que la légende qui fit du moyen âge une époque de « ténèbres », d’ignorance et de barbarie, ait pris naissance et se soit accréditée d’elle-même, et que la véritable falsification de l’histoire à laquelle les modernes se sont livrés ait été entreprise sans aucune idée préconçue ; mais nous n’irons pas plus avant dans l’examen de cette question, car, de quelque façon que ce travail se soit accompli, c’est, pour le moment, la constatation du résultat qui, en somme, nous importe le plus. (1) Nous ne citerons que deux exemples, parmi les faits de ce genre qui devaient avoir les plus graves conséquences : la prétendue invention de l’imprimerie, que les Chinois connaissaient antérieurement à l’ère chrétienne et la découverte « officielle » de l’Amérique, avec laquelle des communications beaucoup plus suivies qu’on ne le pense avaient existé durant tout le moyen âge.
René Guénon (The Crisis of the Modern World)
Cette qualité de la joie n’est-elle pas le fruit le plus précieux de la civilisation qui est nôtre ? Une tyrannie totalitaire pourrait nous satisfaire, elle aussi, dans nos besoins matériels. Mais nous ne sommes pas un bétail à l’engrais. La prospérité et le confort ne sauraient suffire à nous combler. Pour nous qui fûmes élevés dans le culte du respect de l’homme, pèsent lourd les simples rencontres qui se changent parfois en fêtes merveilleuses… Respect de l’homme ! Respect de l’homme !… Là est la pierre de touche ! Quand le Naziste respecte exclusivement qui lui ressemble, il ne respecte rien que soi-même ; il refuse les contradictions créatrices, ruine tout espoir d’ascension, et fonde pour mille ans, en place d’un homme, le robot d’une termitière. L’ordre pour l’ordre châtre l’homme de son pouvoir essentiel, qui est de transformer et le monde et soi-même. La vie crée l’ordre, mais l’ordre ne crée pas la vie. Il nous semble, à nous, bien au contraire, que notre ascension n’est pas achevée, que la vérité de demain se nourrit de l’erreur d’hier, et que les contradictions à surmonter sont le terreau même de notre croissance. Nous reconnaissons comme nôtres ceux mêmes qui diffèrent de nous. Mais quelle étrange parenté ! elle se fonde sur l’avenir, non sur le passé. Sur le but, non sur l’origine. Nous sommes l’un pour l’autre des pèlerins qui, le long de chemins divers, peinons vers le même rendez-vous. Mais voici qu’aujourd’hui le respect de l’homme, condition de notre ascension, est en péril. Les craquements du monde moderne nous ont engagés dans les ténèbres. Les problèmes sont incohérents, les solutions contradictoires. La vérité d’hier est morte, celle de demain est encore à bâtir. Aucune synthèse valable n’est entrevue, et chacun d’entre nous ne détient qu’une parcelle de la vérité. Faute d’évidence qui les impose, les religions politiques font appel à la violence. Et voici qu’à nous diviser sur les méthodes, nous risquons de ne plus reconnaître que nous nous hâtons vers le même but. Le voyageur qui franchit sa montagne dans la direction d’une étoile, s’il se laisse trop absorber par ses problèmes d’escalade, risque d’oublier quelle étoile le guide. S’il n’agit plus que pour agir, il n’ira nulle part. La chaisière de cathédrale, à se préoccuper trop âprement de la location de ses chaises, risque d’oublier qu’elle sert un dieu. Ainsi, à m’enfermer dans quelque passion partisane, je risque d’oublier qu’une politique n’a de sens qu’à condition d’être au service d’une évidence spirituelle. Nous avons goûté, aux heures de miracle, une certaine qualité des relations humaines : là est pour nous la vérité. Quelle que soit l’urgence de l’action, il nous est interdit d’oublier, faute de quoi cette action demeurera stérile, la vocation qui doit la commander. Nous voulons fonder le respect de l’homme. Pourquoi nous haïrions-nous à l’intérieur d’un même camp ? Aucun d’entre nous ne détient le monopole de la pureté d’intention. Je puis combattre, au nom de ma route, telle route qu’un autre a choisie. Je puis critiquer les démarches de sa raison. Les démarches de la raison sont incertaines. Mais je dois respecter cet homme, sur le plan de l’Esprit, s’il peine vers la même étoile. Respect de l’Homme ! Respect de l’Homme !… Si le respect de l’homme est fondé dans le cœur des hommes, les hommes finiront bien par fonder en retour le système social, politique ou économique qui consacrera ce respect. Une civilisation se fonde d’abord dans la substance. Elle est d’abord, dans l’homme, désir aveugle d’une certaine chaleur. L’homme ensuite, d’erreur en erreur, trouve le chemin qui conduit au feu.
Antoine de Saint-Exupéry (Lettre à un otage)