Bien Vivre Quotes

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Le mal de vivre, 'the pain of life.' Qu'll faut bien vivre... 'that we must live with, or endure.' Vaille que vivre, this is difficult but it is something like 'we must live the life we have. We must soldier on.
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Ruth Ozeki (A Tale for the Time Being)
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Les mots n’ont pas toujours besoin d’une destination. On les laisse s’arrĂȘter aux frontiĂšres des sensations. Errant sans tĂȘte dans l’espace du trouble. Et c’est bien lĂ  le privilĂšge des artistes : vivre dans la confusion.
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David Foenkinos (Charlotte)
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En travaillant pour les seuls biens matĂ©riels, nous bĂątissons nous-mĂȘmes notre prison. Nous nous enfermons solitaires, avec notre monnaie de cendre qui ne procure rien qui vaille de vivre.
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Antoine de Saint-Exupéry (Wind, Sand and Stars)
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On peut vivre sans philosophie, sans musique, sans joie et sans amour. Mais pas si bien.
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Vladimir Jankélévitch
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Criton - Le principe, que l'important n'est pas de vivre, mais de bien vivre.
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Socrates (Quotations by Socrates)
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on ne peut pas bien vivre en sachant que l'homme n'est rien et que la face de Dieu est affreuse.
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Albert Camus (L'état de siÚge)
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Ta voix, tes yeux, tes mains, tes lĂšvres, Nos silences, nos paroles, La lumiĂšre qui s’en va, la lumiĂšre qui revient, Un seul sourire pour nous deux, Par besoin de savoir, j’ai vu la nuit crĂ©er le jour sans que nous changions d’apparence, Ô bien-aimĂ© de tous et bien-aimĂ© d’un seul, En silence ta bouche a promis d’ĂȘtre heureuse, De loin en loin, ni la haine, De proche en proche, ni l’amour, Par la caresse nous sortons de notre enfance, Je vois de mieux en mieux la forme humaine, Comme un dialogue amoureux, le cƓur ne fait qu’une seule bouche Toutes les choses au hasard, tous les mots dits sans y penser, Les sentiments Ă  la dĂ©rive, les hommes tournent dans la ville, Le regard, la parole et le fait que je t’aime, Tout est en mouvement, il suffit d’avancer pour vivre, D’aller droit devant soi vers tout ce que l’on aime, J’allais vers toi, j’allais sans fin vers la lumiĂšre, Si tu souris, c’est pour mieux m’envahir, Les rayons de tes bras entrouvraient le brouillard.
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Paul Éluard
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Elle pense qu'elle va mourir, qu'elle est jeune et qu'elle aussi, elle aurait bien aimé vivre.
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Jean Anouilh (Antigone)
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J’ai rĂ©flĂ©chi, je ne me fais pas d’illusions, je t’aime mais je n’ai pas confiance en toi. Puisque ce que nous vivons n’est pas rĂ©el, alors c’est un jeu. Je n’ai plus l’ñge de jouer Ă  chat. Ne cherche pas Ă  m’appeler, ni Ă  savoir oĂč je suis, ni comment je vis, je crois que ce n’est plus le problĂšme. J’ai rĂ©flĂ©chi, je pense que c’est la meilleure solution, faire comme toi, vivre de mon cĂŽtĂ© en t’aimant bien mais de loin. Je ne veux pas attendre tes coups de tĂ©lĂ©phone, je ne veux pas m’empĂȘcher de tomber amoureuse. J’ai rĂ©flĂ©chi, je veux bien essayer. C’est Ă  prendre ou Ă  laisser

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Anna Gavalda (Someone I Loved (Je l'aimais))
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L’amour, aussi bien que le feu, ne peut subsister sans un mouvement continuel, et il cesse de vivre dĂšs qu’il cesse d’espĂ©rer ou de craindre.
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François de La Rochefoucauld
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Les personnes qui m'ont adoré (...) se sont obstinées à vivre bien au-delà du terme de mon amour pour elles ou de leur amour pour moi.
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Oscar Wilde (The Picture of Dorian Gray)
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On a bien le droit d'avoir une opinion sur sa propre mort.
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Louis-Ferdinand Céline (Voyage au bout de la nuit)
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Madame Rosa dit que la vie peut ĂȘtre trĂšs belle mais qu’on ne l’a pas encore vraiment trouvĂ©e et qu’en attendant il faut bien vivre.
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Romain Gary (La vie devant soi)
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Je suis trop intelligente, trop exigeante et trop riche pour que personne puisse se charger de moi entiĂšrement. Personne ne me connaĂźt ni ne m'aime tout entiĂšre. Je n'ai que moi. Il ne faut pas que j'essaie de tromper cette solitude en renonçant Ă  ce que je peux seule porter. Il faut que je vive, sachant que personne ne m'aidera Ă  vivre. Ma force, c'est que je m'estime aussi haut que n'importe quel autrui ; je peux bien envier Ă  l'un ou l'autre telle qualitĂ© ; de personne la valeur ne me semble dĂ©passer la mienne : je possĂšde autant. Seule je vivrai, forte de ce que je sais ĂȘtre.
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Simone de Beauvoir (Cahiers de jeunesse: 1926-1930)
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C'est seulement Ă  partir de ce moment que je commençai Ă  comprendre (ce que taisent la plupart du temps les Ă©crivains) que les malades, les estropiĂ©s, les gens laids, fanĂ©s, flĂ©tris, les ĂȘtres physiquement infĂ©rieurs aiment au contraire avec plus de passion et de violence, que les gens heureux et bien portants ; ils aiment d'un amour fanatique, sombre, aucune passion sur terre n'est plus violente et avide que celle de ces dĂ©sespĂ©rĂ©s, de ces bĂątards de Dieu qui ne trouvent que dans l'amour d'autrui et pour autrui leur raison de vivre. Le fait que c'est prĂ©cisĂ©ment de l'abĂźme le plus profond de la dĂ©tresse que s'Ă©lĂšve le plus furieusement le cri panique du dĂ©sir de vivre, ce terrible secret, jamais, dans mon inexpĂ©rience, je ne l'avais soupçonnĂ©. Et c'est seulement en cette minute qu'il avait pĂ©nĂ©trĂ© en moi comme un fer brĂ»lant.
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Stefan Zweig (Beware of Pity)
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Je suis une ombre dans ta vie, tu es bien plus que ça dans la mienne et ça me fait mal. [
] Pourquoi m’avoir laissĂ©e entrer dans ta vie si ce n’était qu’en simple visiteuse ? J’ai pensĂ© cent fois te quitter, mais je n’y arrive pas toute seule. Alors je te demande un service, fais-le pour nous, ou si tu crois que nous avons quelque chose Ă  partager, mĂȘme si ce n’est que pour un temps, donne-nous vraiment les moyens de vivre cette histoire.
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Marc Levy (Le Voleur d'ombres)
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... m'emplissait d'un bonheur vivant, d'un vrai bonheur. J'en avais sur la peau, j'en avais dans la chair, j'en avais dans le sang; il descendait jusque dans l'Ăąme. A cet Ăąge-lĂ  on est ignorant. Mais je sentais bien que ma joie de vivre Ă©tait plus grande que mon corps, et je me disais: "Pascalet, c'est l'ange du Bon Dieu qui remue de plaisir en toi. Traite-le bien." Pascalet ~ "L'enfant et la riviĂšre Traduction en grecque: ... ΌΔ ÎłÎ­ÎŒÎčζΔ ΌΔ ÎŒÎčα Î”Ï…Ï„Ï…Ï‡ÎŻÎ± Î¶Ï‰ÎœÏ„Î±ÎœÎź, ΌΔ ÎŒÎčα Ï€ÏÎ±ÎłÎŒÎ±Ï„ÎčÎșÎź Î”Ï…Ï„Ï…Ï‡ÎŻÎ±. ΀ηΜ αÎčÏƒÎžÎ±ÎœÏŒÎŒÎżÏ…Îœ Ï€ÎŹÎœÏ‰ ÏƒÏ„Îż ΎέρΌα ÎŒÎżÏ…, Όέσα στη ÏƒÎŹÏÎșα ÎŒÎżÏ…, Όέσα ÏƒÏ„Îż Î±ÎŻÎŒÎ± ÎŒÎżÏ… · ÎșατέÎČαÎčΜΔ ΌέχρÎč τηΜ ÏˆÏ…Ï‡Îź ÎŒÎżÏ…. ΔΔΜ ÎźÎŸÎ”ÏÎ± τÎč Î”ÎŻÎœÎ±Îč η ÏˆÏ…Ï‡Îź. ΣΔ Î±Ï…Ï„Îź τηΜ ηλÎčÎșία ΎΔ ÎłÎœÏ‰ÏÎŻÎ¶ÎżÏ…ÎŒÎ” Ï€ÎżÎ»Î»ÎŹ. ΌΌως αÎčÏƒÎžÎ±ÎœÏŒÎŒÎżÏ…Îœ Î­ÎœÏ„ÎżÎœÎ± ότÎč η Ï‡Î±ÏÎŹ Ï„ÎżÏ… Μα ζω ÎźÏ„Î±Îœ ÎŒÎ”ÎłÎ±Î»ÏÏ„Î”ÏÎ· από Ï„Îż σώΌα ÎŒÎżÏ… ÎșαÎč έλΔγα ÏƒÏ„ÎżÎœ Δαυτό ÎŒÎżÏ…: "ΠασÎșαλέ, Î”ÎŻÎœÎ±Îč Îż ÎŹÎłÎłÎ”Î»ÎżÏ‚ Ï„ÎżÏ… ÎšÎ±Î»ÎżÏ Î˜Î”ÎżÏ Ï€ÎżÏ… ÎșÎčÎœÎ”ÎŻ τηΜ Î”Ï…Ï„Ï…Ï‡ÎŻÎ± Όέσα ÏƒÎżÏ…. ÎŠÎ­ÏÏƒÎżÏ… της ÎșαλΏ".
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Henri Bosco (L'enfant et la riviĂšre)
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VoilĂ  comment ça se passait au cƓur du cƓur du Dieu : notre groupe de six, sept ou dix arrivait Ă  pied ou en chaise roulante, piochait dans un malheureux assortiment de biscuits et se servait un verre de limonade, avant de prendre place dans le cercle de la vĂ©ritĂ© et d'Ă©couter Patrick dĂ©biter pour la milliĂšme fois le rĂ©cit dĂ©primant de sa vie – comment il avait eu un cancer des testicules et aurait dĂ» en mourir, sauf qu'il n'Ă©tait pas mort et que maintenant il Ă©tait mĂȘme un adulte bien vivant qui se tenait devant nous dans la crypte d'une Ă©glise de la 137e ville d'AmĂ©rique la plus agrĂ©able Ă  vivre, divorcĂ©, accro aux jeux vidĂ©o, seul, vivotant du maigre revenu que lui rapportait l'exploitation de son passĂ© de super-cancĂ©reux, futur dĂ©tenteur d'un master ne risquant pas d'amĂ©liorer ses perspectives de carriĂšre, et qui attendait, comme nous tous, que l'Ă©pĂ©e de DamoclĂšs lui procure le soulagement auquel il avait Ă©chappĂ© des annĂ©es plus tĂŽt quand le cancer lui avait pris ses couilles, mais avait Ă©pargnĂ© ce que seule une Ăąme charitable aurait pu appeler « sa vie ».
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John Green (The Fault in Our Stars)
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La liberté est un bien immense, mais qu'on ne peut goûter qu'à la condition de vivre.
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Jules Verne
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Impatients de leur présent, ennemis de leur passé et privés d'avenir, nous ressemblions bien ainsi à ceux que la justice ou la haine humaines font vivre derriÚre des barreaux.
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Albert Camus (La Peste)
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Ça ne fait pas grand bien de s’installer dans les rĂȘves en oubliant de vivre, souviens-toi de ça.
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J.K. Rowling (Harry Potter and the Sorcerer's Stone (Harry Potter, #1))
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On meurt deux fois, je le vois bien Cesser d'aimer et d'etre amiable C'est une mort insupportable Cesser de vivre ce n'est rien
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Voltaire
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Il y a une chose plus triste Ă  perdre que la vie, c’est la raison de vivre, Plus triste que de perdre ses biens, c’est de perdre son espĂ©rance.
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Paul Claudel (L'Otage: Drame en trois actes)
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Vivre, mourir: ce ne sont que des conséquences de ce qu'on a construit. Ce qui compte, c'est de bien construire.
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Muriel Barbery (The Elegance of the Hedgehog)
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Curius Dentatus disait, je crois, qu’il aimerait mieux ĂȘtre mort que vivre mort ; Le dernier des malheurs, c’est bien de sortir du monde des vivants avant de mourir.
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SénÚque (De la constance du sage : De la tranquilité de l'ùme)
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Le jugement du corps vaut bien celui de l'esprit et le corps recule devant l'anéantissement. Nous prenons l'habitude de vivre avant d'acquérir celle de penser.
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Albert Camus (The Myth of Sisyphus)
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Je suis bien malheureux. J’ai voulu vivre pour votre bonheur, et je l’ai troublĂ©. Je me dĂ©voue pour votre tranquillitĂ©, et je la trouble encore.
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Pierre Choderlos de Laclos (Les Liaisons dangereuses)
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Du moment que le bonheur, c'est de vivre, on doit le trouver aussi bien dans la douleur que dans le plaisir et parfois jusque dans l'ennui.
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Marcel Jouhandeau
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Pour que vous parveniez à bien nous comprendre, il vous faudrait vivre longtemps , entourées de Noirs, en Afrique, et loin des Blancs dont la civilisation trop poussée finit par tout détruire !
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Guy des Cars
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Vivre d'un troupeau, c'est en grande partie le parasiter quelle que soit la prĂ©ocupation qu'on ait de son bien-ĂȘtre. Nous sommes Ă  la fois le lĂ©gislatif et l'exĂ©cutif. On ne peut enfermer des animaux dans une Ă©treinte intĂ©ressĂ©e sans aller Ă  l'encontre de leur nature. La dĂ©marche soucieuse de vivre avec et non de peut dĂ©jĂ  attĂ©nuer l'arbitraire. Il s'agit alors de vivre des rĂ©ciprocitĂ©s. (p.238)
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Pierre Rabhi (Du Sahara aux Cévennes : Itinéraire d'un homme au service de la Terre-MÚre)
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Les hommes en géneral ne savent pas vivre, ils n'ont aucune vraie familiarité avec la vie, ils ne s'y sentent jamais tout à fait à leur aise, aussi poursuivent-ils différents projets, plus ou moins ambitieux plus ou moins grandioses c'est selon, en géneral bien entendu ils échouent et parviennent à la conclusion qu'ils aurait mieux fait, tout simplement, de vivre, mais en général il est trop tard.
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Michel Houellebecq (Serotonin)
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Le jour oĂč je me suis aimĂ© pour de vrai, J’ai compris qu'en toutes circonstances, J’étais Ă  la bonne place, au bon moment. Et alors, j'ai pu me relaxer. Aujourd'hui je sais que cela s'appelle... l'Estime de soi. Le jour oĂč je me suis aimĂ© pour de vrai, J’ai pu percevoir que mon anxiĂ©tĂ© et ma souffrance Ă©motionnelle N’étaient rien d'autre qu'un signal Lorsque je vais Ă  l'encontre de mes convictions. Aujourd'hui je sais que cela s'appelle... l'AuthenticitĂ©. Le jour oĂč je me suis aimĂ© pour de vrai, J'ai cessĂ© de vouloir une vie diffĂ©rente Et j'ai commencĂ© Ă  voir que tout ce qui m'arrive Contribue Ă  ma croissance personnelle. Aujourd'hui, je sais que cela s'appelle... la MaturitĂ©. Le jour oĂč je me suis aimĂ© pour de vrai, J’ai commencĂ© Ă  percevoir l'abus Dans le fait de forcer une situation ou une personne, Dans le seul but d'obtenir ce que je veux, Sachant trĂšs bien que ni la personne ni moi-mĂȘme Ne sommes prĂȘts et que ce n'est pas le moment... Aujourd'hui, je sais que cela s'appelle... le Respect. Le jour oĂč je me suis aimĂ© pour de vrai, J’ai commencĂ© Ă  me libĂ©rer de tout ce qui n'Ă©tait pas salutaire, personnes, situations, tout ce qui baissait mon Ă©nergie. Au dĂ©but, ma raison appelait cela de l'Ă©goĂŻsme. Aujourd'hui, je sais que cela s'appelle... l'Amour propre. Le jour oĂč je me suis aimĂ© pour de vrai, J’ai cessĂ© d'avoir peur du temps libre Et j'ai arrĂȘtĂ© de faire de grands plans, J’ai abandonnĂ© les mĂ©ga-projets du futur. Aujourd'hui, je fais ce qui est correct, ce que j'aime Quand cela me plait et Ă  mon rythme. Aujourd'hui, je sais que cela s'appelle... la SimplicitĂ©. Le jour oĂč je me suis aimĂ© pour de vrai, J’ai cessĂ© de chercher Ă  avoir toujours raison, Et je me suis rendu compte de toutes les fois oĂč je me suis trompĂ©. Aujourd'hui, j'ai dĂ©couvert ... l'HumilitĂ©. Le jour oĂč je me suis aimĂ© pour de vrai, J’ai cessĂ© de revivre le passĂ© Et de me prĂ©occuper de l'avenir. Aujourd'hui, je vis au prĂ©sent, LĂ  oĂč toute la vie se passe. Aujourd'hui, je vis une seule journĂ©e Ă  la fois. Et cela s'appelle... la PlĂ©nitude. Le jour oĂč je me suis aimĂ© pour de vrai, J’ai compris que ma tĂȘte pouvait me tromper et me dĂ©cevoir. Mais si je la mets au service de mon coeur, Elle devient une alliĂ©e trĂšs prĂ©cieuse ! Tout ceci, c'est... le Savoir vivre. Nous ne devons pas avoir peur de nous confronter. Du chaos naissent les Ă©toiles.
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Charlie Chaplin
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L’usage d’un instrument savant n’a pas fait de toi un technicien sec. Il me semble qu’ils confondent but et moyen ceux qui s’effraient par trop de nos progrĂšs techniques. Quiconque lutte dans l’unique espoir de biens matĂ©riels, en effet, ne rĂ©colte rien qui vaille de vivre.
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Antoine de Saint-Exupéry (Livres de Antoine de Saint-Exupéry (Illustré): Le Petit Prince, Vol de nuit, Terre des hommes, Courrier sud, Citadelle (French Edition))
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Le plus heureux des hommes serait celui qui, possĂ©dant la science de son labeur, et travaillant de ses mains, puisant le bien-ĂȘtre et la libertĂ© dans l'exercice de sa force intelligente, aurait le temps de vivre par le cur et par le cerveau, de comprendre son uvre et d'aimer celle de Dieu.
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George Sand (La mare au diable)
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Cela pose un problÚme que...?" "Que tu ne sois pas juif? Pas le moins du tout, dit maman en riant. Ni mon mari ni moi n'accordons d'importance à la différence de l'autre. Bien au contraire, nous avons toujours pensé que'elle était passionnante et source de multiples bonheurs. Le plus important, quand on veut vivre à deux toute une vie, est d'etre sur que l'on ne s'ennuiera pas ensemble. L'ennui dans un couple, c'est lui qui tue l'amour. Tant que tu feras rire Alice, tant que tu lui donneras l'envie de te retrouver, alors que tu viens à peine de la quitter pour aller travailler, tant que tu seras celui dont elle partage les confidences et à qui elle aime aussi se confier, tant que tu vivras tes reves avec elle, meme ceux que tu ne pourras pas réaliser, alors je suis certaine que quelles que soient tes origines, la seule chose qui sera étrangÚre à votre couple sera le monde et ses jaloux.
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Marc Levy (Les Enfants de la liberté)
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Il paraĂźt qu'Ă  soixante-dix ans, c'est le meilleur souvenir qu'il vous reste. Le sexe. C'est ma grand-mĂšre qui m'a dit ça. Elle m'a dit, tu sais quand on a mon Ăąge, les plus beaux souvenirs qu'il vous reste ce sont les nuits d'amour. C'est ses mots Ă  elle, mais je sais bien ce que ça veut dire. Ça veut dire qu'il n'y a rien de tel, aprĂšs avoir bien pris son pied, que de se coller contre un homme en lui tenant la bite encore toute chaude comme un petit Ă©cureuil endormi. Tricote-toi des souvenirs, elle me dit, ma grand-mĂšre, alors moi, je fais comme elle me dit et je me tricote des souvenirs pour me faire des pulls et des pulls pour quand je serai vieille et que j'aurai toujours froid. Parce que les vieux, ils ont toujours froid. Ils ont froid de ne plus pouvoir vivre les choses. C'est ça, qui donne froid, c'est de plus pouvoir s'assouvir, de plus pouvoir se donner Ă  fond Ă  ce qu'on a envie de vivre.
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David Thomas (La Patience des buffles sous la pluie)
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Si il y avait bien une chose que l'Occupation nous avait apprise, c'Ă©tait Ă  nous taire. A ne jamais montrer ce que nous pensions du IIIĂšme Reich et de cette guerre. Nous n'Ă©tions que des dĂ©tenus dans nos propres maisons, dans notre pays. Plus libres d'avoir une opinion. Parce que mĂȘme nos pensĂ©es pouvaient nous enchaĂźner. Ce soir, je l'avais oubliĂ©. Pourtant il ne m'arrĂȘta pas. Il ne me demanda pas de le suivre pour un petit interrogatoire. AprĂšs tout, il n'y avait que les rĂ©sistants pour tenir un discours si tranchĂ©, non? Il n'y avait qu'eux pour oser dire de telles choses devant un caporal de la Wehrmacht. Alors pourquoi me tendit-il simplement sa fourche? Puisque la mienne Ă©tait inutilisable... J'hĂ©sitai Ă  la prendre. Quand je le fis, il refusa de la lĂącher. Nous restĂąmes lĂ , une seconde. Nos mains se frĂŽlant sur le manche en bois et nos regards accrochĂ©s. - Je ne suis pas innocent c'est vrai, m'avoua-t-il. Je ne le serai jamais plus et je devrai vivre avec toutes mes fautes. J'ai tuĂ©, je tuerai sans doute encore. J'ai blessĂ© et je blesserai encore. J'ai menti et je mentirai encore. Non, c'est vrai, il n'y a plus rien d'innocent en moi. Mais je l'ai Ă©tĂ©. Au dĂ©but. Avant la guerre. Je l'Ă©tais vraiment, vous savez. Innocent. Sa voix n'Ă©tait qu'un murmure. - Pourquoi me dites-vous ça? - Pour que vous le sachiez. - Mais pourquoi? demandai-je encore. Il recula d'un pas. - Bonne soirĂ©e, monsieur Lambert, dit-il sans me rĂ©pondre. Il quitta les Ă©curies sans un bruit. Aussi discrĂštement qu'il Ă©tait arrivĂ©.
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Lily Haime (À l'ombre de nos secrets)
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Il fallait que j'arrĂȘte mes efforts vains pour recevoir l'assentiment de mes parents... MĂȘme si les choses ne sont pas dĂ©roulĂ©es trĂšs bien par le passĂ©, j'ai comme le sentiment qu'Ă  partir de maintenant, ça devrait aller mieux. Comment je peux vivre ma propre vie si je me soucie trop d'ĂȘtre une fille modĂšle ?
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Kabi Nagata (My Lesbian Experience with Loneliness)
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La grandeur d'un mĂ©tier est peut-ĂȘtre, avant tout, d'unir des hommes : il n'est qu'un luxe vĂ©ritable, et c'est celui des relations humaines. En travaillant pour les seuls biens matĂ©riels, nous bĂątissons nous-mĂȘmes notre prison. Nous nous enfermons solitaires, avec notre monnaie de cendre qui ne procure rien qui vaille de vivre. Si je cherche dans mes souvenirs ceux qui m'ont laissĂ© un goĂ»t durable, si je fais le bilan des heures qui ont comptĂ©, Ă  coup sĂ»r je retrouve celles que nulle fortune ne m'eĂ»t procurĂ©es. On n'achĂšte pas l'amitiĂ© d'un Mermoz, d'un compagnon que les Ă©preuves vĂ©cues ensemble ont liĂ© Ă  nous pour toujours. (p. 35-36)
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Antoine de Saint-Exupéry (Wind, Sand and Stars)
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Être heureux, c’est apprendre Ă  choisir. Non seulement les plaisirs appropriĂ©s mais aussi sa voie, son mĂ©tier, sa maniĂšre de vivre et d’aimer. Choisir ses loisirs, ses amis, les valeurs sur lesquelles fonder sa vie. Bien vivre, c’est apprendre Ă  ne pas rĂ©pondre Ă  toutes les sollicitations, Ă  hiĂ©rarchiser ses prioritĂ©s. L’exercice de la raison permet une mise en cohĂ©rence de notre vie en fonction des valeurs ou des buts que nous poursuivons. Nous choisissons de satisfaire tel plaisir ou de renoncer Ă  tel autre parce que nous donnons un sens Ă  notre vie – et ce, aux deux acceptions du terme : nous lui donnons Ă  la fois une direction et une signification.
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SénÚque
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etre ou ne pas etre se demandait shakspear .y'a t'il plus de puissance d'ame a subir . ou bien s' armer contre les vagues de douleurs. avant que les maux spirituelles du vertige demeurent . avnt que laterre dit sa parole aux milles tortures naturelles . avant que le seigneur devient en colére . souvient toi de ta naissance prmiére . le jour ou on t'a apris la priére . ton coeur etait brave trés propre .tu cherchait la paix pour mieucx vivre alors que la paix. cest s'offrir le luxe e ne plus souffrir . inconscient tu était du terme mourir . l'agonie de la mort va te couvrir .cette heure tu connaitras une valeure . a quoi sert de vivre deux heures sans savoir que le destin c'est l'enfer .etre ou ne pas etre se demandait un jeune asperger .telle est la question du grand mistére. reveille toi pour ne pl us dormir . car la cloche de la restruction va te couvrir.
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cherine hamaidi savant
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Dans quelles conditions l’homme s’est-il inventĂ© Ă  son usage ces deux Ă©valuations : le bien et le mal : Et quelle valeur ont-elles par elles-mĂȘmes ? Ont-elles jusqu’à prĂ©sent enrayĂ© ou favorisĂ© le dĂ©veloppement de l’humanitĂ© ? Sont-elles un symptĂŽme de dĂ©tresse, d’appauvrissement vital, de dĂ©gĂ©nĂ©rescence ? Ou bien trahissent-elles, au contraire, la plĂ©nitude, la force, la volontĂ© de vivre, le courage, la confiance en l’avenir de la vie ?
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Friedrich Nietzsche (Généalogie de la morale: édition originale et annotée)
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Il n'y a pas d'Ăąge pour rĂ©apprendre Ă  vivre. On dirait mĂȘme qu'on ne fait que ça toute sa vie. Repartir, recommencer, respirer : comme si l'on apprenait jamais rien sur l'existence, sauf, parfois, une caractĂ©ristique de soi-mĂȘme inconnue de nous et de nos amis : une endurance, une vaillance, une lĂ©gĂšretĂ©, quelque chose qui revient au jour dans les pires moments et sur quoi on ne comptait pas... Quand ce n'est pas, bien sĂ»r, hĂ©las, une impuissance, une lĂąchetĂ©, un abandon de tout.
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Françoise Sagan (DerriÚre l'épaule)
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En effet l'Ă©cart que le vice mettait entre la vie rĂ©elle d'Odette et la vie relativement innocente que Swann avait cru, et bien souvent croyait encore, que menait sa maitresse, cet Ă©cart, Odette en ignorait l'Ă©tendue, un ĂȘtre vicieux, affectant toujours la mĂȘme vertu devant les ĂȘtres de qui il ne veut pas que soient soupçonnĂ©s ses vices, n'a pas de contrĂŽle pour se rendre compte combien ceux-ci, dont la croissance continue est insensible pour lui-mĂȘme, l'entrainent peu Ă  peu loin des façons de vivre normales.
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Marcel Proust (Swann’s Way (In Search of Lost Time, #1))
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[...] Les natures du genre de la tienne, les hommes douĂ©s de sens dĂ©licats, ceux qui ont de l'Ăąme, les poĂštes, ceux pour qui toute la vie est amour nous sont presque toujours supĂ©rieurs, Ă  nous, chez qui domine l'intellect. Vous ĂȘtes, par votre origine, du cĂŽtĂ© de la mĂšre. Vous vivez dans la plĂ©nitude de l'ĂȘtre. La force de l'amour, la capacitĂ© de vivre intensĂ©ment les choses est votre lot. Nous autres, hommes d'intellect, bien que nous ayons l'air souvent de vous diriger et de vous gouverner, nous ne vivons pas dans l'intĂ©gritĂ© de l'ĂȘtre, nous vivons dans les abstractions. A vous la plĂ©nitude de la vie, le suc des fruits, Ă  vous le jardin de l'amour, le beau pays de l'art. Vous ĂȘtes chez vous sur terre, nous dans le monde des idĂ©es. Vous courez le risque de sombrer dans la sensualitĂ©, nous d'Ă©touffer dans le vide. Tu es artiste, je suis penseur. Tu dors sur le cƓur d'une mĂšre, je veille dans le dĂ©sert. Moi, c'est le soleil qui m'Ă©claire, pour toi brillent la lune et les Ă©toiles. Ce sont des jeunes filles qui hantent tes rĂȘves; moi, ce sont mes Ă©coliers... (p. 54-55)
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Hermann Hesse (Narcissus and Goldmund)
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Je disais à ma soeur, ou elle me disait, tu viens, on joue à rire ? On s'allongeait cÎte à cÎte sur un lit, et on commençait. Pour faire semblant, bien sûr. Rires forcés. Rires ridicules. Rires si ridicules qu'ils nous faisaient rire. Alors il venait, le vrai rire, le rire entier, nous emporter dans son déferlement immense. Rires éclatés, repris, bousculés, déchaßnés, rires magnifiques, somptueux et fous... Et nous riions à l'infini du rire de nos rires... Oh rire ! rire de la jouissance, jouissance du rire ; rire, c'est si profondément vivre.
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Annie Leclerc (Parole de femme)
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- Maman, pourquoi les nuages vont dans un sens et nous dans l'autre ? Isaya sourit, caressa la joue de sa fille du bout des doigts. - Il y a deux rĂ©ponses Ă  ta question. Comme Ă  toutes les questions, tu le sais bien. Laquelle veux-tu entendre ? - Les deux. -Laquelle en premier alors ? La fillette plissa le nez. - Celle du savant. - Nous allons vers le nord parce que nous cherchons une terre oĂč nous Ă©tablir. Un endroit oĂč construire une belle maison, Ă©lever des coureurs et cultiver des racines de niam. C'est notre rĂȘve depuis des annĂ©es et nous avons quittĂ© Al-Far pour le vivre. - Je n’aime pas les galettes de niam... - Nous planterons aussi des fraises, promis. Les nuages, eux, n'ont pas le choix. Ils vont vers le sud parce que le vent les pousse et, comme ils sont trĂšs trĂšs lĂ©gers, il sont incapables de lui rĂ©sister. - Et la rĂ©ponse du poĂšte ? - Les hommes sont comme les nuages. Ils sont chassĂ©s en avant par un vent mystĂ©rieux et invisible face auquel ils sont impuissants. Ils croient maĂźtriser leur route et se moquent de la faiblesse des nuages, mais leur vent Ă  eux est mille fois plus fort que celui qui souffle lĂ -haut. La fillette croisa les bras et parut se dĂ©sintĂ©resser de la conversation afin d'observer un vol de canards au plumage chatoyant qui se posaient sur la riviĂšre proche. Indigo, Ă©meraude ou vert pĂąle, ils se bousculaient dans une cacophonie qui la fit rire aux Ă©clats. Lorsque les chariots eurent dĂ©passĂ© les volatiles, elle se tourna vers sa mĂšre. - Cette fois, je prĂ©fĂšre la rĂ©ponse du savant. -Pourquoi ? demande Isaya qui avait attendu sereinement la fin de ce qu'elle savait ĂȘtre une intense rĂ©flexion. - J'aime pas qu'on me pousse en cachette.
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Pierre Bottero (Ellana (Le Pacte des MarchOmbres, #1))
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Je connais trop le monde, ma chÚre, pour vouloir me mettre à la discrétion d'un homme trop supérieur. Sachez qu'il faut se laisser faire la cour par eux, mais les épouser! c'est une faute. Nous autres femmes, nous devons admirer les hommes de génie, en jouir comme d'un spectacle, mais vivre avec eux! jamais. Fi donc! c'est vouloir prendre plaisir à regarder les machines de l'Opéra, au lieu de rester dans une loge, à y savourer ses brilliant illusions. Mais chez vous, ma pauvre enfant, le mal est arrivé, n'est-ce-pas? Eh bien! il faut essayer de vous armer contre la tyrannie.
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Honoré de Balzac (La Maison du Chat-qui-pelote : et autres scÚnes de la vie privée)
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La chute de la Monarchie avait Ă©tĂ© si prompte, que, la premiĂšre stupĂ©faction passĂ©e, il y eut chez les bourgeois comme un Ă©tonnement de vivre encore. L’exĂ©cution sommaire de quelques voleurs, fusillĂ©s sans jugements, parut une chose trĂšs juste. On se redit, pendant un mois, la phrase de Lamartine sur le drapeau rouge, » qui n’avait fait que le tour du Champ de Mars, tandis que le drapeau tricolore », etc ; et tous se rangĂšrent sous son ombre, chaque parti ne voyant des trois couleurs que la sienne - et se promettant bien, dĂšs qu’il serait le plus fort, d’arracher les deux autres.
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Gustave Flaubert (Sentimental Education)
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Il me semble qu'ils confondent but et moyen ceux qui s'effraient par trop de nos progrĂšs techniques. Quiconque lutte dans l'unique espoir de biens matĂ©riels, en effet, ne rĂ©colte rien qui vaille de vivre. Mais la machine n'est pas un but. L'avion n'est pas un but : c'est un outil, un outil comme la charrue. Si nous croyons que la machine abĂźme l'homme c'est que, peut-ĂȘtre, nous manquons un peu de recul pour juger les effets de transformations aussi rapides que celles que nous avons subies. Que sont les cent annĂ©es de l'histoire de la machine en regard des deux cent mille annĂ©es de l'histoire de l'homme? C'est Ă  peine si nous nous installons dans ce paysage de mines et de centrales Ă©lectriques. C'est Ă  peine si nous commençons d'habiter cette maison nouvelle, que nous n'avons mĂȘme pas achevĂ© de bĂątir. Tout a changĂ© si vite autour de nous : rapports humains, conditions de travail, coutumes. Notre psychologie elle-mĂȘme a Ă©tĂ© bousculĂ©e dans ses bases les plus intimes. Les notions de sĂ©paration, d'absence, de distance, de retour, si les mots sont demeurĂ©s les mĂȘmes, ne contiennent plus les mĂȘmes rĂ©alitĂ©s. Pour saisir le monde aujourd'hui, nous usons d'un langage qui fut Ă©tabli pour le monde d'hier. Et la vie du passĂ© nous semble mieux rĂ©pondre Ă  notre nature, pour la seule raison qu'elle rĂ©pond mieux Ă  notre langage. Pour le colonial qui fonde un empire, le sens de la vie est de conquĂ©rir. Le soldat mĂ©prise le colon. Mais le but de cette conquĂȘte n'Ă©tait-il pas l'Ă©tablissement de ce colon? Ainsi dans l'exaltation de nos progrĂšs, nous avons fait servir les hommes Ă  l'Ă©tablissement des voies ferrĂ©es, Ă  l'Ă©rection des usines, au forage de puits de pĂ©trole. Nous avions un peu oubliĂ© que nous dressions ces constructions pour servir les hommes. (Terre des Hommes, ch. III)
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Antoine de Saint-Exupéry
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Le culte des sens a Ă©tĂ© souvent dĂ©criĂ©, et Ă  juste titre : un instinct naturel inspire aux hommes la terreur de passions et de sensations qui leur semblent plus fortes qu'eux-mĂȘmes, et qu'ils ont conscience de partager avec les formes infĂ©rieures du monde organique. Mais Dorian Gray estimait que la vraie nature des sens n'avait jamais Ă©tĂ© bien comprise, qu'ils avaient gardĂ© leur animalitĂ© sauvage uniquement parce qu'on avait voulu les soumettre par la famine ou les tuer Ă  force de souffrance, au lieu de chercher Ă  en faire les Ă©lĂ©ments d'une spiritualitĂ© nouvelle, ayant pour trait dominant une sĂ»re divination de la beautĂ©. Quand il considĂ©rait la marche de l'homme Ă  travers l'Histoire, il Ă©tait poursuivi par une impression d'irrĂ©parable dommage. Que de choses on avait sacrifiĂ©es, et combien vainement ! Des privations sauvages, obstinĂ©es, des formes monstrueuses de martyre et d'immolation de soi, nĂ©es de la peur, avaient abouti Ă  une dĂ©gradation plus Ă©pouvantable que la dĂ©gradation tout imaginaire qu'avaient voulu fuir de pauvres ignorants : la Nature, dans sa merveilleuse ironie, avait amenĂ© les anachorĂštes Ă  vivre dans le dĂ©sert, mĂȘlĂ©s aux animaux sauvages ; aux ermites, elle avait donnĂ© pour compagnons les bĂȘtes des champs.
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Oscar Wilde (The Picture of Dorian Gray)
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Il serra ses mains en poings et se força Ă  marcher Ă  pas lents et mesurĂ©s vers la tombe et commença Ă  haleter. Bon sang, il ne pouvait pas s’écrouler. Il voulait le faire, il avait besoin de le faire, besoin de voir ce qu’il pourrait retirer de ce rappel physique de sa propre mortalitĂ© Ă©phĂ©mĂšre. Peut-ĂȘtre que cela lui donnerait envie de vivre Ă  nouveau. Il lut les dates de dĂ©cĂšs marquĂ©es sur les pierres tombales, en faisant attention Ă  ne pas marcher sur les tombes des autres pauvres enfants morts, d’annĂ©e en annĂ©e, jusqu’à ce qu’il voit son nom. JULIETTE ANNE MARTIN 14 aoĂ»t 1991-9 octobre 2008 Fille bien-aimĂ©e. Il n’y avait pas d’ours, de plaques ou mĂȘme d’anges comme il en avait vu sur les autres pierres tombales, alors qu’il cherchait la sienne. Elle Ă©tait gris foncĂ©, en marbre et trĂšs Ă©lĂ©gante. Ses jambes se dĂ©robĂšrent sous lui quand il rĂ©alisa que son amie, sa Juliette, gisait Ă  ses pieds, et il atterrit sur la terre molle Ă  cĂŽtĂ© d’elle. Les fleurs oubliĂ©es tombĂšrent au sol et des sanglots secs ravagĂšrent son corps. Il ne pleurerait pas, il le savait. Il Ă©tait incapable de pleurer depuis cette nuit-lĂ . Tout comme il ne supportait plus d’ĂȘtre touchĂ©, il ne pouvait Ă©prouver le plus petit soulagement que les pleurs lui auraient accordĂ©.
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J.P. Barnaby (Aaron: Histoire d'un survivant #1 (French Edition))
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Elle dit: je ne regrette rien. Bien sĂ»r, il n’y aurait pas eu les annĂ©es d’opprobre, il n’y aurait pas aujourd’hui cette souffrance, mais il n’u aurait pas eu non plus le bonheur, le temps inĂ©galable du bonheur. Cette phrase-lĂ  agit sur moi comme un rĂ©vĂ©lation. D’évidence, c’est seulement en souvenir du bonheur qu’on peut finir par accepter son malheur prĂ©sent, vivre avec lui plutĂŽt que mourir. Et alors, dans le silence, reviennent les rires sonores, les corps qui se jettent sur les lits, les regards complices, les baisers lents, les fatigues apaisĂ©es, les promesses non dites mais entendues, les lumiĂšres violentes d’un Ă©tĂ© triomphant. Oui: le bonheur. Nous n’avons pas eu le temps d’ĂȘtre malheureux ensemble.
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Philippe Besson (In the Absence of Men)
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La raison nous impose des limites bien trop étroites et nous invite à ne vivre que le connu - encore avec bien des restrictions - et dans un cadre connu, comme si nous connaissions la véritable étendue de la vie. De fait, notre vie, jour aprÚs jour, dépasse de beaucoup les limites de notre conscience et, sans que nous le sachions, la vie de l'inconscient accompagne notre existence. Plus la raison critique prédomine, plus la vie s'appauvrit ; mais plus nous sommes aptes à rendre conscient ce qui est inconscient et ce qui est mythe, plus est grande la quantité de vie que nous intégrons. La surestimation de la raison a ceci de commun avec un pouvoir d'état absolu ; sous sa domination, l'individu dépérit. (p. 475)
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C.G. Jung (Memories, Dreams, Reflections)
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La mort est une chose Ă©tonnante. Les gens passent leur vie entiĂšre Ă  faire comme si elle n’existait pas, et pourtant elle est la plupart du temps notre principale raison de vivre. Certains d’entre nous prennent conscience de la fragilitĂ© humaine assez tĂŽt pour vivre ensuite plus intensĂ©ment, plus obstinĂ©ment, plus furieusement. Quelques-uns ont besoin de sa prĂ©sence constante pour se sentir vivants. D’autres sont tellement obsĂ©dĂ©s par la mort qu’ils s’assoient dans la salle d’attente bien avant qu’elle n’ait annoncĂ© son arrivĂ©e. Nous la redoutons, et pourtant la plupart d’entre nous ont peur qu’elle n’emporte quelqu’un d’autre plus qu’elle ne nous emporte nous-mĂȘmes. Car la plus grande crainte face Ă  la mort est qu’elle passe Ă  cĂŽtĂ© de nous. Et nous laisse esseulĂ©s.
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Fredrik Backman (A Man Called Ove)
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Anastase passa son pouce sur ma lĂšvre infĂ©rieure ; ses traits virils, son regard pĂ©nĂ©trant me brĂ»lait. — Laisse-toi aller, MikhaĂŻl. Personne ne surveille tes faits et gestes. Personne ne dira rien ni ne te jugera. Sois toi-mĂȘme, abaisse tes barriĂšres. J’inspirai profondĂ©ment et collai sa mĂšche de cheveux Ă  mon nez, m’apaisant. — Vivre dans un fort n’est pas vivre, les plus belles sensations sont celles de pleine libertĂ©. Tu peux toucher qui tu veux. Rire avec qui cela te plaĂźt. Agir comme un enfant si c’est ce dont tu as envie. Je plissai le nez. — Non merci, je laisse ça Ă  Matt et Jimmy, deux enfants, c’est bien assez Ă  gĂ©rer. Nous sourĂźmes tous deux. Le brun me posa un baiser sur la joue, et peu de temps aprĂšs, la porte s’ouvrit Ă  nouveau. — Hey ! Moi aussi je veux des cĂąlins !
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Phoenix Pharell (Des échos de sang et de crocs (Paranormal) (French Edition))
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Or je dis qu’il n’y a point d’homme, qui avec un peu de rĂ©flexion puisse balancer entre le crime, quelque avantage qu’il s’en promette, & la perte entiĂšre & perpĂ©tuelle de sa libertĂ©. Donc l’intensitĂ© de la peine d’un esclavage perpĂ©tuel a tout ce qu’il faut pour dĂ©tourner du crime l’esprit le plus dĂ©terminĂ©, aussi bien que la peine de mort. J’ajoute qu’elle produira cet effet encore plus sĂ»rement. Beaucoup d’hommes envisagent la mort d’un Ɠil ferme & tranquille, les uns par fanatisme, d’autres par cette vanitĂ© qui nous accompagne au-delĂ  mĂȘme du tombeau ; d’autres par un dernier dĂ©sespoir qui les pousse Ă  sortir de la misĂšre, ou Ă  cesser de vivre. Mais le fanatisme & la vanitĂ© abandonnent le criminel dans les chaĂźnes, sous les coups, dans une cage de fer ; & le dĂ©sespoir ne termine pas ses maux, mais les commence.
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Cesare Beccaria (Dos Delitos e das Penas)
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Quand je vis avec mes semblables, ma pensĂ©e s'occupe d'eux si exclusivement, soit pour les aider Ă  vivre bien, soit pour comprendre pourquoi ils vivent mal, que j'oublie absolument de vivre pour mon compte. Quand je m'aperçois que j'ai fait pour eux mon possible et que je ne leur suis plus nĂ©cessaire, ou, ce qui arrive plus souvent, que je ne leur suis bon Ă  rien, j'Ă©prouve le besoin de vivre avec ce moi intĂ©rieur qui s'identifie Ă  la nature et au rĂȘve de la vie dans l'Ă©ternel et dans l'infini. La nature, je le sais, parle dans l'homme plus que dans les arbres et les rochers; mais elle y parle follement, elle y est plus souvent dĂ©lirante que sage, elle y est pleine d'illusions ou de mensonges. Les animaux sauvages eux-mĂȘmes sont tourmentĂ©s d'un besoin d'existence qui nous empĂȘche de savoir ce qu'ils pensent et si leurs obscures manifestations ne sont pas trompeuses. DĂšs qu'ils subissent des besoins et des passions, ils doivent les satisfaire Ă  tout prix, et toute logique de leur instinct de conservation doit cĂ©der Ă  cette sauvage logique de la faim et de l'amour. OĂč donc trouver, oĂč donc surprendre la voix du vrai absolu dans la nature? HĂ©las, dans le silence des choses inertes, dans le mutisme de ce qui ne ment pas! la face impassible du rocher qui boit le soleil, le front sans ombre du glacier qui regarde la lune, la morne altitude des lieux inaccessibles, exercent sur nous un rassĂ©rĂ©nement inexplicable. LĂ , nous nous sentons comme suspendus entre ciel et terre, dans une rĂ©gion d'idĂ©es oĂč il ne peut y avoir que Dieu ou rien, et, s'il n'y a rien, nous sentons que nous ne sommes rien nous-mĂȘmes et que nous n'existons pas; car rien ne peut se passer de sa raison d'ĂȘtre.
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George Sand (Le dernier amour)
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Elle demeurait seule debout, au milieu des richesses entassĂ©es de son hĂŽtel, avec un peuple d'hommes abattus Ă  ses pieds. Comme ces monstres antiques dont le domaine redoutĂ© Ă©tait couvert d'ossements, elle posait les pieds sur des crĂąnes ; et des catastrophes l'entouraient, la flambĂ©e furieuse de Vandreuves, la mĂ©lancolie de Foucarmont perdu dans les mers de la Chine, le dĂ©sastre de Steiner rĂ©duit Ă  vivre en honnĂȘte homme, l'imbĂ©cilitĂ© satisfaite de La Faloise, et le tragique effondrement des Muffat, et le blanc cadavre de Georges, veillĂ© par Philippe, sorti la veille de prison. Son oeuvre de ruine et de mort Ă©tait faite, la mouche envolĂ©e de l'ordure des faubourgs, apportant le ferment des pourritures sociales, avait empoisonnĂ© ces hommes, rien qu'Ă  se poser sur eux. C'Ă©tait bien, c'Ă©tait juste, elle avait vengĂ© son monde, les geux et les abandonnĂ©es.
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Émile Zola
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Courageux peuple belge, vous avez vaincu de façon décisive! Veillez maintenant à profiter de cette victoire, vos ennemis ont été réduits au silence, ne perdons pas un instant, unissons-nous autour du gouvernement provisoire qui a été mis en place grùce à vous, ne doutez pas que les incendiaires, que vous avez expulsés de votre capitale d'une maniÚre si humiliante, préparent déjà de nouveaux crimes. N'hésitons plus, n'épargnons plus, chassons une fois pour toutes les assassins de chez nous qui ont travaillé ici par le feu et le sabre, violant et détruisant. Nous devons sauver nos mÚres, nos femmes, nos enfants et nos biens ; nous devons vivre en hommes libres, ou nous ensevelir sous une montagne de cendres. Soyons unis chers compatriotes, et alors nous serons invincibles, l'ordre véritable, il est indispensable pour préserver notre indépendance. Vive la Belgique!
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Louis Joseph Antoine de Potter
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Sans doute, rien n'est plus naturel, aujourd'hui, que de voir des gens travailler du matin au soir et choisir ensuite de perdre aux cartes, au cafĂ©, et en bavardages, le temps qui leur reste pour vivre. Mais il est des villes ou des pays oĂč les gens ont, de temps en temps, le soupçon d'autre chose. En gĂ©nĂ©ral, cela ne change pas leur vie. Seulement, il y a eu le soupçon et c'est toujours cela de gagnĂ©. Oran, au contraire, est apparemment une ville sans soupçon, c'est-Ă -dire une ville tout Ă  fauit moderne. Il n'est pas nĂ©cessaire, en consĂ©quence, de prĂ©ciser la façon dont on s'aime chez nous. Les hommes et les femmes, ou bien se dĂ©vorent rapidement dans ce qu'on appelle l'acte d'amour, ou bien s'engagent dans une longue habitude Ă  eux. Entre ces deux extrĂȘmes, il n'y a pas souvent de milieu. Cela non plus n'est pas original. A Oran comme ailleurs, faute de temps et de rĂ©flexion, on est bien obligĂ© de s'aimer sans le savoir.
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Albert Camus (The Plague)
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Mon ami, vous m'avez facilement appris Ă  ne vivre que pour vous ; apprenez-moi maintenant Ă  vivre loin de vous... Non, ce n'est pas lĂ  ce que je veux dire, c'est plutĂŽt que, loin de vous, je voudrais ne point vivre, ou au moins oublier mon existence. AbandonnĂ©e Ă  moi-mĂȘme, je ne puis supporter ni mon bonheur, ni ma peine; je sens le besoin du repos, et tout repos m'est impossible; j'ai vainement appelĂ© le sommeil, le sommeil a fui de moi; je ne puis ni m'occuper ni rester oisive; tour-Ă -tour un feu brĂ»lant me dĂ©vore, un frisson mortel m'anĂ©antit: tout mouvement me fatigue et je ne saurais rester en place. Enfin ! que dirai-je ? je souffrirais moins dans l'ardeur de la plus violente fiĂšvre, et, sans que je puisse ni l'expliquer ni le concevoir, je sens trĂšs bien pourtant que cet Ă©tat de souffrance ne vient que de mon impuissance Ă  contenir ou diriger une foule de sentiments au charme desquels cependant je me trouverais heureuse de pouvoir livrer mon Ăąme toute entiĂšre.
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Laclos Pierre Choderlos De (Les Liaisons dangereuses)
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Moi qui ai eu la chance, malgrĂ© quelques grosses sĂ©quelles, de me relever et de retrouver une autonomie totale, je pense souvent Ă  cette incroyable pĂ©riode de ma vie et surtout Ă  tous mes compagnons d’infortune. À part Samia, peut-ĂȘtre, je sais pertinemment que les autres sont toujours dans leurfauteuil, qu’ils sont contraints Ă  une assistance permanente, qu’ils ont toujours droit aux sondages urinaires, aux transferts, aux fauteuils-douches, aux sĂ©ances de verticalisation
 Ils sont pour toujours confrontĂ©s Ă  ces mots qui ont Ă©tĂ© mon quotidien, cette annĂ©e-lĂ  J’ai fait trois autres centres de rééducation par la suite, mais jamais je n’ai autant ressenti la violence de cette immersion dans le monde du handicap que lors de ces quelques mois. Jamais je n’ai retrouvĂ© autant de malheur et autant d’envie de vivre rĂ©unis en un mĂȘme lieu, jamais je n’ai croisĂ© autant de souffrance et d’énergie, autant d’horreur et d’humour. Et jamais plus je n’ai ressenti autant d’intensitĂ© dans le rapport des ĂȘtres humains Ă  l’incertitude de leur avenir .. Je ne connaissais rien de ce monde-lĂ  avant mon accident. Je me demande mĂȘme si j’y avais dĂ©jĂ  vraiment pensĂ©. Bien sĂ»r, cette expĂ©rience aussi difficile pour moi que pour mon entourage proche m’a beaucoup appris sur moi-mĂȘme, sur la fragilitĂ© de l’existence (et celle des vertĂšbres cervicales). Personne d’autre ne sait mieux que moi aujourd’hui qu’une catastrophe n’arrive pas qu’aux autres, que la vie distribue ses drames sans regarder qui les mĂ©rite le plus . Mais, au-delĂ  de ces lourds enseignements et de ces grandes considĂ©rations, ce qui me reste surtout de cette pĂ©riode, ce sont les visages et les regards que j’ai croisĂ©s dans ce centre. Ce sont les souvenirs de ces ĂȘtres qui, Ă  l’heure oĂč j’écris ces lignes, continuent chaque jour de mener un combat qu’ils n’ont jamais l’impression de gagner.Si cette Ă©preuve m’a fait grandir et progresser, c’est surtout grĂące aux rencontres qu’elle m’aura offertes.
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Grand corps malade (Patients)
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Qui vous le dit, qu’elle (la vie) ne vous attend pas ? Certes, elle continue, mais elle ne vous oblige pas Ă  suivre le rythme. Vous pouvez bien vous mettre un peu entre parenthĂšses pour vivre ce deuil
 accordez-vous le temps. *** Parce que Ò«a me fait plaisir. Parce que je sais aussi que l’entourage peut se montrer trĂšs discret dans pareille situation, et que de se changer les idĂ©es de temps en temps fait du bien. Parce que je sais que vous aimez la montagne et que vous n’iriez pas toute seule. *** Oui. Si vous perdez une jambe, Ò«a se voit, les gens sont conciliants. Et encore, pas tous. Mais quand c’est un morceau de votre cƓur qui est arrachĂ©, Ò«a ne se voit pas de l’extĂ©rieur, et c’est au moins aussi douloureux
 Ce n’est pas de la faute des gens. Ils ne se fient qu’aux apparences. Il faut gratter pour voir ce qu’il y a au fond. Si vous jetez une grosse pierre dans une mare, elle va faire des remous Ă  la surface. Des gros remous d'abord, qui vont gifler les rives, et puis des remous plus petits, qui vont finir par disparaĂźtre. Peu Ă  peu, la surface redevient lisse et paisible. Mais la grosse pierre est quand mĂȘme au fond. La grosse pierre est quand mĂȘme au fond. *** La vie s’apparente Ă  la mer. Il y a les bruit des vagues, quand elles s’abattent sur la plage, et puis le silence d’aprĂšs, quand elles se retirent. Deux mouvement qui se croissent et s’entrecoupent sans discontinuer. L’un est rapide, violent, l’autre est doux et lent. Vous aimeriez vous retirer, dans le mĂȘme silence des vagues, partir discrĂštement, vous faire oublier de la vie. Mais d’autres vague arrivent et arriveront encore et toujours. Parce que c’est Ò«a la vie
 C’est le mouvement, c’est le rythme, le fracas parfois, durant la tempĂȘte, et le doux clapotis quand tout est calme. Mais le clapotis quand mĂȘme Un bord de mer n'est jamais silencieux, jamais. La vie non plus, ni la vĂŽtre, ni la mienne. Il y a les grains de sables exposĂ©s aux remous et ceux protĂ©gĂ©s en haut de la plage. Lesquels envier? Ce n'est pas avec le sable d'en haut, sec et lisse, que l'on construit les chĂąteaux de sable, c'est avec celui qui fraye avec les vagues car ses particules sont coalescentes. Vous arriverez Ă  reconstruire votre chĂąteau, vous le construirez avec des grains qui vous ressemblent, qui ont aussi connu les dĂ©ferlantes de la vie, parce qu'avec eux, le ciment est solide.. *** « Tu ne sais jamais Ă  quel point tu es fort jusqu’au jour oĂč ĂȘtre fort reste la seule option. » C’est Bob Marley qui a dit Ò«a. *** Manon ne referme pas violemment la carte du restaurant. Elle n’éprouve pas le besoin qu’il lui lise le menu pour qu’elle ne voie pas le prix, et elle trouvera Ă©gal que chaque bouchĂ©e vaille cinq euros. Manon profite de la vie. Elle accepte l’invitation avec simplicitĂ©. Elle dĂ©fend la place des femmes sans ĂȘtre une fĂ©ministe acharnĂ©e et cela ne lui viendrait mĂȘme pas Ă  l’idĂ©e de payer sa part. D’abord, parce qu’elle sait que Paul s’en offusquerait, ensuite, parce qu’elle aime ces petites marques de galanterie, qu’elle regrette de voir disparaĂźtre avec l’évolution d’une sociĂ©tĂ© en pertes de repĂšres.
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AgnĂšs Ledig (Juste avant le bonheur)
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J'aurais voulu lui dire que je me sentais comme abimĂ©. Que j'existais sans vivre vraiment. Que des fois j'Ă©tais vide et des je fois je bouillonnais a l’intĂ©rieur, que j'Ă©tais sous pression, prĂȘt a Ă©clater. Que je ressentais plusieurs choses a la fois, comment dire? Que ça grouillait de pensĂ©es dans mon cerveau. Qu'il y avait une sorte d'impatience, comme l'envie de passer Ă  autre chose, quelque chose qui serait bien bien mieux que maintenant, sans savoir ce qui allait mal ni ce qui serait mieux. Que j'avais peur de pas y arriver, peur de pas pouvoir tenir jusque lĂ . De ne jamais ĂȘtre assez fort pour survivre Ă  ça, et que quand je disais "ça", je ne savais mĂȘme pas de quoi je parlais. Que j'arrivais pas Ă  gĂ©rer tout ce qu'il y avait dans ma tĂȘte. Que j'avais toujours l'impression d'ĂȘtre en danger, un danger permanent, de tous les cotĂ©s oĂč je regardais, d'ĂȘtre sur le point de me noyer. Comme si Ă  l'intĂ©rieur de moi le niveau montait et que j'allais ĂȘtre submergĂ©. Mais j'ai pas pu lui dire. J'ai dĂ©gluti et j'ai dit ça va aller, merci. C'Ă©tait plus facile.
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Claire-Lise Marguier (Le faire ou mourir)
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Vous considĂ©rez les textes sacrĂ©s comme des contes, des Ă©popĂ©es grandioses. Plus vous Ă©tudiez, moins vous y croyez. Un autre clin d'Ɠil et vous avez vingt-quatre ans. Vous parcourez l'Europe en pensant - en espĂ©rant - que cette expĂ©rience vous stimulera, qu'avoir un aperçu du vaste monde rendra le vĂŽtre plus net. Ce sera le cas, au dĂ©but. Mais vous n'avez ni emploi ni avenir. Une fois terminĂ© l'intermĂšde, votre compte bancaire est vide et vous n'avez toujours rien trouvĂ©. Nouveau clin d’Ɠil. À vingt-six ans, vous ĂȘtes convoquĂ© dans le bureau du doyen de la facultĂ©. Voyant que vous n'avez plus le cƓur Ă  l'ouvrage, il vous conseille de changer de voie et vous assure que vous finirez par trouver votre vocation. Tout le problĂšme est lĂ  : vous n'avez jamais ressenti d'appel pour quoi que ce soit. Pas de poussĂ©e violente dans une direction prĂ©cise, mais une succession de lĂ©gers mouvements dans une multitude de directions qui, Ă  prĂ©sent, vous semblent toutes hors de portĂ©e. Au clin d’Ɠil suivant, vous avez vingt-huit ans. Alors que tous les autres ont dĂ©jĂ  bien avancĂ© sur la route, vous en ĂȘtes encore Ă  chercher votre chemin. L'ironie de la situation ne vous aura pas Ă©chappĂ© : en voulant vivre, apprendre et vous trouver, vous vous ĂȘtes perdu.
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Victoria Schwab (The Invisible Life of Addie LaRue)
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Je me trouvais en quelque lieu vague et trouble... Je dis « lieu » par habitude, car maintenant toute conception de distance et de durĂ©e Ă©tait abolie pour moi, et je ne puis dĂ©terminer combien de temps je restai en cet Ă©tat. Je n’entendais rien, ne voyais rien, je pensais seulement et avec force et persistance. Le grand problĂšme qui m’avait tourmentĂ© toute ma vie Ă©tait rĂ©solu : la mort n’existe pas, la vie est infinie. J’en Ă©tais convaincu bien avant ; mais jadis je ne pouvais formuler clairement ma conviction : elle se basait sur cette seule considĂ©ration que, astreinte Ă  des limites, la vie n’est qu’une formidable absurditĂ©. L’homme pense ; il perçoit ce qui l’entoure, il souffre, jouit et disparaĂźt ; son corps se dĂ©compose et fournit ses Ă©lĂ©ments Ă  des corps en formation : cela, chacun le peut constater journellement, mais que devient cette force apte Ă  se connaĂźtre soi-mĂȘme et Ă  connaĂźtre le monde qui l’entoure ? Si la matiĂšre est immortelle, pourquoi faudrait-il que la conscience se dissipĂąt sans traces, et, si elle disparaĂźt, d’oĂč venait-elle et quel est le but de cette apparition Ă©phĂ©mĂšre ? Il y avait lĂ  des contradictions que je ne pouvais admettre. Maintenant je sais, par ma propre expĂ©rience, que la conscience persiste, que je n’ai pas cessĂ© et probablement ne cesserai jamais de vivre. Voici que derechef m’obsĂšdent ces terribles questions : si je ne meurs pas, si je reviens toujours sur la terre, quel est le but de ces existences successives, Ă  quelles lois obĂ©issent-elles et quelle fin leur est assignĂ©e ? Il est probable que je pourrais discerner cette loi et la comprendre si je me rappelais mes existences passĂ©es, toutes, ou du moins quelques-unes ; mais pourquoi l’homme est-il justement privĂ© de ce souvenir ? pourquoi est-il condamnĂ© Ă  une ignorance Ă©ternelle, si bien que la conception de l’immortalitĂ© ne se prĂ©sente Ă  lui que comme une hypothĂšse, et si cette loi inconnue exige l’oubli et les tĂ©nĂšbres, pourquoi dans ces tĂ©nĂšbres, d’étranges lumiĂšres apparaissent-elles parfois, comme il m’est arrivĂ© quand je suis entrĂ© au chĂąteau de La Roche-Maudin ? De toute ma volontĂ©, je me cramponnais Ă  ce souvenir comme le noyĂ© Ă  une Ă©pave ; il me semblait que si je me rappelais clairement et exactement ma vie dans ce chĂąteau je comprendrais tout le reste. Maintenant qu’aucune sensation du dehors ne me distrayait, je m’abandonnais aux houles du souvenir, inerte et sans pensĂ©e pour ne pas gĂȘner leur mouvement, et tout Ă  coup, du fond de mon Ăąme comme des brumes d’un fleuve, commençaient Ă  s’élever de fugaces figures humaines ; des mots au sens effacĂ© rĂ©sonnaient, et dans tous ces souvenirs Ă©taient des lacunes... Les visages Ă©taient vaporeux, les paroles Ă©taient sans lien, tout Ă©tait dĂ©cousu......
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Aleksey Apukhtin (Entre la mort et la vie : suivi de Les Archives de la comtesse D*** & Le Journal de Pavlik Dolsky)
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Prenez garde, mon enfant, Ă  ce qui se passe dans votre cƓur, dit le curĂ© fronçant le sourcil : je vous fĂ©licite de votre vocation, si c'est Ă  elle seule que vous devez le mĂ©pris d'une fortune plus que suffisante. Il y a cinquante-six ans sonnĂ©s que je suis curĂ© de VerriĂšres, et cependant, suivant toute apparence, je vais ĂȘtre destituĂ©. Ceci m'afflige, et toutefois j'ai huit cents livres de rente. Je vous fais part de ce dĂ©tail afin que vous ne vous fassiez pas d'illusions sur ce qui vous attend dans l'Ă©tat de prĂȘtre. Si vous songez Ă  faire la cour aux hommes qui ont la puissance, votre perte Ă©ternelle est assurĂ©e. Vous pourrez faire fortune, mais il faudra nuire aux misĂ©rables, flatter le sous-prĂ©fet, le maire, l'homme considĂ©rĂ©, et servir ses passions : cette conduite, qui dans le monde s'appelle savoir-vivre, peut, pour un laĂŻque, n'ĂȘtre pas absolument incompatible avec le salut ; mais, dans notre Ă©tat, il faut opter ; il s'agit de faire fortune dans ce monde ou dans l'autre, il n'y a pas de milieu. Allez, mon cher ami, rĂ©flĂ©chissez, et revenez dans trois jours me rendre une rĂ©ponse dĂ©finitive. J'entrevois avec peine, au fond de votre caractĂšre, une ardeur sombre qui ne m'annonce pas la modĂ©ration et la parfaite abnĂ©gation des avantages terrestres nĂ©cessaires Ă  un prĂȘtre ; j'augure bien de votre esprit ; mais, permettez-moi de vous le dire, ajouta le bon curĂ©, les larmes aux yeux, dans l'Ă©tat de prĂȘtre, je tremble pour votre salut.
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Stendhal (The Red and the Black)
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Rien, jamais, en effet, ne remplacera le compagnon perdu. On ne se crĂ©e point de vieux camarades. Rien ne vaut le trĂ©sor de tant de souvenirs communs, de tant de mauvaises heures vĂ©cues ensemble, de tant de brouilles, de rĂ©conciliations, de mouvements du cƓur. On ne reconstruit pas ces amitiĂ©s-lĂ . Il est vain, si l’on plante un chĂȘne, d’espĂ©rer s’abriter bientĂŽt sous son feuillage. Ainsi va la vie. Nous nous sommes enrichis d’abord, nous avons plantĂ© pendant des annĂ©es, mais viennent les annĂ©es oĂč le temps dĂ©fait ce travail et dĂ©boise. Les camarades, un Ă  un, nous retirent leur ombre. Et Ă  nos deuils se mĂȘle dĂ©sormais le regret secret de vieillir. Telle est la morale que Mermoz et d’autres nous ont enseignĂ©e. La grandeur d’un mĂ©tier est, peut-ĂȘtre, avant tout, d’unir des hommes : il n’est qu’un luxe vĂ©ritable, et c’est celui des relations humaines. En travaillant pour les seuls biens matĂ©riels, nous bĂątissons nous-mĂȘmes notre prison. Nous nous enfermons solitaires, avec notre monnaie de cendre qui procure rien qui vaille de vivre. Si je cherche dans mes souvenirs ceux qui m’ont laissĂ© un goĂ»t durable, si je fais le bilan des heures qui ont comptĂ©, Ă  coup sĂ»r je retrouve celles que nulle fortune ne m’eĂ»t procurĂ©es. On n’achĂšte pas l’amitiĂ© d’un Mermoz, d’un compagnon que les Ă©preuves vĂ©cues ensemble ont liĂ© Ă  nous pour toujours. Cette nuit de vol et ses cent mille Ă©toiles, cette sĂ©rĂ©nitĂ©, cette souverainetĂ© de quelques heures, l’argent ne les achĂšte pas. p35-p36
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Antoine de Saint-Exupéry (Tierra de los hombres)
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On atteint [l'Ă©quanimitĂ©] lorsqu'on est capable d'accueillir le bon comme le moins bon avec la mĂȘme acceptation, la mĂȘme Ă©coute. En fait, ce n'est mĂȘme pas le bon et le moins bon, puisqu'il y a accueil de ce qui est sans jugement. Outre que cela nous permet d'explorer de nouvelle associations en cuisine, de libĂ©rer notre crĂ©ativitĂ© et de dĂ©couvrir de nouveaux plats, l'Ă©quanimitĂ© est un stade de sagesse qui permet de vivre vraiment mieux ! Vous connaissez peut-ĂȘtre dĂ©jĂ  cette histoire de l'homme et de son cheval, [
]. L'homme, donc, possĂšde un cheval
 lequel un jour se sauve. Les voisins viennent et plaignent notre homme qui rĂ©pond avec bonhomie : "De la malchance ? Je ne sais pas." Quelques jours plus tard, le cheval revient accompagnĂ© d'une horde d'Ă©quidĂ©s sauvages. Les voisins se prĂ©cipitent : "Quelle chance !" À quoi le vieil homme rĂ©torque : "De la chance ? Je ne sais pas." Le fils de l'homme tente de dompter et de monter ces chevaux. Il se casse la jambe. Les voisins arrivent et y vont de leurs commentaires sur la malchance qui survient, Ă  quoi l'homme rĂ©pond : "De la malchance ? Je ne sais pas." Le lendemain, des affiches placardĂ©es sur les murs annoncent la guerre et l'appel de tous les jeunes gens sous les drapeaux. Le fils ayant la jambe cassĂ©e est bien sĂ»r exempté  Bref, gardons-nous de juger les Ă©vĂ©nements comme bons ou mauvais. Les choses ne sont ni bien ni mal, elles ont des consĂ©quences. Ce n'est pas "mal" de mettre des meringues Ă  230°C dans le four, elles seront brĂ»lĂ©es. C'est tout. (p.33-34)
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Isabelle Filliozat (Un zeste de conscience dans la cuisine)
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TOUZENBACH Si vous voulez. De quoi parlerons-nous ? VERCHININE De quoi ? RĂȘvons ensemble... par exemple de la vie telle qu’elle sera aprĂšs nous, dans deux ou trois cents ans. TOUZENBACH Eh bien, aprĂšs nous on s’envolera en ballon, on changera la coupe des vestons, on dĂ©couvrira peut-ĂȘtre un sixiĂšme sens, qu’on dĂ©veloppera, mais la vie restera la mĂȘme, un vie difficile, pleine de mystĂšre, et heureuse. Et dans mille ans, l’homme soupirera comme aujourd’hui : « Ah ! qu’il est difficile de vivre ! » Et il aura toujours peur de la mort et ne voudra pas mourir. VERCHININE, aprĂšs avoir rĂ©flĂ©chi. Comment vous expliquer ? Il me semble que tout va se transformer peu Ă  peu, que le changement s’accomplit dĂ©jĂ , sous nos yeux. Dans deux ou trois cents ans, dans mille ans peut-ĂȘtre, peu importe le dĂ©lai, s’établira une vie nouvelle, heureuse. Bien sĂ»r, nous ne serons plus lĂ , mais c’est pour cela que nous vivons, travaillons, souffrons enfin, c’est nous qui la crĂ©ons, c’est mĂȘme le seul but de notre existence, et si vous voulez, de notre bonheur. Macha rit doucement. TOUZENBACH Pourquoi riez-vous ? MACHA Je ne sais pas. Je ris depuis ce matin. VERCHININE J’ai fait les mĂȘmes Ă©tudes que vous, je n’ai pas Ă©tĂ© Ă  l’AcadĂ©mie militaire. Je lis beaucoup, mais je ne sais pas choisir mes lectures, peut-ĂȘtre devrais-je lire tout autre chose ; et cependant, plus je vis, plus j’ai envie de savoir. Mes cheveux blanchissent, bientĂŽt je serai vieux, et je ne sais que peu, oh ! trĂšs peu de chose. Pourtant, il me semble que je sais l’essentiel, et que je le sais avec certitude. Comme je voudrais vous prouver qu’il n’y a pas, qu’il ne doit pas y avoir de bonheur pour nous, que nous ne le connaĂźtrons jamais... Pour nous, il n’y a que le travail, rien que le travail, le bonheur, il sera pour nos lointains descendants. (Un temps.) Le bonheur n’est pas pour moi, mais pour les enfants de mes enfants. TOUZENBACH Alors, d’aprĂšs vous, il ne faut mĂȘme pas rĂȘver au bonheur ? Mais si je suis heureux ? VERCHININE Non. TOUZENBACH, joignant les mains et riant. Visiblement, nous ne nous comprenons pas. Comment vous convaincre ? (Macha rit doucement. Il lui montre son index.) Eh bien, riez ! (À Verchinine :) Non seulement dans deux ou trois cents ans, mais dans un million d’annĂ©es, la vie sera encore la mĂȘme ; elle ne change pas, elle est immuable, conforme Ă  ses propres lois, qui ne nous concernent pas, ou dont nous ne saurons jamais rien. Les oiseaux migrateurs, les cigognes, par exemple, doivent voler, et quelles que soient les pensĂ©es, sublimes ou insignifiantes, qui leur passent par la tĂȘte, elles volent sans relĂąche, sans savoir pourquoi, ni oĂč elles vont. Elles volent et voleront, quels que soient les philosophes qu’il pourrait y avoir parmi elles ; elles peuvent toujours philosopher, si ça les amuse, pourvu qu’elles volent... MACHA Tout de mĂȘme, quel est le sens de tout cela ? TOUZENBACH Le sens... VoilĂ , il neige. OĂč est le sens ? MACHA Il me semble que l’homme doit avoir une foi, du moins en chercher une, sinon sa vie est complĂštement vide... Vivre et ignorer pourquoi les cigognes volent, pourquoi les enfants naissent, pourquoi il y a des Ă©toiles au ciel... Il faut savoir pourquoi l’on vit, ou alors tout n’est que balivernes et foutaises. Comme dit Gogol : « Il est ennuyeux de vivre en ce monde, messieurs. »
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Anton Chekhov (The Three Sisters)
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En admettant que l’on ait compris ce qu’il y a de sacrilĂšge dans un pareil soulĂšvement contre la vie, tel qu’il est devenu presque sacro-saint dans la morale chrĂ©tienne, on aura, par cela mĂȘme et heureusement, compris autre chose encore : ce qu’il y a d’inutile, de factice, d’absurde, de mensonger dans un pareil soulĂšvement. Une condamnation de la vie de la part du vivant n’est finalement que le symptĂŽme d’une espĂšce de vie dĂ©terminĂ©e : sans qu’on se demande en aucune façon si c’est Ă  tort ou Ă  raison. Il faudrait prendre position en dehors de la vie et la connaĂźtre d’autre part tout aussi bien que quelqu’un qui l’a traversĂ©e, que plusieurs et mĂȘme tous ceux qui y ont passĂ©, pour ne pouvoir que toucher au problĂšme de la valeur de la vie : ce sont lĂ  des raisons suffisantes pour comprendre que ce problĂšme est en dehors de notre portĂ©e. Si nous parlons de la valeur, nous parlons sous l’inspiration, sous l’optique de la vie : la vie elle-mĂȘme nous force Ă  dĂ©terminer des valeurs, la vie elle-mĂȘme Ă©volue par notre entremise lorsque nous dĂ©terminons des valeurs
 Il s’ensuit que toute morale contre nature qui considĂšre Dieu comme l’idĂ©e contraire, comme la condamnation de la vie, n’est en rĂ©alitĂ© qu’une Ă©valuation de vie, — de quelle vie ? de quelle espĂšce de vie ? Mais j’ai dĂ©jĂ  donnĂ© ma rĂ©ponse : de la vie descendante, affaiblie, fatiguĂ©e, condamnĂ©e. La morale, telle qu’on l’a entendue jusqu’à maintenant — telle qu’elle a Ă©tĂ© formulĂ©e en dernier lieu par Schopenhauer, comme « nĂ©gation de la volontĂ© de vivre » — cette morale est l’instinct de dĂ©cadence mĂȘme, qui se transforme en impĂ©ratif : elle dit : « va Ă  ta perte ! » — elle est le jugement de ceux qui sont dĂ©jĂ  jugĂ©s

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Friedrich Nietzsche (Twilight of the Idols)
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26 octobre. Oui, mon cher Wilhelm, je me persuade chaque jour davantage que l’existence d’une crĂ©ature est peu de chose, bien peu de chose. Une amie de Charlotte Ă©tait venue la voir, et je passai dans la chambre voisine pour prendre un livre, et je ne pouvais lire : alors je pris une plume pour essayer d’écrire. Je les entendais causer doucement : elles se racontaient l’une Ă  l’autre des choses indiffĂ©rentes, des nouvelles de la ville ; que l’une se mariait, que l’autre Ă©tait malade, trĂšs-malade ; elle avait une toux sĂšche, la figure dĂ©charnĂ©e ; il lui prenait des faiblesses. « Je ne donnerais pas un sou de sa vie, » disait l’une. « N. N. est aussi fort mal, » dit Charlotte. « II est enflĂ©, » reprit l’amie Et mon imagination me transportait vivement au chevet de ces malheureux ; je voyais avec quelle rĂ©pugnance ils tournaient le dos Ă  la vie ; avec quel
. Wilhelm, et mes deux petites dames parlaient de cela prĂ©cisĂ©ment comme on parle d’un Ă©tranger qui meurt
. Et quand je porte les yeux autour de moi, quand je regarde cette chambre et, tout alentour, les habits de.Charlotte et les papiers d’Albert, et ces meubles auxquels je suis maintenant si accoutumĂ©, mĂȘme cet encrier, je me dis : « Vois ce que tu es’pour cette maison ! Tout pour tous. Tes amis te considĂšrent ; tu fais souvent leur joie, et il semble Ă  ton cƓur, qu’il ne pourrait vivre sans eux ; et pourtant
, si tu venais Ă  mourir, si tu disparaissais de ce cercle, sentiraient-ils, combien de temps sentiraient-ils, le vide que ta perte ferait dans leur existence ? combien de temps ?
 » Ah ! l’homme est si Ă©phĂ©mĂšre, qu’aux lieux mĂȘmes oĂč il a l’entiĂšre certitude de son ĂȘtre, oĂč il grave la seule vĂ©ritable impression de sa prĂ©sence dans le souvenir, dans l’ñme de ses amis, lĂ  mĂȘme, il doit s’effacer, disparaĂźtre, disparaĂźtre promptement !
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Johann Wolfgang von Goethe (The Sorrows of Young Werther)
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_ Pourquoi sont-ils si mĂ©prisants ? demanda ChloĂ©. Ce n'est pas tellement bien de travailler... _ On leur a dit que c’était bien, dit Colin. En gĂ©nĂ©ral, on trouve ça bien. En fait, personne ne le pense. On le fait par habitude et pour ne pas y penser, justement. _ En tout cas, c'est idiot de faire un travail que des machines pourraient faire. _ Il faut construire des machines, dit Colin. Qui le fera? _ Oh! Evidemment, dit ChloĂ©. Pour faire un Ɠuf, il faut une poule, mais, une fois qu'on a la poule, on peut avoir des tas d’Ɠufs. Il vaut donc mieux commencer par la poule. _ Il faudrait savoir, dit Colin, qui empĂȘche de faire des machines. C'est le temps qui doit manquer. Les gens perdent leur temps Ă  vivre, alors, il ne leur en reste plus pour travailler. _ Ce n'est pas plutĂŽt le contraire? dit ChloĂ©. _ Non, dit Colin. S'ils avaient le temps de construire les machines, aprĂšs ils n'auraient plus besoin de rien faire. Ce que je veux dire c'est qu'ils travaillent pour vivre au lieu de travailler Ă  construire des machines qui les feraient vivre sans travailler. _ C'est compliquĂ©, estima ChloĂ©. _ Non, dit Colin. C'est trĂšs simple. Ça devrait, bien entendu, venir progressivement. Mais, on perd tellement de temps Ă  faire des choses qui s'usent... - Mais, tu crois qu'ils n'aimeraient pas mieux rester chez eux et embrasser leur femme et aller Ă  la piscine et aux divertissements? - Non, dit Colin. Parce qu'ils n'y pensent pas. - Mais est-ce que c'est leur faute si ils croient que c'est bien de travailler? - Non, dit Colin, ce n'est pas leur faute. C'est parce qu'on leur a dit : « Le travail, c'est sacrĂ©, c'est bien, c'est beau, c'est ce qui compte avant tout, et seuls les travailleurs ont droit Ă  tout. » Seulement, on s'arrange pour les faire travailler tout le temps et alors ils ne peuvent pas en profiter. _ Mais, alors, ils sont bĂȘtes? dit ChloĂ©. _ Oui, ils sont bĂȘtes, dit Colin. C'est pour ça qu'ils sont d'accord avec ceux qui leur font croire que le travail c'est ce qu'il y a de mieux. Ça leur Ă©vite de rĂ©flĂ©chir et de chercher Ă  progresser et Ă  ne plus travailler.
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Boris Vian (L'écume des jours)
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Quand elle Ă©tait petite, elle voulait m’épouser. J’étais son prince charmant. AnnĂ©e aprĂšs annĂ©e, j’avais bien vu dans son regard que le mythe s’était Ă©parpillĂ© dans les affres de la rĂ©alitĂ©. J’étais tombĂ© de mon piĂ©destal et, si je ne cherchais pas Ă  mentir sur qui j’étais, j’avais toujours eu envie qu’elle me voie au meilleur de ma forme. Au fond, je pouvais dire que nous n’avions jamais rĂ©ellement eu une relation saine. La preuve : cette incapacitĂ© physique d’aller voir son appartement, ce lieu oĂč elle vivait en femme. Il faudrait des siĂšcles pour admettre que nos enfants sont devenus adultes. On dit souvent qu’il est difficile de vieillir ; moi, je pourrais vieillir indĂ©finiment du moment que mes enfants, eux, ne grandiraient pas. Je ne sais pas pourquoi j’éprouvais tant de difficultĂ©s Ă  vivre cette transition que tout parent connaĂźt. Je n’avais pas l’impression qu’autour de moi les gens avaient les mĂȘmes. Pire, j’entendais des parents soulagĂ©s du dĂ©part de leurs enfants. Enfin, ils allaient retrouver la libertĂ©, disaient-ils. Il y avait ce film oĂč le garçon, Tanguy, s’éternisait chez ses parents, prolongeant sans cesse ses Ă©tudes. Le mien Ă©tait parti Ă  l’autre bout du monde dĂšs ses dix-huit ans. C’est toujours comme ça : ceux qui veulent se dĂ©barrasser de leurs enfants hĂ©ritent de boulets, tandis que ceux qui veulent couver Ă  loisir leur progĂ©niture se retrouvent avec des prĂ©coces de l’autonomie. Mon fils me manquait atrocement. Et je ne supportais plus d’échanger avec lui des messages par Skype, ou par e-mails. D’ailleurs, ces messages et ces moments virtuels Ă©taient de plus en plus courts. Nous n’avions rien Ă  nous dire. L’amour entre un parent et un enfant n’est pas dans les mots, pas dans la discussion. Ce que j’aimais, c’était simplement que mon fils soit lĂ , Ă  la maison. On pouvait ne pas se parler de la journĂ©e, ce n’était pas grave, je sentais sa prĂ©sence, ça me suffisait. Étais-je si tordu ? Je ne sais pas. Je ne peux qu’essayer de mettre des mots sur mes sentiments. Et je peux affirmer maintenant ce que je sais depuis le dĂ©but : je vis mal la sĂ©paration avec mes enfants. Elle me paraĂźt normale, justifiĂ©e, humaine, biologique, tout ce que vous voulez, pourtant elle me fait mal.
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David Foenkinos (Je vais mieux)
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Porteurs Notre monde repose sur les Ă©paules de l'autre. Sur des enfants au travail, sur des plantations et des matiĂšres premiĂšres payĂ©es bon marchĂ© : des Ă©paules d'inconnus portent notre poids, obĂšse de disproportion de richesses. Je l'ai vu. Dans les ascensions qui durent bien des jours vers les camps de base des hautes altitudes, des hommes et aussi des femmes et des enfants portent notre poids dans des hottes tressĂ©es. Tables, chaises, vaisselle, tentes, cuisiniĂšres, combustibles cordes, matĂ©riel d'escalade, nourriture pour plusieurs semaines, en somme un village pour vivre lĂ  oĂč il n'y a rien. Ils portent notre poids pour le prix moyen de trois cents roupies nĂ©palaises par jour, moins de quatre euros. Les hottes pĂšsent quarante kilos, mais certains en portent de plus lourdes. Les Ă©tapes sont longues, elles fatiguent le voyageur avec son petit sac Ă  dos et le minimum nĂ©cessaire. Des porteurs de tout notre confort marchent avec des tongs ou bien pieds nus sur des pentes qui manquent d'oxygĂšne, la tempĂ©rature baissant. La nuit, ils campent en plein air autour d'un feu, ils font cuire du riz et des lĂ©gumes cueillis dans les parages, tant que quelque chose sort de terre. Au NĂ©pal, la vĂ©gĂ©tation monte jusqu'Ă  trois mille cinq cents mĂštres. Nous autres, nous dormons dans une tente avec un repas chaud cuisinĂ© par eux. Ils portent notre poids et ne perdent pas un gramme. Il ne manque pas un mouchoir au bagage remis en fin d'Ă©tape. Ils ne sont pas plus faits pour l'altitude que nous, la nuit je les entends tousser. Ce sont souvent des paysans des basses vallĂ©es de riziĂšres. Nous avançons pĂ©niblement en silence, eux ne renoncent pas Ă  se parler, Ă  raconter, tout en marchant. Nous habillĂ©s de couches de technologie lĂ©gĂšre, aĂ©rĂ©e, chaude, coupe-vent, et cetera, eux avec des vĂȘtements usĂ©s, des pulls en laine archiĂ©limĂ©s : ils portent notre poids et sourient cent plus que le plus extraverti de nos joyeux compĂšres. Ils nous prĂ©parent des pĂątes avec l'eau de la neige, ils nous ont mĂȘme apportĂ© des oeufs ici, Ă  cinq mille mĂštres. Sans eux, nous ne serions ni agiles, ni athlĂ©tiques, ni riches. Ils disparaissent en fin de transport, ils se dispersent dans les vallĂ©es, juste Ă  temps pour le travail du riz et de l'orge. (p. 11-12)
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Erri De Luca (Sulla traccia di Nives)
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Il est tragique que si peu de gens « possĂšdent leur Ăąme » avant de mourir. « Rien n’est plus rare pour un homme, dit Emerson, que de commettre un acte bien Ă  lui. » C’est parfaitement vrai. La plupart des gens ne sont pas eux-mĂȘmes. Leurs pensĂ©es sont les opinions des autres, leur vie une imitation, leurs passions une citation. Le Christ fut non seulement l’individualiste suprĂȘme, mais le premier individualiste de l’histoire. Certains ont tentĂ© d’en faire un philanthrope ordinaire semblable aux horribles philanthropes du XIXe siĂšcle ou l’ont classĂ© comme altruiste parmi les incultes et les sentimentaux. Mais il n’était vraiment ni l’un ni l’autre. Naturellement, les pauvres, ceux qui sont enfermĂ©s dans des prisons, les humbles, les misĂ©rables, lui inspiraient de la pitiĂ© ; mais il Ă©prouvait une pitiĂ© plus grande encore pour les possĂ©dants, pour les hĂ©donistes au cƓur dur, pour ceux qui perdent leur libertĂ© Ă  devenir les esclaves de leurs possessions, pour ceux qui sont richement vĂȘtus et vivent dans des palais. La fortune et le plaisir lui paraissaient ĂȘtre de plus grandes tragĂ©dies que la pauvretĂ© et la douleur. Quant Ă  l’altruisme, qui mieux que lui savait que c’est la vocation, et non la volontĂ©, qui nous dĂ©termine et que l’on ne peut cueillir des raisins sur des ronces ou des figues sur des chardons ? Vivre pour les autres n’était pas son but conscient et dĂ©fini, ce n’était pas sa croyance. Lorsqu’il dit : « Pardonnez Ă  vos ennemis », ce n’est pas pour l’amour de l’ennemi, mais pour l’amour de soi et parce que l’amour est plus beau que la haine. Lorsqu’il adjure ainsi le jeune homme qu’il veut sauver : « Vends tout ce que tu possĂšdes et donne-le aux pauvres », ce n’est pas Ă  la condition des pauvres qu’il pense, mais Ă  l’ñme du jeune homme, cette Ăąme que gĂąte la richesse. Dans sa conception de la vie, il s’identifie Ă  l’artiste qui sait que, par l’inĂ©vitable loi de la perfection de soi, le poĂšte doit chanter, le sculpteur penser en bronze et le peintre faire du monde le miroir de ses impressions, aussi inĂ©vitablement que l’aubĂ©pine doit fleurir au printemps, que le blĂ© doit dorer ses Ă©pis au temps de la moisson et que la lune, dans ses inĂ©luctables phases, doit se mĂ©tamorphoser de bouclier en faucille et de faucille en bouclier.
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Oscar Wilde (De Profundis)
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Adieu, vous que j'aimais. Ce n'est point ma faute si le corps humain ne peut rĂ©sister trois jours sans boire. Je ne me croyais pas prisonnier ainsi des fontaines. Je ne soupçonnais pas une aussi courte autonomie. On croit que l'homme peut s'en aller droit devant soi. On croit que l'homme est libre. On ne voit pas la corde qui le rattache au puits, qui le rattache, comme un cordon ombilical, au ventre de la terre. S'il fait un pas de plus, il meurt. À part votre souffrance, je ne regrette rien. Tout compte fait, j'ai eu la meilleure part. Si je rentrais, je recommencerais. J'ai besoin de vivre. Dans les villes, il n'y a plus de vie humaine. Il ne s'agit point ici d'aviation. L'avion, ce n'est pas une fin, c'est un moyen. Ce n'est pas pour l'avion que l'on risque sa vie. Ce n'est pas non plus pour sa charrue que le paysan laboure. Mais, par l'avion, on quitte les villes et leurs comptables, et l'on retrouve une vĂ©ritĂ© paysanne. On fait un travail d'homme et l'on connaĂźt des soucis d'homme. On est en contact avec le vent, avec les Ă©toiles, avec la nuit, avec le sable, avec la mer. On ruse avec les forces naturelles. On attend l'aube comme le jardinier attend le printemps. On attend l'escale comme une Terre promise, et l'on cherche sa vĂ©ritĂ© dans les Ă©toiles. Je ne me plaindrai pas. Depuis trois jours, j'ai marchĂ©, j'ai eu soif, j'ai suivi des pistes dans le sable, j'ai fait de la rosĂ©e mon espĂ©rance. J'ai cherchĂ© Ă  joindre mon espĂšce, dont j'avais oubliĂ© oĂč elle logeait sur la terre. Et ce sont lĂ  des soucis de vivants. Je ne puis pas ne pas les juger plus importants que le choix, le soir, d'un music-hall. Je ne comprends plus ces populations des trains de banlieue, ces hommes qui se croient des hommes, et qui cependant sont rĂ©duits, par une pression qu'ils ne sentent pas, comme les fourmis, Ă  l'usage qui en est fait. De quoi remplissent-ils, quand ils sont libres, leurs absurdes petits dimanches ? Une fois, en Russie, j'ai entendu jouer du Mozart dans une usine. Je l'ai Ă©crit. J'ai reçu deux cents lettres d'injures. Je n'en veux pas Ă  ceux qui prĂ©fĂšrent le beuglant. Ils ne connaissent point d'autre chant. J'en veux au tenancier du beuglant. Je n'aime pas que l'on abĂźme les hommes. Moi je suis heureux dans mon mĂ©tier. Je me sens paysan des escales. Dans le train de banlieue, je sens mon agonie bien autrement qu'ici ! Ici, tout compte fait, quel luxe !... Je ne regrette rien. J'ai jouĂ©, j'ai perdu. C'est dans l'ordre de mon mĂ©tier. Mais, tout de mĂȘme, je l'ai respirĂ©, le vent de la mer. Ceux qui l'ont goĂ»tĂ© une fois n'oublient pas cette nourriture. N'est-ce pas, mes camarades ? Et il ne s'agit pas de vivre dangereusement. Cette formule est prĂ©tentieuse. Les torĂ©adors ne me plaisent guĂšre. Ce n'est pas le danger que j'aime. Je sais ce que j'aime. C'est la vie.
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Antoine de Saint-Exupéry (Wind, Sand and Stars)
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moi je suis fĂąchĂ© contre notre cercle patriarcal parce qu’il y vient toujours un homme du type le plus insupportable. Vous tous, messieurs, le connaissez trĂšs bien. Son nom est LĂ©gion. C’est un homme qui a bon coeur, et n’a rien qu’un bon coeur. Comme si c’était une chose rare Ă  notre Ă©poque d’avoir bon coeur ; comme si, enfin, on avait besoin d’avoir bon coeur ; cet Ă©ternel bon coeur ! L’homme douĂ© d’une si belle qualitĂ© a l’air, dans la vie, tout Ă  fait sĂ»r que son bon coeur lui suffira pour ĂȘtre toujours content et heureux. Il est si sĂ»r du succĂšs qu’il nĂ©glige tout autre moyen en venant au monde. Par exemple, il ne connaĂźt ni mesure ni retenue. Tout, chez lui, est dĂ©bordant, Ă  coeur ouvert. Cet homme est enclin Ă  vous aimer soudain, Ă  se lier d’amitiĂ©, et il est convaincu qu’aussitĂŽt, rĂ©ciproquement, tous l’aimeront, par ce seul fait qu’il s’est mis Ă  aimer tout le monde. Son bon coeur n’a mĂȘme jamais pensĂ© que c’est peu d’aimer chaudement, qu’il faut possĂ©der l’art de se faire aimer, sans quoi tout est perdu, sans quoi la vie n’est pas la vie, ni pour son coeur aimant ni pour le malheureux que, naĂŻvement, il a choisi comme objet de son attachement profond. Si cet homme se procure un ami, aussitĂŽt celui-ci se transforme pour lui en un meuble d’usage, quelque chose comme un crachoir. Tout ce qu’il a dans le coeur, n’importe quelle saletĂ©, comme dit Gogol, tout s’envole de la langue et tombe dans le coeur de l’ami. L’ami est obligĂ© de tout Ă©couter et de compatir Ă  tout. Si ce monsieur est trompĂ© par sa maĂźtresse, ou s’il perd aux cartes, aussitĂŽt, comme un ours, il fond, sans y ĂȘtre invitĂ©, sur l’ñme de l’ami et y dĂ©verse tous ses soucis. Souvent il ne remarque mĂȘme pas que l’ami lui-mĂȘme a des chagrins par-dessus la tĂȘte : ou ses enfants sont morts, ou un malheur est arrivĂ© Ă  sa femme, ou il est excĂ©dĂ© par ce monsieur au coeur aimant. Enfin on lui fait dĂ©licatement sentir que le temps est splendide et qu’il faut en profiter pour une promenade solitaire. Si cet homme aime une femme, il l’offensera mille fois par son caractĂšre avant que son coeur aimant le remarque, avant de remarquer (si toutefois il en est capable) que cette femme s’étiole de son amour, qu’elle est dĂ©goĂ»tĂ©e d’ĂȘtre avec lui, qu’il empoisonne toute son existence. Oui, c’est seulement dans l’isolement, dans un coin, et surtout dans un groupe que se forme cette belle oeuvre de la nature, ce « spĂ©cimen de notre matiĂšre brute », comme disent les AmĂ©ricains, en qui il n’y a pas une goutte d’art, en qui tout est naturel. Un homme pareil oublie – il ne soupçonne mĂȘme pas –, dans son inconscience totale, que la vie est un art, que vivre c’est faire oeuvre d’art par soi-mĂȘme ; que ce n’est que dans le lien des intĂ©rĂȘts, dans la sympathie pour toute la sociĂ©tĂ© et ses exigences directes, et non dans l’indiffĂ©rence destructrice de la sociĂ©tĂ©, non dans l’isolement, que son capital, son trĂ©sor, son bon coeur, peut se transformer en un vrai diamant taillĂ©.
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Fyodor Dostoevsky
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J’ai fait ma visite au lieu natal avec toute la piĂ©tĂ© d’un pĂšlerin, et bien des sentiments inattendus m’ont saisi. Je fis arrĂȘter prĂšs du grand tilleul qui se trouve Ă  un quart de lieue de la ville du cĂŽtĂ© de S
 ; je quittai la voiture, et je l’envoyai en avant, afin de cheminer Ă  pied et de savourer Ă  mon grĂ© chaque souvenir, dans toute sa vie et sa nouveautĂ©. Je m’arrĂȘtai sous le tilleul, qui avait Ă©tĂ©, dans mon enfance, le but et le terme de mes promenades. Quelle diffĂ©rence ! Alors, dans une heureuse ignorance, je m’élançais avec ardeur vers ce monde inconnu, oĂč j’espĂ©rais pour mon cƓur tant de nourriture, tant de jouissances, qui devaient combler et satisfaire l’ardeur de mes dĂ©sirs. Maintenant, j’en reviens de ce vaste monde
. O mon ami, avec combien d’espĂ©rances déçues, avec combien de plans renversĂ©s !
 Les voilĂ  devant moi les montagnes qui mille fois avaient Ă©tĂ© l’objet de mes vƓux. Je pouvais rester des heures assis Ă  cette place, aspirant Ă  franchir ces hauteurs, Ă©garant ma pensĂ©e au sein des bois et des vallons, qui s’offraient Ă  mes yeux dans un gracieux crĂ©puscule, et, lorsqu’au moment fixĂ© il me fallait revenir, avec quel regret ne quittais-je pas cette place chĂ©rie !
 J’approchai de la ville : je saluai tous les anciens pavillons de jardin ; les nouveaux me dĂ©plurent, comme tous les changements qu’on avait faits. Je franchis la porte de la ville, et d’abord je me retrouvai tout Ă  fait. Mon ami, je ne veux pas m’arrĂȘter au dĂ©tail : autant il eut de charme pour moi, autant il serait monotone dans le rĂ©cit. J’avais rĂ©solu de me loger sur la place, tout Ă  cĂŽtĂ© de notre ancienne maison. Je remarquai, sur mon passage, que la chambre d’école, oĂč une bonne vieille femme avait parquĂ© notre enfance, s’était transformĂ©e en une boutique de dĂ©tail. Je me rappelai l’inquiĂ©tude, les chagrins, l’étourdissement, l’angoisse que j’avais endurĂ©s dans ce trou
. Je ne pouvais faire un pas qui ne m’offrĂźt quelque chose de remarquable. Un pĂšlerin ne trouve pas en terre sainte autant de places consacrĂ©es par de religieux souvenirs, et je doute que son ame soit aussi remplie de saintes Ă©motions
. Encore un exemple sur mille : je descendis le long de la riviĂšre, jusqu’à une certaine mĂ©tairie. C’était aussi mon chemin autrefois, et la petite place oĂč les enfants s’exerçaient Ă  qui ferait le plus souvent rebondir les pierres plates Ă  la surface de l’eau. Je me rappelai vivement comme je m’arrĂȘtais quelquefois Ă  suivre des yeux le cours de la riviĂšre ; avec quelles merveilleuses conjectures je l’accompagnais ; quelles Ă©tranges peintures je me faisais des contrĂ©es oĂč elle allait courir ; comme je trouvais bientĂŽt les bornes de mon imagination, et pourtant me sentais entraĂźnĂ© plus loin, toujours plus loin, et finissais par me perdre dans la contemplation d’un vague lointain
. Mon ami, aussi bornĂ©s, aussi heureux, Ă©taient les vĂ©nĂ©rables pĂšres du genre humain ; aussi enfantines, leurs impressions, leur poĂ©sie. Quand Ulysse parle de la mer immense et de la terre infinie, cela est vrai, humain, intime, saisissant et mystĂ©rieux. Que me sert maintenant de pouvoir rĂ©pĂ©ter, avec tous les Ă©coliers, qu’elle est ronde ? Il n’en faut Ă  l’homme que quelques mottes pour vivre heureux dessus, et moins encore pour dormir dessous

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Johann Wolfgang von Goethe (The Sorrows of Young Werther)
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J’ai remarquĂ© souvent que quand deux amis pĂ©tersbourgeois se rencontrent quelque part, aprĂšs s’ĂȘtre saluĂ©s, ils demandent en mĂȘme temps : Quoi de neuf ? il y a une tristesse particuliĂšre dans leurs voix, quelle qu’ait Ă©tĂ© l’intonation initiale de leur conversation. En effet, une dĂ©sespĂ©rance totale est liĂ©e Ă  cette question Ă  PĂ©tersbourg. Mais le plus agaçant c’est que, trĂšs souvent, l’homme qui la pose est tout Ă  fait indiffĂ©rent, un PĂ©tersbourgeois de naissance, qui connaĂźt trĂšs bien la coutume, sait d’avance qu’on ne lui rĂ©pondra rien, qu’il n’y a rien de nouveau, qu’il a posĂ© cette question peut-ĂȘtre mille fois sans aucun succĂšs ; cependant, il la pose, et il a l’air de s’y intĂ©resser, comme si les convenances l’obligeaient de participer lui aussi Ă  la vie publique, d’avoir des intĂ©rĂȘts publics. Mais les intĂ©rĂȘts publics... C’est-Ă -dire nous ne nions pas que nous ayons des intĂ©rĂȘts publics ; nous tous aimons ardemment la patrie, nous aimons notre cher PĂ©tersbourg, nous aimons jouer si l’occasion se prĂ©sente. En un mot il y a beaucoup d’intĂ©rĂȘts publics. Mais ce qu’il y a surtout chez nous, ce sont les groupes. On sait que PĂ©tersbourg n’est que la rĂ©union d’un nombre considĂ©rable de petits groupes dont chacun a ses statuts, ses conventions, ses lois, sa logique et son oracle. C’est en quelque sorte le produit de notre caractĂšre national qui a encore peur de la vie publique et tient plutĂŽt au foyer. En outre, la vie publique exige un certain art ; il faut s’y prĂ©parer ; il faut beaucoup de conditions. Aussi, l’on prĂ©fĂšre la maison. LĂ , tout est plus simple ; il ne faut aucun art ; on est plus tranquille. Dans le groupe, on vous rĂ©pondra bravement Ă  la question : Quoi de neuf ? La question reçoit tout de suite un sens particulier, et l’on vous rĂ©pond ou par un potin, ou par un bĂąillement, ou par quelque chose qui vous force vous-mĂȘme Ă  bĂąiller cyniquement, magistralement. Dans le groupe, on peut traĂźner de la façon la meilleure et la plus douce une vie utile entre le bĂąillement et le ragot, jusqu’au moment oĂč la grippe, ou bien la fiĂšvre chaude, visite votre demeure ; et vous quittez alors la vie stoĂŻquement, avec indiffĂ©rence, sans savoir comment et pourquoi tout cela Ă©tait avec vous jusqu’alors. Aujourd’hui, dans l’obscuritĂ©, au crĂ©puscule, aprĂšs une triste journĂ©e, plein d’étonnement que tout se soit arrangĂ© ainsi, il semble qu’on ait vĂ©cu, qu’on ait atteint quelque chose, et tout Ă  coup, on ne sait pas pourquoi, il faut quitter ce monde agrĂ©able et sans soucis pour Ă©migrer dans un monde meilleur. Dans certains groupes, d’ailleurs, on parle fortement de la cause. Quelques personnes instruites et bien intentionnĂ©es se rĂ©unissent. On bannit sĂ©vĂšrement tous les plaisirs innocents, comme les potins et la prĂ©fĂ©rence, et, avec un entrain incomprĂ©hensible, on parle de diffĂ©rents sujets trĂšs importants. Enfin, aprĂšs avoir bavardĂ©, parlĂ©, rĂ©solu quelques questions d’utilitĂ© gĂ©nĂ©rale, et aprĂšs avoir rĂ©ussi Ă  imposer aux uns et aux autres une opinion sur toutes choses, le groupe est saisi d’une irritation quelconque et commence Ă  s’affaiblir considĂ©rablement. Finalement, tous se fĂąchent les uns contre les autres. On se dit quelques dures vĂ©ritĂ©s. Quelques caractĂšres tranchants se font jour et tout se termine par la dislocation totale. Ensuite on se calme ; on fait provision de bon sens et, peu Ă  peu, l’on se rĂ©unit de nouveau dans le groupe dĂ©crit ci-dessus. Sans doute il est agrĂ©able de vivre ainsi. Mais Ă  la longue cela devient irritant ; cela irrite fortement.
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Fyodor Dostoevsky
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Lorsque vous subissez un revers important dans le cours d'une vie par ailleurs enviable, une panoplie d'options s'offre à vous. Vous pouvez, poussé par la honte, tenter de dissimuler les preuves de votre changement de situation. (...) Ou bien, vous pouvez vous apitoyer sur votre sort et vous retirer du monde dans lequel vous aviez eu le bonheur de vivre. (...) Ou bien, comme le comte et Anna, vous pouvez tout simplement rejoindre la confédération des perdants. A l'instar de celle des francs-maçons, la confédération des perdants est une confrérie trÚs unie dont les membres voyagent sans signe distinctif, tout en se reconnaissant dÚs le premier regard.
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Amor Towles (A Gentleman in Moscow)
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Élever un enfant s'accompagne de toute une sĂ©rie de tracas - Ă  propos de l'Ă©cole, des vĂȘtements, des bonnes maniĂšres -, mais au bout du compte, le devoir d'un parent n'a rien de bien compliquĂ©: il s'agit d'amener sans encombre l'enfant jusqu'Ă  l'Ăąge adulte afin qu'il ou elle puisse avoir une chance de vivre qui a du sens et, si Dieu le permet, dans la joie.
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Amor Towles (A Gentleman in Moscow)
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- Comment rĂ©ussiras-tu Ă  vivre bien lĂ -bas sans bien connaĂźtre le conditionnel et le subjonctif? Je ne rĂ©pondais pas. Je les trouvais moins difficiles Ă  apprendres que le savoir-faire de nos ancĂȘtres.
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Ying Chen (Les Lettres Chinoises)
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Il y a trĂšs longtemps, monsieur Sosa, bien avant vous et votre arriĂšre-arriĂšre-grand-pĂšre, un homme se tenait Ă  l'endroit ou vous ĂȘtes. Lorsqu'il levait les yeux sur cette plaine, il ne pouvait s'empĂȘcher de s'identifier Ă  elle. Il n'y avait pas de routes ni de rails, et les lentisques et les ronces ne le dĂ©rangeaient pas. Chaque riviĂšre, morte ou vivante, chaque bout d'ombre, chaque caillou lui renvoyaient l'image de son humilitĂ©. Cet homme Ă©tait confiant. Parce qu'il Ă©tait libre. Il n'avait, sur lui, qu'une flĂ»te pour rassurer ses chĂšvres et un gourdin pour dissuader les chacals. Quand il s'allongeait au pied de l'arbre que voici, il lui suffisait de fermer les yeux pour s'entendre vivre, Le bout de galette et la tranche d'oignon qu'il dĂ©gustait valaient mille festins. Il avait la chance de trouver l'aisance jusque dans la frugalitĂ©. Il vivait au rythme des saisons, convaincu que c'est dans la simplicitĂ© des choses que rĂ©sidait l'essence des quiĂ©tudes. C'est parce qu'il ne voulait de mal Ă  personne qu'il se croyait Ă  l'abri des agressions jusqu'au jour oĂč, Ă  l'horizon qu'il meublait de ses songes, il vit arriver le tourment. On lui confisqua sa flĂ»te et son gourdin, ses terres et ses troupeaux, et tout ce qui lui mettait du baume Ă  l'Ăąme. Et aujourd'hui, on veut lui faire croire qu'il Ă©tait dans les parages par hasard, et l'on s'Ă©tonne et s'insurge lorsqu'il rĂ©clame un soupçon d'Ă©gards.. Je ne suis pas d'accord avec vous, monsieur. Cette terre ne vous appartient pas. Elle est le bien de ce berger d'autrefois dont le fantĂŽme se tient juste Ă  cĂŽtĂ© de vous et que vous refusez de voir. Puisque vous ne savez pas partager, prenez vos vergers et vos ponts, vos asphaltes et vos rails, vos villes et vos jardins, et restituez le reste Ă  qui de droit.
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Yasmina Khadra (Ce que le jour doit Ă  la nuit)
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Nous savons aujourd'hui que les peuples qualifiĂ©s de "primitifs", ignorant l'agriculture et l'Ă©levage, ou ne pratiquant qu'une agriculture rudimentaire, parfois sans connaissance de la poterie et du tissage, vivant principalement de chasse et de pĂȘche, de cueillette et de ramassage des produits sauvages, ne sont pas tenaillĂ©s par la crainte de mourir de faim et l'angoisse de ne pouvoir survivre dans un milieu hostile. Leur petit effectif dĂ©mographique, leur connaissance prodigieuse des ressources naturelles leur permettent de vivre dans ce que nous hĂ©siterions sans doute Ă  nommer l'abondance. Et pourtant -des Ă©tudes minutieuses l'ont montrĂ© en Australie, en AmĂ©rique du Sud, en MĂ©lanĂ©sie et en Afrique-, de deux Ă  quatre heures de travail quotidien suffisent amplement Ă  leurs membres actifs pour assurer la subsistance de toutes les familles, y compris les enfants et les vieillards qui ne participent pas encore ou ne participent plus Ă  la production alimentaire. Quelle diffĂ©rence avec le temps que nos contemporains passent Ă  l'usine ou au bureau ! Il serait donc faux de croire ces peuples esclaves des impĂ©ratifs du milieu. Bien au contraire, ils jouissent vis-Ă -vis du milieu d'une plus grande indĂ©pendance que les cultivateurs et les Ă©leveurs. Ils disposent de plus de loisirs qui leur permettent de faire une large place Ă  l'imaginaire, d'interposer entre eux et le monde extĂ©rieur, comme des coussins amortisseurs, des croyances, des rĂȘveries, des rites, en un mot toutes ces formes d'activitĂ© que nous appellerions religieuse et artistique.
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Claude Lévi-Strauss (DISCOURS PRONONCES DANS LA SEANCE PUBLIQUE Signed 1st ed)
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Les Ă©migrants, ou, comme ils s'appelaient si bien eux-mĂȘmes, les pĂšlerins (pilgrims), appartenaient Ă  cette secte d'Angleterre Ă  laquelle l'austĂ©ritĂ© de ses principes avait fait donner le nom de puritaine. Le puritanisme n'Ă©tait pas seulement une doctrine religieuse; il se confondait encore en plusieurs points avec les thĂ©ories dĂ©mocratiques et rĂ©publicaines les plus absolues. De lĂ  lui Ă©taient venus ses plus dangereux adversaires. PersĂ©cutĂ©s par le gouvernement de la mĂšre-patrie, blessĂ©s dans la rigueur de leurs principes par la marche journaliĂšre de la sociĂ©tĂ© au sein de laquelle ils vivaient, les puritains cherchĂšrent une terre si barbare et si abandonnĂ©e du monde, qu'il fĂ»t encore permis d'y vivre Ă  sa maniĂšre et d'y prier Dieu en libertĂ©.
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Alexis de Tocqueville (De La DĂ©mocratie En AmĂ©rique (INCLUANT TOUS LES TOMES, ANNOTÉ D’UNE BIOGRAPHIE))
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La fiertĂ© fut bien, dans le passĂ© tout proche, l'une des vertus qui nous ont le plus manquĂ©, quand fort peu pourtant nous Ă©taient aussi nĂ©cessaires. Un peuple faible par le nombre, peut se passer, Ă  la rigueur, de richesse et mĂȘme d'art; il ne saurait se passer d'ĂȘtre fier. Pour vivre il faut d'abord se convaincre que la vie en vaut la peine; et notre peuple n'aura plus de raisons de perpĂ©tuer sa race quand il y aura vu la cause d'une infĂ©rioritĂ©. Pour ĂȘtre fiers, les jeunes n'ont besoin que de savoir qui ils sont. Il n'appartient pas aux fils des grands Français qui ont bĂąti ce chef-d’Ɠuvre d'histoire que fut la Nouvelle-France, de chercher ailleurs que chez eux, les raisons de leur dignitĂ©. Si cette gloire fut entachĂ©e d'une dĂ©faite, nos pĂšres ont empĂȘchĂ© que cette dĂ©faite fĂ»t irrĂ©parable; il y a mĂȘme beau temps qu'ils l'ont rachetĂ©e. Aujourd'hui, dans notre pays, oĂč notre ordre social fait l'envie des autres, nous n'avons que le dĂ©shonneur de nous mal juger nous-mĂȘmes. Nous sommes pourtant la race qui n'a jamais violĂ© le droit d'autrui. PersĂ©cutĂ©s souvent, nous n'avons jamais Ă©tĂ© persĂ©cuteurs. Le service de la civilisation par la propagande de la foi du Christ, plus que personne en AmĂ©rique, nous l'avons pratiquĂ©. Tous ces motifs de fiertĂ© suffiraient Ă  de moins inattentifs.
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Lionel Groulx (Notre maßtre le passé)
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Bien vivre, c'est se préparer à mourir sans regrets.
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Laurent Gounelle
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Il vaut mieux vivre de rĂȘves que de rĂȘver de vivre.
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M. Helist (Nightrun - L'Ombre des Couleurs)
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- Mais moi, je voyais d'abord mes amis. Ils Ă©taient mes ƓillĂšres, ou, si tu prĂ©fĂšres, ils Ă©taient les arbres qui me cachaient la forĂȘt. = Et pour toi, c'Ă©tait une bonne chose? - Oui, c'Ă©tait une excellente chose. Il faut cacher la forĂȘt. Et il faut porter des ƓillĂšres. = C'est Ă  ça que servent les amis? - Oui, je le crois. Tes amis servent Ă  te prĂ©server tes illusions le plus longtemps possible. = Mais tu finis quand mĂȘme par les perdre, tes illusions. - Bien sĂ»r, avec le temps, tu finis par les perdre. Mais il vaut mieux que c'a n'arrive pas trop tĂŽt. Sinon, tu perds aussi le courage de vivre.
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Amine Maalouf
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En haut, au cƓur de la montagne, la Couleuvre rampa et se blottit. LovĂ©e au sein d’une crevasse humide, elle regardait la mer. Le soleil brillait haut dans le ciel. Dans le ciel les sommets exhalaient leur chaleur. A leurs pieds les vagues venaient se briser... Au fond d’une gorge noyĂ©e d’obscuritĂ© et d’embruns, dans un tonnerre de pierres, un torrent se prĂ©cipitait vers la mer
 Tout en Ă©cume blanche, puissant et grisonnant, il fendait la roche et, hurlant de colĂšre, se jetait dans les flots. Soudain du ciel, dans la crevasse oĂč la Couleuvre se blottissait, tomba le Faucon, la poitrine dĂ©chirĂ©e, les plumes ensanglantĂ©es... Dans un cri bref, il s’était Ă©crasĂ©, et, plein de colĂšre impuissante, frappait de sa poitrine l’ñpretĂ© de la pierre... D'abord, la Couleuvre effrayĂ©e recula, mais bientĂŽt elle comprit que l’oiseau blessĂ© n’avait plus longtemps Ă  vivre
 Elle rampa et, fixant le Faucon droit dans les yeux, lui siffla : - Quoi, voilĂ  donc que tu meurs ? - Oui, je meurs ! lui rĂ©pondit l’oiseau dans un profond soupir. Je meurs mais j’ai vĂ©cu dans la gloire !... J'ai connu la fĂ©licitĂ© !
 J’ai combattu vaillamment !
 J'ai vu le ciel comme jamais tu ne sauras t’en approcher !... Pauvre crĂ©ature ! - Le ciel !?
 Qu'est-ce le ciel pour moi ? Un espace vide oĂč je ne puis ramper. Ici je me sens bien : il y fait si douillettement chaud et humide ! Ainsi rĂ©pondit la Couleuvre Ă  l'oiseau Ă©pris de libertĂ©, gloussant au fond d’elle-mĂȘme de devoir Ă©couter de pareilles sornettes. Ainsi pensait l’ophidien : "Qu’on vole ou bien qu’on rampe, chacun connaĂźt ici la fin : tous nous reposerons sous terre et tout finira en poussiĂšre..." Mais le Faucon tenta de se soulever, dressa la tĂȘte et porta son regard alentour. Au fond de cette gorge, dans cette obscuritĂ©, l'eau suintait entre les pierres grises, l’air Ă©tait suffocant et puait la charogne. Alors le Faucon rassemblant toutes ses forces laissa Ă©chapper un cri de douleur et de chagrin : - Oh, que ne puis-je une derniĂšre fois m’envoler et rejoindre le ciel ! LĂ , j’étreindrais mon ennemi
 contre ma poitrine et... il s’étoufferait de mon sang ! Ô, Ivresse de la bataille !... L’entendant ainsi gĂ©mir la Couleuvre se dit : "Comme il doit ĂȘtre bon de vivre dans le ciel !" Elle proposa Ă  l’oiseau Ă©pris de libertĂ© : "Va, approche-toi du gouffre et prĂ©cipite-toi dans le vide. Et qui sait ? tes ailes te porteront. Ainsi te sera-t-il donnĂ© de vivre encore un instant dans ce monde qui est le tien." Le Faucon frĂ©mit et fiĂšrement dans un cri s'approcha de l’abĂźme, s’agrippant de ses griffes, rampant sur la pierre glissante. ArrivĂ© au bord du prĂ©cipice, il dĂ©ploya ses ailes, prit une profonde inspiration ; ses yeux clignĂšrent plusieurs fois et il se jeta dans le vide. Il tomba plus vite qu’une pierre et se brisa les ailes, dĂ©valant et roulant sur les roches, y laissant ses plumes
 Le flot du ruisseau le saisit, le lava de son sang et l’inondant d’écume l’emporta vers la mer. Dans un rugissement de douleur, les vagues amĂšres battaient contre les pierres... Le corps de l’oiseau Ă  tout jamais disparut dans le vaste ocĂ©an
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Maxime Gorki (Le bourg d'Okourov)
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En haut, au cƓur de la montagne, la Couleuvre rampa et se blottit. LovĂ©e au sein d’une crevasse humide, elle regardait la mer. Le soleil brillait haut dans le ciel. Dans le ciel les sommets exhalaient leur chaleur. A leurs pieds les vagues venaient se briser... Au fond d’une gorge noyĂ©e d’obscuritĂ© et d’embruns, dans un tonnerre de pierres, un torrent se prĂ©cipitait vers la mer
 Tout en Ă©cume blanche, puissant et grisonnant, il fendait la roche et, hurlant de colĂšre, se jetait dans les flots. Soudain du ciel, dans la crevasse oĂč la Couleuvre se blottissait, tomba le Faucon, la poitrine dĂ©chirĂ©e, les plumes ensanglantĂ©es... Dans un cri bref, il s’était Ă©crasĂ©, et, plein de colĂšre impuissante, frappait de sa poitrine l’ñpretĂ© de la pierre... D'abord, la Couleuvre effrayĂ©e recula, mais bientĂŽt elle comprit que l’oiseau blessĂ© n’avait plus longtemps Ă  vivre
 Elle rampa et, fixant le Faucon droit dans les yeux, lui siffla : - Quoi, voilĂ  donc que tu meurs ? - Oui, je meurs ! lui rĂ©pondit l’oiseau dans un profond soupir. Je meurs mais j’ai vĂ©cu dans la gloire !... J'ai connu la fĂ©licitĂ© !
 J’ai combattu vaillamment !
 J'ai vu le ciel comme jamais tu ne sauras t’en approcher !... Pauvre crĂ©ature ! - Le ciel !?
 Qu'est-ce le ciel pour moi ? Un espace vide oĂč je ne puis ramper. Ici je me sens bien : il y fait si douillettement chaud et humide ! Ainsi rĂ©pondit la Couleuvre Ă  l'oiseau Ă©pris de libertĂ©, gloussant au fond d’elle-mĂȘme de devoir Ă©couter de pareilles sornettes. Ainsi pensait l’ophidien : "Qu’on vole ou bien qu’on rampe, chacun connaĂźt ici la fin : tous nous reposerons sous terre et tout finira en poussiĂšre..." Mais le Faucon tenta de se soulever, dressa la tĂȘte et porta son regard alentour. Au fond de cette gorge, dans cette obscuritĂ©, l'eau suintait entre les pierres grises, l’air Ă©tait suffocant et puait la charogne. Alors le Faucon rassemblant toutes ses forces laissa Ă©chapper un cri de douleur et de chagrin : - Oh, que ne puis-je une derniĂšre fois m’envoler et rejoindre le ciel ! LĂ , j’étreindrais mon ennemi
 contre ma poitrine et... il s’étoufferait de mon sang ! Ô, Ivresse de la bataille !... L’entendant ainsi gĂ©mir la Couleuvre se dit : "Comme il doit ĂȘtre bon de vivre dans le ciel !" Elle proposa Ă  l’oiseau Ă©pris de libertĂ© : "Va, approche-toi du gouffre et prĂ©cipite-toi dans le vide. Et qui sait ? tes ailes te porteront. Ainsi te sera-t-il donnĂ© de vivre encore un instant dans ce monde qui est le tien." Le Faucon frĂ©mit et fiĂšrement dans un cri s'approcha de l’abĂźme, s’agrippant de ses griffes, rampant sur la pierre glissante. ArrivĂ© au bord du prĂ©cipice, il dĂ©ploya ses ailes, prit une profonde inspiration ; ses yeux clignĂšrent plusieurs fois et il se jeta dans le vide. Il tomba plus vite qu’une pierre et se brisa les ailes, dĂ©valant et roulant sur les roches, y laissant ses plumes
 Le flot du ruisseau le saisit, le lava de son sang et l’inondant d’écume l’emporta vers la mer. Dans un rugissement de douleur, les vagues amĂšres battaient contre les pierres... Le corps de l’oiseau Ă  tout jamais disparut dans le vaste ocĂ©an

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Maxime Gorki
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Je soulĂšve donc de mes Ă©paules le fardeau du temps et, par la mĂȘme occasion, celui des performances que l'on exige de moi. Ma vie n'est pas quelque chose que l'on doive mesurer. Ni le saut du cabri ni le lever du soleil ne sont des performances. Une vie humaine n'est pas non plus une performance, mais quelque chose qui grandit et cherche Ă  atteindre la perfection. Et ce qui est parfait n'accomplit pas de performance : ce qui est parfait Ɠuvre en Ă©tat de repos. Il est absurde de prĂ©tendre que la mer soit faite pour porter des armadas et des dauphins. Certes, elle le fait- mais en conservant sa libertĂ©. Il est Ă©galement absurde de prĂ©tendre que l'homme soit fait pour autre chose que pour vivre. Certes, il approvisionne des machines et il Ă©crit des livres, mais il pourrait tout aussi bien faire autre chose. L'important est qu'il fasse ce qu'il fait en toute libertĂ© et en pleine conscience de ce que, comme tout autre dĂ©tail de la crĂ©ation, il est une fin en soi. Il repose en lui-mĂȘme comme une pierre sur le sable.
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Stig Dagerman (Il nostro bisogno di consolazione)
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La vie me devenait moins facile : quand le corps est triste, le coeur languit. Il me semblait que je désapprenais en partie ce que je n'avais jamais appris et que je savais pourtant si bien, je veux dire vivre.
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Albert Camus
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Être heureux, c’est apprendre Ă  choisir. Non seulement les plaisirs appropriĂ©s, mais aussi sa voie, son mĂ©tier, sa maniĂšre de vivre et d’aimer. Choisir ses loisirs, ses amis, les valeurs sur lesquelles fonder sa vie. Bien vivre, c’est apprendre Ă  ne pas rĂ©pondre Ă  toutes les sollicitations, Ă  hiĂ©rarchiser ses prioritĂ©s.
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Frédéric Lenoir (Du bonheur: un voyage philosophique (Documents) (French Edition))
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Approche donc et dĂ©couvre, petit dragonnet, Les sept ennemis que tu dois redouter. Prends garde Ă  l'Orgueil qui assombrit l'esprit Et te leurre sur la vraie taille de ton ennemi. N'envie pas aux autres dragons pouvoir, richesses et biens Car intrigues et complots seront la fin des tiens. MĂȘme percĂ© de lances, Ă©vite la ColĂšre Car elle tuera la ruse, qu'il te faudra entiĂšre. Un dragon doit dormir mais, toi, fuis la Paresse Nos assassins profitent des longues annĂ©es de sieste. 'Quel mal Ă  l'avarice ?' dira le dragon sot. Les voleurs de trĂ©sors voleront aussi sa peau. Tu connaĂźtras la faim et devras l'apaiser Mais Gourmandise rend gras, empĂȘche de dĂ©coller. Dragonne, joyaux, gloire ou or, Luxure a conduit bien des draques Ă  la mort. Apprends par cƓur ceci, mon prĂ©cieux dragonnet, Tu seras sĂ»r de vivre encore de longues annĂ©es
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E.E. Knight (Dragon Champion (Age of Fire, #1))
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Et puis, souvent encore, mon humeur valdingue, trop vite, trop fort. Je serai malade Ă  vie. Pourtant, il faut bien vivre.
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Lou Lubie (Goupil ou face)
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S’il est une leçon que doit retenir la jeunesse, c’est que la survivance d’un peuple se conquiert beaucoup moins par les beaux coups d’éclat, par les victoires d’éloquence, que par les Ɠuvres constructives. Être fort pour un peuple, c’est l’ĂȘtre d’abord par la vigueur intĂ©rieure de son Ăąme, par sa constitution sociale, Ă©conomique, intellectuelle, morale. Cela mĂȘme est la premiĂšre condition de dĂ©fense contre l’ennemi extĂ©rieur; pour ĂȘtre un bon soldat il faut ĂȘtre physiquement et moralement bien constituĂ©. La fiertĂ© fut bien, dans le passĂ© tout proche, l’une des vertus qui nous ont le plus manquĂ©, quand fort peu pourtant nous Ă©taient aussi nĂ©cessaires. Un peuple faible par le nombre, peut se passer, Ă  la rigueur, de richesse et mĂȘme d’art; il ne saurait se passer d’ĂȘtre fier. Pour vivre il faut d’abord se convaincre que la vie en vaut la peine; et notre peuple n’aura plus de raisons de perpĂ©tuer sa race quand il y aura vu la cause d’une infĂ©rioritĂ©. Pour ĂȘtre fiers, les jeunes n’ont besoin que de savoir qui ils sont. Il n’appartient pas aux fils des grands Français qui ont bĂąti ce chef-d’Ɠuvre d’histoire que fut la Nouvelle-France, de chercher ailleurs que chez eux, les raisons de leur dignitĂ©. Si cette gloire fut entachĂ©e d’une dĂ©faite, nos pĂšres ont empĂȘchĂ© que cette dĂ©faite fĂ»t irrĂ©parable; il y a mĂȘme beau temps qu’ils l’ont rachetĂ©e. Aujourd’hui, dans notre pays, oĂč notre ordre social fait l’envie des autres, nous n’avons que le dĂ©shonneur de nous mal juger nous-mĂȘmes. Nous sommes pourtant la race qui n’a jamais violĂ© le droit d’autrui. PersĂ©cutĂ©s souvent, nous n’avons jamais Ă©tĂ© persĂ©cuteurs. Le service de la civilisation par la propagande de la foi du Christ, plus que personne en AmĂ©rique, nous l’avons pratiquĂ©. Tous ces motifs de fiertĂ© suffiraient Ă  de moins inattentifs.
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Lionel Groulx (Notre maßtre le passé)
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Toutes ces pages n'ont pas toujours de date, encore moins de visage, mais elles supposent qu'un homme s'est assis devant une table, un stylo Ă  la main, qu'il a pris le temps de chercher les mots, peut-ĂȘtre de me rĂ©pondre. Nous Ă©crivions bien je trouve, et qu'importe finalement que l'Ă©lan ait durĂ© une heure, une semaine, un mois ou un an, je sens nos cƓurs serrĂ©s d'alors, l'ombre de la guerre derriĂšre nous, qui nous commande de vivre. [...] Il fallait que nous fassions des phrases amicales, amoureuses, fĂącheuses et menteuses. Il nous fallait nous Ă©crire pour raisonner et nous orienter dans ce monde. Nous allions dans les graves du drame, puis dans les aigus du bonheur. Tout est lĂ , dans une valise.
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Marceline Loridan-Ivens (L'Amour aprĂšs)